Il était définitivement seul depuis qu'il avait découvert la lettre de la mère des jumeaux sur son paillasson un matin estival. Elle était partie, lui expliquant en long, en large et en travers à quel point elle n'était pas prête à assumer un tel rôle aussi jeune et Tim avait compris que c'était une solution inévitable. La jeune femme le regretterait peut être plus tard mais Decastel lui avait donné sa chance, plutôt deux fois qu'une par ailleurs et il ne recommencerait pas. L'affaire était clairement terminée et il allait devoir se faire à l'idée que ses enfants allaient grandir sans une mère. C'était quelque chose qui l'affectait profondément et pour cause, en vue de son passif sur la question. Lui avait eu la sienne mais elle lui avait fait énormément de mal, quelle solution était alors la meilleure? Dans tous les cas, Timothy avait toujours désiré faire mieux pour ses enfants et il s'avérait que l'échec était cuisant et qu'il allait devoir vivre avec. Passé la phase de déception, Tim s'était remis sur ses deux jambes, avait embrassé son destin et choisi de donner doublement aux jumeaux. Alors, il les stimulait de toutes les manières que son frère lui avait fait découvrir. Il jouait avec eux, faisait des tours de magie avec des jeux idiots et parfois, il choisissait de faire une petite balade en leur compagnie, la poussette étant de sortie. Timothy n'avait pas eu spécialement envie de parler tout seul durant tout le chemin alors il avait invité Caleb pour un petit moment entre pères de l'année. De son côté, le français était déjà au beau milieu du parc, posé sur un banc alors que les deux enfants dormaient à poings fermés après la demie heure qu'il avait passé à faire le tour du parc à une vitesse régulière. Comme quoi les promenades avaient un effet positif sur le sommeil difficile de ses enfants. Finalement, quelques minutes plus tard, Timothy aperçut la silhouette de Caleb, lui aussi doté d'une poussette pour ses jumelles, un point commun de nouveau pour les deux hommes. "Jeune papa, bonjour. Comment vont mes petites beautés, et toi-même bien sûr?" Il se releva pour saluer la petite tribu, s'extasiant encore et toujours devant les petites filles dans leur propre poussette. "Félicitations pour tes fiançailles, d'ailleurs..." Decastel lui fit un clin d'oeil, il savait, forcément, en tant que meilleure ami de l'anglaise qui partageait la vie d'Anderson.
Je nage dans le bonheur depuis un mois et demi. Mes filles sont maintenant ce que j’ai de plus précieux dans ma vie et je me sens responsable d’elles. En même temps c’est le cas. En un mois elles ont déjà tellement grandi mais du chemin, elles en ont encore à faire. Elles se réveillent encore je ne sais combien de fois par nuit. Beaucoup trop. Et je ne dors plus. Le premier mois a été dur mais depuis que j’ai repris le travail c’est encore pire. Parce que je ne dors pas la nuit mais je ne peux pas dormir la journée non plus contrairement à Alex qui, elle, peut s’accorder des siestes quand les filles sont elles aussi tombée dans les bras de Morphée. Le sommeil est là, mais le temps pour dormir ne l’est clairement pas. En plus, on ne peut pas dire que mon métier fait partie des plus reposants du monde. Rester debout des heures et des heures, gérer le stress, l’adrénaline, la rapidité tout en restant concentré pour m’assurer à ce que toutes les assiettes qui partent soient toutes aussi parfaites sur le visuel que sur le goût. S’il y a la moindre chose qui ne me plait pas, je ne laisse pas l’assiette disparaître en salle et je demande à ce qu’elle soit refaite. Tout doit être parfait. Tout le temps. C’est important pour la réputation du restaurant qui ne fait que grandir jour après jour, mais également aussi pour ma satisfaction personnelle. Et puis il y a aussi cette révélation que Birdie m’a faite il y a quelque temps déjà. Je ne la croyais pas vraiment, est-ce que Victoria était vraiment enceinte au moment de son décès ? Mais plus j’y réfléchis et plus j’y vois un sens et des signes qui auraient dû me questionner à l’époque. J’y pense encore plus depuis la naissance des filles. Ça me travaille, et je pense que c’est normal, non ? J’y pense la nuit alors le peu de moment de répit que j’arrive à avoir n’est pas synonyme de sommeil pour moi. J’en parle à mon psy ce qui m’aide un peu mais ça ne reste pas facile et au fond, ça ne répond pas vraiment à mes questions et niveau culpabilité, j’étais déjà assez élevé mais maintenant c’est encore pire. Alex étant partie à une réunion des alcooliques anonymes je me retrouve seul avec les jumelles, chose qui n’arrive que très rarement puisqu’Alex semble avoir beaucoup de mal à se séparer de nos filles ne serait-ce que pour deux ou trois heures. Mais je ne reste pas seul bien longtemps puisque j’ai déjà quitté la maison pour rejoindre Tim au parc. M’aérer et changer un peu d’air et sortir les filles du cocon familial, c’est important et surtout, ça me fait un bien fou. J’ai l’impression de passer ma vie, enfermé à la maison, ou au restaurant en passant par les magasins pour faire le plein de couches ou d’autres provisions indispensables pour un nouveau-né. Je l’aperçois assez rapidement, assis sur un banc aux côtés d’une poussette pour ses jumeaux. Je m’avance vers eux et c’est avec un sourire que j’arrive à son niveau. "Jeune papa, bonjour. Comment vont mes petites beautés, et toi-même bien sûr?" Mon sourire s’agrandit comme à chaque fois qu’on me parle de mes filles, ou quand moi je m’apprête à parler d’elles. « Elles vont bien. Elles dorment toutes les deux, ce qui est assez rare finalement. Moi ça va, enfin je suis fatigué mais c’est pas très important. Ce qui importe le plus c’est qu’elles soient en parfaite santé et qu’Alex aille bien. » La plupart du temps, il y a au moins une des filles qui est réveillée et qui le fait d’ailleurs bien savoir. Et finalement moi, que j’aille bien ou non, on s’en fiche. La priorité est de loin les filles, et la santé d’Alex. « Et vous trois, comment vous allez ? » Je lui demande en me penchant un peu au-dessus de sa poussette. Lui aussi ses deux enfants dorment et ça semble presque trop beau pour être vrai. Je m’installe sur le banc tout en gardant la poussette à côté de moi et une main toujours sur celle-ci. "Félicitations pour tes fiançailles, d'ailleurs..." Un autre sourire s’étire sur mes lèvres alors que je viens border encore un peu plus mes filles, j’ajuste la position de leur doudou pour qu’elles ne soient pas trop dérangées, et je lui réponds. « Merci beaucoup… » Une main vient se loger dans mes boucles un court instant avant de se poser sur ma nuque. « Ça fait un peu bizarre d’être fiancer… » De nouveau. D’être fiancé une deuxième fois à une autre femme. «… mais je suis tellement heureux. » Et ça se voit d’ailleurs, je passe mon temps à sourire. Non seulement quand on mentionne mes filles mais également quand je parle d’Alex. Et c’est ça aussi, l’amour.
Être père était un rôle difficile certes, mais ô combien satisfaisant au quotidien. Tim en avait passé des nuits à courir après le temps pour pouvoir gérer ses deux enfants tout seuls, un exploit dont il pouvait être fier en vue de son niveau d'énergie retrouvé. En effet, tout n'avait pas été aisé au départ, quand la mère des petits les avait laissés du jour au lendemain, le mettant face à ses propres faiblesses. Il se devait d'être impeccable à partir de là car deux êtres comptaient sur sa force pour s'épanouir et grandir en bonne et due forme. Decastel avait alors tout donné pour eux, quitte à s'épuiser dans la manoeuvre car rien ne comptait plus pour lui que ses enfants. Il savait que Caleb pouvait désormais le comprendre, lui qui était devenu père quelques mois après lui et de jumeaux, de surcroît. Les deux hommes arrivaient donc à ce stade de compréhension mutuelle que Timothy n'aurait jamais pensé pouvoir atteindre en vue du passif de leur relation. Tout n'avait pas été rose entre eux, sûrement parce que Alex s'était retrouvée en plein milieu, que des rancoeurs puériles s'étaient incrustées lorsqu'ils étaient plus jeunes mais tous ces mauvais instants étaient enterrés depuis des années désormais. De son côté en tout cas, Tim n'y pensait plus outre mesure. Il était surtout des plus heureux de constater que ses deux amis avaient retrouvé leur chemin, les voir de nouveau ensemble était une bénédiction et avec des enfants, par dessus le march&. Timothy avait rencontré les petites filles à la maternité quelques semaines auparavant: il avait pu donc d'ores et déjà s'extasier de leur beauté et faire connaissance avec sa filleule. Clairement, il était un tonton gaga au possible au moment de voir Anderson débarquer avec sa poussette, Tim observant les deux puces en train de dormir profondément. Les deux pères étaient-ils en train de vivre leur seul moment de tranquillité de la journée? C'était un fait probable puisque Tim n'avait fait que courir tout le temps pour une peluche perdue, une couche à jeter et tous les embarras du quotidien quand on devait s'occuper de jeunes enfants. Caleb avait l'air épuisé et cela aussi, le brun pouvait le comprendre alors qu'il le saluait et s'inquiétait de l'état de santé de toute la petite famille. "Je suis ravi d'apprendre ça. Elles grandissent bien à ce que je vois... Oh, de mon côté ça va aussi, dire qu'on approche de leurs un an, ça passe si rapidement." Bientôt, les deux terreurs allaient courir dans tous les sens et leur père devrait les suivre aux quatre coins de l'appartement pour les empêcher de faire les pires bêtises. Il n'était pas si pressé finalement alors qu'il invitait Anderson à s'asseoir à côté de lui sur le banc pour qu'ils puissent enfin profiter ensemble du silence tant attendu. "Alex aussi, je dirais... Vous avez commencé les préparatifs, d'ailleurs? Enfin, je sais même pas si vous avez fixé une date. Je sais juste que je dois aider ta chère et tendre pour deux ou trois petites choses, en tant que meilleur ami, ça me tient à coeur de l'aider. Et toi aussi, en plus." Tim était de toute façon trop généreux pour les laisser se débrouiller tout seuls. Il serait là, répondant toujours présent pour le couple. "Vous enchaînez tout avec brio, le couple modèle." De son côté, Decastel les observait avec une certaine admiration: ils s'en étaient sortis, eux, et c'était le plus dans toute cette histoire qui avait été si chaotique dans ses débuts.