| and suddenly, everything's cold and dark || saülise #14 |
| | (#)Lun 12 Oct 2020 - 17:12 | |
| Cosimo est malade. Depuis des jours. Et il n'a rien dit à personne avant aujourd'hui.
Il est blême comme un drap quand tu passes le chercher chez lui. Il est détrempé. La fièvre le tien depuis quatre jours. Il a manqué des cours tellement il se sentait pas bien. Tu as l'impression qu'il a maigrit, mais c'est peut-être juste dans ta tête. C'est forcément ça. Tu t'imagines toujours le pire et ce n'est jamais rien. C'est sûrement rien. Cosimo te le répète sans arrêt pour chasser cet air inquiet de ton visage - et non ça ne marche pas. Tu es inquiète. Tu n'aimes pas ça quand il est malade. Tu allais vérifiée au moins trois fois par nuit dans sa chambre s'il respirait encore quand il était petit et qu'il avait simplement un petit rhume. Pas facile être le fils de Elise Williams. Pas facile.
Tu lui as envoyé au moins dix messages à Saül. Tu l'as appelé trois fois avant qu'il ne décroche enfin. Tu n'avais pas prévu de l'appeler. Tout le monde a été très rassurant ici. Ça ne semblait rien de grave. Une infection sûrement. L'influenza, peut-être qui pourrait expliquer la haute fièvre qui dure depuis des jours. Mais rien de grave. Mais ta patience, elle a des limites - des limites plutôt courte quand ça considère ton fils. Il est partie passer des examens Cosimo et il n'est jamais revenue. Ça, c'était il y a deux heures. Deux longues et interminables heures où personne ne te dit rien, où Cosimo est quelque part sans que tu ne saches exactement où. Tu es sur le point de te faire mettre dehors de l'hôpital tant tu hurles sur les pauvres infirmières qui ne savent rien. Alors, ouais, tu l'utilises la carte du mari influent. Tu la joues, la fille de riche qui croit que tout lui est dû, la capricieuse à qui on me refuse rien. C'est là où tu le contacte, Saül - que tu l'harcèle plutôt jusqu'à ce qu'il décroche. Il était en plein milieu d'une réunion importante, mais les mots Cosimo et hôpital suffisent à ce qu'il l'ajourne.
Tu tapes du pied dans la salle d'attente duquel tu connais dorénavant les quatres murs par coeur pour les avoir fixé trop longtemps. Ça et ta montre dont les aiguilles n'avancent pas assez vite à ton goût. Le temps est lent. Tellement lent. Tu as l'impression qu'une éternité s'est écoulé avant qu'il n'arrive Saül. Et la guerre entre vous deux peut faire une brèche dans le temps quand l'inquiétude se lit autant sur son visage que sur le tien. « Il est là dedans depuis des heures. » Ça devrait presque être troublant à quel point tes bras s'enroule si naturellement autour de son cou pour l'enlacer - oui, oui même pas pour l'étrangler. « Personne veut rien me dire. » C'est à cette seconde près que ta voix se brise pour la première fois. Parce que tu le sens pas. Il y a quelque chose qui cloche. Tout le monde sait que personne ne veut annoncer les mauvaises nouvelles. Fais quelque chose avant que j'tue quelqu'un. » que tu ajoutes en le relâchant. Fais aller tes contacts Saül, parce que tu ne supportera pas leur silence une seconde de plus.
@saül williams |
| | | | (#)Dim 8 Nov 2020 - 20:06 | |
| Premier taxi de la journée. Saül se rend à l'hôpital, cet endroit qu'il déteste et où il n'a pas remis les pieds depuis qu'Ariane en est sortie, vivante. « Pourriez-vous vous presser un peu ? » Il est déjà agacé, Saül, qui a laissé s'échapper une affaire le même matin, confiée à ses associés. C'est Elise qui l'a tiré de ce rendez-vous de ses appels insistants. On pourrait croire que les presque-ex-époux sont en meilleurs termes - cordiaux, dirons-nous. C'est à peine le cas, lorsque Saül ne se déplace que quand est fait mention de Damon. Cette semaine, ce n'est pas lui qui accueille son propre père à la maison, c'est au tour de quelqu'un d'autre de l'héberger. Le temps que ce dernier ne crèche chez l'aîné des Williams, Saül profite encore un peu de la sécurité de la Serre, sous laquelle il règne un climat orageux. Mais tout devrait rentrer dans l'ordre très bientôt - n'est-ce pas ?
« Il est là dedans depuis des heures. » « Et tu as eu le temps de hurler sur tout l'hôpital ? » Il la reconnaît sa voix éreintée, lorsqu'il l'enlace. Des lustres qu'ils n'ont pas été aussi proche mais le geste n'est pas trop maladroit. « Personne veut rien me dire. » « Ils ne savent peut-être pas encore. » Le voilà qui rationnalise, Saül qui voudrait ne pas céder de terrain à la panique. Les murs blancs se resserrent déjà, pourtant, laissant à l'italien l'envie de se tirer d'ici en courant. « Fais quelque chose avant que j'tue quelqu'un. » « Tu devrais t'asseoir. Je vais aller voir ce que je peux faire. » Saül déporte sa main dans le dos d'Elise, qu'il guide tranquillement vers la chaise la plus proche. Lorsqu'il est aussi vite parti qu'il est arrivé, Elise n'est déjà plus en vue.
Nul part. Il ne trouve aucune information, nul part. On ne sait pas le renseigner. Damon ne devrait pas être laissé seul, pourtant. Damon mérite qu'on l'entoure, qu'on le rassure. Il mérite que Saül lui achète son chocolat préféré et il mérite aussi qu'un infirmier vienne le dissuader d'en manger. Il mérite que sa mère le sermonne et confisque la gourmandise. Il mérite que la présence de ses parents soit faite d'autre chose que de cris et de regards noirs. Pourtant, Saül n'est en mesure d'offrir que de rentrer bredouille, lorsqu'il a déjà fait le tour de tous les endroits accessibles de l'hôpital - et même de certains endroits interdits d'où il a été viré à coups de "vous n'avez rien à faire ici, monsieur". Ses contacts ne seront d'aucune aide, pas ici alors que la mort à ses quartiers partout, au même titre que la vie. C'est à cela que se raccroche le quarantenaire, lorsqu'il vient rejoindre Elise.
« Ils n'ont pas encore de résultats. Ils cherchent. On pourra le voir dans quelques heures. » Saül se rassure lui-même. Lourdement, l'italien se laisse tomber dans une chaise inconfortable. Entre ses mains, deux cafés, dont l'un tendu à la brune qui lui fait face. « Tout ira bien. Ce n'est certainement rien du tout. » Quand il était petit, Damon avait droit à toutes les inquiétudes de sa maman. Toutes, qui méritaient de se rendre aux urgences absolument à chaque fois. Si on avait écouté les parents - et surtout Elise - Damon aurait passé le plus clair de son temps entre les murs d'un hôpital. « Tout ira bien. » qu'il répète encore, sa main libre tendue comme une invitation à la prendre, paume vers le ciel. Il y a des semaines qu'il la déteste sans discontinuer. De l'autre côté d'une des portes, Damon hallucinerait peut-être en les voyant ainsi paisiblement installés l'un à côté de l'autre. |
| | | | (#)Mar 10 Nov 2020 - 20:40 | |
| « Et tu as eu le temps de hurler sur tout l'hôpital ? » « Juste un peu »
Pas certaine que l'infirmière répondrait la même chose que toi. La présence de Saül fait du bien, malgré tout le reste. Tout le reste n'a plus d'importance de toute façon quand vient la santé de Damon en jeu. Ça fait quand même encore chaud au coeur de voir que c'est toujours son cas à lui aussi, que tu n'as presque pas insisté pour qu'il quitte le boulot pour être ici. « Ils ne savent peut-être pas encore. » « Ou ils jouent à la courte paille pour savoir qui va mourir en annonçant la mauvaise nouvelle. » Personne veut être celui qui annonce la mauvaise nouvelle. Encore moins quand la mère est hystérique. « Tu devrais t'asseoir. Je vais aller voir ce que je peux faire. » Tu hoches de la tête alors que tu te laisses diriger vers la chaise où tu as déjà trop attendu à ton goût.
En quelques secondes seulement, Saül disparaît de ton champ de vision et tu as déjà l'impression de mieux respirer. Parce qu'il va forcément trouver une réponse. Il trouve toujours Saül. Il a toujours ce qu'il veut, toujours ce que toi tu veux également - quand tu as ce que tu veux, tu le laisses tranquille, c'est à ne pas négliger quand même. Les minutes passent et l'angoisse remonte aussi rapidement qu'elle a quitté le creux de ton ventre. C'est long. C'est jamais bon signe quand c'est long. Ce sont des milliers de scénarios tous plus horribles les uns que les autres qui te passent par l'esprit. Dans aucun d'eux ça se termine bien pour Damon. Ton visage est couvert d'inquiétude quand Saül revient, lui, avec un visage impassible. « Ils n'ont pas encore de résultats. Ils cherchent. On pourra le voir dans quelques heures. » « Quelques heures ?? » Non. Cette réponse ne te plaît pas. Qu'est-ce qui peut prendre quelques heures ? Rien. Rien ne peut prendre quelques heures. Tu as juste envie de mettre le feu à l'hôpital. Juste ça.
Saül vient s'installer en face de toi. Il te tend un café que tu viens prendre d'entre ses mains. Un café de cafétéria d'hôpital pour attendre quelques heures. Vous auriez dû aller dans une clinique privée là où la nourriture et le café ont un minimum de qualité. « Tout ira bien. Ce n'est certainement rien du tout. » Ton regard se perd sur le café entre tes mains. Il essaie d'être rassurant, mais ça ne fonctionne pas du tout. Il n'y a rien d'autre que les mots des médecins qui arriveront à te rassurer. Et encore là... « Tout ira bien. » Ton regard se relève finalement vers lui alors qu'il tend sa main vers toi. C'est quand la dernière fois qu'un ton aussi doux a été utilisé entre vous deux ? Tu ne saurais même plus dire tant la haine vous a autant habité l'un comme l'autre. « Tu restes ? » que tu lui demandes en prenant finalement cette main qu'il te tend. Il pourrait facilement retourner au boulot, attendre que tu lui donnes des nouvelles de la suite. Ça ne sert à rien d'être deux à attendre quelques heures.
Dans les jours suivants, vous deviez aller prendre ce fameux verre, avoir cette fameuse discussion qui ne servirait probablement à rien. Peu importe ce qu'il voulait négocier pour le divorce, tu savais déjà que tu allais refuser. Il perd son temps. Mais tant qu'à être là tous les deux, aussi bien régler le dossier et ne pas se revoir dans les prochains jours comme prévu. Ce sera donc un café dégueulasse au lieu d'un verre. Ça pourrait être pire. « De quoi tu voulais me parler ? » Parler de ça, ça permet aussi de ne pas penser à Damon en train d'agoniser dans un lieu inconnu de l'hôpital. Il y a au moins ça de bon. |
| | | | (#)Jeu 1 Juil 2021 - 7:22 | |
| « Quelques heures ?? » Oui, quelques heures. Ils patienteront encore dans la pire des attentes, à regarder défiler les heures et puis les minutes et puis les secondes. Ils s'endormiront peut-être l'un contre l'autre, aussi. C'est fou ce que les murs des hôpitaux peuvent faire, comme magie. Elise est sur le point d'exploser mais Saül sait parfaitement contenir les tempêtes - même maintenant qu'ils sont sur le point de se séparer pour de bon. Doucement, il vient s'asseoir près d'elle. Plus doucement encore, elle prend cette main qu'il tend vers elle. Saül passe son pouce sur le dos de la main de celle qui est encore légalement sa femme. C'est un geste de tendresse qui n'existe plus, qui n'a jamais existé que dans les moments les plus difficiles. Parfois, Saül s'est surpris à se demander s'il pourrait un jour l'aimer pour de vrai. Aujourd'hui, il sait que la réponse est oui; mais pas comme il le faudrait. « Tu restes ? » Sans hésiter, l'homme d'affaires opine du chef. Oui, il reste. Pour Cosimo, il reste. Pour leur petit garçon seul au fond d'un lit et entouré de murs blancs, il reste. Pour Elise qui n'a personne sinon leur garçon tout seul, derrière une porte, il reste.
« De quoi tu voulais me parler ? » « Rien de très important. » C'est autant vrai que faux. Parler des termes du divorces alors que Cosimo est tout seul quelque part dans cet hôpital semble stupide, soudain. Ce n'est pas le verre auquel Saül pensait. Ce mauvais café ne fait que renforcer l'amertume ressentie par l'italien. Sans plaisir, il en avale une autre gorgée. Ses yeux reviennent se poser dans ceux d'Elise, dont il n'a pas lâché la main libre. « Rien ne presse. » Tout le presse, en vérité. Être avec Ariane pour de vrai, ça presse. Surtout depuis que l'orage gronde, surtout depuis qu'elle est partie. Elle ne voudra peut-être plus le voir, pas après ce qu'il s'apprête à demander à Elise. Mais elle n'est pas obligée de avoir, si ? « Mais je... Mon père doit venir à la maison. Il ne sait pas, pour le divorce. » Et ses yeux disent à Elise combien Elon ne doit rien apprendre. Cela le tuerait, lui qui n'a déjà plus toute sa tête. « Tu voudrais bien le voir ? Avec moi. Il ne remarquera rien. Ariane n'en saura rien non plus. » C'est pour le bien de tout le monde, mais surtout pour le bien de Saül - toujours pour son bien à lui. Ses doigts se serrent doucement sur ceux d'Elise. Personne n'est obligé de savoir. Un dernier secret à partager à deux, avant de tirer leur révérence pour de bon. |
| | | | (#)Sam 3 Juil 2021 - 16:04 | |
| Il reste. Tu souris doucement malgré la lourdeur de la situation. Cosimo restera bien la seule personne à réussir à vous faire asseoir l'un à côté de l'autre, main dans la main, sans qu'aucune insulte ne soit lancée d'un côté comme de l'autre. Les insultes, tu les gardes pour le professionnel hospitalier incompétent. Une clinique privée aurait été cent fois mieux. Quand on met le prix, on a tout ce qu'on veut. Ici ? Personne n'en a visiblement rien à chier de votre argent. Votre fils est un patient comme un autre. Qu'il crève tous.
Tant qu'à être pris l'un avec l'autre pour un temps indéterminé, aussi bien s'éviter ce fameux verre et régler ça immédiatement. « Rien de très important. Rien ne presse. » Comprendre ici; oui c'est important, oui, ça presse, mais ce n'est ni le moment, ni l'endroit pour régler ça. Il n'a pas tout-à-fait tort. Tu acquiesces légèrement. C'est mieux comme ça. Tu es trop préoccupé pour pouvoir mener la danse. Il gagnerait à coup sûr. Le combat sera pour un autre jour - oh oui, aucun de vous deux ne s'en sauvera. « Mais je... Mon père doit venir à la maison. » À la maison, il dit ça comme s'il parlait de la vôtre, comme si vous étiez encore une famille. Ton regard se tourne vers lui. Ta main se serre dans la sienne, sans savoir si c'est par soutien ou si c'est l'angoisse de la suite de ses paroles. « Il ne sait pas, pour le divorce. » En quoi c'est ton problème ? Tu t'es humilié à le dire au tien, qu'il fasse de même avec le sien. Avec de la chance, ça le fera mourir avant son temps. « Tu voudrais bien le voir ? Avec moi. Il ne remarquera rien. Ariane n'en saura rien non plus. » Tu souffles doucement en retirant ta main de la sienne. Il ne peut pas te demander ça. Et puis, qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire ? Faire semblant quand tout le monde sait que c'est faux, c'est pas pareil. C'en est presque humiliant en fait. « Ça peut être long Saül quelques semaines. » Les médecins ont beau prédire à Elon que quelques semaines à vivre, il n'est pas rare de voir les mourants surpassés leur deadline. Il va faire quoi Saül si son père vit encore une année entière ? Il ne peut pas vivre une double vie aussi longtemps. Pas avec son enfant à naître. Et puis, tout le monde sait qu'un vieux grincheux comme le Williams va faire chier bien plus longtemps que prévu. « Réfléchis bien à ce que tu me demandes. Tu as beaucoup à perdre. » Tu lui donnes vraiment des conseils pour ne pas détruire sa nouvelle vie ? Tu devrais sûrement pas. Tu devrais même l'aider a tout gâcher pour qu'il te supplie de le reprendre. Pas besoin de bien connaître Ariane pour savoir qu'elle exploserait de colère de l'apprendre. Le fait qu'il veuille lui cacher confirme tes doutes. Toi, tu n'as rien à perdre. Tu as tout à y gagner même. Mais lui ?
Un médecin arrive. Ton coeur se serre. Tu te redresses sur ta chaise. Il est mort au moins dix fois dans ta tête quand c'est le nom d'une autre famille en pleure qu'il nomme. « Comment peuvent-ils oser nous faire attendre aussi longtemps ? » que tu rages dans un semi-murmure en te laissant retomber sur ta chaise. Le nom Williams devrait suffire à les presser. |
| | | | (#)Sam 3 Juil 2021 - 18:05 | |
| « Ça peut être long Saül quelques semaines. » Jamais aussi long que ce que peut coûter le courroux de Elon Williams. Jamais aussi long que la culpabilité et que les répercutions qu'auront les découvertes d'Elon. Quelques semaines, c'est ce que Saül est prêt à sacrifier pour que le reste de sa vie se fasse en paix, loin de ce démon. Plus tôt il sera mort, mieux ça sera. Mais en attendant, Saül doit maintenir les apparences. Elon n'acceptera jamais un divorce. S'il vit, il n'acceptera pas que la réputation de sa famille soit ainsi ternie. Rien ne le contrarierai plus qu'un fils qui fuit son mariage et rien ne contrariera plus Saül que d'entendre de la bouche de son père qu'il l'a déçu. Non, cela ne peut arriver, pas maintenant. S'il faut sacrifier quelques semaines, quelques mois, c'est un mal pour un bien. Après des années de sacrifice, Saül est capable d'en endurer d'avantage encore. Et puis, qui de mieux qu'Elise pour garder intact les mensonges qu'ils ont façonnés à deux ? Qui de mieux que l'éternelle partenaire de théâtre, celle qui sait se montrer sur scène mieux que personne ? A l'évidence, Saül ne sait pas encore faire sans elle.
Elle a lâché les mains de l'italien pourtant. Saül redoute ce que cela signifie. « Réfléchis bien à ce que tu me demandes. Tu as beaucoup à perdre. » « C'est déjà réfléchi, Elise. Tu sais que j'y ai déjà réfléchi. » Il a récupéré ses mains entre temps, les yeux ancrés à ceux d'Elise. « Je ne te le demanderais pas si ce n'était pas déjà mûrement réfléchi. » Elle le connaît assez pour savoir qu'il ne fait rien sur un coup de tête, mis à part ce qui concerne les jeux d'argent. Saül a toujours été un joueur, dans une certaine mesure. Mais avec le paternel, il ne joue pas. Avec ce que Elon pourrait lui enlever - un héritage, en somme - Saül ne joue pas. Il a besoin de cet argent, l'homme d'affaires qui sombre petit à petit. Saül sait qu'il a beaucoup à y perdre, mais il a plus encore à y gagner.
On appelle une famille et ça n'est pas la leur. Le médecin a l'air débordé. « Comment peuvent-ils oser nous faire attendre aussi longtemps ? » Devant l'affliction d'Elise, Saül se lève. Il appuie une main tendre sur l'épaule de son ex-femme avant d'aller se présenter au médecin, sur le point de quitter la salle. Non, ils n'auront pas de nouvelles de leur fils tout de suite. Oui, ils doivent encore patienter, au cas où sa maladie se montrait contagieuse. Sur ces mots, Saül opine du chef et retrouve Elise. « Nous allons patienter quelques heures encore. Après, tu pourras rentrer te reposer. Je te donnerai des nouvelles. » Il sait qu'elle ne partira pas. Il sait qu'elle restera au chevet de son précieux petit garçon. Doucement, alors que leurs mains ne sont plus liées, Saül la prend dans ses bras. C'est un geste rare, qui est pourtant plein d'une certaine mesure de sincérité. Lui non plus, n'a pas envie de perdre son fils aîné. Son bras reste autour des épaules d'Elise. « Pense à la proposition que je t'ai faite. Je suis prêt à sacrifier beaucoup, pour un peu de ton temps. Tu peux demander ce que tu veux. » La loyauté s'achète, mais pas avec tout l'or du monde. La loyauté s'achète avec autre chose et Saül en paiera le prix. |
| | | | (#)Sam 3 Juil 2021 - 20:19 | |
| « C'est déjà réfléchi, Elise. Tu sais que j'y ai déjà réfléchi. » Pas assez longtemps visiblement. Son père finira par mourir, c'est vrai. Mais sa mère, elle ? Elle sera tout aussi désappointée que son père par rapport au divorce. Elle sera aussi déçue de lui. Il faut croire que l'opinion de sa mère, il n'en a rien à faire. « Je ne te le demanderais pas si ce n'était pas déjà mûrement réfléchi. » Le regard de Saül s'ancre dans le tien, mais tu détournes la tête en la secouant doucement. Tes yeux fixent le sol quelques minutes. Oui ? Non ? Tu vas y penser ? Tu étais à deux doigts de répondre quand une blouse blanche attire ton attention. Ta patience s'effrite. Saül le remarque. C'est sûrement juste pour gagner quelques points en sa faveur pour sa demande qu'il se relève une deuxième fois pour tenter d'avoir des nouvelles de Cosimo. Qu'importe la raison, tant qu'il le fasse. A force de les harceler, ils vont bien finir par ouvrir la bouche. « Nous allons patienter quelques heures encore. Après, tu pourras rentrer te reposer. Je te donnerai des nouvelles. » Et, non, pas encore. Il revient bredouille. « Je ne bouge pas d'ici. » que tu lui réponds un peu trop sèchement. Tu ne comptes certainement pas partir d'ici. Pas sans avoir pris ton fils dans tes bras au moins une fois. Pas sans être certaine qu'il ne soit pas en train de pousser son dernier souffle quelque part - parce qu'il est clairement mourrant ça va de soi. Chaque mouvement de ton corps trahit l'inquiétude qui te ronge de l'intérieur. Tu tapes du pied, regarde partout et nul part à la fois, n'arrive plus à trouver une position confortable sur cette chaise trop dure. Tu prend une nouvelle gorgé du café, le jette parce qu'il est rendu froid en plus d'être dégueulasse. L'accolade de Saül réussi à te calmer légèrement les nerfs. Quand il glisse son bras autour de tes épaules, tu laisses tomber ta tête contre son épaule.
« Pense à la proposition que je t'ai faite. Je suis prêt à sacrifier beaucoup, pour un peu de ton temps. Tu peux demander ce que tu veux. » Tu n'as même pas besoin d'y réfléchir à deux fois. Tu sais déjà ce que tu veux. « Quitte Ariane. Rentre à la maison. » Ton regard se plante dans le sien. Il a dit demande ce que tu veux. Il le regrette sûrement déjà. C'est ce que tu veux. Cette horrible vie, tu la veux à nouveau. Tu veux ta famille. Tu veux la sécurité qui vient avec le fait d'être l'épouse de Saül Williams. Tu veux que lorsque vous entrez dans une salle, tout le monde jalouse votre vie parfaite. Tu veux les bijoux et les jolies robes. Tu t'en contrefou même si ça doit venir avec le bâtard que Ariane porte. Elle ne doit pas être difficile à pousser en dehors du décor. Ce ne sera pas le premier bébé volé. Enfin, volé, c'est quand même son père. Sauf si c'est une menteuse. Ce qui ne serait pas si surprenant. « Je ne veux pas divorcer. » Tu es pathétique. Voilà ce que tu es.
Saül n'a pas besoin de rien dire. Sa réponse, tu la connais déjà. Il ne quittera jamais sa maîtresse, l'imbécile amoureux. « Oublie ça. » que tu ajoutes d'un signe de main avant qu'il ne dise non. C'est déjà moins humiliant s'il ne dit rien même si, au final, le résultat est le même. Lui et toi, divorcé. Mais aussi lui qui se débrouille tout seul pour gérer beau-papa. |
| | | | (#)Ven 23 Juil 2021 - 6:50 | |
| « Je ne bouge pas d'ici. » Cela, Saül s'y attendait. Elise n'est pas mère à abandonner son enfant. Et même s'ils n'ont pas le même sang, elle et Cosimo sont bien plus proches que ne l'ont jamais été le garçon et son père. Les maxillaires serrées, Saül opine du chef. Pour une fois, la présence de son ex-femme ne lui est pas insupportable. Elle est même rassurante, au fond. Et cela, Saül ne s'attendait pas à le vivre un jour. Depuis qu'il y a de l'orage dans l'air entre lui et Ariane, l'homme d'affaires a baissé sa garde. Il n'en perd pas pour autant son sens des affaires.
S'il y a bien une personne que Saül ne peut pas décevoir, c'est son propre père. Il en va de l'héritage qu'il pourrait bien toucher comme de sa réputation. Il en va du regard que le paternel posera sur son fils aîné. Les temps troublés dans lesquels évolue l'italien ne lui permettent pas de projeter une quelconque rencontre entre Ariane et ses parents. Qui de mieux qu'Elise pour gérer la crise, alors ? Elle a toujours su si bien faire. Entre ses bras, elle paraît pourtant plus vulnérable que jamais. « Quitte Ariane. Rentre à la maison. » Un léger soupir creuse le torse de Saül, qui fixe son regard ailleurs dans la salle. Non, il ne compte pas quitter Ariane. Elle le quittera sans doute bien avant cela. Ce qu'Elise appelle la maison, il y a bien longtemps que Saül n'y vit plus. Il est plutôt habitué à l'horrible raideur du canapé de son bureau, chez Michael Hill. « Je ne veux pas divorcer. » « Elise... » qu'il chuchote, pourtant certain d'avoir déjà gagné.
Car après tout, Ariane n'est pas obligée de savoir. Avant que cela ne ruine les derniers espoirs de sauver leur couple, tout sera réglé. Elon sera mort. Saül, alors, quittera Elise pour retourner pleinement auprès de la mère de son enfant. Dans la tête de l'homme d'affaires, tout est déjà affreusement clair. Et dire qu'il aura fallu que Cosimo soit entre les murs d'un hôpital pour que tout s'arrange... « Oublie ça. » « Monsieur et Madame Williams ? » Saül attrape la main d'Elise en se levant, alors que le médecin leur demande de le suivre.
Cosimo est dans une chambre blanche. Ainsi endormi, il a l'air plutôt paisible. Là, le médecin explique à Elise et Saül que leur fils n'a rien de grave. Une infection effrayante, mais qui se soignera en une petite semaine passée entre les murs de l'hôpital. Quand le médecin s'éclipse, Saül s'approche du lit du jeune homme. Sa main est restée dans celle d'Elise. Son bras passe alors autour des épaules de son ex-femme. « Tu te souviens quand il a attrapé un rhume et que nous l'avons emmené à l'hôpital ? » Quand il était petit, Cosimo était un enfant constamment malade. Un vrai sujet d'inquiète pour ses parents - et surtout pour sa mère. « Je vais m'arranger, pour Ariane. » Elise aura besoin d'entendre des mots que Saül ne comptait jamais prononcer. Mais ce qu'Ariane ignore ne peut pas lui faire de mal, pas vrai ? « Nous ne sommes pas obligés de divorcer tout de suite. » Et dans la main de Saül, les doigts d'Elise ont repris leur juste place. |
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