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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen  

Elle arrive avec des cadeaux, la blonde qu'il n'a pas annoncée. La tête de Lawrence est facilement reconnaissable, même de dos, lui calé dans son siège et ses mèches hirsutes qui s'en dégagent. Il n'a rien dit en prétextant que ce serait une drôle de surprise, que la soirée n'en serait que meilleure et que non, ça ne serait pas awkward du tout qu'elle se joigne à leur moment prévu en couple. Pourtant elle apparaît dans l'embrasure de la salle de cinéma plongée dans la pénombre, popcorn entre les paumes et bouteille de vin achetée à la supérette du coin plaquée dans son sac. Chloe se doute déjà que Lucia ne sera pas particulièrement ravie de la voir arriver - comme à l'habitude.

Cohen déteste le conflit, elle l'abjecte. Jamais elle n'hausse le ton, encore moins ne fait de vagues. Elle laisse les choses aller, elle laisse la vie suivre son cours. Ouais, des tas de trucs l'énervent et tout autant d'éléments l'agressent, mais elle est passée maître dans l'art de tout ravaler le sourire aux lèvres l'étincelle au creux des prunelles. Lucia pourra bien se murer dans son silence habituel, elle pourra bien éviter le regard de Chloe et lui donner encore une fois l'éternelle impression de la prendre de haut, ce n'est pas dit que l'australienne refusera un moment avec Lawrence lui qu'elle ne voit presque plus depuis - qu'il est avec Lucia, d'ailleurs.

Quand elle descend l'allée sombre, qu'elle gomme la distance entre elle et eux deux et qu'elle finit par se poster dans le siège à la droite de Lawrence, c'est tout sourire que Chloe lui lance un popcorn à la gueule. Ils éclatent de rire, fiers de leur coup en commun, on murmure dans la salle et les somme de se taire. Le film n'est même pas encore commencé et ne sont projetées que des publicités et autres bandes-annonces qu'elle est ingrate au point de snober, préférant plutôt chuchoter milles histoires et autres anecdotes à son ami. À sa gauche, elle dénote cachée par la silhouette de Lawrence une Lucia fidèle à elle-même, volontairement aussi hautaine que détachée. La soirée sera longue si elle ne fait pas au moins une tentative vers la gamine qui s'est grattée une place de choix dans la vie du musicien que Cohen connaît depuis qu'ils sont enfants.

« T'en veux? » elle l'a pris extra beurre, elle s'est gâtée, ses doigts sont luisants et le paquet qu'elle tend vers la Whitemore reste en suspens quelques secondes avant que Lawrence ne le dégage du revers de la paume presque déçu, un brin protecteur. Chloe hausse le sourcil d'office. « Elle a un appétit d'oiseau, garde-le pour nous. » il s'esclaffe, elle roule des yeux. Un peu pour son estomac d'ogre, surtout parce qu'elle y lit une probable excuse pour justifier le fait que jamais Lucia ne voudrait quoi que ce soit venant d'elle, sûrement. « Dommage. » que Lucia fasse passer ses messages par Lawrence, mais surtout qu'encore une fois rien ne soit simple et tout soit compliqué quand elle est dans les parages. Dans un soupir, la blonde se cale au fond de son siège, sa tempe se décalant jusqu'à s'appuyer contre celle de son ami de la plus distraite des façons.



@lucia whitemore

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Lucia Whitemore & @Chloe Cohen  - Septembre 2017

C’était censé être un film entre nous. Il me l’a proposé parce qu’il a crié fort hier encore alors que j’appelais simplement la maison pour donner des nouvelles. Il me l’a proposé parce que cette fois ci à nouveau, il a réussi à me faire pleurer à force d'accusations ridicules qui me sont pourtant rentrées dans la tête et de critique véritablement injustes que j’ai pourtant prises pour moi et qui ont commencé à s’infiltrer dans mon esprit, depuis le temps qu’il les répète.

Il était si parfait et si doux, avant qu’on s’installe ensemble. Il l’était tant que je me dit que le problème vient de moi, que c’est moi qui ait changé, moi qui lui met trop de pression ou qui exagère à passer trop de temps au téléphone avec tous ceux que j’ai laissés à Brisbane pour venir vivre à Sydney avec lui. Alors j’ai espacé les appels et réduit leur durée mais rien n’y fait, ses crises de jalousies sont de plus en plus fréquentes et la violence de ses mots avec. Moi, éperdument amoureuse, j’ai mal mais je ne vois pas les signes pourtant évident qu’il prend de plus en plus de pouvoir sur moi, qu’il étend son emprise et que je me laisse faire sans sourciller. J’ai quitté mon second job en fin de semaine. Je l’ai fait parce qu’il ne supportait pas les sois disants regard de mon collègue à l'accueil. La première fois je me suis fait licenciée à cause de l’une de ses scènes, mais là aussi c’était ma faute.

C’était censé être une après midi au cinéma pour se retrouver et j’en avais besoin. Alors quand je vois sa meilleure amie débarquer - elle est toujours là de toute façon - j’ai le coeur serré. Je ne ressens pas de jalousie et je ne suis pas du genre à faire une crise, je suis juste déçue puisque je sais qu’en public il ne m’accorde plus la même attention que lorsque nous sommes tous les deux, surtout si c’est Chloe. Et puis, pourquoi ne pas me prévenir et me laisser croire que ce serait juste nous ? Alors que sa silhouette se détache je jette un coup d’oeil interrogateur au brun qui se penche à mon oreille. « Elle avait rien à faire cet après midi du coup je lui ai proposé. J’espère que ça te dérange pas. On ira manger une glace après, juste nous. » Il glisse un baiser dans mon cou et je me mords la lèvre pour réussir à sourire comme si de rien n’était à et hocher la tête. Je n’ai pas envie qu’il interprète mal mon manque d'enthousiasme alors je le force. Je salue même la blonde quand elle arrive à notre niveau. « Salut Chloe. » Sa familiarité et ses élans tactiles envers Lawrence ne sont même pas un souci, mais il me font me sentir un peu plus à l’écart. « T'en veux ? » Je vais pour répondre puisque j’apprécie l’attention. J’adore le sucre, Lawrence le sait, il sait que je pourrais manger des cochonneries du genre toute la journée pourtant il répond à ma place. « Elle a un appétit d'oiseau, garde-le pour nous. » Ah, j’ai un appétit d’oiseau alors. Je pince les lèvres et secoue la tête poliment. Il le prendrait mal que je le contredise. « Dommage. » Dommage oui. Dommage que je n’existe plus à l’instant même où mon petit ami tranche pour moi. Elle pose sa tête sur son épaule et d’un coup, je sens la peine et l’angoisse monter. Je me sens à l’étroit dans mon propre corps et si je tente de me concentrer sur le film pendant les premières minutes, la sensation d’être sur le point de fondre en larme me fait prendre mes jambes à mon cou. « Désolée, je me sens pas bien je vais prendre l’air. Je reviens. » Je me relève en précipitation et sans demander mon reste, je quitte la salle de cinéma pour me diriger vers les toilettes. Je m’enferme dans la première cabine et, sous le coup des nerfs, je fonds en larmes, la respiration saccadée et le coeur brisé.

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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen  

Le popcorn reste en suspens et le bras de Chloe avec. C'est Lawrence qui prend les devants, poussé par un élan chevaleresque censé protéger Lucia du vilain et horrible snack imbibé de beurre et de sel que Cohen lui a tendu en bonne connaissance de cause. Elle se doutait que la copine de son pote allait trouver une façon d'éviter le geste, elle ignorait par contre que ce serait au dit pote de prendre le relais tellement elle jugeait être au-dessus de toute offrande du genre. Plus pour elle et plus pour Lawrence du coup qu'elle pense Chloe, avant de prendre ses aises dans ce qui représente à ses yeux le siège le plus confortable de l'univers. Elle a passé son adolescence dans les cinémas, l'australienne. Les économies de ses soeurs passaient sur des fringues et des CDs, les siennes étaient dédiées à des entrées pour voir chacun des films à l'affiche de la petite salle de quartier dans laquelle elle avait même séché quelques cours du temps du lycée. Lawrence s'était joint à elle plus de fois que moins, et la voilà qui reprend leurs éternelles habitudes un contact à la fois. Elle est tactile Cohen, elle l'est avec tous les gens qu'elle aime, ressentant le besoin de le leur faire savoir du bout des doigts et un geste à la fois.

Et Lucia, elle, prend la fuite. « Désolée, je me sens pas bien je vais prendre l’air. Je reviens. » immobile, il n'y a que ses iris noisettes qui suivent avec dépit la silhouette de la gamine qui se faufile hors de la salle en quatrième vitesse. Lawrence ne dit rien, souffle pourtant. Dans son entreprise quelques popcorns tombent au sol, Chloe efface les traces du crime en poussant les grains plus loin du bout de ses baskets. « Cinq minutes, c'est mon record j'pense. » Lucia finit toujours par les laisser seuls. Parfois, c'est pour téléphoner à l'une de ses soeurs, d'autres c'est parce qu'elle a une emplette à faire et un truc à acheter qu'elle avait totalement oublié. Là, l'effort mis aujourd'hui est au plus bas, au point où Cohen est un peu moins confortable qu'elle ne l'était dans son siège une seconde plus tôt. « Elle m'épuise. » qu'il lâche, comme si c'était l'évidence. « Elle est pas facile. » et Chloe rattrape le tir, non pas pour défendre qui que ce soit, simplement pour statuer les faits. Lucia n'est pas facile et la situation ne l'est pas non plus. Si Lawrence est une valeur sûre et stable dans la vie de Chloe, l'inverse est toute aussi vraie et tant que sa petite amie se comportera comme une gamine à qui on vole son jouet préféré du moment où Cohen est dans les parages, rien de tout ça ne sera autre chose que compliqué. « Avant, elle les aimait mes surprises. » elle est tentée de lui dire qu'il est idiot, là. L'imbécile heureux qui a cru que de ne pas l'annoncer serait une bonne idée. À la place, elle ébouriffe ses cheveux et embrasse bruyamment sa joue, lui glissant un « Texte-moi quand ça devient intéressant. » à propos du film qu'elle ignore depuis son début. C'est une comédie romantique niaise comme il s'en fait des centaines en plus, probablement choisie par Lucia. Chloe déteste.

Hors de la salle, il lui faut un petit moment pour que ses prunelles s'adaptent à la lumière qui y est renvoyée. Un coup d'oeil à gauche, un autre à droite. Elle se la joue presque maternelle Chloe, quand elle s'appuie sur le mur en bordure des toilettes. Patiente, elle attend que Lucia apparaisse dans ce qui pourrait être tout de suite comme dans une heure. Lorsque ses yeux croisent enfin ceux de la Whitemore, elle les voit rougis, encore un peu humides. C'est là qu'elle se félicite de lui avoir laissé au moins une longueur d'avance pour se cacher dans une cabine, autant que de lui avoir accordé la dignité de pleurer sans public et surtout sans témoins. « Ça va mieux? » un mot à dire et je dégage, je vous laisse seuls que son coup d'oeil propose, négocie, sachant très bien que Lucia ne lui demandera jamais une telle chose si impolie.

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Lucia Whitemore & @Chloe Cohen  - Septembre 2017

Evidemment que je fuis. J’aurais aimé être capable de rester assise, un sourire poli sur les lèvres et de prendre sur moi, sauf que je réalise que je n’en suis pas capable. Je tente de fixer mon attention sur les bandes annonces et sur les premières minutes du film mais je sens un poids sur mon coeur, un étau autour de ma gorge qui ne semble vouloir aller nul part et plutôt que de me donner en spectacle et de fondre en larme ici et maintenant, je choisi de m’enfuir. Lawrence me jetterais un regard noir s’il m’entendait sangloter, Lawrence me jette un regard noir quand je me lève pour quitter la salle, Lawrence m’aurait jeté un regard noir quelle que soit ma réaction et je ne lui en veut même pas. Je n’arrive pas à lui en vouloir d’être fatiguée de ma présence quand quelque chose d’aussi idiot qu’un sceau de pop corn arrive à me mettre dans tous mes états et je m’en veux de lui donner raison, de prouver que j’ai changé et que je suis bien trop sensible et à fleur de peau. Je m’excuserai sans nul doute auprès de lui plus tard, mais sur l’heure je décide que sa réaction sera pire s’il me voit pleurer.

Dans le couloir, j’accélère le pas comme si ma vie en dépendait. Comme si verser la moindre larme en public était quelque chose de grave, persuadée que je suis minable si je n’arrive même pas à atteindre les toilettes avant de m’effondrer. Et je m’effondre, c’est inévitable et, à assise sur le rabat que je ferme, je ne sais même pas mettre le mot sur pourquoi je pleure. Parce qu’il a proposé à Chloe de nous rejoindre dans un moment qui devait nous appartenir ? Parce qu’il ne m’a pas prévenue ? Parce que j’ai cessé d’exister à l’instant même où elle est entrée dans la pièce et à posé la tête sur son épaule ? Parce qu’il a pris la décision pour moi, même si c’était une décision idiote.

Je mets un moment à sécher mes larmes. J’écris un message à Hannah que je n’envoie pas, que j’efface finalement avant de ranger mon téléphone et je ne sors que pour mettre de l’eau sur mon visage. Lorsque je croise mon reflet dans le miroir,  je me dit que je ne peux pas revenir dans la salle comme ça, qu’il verra forcément que j’ai pleuré. Je n’ai pas envie qu’il crie, j’ai envie de tout sauf ça. Je décide d’aller acheter quelque chose à manger, de prendre le temps de me calmer et de faire disparaître les preuves même si pour ça je rate l’entièreté du film qu’il m’avait pourtant laissé choisir, pour une fois. « Ça va mieux ? » Je me retourne sur la voix qui m’interpelle à la sortie des toilettes. Chloe. Que fait-il là ? Je lui ai laissé sa place, celle aux côté de Lawrence, je me suis effacée sans lui en vouloir et sans ressentiment. « Je… » Je suis surprise, avant toute chose. Je suis surprise qu’elle ait pris la peine de sortir pour venir me trouver. « T’aimais pas le film ? » C’est la seule explication. C’est un hasard qu’elle me croise là, maintenant, elle est simplement sortie de la salle parce que le film ne lui plaisait pas ou pour aller acheter à manger. « Vous aviez plus de pop corn ? » Comme quoi, il n’y en avait en effet pas assez pour trois. « Je peux aller en chercher si tu veux. J’ai ma carte sur moi. » Et je serais prête à le faire même si je n’ai pas le droit de plonger la main dedans. « Je suis encore un peu patraque, je crois que je vais vous laisser regarder le film. » Je suis patraque. Je ne me sens pas bien. Je crois que c’est devenu mon excuse préférée, n’importe quel médecin se ferait du souci pour ma santé.

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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen

Elle sort des toilettes avec l'air de celle qui aurait dû y rester encore une poignée de minutes le temps d'attendre que ses yeux reprennent une teinte plus naturelle, ses joues avec. Chloe est tentée de lui tendre sa poudre compacte pour effacer les ravages, mais elle doute qu'un coup de main supplémentaire soit le genre d'élément que Lucia apprécie. Ce serait pointer du doigt qu'elle n'en mène pas large, et c'est probablement un autre point que la gamine pourra lui reprocher au compte-goutte. C'est lassant, d'être la meilleure pote d'un gars qui ne choisit que des petites amies qui la voient comme une menace.

« Je… » tu? Cohen est bien trop occupée à enfoncer ses mains dans les poches de son jeans délavé pour la presser à parler. Elle est là parce que Lawrence ne se bougeait pas, parce qu'elle n'est pas du genre à laisser les gens avoir mal seuls dans leur coin et parce que, stupidement, elle espère que Lucia calmera son attitude de gamine avec elle si elle voit que Chloe est dans son équipe. Ou tend à l'être durant ses bons jours. « T’aimais pas le film ? » « Je l'ai déjà vu. » un petit mensonge blanc comme un autre, quand on sait que n'importe quelle comédie romantique lui donne l'impression d'être la même chose en format copier coller. Elle ne l'a jamais vu, le film qui joue à l'écran et qu'elles manquent pour le moment. Mais si elle a vu un chick flick une fois, elle les a tous vus. « Vous aviez plus de pop corn ? » et les excuses pleuvent, et le signal d'alarme en toutes lettres qui signifie un "pars Chloe, laisse-moi à ma misère" lui provoquerait presque un roulement d'yeux qu'elle retient de justesse. « À cette heure-ci il doit l'avoir déjà fini, ouais. » toujours, éternellement dans la diplomatie. « Je peux aller en chercher si tu veux. J’ai ma carte sur moi. » ça par contre, c'est le summum. Son sourcil se hausse, elle les froncent tous les deux la seconde d'après. Lucia serait vraiment prête à se rendre là, à piler sur son orgueil à ce point, pour avoir la sainte et unique paix? Seigneur. « Je suis encore un peu patraque, je crois que je vais vous laisser regarder le film. » « Peut-être que d'aller prendre l'air ça t'aiderait. » ce qui sonne comme un conseil est au final une proposition qu'elle veut presque intransigeante.

Esquissant un pas vers la sortie, elle fait signe à Lucia de la suivre sans vraiment laisser place à la négociation. Si vraiment elle se sent si patraque que ça, le fraîcheur du jour ne lui fera que du bien. N'est-ce pas, Whitemore? « Il t'avait pas dit hen, que je viendrais? » la blonde tente une tactique d'approche toute en douceur, quelque chose d'un peu moins agressif que les foutus néons de ce foutu couloir de cinéma. « Il fait toujours ça, le nombre de malaises que j'ai créés, je les compte plus. » ici, elle se sent prise entre les limbes à attendre de savoir si Lucia veut sortir ou continuer de jouer les patins devant public à l'intérieur. « Si tu mens, ça a toujours l'air pire. » alors elle pointe, et pique. Si Lucia ment sur la cause de sa conséquence, elle se sentira encore plus mal à se faufiler dans ses faussetés tricotées trop serrées.

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Lucia Whitemore & @Chloe Cohen  - Septembre 2017

« Je l'ai déjà vu. » Qu’est-ce qu’elle fait ici alors, si elle a déjà vu le film ? Aveuglée par mon incompréhension, je ne vois pas que ce n’est qu’une excuse, je ne perçois pas qu’elle est mal à l’aise aussi et qu’elle cherche simplement à me faire me sentir un peu moins mal. La vérité c’est qu’il y a peu de chances qu’elle en soit capable : Chloe est bien la dernière personne à laquelle je confierais mes problèmes de couple avec Lawrence, et ça même si j’étais capable d’en parler, de les admettre à voix haute et d’arrêter de faire l’autruche. « À cette heure-ci il doit l'avoir déjà fini, ouais. » Je hausse les épaules, avant de répondre, fataliste. « Alors je suppose qu’il avait raison, que y’avait pas assez pour trois. » Lui a invoqué mon appétit, moi je me suis simplement exclue et, Chloe, je me demande si elle n’a pas fait exprès puisque je me sens tenue à l’écart de cette relation amicale quand je n’ai pourtant jamais essayé de les séparer. Ma phrase, je la regrette dès qu’elle passe la barrière de mes lèvres : ce n’est pas moi, je ne suis pas aigrie et sarcastique, je ravale ma colère et d’un signe de la main, je lui fais signe d’oublier ce que je viens de dire.

« Peut-être que d'aller prendre l'air ça t'aiderait. » Elle se dirige vers la sortie en me fixant, et je n’ai pas vraiment l’impression d’avoir le moindre choix. Face aux fortes personnalités je me suis toujours écrasée et Chloe fait indéniablement partie du lot alors, docile, je la suis. Peut-être va-t-elle m’adresser des reproches, peut-être reprendra-t-elle en coeur ceux de Lawrence, mais je n’ai pas la force de me rebiffer. « Il t'avait pas dit hen, que je viendrais ? » Je relève les yeux vers elle, mal à l’aise puisque je l’ai toujours été dans la confrontation. « Il fait toujours ça, le nombre de malaises que j'ai créés, je les compte plus. » Pourquoi le fait-elle alors ? Pourquoi rejoint-elle un couple au cinéma ? Pourquoi vient-elle au restaurant quand elle sait que nous ne serons tous les trois ? Si elle le sait, pourquoi ai-je toujours l’impression qu’elle tente de s’immiscer dans ma relation de couple ? Pourquoi ai-je toujours l’impression d’être seule contre deux dès qu’ils se retrouvent ? « Si tu mens, ça a toujours l'air pire. » Je hausse les épaules en baissant les yeux. « Non, il me le dit jamais. » Chloe, c’est toujours la surprise, pourtant j’ai du mal à penser qu’il puisse croire que c’en est une bonne. « Et c’est son droit. C’est pas un problème, vraiment. » Bien sûr que c’en est un. Mais c’est moins grave que sa tendance à m’exclure dès qu’elle est là, moins grave que le constat que notre relation a bien changé depuis ses débuts. « C’était juste pas le jour. » Elle va avoir l’impression que ce n’est jamais le jour, que je ne suis pas drôle quand je suis simplement consciente que sa présence ne fera que créer un peu plus de conflit, un que je paye cher dès que nous nous retrouvons tous les deux, mon petit ami et moi.

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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen

« Alors je suppose qu’il avait raison, que y’avait pas assez pour trois. » hm. Elle pique et Chloe reste impassible, pas certaine du tout de l'angle que Lucia souhaite aborder s'il en est un où elle critiquerait Lawrence. Elle sait bien que l'allégeance de Cohen est marquée, sacrée, qu'elle peut bien être sortie de la salle pour s'assurer que la gamine allait bien. Mais que si elle l'a fait c'est bien plus pour que son ami ne se retrouve pas à gérer une poupée de chiffon brusquée quand il repartirait avec sa petite amie vers de nouvelles aventures. Elle est là par solidarité féminine oui ; et surtout par solidarité envers son ami. Si Lucia l'a oublié, le sourcil que la blonde arque ne fera que le lui confirmer un peu plus. « Non, il me le dit jamais. » a-t-il vraiment besoin de lui rendre des comptes à ce point? Est-ce que Chloe s'incruste autant que ça? La vérité, c'est oui, un gros oui à chacune de ces questions-là. Il est en couple avec Lucia et donc, elle devrait être toujours celle vers qui il se tourne, pour discuter de tout et de rien, et certainement des visites inopinées arrivant durant leurs soirées à eux deux. Il est son petit ami et pourtant Chloe apprend presque systématiquement toutes ses nouvelles à lui la première, sait tous ses secrets sur le bout de ses doigts et ne se gênerait pas de l'affirmer tant elle a confiance en leur relation à tous les deux. Bien moins qu'en la relation qu'il entretient avec Lucia, ceci étant dit. Quand la gamine le justifie, Chloe la scrute d'un mensonge à un autre. « Et c’est son droit. C’est pas un problème, vraiment. » « Si c'est pas un problème, alors tout va bien. »

C'est un problème, elles le savent toutes les deux. Mais si la Whitemore y va de la tactique de l'autruche, Chloe fera tout pour l'encourager à s'enfoncer bien creux dans le sable si tel est son désir. « C’était juste pas le jour. » étonnamment, elle la suit dehors. C'était presque une nouvelle porte de sortie qu'elle lui laissait, pour retourner voir Lawrence et lui babiller à l'oreille à quel point son amie n'est pas si sympa que ça. Mais quelle situation lourde et complexe quand Chloe elle, veut juste s'allumer une cigarette et laisser le reste s'enflammer avec. « T'en veux une? » elle prend appui sur le muret du cinéma, tendant paquet et briquet vers Lucia en sachant très bien qu'elle ne fume pas, ne fumera jamais. C'est par politesse qu'elle lui offre, autant que pour se confirmer une fois de plus que la plus jeune est une enfant, encore.

« Ça changera pas. » alors Cohen se veut relativiste. Inspirant sur sa clope, s'assurant d'expirer la fumée à l'opposé de Lucia par principes, elle finit par rattraper ses yeux des siens rien que pour y ajouter une touche de calme dans la tempête. Elle n'est pas fâchée et elle n'est pas agacée, elle cherche juste à défaire les noeuds et à motiver la copine de Lawrence à avancer sans être portée à éternellement éparpiller des cailloux sur sa route. « Faudrait peut-être qu'on trouve un terrain d'entente. » le bénéfice du doute et la cendre qui tombe au sol, qu'elle dégage du bout de ses baskets. « Ou pas, si tu dis qu'aujourd'hui c'est juste pas le bon jour. » le bénéfice du doute, on disait.

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Lucia Whitemore & @Chloe Cohen  - Septembre 2017

« Si c'est pas un problème, alors tout va bien. » Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Quand je vois comment elle grimace quand j’ose à peine laisser paraître que la réaction de Lawrence m’a fait du mal, je me dis qu’elle n’est certainement pas là par bienveillance Chloe. Je me demande même s’il lui a demandé de me suivre pour me surveiller et lui faire un rapport puisque, sans paranoïa, je sais qu’il en serait capable. Je le sais depuis qu’il m’a demandé mon téléphone pour lire mes messages, je le sais depuis qu’il m’a hurlé dessus un soir où je suis rentrée une heure plus tard que ce que j’avais annoncé, je le sais depuis qu’il m’a un jour regardée droit dans les yeux en me disant ”je ne veux plus que tu traînes avec lui.” Ou elle, ça n’a pas d’importance puisqu’il n’est pas question de loyauté : la mienne lui est pleinement acquise. Celle de Chloe, je sais ou elle va et sa réaction me sert de piqûre de rappel : elle n’est pas là pour moi, elle n’est pas là pour me tendre la main mais elle est là pour lui.

« T'en veux une ? »
« Je fume pas. »

Je garde mes bras croisés sous ma poitrine et je me demande s’il s’agit de politesse ou d’une façon de prendre l’ascendant puisqu’elle le sait Chloe, elle sait que je ne les accompagne jamais au fumoir, elle sait que mon visage s’assombrit à chaque fois que Lawrence me laisse seule pour sortir fumer avec des gens certainement bien plus intéressants que moi. « Ça changera pas. » Hum ? Je relève les yeux dans sa direction, angoissée à l’idée de la conversation désagréable que je présage. « Qu’est ce qui changera pas ? » Lui ? Je n’y crois plus non plus, même s’il me le promets souvent, après les crises, une fois que j’ai pleuré et qu’il soit redescendu. Elle ? Elle ne me doit rien de toute façon, mais je la trouve hypocrite de l’affirmer comme une fatalité quand elle pourrait faire attention, quand elle pourrait faire en sorte que ça change : moi, je n’ai aucun pouvoir là dessus. « Faudrait peut-être qu'on trouve un terrain d'entente. » Je fuis son regard : je n’aime pas ce genre de phrase. Je suis conciliante et trouver un terrain d’entente ça signifie bien plus souvent que je vais m’écraser et donner à l’autre ce qu’il veut. Je le fais avec Lawrence de toute façon alors, je suis prête, que veut-elle ? « Ou pas, si tu dis qu'aujourd'hui c'est juste pas le bon jour. » « J’ai rien contre toi Chloe. » Moi même, je suis surprise par le son de ma voix. La phrase m’échappe puisque j’ai l’impression qu’elle se pose en victime et moi en petite amie jalouse. « J’ai rien contre votre amitié non plus. » Totalement honnête, j’admettrais que je n’aime pas qu’elle passe son bras autour de ses épaules, qu’elle joue avec ses cheveux et qu’elle vienne poser sa tête dans son cou. Mais je suis sincère lorsque je dis que ce n’est pas ça le problème. « C’est juste que je passe toujours au second plan quand vous êtes ensemble. Je sais pas si c’est normal ou si c’est moi qui exagère de le prendre comme ça, mais ça fait mal, c’est tout. » Puisque dans ces moments, je me sens exclue de mon propre couple.

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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen  

La silhouette de Lucia se taille une place aux côtés de celle de Chloe, comme si elles avaient chacune leurs raisons d'être ici. C'est drôle à dire que dans une autre vie, Chloe aurait probablement été une excellente amie pour Lucia et vice versa. La douceur et le calme de l'une auraient facilement temporisé l'attitude solaire et parfois excessive de l'autre. Lucia aurait pu servir de baume, de pilier rassurant à une Chloe toujours prête à s'échapper, toujours visant la sortie bien plus que l'entrée. Cohen elle, aurait facilement secoué Lucia le temps de lui montrer que la vie ne se résume pas aux perceptions que les autres peuvent avoir de soi, et qu'ainsi on apprend bien mieux à s'aimer que lorsqu'on se cale sur ce que la Terre en entier veut de nous. Ce que Lawrence veut d'elle, en somme.

Et elle ne fume pas, bien sûr qu'elle ne fume pas. « Qu’est ce qui changera pas ? » le fait que la situation est pleine de malaises. Le fait que Chloe traînera toujours avec Lawrence, autant qu'il est défini comme une constante dans sa vie à elle aussi. Rien ne changera et ce n'est certainement pas en donnant l'impression que chaque regard rivé sur elle sont un argument d'attaque de plus que cela l'aidera. « J’ai rien contre toi Chloe. » Chloe contre qui Lucia n'a rien apparemment prend une longue bouffée de cigarette, expirant la fumée à l'autre angle pour l'éviter à la gamine plus près encore que jamais. Elle n'a rien contre elle mais elle soupire du moment où Chloe approche. Elle n'a rien contre elle mais elle ne rigole jamais en même temps que Chloe et Lawrence s'amusent de tout et de rien. Elle n'a rien contre elle mais encore une fois Chloe doit jouer à la diplomate pour que la soirée ne tombe pas à l'eau sous un caprice. « J’ai rien contre votre amitié non plus. » encore heureux, c'est bel et bien de l'honnêteté que Cohen entraperçoit, au creux des prunelles de Lucia lorsqu'elle détourne son attention vers elle. « C’est juste que je passe toujours au second plan quand vous êtes ensemble. Je sais pas si c’est normal ou si c’est moi qui exagère de le prendre comme ça, mais ça fait mal, c’est tout. » ça fait mal, ça, elle a raison. Quand la cendre tombe au sol au ralenti, c'est presque comme si Chloe voyait les baricades de Lucia se dégager un bref instant. Elle sait très bien que ce ne sera pas en un claquement de doigts qu'elles avanceront vers quoi que ce soit, mais au moins, elles avancent.

« Alors le laisse pas te faire passer seconde. » elle ne le tolère pas, ça, la blonde. D'être deuxième, d'être l'autre choix, de ne pas être la priorité. Elle ne le tolère jamais si ce n'est sur un plateau là où elle sait très bien où prendre sa place quand bien même elle est minime. S'il y a bien une chose qui la répugne, c'est d'avoir l'impression de ne pas être celle qu'on voulait avoir, d'hésiter à aimer sa présence. « Avec lui dans les parages, et avec moi - » qu'elle pouffe, dédramatisant, très bien au courant qu'elle est du genre à monopoliser beaucoup d'espace à la base. « - faut que tu prennes ta place. Impose-toi, choisis les activités, choisis les endroits et choisis si tu manges du popcorn ou pas. » la voilà Chloe, qui joue à la grande sage. Si seulement elle savait.

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Lucia Whitemore & @Chloe Cohen  - Septembre 2017

« Alors le laisse pas te faire passer seconde. » Ca a l’air facile dit comme ça. Parce qu’elle est forte de l’expérience d’une vie à s’imposer Chloe, à laisser personne la mettre à une autre place que la première mais c’est loin d’être mon cas. J’ai toujours eu du mal à m’affirmer. Arrivée troisième, ayant grandi avec deux soeurs aux caractères affirmés, je me suis effacée assez naturellement et sans que personne ne l’exige jamais et ma rencontre avec Lawrence, loin de m’aider à prendre confiance en moi, a achevé de me transformer en oisillon apeuré. Mais n’ai-je pas le droit d’être discrète et gracieuse plutôt que du genre à attirer l’attention et à parler fort ? N’ai-je pas le droit de préférer longer les murs dans une pièce plutôt que de me placer au centre ?

Est-ce que cela donne le droit à mon petit ami de me réduire au silence en parlant à ma place ? Est-ce que ça lui donne le droit me faire me sentir aussi mal en allouant ma place à son amie ?

Je suis perdu et son conseil me heurte comme un reproche. Ce n’est pas vraiment sa faute à Chloe : comment pourrait-elle deviner des choses dont moi-même je n’ai pas encore conscience ? « Avec lui dans les parages, et avec moi - » « Tu sais, je crois pas que ce soit normal que j’ai besoin de me battre pour ça. Il passe toujours en premier pour moi. » Et ses crises de jalousie à lui ne sont jamais motivées par rien de tangible. Il m’a éloignée de mes sœurs et de mes amis : il n’est pas uniquement le premier, il est le seul dans ma vie. « Je voudrais juste que ça soit aussi naturel dans l’autre sens. » Sauf qu’il n’y a plus rien de naturel entre Lawrence et moi depuis longtemps, et bien que je tente d’y rester aveugle je n’arrive pas à expliquer ce poid sur mon estomac en quasi permanence. « Mais t’as raison. C’est pas ta faute et je m’excuse si je t’ai blessée. » Puisque je suis comme ça : je m’excuse à tort et à travers sans être réellement certaine d’avoir fait quelque chose de mal. Je ne veux pas qu’elle puisse avoir une critique à mon égard à aller chuchoter à l’oreille de mon petit ami : j’avais simplement envie de passer un bon moment avec lui aujourd’hui. « Faut que tu prennes ta place. Impose-toi, choisis les activités, choisis les endroits et choisis si tu manges du popcorn ou pas. » « J’avais choisi le film. Il avait pas envie de le voir mais il a dit oui pour me faire plaisir. » N’est-ce pas déjà assez ? Ne suis-je pas idiote de lui reprocher le reste ? Elle, le pop-corn, n’est-ce pas idiot quand il a fait un effort pour moi ? Ne suis-je pas en train de faire preuve d’ingratitude ? « Il aime pas quand je m’impose. » La confession, je la lâche dans un murmure et je me sens coupable dès l’instant où elle passe la barrière de mes lèvres.

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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen

Dans la tête de Chloe, tout est simple et évident. Si on ne souhaite pas passer deuxième, alors on ne donne jamais la moindre munition à qui que ce soit pour qu’il puisse nous refiler le rôle. Elle a toujours fonctionné ainsi, se contentant de s’envoler sans plus de cérémonie si à un moment ou un autre on lui donnait l’impression de devoir justifier sa place. C’est ainsi qu’elle s’impose la blonde, s’assurant que lorsqu’elle est dans les parages quiconque passe un assez bon moment pour vouloir qu’elle revienne encore et toujours en dépit des autres présents.

« Tu sais, je crois pas que ce soit normal que j’ai besoin de me battre pour ça. Il passe toujours en premier pour moi. » sa cigarette roule entre ses doigts, elle laisse à Lucia la place de parler et de se vider le cœur. Pas parce qu’elle veut tout entendre pour aller le raconter à Lawrence, mais bien parce qu’il s’agit là d’un premier pas suffisant aux yeux de la blonde pour voir enfin la plus jeune prendre la place qui lui ai dû. « Je voudrais juste que ça soit aussi naturel dans l’autre sens. » pourtant, Cohen de l’extérieur le voit toujours faire des pieds et des mains pour inclure Lucia. Il lui parle de tout ce qu’il a organisé pour la gamine, il lui raconte les dizaines de cadeaux qu’il lui faits, les chansons qu’il lui compose. Avec un peu de bon sens, Chloe risque même de dire à Lucia de relativiser, quand elle ignore évidemment que la grande majorité des informations que Lawrence lui passe au sujet de sa petite amie sont complètement erronées, faussées au possible. Il la traite comme de la merde mais est passé maître dans l’art de faire croire à l’inverse. Cohen l’ignore. « Mais t’as raison. C’est pas ta faute et je m’excuse si je t’ai blessée. » « T’as pas besoin de t’excuser pour la façon dont j’ai pu me sentir. » sa voix est douce, à l’actrice, elle calmerait presque.

Chloe n’en veut pas à Lucia, elle est simplement dépassée par le fait qu’après tous ces mois, elles en soient encore là. C’est chiant, de se battre à contre-courant. « J’avais choisi le film. Il avait pas envie de le voir mais il a dit oui pour me faire plaisir. » bon, un début relativement correct en soi. « Il aime pas quand je m’impose. » qui n’aime pas ça, sincèrement? Qui n’aime pas être en compagnie d’une personne qui sait ce qu’elle veut, et qui l’assume? Qui refuse d’être posté aux côtés de quelqu’un qui n’a pas peur de dire quelque chose qui pourrait froisser, simplement en confiance de ses convictions? C’est quelque chose que Chloe déplore, et lorsque la dernière salve de cendre tombe au sol, elle essaie de voir là où y’a le nœud, là où elle pourrait porter ses maigres connaissances à profit.

« Vous devriez vous trouver une passion en commun. » avec Victor, le reste du monde cesse d’exister quand ils parlent de cinéma, quand ils se confondent dans leur envie de révolutionner le monde à travers un grand écran. « Plutôt que d’alterner entre des trucs que vous aimez ou que vous détestez. »  ainsi, ils auraient peut-être moins l’air d’être l’un contre l’autre, et de plutôt bosser comme des alliés. « L’amour ça a pas besoin d’être un compromis. »  Chloe elle, ne l’a jamais vu comme tel. Ni maintenant, ni hier, ni demain.

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Lucia Whitemore & @Chloe Cohen  - Septembre 2019

« T’as pas besoin de t’excuser pour la façon dont j’ai pu me sentir. » Pourtant j’ai l’impression de devoir tout le temps m’excuser, dès que je quitte une soirée plus tôt parce qu’il est collé à elle, dès qu’il me lance un regard noir parce que je dis quelque chose qui ne lui plait pas, jette un regard qui ne lui plait pas et qu’il ne manque pas de me le repprocher dès que nous arrivons à la maison. La seule fois où j’ai osé faire une remarque à propos de Chloe, une remarque détournée et anodine puisque je ne suis pas du genre à aborder les gens en frontal, il est rentré dans une colère noire si bien qu’aujourd’hui, je m’efface. A sa remarque, je me contente de répondre en haussant les épaules. Pourquoi m’a-t-elle suivie si ce n’est pour pouvoir s’expliquer avec moi ? « C’est lui qui t’a demandé de sortir ? » De sortir pour venir voir comment j’allais puisque lui, je le fatigue ?

Moi aussi je suis fatiguée, je suis fatiguée de me battre pour ou contre - je ne sais plus - mon petit ami mais je m’en rend à peine compte tant je lui suis dédiée. Je m’en rends à peine compte puisque je suis amoureuse et que, pour les gens que j’aime, j’ai toujours été prête à soulever des montages et, dans le cas présent, faire des efforts encore et encore quand bien même je n’ai rien à reprocher et quand bien même en face, rien ne change jamais. « Vous devriez vous trouver une passion en commun. Plutôt que d’alterner entre des trucs que vous aimez ou que vous détestez. » Je hoche doucement la tête. J’ai l’impression que nos problèmes sont bien plus compliqués qu’une passion en commun et je la trouve hypocrite Chloe : ce n’est pas le film le problème, c’est qu’elle passe avant. « L’amour ça a pas besoin d’être un compromis. » Un sourire étire mes lèvres et à nouveau je hoche la tête mais je ne le fais plus que par politesse. « Faudra que tu me fasses une liste de ce que tu détestes faire alors. Que je cherche dans cette direction là. » Ce sera quoi Chloe ? Faut-il que nous nous mettions à la cuisine, au tricot ou au macramé pour qu’on puisse le faire sans toi ? Ma remarque est piquante, peu pour les autres mais trop pour moi et je baisse les yeux au sol. « C’est pas grave de toute façon, je sais que vous êtes qu’amis. » Pas de jalousie motivée par une quelconque paranoïa, c’est ce que j’essaye de lui dire. « Faire des compromis c’est important pour lui. » Que moi j’en fasse en tout cas, c’est ça qui semble avoir une importance.

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@Lucia Whitemore & Chloe Cohen

On dira d’elles qu’elles apprennent à se connaître, là de suite. Chose qui ne semble pas avoir été leur priorité toutes les autres fois où elles ont bien pu se côtoyer, à commencer par leur toute première rencontre où au final Lawrence et Chloe avaient passé le plus clair de leur temps à se répondre de répliques de leurs films cultes préférés, qu’évidemment Lucia ne connaissait pas d’emblée. C’est elle qui a choisi le film aujourd’hui ; ceci explique cela.

« C’est lui qui t’a demandé de sortir ? »
« Je suis capable de prendre mes décisions toute seule. »

Cohen inspire sa clope, la termine au passage. À choisir, jamais elle ne se serait embêtée à sortir rejoindre la plus jeune, pour la simple et unique raison que justement, elle est plus jeune. Elle est gamine à souhait, apprenant à peine à faire ses premiers pas dans un monde qui la bouffera toute crue si elle n’y met pas un peu du sien. Aux yeux de Chloe, Lucia n’est qu’une de plus, un autre exemplaire des filles typiques qui attirent l’œil de Lawrence. Il aime les petites poupées de porcelaine Lawrence, et c’est probablement pour ça que Lucia s’étonne que Chloe soit sortie d’elle-même sans demander de compte à personne. Elle voulait voir si elle pouvait la raisonner, elle voulait discuter et essayer de la comprendre. Finalement, Chloe a eu tort de vouloir voir sous la carapace. Lucia n’a rien de plus à ajouter à l’équation et déjà, Cohen s’ennuie.

Ou alors, elle a peut-être un peu de piquant. Qui l’aurait cru. « Faudra que tu me fasses une liste de ce que tu détestes faire alors. Que je cherche dans cette direction-là. » Chloe éclate de rire, la jalousie comme l'attaque de l’autre fillette ne l’atteignant absolument pas. « C’est facile ça. » elle hausse de l’épaule, prête une seconde à lui faire une véritable liste, la suivante reprenant le ton de Lucia avec une désinvolture qui en ferait rager plus d’un(e). « Je déteste quand t’es là. Mais ça tu le sais déjà. » et elle déteste surtout avoir l’impression de marcher sur des œufs pour éviter qu’encore une fois, la précieuse petite copine de Lawrence ne fasse frasques et crises de larmes, malaises et autre timidité maladive donnant l’impression que Chloe est l’erreur dans l’équation. « C’est pas grave de toute façon, je sais que vous êtes qu’amis. » alors pourquoi est-ce qu’elle a senti le besoin d’attaquer? « Faire des compromis c’est important pour lui. »

Elle gratte et elle camoufle, rien n’horripile plus Chloe que l’hypocrisie. Oh, l’ironie. « Je voulais juste voir si y’avait quelque chose à sauver, mais j’ai pas envie de me battre pour ça. » qu’elle finit par expliquer, donner la raison du pourquoi à une Lucia muette comme une tombe depuis trop longtemps déjà. Dans un autre monde, peut-être qu’elles auraient pu être amies. Chloe déteste s’embêter avec des et si. « Raccroche-toi au fait que si j’avais vraiment voulu m’immiscer entre vous deux, ce serait déjà fini depuis longtemps. » elle ne l’utilisera jamais, son veto avec Lawrence. Mais elle sait très bien que si elle levait le drapeau en lui affirmant que c’en est trop, il jetterait Lucia en un claquement de doigt. « Tu te bats toute seule Lucia, on est tous chill. C’est toi qui nous les impose, les compromis. » aujourd’hui, comme la dernière fois, comme la prochaine. C’est elle qu’ils doivent manipuler comme la plus délicate des bombes à retardement. À chaque nouveau passage elle laisse tout le monde aux prises avec ses réactions, avec ses larmes de crocodiles, avec ses tactiques d’évitement qui ne font que déclencher des vagues de pitié mal intentionnée.

Chloe en a assez. « Tu lui diras que je ne me sentais pas bien. » les mots de Lucia qu’elle reprend, sarcastique au possible, quand son mégot file aux poubelles et qu’elle, elle file vers le parking sans plus de cérémonie.