MAY & CLYDE Kick you when you're down As you're slipping down the wall And you're headin' for a fall As you're slippin' down the wall Why do they kick you when you're down?

Cela faisait désormais de nombreux mois qu’Halsey et Clyde avaient posé leurs valises à Brisbane dans le but de piéger le meilleur des pigeons - la demi-sœur de la brune, Raelyn. Le plan avait dès le départ été mis à mal lorsqu’ils avaient découvert que la blonde était tout sauf la victime crédule qu’ils avaient espéré trouver, et leur petite machination n’avait jamais atteint le stade qu’ils espéraient. Si Halsey avait trouvé un emploi d’assistante juridique pour servir de couverture parfaite à leurs manigances extraprofessionnelles, Clyde appréciait quant à lui réellement le poste qu’il avait réussi à décrocher chez ABC. Le journalisme avait toujours été son boulot, avant même que les arnaques et le chantage ne finissent par faire partie intégrante de sa vie - et pourtant, il ne réussissait plus vraiment à se passer de l’adrénaline provoquée par ces derniers. Le brun avait dû se rendre à l’évidence que les recherches qu’ils avaient faites sur Raelyn ne faisaient que se heurter à des murs toujours plus hauts et dangereux, et que parfois il ne faisait pas bon de se frotter à plus fort que soi - quand bien même il détestait se l’avouer en ces termes. Alors, à défaut, le duo avait dû se replier sur d’autres plans moins ambitieux et moins risqués que celui qu’ils avaient initialement en tête, et Clyde avait donc profité de ses contacts et des nouvelles qui lui parvenaient automatiquement aux oreilles chez ABC pour établir une liste de personnes intéressantes. Certaines d’entre elles n’avaient rien à se reprocher, mais la plupart des gens avaient toujours des secrets ou des pans de leur vie qu’ils ne voulaient pas rendre publics - et il s’agissait là du créneau parfait pour le brun. Plus jeune, il n’avait rien d’autre en tête que de se faire de l’argent à travers ses divers petits coups, mais aujourd’hui, il connaissait la valeur des informations et était volontiers attiré par ces dernières. Car au bout du chemin, les secrets glanés servaient toujours à faire chanter quelqu’un, et à gonfler toujours un peu plus un de ses comptes en banque.

Le nom de May Glitters n’était pas sans être inconnu aux oreilles du brun, encore moins depuis les émissions à succès dont elle avait fait partie au cours de l’année écoulée. Cependant, il ne s’était que récemment intéressé à elle - sans raison autre que le fait qu’elle était une personnalité publique avec une image à maintenir, et que par conséquent elle ne pouvait souffrir de voir de potentiels secrets révélés. Que cela soit tombé sur elle était un pur hasard, car Clyde avait un large panel de personnalités dans ses dossiers, mais les retombées médiatiques liées à May étaient suffisamment importantes pour que son nom ait été directement hissé en haut de la pile d’intérêt du brun. Cela faisait désormais quelques semaines qu’il fouillait tant bien que mal dans la vie de la blonde à l’image parfaite, et c’était par un pur hasard qu’il avait fini par réaliser à la suite d’une filature que May ne semblait plus vivre chez elle désormais, mais chez un écrivain auquel le brun ne voulait rien - pour l’instant, du moins. Il n’avait pas fallu bien longtemps à Clyde pour se glisser dans les serveurs informatiques contenant toutes les adresses dont il pouvait avoir besoin, et réaliser que la maison qu’il avait trouvée au nom de la blonde venait d’être vidée. Curieux. Quelques clics de plus, et le passage des huissiers lui était apparu - autant dire que May n’était donc pas la candidate idéale pour qu’il espère lui soutirer de l’argent, néanmoins, elle devait avoir son lot d’histoires passionnantes à raconter. A l’aide de la bonne pression, évidemment. C’était donc couvert d’une casquette dénuée de tout logo et de lunettes noires que Clyde avait retrouvé le chemin de la villa de Jesse Gibson, bien loin du quartier où il avait ses habitudes, et où sa tête pouvait donc être potentiellement reconnue. La patience était une qualité dont il pouvait faire largement preuve lorsqu’il était déterminé à obtenir quelque chose, et il avait donc sagement patienté de l’autre côté de la rue jusqu’à voir May se glisser sur le pas de la porte. Sans attendre, les pas du brun l’avaient porté à sa hauteur, suffisamment loin pour qu’elle ne craigne pas là une agression, mais tout de même assez proche pour qu’elle ressente la présence de quelqu’un derrière elle. “Très belle villa.” Comme s’il en avait réellement quelque chose à faire. “Dommage pour la vôtre.” Si le ton du brun ne laissait transpirer aucune menace immédiate, et qu’il voulait ses mots posés et calmes au possible, il ne faisait pourtant aucun doute qu’il ne s’agissait pas là d’une visite de courtoisie.

Depuis que May habitait chez Jesse – enfin, était hébergée gracieusement, plutôt – elle avait pris l’habitude d’aller faire un footing presque quotidien avec lui. Alors qu’ils ne se donnaient ce rendez-vous qu’occasionnellement auparavant, elle s’était décidée à le suivre dans ses virées urbaines pour oxygéner ses poumons. Elle avait écouté ses conseils et devait admettre qu’elle respirait bien mieux depuis quelques semaines et qu’elle se sentait plus en forme aussi. Si May avait du mal à accepter sa nouvelle routine, loin de chez elle, dans un premier temps, maintenant, elle se sentait comme chez elle chez son ami et procrastinait en terme de recherche de nouvel appartement. Mais, elle savait qu’il finirait par perdre patience…
De retour de la virée quotidienne, May avait libéré rapidement la salle de bain pour laisser Jesse y accéder. Il devait faire vite puisque Ariel n’allait pas tarder à arriver et qu’il devait se rendre disponible pour travailler avec elle. May n’avait pas bien saisi tous les tenants et les aboutissants de leur collaboration, avait l’impression qu’elle écrivait ses livres pour lui, qu’il arnaquait tous ses lecteurs en réalité, mais elle n’avait pas l’impression d’avoir très bien saisi les enjeux et leur façon de travailler. Alors elle se contentait de faire celle qui n’y comprenait toujours rien pour ne pas s’en mêler. Ce qu’il se passait chez Jesse devait rester ici, c’est tout ce qu’elle avait bien compris.
La blonde était ressortie, se dirigeant vers la colocation de sa fille, avec qui, étrangement, depuis qu’elle était au courant des problèmes d’argent de May, le contact était bien plus facile. Comme si, depuis qu’il n’y avait plus ce secret, les barrières étaient tombées et qu’autant l’une et l’autre s’ouvraient davantage. Une complicité naissante avec sa fille que May n’aurait en réalité, jamais soupçonné. Alors qu’elle marchait sur le trottoir, elle eu la sensation d’une présence derrière elle, rien d’alarmant, elle n’avait pas l’exclusivité des balades en ville, mais ayant l’impression que cette personne marchait plus vite qu’elle, elle jeta un œil derrière son épaule pour la laisser passer. “Très belle villa.” Venait-il de commenter la villa de Jesse d’où elle sortait ? De quoi j’me mêle ? “Dommage pour la vôtre.” Ok. May qui n’avait pas l’intention de le calculer ne pouvait pas rester de glace face à cette seconde remarque. « C’est-à-dire ? » que voulait-il dire par là ?

Le plus souvent, Clyde s’adaptait à son interlocuteur pour diriger la conversation selon les armes que la personne en face lui donnait - ou plutôt, selon les informations, les sourires, les mimiques et tout le langage corporel qui laissait filtrer des émotions. S’il avait bien vu May Glitters jeter un regard en arrière dans sa direction, ce n’était que lorsqu’il l’avait interpellée personnellement qu’elle avait fini par se retourner pour le fixer. “C’est-à-dire?” A en juger par l’air contrit qu’elle affichait et ces quelques mots vagues qui transpiraient pourtant de méfiance et d’interrogation, elle ne tentait même pas de rester de marbre face à ce commentaire qu’elle aurait pu ignorer et laisser filer. Clyde retint un sourire, satisfait d’avoir réussi à attirer son attention si rapidement, là où il s’attendait presque à ce qu’elle s’éloigne sans lui accorder plus qu’un regard. S’il ne savait s’avancer sur la suite et la manière dont elle pourrait bien réagir, il avait pourtant touché juste, et c’était là l’occasion de lui faire comprendre qu’elle avait tout intérêt à lui accorder au moins deux minutes.

Il réajusta donc sa casquette en haussant les épaules, comme s’il n’était pas là pour la menacer mais juste pour constater des faits - ce qui ne dupait personne, pour peu que la blonde soit habituée aux conversations détournées qui cachaient des messages subliminaux et des menaces silencieuses. Elle côtoyait la sphère médiatique, alors Clyde ne doutait pas qu’elle sache lire entre les lignes, justement. “Elle a été saisie, non?” Les meubles avaient été saisis, et non pas la villa, selon ses informations - mais il aimait souvent laisser flotter l’idée qu’il n’avait peut-être pas l'entièreté de la vérité entre les mains. Cela lui permettait parfois d’obtenir des détails qu’il savait faux par avance, et donc de se rendre bien vite compte de la véracité des propos de son interlocuteur, et de la confiance - ou méfiance - qu’il devait lui accorder. “Enfin j’me trompe peut-être, c’est pas le genre de choses qu’ils montrent à la télévision.” Bien sûr que non, puisque May Glitters affichait plutôt une image irréprochable devant les caméras - bien loin de ce que semblait pourtant cacher sa vie personnelle.

May n’avait pas l’habitude de se laisser approcher d’aussi près et si elle avait toujours rêvé de gloire et d’être au devant de la scène, elle n’avait jamais vraiment réfléchis au réel impact que cela pourrait avoir sur sa vie privée. Etonnant lorsqu’on sait qu’elle a casté des dizaines et des dizaines de jeunes personnes à la recherche de notoriété et que ces questions font partis des points abordés lors des castings, la plus part du temps. Comment projetez vous votre célébrité ? Comment pensez vous réagir à cette privation d’intimité ? Et tout le reste. Des questions qu’elle ne s’est jamais posées elle-même.
May était reconnue dans la rue depuis la diffusion de ROA, quelques mois auparavant. Elle s’estimait heureuse d’être du quartier et de connaitre déjà pas mal de monde, on ne lui saurait pas dessus dès qu’elle sortait son nez dehors. Mais dès lors qu’elle allait en dehors de Bayside, les curieux se faisaient plus nombreux. Par contre, devant chez Jesse, c’était bien la première fois qu’on l’abordait. Et on dirait bien que cette approche n’était pas sans intérêt. Bien au courant visiblement des histoires de May. “Elle a été saisie, non?” qui avait bien pu vendre la mèche ? Elle espérait qu’il ne soit pas un ami de sa fille mais vu la dégaine, il y avait peu de chance. May s’arrêta net sur le trottoir, pas la peine de faire un pas de plus sans savoir quelles étaient ses intentions. “Enfin j’me trompe peut-être, c’est pas le genre de choses qu’ils montrent à la télévision.” May regarda autour d’eux, comme par reflex, s’assurant qu’aucune oreille ne pouvait trainer dans le coin. « Qu’est ce que vous me voulez ? Allez droit au but, on perdra moins de temps vous et moi. » elle n’avait pas l’intention de nier ses propos, puisqu’il n’avait pas l’air de bluffer. « Comment avez-vous eu ces informations ? » elle ne manquerait pas de coller un procès à la société qui aura fait fuiter l’information. Ca ne pouvait qu’être un coup de l’huissier ou de la société de recouvrement qui la relançait depuis des années.

Le petit manège de Clyde avait bien vite attiré l’attention de la présentatrice qui s’était figée dans ses mouvements pour se retourner vers lui, sans même qu’il n’ait besoin d’appuyer le fait que ses questions n’étaient pas anodines. Loin d’être stupide, May Glitters se rendait sûrement bien trop compte de ce qu’elle risquait si ce genre d’information fuitait, si bien que le brun nota son regard environnant pour vérifier qu’aucune caméra n’était là pour les épier. Coup de chance pour elle, il tenait dans cette situation-là à être tout aussi discret, et savait donc parfaitement que personne n’était sur le point de les croiser dans cette rue parfaitement déserte à cet instant. “Qu’est ce que vous me voulez? Allez droit au but, on perdra moins de temps vous et moi.” Clyde eut un léger sourire en coin - elle ne niait pas, mais ne confirmait pas non plus. Elle était maligne, même un peu trop pour que le coup du micro planqué sous sa veste puisse réellement fonctionner, mais il n’avait rien eu à perdre à l’installer là en espérant peut-être qu’une ou deux phrases seraient bonnes à enregistrer - pour mieux les rappeler ensuite à la mémoire de la blonde, si besoin.

Pourtant, Clyde laissa flotter un instant le doute sur ce qu’il cherchait réellement à retirer de cette situation, juste le temps de la laisser s’inquiéter encore davantage des desseins qu’il pouvait bien avoir. “Comment avez-vous eu ces informations?” “Certaines personnes parlent facilement.” En l'occurrence, cela n’avait pourtant pas été le cas, Clyde ayant préféré passer par la source directement en allant piocher dans les bases de données des sociétés de recouvrement qu’il ne lui avait pas fallu longtemps pour intégrer. En revanche, puisqu’il ne pouvait très visiblement pas espérer lui soutirer d’argent, il espérait qu’elle fasse partie de ces gens prêts à se confier. “Avec la bonne motivation, évidemment.” Il réajusta une nouvelle fois sa casquette puis tourna légèrement la tête pour scruter les environs et laisser le temps à la blonde de réaliser pleinement qu’il s’adressait bien à elle et qu’il s’agissait là de ce qu’il attendait. Des informations. “J’imagine que vous devez connaître beaucoup d’histoires qu'on ne voit pas non plus à la télé.” Son ton n'était pas menaçant, et dans d'autres circonstances ses mots auraient presque pu paraître anodins, mais cela n'était désormais plus le cas et personne n'en était dupe.

Le nombre de personnes au courant de la situation de May se limitait à trois. Sa fille, Jesse et récemment, elle savait que Norman était dans la confidence. Et elle savait que ni l’un ni l’autre n’aurait pu vendre la mèche, surtout pas à un inconnu. Concernant Norman, même à sa compagnie actuelle, il n’en avait surement pas dit un mot. Il s’agissait de May, cela ne devait pas l’interesser. Il s’était permis d’approcher la blonde pour lui en toucher deux mots et lui proposer son aide, bien sûre qu’elle n’attendait absolument rien de lui. Vis à vie de Jesse, lui qui l’hébergeait depuis plusieurs semaines maintenant, quels intérêts aurait-il eut à aller dénoncer les frasques de la toute jeune présentatrice télévisée ? Leur complicité se faisait douce et de plus en plus certaine, ils s’étaient confiés l’un à l’autre et se faisaient confiance, elle savait qu’il ne la trahirait pas. Puis, Elia avait lâché l’information au détour d’une conversation à son père, sans doute avec le sentiment de détenir un secret bien trop lourd à garder pour elle, May lui en avait voulu un instant, mais elle pouvait tout de même comprendre, mais de là à balancer sa mère en pâture… jamais.
“Certaines personnes parlent facilement.”
Qui donc, alors ? Si ce n’est un salarié même de cette fameuse société qui la harcelait depuis des années ? Elle ne manquerait pas de voir un avocat – quand elle aura renfloué les caisses, bien sûre – pour se défendre contre ces informations qui ont fuité. Et si ça pouvait, en plus, lui permettre de gagner de l’argent, récupérer ce qu’on lui a finalement pris… “Avec la bonne motivation, évidemment.” Et lui, quelle était sa motivation ? Ne savait-il donc pas qu’elle n’avait pas d’argent pour acheter son silence ? « J’imagine que vous devez connaître beaucoup d’histoires qu'on ne voit pas non plus à la télé » C’est ça qu’il veut ? Du potin ? « Je connais rien. Ma place au sein du paysage audiovisuelle n’est que trop récente pour avoir quoi que ce soit à vous donner. » elle le scruta de la tête au pied, peu crédible sous ses airs de touriste dans le coin. « Et comme vous pouvez vous en douter, je n’ai rien pour vous. » pas un sous. « Vous vous trompez de cible. » elle jeta un œil tout autour d’eux, il y avait pourtant dans ce quartier bien d’autres grandes fortunes qui seraient peut-être plus intéressantes pour lui. « Qu’est-ce que vous voulez ? »

L’air de la blonde était plus méfiant que jamais, alors qu’elle écoutait Clyde sans broncher tandis qu’elle était déjà probablement en train de réfléchir et rassembler les informations les unes avec les autres pour comprendre comment elle s’était retrouvée dans cette situation. Certainement qu’elle se passait en tête la revue des personnes ayant pu balancer l’information, ou les moments où elle aurait été un peu trop bavarde - même si elle ne semblait pas vraiment de ce genre-là. En réalité, elle ne se doutait sûrement pas que personne n’était réellement responsable, à part les firewalls de beaucoup de sociétés qui n’étaient pas assez sécurisés. “Je connais rien. Ma place au sein du paysage audiovisuelle n’est que trop récente pour avoir quoi que ce soit à vous donner.” “Je vous ai beaucoup vu à la télé l’année dernière pourtant. Je pensais que vous étiez mieux payée d'ailleurs.” Ou plutôt, suffisamment payée pour ce genre d'émission pour être capable de garder ses meubles. Ses émissions avaient fait du bruit et ROA avait fini d’entériner l’existence de son nom dans le paysage, comme elle disait. Quand bien même cela remontait à une année tout au plus, Clyde savait pertinemment comment les choses fonctionnaient dans le milieu - et il n’y avait pas besoin d’autant de temps pour se faire des contacts à droite à gauche. Il ne demandait pas le numéro privé du président du groupe, évidemment, et nul doute qu’elle avait très certainement quelques informations intéressantes malgré ce qu’elle pouvait bien prétendre.

Clyde était persuadé que l’on pouvait difficilement se faire une place dans le milieu - et surtout, la garder - si l’on n’avait pas un certain poids, qu’il s’agisse de contacts, de pouvoir, d’argent ou d’informations de valeur. “Et comme vous pouvez vous en douter, je n’ai rien pour vous.” En effet, il se doutait bien qu’elle n’avait pas gravi les échelons en graissant généreusement la patte de ceux qui l’avaient placée là, comme son hochement de tête le fit comprendre. Pour ce qu’il en savait, Clyde trouvait qu’elle était même plutôt douée dans ce qu’elle faisait, et cela le rendait d’autant plus désireux d’essayer d’en retirer quelque chose. “Vous vous trompez de cible.” “Je vous rassure, vous n'êtes pas la cible.” C'était plutôt les autres, ceux sur lesquels elle serait prête à parler suivant les bonnes motivations, et surtout qui étaient loin d’être tous blancs. Sans doute qu’elle s’estimait être une cible à sa manière, mais au fond Clyde ne lui voulait aucun mal et il ne la classait donc pas vraiment dans la même catégorie que les autres - elle n’était qu’un pion tout au mieux, d’une grande valeur néanmoins. L’entrée vers un milieu qu’il ne connaissait que trop peu. “Qu’est-ce que vous voulez?” “Ça ressemble à quoi, les cocktails et les soirées dans le milieu?” Est-ce que ça valait le coup qu’il s’y fasse inviter, surtout? Déjà, la réponse se dessinait dans sa tête sans même qu’elle n’ait eu le temps de prononcer un mot.

Il débarque de nulle part, arrive par derrière et l’accoste tranquillement, comme si ils se connaissaient depuis toujours. Comme si c’était normal de parler à des inconnus dans la rue. Les personnes susceptibles de les croiser pourraient se dire qu’ils se connaissent, qu’ils marchent ensemble en discutant, mais May n’avait aucune idée de qui il s’agissait, n’avait jamais adressé la parole à cet individu et ne comprenait toujours pas ce qu’il lui voulait exactement. De l’argent ? Il tomberait bien haut à savoir qu’elle n’avait pas grand-chose à faire pour lui dans ces cas-là. Des informations ? Ca y ressemblait, mais alors, sur qui et sur quoi ? Qu’il ne pense pas que sa récente place auprès des sociétés de productions allaient lui permettre de connaitre tous les potins, May ne voulait rien savoir et se faisait assez discrète de manière générale. Elle voulait sa place devant les caméras, elle l’avait et ne voulait surtout pas la perdre. Bien sûre qu’en réalité, elle avait deux ou trois informations, mais rien de suffisamment croustillant pour être intéressant et surtout, elle ne voulait pas griller sa place qu’elle avait toujours convoité. D’autant plus lorsque ces informations concernent directement ses amis proches. Sofia, en l’occurrence… “Je vous ai beaucoup vu à la télé l’année dernière pourtant. Je pensais que vous étiez mieux payée d'ailleurs.” Beaucoup vu, c’était un grand mot. Il l’avait peut-être aperçu au détour d’un cadrage mal réalisé sur l’émission marié au premier regard, notamment lors de la diffusion du mariage de cet idiot d’Auden mais le rôle de May était bien de rester dans l’ombre à ce moment-là. Et concernant Race of Australia, même si elle était en vedette pour cette émission phare, les quelques semaines de diffusion n’étaient pas suffisantes pour la Glitters. Et d’ailleurs, les croyances sur les salaires des personnalités du petit écran avaient encore bon avenir. « C’est ma première émission, première diffusion pour le programme, bien sûre que non, je n’ai pas un salaire de ministre. » et pourquoi avait-elle cru bon de se justifier ainsi ? Pourquoi avait-elle donné plus de grains à moudre à cet homme qui ne lui voulait vraisemblablement, pas que du bien.
“Je vous rassure, vous n'êtes pas la cible.” Qui donc ? Après qui pouvait-il en avoir ? Le prénom de Jesse lui effleura l’esprit, se demandant s’il lui voulait quelques chose à lui. Elle avait en sa possession quelques secrets qu’elle s’était promis de ne jamais dévoiler et jamais, elle ne trahirait la seule personne qui lui avait réellement tendue la main ces derniers mois. “Ça ressemble à quoi, les cocktails et les soirées dans le milieu?” La blonde afficha un sourire, sourire jaune, ne comprenant pas tellement en quoi sa curiosité mal placée pourrait l’aider. « Vous voulez sérieusement infiltrer ce genre de soirée ennuyante à mourir ? » quelles étaient ses véritables intentions ? « Vous voulez un autographe de votre starlette préférée ? Ca ne vaut plus grand choses, même aux enchères, aujourd’hui. » au final, peut être qu’il n’était pas si à craindre qu’elle ne l’avait pensé.

Si la blonde était effrayée par ses menaces déguisées, elle n’en montrait rien et Clyde devait admettre qu’elle avait un certain cran que beaucoup de personnes auxquelles il avait fait face n’avait pas. Derrière ses airs de pauvre présentatrice ruinée, elle apparaissait bien plus futée que ce qu’elle ne voulait bien faire croire - et rien que pour cela, Clyde croyait moyennement au fait qu’elle n’avait vraiment aucun intérêt à ses yeux. S’il voulait de l’argent, il avait frappé à la mauvaise porte et il le savait avant même de l’avoir approché - puisque c’était pour cette raison précise qu’il en était arrivé à lui parler. En revanche, May affichait un air débrouillard qui lui laissait à penser qu’elle avait ses entrées dans certains endroits, ne lui en déplaise. Elle ne connaissait peut-être pas grand-chose, mais rien sonnait comme un mensonge un peu trop gros à avaler. Malheureusement pour elle, Clyde était un peu trop tenace lui aussi pour la croire sur parole. “C’est ma première émission, première diffusion pour le programme, bien sûr que non, je n’ai pas un salaire de ministre.” “Première émission? C’est amusant, j’aurais juré vous avoir déjà vue ailleurs.” Si elle pensait qu’il ne s’était pas renseigné un minimum sur elle avant de l’aborder, elle le prenait pour un amateur qu’il n’était pas. Instiller le vrai pour espérer que le faux passerait avec - c’était bien tenté. Pourtant, et même s’il n’était pas un consommateur de ce genre d’émissions, il n’était pas passé à côté de sa tête sur les publicités annonçant la programmation des deux programmes auxquelles elle avait participé.

Clyde ne lui voulait aucun mal, et n’en avait même pas après son argent - au fond, elle était probablement sa victime la plus chanceuse et elle n’en avait même pas conscience. “Vous voulez sérieusement infiltrer ce genre de soirée ennuyante à mourir ? Vous voulez un autographe de votre starlette préférée ? Ça ne vaut plus grand chose, même aux enchères, aujourd’hui.” La plaisanterie n’en était pas une, mais elle tira un sourire au brun. “Il n’y a pas que l’argent, vous savez.” Il s’agissait de la finalité, certes, mais elle savait pourtant sûrement que certaines informations avaient bien plus de valeur qu’un simple bout de papier. “Et le côté bling-bling de ce genre de soirée m’a toujours intrigué.” Pas pour y tenir des conversations particulièrement profondes, il pouvait au moins lui accorder ça. “Je compte sur vous pour penser à moi la prochaine fois.” Lors de la prochaine soirée mondaine, mais également à tout moment tandis qu’elle se retournerait son visage en boucle dans sa tête, cherchant à savoir ce qu’il pouvait bien attendre d’elle exactement. Avant qu’elle n’ait pu lui répondre, il avait filé, enfonçant sa casquette sur ses yeux avant de tourner au coin de la rue et de rejoindre sa moto garée un peu plus loin.