| | | (#)Sam 17 Oct - 19:05 | |
| La vie est belle en dehors de Brisbane. Ils ne sont pas à des milliers de kilomètres non plus - pas même des centaines, en fait - mais pour une Charlie qui n’est pas sortie de la ville depuis plus d’un an, cela ressemble au bout du monde. Ses cheveux volent dans tous les sens et elle se dit que Victor en sera fou, puisqu’ils n’apparaîtront pas parfaitement lisses et brillants sur les photos qu’il prévoit de faire cet après midi. Est ce que c’est une raison suffisante pour remonter la vitre et arrêter de ressembler à une adolescente rebelle ? Non, bien sûr que non, bien au contraire.
La séance de photographie n’était pas supposée se conjuguer au pluriel - et, si vous en faites appel à ses souvenirs, elle ne se souvient même plus comment ils en sont venus à faire la moindre photo. “Si moi je suis ta muse alors toi, on t’appelle comment ?” Okay, il n’a jamais dit qu’elle était sa muse, à vrai dire. Quand bien même, cela semble couler de source et, surtout, elle ne lui laisse pas le temps de la contredire parce que l'appellation comble les insécurités qui avaient eu tendance à réapparaître lors de ces derniers mois. “Je propose “le photographe au passé flou qui profite d’une pauvre jeune femme”, t’en dis quoi ?” Qu’elle joue et qu’elle s’amuse, Charlie, un immense sourire sur le bout des lèvres et désormais toute sa silhouette retournée vers Victor, sur le siège avant de la voiture. C’est loin d’être ce qu’elle pense de lui mais elle s’amuse bien trop à dresser un portrait fictif de la situation pour s’arrêter en si bon chemin.
Elle se garde bien, aussi, de préciser qu’elle a pris la mauvaise habitude de n’être amie qu’avec des personnes plus proches de son âge à lui plutôt que du sien à elle. “On peut laisser les tabloïds titrer ça eux même sinon, ils auront des titres plus accrocheurs à te donner.” Qui dit tabloïds dit célébrité, et ce serait bien loin de déranger la jeune femme d’aucune manière que ce soit. Sans doute devrait-elle attendre qu’il recouvre sa gloire d’antan pour s’afficher avec lui, non ? Ainsi ils feraient la première de couverture et non pas seulement une simple page à l’intérieur du livre. Ce sont des choses auxquelles elle pense sérieusement, à défaut de justement penser à quoi que ce soit d’autre puisque ses doigts ont déjà joué avec tous les boutons et autres objets de l’habitacle du véhicule. Le seul surnom qui ne lui plairait sans doute pas reste celui de son ex fiancée, laquelle se porte sans doute très bien, très loin d’elle. Elle n’est qu’un simple détail au milieu de sa vie qui (re)prend forme et lui plaît de plus en plus, entre sa liberté chez elle et ses moments avec Victor, son travail au poste de police et l’entraînement allant avec. Seuls ses enfants lui manquent mais elle se garde bien de parler d’eux à toute personne externe à la situation, désireuse de ne pas prouver que sa vie n’est pas parfaite. “Pourquoi tu ne veux pas faire les photos chez toi ? Y’a un cadavre sous ton lit ?” Bien qu’elle ajoute une blague pour aller de pair avec sa blague, Charlie est cette fois-ci on ne peut plus sérieuse et c’est une mine plus fermé qu’elle laisse se retourner une dernière fois vers l’homme aux mille facettes. |
| | | | (#)Sam 7 Nov - 7:59 | |
| « Si moi je suis ta muse alors toi, on t’appelle comment ? » « Qui t'a donné ce titre ? » Certainement pas la presse, qui a délaissé Victor depuis un petit moment déjà. La dénomination le fait rire pourtant, lui qui ne lâche pas la route des yeux. Ils passeront dix minutes à s'énerver sur les cheveux de Charlie, une fois arrivés. Elle n'écoute jamais ses recommandations - lorsqu'il en formule - pas plus qu'elle ne comprend combien il est compliqué, pour Victor, de perdre du temps sur des détails qui pourraient être réglés en amont si elle fermait la fenêtre de la voiture. Passer du temps avec Charlie pourtant, ce n'est jamais une perte de temps, de quelque manière que ce soit. Le photographe se surprend à apprécier sa compagnie, bien qu'elle mette parfois à rude épreuve sa légendaire patience - et Dieu seul sait que Victor est patient.
Aujourd'hui, c'est à l'extérieur de la ville qu'il l'amène, un air de Fleetwood Mac dans le poste radio. La vie est tranquille, lorsque les journées se rallongent et qu'il est temps de profiter des rayons de soleil supplémentaires. Le photographe n'a pas beaucoup de contrats, en ce moment. A Charlie, il dira qu'il n'a fait que caler leur entrevue entre deux séances très importantes. La réalité est tout autre, lorsque Victor se contente surtout de traîner chez Chloe au milieu de leurs souvenirs communs, entre deux cigarettes - et entre deux coups de tonnerre. « Je propose “le photographe au passé flou qui profite d’une pauvre jeune femme”, t’en dis quoi ? » « Moi j'ai un passé flou ? Tu n'as pas bien lu les magazines, ils me décrivent comme le prochain dieu du cinéma. On s’en fiche du passé. » Décrivaient en fait, mais Victor se garde bien de le rappeler. La gloire du dernier succès commence à dater, lui qui n'a rien produit depuis de trop longs mois. Rien ne vient à son esprit, lorsqu'on lui parle de cinéma - et rien n'a jamais été aussi terrifiant. « T'as carrément pas de passé toi, t'es étudiante. » Ils n'en ont jamais vraiment trop discuté, mais la pique méritait d'être lancée dans le vent, sur le ton serein que l'on connaît à l'artiste. « On peut laisser les tabloïds titrer ça eux même sinon, ils auront des titres plus accrocheurs à te donner. » Oh qu'elles datent, les dernières couverture de Gala en France, les derniers titres, les dernières sorties en costume. Ce n'est pas ce qui manque à l'australien, qui regrette plutôt l'ivresse des fins de tournage et les ambitieuses productions, les jours et les nuits de tournage... La vie d'avant.
Les bâtiments se font plus rares, alors que Fleetwood Mac entonne Dreams. On se croirait dans le plus parfait des clichés de cinéma, Charlie cheveux aux vents. S'il avait quelqu'un pour conduire à sa place, Victor la photographierait sans hésitation, libre. Elle est belle, Charlie, avec les notes d'audace et d'affranchissement qu'elle porte partout dans les yeux en ce moment même. « Pourquoi tu ne veux pas faire les photos chez toi ? Y’a un cadavre sous ton lit ? » Victor se bat avec un paquet de cigarettes, les doigts faiblement accrochés au volant. « Pourquoi tu veux venir chez moi ? » Les réponses par des questions, ça connaît le photographe, qui se bat maintenant avec son briquet. Il ne lui en propose pas, l'égoïste, mais si on lui demande pourquoi il répondra certainement que c'est parce qu'il ne veut pas qu'elle ternisse son teint de porcelaine. « Je préfère les photos en extérieur. C’est meilleur pour la lumière. » Et c’est surtout mieux parce que Victor n’a pas de chez lui. Chez Chloe, c’est très bien. Mais c’est chez Chloe. « On ira chez toi la prochaine fois, puisque t’as l’air d’avoir tellement envie d’être en intérieur. » A son tour d’ouvrir la fenêtre pour y recracher la fumée. « T’aimerais pas chez moi, de toute façon. Chez toi ça sera bien, merci d’avoir proposé. » Un regard et un seul, pour marquer le côté seulement à moitié sérieux de la chose. A moitié seulement, quand il crève d’envie de s’y essayer. |
| | | | (#)Sam 7 Nov - 22:13 | |
| « Qui t'a donné ce titre ? » “Moi même, je suis une grande fille.” La blonde répond sur le même ton comme si tout allait de soi, jouant à faire des vagues avec sa main, à l’extérieur de la fenêtre. La vie est belle, comme ça. Elle se rapproche d’un monde qui n’est pas le sien, se fait prendre en photo comme si elle était célèbre, se rend à des événements de charité avec Nicky comme si ils étaient connus. Tout n’est qu’un immense mensonge mais ça lui plaît, pour le moment encore. C’est amusant. Peut être qu’elle aurait dû être actrice, finalement.
« Moi j'ai un passé flou ? Tu n'as pas bien lu les magazines, ils me décrivent comme le prochain dieu du cinéma. On s’en fiche du passé. » “Va dire ça à Spacey.” Personne ne s’en moque du passé des autres ; il vous suit toute votre vie, que vous le vouliez ou non. Ce n’est ni une bonne chose ni une mauvaise, pour lui. Quand bien même il serait dépeint avec de sordides histoires, elle serait tout de même montée dans sa voiture pour aller on ne sait où. Encore une fois, c’est parce que c’est amusant. Elle rêve d’une vie d’aventure et il la lui offre, même si parfois cela se résume surtout à jouer avec le feu et se brûler. Ce n’est pas le plus important, elle en a l’habitude et elle est certaine que lui aussi, grâce à son passé flou et son avenir qui ne peut être que brillant. Un jour, elle franchira les marches des tapis rouges à ses côtés et ils iront de cérémonies en cérémonies. Il n’a plus de femme de toute façon, non ? Tout le monde sait qu’elle a l’avantage, maintenant.
« T'as carrément pas de passé toi, t'es étudiante. » “Et si je mens de quelques années on peut officiellement te qualifier de pédophile, alors fais pas le malin.” Ca par contre, ça ne l’amuserait pas. Sa mine impassible ne le démontre pas mais imaginer Victor derrière les barreaux ne lui procure aucune sorte de joie ni même d’excitation : comment est ce qu’il la prendrait en photo sinon ? Non, ce n’est absolument pas dans ses projets que de le rouler dans la farine - pas comme ça, en tout cas -, elle préfère profiter de chaque instant à ses côtés et continuer de jouer au jeu de celui qui aura le dernier mot. Bien sûr, la partie ne s’arrête que lorsqu’elle la gagne ; c’est inscrit dans les règles.
« Pourquoi tu veux venir chez moi ? » “Pour voir le cadavre sous ton lit.” Elle a envie de voir à quoi ressemble réellement une maison de personne riche et célèbre. Elle posera ses doigts sur des vases Ming hors de prix qu’elle aurait simplement utilisé comme pot à parapluie si elle n’avait pas été informé de leur âge, elle glissera ses orteils entre les pans de tapis de fourrures d’animaux en voie de disparition, elle s’étalera de tout son long sur d’immenses lits trônant au centre d’immenses chambres. Elle imagine qu’il habite dans un endroit semblable au Manoir Playboy, pas moins, et loin d’en vouloir à son argent, Charlie est simplement poussée par la curiosité. Les photos pourraient être belles, là bas. Là bas, elle pourrait marquer son territoire pour faire oublier son ex femme, aussi. Du coin de l’oeil, elle l’observe se battre avec les cigarettes puis le briquet, bien décidée à ne surtout pas l’aider. « Je préfère les photos en extérieur. C’est meilleur pour la lumière. » A cela elle n’a rien à répondre. Finalement, c’est lui le seul artiste du duo. Elle repose son menton contre le dessus de la portière, ses yeux posés sur les étendues planes face à eux. Ils auront une belle lumière aujourd’hui, c’est vrai.
« On ira chez toi la prochaine fois, puisque t’as l’air d’avoir tellement envie d’être en intérieur. » “On arrive dans combien de temps ?” « T’aimerais pas chez moi, de toute façon. Chez toi ça sera bien, merci d’avoir proposé. » “J’ai faim.”
Oh, oui, elle l’a bien entendu refuser qu’ils aillent chez lui pour ensuite proposer (exiger) qu’ils se rendent chez elle. Simplement ce n’est pas ce dont elle a envie de parler pour le moment alors elle joue à l’enfant impatiente incapable de contrôler sa faim ni même sa soif. Victor conduit de toute façon, il ne devrait pas fumer alors elle lui dérobe la tige des mains, manquant sans doute de peu de leur faire avoir un accident alors qu’elle se penche vers lui et lui cache la moitié de la route. “Tu viens chez moi ce soir ? Les lumières du coucher de soleil sont belles, de là bas.” Et lui aussi il serait beau sous ces lumières, quand elle lui aura fait comprendre au bout de quelques secondes qu’elle en a déjà marre de se faire photographier telle une poupée et qu’elle souhaite simplement passer du temps en sa compagnie. Pour le moment, elle s’en tient encore à l’argument de la lumière puisqu’il n’y a apparemment que ça qui l’intéresse. La fumée sort désormais de son côté de la voiture depuis qu’elle lui a dérobé sa cigarette, allumée avec peine. |
| | | | (#)Sam 19 Déc - 10:11 | |
| « Et si je mens de quelques années on peut officiellement te qualifier de pédophile, alors fais pas le malin. » Voilà qu'il la dévisage, les yeux plus dégoûtés qu'outrés. « T'oseras jamais. » Non, pas vrai ? On ne l'a jamais accusé de trucs de la sorte, justement parce que Victor n'a pas fréquenté grand monde pendant la courte période qu'a été le sommet de sa gloire. Un instant flamboyant, pas assez important pour attirer assez de jolies filles jusqu'à lui. Et puis, il y avait Chloe, pour le temps que ça a duré. Après elle, Ivy. Ils n'étaient que des amants, rien d'officiel. Non, personne ne peut l'accuser parce qu'il n'y a eu personne pour prétendre au titre. D'autres sont tombés, bien sûr. De grands producteurs, des réalisateurs avec eux, qui n'avaient pourtant rien d'officiel en cours non plus. Tant mieux. Ils peuvent tous pourrir là où ils le méritent - et là où personne ne se souviendra d'eux. « En plus j'ai de bons avocats. » "Avait". C'était une seule avocate, en plus de ça. Même pas payée pour longtemps, qu'il n'a vue que quelques fois. Victor n'a jamais eu assez d'argent pour en faire une fidèle alliée. Ces gens là s'achètent presque aussi facilement que des prostituées. Oops.
Pourquoi elle veut venir chez lui ? Il n'a rien à voir là-bas, certainement pas de quoi prendre des photos correctes. Il y a, tout au plus, les fantômes du passé et des affaires qui ne lui appartiennent pas. Il y a aussi le risque de croiser ce petit idiot de Jet, le comble de l'humiliation. Elle fait ce qu'elle veut, Chloe. Victor ne cesse de se le répéter. Pour autant, sa légendaire patience est mise à l'épreuve, auprès de cet artiste qui n'en a que le nom. « Pour voir le cadavre sous ton lit. » Ha. Oui. Ca fait sens. La route se fait longue, même en la présence de Charlie. Autant qu'il aime sa présence, elle n'efface pas pour autant l'impatience du trentenaire - celle qui le pousse à capturer ses modèles sous les rayons du soleil. On arrive dans combien de temps ? J'ai faim. et blablabla. « T'as douze ans ? On va vraiment m'accuser de trucs que j'ai pas fait. » Et ils la croiront tous. Sauf si elle continue de lui voler ses cigarettes, peut-être. « Tu viens chez moi ce soir ? Les lumières du coucher de soleil sont belles, de là bas. » « Les lumières du coucher du soleil. » qu'il répète, sourire aux lèvres. Il n'y a pas que les rayons, qui sont splendides. Victor risque un regard entendu dans la direction de la jeune femme, avant de lui reprendre la cigarette des lèvres. « J'ai du travail. » Des gens à éviter, des pièces à revoir, des photos à trier, un scénario à lire. Beaucoup trop de travail qu'il remettra à demain, donc. « Tu fais à manger et c'est d'accord. »
C'est un champ de tournesols qu'il a choisi pour cette fois-ci. Ils ont déjà fait quelques photos lorsque le temps commence à se gâter, écrasant des rayons dorés sur la peau nue des épaules de Charlie. « Pourquoi t'as pas fait mannequin ? » Elle en a l'étoffe. Et elle l'aura pour longtemps, avec son visage parfait et anguleux, ses yeux perçants et ses cheveux mordus par le soleil. « Je parle pas de faire du mannequinats avec les connards sur les podiums. » Entre les pages des magazines, pour de la photo, de la vraie. Pas avec lui, elle mérite mieux qu'un cinéaste raté qui se rabat sur ses projets de sortie d'école pour arrondir les fins de mois. « T'iras pas chez moi, parce que j'ai pas vraiment de chez moi. » Il a remis l'appareil devant son œil gauche, concentré sur la tâche. Un grand coup de vent balaie le champ de fleurs. Il sera bientôt temps de rentrer. |
| | | | (#)Lun 21 Déc - 4:45 | |
| « T'oseras jamais. » “C’est un défi ?”
Non, elle ne le fera jamais. Pas dans ces conditions, en tout cas, parce qu’elle le porte bien trop haut en estime pour vouloir lui gâcher la vie. Ce serait un jeu qui l’aurait sans doute amusé pendant quelques temps, jusqu’à ce qu’elle s’en ennuie comme elle s’ennuie toujours de tout. Son sourire en coin démontre qu’elle rigole bien plus qu’elle n’est sérieuse et il met fin à cette discussion qui n’en avait que le nom. Charlie ne le prend pas pour un pédophile, cela va de soi. Elle l’aime bien trop pour penser de telles choses à son sujet.
La blonde vante les lumières de la Golden Hour chez elle, et sa crédibilité est aussitôt remise en question dès lors qu’il reprend et répète doucement ses paroles. « Les lumières du coucher du soleil. » Elle voudrait lui dire qu’il est beau quand il sourit aussi instinctivement mais cela serait griller sa couverture de celle qui boude parce qu’on ne la croie pas. Les lèvres retroussées de la jeune femme ne restent en place que quelques secondes, de toute façon. Tout ce dont elle est capable à terme, c’est de lui rendre son sourire et d’être bernée assez longtemps pour qu’il puisse lui reprendre la cigarette des doigts. Son attention n’en a plus rien à faire du paysage qui défile sous ses yeux et elle ramène ses yeux bleus à l’intérieur de l’habitacle du véhicule ; sur lui plus précisément. « J'ai du travail. » Ce n’est pas la réponse qu’elle attendait et c’est encore moins une réponse qu’elle juge acceptable, en témoignent les sourcils qu’elle fronce doucement, déjà prête à trouver tous les arguments du monde pour qu’il ne continue pas sur sa lancée. “C’est moi ton travail.” Elle ne le paye pas et il ne gagne rien à rester avec elle, mais quelques clichés pris le rendent toujours heureux, non ? Il ne devrait pas vouloir faire autre chose. Ce n’est pas juste. « Tu fais à manger et c'est d'accord. » Charlie se pince les lèvres pour ne pas sourire de trop alors qu’il cède finalement très rapidement, sans qu’elle n’ait eu à négocier beaucoup. Elle bouge lentement pour ne pas être bloquée par la ceinture de sécurité et finalement vient poser ses lèvres sur la joue de son photographe attitré. “On commandera à manger.” Parce qu’elle ne sait pas cuisiner, bien sûr, mais qu’elle n’a pas envie de risquer un empoisonnement.
« Pourquoi t'as pas fait mannequin ? » “Je veux faire un métier utile.” La vérité, c’est qu’elle veut surtout faire un métier où on reconnaîtra tout le travail qu’elle a dû abattre pour en arriver là et pas seulement les couches d’auto-bronzant soigneusement appliquées sur son corps. Qui plus est, elle trouve du réconfort et des mots doux dans les bras de bien assez de personnes, elle n’a pas besoin que d’autres - qu’elle n’aura pas choisi - lui répètent qu’elle est belle à travers l’écran d’un appareil photo ou d’un book. Elle préfère choisir ceux qui composent sa vie, tout comme elle préfère pouvoir faire ce qu’elle veut face à son appareil photo, jouant de ses battements de paupière en même temps que de ses cheveux et de ses doigts, des maigres rayons de soleil avec. « T'iras pas chez moi, parce que j'ai pas vraiment de chez moi. » A défaut de pouvoir le regarder dans les yeux, elle l’observe à travers le zoom de l’appareil photo, désormais le visage bien plus fermé qu’auparavant. On lui reproche son air trop enfantin, il est temps de capturer l’instant et de prendre en compte les nuages gris s’étant mêlés à la scène, non ? Le vent la glace, il n'était pas prévu aujourd’hui. “Qu’est ce qu’il s’est passé ?” Elle a beaucoup de suppositions farfelues mais elle ne leur fera pas prendre de temps à toutes les citer unes à unes. Cette fois-ci, elle n’est plus une enfant. Elle le redeviendra au moment voulu, quand son appartement - et les plats commandés - auront fait place aux premières gouttes de pluie qui menacent leur scène supposée paradisiaque. |
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