Chacun y va de ses remèdes de grand mère pour minimiser au mieux l’impact des furoncles et autres pustules, tenter de imiter leur propagation ou au moins la douleur que procure cette dernière. La vie n’a plus rien d’un long fleuve tranquille, elle n’est plus ni l’un ni l’autre. Chacun se bat pour sa propre survie avant même de ne serait-ce oser penser à celle des autres. L’objectif de chaque jour est d’accéder au suivant. Aujourd’hui rêver n’est plus permis, c’est un concept qui n’appartient désormais plus qu’à l’ancien monde qu’ils regrettent tous déjà. Ils regrettent de ne pas en avoir profité. Ils regrettent de ne pas avoir dévalisé les pharmacies quand tout a commencé plutôt que le rayon alcool et cigarettes.

Les amies continuent de se battre autant qu’elle les peuvent et si rêver n’est plus permis, alors elles peuvent au moins continuer à garder espoir. Il y a forcément un moyen d’enrayer la fin du monde, elles le savent. Il ne suffit plus qu’à trouver comment exactement et cela passe forcément par la découverte et la traduction des différentes tablettes perdues à travers la ville. Les différentes informations les amènent dans l'hôpital où les cadavres s’entassent littéralement les uns sur les autres, maintenant que plus personne ne fait aucun effort pour ceux qui sont déjà morts. On ne peut plus rien faire pour eux, qu’ils disent. On doit essayer de sauver ceux qui peuvent encore l’être, qu’ils ajoutent, eux mêmes peu assurés de leurs propos. “Il a dit que c’était au sous sol, qu’est ce qu’il y a au sous sol des hôpitaux ?” Naïve petite blonde ingénue qui demande à son amie aveugle de lire les panneaux alors qu’elle s’engouffre dans l’ascenseur - miraculeusement encore en état de fonctionner, même après tout ce qu’elles ont déjà vécu. “Oh. Tu vas pas aimer. Tu vas vraiment pas aimer.” Ses yeux ont dérivé sur le plan. Ceux d’Ana restent vitreux.

Elle va détester. Charlie va adorer bien malgré elle, sa malédiction ayant fait d’elle une adepte des insectes et non plus de la nourriture d’autrefois. Sa main collée contre la sienne, elle l’entraîne au milieu des cadavres qui étaient bien rangés, avant. Aujourd’hui ils sont déjà vieux et odorants. La mort, personne ne peut confondre sa senteur avec quoi que ce soit d’autre. Ana a compris où elles sont, tout comme elle a dû comprendre ce qu’elles vont désormais devoir faire.

@Anastasia Williams

« Putain Charlie, tu peux pas prévenir… Eurk, j’vais gerber... » “Roh ça va, c’est pas pire que du clonage.” Elle a de ces idées aussi, Ana, à penser aussitôt qu’elles s'apprêtent à entrer dans un laboratoire d’une telle sorte. D’où est ce qu’elle peut bien sortir une telle imagination ? La blonde esquisse un pas sur le côté pour éviter un possible vomi mais fort heureusement son amie arrive à reprendre le contrôle de son corps, assez longtemps pour éviter une catastrophe de la sorte. “Enfin je crois.” Parce qu’au fond, elles sont tout de même au milieu de morts qui sont tout de même très odorants, sûrement plus encore pour Anastasia pour qui l’odorat est sur développé depuis quelques temps.

« Me dis pas qu’on doit trouver la tablette dans la morgue. J’y vois que dalle mais ils ont dit à la radio qu’elle était submergée de cadavres potentiellement contagieux… On ferait peut-être mieux d’aller se bourrer la gueule, hein... »

La blonde n’avait pas envie de le dire non plus mais force est de constater qu’elles n’ont clairement pas le choix : en effet, elles doivent fouiller au milieu des boyaux d’inconnus pour trouver une stupide tablette supposée enrayer une malédiction tout aussi stupide encore, si ce n’est plus. A son tour elle est prise de différentes haut le coeur mais n’a d’autres choix que de se contrôler, tant pour tenter de garder sa dignité intacte que pour aider à redresser le cours de l’humanité. Ouais, rien que ça, ouais. Aucune pression, bien sûr, et c’est avec un sourire absente sur le visage qu’elle ouvre le premier tiroir de la morgue. Elle n’a aucune idée de comment s’y prendre, ses yeux quelque peu paniqués étant à la recherche d’un outils pour pouvoir rouvrir le corps de haut en bas ; comme dans les films. “Je vais te trouver un cutter ou quelque chose comme ça. On doit le faire, même si … ouais, même si c’est pas ce dont je rêvais non plus.” Villanelle pose les deux mains de son amie sur le lit de métal, près du corps inerte sans pour autant la lui laisser le toucher.

Un bruit plus loin fait sursauter l’aînée qui se reprend en se rassurant de mille et une raisons différentes - le vent, c’est le vent. “Je trouve pas de gants. On va devoir faire sans.” Fameux, vraiment fameux. Anastasia ne verra pas toutes les phases par lesquelles passe l’expression de son visage mais elles sont nombreuses, vous pouvez me croire. “Si on s’occupe chacun d’un … différent, on ira plus vite.” Cadavre étant le mot qu’elle n’osait pas prononcer. Pas encore, pas déjà. Et après une grande inspiration, elle commence à ouvrir le corps inanimé face à elle.

Il est vrai que des couteaux de boucher (c’est ce qu’ils sont, honnêtement) seront bien plus adaptés pour ouvrir un corps en deux mais elle ne sait pas si elle doit être effrayée ou impressionnée de savoir qu’Anastasia en avait dans son sac pendant tout ce temps. Combien de fois Charlie s’est-elle prise les pieds entre eux et a risqué de tomber sur ce fichu sac ? « Tiens, ça devrait rentrer comme dans du beurre... » “Si on peut éviter de parler de nourriture maintenant, vraiment, ça serait une merveilleuse idée.” La blonde grimace mais empoigne tout de même le couteau entre ses mains, sachant déjà qu’elle n’a pas le droit de s’y dérober parce que tout va bien au delà de ses simples intérêts et de sa manucure déjà fichue. Du coin de l’oeil, elle vérifie qu’Ana l’attrape bien par le manche sans risquer de se couper avant l’heure.

« Tu déconnes ? Tu veux ma mort ? » “J’aurai pas de gants non plus, on est dans le même bateau.” Les pustules auront leur mort à toutes les deux, finalement, et Charlie essaye de lui faire croire que ça a moindrement quelque chose de rassurant. Quelle idée, franchement. Ca ne doit pas être si pire que ça en a l’air, hein ? Après tout, les gens meurent pour un millier de raisons différentes … Non ?

Le bruit de la peau qui se déchirent et des os qui se brisent force Charlie à prendre sur elle même pour ne pas vomir ses maigres derniers repas sur le corps inanimé de l’inconnu. Ana a l’air de s’en sortir bien mieux qu’elle et finalement en un rien de temps, elles ont accès à tous ses boyaux. Croyez moi, ce n’est pas aussi propre que dans tous ces films qu’elle a vu. Ses mains se frayent un chemin au travers de ses organes en tremblant, regrettant un peu plus amèrement à chaque seconde qui passe d’avoir ses doigts perdus entre toutes ces choses visqueuses et gluantes et ewww. “Rien. Au suivant.” Elle étale le sang sur ses cuisses, par dessus son pantalon, à défaut d’avoir une autre idée lumineuse. Ce sera toujours moins pire que sur ses doigts, sûrement.

Après une profonde inspiration, elle passe à la case suivante.

(moi aussi je veux lancer les dés, ça me mank)

WIN - Le cadavre est bien mort, c’est cool. Plus qu’à le découper en petits morceaux, encore.
SO CLOSE - Le cadavre est mort mais cette fois-ci Charlie insiste pour être celle qui se contente de l’ouvrir : à Ana d’aller mettre ses mains de partout.
LOSE - Lol. Il bouge. Promis, juré, craché, il bouge.

« Oh fais pas ta chochotte, après on va s’bouffer un bon steak ! » “Ferme la.” Tel un enfant pris sur le fait, la voilà qui pense que c’est le bon moment pour commencer à bouder et se mettre Anastasia à dos, comme si le reste du monde n’était pas déjà dans une assez mauvaise passe comme ça. Le seul steak qu’elle voit est celui de taille humaine, allongé sur un lit de métal comme s’il n’y avait rien de plus normal à cela. Autant dire qu’il ne lui met pas l’eau à la bouche ; vraiment pas.

Face à elle, tout ce que sait faire son homologue blonde reste de se plaindre encore et toujours comme si c’était la seule chose à faire. Cela ne les aidera pas à trouver cette fichue tablette plus vite ni même à sortir de là avant d’être recouvertes d’affreux boutons mortels. Déjà, les mains de la Villanelle commencent à la brûler ; adieu la peau de bébé et les années passées à prendre soin d’elle à coup de produits affreusement chers. C’était bien la peine de s’emmerder toutes ces années. Ses mains autour des poignets d’Ana, elle la guide à peine au travers du corps éventré face à elles. Ses yeux scrutent son visage à la recherche d’un éclair de génie parce que, qui sait, peut être qu’elles trouveront ce qu’elles cherchent dès le second corps et qu’elles en seront ensuite débarrassées jusqu’à la fin des temps et - et … Non ? D’accord. Rien, au suivant.

“Putain Ana je te jure qu’ils ont intérêt de nous donne la Médaille d’Honneur ou un putain de truc qu’on pourra mordre comme les athlètes, là, parce qu’on mérite au moins ça.” Une fois de plus elle se surprend à tenter de s’éviter de vomir contre le corps déjà abîmé qu’elle ouvre de sa boîte. Cette fois-ci elle l’ouvre presque machinalement avant d’enfoncer sa main à l’intérieur avec aussi peu de remords. Elle sait qu’elles n’ont plus le choix de grand chose, désormais, pas même de faire ce qu’elles désirent réellement. “On est même pas sûres qu’avec ça, ça suffira à tout arrêter … C’est stupide.” Charlie, défaitiste ? Oui, totalement. Charlie les mains pleines de sang d’un inconnu, aussi. Charlie qui s’arrête entre ses poumons, pensant toucher quelque chose, peut être ? “J’arrive pas à … y’a peut être un truc, je sais pas, il faut que tu coupes un peu plus.” Demander à une aveugle de faire une incision précise à l’aide d’un couteau de boucher alors que ses doigts sont tout près ; quelle idée merveilleuse.

On dit souvent qu’on est plus fort à deux. Pour le moment, elles se contentent surtout de râler à deux et de s’énerver à deux, rien de plus, rien de mieux. Elles sont simplement deux dans la merde et autant dire que cela ne les aide en rien. « Ok, bouge pas, j’te fais de la place ! » Charlie écarte ses doigts au maximum pour ne pas qu’ils finissent tranchés eux aussi et elle en profite pour fermer les yeux par la même occasion, certaine que si elle ne voit pas le carnage en train de se passer juste devant elle alors il n’y aura justement aucun carnage. « Allez, cette fois c’est la bonne ! » Tu parles. Les doigts de la blonde ne savent finalement que s’enfoncer dans quelque chose de plus gluant encore, mais cette fois-ci bien vivant. En sortant la main d’entre les entrailles de l’inconnu, elle ne fait qu’en ressortir des asticots bizarrement plutôt appétissants. “Rien, putain.” Elle râle pour la forme, se léchant le bout des doigts au passage pour manger ce qu’elle peut bien en retirer. Au moins, elle se dit que ce n’est pas perdu pour tout le monde. Elle n’est pas prête de se vanter de ce repas face à Anastasia mais il au moins le mérite de lui remplir un peu le ventre - après tout, beaucoup disent qu’à l’avenir ce sera la première source de nourriture.

Encore faut il qu’il y ait un avenir, et la Villanelle en doute un peu plus fort encore alors que la porte d’entrée commence à s’ouvrir lentement, horriblement grinçante. Des doigts bandés s’accrochent aux parois, c’est un nouveau Merde qu’elle a à peine le temps de prononcer avancer d’accourrir pour garder la porte fermée. Les doigts gigotent, s’agitent, et elle est forcée de mettre tout son poids contre la porte métallique pour garder la chose loin d’elles. “Ok Ana il faut que je te guide, tu dois continuer toute seule, dépêche toi !” Yay, super les encouragements. Soit elles meurent à cause de la chose derrière la porte, soit à cause de la fin du monde, soit à cause de pustules.