Je reviens d’une nouvelle visite d’appartement. Je suis passé devant l’hôpital et j’ai décidé de m’y arrêter pour voir s’il y a des gens que j’apprécie dans le coin. Ce fut un beau bingo parce que Isaac et Hassan sont là. Mon sourire est bien plus large qu’il ne le faudrait mais je les vois bien moins qu’avant cette année. Enfin, Isaac j’ai eu tout le loisir de le croiser à Race of Australia surtout mais dans un cadre un peu plus normal comme le travail, c’est pas chose fréquente. Je reprends le boulot dans quelques semaines et j’ai très hâte. « Voilà vos boissons les gars ! » Et voilà Katherine qui fait irruption. Ca fait longtemps, très longtemps que je ne l’ai pas revu.

« Salut. »
« Salut… »

Je remarque bien qu’il y a une gêne et je sais pourquoi. Je l’ai beaucoup esquivé par le passé. J’avais pas le coeur de voir son ombre car elle ressemble beaucoup à Wendy. C’était mieux comme ça, même si c’était pas juste pour elle. Ça me faisait trop mal. « Je suis désolée, il faut que j'y retourne tout de suite. » Je suis pas sûr de ce qu’elle veut dire. Y’a peut être une urgence ? « Tiens, prends là. » Je prends la boisson qu’elle me tend. « Oh. Merci… » Je m’y attendais pas. Je mérite certainement pas. « A plus tard. » Je la regarde filer sentant que le malaise vient de moi. Je me mordille la lèvre un moment avant de reprendre la conversation avec Isaac et Hassan en espérant qu’il n’y ait pas de malaise en plus.

Une fois qu’ils sont retournés à leurs activités respectives, je continue mon tour de l’hôpital car j’ai pas envie de rentrer tout de suite. Ok je suis en train de chercher Katherine pour lui dire plus que trois mots. J’ai le sentiment de devoir m’excuser. Me justifier. A juste titre cette fois. Je la trouve dans la salle de pause où j’ai sans honte - apparemment - passé la tête même si je ne fais pas parti du personnel médical de la journée. Ni même de ces 12 derniers mois. Je me sens bien ici, j’ose des choses. Ca fait du bien de ne pas douter parfois. « Hey… Merci encore pour le café. » Ca se voit clairement sur mon visage que je l’ai cherché spécifiquement juste pour répéter une chose que je lui ai déjà dit. Je l'ai fini depuis un moment en plus. Le gobelet déjà dans la poubelle de recyclage. « Je te dérange pas ? » Si elle est en pause elle a sûrement mieux à faire qu’écouter un gars qui lui a mis des vents à répétitions y’a 2 ans de ça. Je ne sais pas vraiment quoi dire de plus là, alors j’attends de voir ce qu’elle me répond. Je risque de prendre la poudre d’escampette si je vois que je ne suis pas le bienvenu. Je comprendrais totalement cela dit.

Elle tourne a tête vers moi quand je la remercie et une partie de moi me dit que c’est déjà bien trop de considération qu’elle me donne depuis qu’on s’est croisé juste avant. Moi je l’ai esquivé pendant une poignée d’années plus ou moins volontairement en fonction de la période en question. Quand j’étais à l’autre bout du globe, puis sur la route d’Australie, puis juste pas au boulot, c’était moins voulu.  « Y'a pas de quoi. » Elle m’accorde même une réponse avec des mots. Un sourire aussi. Ce qui me fait sourire aussi du coup. J’apprécie de voir qu’on peut renouer comme ça, même si c’est pas grand chose. J’en reste pour autant assez nerveux de cette interaction et je ne veux pas en plus la déranger dans son travail ou sa pause manifestement. « Non. » Elle est trop gentille.  « Viens, entre. » Vraiment trop. Elle s’arrête dans ce qu’elle était en train de faire pour me faire face. J’entre, sans véritablement savoir où me mettre. « Est ce que je dois comprendre par ta présence ici que ça y est .. je ne suis plus punie ? » J’ouvre de grands yeux en l’entendant dire ça. Mes joues qui deviennent automatiquement rouges.

« Je… Désolé. » Je sais pas quoi dire d’autre que ça. Je comprends que c’est comme ça qu’elle a ressenti la façon dont je l’ai esquivé. « J’étais pas bien, je sais que ça excuse rien et… Je suis désolé. » De l’eau a coulé sous les ponts. Comme quoi, le temps, c’est pas des balivernes. Ca aide vraiment. J’ai toujours une pointe au coeur quand je pense à Wendy parce que mon histoire avec elle était parfaite, et tout s’est envolé du jour au lendemain sans de véritables explications. J’en serai hanté jusqu’à la fin de mes jours. Je comprendrais jamais. Je sais pas si c’est de la chance d’avoir eu bien d’autres problèmes ensuite. Les plaies étaient fraîches pour d’autres soucis et celui de Wendy n’était plus si vif. Mais mes souvenirs de ma relation avec elle font toujours mal car je veux encore ça. Mais juste sans que ça soit qu’une illusion. Avec un sourire gêné, je reprends la parole. « Je suis pas stable comme mec. » Pourquoi je dis ça ? Pourquoi je me rabaisse ? C’est la vérité. Oui, mais quand même, y’a d’autres trucs plus pertinent que j’aurai pu dire. T’es awkward. Nerveux. Oui, mais quand même. T’es con. Oui.

« Excuses acceptées. » Alors ça. Si j’avais su qu’elle serait si compréhensible, peut être que je serai venu m’excuser plus tôt. On va être mener à se croiser au travail quand j’aurai repris. La vérité c’est que je n’avais pas pensé à elle si je ne l’avais pas croisé là. Ma tête est tellement pleine de mille choses. C’est plutôt bien de l’avoir vu aujourd’hui et d’avoir mis ça au claire si simplement en plus. Je préfère pas imaginer comment ça aurait pu se passer au milieu d’une intervention ou entre deux. Ca aurait été moche. « Dis pas ça. Tu as fais ce que tu pensais être le mieux pour toi. C'est tout .. » Oh. J’aurai pas cru qu’elle comprenne si bien vu la façon dont elle a eu de me dire que je l’ai puni. J’ai vraiment cru que je l’avais blessé fortement mais elle comprend en fait. « Tu m'as abordés la toute première fois parce que je lui ressemblais et tu m'as écartés de ta vie dès qu'elle est partie parce que je lui ressemblais. » Je sais pas pourquoi elle fait un résumé de tout ça mais ça me fait bizarre. « Donc .. On n'est pas amis et ça .. c'est tout ce qui nous liait. » J’hoche la tête. « Je suis sûre et certaine que tu ne serais même pas venus me parler si je ne t'avais pas croisés avec Isaac et Hassan tout à l'heure, non ? » Je me sens pris au dépourvu par cette phrase. Je voulais juste la remercier pour le café correctement. Elle s’est sacrifié pour me le donner ce café. « On n'est du coup pas obligés de se voir ni de se parler en dehors des moments où on est avec les autres. Qu'est ce que t'en dis ? » Je suis vraiment très pris au dépourvu. Je pensais pas qu’on allait carrément aller jusque là dans notre mise au point.

« Je… Hmmm… Ok. » Je me pince les lèvres quelques secondes avant de reprendre. « Mais… Sache que ça me dérangerait pas si jamais ça arrivait… » Je suis un peu beaucoup paumé, j’ai l’impression qu’elle dit tout ça pour moi mais une partie de moi ne peut s’empêcher de se dire qu’elle n’en veut en fait pas passer de temps seul avec moi. « Ca m’a fait du bien de te revoir là parce que justement ça m’a fait réaliser que… Ca va. » Je me mords la lèvre inférieure, ne sachant pas trop si j’ai bien fait de dire tout ça ou pas. C’est super délicat et c’est pas comme si on était proche elle et moi. C’est d’ailleurs tout le sujet de notre réflexion là.

Je vois bien qu’elle ne s’attendait pas à mes mots, autant que je ne m’attendais pas aux siens. Au moins, on est un peu dans la même place là tous les deux. « Il n'y a plus qu'a croiser les doigts pour que le hasard nous réunisse au même endroit au même moment de temps en temps. » Oui. Je suppose. Je sais pas pourquoi je trouve ça triste quand même la façon dont elle dit ça. Comme si on avait pas le droit de se voir, ou vouloir se voir. Je sais qu’on n’est pas amis ou quoi que ce soit. On est collègues avant tout mais, je sais pas, cette formulation, je la trouve triste. Peut être parce que je suis un peu triste et chamboulé par cette conversation dans son ensemble. C’était pas prévu. Je me conditionne le mieux que je peux pour pas cogiter pour rien. Oui, c’est exactement ce que je fais là. Je vois des sens dans ses phrases qui n’ont pas lieux d’être. J’en suis sûr. « Si tu t'en ai remis alors, je suis contente pour toi. Vraiment .. » La vie continue. D’autres problèmes prennent le dessus et j’ai visiblement pas la place dans ma tête d’être inquiet pour tout à la fois. Tant mieux. Mais oui, du coup j’ai pu passer à autre chose que l’affaire Wendy. Mais si j’y pense un peu trop longuement, ça fait mal. Heureusement que je sais que Katherine n’est pas Wendy. La preuve, ça va là. Vraiment. C’est une très bonne surprise.

« Et si on recommençait à zéro ? »
« Oh… Oui. Bonne idée. »

Mes yeux qui la regardent, surpris mais curieux de ce qu’elle veut dire par là. Elle tend sa main mais l’enlève aussitôt. Ah ? Elle a un doute ? « Il faut juste que tu me fasses la promesse de ne plus sortir avec une femme qui me ressemble de près ou de loin ou au moins que tu ne m'écarteras plus de ta vie du jour au lendemain. » Elle me taquine. Ou du moins je crois. C’est bon signe à mon avis. Je sais aussi qu’il y a toujours une part de vérité et quelque chose me dit que là, c’est la totalité. Je souris aussi, je ris même un peu (nerveusement peut être).

« Je vais rester célibataire pour un bon long moment donc on devrait être tranquille. » Je ne sais pas combien de temps. Mais ça fait bientôt 6 mois que je le suis. Autant que je n’ai pas eu d’aventure avec qui que ce soit. Je continue comme ça. J’ai plein de choses dans ma vie pour m’occuper au lieu de chercher à être le premier choix pour quelqu’un. Chose que j’ai bien compris, n’arrive jamais. J’ai pas envie de me refaire du mal pour un bonheur temporaire. Dans ma tête, les douze prochains mois sont dans mon plan de célibat à 100%. On verra comment ma vie tourne. J’ai mon appart’ bientôt, plein de changements. Ca va me faire du bien. « Je te promets. » Parce que je reviens sur sa phrase initiale, en tendant la main le premier cette fois. « Et je suis encore vraiment très désolé… » Elle n’avait rien demandé et je comprends que ça blesse. Je déteste ça blesser les gens quand ils le méritent pas. Mais fallait je me sauve moi en premier. C’est ça le truc le plus important pour moi là. Je suis la personne la plus importante de ma vie. Il faut que j’arrête de penser autant aux gens et ce qu’ils pensent de moi. « Je te dois un café. Tu me diras quand tu le veux. » Parce que j’ai bien envie qu’on reste à égalité tous les deux. Pour montrer que j’ai du respect pour elle et je ne profite pas juste de sa générosité alors que je l’ai pas considéré pendant de longs mois.

« N'en parlons plus. » Maintenant que tout est au claire, je suis ok pour ne plus en parler. Elle a dit tout ce qu’elle avait sur le coeur, j’ai expliqué avec tout ce que je pouvais également. Je me sens quand même légitime dans tout ce qu’il s’est passé, bien qu’elle fasse partie des dommages collatéral. C’était pas voulu. Je vais essayer de ne pas y repenser trop longtemps. Je pense que je vais cogiter ça toute la soirée encore, avec d’autres trucs qui vont me venir en tête que j’aurai dû lui dire, parce que, c’est toujours comme ça que ça se passe. Demain ça ira mieux. « Tu ne me dois rien, tu sais. Mais d'accord, je te dirai ! » Ca me fait plaisir qu’elle accepte. C’est une sorte de promesse qu’on va se revoir dans un futur proche et pas forcément pour le travail. Je reprends bientôt et on va forcément se croiser par ce fait, mais le café sera totalement hors d’une intervention. Ca ferait désordre sinon. Je le vois de part son coup d’oeil à sa montre qu’elle arrive au terme de sa pause.

« Je .. Je suis désolée mais il va falloir que j'y retourne. »
« Oh oui bien sûr. »

J’hoche la tête, comprenant tout à fait qu’il faut qu’elle aille travailler. Je sais plus ce que c’est ce concept pour l’instant mais bientôt je serai comme elle. A regarder ma montre pour reprendre dans les temps parce que je déteste être hors des clous. Y’a un règlement, je le respecte à la lettre. Sauf si des collègues que j’apprécie arrivent à m’enrôler dans d’autres retranchements. Oui. Ca arrive. « Ca m'a fais plaisir de te revoir .. C'est cool que tu sois de nouveau dans le coin. » Je lui fais un sourire car c’est exactement pareil pour moi. « Je reprends le boulot dans deux semaines à peu près. On se croisera sûrement. Bon courage pour le reste de ta garde. » Je dis tout ça à la suite comme si j’avais un temps imparti pour placer toutes mes informations mais oui au fond. Elle doit partir et je ne veux pas la déranger plus longtemps. Je sors de la salle de pause avec elle, lui fais un dernier sourire avant de partir dans le sens opposé à elle. Je n’ai aucune idée où je vais mais je voulais juste éviter de marcher à côté d’elle alors que je viens de lui dire au revoir. Y’a eu assez de malaise comme ça entre nous pour aujourd’hui.

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