| The hero and the coward both feel the same thing [Jarchie] |
| | (#)Jeu 10 Déc 2020 - 4:37 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. « Vous faites quelque chose, ce soir ? C’est vendredi quand même. » Demande l’un des garçons installé à la table derrière Archie. Le principal interpelé garde ses deux yeux rivés vers l’enseignante en marmonnant quelques mots incompréhensibles, le bout de son crayon coincé entre ses dents. Son ami à sa droite hausse les épaules et pose son regard sur Archie, attendant sa réaction. Mais il continue de fixer la femme devant la classe alors qu’elle inscrit des dates sur le tableau vert. Quelques secondes plus tard, il reçoit une boule de papier à l’arrière du crâne et il réagit finalement. « Quoi ? » Il souffle sans se tourner, avant qu’on ne lui demande une seconde fois s’il est occupé après les cours. Reposant son crayon sur son carnet de notes, il secoue la tête de droite à gauche pour finalement la basculer de bas en haut comme s’il venait de se rappeler qu’il a effectivement quelque chose de prévu. « Ouais, c’est l’anniv’ de ma p’tite sœur. Je dois rentrer à dix-huit heures. » Quelques ricanements moqueurs. « C’est pas moi qui ai choisi, hein, commencez pas. C’mes parents qui veulent que j’sois là. » Il trouve des excuses, bien qu’il ne refusera jamais de passer une soirée avec ses sœurs précieuses. « Faites quelques chose si vous voulez mais vous aurez pas ma bagnole. Et faites pas genre que vous vouliez qu’sorte avec vous seulement pac’que j’suis de bonne compagnie. Faudra qu’un de vous passe le permis un jour, j’sais pas c’que vous ferez sans moi quand j’crèverai. » L’enseignante pose sa craie sur son bureau et se racle la gorge pour attirer l’attention des quatre garçons qui se sont mis à discuter comme si le cours d’histoire était terminé. « Messieurs, j’espère que je ne vous dérange pas trop. L’un de vous pourrait répéter ce que je viens de dire ? » Ils s’échangent tous un regard, sauf Archie qui se contente de ricaner, un sourire fier étirant ses lèvres, dévoilant une rangée de dents blanches. « Eux non mais moi si. Vous parliez des cinquante mille soldats qui ont donné leur vie pour l’Australie pendant la première guerre mondiale. Ainsi que de la centaine de millier de blessés. Je voudrais bien vous refiler d’autres statistiques et chiffres mais je ne suis pas là pour faire votre boulot, madame. » Il obtient un regard noir mais, déstabilisée, la femme devant la classe ne fait que balayer l’air du revers de la main avant de se tourner à nouveau face au tableau qui accueille ses notes. « On se reprendra la semaine prochaine, les mecs. » Archie conclue dans un murmure en reprenant son crayon pour se remettre à griffonner les informations importantes qui sortent de la bouche de l’enseignante, celles qui lui permettront d’avoir toujours les meilleurs résultats scolaires.
À seize heures, le cours se termine et tous les élèves accourent et créent la foule à la sortie de la classe. Tout le monde semble s’être réveillé maintenant que le week-end se présente à eux. Archie salue ses potes d’une tape sur l’épaule et se dirige à contre-courant vers le gymnase. Il a pris soin d’apporter avec lui sa tenue de sport ainsi que son équipement de boxe. Il ne lui suffit que de quelques minutes pour se changer et retrouver son précieux sac rempli de sable. Saluant du regard le responsable des sports qui passe par là, il enroule autour de ses poignets les bandages qui maintiendront en place chaque os dans sa main. « Tu ne restes pas après dix-sept heures, hein, Archie ? » L’homme demande en rangeant son équipement. « Promis. » Le concerné répond, les yeux brillants de malice, alors qu’il tape un premier coup dans le sac de boxe qui rebondi. « Je compte sur toi pour t’assurer qu’il n’y a plus personne à ta sortie. La clef est à la même place que d’habitude. » Il hoche la tête sans le regarder, ses deux yeux rivés vers son adversaire en faux cuir. « Yep. » Il ignore la dizaine d’autres sportifs qui parsèment le gymnase, concentré à dépenser toute l’énergie qu’il a accumulée en lui durant la journée.
Dernière édition par Archie Kwanteen le Mar 15 Déc 2020 - 3:47, édité 2 fois |
| | | | (#)Mar 15 Déc 2020 - 3:22 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. « Je voudrais bien vous refiler d’autres statistiques et chiffres mais je ne suis pas là pour faire votre boulot, madame. » La voix de l'adolescent s'éleva à travers la salle de classe pour aussitôt tirer à l'ensemble des élèves quelques rires et des « oh » fascinés par le bagout du garçon. James, lui, ne réagit pas et posa son stylo à coté de sa feuille en soupirant le temps que le cours veuille bien reprendre. Il était le seul ici à ne jamais s'étonner des interventions d'Archie Kwanteen, car c'est bien sa voix qu'il aurait reconnu entre mille lorsque ce dernier avait tenu tête à l'enseignante pour le plus grand plaisir de leurs camarades. Le seul, parce qu'il était lui-même le plus souvent victime des tours que l'adolescent pouvait entreprendre pour se faire remarquer et admirer des autres élèves, que ce soit ici quand il n'avait aucun mal à avoir le dessus sur une adulte ou à chaque récréation quand ses amis et lui venaient le trouver. « C'est fou, il a vraiment peur de rien Archie. » Katie, l'une des deux rares élèves de sa classe à lui adresser la parole, était comme beaucoup d'autres filles fascinée par le tempérament du garçon. Au même titre que Teresa, qui chuchota à son tour. « Moi je le trouve carrément craquant. » La scène tira un nouveau soupire à James, qui garda pour lui ce qu'il en pensait réellement et attendit la sonnerie avec impatience tandis que le cours put reprendre. Lorsqu'enfin la journée s'acheva et que la classe se vida, James sentit deux mains se déposer sur ses épaules et ralentit le pas lorsque Katie se glissa à ses cotés. « Tu rentres directement chez toi, James ? » L'adolescent secoua la tête. « Non, j'ai un truc à faire avant. » Et elle le connaissait assez bien pour savoir que s'il n'entrait pas dans les détails, c'est qu'il avait ses raisons. James était du genre discret, elle ne l'ignorait pas. « Sinon on peut aller chez moi. Mes parents rentrent tard, on aura la maison pour nous tous seuls. » Son regard se mit à fuir celui de la jeune fille, dont le ton de la voix trahissait ce qu'elle avait en tête. Des avances à peine déguisées, Katie lui en faisait depuis des semaines et chaque fois James faisait mine de ne rien remarquer. Mais plus le temps passait, moins elle devenait subtile. « Désolé, 'faut vraiment que j'y aille. » Et il disparut avant même que l'adolescente n'ait le temps d'insister, passé maître dans l'art d'éviter ce genre de situations depuis que certaines filles se méprenaient sur la nature de son intérêt pour elles. Elle était jolie, Katie, mais c'est tout.
Et il aurait suffi à l'adolescente de lui emboîter le pas jusqu'au gymnase pour comprendre qu'il ne regardait pas vraiment les filles de leur classe de la même façon que les autres garçons. Parce qu'ici, dans ce temple de la testostérone, James était bien plus troublé que n'importe où ailleurs. Ses yeux ne s'attardaient chaque fois que rarement sur les lieux en eux-mêmes et glissaient toujours secrètement jusqu'aux silhouettes des jeunes sportifs tapant avec vigueur dans les sacs de boxe. Il prétendait pourtant toujours avoir une excellente raison d'être ici, devenant juste de plus en plus doué pour prétendre n'avoir aucun intérêt à pousser ces portes juste pour le plaisir qu'il avait à profiter de ce genre de visions. James se savait attiré par les garçons depuis le milieu de son adolescence, mais c'était bien différent de le crier sur tous les toits et cette attirance bien plus facile à assumer loin des parois du lycée. Les papillons dans son ventre, eux, redoublèrent d'intensité lorsqu'un garçon encore en sueur d'avoir boxé pendant de longues minutes passa près de lui sans même remarquer son trouble. James retrouva ensuite sa place habituelle, celle qu'il occupait dans un coin du gymnase pour se faire chaque fois aussi petit que possible. Il voulait juste comprendre ce qui l'attirait à ce point chez ces êtres pourtant dépourvus de la moindre grâce et de la moindre délicatesse. Ils tapaient dans ces sacs comme des brutes, crachaient et sifflaient les filles sur leur passage. Mais dieu qu'ils étaient attirants, quand leurs cheveux humides retombaient sur leur front et que des gouttes de sueur coulaient le long de leur dos. « Eh, toi. » Une voix grave résonna sur sa droite et James eut à peine le temps de tourner la tête qu'un garçon braqua son regard sévère dans le sien. « Qu'est-ce que tu fous ici ? T'es venu boxer ? » S'il s'étonna qu'il puisse poser la question en voyant bien qu'il n'avait ni sac de sport ni l'allure d'un boxeur, James se contenta de mouver la tête. « Non, je viens juste accrocher des papiers sur le tableau d'affichage. Je fais partie du journal du lycée et on organise un concours d'écriture. » Ça, c'était le prétexte d'aujourd'hui. Et si le type voulait une preuve, il trouverait de quoi lui en fournir une. Il n'était dans aucun club, aucun journal, mais ses amies oui. « Un concours de... sérieux, t'es trop bizarre. Eh, les mecs, quelqu'un connaît ce gars-là ? » C'était tout ce qu'il voulait éviter et James déglutit à la seconde où son regard accrocha celui du seul boxeur qu'il sache formellement identifier. Et pour cause, la même rage et la même détermination brûlaient dans ses yeux chaque fois qu'il s'en prenait à lui.
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| | | | (#)Mer 16 Déc 2020 - 2:16 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Il est dans son élément, l’adolescent en recherche d’adrénaline et d’action pour s’essouffler avant de rentrer chez lui et ainsi redevenir le gentil garçon devant ses parents. La brûlure se fait de plus en plus enivrante dans ses poignets au fur et à mesure qu’il envoie ses poings valser dans son sac de boxe mais il l’apprécie, cette dernière, parce qu’elle lui permet de sentir son corps, sa présence au milieu de ce gymnase rempli d’élèves tous dans leur bulle. Après seulement dix minutes, il se voit obligé de retirer les écouteurs de ses oreilles afin de plus facilement se débarrasser de son t-shirt déjà trempé par l’effort. Il profite de ce moment pour jeter un coup d’œil autour de lui, sur l’horloge accrochée au mur afin de s’assurer que le temps ne passe pas plus vite que prévu, puis sur une silhouette qui se fraie un chemin dans la grande salle de sport. Il la reconnait aussitôt, la tignasse bouclée de James. Il esquisse un sourire et pose sa bouteille d’eau contre ses lèvres avant d’avaler quatre, cinq généreuses gorgées sans détacher ses yeux du visiteur. Évidemment, il se demande ce que ce maigrichon fait là, lui qui n’a jamais montré d’intérêt pour les activités sportives et qui est toujours le dernier choisi lors de la formation d’équipe en cours de sport. Mais il n’a pas assez d’énergie pour dire quoi que ce soit alors il essuie vaguement la sueur sur son front avec son t-shirt devenu une serviette improvisée. En se mordant le bout de la langue, il glisse à nouveau ses écouteurs dans ses oreilles puis range son précieux Ipod Nano rouge dans la poche de son short. Quelques secondes plus tard, il se remet à taper comme si sa vie en dépendait, gardant l’un de ses poings toujours surélevé devant son visage pour se protéger d’une éventuelle attaque, comme il a appris lors de ses leçons de boxe privées hebdomadaires. Il tape au rythme de sa chanson, ralenti lors des couplets et accélère au refrain.
Il aurait pu passer les trente dernières minutes de son entrainement à dépenser son énergie sans accorder la moindre importance à ce qu’il se passe autour de lui mais, entre deux mélodies, il entend une confrontation près du tableau d’affichage sur lequel sont accrochées des paperasses, surtout des publicités pour de l’équipement sportif. Sa curiosité maladive le pousse à retirer ses écouteurs pour une deuxième fois, délaissant AC/DC. « Non, je viens juste accrocher des papiers sur le tableau d'affichage. Je fais partie du journal du lycée et on organise un concours d'écriture. » Les yeux d’Archie balaient les mains vides de James et il hausse un sourcil. Il lui laisse le bénéfice du doute puisque son sac se trouve encore sur son dos. Pourtant, il ne peut s’empêcher de ricaner à l’évocation d’un concours d’écriture parce qu’il n’attendait pas moins de la part du pédé. Évidemment qu’il est un littéraire, comme toutes les filles timides de la classe. Jason, le principal interlocuteur de boucle d’or, interroge les usagers du gymnase afin de savoir si quelqu’un connait ce type qui ne se trouve pas du tout dans son élément. Archie croise le regard de celui de James et il hausse un sourcil, l’air moqueur. « Yep. Et je ne suis pas surpris d’apprendre qu’il aime bien jouer avec des crayons. » Il lance, restant à sa place, n’ayant pas vraiment l’intention de s’approcher du petit groupe qui s’est formé près de James. « Et il aimerait bien jouer avec nos queues, aussi ? » Renchérit Jason, encouragé par quelques rires. De son côté, Archie se pince les lèvres et repose son attention sur son sac rempli de sable avant de le taper une fois, deux fois, gardant son ouïe attentive à ce qu’il se passe à quelques mètres de la porte de sortie. « T’es venu mater ? » Demande un autre boxeur qui retire lentement les bandages autour de ses mains en s’approchant dangereusement de James pour le toiser. « Vas-y, sors le petit papier de ton sac, on veut voir ce fameux concours que tu nous as si bien vendu. » Archie les observe du coin de l'œil.
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| | | | (#)Mer 23 Déc 2020 - 4:28 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Il n'avait rien à faire ici et il le savait. Cet univers n'était pas le sien et il ne se reconnaissait en aucun de ces sportifs dont les corps se recouvraient de sueur à mesure qu'ils tapaient frénétiquement dans ces sacs. Leurs silhouettes semblaient ancrées dans le décor, il ne manquait qu'une jolie cinématographie et un léger ralenti pour en faire une scène digne d'une publicité pour une marque de survêtements. James s'y verrait bien, mais en spectateur. Et parce que les voir boxer lui faisait chaque fois quelque chose, à lui qui déjà relevait le nez de ses carnets de croquis pendant les réactions pour les observer d'un coin à l'autre de la cour. Certains étaient au lycée avec lui, d'autres plus vieux et ça n'était qu'une autre des raisons pour lesquelles il se faisait aussi discret que possible chaque fois qu'il mettait les pieds ici. Il ne voulait pas être vu, reconnu, au risque de le payer ensuite dans les couloirs du bahut. James savait ce que ces types penseraient en le voyant traîner dans le coin avec son allure d'intellectuel et d'original. Il savait quelles insultes ça lui vaudrait encore, si on se mettait à penser qu'il n'était pas là par attrait pour la boxe. Et il pourrait difficilement leur donner tort, n'éprouvant au mieux qu'une certaine curiosité pour ce sport dont il savait peu de choses à part, c'est vrai, que ceux qui le pratiquaient étaient toujours séduisants lorsqu'ils se défoulaient sur ces sacs. Elle était là la vraie raison de sa venue, et il en avait bien trop honte pour l'assumer auprès de qui que ce soit. Il ne dirait pas à son père qu'il avait passé une heure à traîner dans ce gymnase, lorsqu'il rentrerait ce soir. Il ne le dirait pas à ses amies, demain en arrivant au lycée. Parce qu'il était aussi conscient de son attirance pour les autres garçons que du fait qu'il avait intérêt à la taire le plus longtemps possible. S'il attendait quelques années, il aurait trouvé un logement avant que son père ne puisse le mettre dehors et aurait quitté le lycée avant que ses seules amies ne puissent lui tourner le dos. S'il attendait, il souffrirait moins de voir tout le monde le rejeter pour ce qu'il était. Est-ce qu'ils le feraient vraiment ? Peut être pas, mais ça restait sa plus grande crainte.
Sa quiétude ne dura qu'un temps et dès l'instant où il fut repéré par un des garçons du gymnase, James comprit qu'il aurait du mal à s'échapper de l'étau qui se referma sur lui. L'excuse du tableau d'affichage ne prendrait pas éternellement, ce n'était qu'une parade pour gagner du temps et le regard dur du jeune homme en face de lui ne laissait rien présager de bon. « Yep. Et je ne suis pas surpris d’apprendre qu’il aime bien jouer avec des crayons. » Comme un peu plus tôt en salle de classe, James reconnut la voix s'élevant à quelques mètres de là et croisa le regard d'Archie Kwanteen sans un mot. Habituellement, l'adolescent aurait pris part réjouissances et l'aurait bousculé sans ménagement, mais ici son attitude était plus en retrait et il ne semblait pas aussi pressé de marquer sa position de force qu'en présence de ses copains entre deux heures de cours. « Et il aimerait bien jouer avec nos queues, aussi ? » James s'efforça de rester aussi impassible qu'il avait appris à l'être les nombreuses fois où il avait déjà fait les frais de ce genre de remarques. Autre contexte, même envie d'humilier. « Vas-y, sors le petit papier de ton sac, on veut voir ce fameux concours que tu nous as si bien vendu. » L'adolescent se pinça les lèvres et quitta le regard de son interlocuteur au moment de plonger sa main dans son sac pour y trouver de quoi crédibiliser cette histoire de concours. Il mentait à ce propos comme il mentirait ce soir à son père s'il affichait des bleus ou des traces comme ceux qu'il avait l'habitude de ramener du lycée. « C'est un concours de nouvelles. » Ses doigts se refermèrent avec nervosité sur le bout de papier, une affiche qu'il avait récupéré un peu plus tôt auprès de Katie – elle comptait sur lui pour l'afficher à l'entrée du lycée, il avait simplement choisi d'en faire un autre usage. « Les élèves font parvenir leur texte et les meilleurs seront publiés. Le thème est précisé sur la feuille, et... » James tendit fébrilement le papier au jeune homme. « Y'a juste les noms des personnages qui sont imposés. » Les sourires moqueurs se dessinant sur les visages des sportifs qui l'entouraient lui ôtèrent le moindre soulagement qu'il aurait pu éprouver à l'idée d'avoir su un peu mieux amené son mensonge que prévu. « Eh, il nous raconte pas de conneries, c'est bien marqué que les personnages doivent s'appeler Luke et Ryan. Vous en pensez quoi les mecs ? Moi, je me sens comme inspiré tout à coup. » Le garçon en face de lui broya le papier entre ses mains et en fit une boule qu'il fit rebondir d'une main à l'autre. « Ouais, je suis sûr que ce Luke c'est un petit vicieux qui se planque dans les gymnases pour mater des mecs. Il en pince pour Ryan, vous pensez ? » Plusieurs rires s'élevèrent autour de lui tandis qu'ailleurs dans la salle, beaucoup continuaient à boxer sans même prêter attention à la scène qui se jouait. « C'est clair. Sauf que Ryan lui c'est pas une tantouze. Alors il va le remettre à sa place comme on devrait le faire avec ce genre de mecs. » Son regard glaçant, James ne l'oublierait pas de si tôt. Pas plus que la violence avec laquelle les mains désormais libres du jeune homme s’agrippèrent à son col pour le plaquer dos contre le tableau d'affichage. Le choc le secoua des pieds à la tête. Il devint blanc, mais ne cilla pas. Agité comme un vulgaire sac, il n'entendit plus rien à part les rires qui continuaient ici et là. « Quelqu'un veut s'amuser sur un vrai punching ball ? 'Faut lui en donner pour son argent maintenant qu'il est là. » A présent, James songeait que tout aurait été mieux que de pousser les portes de ce gymnase, y compris passer le reste de l'après-midi avec Katie.
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| | | | (#)Jeu 24 Déc 2020 - 2:57 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Pourtant, alors qu’il est souvent le déclencheur d’hostilités, Archie se fait plutôt absent tandis que trois boxeurs encerclent celui qui fait tache dans le décor. Il observe de loin comme un vautour qui attend que les hyènes terminent d’avaler leur festin. Il esquisse des sourires moqueurs aux réparties de ses camarades et, pour s’assurer de ne pas louper le moindre détail croustillant de la petite parade, il s’est dégagé de quelques centimètres autour de son sac de sable pour y faire face et il n’a pas remis ses écouteurs sur ses oreilles. S’il a évoqué en premier l’homosexualité refoulée de James, c’est seulement parce qu’il est celui qui alimente les rumeurs depuis qu’il a posé le grappin sur cette proie facile. Depuis que le bouclé l’a remballé quand ils se sont rencontrés le premier jour dans le carré de sable et qu’il s’est montré solide pour un petit garçon vêtu de pantalons trop serrés. Il a besoin de le casser un peu, de le fragiliser, pour lui faire regretter de s’être montré aussi confiant. « C'est un concours de nouvelles. » Un gloussement clair s’échappe des lèvres d’Archie et il secoue la tête de droite à gauche, hilare. Il tape le sac, une fois, deux fois, l’oreille attentive. « Les élèves font parvenir leur texte et les meilleurs seront publiés. Le thème est précisé sur la feuille, et... » Il n’est finalement pas si futé que ça, le jeune Weatherton – et ne demandez pas pourquoi il connait son nom de famille, c’est seulement parce qu’il a pu le lire sur les copies d’examens qu’il rendait aux professeurs qu’ils ont en commun. Il s’enfonce dans un trou déjà bien profond en imposant aux sportifs des informations avec lesquelles ils se torcheraient le cul. La plupart des garçons qui veulent prouver leur masculinité n’afficheront aucun intérêt pour les arts. C’est le cas d’Archie, qui continue de dépenser son énergie en imaginant la tête de James à la place de son sac de plus en plus ramolli par les coups répétés et calculés – il ne fait qu’imaginer parce qu’il n’est pas du genre à faire saigner ses proies. Il les martyrise au gré d’attaques littéraires et d’insultes (ça ferait presque de lui un artiste, ironiquement).
« Ouais, je suis sûr que ce Luke c'est un petit vicieux qui se planque dans les gymnases pour mater des mecs. Il en pince pour Ryan, vous pensez ? » À nouveau, la répartie de la brute lui arrache un rire et il est accompagné de ceux des autres spectateurs qui ont tous ralenti leur rythme pour suivre la pièce de théâtre qui se déroule tout prêt de la sortie. C’est bien fait, pense Archie, déstabilisé à l’idée d’imaginer les yeux de James posés sur lui sans qu’il ne s’en rende compte. Pervers. « C'est clair. Sauf que Ryan lui c'est pas une tantouze. Alors il va le remettre à sa place comme on devrait le faire avec ce genre de mecs. » Il aurait aimé rigoler une énième fois mais la suite étire ses traits en une surprise. Il attrape son sac de sable pour l’immobiliser. Il retirer un gang, puis un second, et commence à dérouler le ruban serrant son poignet. Il garde ses deux yeux rivés vers la bande : James vole à quelques centimètres du sol, pendu à la poigne costaude de son agresseur. La vision dérange Archie qui fait quelques pas en leur direction. « Quelqu'un veut s'amuser sur un vrai punching ball ? 'Faut lui en donner pour son argent maintenant qu'il est là. » La réponse austère d’Archie découpe la vague de rires qui s’élève dans la grande salle. « Davis ! Pose-le. » C’est comme si le roi venait de parler. Un silence pesant s’installe entre toutes les silhouettes qui semblent figées dans le temps. Pourtant, l’interpelé ne réduit pas la pression qu’il exerce contre le cou de James. « Qu’est-ce que t’as, Archie ? Je pensais que tu serais le premier à profiter de l’offre ! » Le ton de sa voix est à la fois inquiet et amusé. Une sorte de mélange incertain qui caractérise les brutes sans cervelle. « Je suis responsable du gym après dix-sept heures. Si vous tachez les murs avec son sang, c’est moi qui payerai le prix. » Il s’arrête à quelques centimètres du duo ennemi : tous les autres se sont légèrement éloignés, visiblement mal à l’aise devant ce retournement de situation inattendu. « Pose-le, j’ai dit. » Mais la brute soutient son regard, ses sourcils se fronçant de plus en plus. Il ne veut pas céder si facilement, lui qui menait la danse quelques secondes plus tôt. Au bout de ses poings, James devient de plus en plus violet, ses poumons quémandant probablement un peu d'oxygène. Mais Archie ne lui accorde pas un seul regard, au pédé, parce que ce n'est pas lui qu'il veut sauver mais bien la confiance qu'il a gagnée auprès des responsables de l'école - ça, c'est ce qu'il vous fera croire.
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| | | | (#)Mer 30 Déc 2020 - 1:54 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. S'il avait tout fait pour rester aussi discret que possible, force est de constater qu'aucun de ses efforts n'aurait rien changé au fait qu'il ait tout sauf l'air à sa place, ici. Il suffisait de le voir, lui, puis de porter son regard sur ces boxeurs pour comprendre que ça n'était pas son monde et qu'il ne pourrait jamais le faire croire à qui que ce soit. A partir de là, ça n'était qu'une question de temps avant qu'il attire l'attention de quelques brutes en mal d'adrénaline – taper frénétiquement dans des sacs de sable ne leur suffisait pas, de toute évidence – et devienne la cible de brimades auxquelles il était habitué. La différence, c'est qu'ici il n'était pas dans la cour du lycée et qu'il suffirait d'un rien pour que la situation dérape dans l'indifférence de l'ensemble des sportifs présents dans le gymnase. Parce que James n'était pas idiot, il devinait qu'ici la solidarité masculine régnait en maîtresse et qu'à la façon dont on le fixait, lui, personne ne le considérait comme son égal. Il y avait des sourires moqueurs, des regards emplis de dédain et maintenant ce petit groupe qui se formait tout autour de lui comme un piège prêt à se refermer. S'il avait voulu fuir, s'il y avait probablement pensé un instant, ça ne lui était plus possible. Or ça l'embêterait, James, de rentrer chez lui tout à l'heure couvert de bleus qu'il ne saurait pas comment justifier auprès de son père. Ça l'embêterait de devoir lui mentir, encore, pour ne pas qu'il s'inquiète et voit son fils comme un martyre pointé du doigt pour ses différences. Il le sentait, pourtant, que l'étau se resserrait et que cette histoire de concours n'avait fait qu'offrir à ces garçons l'excuse qu'ils attendaient pour s'en prendre à lui. Puisqu'il était définitivement étrange, puisqu'il ne ressemblait en rien à ce qu'il se devait d'être, il n'y avait pas de mal à le secouer un peu. Un poing resserré autour du col de son t-shirt, James avait à peine eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait qu'il s'était retrouvé à plusieurs centimètres du sol. La poigne de son bourreau déjouerait n'importe laquelle de ses tentatives pour se libérer, et son visage lui avait déjà changé de couleur.
Pourtant, alors qu'il ne pensait entendre que des rires entrecoupés d'insultes pendant tout le temps où on éprouverait le besoin de l'agiter comme un pantin pendu au bout d'un fil, une voix se fit subitement entendre et James crut rêver au moment où il reconnut le timbre d'Archie. En temps normal, c'est lui qui l'aurait bousculé devant ses amis et lui aurait dit tout le mal qu'il pensait de ses tenues, de sa coiffure ou de sa façon d'être. En temps normal, il se serait trouvé de l'autre coté, près de ceux qui riaient de le voir blêmir et se décomposer. Pourtant, ici, il était le seul à réagir. Le seul à donner de la voix pour faire cesser ce cirque et ça avait tout de surprenant, tout de troublant aussi. « Pose-le, j’ai dit. » Les yeux de Davis fusillèrent Archie sous les regards tantôt interloqués, tantôt craintifs des autres sportifs et d'un James incapable du moindre mouvement. « Ça va, on veut juste s'amuser un peu, je te promets qu'on va pas lui abîmer sa jolie petite gueule. » Et James savait que dans ce genre de cas de figures, on frappait là où on était sûr que les marques ne se remarqueraient pas au premier coup d’œil. Lui laisser une trace au beau milieu du visage n'étant dans l'intérêt de personne ici. « Allez Archie, lâche l'affaire et va voir ailleurs si j'y suis. » Et tout à coup, le blond fut tétanisé non plus seulement à l'idée de ce que Davis et ses copains pourraient lui faire, mais à celle qu'Archie décide de le laisser seul avec eux. Car tout à coup James se surprenait à se raccrocher à cette présence qui lui évitait de trop penser à la douleur qui se répandait dans le haut de son corps. Son regard cherchait le sien sans le trouver, comme on chercherait un rempart dans la nuit. « Toi, fouille dans son sac. Je veux savoir ce qu'il trafique ici. » Davis ordonnait et ses disciples, eux, s’exécutaient dans la seconde. Il était visiblement tout puissant entre ces murs, et James se demandait s'il éprouverait un jour le même sentiment où que ce soit. Un des garçons renversa son sac sur le sol et se mit à fouiller parmi son contenu. « Y'a rien à part des cahiers de cours et... putain, c'est quoi ces trucs ? » Le garçon récupéra son carnet à croquis sans savoir ce qu'il tenait exactement entre les mains tandis que rien de ce qu'il avait sous les yeux ne devait lui sembler familier. « On dirait des dessins. Des dessins de bonnes femmes avec des robes bizarres, je pensais que c'était les mecs son truc ? » Ce qu'il prenait pour des « dessins de bonnes femmes », c'était rien de moins que des esquisses de créations, des silhouettes habillées de robes qu'il aimerait un jour réaliser pour de vrai. Il baignait dans l'univers de la mode depuis petit et était fasciné par ces femmes qu'il voyait défiler pour son grand-père à l'époque. « C'est son truc. Ce mec c'est juste un tordu. » Le regard de Davis croisa le sien et les muscles de James se raidirent un peu plus. Bien sûr que c'était les garçons qui l'attiraient et qu'il n'y avait encore que son père pour ne pas le voir. Bien sûr qu'il tendait le bâton pour se faire battre quand il venait ici dans l'espoir de cultiver cette attirance sans pourtant nuire à personne, juste parce qu'il se retrouvait bien seul quand contrairement aux autres garçons, il ne pouvait pas essayer de se rapprocher d'un camarade du lycée sans risquer d'être mis en pièce. Il n'avait personne à qui se confier et certains jours, il aimerait juste pouvoir se convaincre que sortir avec une fille ne devait pas être si mal, au fond. Il n'était pas obligé d'éprouver quoi que ce soit et il ne s'en sortait pas si mal pour éconduire Katie en douceur, jusqu'ici. « Alors Archie, en tant que responsable t'es sûr que t'as envie de laisser traîner un taré pareil dans le gymnase ? Je suis sûr qu'il attend juste qu'on aille aux vestiaires pour nous y espionner. » Il aimerait les contredire, il aimerait assurer à Archie que c'était faux et qu'il serait reparti comme il le faisait d'habitude sans faire plus que les observer boxer. Il voudrait l'implorer de ne pas le laisser aux mains de ces brutes épaisses, mais l'air qui parvenait péniblement jusqu'à ses poumons ne lui permettait pas de parler.
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| | | | (#)Mer 30 Déc 2020 - 3:04 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Si quelques garçons dans le gymnase ont baissé la tête lorsqu’Archie a monté le ton, ce n’est pas le cas de Davis qui a toujours eu une personnalité de délinquant – une personnalité semblable à celle d’Archie. C’est dans leur nature à tous les deux de vouloir faire les règles et de rabaisser les gens différents dans le simple but de se retrouver sur le haut du podium. Tous les deux ne pourront jamais s’entendre parce qu’ils alimenteront une lutte éternelle. Ils sont deux pôles négatifs, des courants qui vont à contresens, deux serpents qui s’injectent le même venin sans que l’un ou l’autre ne s’épuise. « Ça va, on veut juste s'amuser un peu, je te promets qu'on va pas lui abîmer sa jolie petite gueule. » Il est un boxer : il sait comment frapper injustement sans que l’arbitre ne lève son carton rouge. Il sait bien qu’il ne va pas le faire saigner (et puis, si la moindre goutte de sang coulait, Archie lui ferait avaler). Pourtant, les yeux du brun se soulèvent pour tracer la ligne du plafond afin de dénicher l’une des caméras dont il connait la position. Quand il la trouve, il plisse le regard en réalisant que cette dernière n’est pas allumée comme elle devrait l’être. Habituellement, elle est toujours alerte pour le moindre vol, la moindre blessure ou le moindre accident dans la salle. Il faut dire qu’Archie n’a pas réussi qu’à obtenir la confiance de l’entraîneur sportif. Il est plutôt familier avec le concierge, aussi, parce que ce dernier lui permet parfois de rester plus longtemps sur la propriété scolaire, même parfois de passer les week-ends avec ses potes lorsqu’il pleut trop à l’extérieur. La cafétéria, c’est leur point de rassemblement lorsqu’ils ne veulent pas se mouiller les godasses. « Allez Archie, lâche l'affaire et va voir ailleurs si j'y suis. » Il rabaisse la tête, oubliant cette caméra défectueuse qui ne l’aidera pas ce soir. Il pourrait donner la véritable raison derrière ce parti qu’il prend mais ça lui couterait beaucoup trop cher. Défendre James pour des raisons personnelles, c’est aussi perdre sa notoriété chez les mecs bourrés de testostérone. Gardant sa mâchoire cambrée, Archie décide de faire un pas en arrière en soufflant tout son air par ses narines. Ça lui brûle de l’intérieur de se montrer si peu convaincant devant tous ces témoins mais les conséquences seront moins lourdes que s’il décide de protéger le pédé qui devient de plus en plus bleu. « Toi, fouille dans son sac. Je veux savoir ce qu'il trafique ici. » Croisant ses bras sur sa poitrine, le responsable du gymnase hausse un sourcil en observant les cartables et la paperasse qui s’échappe du sac et qui s’étend sur le sol comme de vulgaires déchets. C’est à ce moment qu’Archie devient honteux : il connait le contenu du carnet à croquis qu’il trimbale de cours en cours et qu’il garni de coups de crayons quand la matière ne l’intéresse pas – c’est-à-dire tout le temps. Il a été assez curieux pour tendre le cou et découvrir les silhouettes féminines tracées au graphite puis couvertes de traits plus fluides représentant des vêtements ressemblants à ceux que portent les célébrités sur le tapis rouge. « … putain, c'est quoi ces trucs ? » Archie se mord le bout de la langue en relevant son regard pour l’accrocher à celui de James. À ce moment, il le maudit de garder un objet aussi ridicule dans son sac : comment peut-il le défendre, maintenant ? Il n’aurait pas pu plutôt avoir une passion pour les Pokémons ou Star Wars ? Il aurait attiré les moqueries là aussi vu son âge avancé, mais, au moins, son orientation sexuelle n’aurait pas été mise en jeu une centième fois. Putain, James, tu fais exprès pour qu’on te traite de tapette.
Pourtant, une image qu’il aurait voulu oublier se repose dans le fond de sa mémoire. Il avale sa salive, son rythme cardiaque s’accélérant alors qu’il revoit la silhouette de la Barbie dans ses mains tandis qu’il lui glisse des talons aux pieds. Il était tellement fier d’avoir réussi à boutonner sa jupe mais il n’avait personne avec qui célébrer. Sous sa couverture qui le protégeait du monde extérieur, il passait le peigne dans les fins cheveux de la jeune femme en plastique et il souriait. « C'est son truc. Ce mec c'est juste un tordu. » Les mots semblent prononcés pour Archie alors qu’il sort de ses rêveries. Ses sourcils se froncent dangereusement et il fusille du regard Davis, lui qui est trop occupé à serrer de plus en plus le col de James pour le maintenir surélevé au-dessus du sol. Tandis que les autres idiots arrachent les pages du carnet de croquis pour les réduire à la simple forme de boule, Archie se met à observer les alentours à la recherche d’une arme improvisée. Certes, il sait se servir de ses poings, mais il n’a jamais été le plus grand de sa classe. Il est même plutôt petit, pour un intimidateur, et c’est pour cette raison que ce sont les mots qu’il a appris à manier à la perfection. Toutefois, les mots qu’il a envie de prononcer maintenant ne feraient que l’humilier, lui, et il veut éviter à tout prix de se trouver au même niveau que James : alors ses doigts s’enroulent autour de la barre en bois qui sert à maintenir la porte de la sortie entrouverte. Il compte seulement jusqu’à trois dans sa tête avant de balancer l’objet de toute ses force à l’arrière du genou de Davis. Ce dernier glisse et s’effondre à moitié, relâchant James en même temps. Il garde un genou au sol alors qu’il vomi un hurlement de rage : « MAIS T’ES TARÉ ?! » Aussitôt, Archie pointe la caméra avec le bâton. « On est filmés. Je ne veux pas me battre avec toi. Je ne pense pas que tes parents seraient fiers d’apprendre que leur vilain petit garçon est expulsé pour une semaine. » Et, enfin, le naturel revient au galop : un sourire malicieux étire ses lèvres. « Alors, en tant que responsable, je te demande de quitter les lieux, toi et tes copains. » L’idiot le fixe de ses yeux rouges et, après avoir soufflé une sorte de grognement primal, il se relève enfin et, en boitant, il va récupérer son sac de sport en faisant signe à sa bande de le suivre. Aussitôt, Archie se tourne pour faire face aux autres boxeurs qui n’avaient fait qu’observer la scène depuis le début : « Tout le monde sort, allez. Je ferme pour ce soir. » Qu’est-ce que ça lui fait plaisir de donner des ordres. Alors il ne se gêne pas pour en énoncer un autre, pointant James du doigt : « Toi, tu restes ici. » Qu’il murmure afin que seul lui ne puisse l’entendre.
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| | | | (#)Mar 5 Jan 2021 - 4:28 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. James avait beau être suspendu à la seule force de la poigne de Davis, à cet instant le garçon était simple observateur de la scène qui se jouait devant lui. Ou plutôt, de cette confrontation entre son bourreau et Archie, qui aujourd'hui ne se rangeait pas du coté de ceux qui prenaient plaisir à l'humilier. Bien au contraire, l'adolescent était le seul à oser tenir tête à celui que tout le monde ici semblait craindre autant qu'admirer. Qu'Archie n'ait pas froid aux yeux n'était pas une surprise, c'était le genre de choses que James avait souvent remarqué – pas plus tard que tout à l'heure, lorsqu'ils étaient en cours – et s'il prétendait en général que son bagou l'agaçait, la vérité était toute autre et lui bien souvent tenté d'égarer son regard en direction du jeune boxeur lorsque chaque mot qui sortait de sa bouche forçait le respect des autres élèves. Et plus souvent qu'il n'irait là aussi l'avouer, son rythme cardiaque subissait bien des variations lorsqu'Archie était tout près – et ça n'était pas toujours juste dû à la crainte qu'une partie de lui éprouvait de le voir en présence de ses amis. Car c'est bien là qu'était la nuance, et James en prenait conscience maintenant que l'adolescent cherchait à raisonner les autres garçons. Si sa bande avait été là, il y a fort à parier qu'Archie aurait retrouvé son sourire sarcastique et ses manières de brute. Mais ses amis étaient absents et James avait l'impression de redécouvrir celui qui s'amusait pourtant depuis des années à le brusquer entre leurs heures de cours. Son regard injecté de peur passait successivement d'une silhouette à l'autre : celle de Davis, celle d'Archie. James n'avait pas le moindre contrôle sur la situation et se surprenait à penser à ses propres intérêts en tout dernier lieu depuis qu'Archie était intervenu. L'une de ses plus grandes craintes à présent, c'était que les autres garçons se retournent contre l'adolescent. Il en oubliait presque ainsi l'air qui manquait de plus en plus à ses poumons et la teinte bleuâtre que prendrait bientôt son visage s'il ne reprenait pas son souffle. Il en oubliait que personne n'aurait rien fait pour lui si Archie n'avait pas tenu tête à son bourreau parce que la plupart des gens préféraient détourner le regard ou, pire encore, sourire devant l'impuissance d'autrui.
Un tordu, c'est par ce terme que Davis le qualifia et s'il sonnait de façon si familière aux oreilles du blond, c'est parce qu'il avait déjà entendu pire. On le jugeait original et extravagant depuis tout petit, mais c'est en franchissant les portes du collège que sa différence lui avait valu d'essuyer de premières insultes et la situation ne s'était pas arrangée au lycée. Et c'est vrai, il ne faisait rien pour se faciliter les choses lorsqu'il ramenait dans son sac de cours des dessins qu'il réalisait sur son temps libre depuis suffisamment d'années pour que son coup de crayon soit précis. James avait toujours été comme ça et plus les années passaient, moins il laissait les autres décider pour lui de ce qu'il pouvait être ou porter. Aujourd'hui pourtant, il dut prendre sur lui pour ne pas trembler lorsque le regard de Davis le foudroya à nouveau et qu'autour de lui tout le monde parut impatient de lui faire regretter d'avoir posé un pied ici. Il lui suffisait de faire preuve d'un minimum d'imagination pour visualiser les poings des autres garçons s'écraser contre ses cotes et lui arracher des cris de douleur. Il croirait presque déjà sentir les coups, et pourtant, la suite des événements ne ressembla en rien à ce que son esprit confus avait imaginé. Ses yeux accrochèrent la silhouette d'Archie et s'écarquillèrent lorsqu'adolescent réapparut cette fois avec une barre en bois qu'il leva en direction de Davis. Le reste se déroula en à peine quelques secondes : la barre venant frapper l'arrière du genou du garçon, la pression cessant autour de son cou, son corps enfin délivré de cette emprise et son visage retrouvant ses couleurs. James demeura contre le mur, tétanisé autant qu'impressionné par l'élan de courage d'Archie. Personne n'avait jamais fait ça pour lui, peu importe que l'adolescent ne le voit sûrement pas de cette manière. Davis, lui, était fou de rage. Pour autant, il n'impressionnait plus personne depuis qu'il s'était retrouvé à genoux d'un seul coup de barre. « On est filmés. Je ne veux pas me battre avec toi. Je ne pense pas que tes parents seraient fiers d’apprendre que leur vilain petit garçon est expulsé pour une semaine. Alors, en tant que responsable, je te demande de quitter les lieux, toi et tes copains. » La scène autant que l'élan d'impétuosité d'Archie lui aurait peut être arraché un sourire s'il n'était pas encore profondément troublé et sonné par ce qu'il venait de vivre. « Tout le monde sort, allez. Je ferme pour ce soir. » Et c'est un profond soulagement qu'il éprouva lorsque Davis et sa bande suivirent les conseils d'Archie et gagnèrent la sortie du gymnase sans plus faire d'esclandres. « Toi, tu restes ici. » Cette fois le ton d'Archie se fit plus bas, son ordre presque silencieux, et James remonta doucement son regard jusqu'au sien en sentant une pointe d'appréhension lui chatouiller la gorge. C'était idiot, après qu'il lui ait évité de subir les coups des autres garçons, mais une part de lui redoutait qu'Archie regrette à présent. Qu'il regrette de l'avoir défendu comme tant de fois James avait justement espéré qu'on le ferait. Il secoua légèrement la tête et finit par se redresser pour de bon, osant encore à peine réduire la distance qui le séparait du jeune homme. « Merci. » Fut la première chose qu'il souffla une fois son rythme cardiaque ralenti et ses mains moins tremblantes. Il croirait presque encore sentir la poigne de Davis le priver d'oxygène et pour ça, le geste d'Archie ne lui inspirait qu'une plus forte gratitude. « Personne avait jamais fait... ce que t'as fait. » James pesait chacun de ses mots, tentait à certains moments de lire dans le regard d'Archie si le terrain était suffisamment sûr pour qu'il s'adresse à lui comme si en temps normal, les yeux de l'adolescent n'étaient pas injectés de mépris lorsqu'il les posait sur lui. « Tu sais qu'il te le fera probablement payer ? » Davis, qui s'était sans doute senti aussi humilié que s'il avait mouillé son pantalon devant ses potes. Être remis à sa place, quand on se croyait au-dessus de tout, ça vous heurtait un ego. « C'est un sale con. » Et tandis que son regard osa plus longuement s'attarder dans le sien, il se risqua à souffler. « Et ce qu'il a dit sur les vestiaires... c'est pas vrai. Je serais pas resté, j'aurais gêné personne. » Lèvres pincées, il baissa légèrement le regard. Il était invisible, de toute façon, aux yeux de la plupart des garçons. En dehors des moments où on s'en prenait à lui, personne ne faisait attention à l'adolescent aux boucles blondes qui observait les autres avec un mélange d'envie et de fascination. Aujourd'hui serait l'exception qui confirmerait la règle : Davis serait contrarié quelques jours puis ne se souviendrait plus de la raison de son différend avec Archie. Pas plus que du regard apeuré ou des dessins de James.
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| | | | (#)Mar 5 Jan 2021 - 5:21 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Il n’est pas avec sa bande d’amis. Il n’a besoin d’impressionner personne. Aussi surprenant que cela puisse paraître, Archie sait parfois mettre de côté ses défauts et tendre la main à ceux qui en ont besoin. Ce sont ses sœurs qui lui ont appris à prendre soin des peinés parce qu’il est devenu l’ainé de la fratrie quand Lola s’est éteinte en plein milieu de la nuit, dans son lit d’hôpital. Quand les bips saccadés du moniteur cardiaque se sont aplatis, ce sont les larmes de ses sœurs qu’il a dû essuyer parce que, lui, il n’avait pas le droit de pleurer. Il avait hérité du rôle du protecteur et c’est l’une des plus grandes leçons qu’il a apprises au cours de sa vie : il doit garder la tête haute et, même lorsque la douleur est trop forte, il doit la surmonter. Il est un Kwanteen créé à l’image de son père, un franc manipulateur, un cerveau bien alerte et les poings toujours serrés au cas où il aurait besoin de se défendre. Ce soir, ce n’est pas lui qu’il a défendu, ni son honneur – qu’il a d’ailleurs fragilisé pour sauver celui d’un autre. Il dira à toute l’école qu’il l’a fait pour ne pas perdre la confiance de l’entraîneur sportif mais, au fond, il sait très bien qu’il a tendu la main à l’un des siens. James a toujours été ce reflet honteux qu’Archie perçoit dans le miroir. S’il y a bien une raison pour laquelle il s’en est pris à lui la première fois que leurs regards se sont croisés, c’est parce qu’il voulait détruire ce petit garçon qui lui ressemblait trop. Le punir d’exister, le punir de s’exprimer, le punir d’être qui il est. Parce qu’Archie n’a pas eu le droit de montrer son vrai visage.
« Merci. » Il ne veut pas se faire remercier. Il n’est pas un héros, encore moins le sien. Il n’a simplement pas voulu voir son sang couler. « Nah. » Il marmonne mollement, les dents serrées, en reposant le bâton en bois près de la porte parce qu’il ne lui trouve plus d’utilité maintenant qu’il a fait fuir le truand. Préférant éviter le regard de James, il fait mine d’observer les lieux pour s’assurer qu’aucun matériel sportif ne traîne. Il maintient aussi une certaine distance entre eux ; c’est bien la première fois qu’il se trouve seul avec lui. Et, pourtant, il y a bien une raison pour laquelle il lui a intimé l’ordre de rester là. « Personne avait jamais fait... ce que t'as fait. » Il laisse échapper un gloussement, renifle et essuie la sueur qui perle sous son nez. Il secoue la tête de droite à gauche, ne souhaitant pas s’expliquer davantage. C’est étrange comme il perd toute sa confiance maintenant qu’il n’y a personne pour le soutenir. « Tu sais qu'il te le fera probablement payer ? » Oui, il le sait, et ça ne l’effraie pas. Ils sont deux prédateurs, deux brutes qui cherchent à avoir l’avantage sur l’autre. La guerre ne se terminera pas tant que l’un des deux n’aura pas mis son drapeau en berne. Mais il ne regrettera rien, Archie, parce qu’il a appris à assumer les conséquences de ses actes. « Ça ne sera jamais bien pire que c’qu’il t’a fait vivre. S’il me touche une seule fois, il ne repartira pas qu’avec une ecchymose à l’arrière du genou. » Il lance des menaces en l’air alors qu’il n’est pas un habitué de la violence. C’est sa façon de prouver sa virilité. « Tu devrais apprendre à te défendre, ça m’évitera de me salir les mains la prochaine fois que tu viens mater. » Enfin, il le regarde à nouveau, mais il cache ses vraies pensées derrière un sourire moqueur, comme d’habitude. Son but est de rapidement remonter dans l’échelle pour montrer à James qu’il se trouve tout en bas et que, lui, il se hisse fièrement tout en haut. « Et ce qu'il a dit sur les vestiaires... c'est pas vrai. Je serais pas resté, j'aurais gêné personne. » Cette fois, il lâche un ricanement. Il laisse les secondes s’écouler en déroulant lentement les bandages autour de ses mains, libérant ses paumes trempées par l’effort. Il fait tourner sa langue trois fois dans sa bouche, entrouvre les lèvres, les referme, puis décide enfin de lancer la bombe : « C’est vrai que t’es comme ça ou c’n’est qu’une fausse rumeur ? » Devant l’incompréhension qui se lit sur le visage du jeune homme, il soupire et souffle, précisant sa pensée : « Une tapette. Un pédé. Tu peux employer le terme que tu veux ça ne change rien. Dans mon dictionnaire, ça veut dire la même chose. » Qu’il aime les hommes. Qu’il est différent. Et, surtout, qu’il commet un péché selon d’innombrables religions. Archie est-il croyant ? Non. Il le serait peut-être s’il n’avait pas laissé ses propres yeux se perdre honteusement contre le torse d’Indiana Jones, ce personnage de films d’action qui donnait l’impression à son père qu’il était tout à fait comme lui : un vrai homme qui aime les explosions et les flingues.
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| | | | (#)Mar 12 Jan 2021 - 3:44 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. La scène s'était déroulée si vite que James avait cru l'espace d'un instant l'avoir fantasmée, lorsque l'oxygène avait commencé à lui manquer. Mais Archie était bel et bien intervenu lorsque personne n'avait bougé le petit doigt pour le tirer de cette situation. Seul contre les autres garçons, il avait tenu tête à leur leader et évité que les choses ne dégénèrent davantage. Seul, il avait fait preuve de plus d’aplomb et de courage que James ne l'en aurait jamais cru capable, tout simplement parce qu'il était facile de le ranger habituellement dans la même case que ceux qui aujourd'hui s'en prenaient à lui. Comment le Archie qui se dressait face à son bourreau pouvait être aussi différent du Archie qui l'humiliait volontiers en compagnie de ses amis ? Comment pouvait-il autant souhaiter se tenir à distance de lui d'habitude et aujourd'hui souhaiter désespérément qu'il reste, rien que pour ne pas se retrouver seul avec eux ? Il ignorait ce qu'ils pourraient lui faire, mais savait en revanche qu'il ne s'était jamais senti plus en sécurité depuis qu'il avait mis un pied dans ce gymnase que depuis qu'Archie avait élevé la voix. C'était ironique, à quel point il pouvait encore sentir cette main se resserrer autour de son cou et pourtant nourrir l'impression que tant que le garçon serait là, il ne pourrait rien lui arriver de grave. Son regard avait cherché le sien pendant de longues minutes sans jamais réellement le trouver, les yeux d'Archie ayant à peine quitté ceux de Davis avant que le petit groupe ne le libère finalement et débarrasse le plancher. Dieu sait que James ne les regretterait pas et que cet incident lui servirait de leçon. Dieu sait, surtout, qu'il était reconnaissant à Archie d'avoir fait ce qu'il avait fait. Les mots paraîtraient presque dérisoires, mais James n'était pas pour autant idiot. Les garçons comme Archie devaient détester les effusions et plus encore lorsqu'elles venaient de garçons tels que lui. Le remercier simplement était sans doute bien plus sûr et de toute manière, James avait depuis longtemps appris qu'être tactile avec les autres ne ferait que leur donner une raison supplémentaire de détester tout ce qu'il était. Mais en plus d'avoir fait ce que personne n'aurait sûrement fait à sa place, Archie avait pris des risques. Les types comme Davis ne se laissaient pas recadrer sans réagir, et alors que son sort l'aurait indifféré il y a encore quelques heures, à présent le blond songeait qu'il n'aimerait pas apprendre qu'Archie avait eu des problèmes par sa faute. « Ou menace-le de raconter à tout le monde comment il s'est retrouvé à moitié par terre devant tous ses potes. Si un garçon comme moi allait le raconter, personne me croirait, mais toi... » La clarté de son regard retrouva l'intensité de celui d'Archie et James haussa les épaules. « Toi, tout le monde te croira. » Il était Archie Kwanteen après tout, la moitié du lycée l’idolâtrait quand l'autre moitié semblait le craindre. Qu'il soit en classe ou à l'extérieur, il parvenait toujours à attirer les regards et à forcer le respect des autres élèves. Et bien que ça lui coûte de se l'avouer, James faisait bien souvent partie de ceux incapables de détacher leur regard une fois celui-ci posé sur le brun.
« J'étais pas entrain... » de mater. Si les mots restèrent coincés en travers de sa gorge, c'est en partie parce que James savait que ça n'était pas tout à fait vrai. Que s'il avait poussé les portes de ce gymnase, c'était pour admirer ces garçons en plein effort, tapant dans des sacs de frappe comme s'ils jouaient leur vie. Il n'y comprenait pas grand chose à la boxe, mais il savait ce qu'il ressentait en laissant ses yeux s'égarer sur les silhouettes athlétiques de ces jeunes sportifs. La température de son corps s'élevait bien souvent en même temps que les battements de son cœur s'accéléraient lorsque c'était le cas. « J'aurais pas à me défendre si on s'en prenait pas à moi. Pourquoi est-ce que vous vous sentez tous obligés de vous montrer violents ? » Par leurs gestes, comme Davis tout à l'heure. Par leurs mots, comme Archie le reste du temps. James trouvait les ennuis sans jamais les chercher et devrait en plus apprendre à se défendre parce que des garçons n'étaient pas capables de résister à l'envie de le bousculer. Son cœur se serra à l'idée qu'il aurait peut être toujours à rester sur ses gardes et son regard fuit celui d'Archie l'espace d'un instant. Ses yeux se concentrèrent plutôt sur les bandages que l'adolescent retira d'autour de ses mains, s'attardant sur chacun de ses gestes avec toujours cette pointe de fascination au fond du regard. Il avait de belles mains, mais il n'était sûrement pas censé s'en faire la réflexion. Lorsque son regard retrouva finalement celui d'Archie, sa question le laissa interdit quelques secondes et le brun précisa le fond de sa pensée. James secoua timidement la tête et poussa un soupire. « Oui. » Oui, les rumeurs étaient fondées. Non, il n'éprouvait pas le moindre intérêt pour les filles et se contentait de les trouver jolies, intéressantes, mais jamais attirantes. Parce que c'était les garçons qui rendaient ses mains moites et son souffle court. Les garçons, de qui il aimerait parfois obtenir un regard. « On dit gay, chez moi. Mais je me soucie pas trop de l'étiquette qu'on me colle, je sais juste... que j'aime bien la compagnie des... des garçons. » Qu'il les aimait tout court en réalité, mais c'était suffisamment compliqué d'énoncer l'évidence face à Archie, qui sans doute réprimait déjà plusieurs insultes rien que maintenant qu'il avait confirmé ses doutes. « Mais toi, t'as jamais trop semblé en douter. » James joignit ses mains devant lui sans quitter son regard. S'il se montrait si virulent à son égard depuis le début, même déjà au collège, c'était bien parce qu'il n'avait sûrement pas attendu les autres pour se faire son propre avis. « C'est pour ça que tu m'as demandé de rester ? Tu vas tout répéter à tes copains demain quand tu les verras au lycée ? » Pourtant, James aimait penser que le Archie qui se tenait devant lui ne cherchait pas autant à lui nuire que le Archie qui bombait le torse devant ses amis. Après tout, il aurait pu faire en sorte que Davis et les autres l'entendent répondre à sa question mais n'en avait rien fait.
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| | | | (#)Mar 12 Jan 2021 - 4:43 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Il se bat continuellement contre ses pensées. Sa conscience lui dit de baisser sa garde pendant seulement quelques petites secondes pour inspirer sa prochaine bouffée d’air avec les poumons du véritable Archie Kwanteen. Pas celui qui s’est formalisé, ni celui qui se pince le bras à chaque fois qu’il oublie qu’il ne devrait pas être comme il est. Elle n’est jamais vraiment disparue, cette petite lueur rose qui brille dans son cœur, et il a abandonné l’idée de l’éteindre complètement depuis plusieurs mois déjà. Il a beau fermer les yeux assez fort et assez longtemps ; quand il les rouvre, il reste le même. Le petit garçon qui n’aurait pas naturellement approché les filles dans le bac à sable si sa mère ne lui avait pas tenu la main jusqu’à la prochaine Emily, la prochaine Olivia, la prochaine Karen.
C’est la honte qui le pousse à agir ainsi. Et, s’il y a bien une chose qu’il ne comprendra jamais, c’est cette facilité avec laquelle James ajuste soigneusement sa chemise pour s’assurer qu’aucun pli ne l’abime de façon permanente. N’y-a-t ’il donc personne pour le ramener sur Terre ? Est-il réellement libre d’être honnête envers lui-même ? Ce serait injuste si seulement Archie souffrait. Les deux garçons se ressemblent beaucoup, au fond, et qu’est-ce que ça le rend jaloux. Il n’y a personne pour empêcher le bouclé de porter ces pantalons trop serrés alors le sportif se fait volontaire pour la cause. Après tout, son propre père le lui rappelle tout le temps. Je fais ça pour ton bien, Archie. Tu seras bien plus heureux si tu suis mes pas. Arrête de pleurer ou, si tu ne peux empêcher les larmes de couler, cache-toi. Personne ne doit te voir, ça te ferait trop de mal.
Qu’est-ce qu’il lui a pris ? Ça aurait été facile de détourner les yeux et de garder son casque sur ses oreilles pour seulement entendre sa musique et non les moqueries incessantes des brutes qui avaient fait de James leur proie. Il aurait pu taper dans son sac de sable au même rythme que les autres auraient tapé contre les côtes de James et feindre de ne jamais avoir été témoin d’une telle injustice – c’est ainsi qu’il décrit l’événement, oui, parce qu’Archie connait les limites à ne pas franchir et jamais il n’aurait teint de bleu la peau de plus faible que lui. Il y a bien une raison pour laquelle il a appris à manier les mots à la perfection. Maintenant, il est trop tard : les yeux presque admirateurs du plus vieux ne se détachent pas de lui alors qu’il tente d’éviter tout contact visuel. Il préfère poser son attention vers ailleurs, là où la nervosité n’assèchera pas sa gorge. « Je sais que tout le monde me croira. » Il souffle crûment, conscient de cette autorité qu’il possède entre les murs du collège. Il ne jouerait pas les sales cons s’il craignait les représailles. Les yeux se baissent quand il traverse les couloirs, y compris ceux de James – parce qu’il l’a remarqué. Il le remarque souvent. « Mais je n’ai pas envie qu’on sache que je t’ai défendu, toi. » Il souffle ensuite, secouant sa tête de droite à gauche pour débarrasser son front des quelques cheveux qui s’y sont collé. Il esquisse un faux sourire, une défense, un bouclier, pour se déculpabiliser d’être aussi méchant envers James, mais aussi envers lui-même. Il insulte sa propre personne en s’en prenant au garçon qui représente son reflet. Étrangement, c’est moins difficile de le faire en compagnie de ses « amis » - ou, plutôt, ceux qui le suivent et qui rient de ses blagues pour éviter de se retrouver à la place du pédé. « J'étais pas entrain... » Il rigole, ne cachant pas ses doutes quant à la véracité de sa défense. Il n’a pas cru une seconde à cette histoire de concours littéraire. Le contenu du panneau d’affichage dans le gym se résume à des présentations de cours de sports parascolaires ou des opportunités d’emprunt de matériel. Son papier aurait fait tache. « J'aurais pas à me défendre si on s'en prenait pas à moi. Pourquoi est-ce que vous vous sentez tous obligés de vous montrer violents ? » Il la déteste, cette question, parce qu’il connait trop bien la réponse. Seulement, James ne mérite pas de l’entendre, alors il la lui renvoie avec un ton ironique, accusateur : « Et tu te sens obligé de tous nous rendre inconfortable ? » Parce que c’est bien ce qu’il fait en respirant, tout simplement. La plupart des garçons ont peur de sentir son regard sur eux parce qu’il s’agirait là d’une « perte de virilité ». Ce sont les yeux des filles qu’ils veulent attirer et la moindre infraction les rend mal à l’aise. Archie, lui, il attaque seulement pour empêcher que les autres ne le fassent avant lui. Il ne saurait dire si James a déjà posé son attention sur lui trop longtemps. À vrai dire, il ne veut pas savoir. Il préfère se faire craindre pour éviter de devoir se pincer encore et encore le bras.
Cependant, il n’a pas ordonné au garçon de rester dans le gym pour aucune raison. Il préfère ne pas tourner autour du pot ; il évoque la question de sa prétendue homosexualité, ce à quoi James répond honnêtement. Peut-être un peu trop, d’ailleurs, car son simple « oui » déstabilise légèrement Archie qui doit absolument glousser pour balayer son étonnement. « On dit gay, chez moi. Mais je me soucie pas trop de l'étiquette qu'on me colle, je sais juste... que j'aime bien la compagnie des... des garçons. » Le visage d’Archie se détend seulement quelques secondes pour mieux se refermer. Oui, il s’en est douté depuis qu’il l’a rencontré mais le fait d’avoir la confirmation ne le rend pas fier, au contraire. Ça le ridiculise, même, parce que s’il a pu lui coller cette étiquette trop rapidement, c’est parce qu’il a reconnu certains de ses propres traits en lui. Avant qu’il ne se fasse pointer du doigt le bon chemin, évidemment. « C'est pour ça que tu m'as demandé de rester ? Tu vas tout répéter à tes copains demain quand tu les verras au lycée ? » La question était légitime, parce que c’est probablement ce qu’il aurait fait s’ils ne se trouvaient pas dans un contexte aussi intime. Réfléchissant, il fait une boule avec ses bandages sales et les jette en direction de son sac de sport ouvert à un mètre de lui. Il renifle, fait plusieurs pas autour de son équipement pour le ramasser, trainant le pas pour laisser les secondes s’écouler. Il finit par répondre sans regarder James. « Non. Ils sauraient que je t’ai posé la question, ça me mettrait à ton niveau. » Il s’abaisse pour mieux placer ses effets personnels dans son sac et il ferme la fermeture éclair. Il reste accroupi ainsi un peu trop longtemps, se frottant le menton, laissant trop de pensées se bousculer dans son crâne, et il finit par relever la tête pour plonger son regard dans celui du garçon. « T’as jamais essayé de changer ? De regarder les meufs, plutôt. Ça t’éviterait bien des problèmes. Ta copine, Katie. Elle est pas mal. Elle doit faire au moins du C, et je suis certain qu’elle a déjà sucé, celle-là. Paraît qu’elle a joué au jeu d’la bouteille lors d’une soirée Nachos et Pizza, j’ai vu quelques photos sur Facebook. »
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| | | | (#)Dim 24 Jan 2021 - 19:48 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Passé le soulagement d'avoir échappé au pire lorsqu'il était encore à la merci de Davis et que la voix d'Archie s'était élevée pour l'aider, James éprouvait forcément une profonde gratitude envers celui qui avait évité à cette situation de dégénérer. Parce qu'il le savait, James, qu'il aurait sans doute été bien plus facile pour l'adolescent de ne rien faire et de rester en retrait. Bien plus facile, de ne pas s'opposer à celui que tout le monde au sein de ce gymnase semblait encore redouter une poignée de minutes plus tôt. D'aussi loin qu'il s'en souvienne, le jeune Kwanteen avait toujours été de l'autre coté, là où l'on pouvait se permettre d'intimider les plus faibles tout en profitant d'une popularité sans pareil entre les murs du lycée. Il était l'un de ceux qu'on admirait quoi qu'ils fassent, quoi qu'ils disent, et dont on ne remettait jamais en question les agissements parce que tout le monde voulait se faire bien voir d'un garçon comme Archie. Beau, malin, intelligent. Sa confiance en lui n'était qu'un autre de ses atouts et si elle impressionnait un gamin comme James, elle impressionnait sans doute aussi le reste du lycée. Les filles voulaient toutes avoir leurs chances avec lui, les garçons enviaient son statut et aspiraient à devenir aussi populaires que lui. Il n'y avait que James pour représenter une troisième catégorie à lui tout seul, celle où on observait les garçons comme Archie avec un mélange de crainte et d'envie. Il l'impressionnait, bien sûr, mais il mentirait s'il prétendait que son regard n'était pas plus généralement attiré par tout ce qu'il représentait, y compris par la couleur de ses yeux ou son sourire insolent. Finalement, il était en marge du reste et les propos du garçon ne firent que lui confirmer une chose : même lorsqu'on lui sauvait la mise, on avait encore trop honte pour s'en vanter auprès de ses amis. « Moi, le petit homo à bouclettes. » Son regard rencontra longuement le sien en silence, et il finit par hausser les épaules. C'était sûrement comme ça qu'Archie l'appelait avec ses amis et que des rires filtraient d'entre leurs lèvres dès qu'il passait tout près d'eux. Il s'en fichait pas mal, des surnoms qu'on pouvait lui donner, parce qu'ils faisaient tous aussi mal mais qu'il continuerait de prétendre le contraire. « Ouais, j'imagine que tu tiens pas à ce qu'on nous associe. » A ce qu'on l'associe à lui, puisque James était le cœur du problème et que ça n'avait rien de nouveau, après tout Archie savait toujours lui rappeler le dédain qu'il lui inspirait. Et même ici, alors qu'il avait pourtant fait pour lui ce que personne ne s'était jamais risqué à faire, son besoin de lui rappeler ce qu'il représentait à ses yeux s'était de nouveau fait plus fort que le reste. Alors tout ce qu'il pouvait sans doute faire, c'était lui donner le moins de raisons possibles de regretter son geste. Peut être bien qu'il était entré dans ce gymnase avec l'envie d'apercevoir les garçons qui y pratiquaient la boxe, mais James n'était pas idiot. Il ne serait pas resté, il savait où était son intérêt et le constatait à nouveau dans les regards que lui lançait Archie. Dans son rire mauvais et bientôt à sa manière de reprendre la parole, aussi. James se crispa et fronça les sourcils. « Si ça vous fait vous sentir inconfortable c'est votre problème, pas le mien. » Il asséna, comme si le fait qu'Archie soit seul aujourd'hui rendait un peu plus facile de lui tenir tête, quand bien même James continuait d'être impressionné et déstabilisé en croisant son regard. « Je fais rien de mal. J'aborde personne, et je demande pas non plus à ce que je ressente soit réciproque. » Il ne demandait rien à personne, en réalité, si ce n'est le droit d'être ce qu'il était sans que ça lui vaille d'être moqué et pointé du doigt. « Je suis pas ce que je suis pour vous embêter. » Ni pour provoquer quiconque parce que ses penchants, il ne les contrôlait tout simplement pas. Ça faisait partie de lui et il ne pouvait rien y changer, si tant est qu'il puisse en avoir envie. C'était le cas, parfois, bien qu'une partie de lui n'ait pas envie d'avoir honte. Sous le regard d'Archie, pourtant, il se sentait systématiquement honteux.
Il ne broncha pourtant pas au moment de reconnaître la vérité, celle qui vaudrait sûrement à Archie de lui lancer son regard le plus répugné et le plus réprobateur. James avait toujours pressenti que l'adolescent savait, pourtant, car sinon pourquoi le traiter comme il le faisait depuis le collège ? Pourquoi prendre un malin plaisir à le ridiculiser devant ses amis et à pointer du doigt tout ce qui faisait de lui quelqu'un de « différent » ? Son attirance pour les garçons était sue d'une partie de ses camarades sans que James n'ait pourtant jamais rien fait pour confirmer les rumeurs. Au contraire, il s'était fait aussi discret que possible, ses allées et venues au gymnase étant le seul risque qu'il ait pris, et pourtant des surnoms et des brimades il en supportait depuis déjà plusieurs années. A tel point que même si son père n'avait jamais rien dit, jamais rien demandé, James avait toujours pressenti qu'il s'en doutait lui aussi. A cette idée, la honte s'infiltra de nouveau en lui et ses joues se colorèrent tandis que le regard d'Archie, lui, fuyait maintenant le sien. Il devrait probablement s'en moquer, considérer que ça n'avait aucune importance. Mais pour une raison qu'il ne s'expliquait pas, ce silence lui faisait bien plus mal que tous les mots qu'il aurait pu lui asséner. James se retrouvait seul face à son aveu, son regard cherchant désespérément le sien, suivant les mouvements d'Archie et finissant par baisser la tête, lorsqu'enfin l'autre garçon reprit la parole. « Tu seras jamais à mon niveau. Parce que tu sauras jamais ce que ça fait. » Et s'il avait du mal à comprendre en quoi parler de leur discussion à ses amis vaudrait à Archie d'être regardé en biais par ces derniers, James songeait que de toute manière, un garçon comme lui ne connaîtrait jamais le quart du sentiment de rejet qui lui l'habitait jour après jour. Parce qu'Archie cochait toutes les cases et que James, lui, était la cible toute désignée. Ils étaient profondément différents, quand bien même il avait nourri la troublante impression que quelque chose le liait à l'adolescent lorsqu'il l'avait arraché des griffes de Davis. Une illusion, sans doute rien de plus, et de toute façon Archie regrettait sûrement déjà d'être intervenu. Son regard retrouva enfin le sien et James se figea une seconde, plus troublé qu'il ne l'aurait cru. Ses propos, eux, auraient pu l'exaspérer s'ils ne lui inspiraient pas un si profond dépit. Pourtant, à sa façon d'évoquer Katie, James ne put rester sans réagir. « Parle pas d'elle comme ça. » Son regard ne quitta pas celui d'Archie. « Katie, c'est pas ce genre de fille. C'est toi qui prends tes rêves pour des réalités parce que tes potes et toi, vous voyez les filles comme des morceaux de viande. » Le ton de sa voix se fit plus dur, comme si en plus d'être résigné une partie de lui était aussi déçue. « T'as aucun respect pour elle, d'ailleurs t'as aucun respect pour personne. Et si aimer les garçons c'est m'éviter de devenir comme toi, alors pour rien au monde je voudrais changer. De toute façon je pourrais pas même si je voulais. » Ce qui ne voulait pas dire qu'il n'avait pas déjà essayé de s'intéresser aux filles autrement, simplement qu'il n'en avait été que plus conforté encore dans l'idée qu'il aimait les garçons et qu'il ne changerait pas simplement parce que ce serait plus supportable pour les autres. Et plutôt que de l'admettre devant Archie au risque de l'entendre le railler à nouveau, James redevint silencieux un instant. Il hésita à reprendre, puis souffla. « Toi, t'as jamais essayé d'être sympa ? Pourquoi tu traînes avec ces mecs, parce qu'ils t'encouragent chaque fois que tu rabaisses quelqu'un ? » Archie devait aimer le sentiment qu'il nourrissait d'être inarrêtable, dans ces moments-là. « Pendant une minute tout à l'heure, j'ai cru que t'étais quelqu'un de bien. » Ses yeux retrouvèrent les siens et cet aveu valut aussitôt à sa gorge de se serrer.
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| | | | (#)Mer 27 Jan 2021 - 20:53 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. Son regard s’attarde trop souvent sur l’énorme horloge encagée suspendue sur le mur au fond du gymnase. Le temps ne passe pas bien vite et il n’a pas oublié son engagement envers sa sœur qui célèbre son anniversaire le soir-même. Il ne peut pas arriver en retard parce qu’il est un bon frère, à défaut d’être un bon camarade de classe. Il aimerait trouver une raison de déguerpir le plus rapidement possible de cette salle puante mais quelque chose l’empêche de bien réfléchir. Il se trouve en présence du seul garçon qui le rend inconfortable pour des raisons très personnelles. Pourtant, c’est lui qui a voulu lui parler, comme si, au fond de lui, il avait besoin de le faire. Pour le comprendre, peut-être, même s’il doute être incapable d’arriver à le faire : ils sont bien trop différents, selon lui. « Moi, le petit homo à bouclettes. » Il reste silencieux un moment alors que son regard s’accroche à celui de James. Il souffle ton son air par ses narines pour finalement lever les mains devant lui, innocent. « C’est pas moi qui l’ai dit. » Mais il l’a certainement pensé. Il ne voudrait pas que l’école entière sache qu’il a eu un moment de faiblesse, ce soir – il considère que c’en est un parce qu’il arrive habituellement à garder son calme et à ne pas lever les armes quand il se trouve dans une situation inconfortable. Et, encore pire, il a frappé un garçon qui pourrait facilement soulever la rumeur selon laquelle Archie aurait un faible pour le petit homo à bouclettes, lui qui ne défend que sa propre image en temps normal. « Si ça vous fait vous sentir inconfortable c'est votre problème, pas le mien. » Une répartie digne d’un enfant de huit ans, il se dit. Celui qui le dit celui qui l’est. La remarque arrache un sourire à Archie qui pouffe finalement de rire en secouant la tête de droit à gauche, accordant davantage d’importance à son sac de sport qu’à son interlocuteur qui tente de plaider sa cause de pauvre petit garçon différent des autres qui ne fait pas exprès d’être ainsi. Mais, s’il y a quelqu’un qui croit en savoir plus sur le sujet, c’est bien Archie, qui s’est adapté aux désirs de ses parents pour devenir le parfait garçon modèle. Sportif, intelligent, solide. « Tes parents t’en ont jamais voulu, alors ? » Il demande, d’une voix lunatique, pour ne pas donner le moindre indice sur sa propre situation. Sa famille semble vivre encore en l’an 40 mais c’est quelque chose qu’il ne pourra jamais remarquer. Il n’a jamais vu comment ça se passe, ailleurs, et la sensibilisation vis-à-vis ce genre de cas ne se fait pas vraiment. Pas encore.
Les joues rougies de James le déstabilisent plus qu’elles ne devraient. Maintenant que le garçon a confié l’un de ses secrets, il n’a plus aucun doute : ce n’est pas par amour de la boxe qu’il est venu faire les cent pas dans le gymnase. Les autres avaient raison en prétendant que son intérêt était plutôt sur les torses dénudés des sportifs qui, avec un peu de chance, ne remarqueraient pas qu’ils sont espionnés. C’est à ce moment qu’il, mal à l’aise, enfile un t-shirt propre dans l’unique but de se protéger des yeux de James. « Tu seras jamais à mon niveau. Parce que tu sauras jamais ce que ça fait. » Il grimace en soulevant son sac pour le poser sur son épaule, prêt à partir. « Non, en effet. Parce que je fais tout en mon pouvoir pour ne pas être la cible. Tu ne fais pas vraiment d’efforts, je trouve. » Si lui y est arrivé, pourquoi pas James ? C’est quelque chose qu’il ne pourra jamais comprendre, trop fermé dans sa petite bulle, comme si le monde entier respirait le même air que lui. C’est à ce moment qu’il propose au garçon une idée qui, selon lui, pourrait régler tous les problèmes : regarder les filles, plutôt, comme lui-même a fait pour se soigner. La réaction négative de James le surprend et il fronce les sourcils tandis que l’autre lui fait la morale, se pensant bien mieux que lui. Ses iris se noircissent au fur et à mesure qu’il se fait couvrir d’insultes qui, selon lui, sont infondées. C’est bien lui qui se trouve dans le haut de la pyramide, pas vrai ? Il a le droit de cracher son venin, maintenant. « Dit-il, après avoir passé la dernière heure à se caresser la graine devant des mecs qui ne sont pas ici pour le faire bander. » Il commence, sur un ton sarcastique, avant de s’approcher de James pour le fusiller du regard, pour que son ombre couvre son visage. « En effet, tu ne pourras jamais changer parce qu’il faut bien des gens dans le bas de la chaîne alimentaire. » Il le dévisage, ses yeux remplis de dégoût. « T’as raison, j’aime bien imposer le respect. Tant pis si ça fait de moi un connard à tes yeux. Ton avis ne m’intéresse pas vraiment, pour être honnête. » « Pendant une minute tout à l'heure, j'ai cru que t'étais quelqu'un de bien. » Devant son air piteux, il ricane moqueusement et le contourne enfin en le bousculant avec son épaule, secouant son fragile petit squelette. « Le bien, le mal. Ce n’est qu’une question de perception après tout. » Il se dirige vers la sortie et jette un dernier coup d’œil à James : « Ah, oui ! J’ai presque oublié. » Il sort le trousseau de clés de sa poche et glisse l’une d’entre elles dans la serrure avant de conclure, arrogant : « Heureusement, tu m’as rappelé de bien faire mon travail. À demain, dors bien ! » Et il claque la porte pour enfermer le garçon dans le gymnase avant de tourner fièrement des talons pour quitter l’établissement.
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| | | | (#)Mer 10 Fév 2021 - 0:44 | |
| The hero and the coward both feel the same thing. S'il y a une chose qu'il avait apprise à parfaire dès son entrée au collège, c'était sa perception du regard des autres. Du regard qu'ils posaient sur lui, du moins, alors que depuis plusieurs années il faisait les frais de leurs remarques. James savait comment un garçon comme Archie le percevait, et quel dédain brillait au fond de ses yeux lorsqu'il les posait sur lui. Ils étaient très différents, tous les deux, et son camarade avait visiblement appris à dénigrer ceux qui ne rentraient pas dans la même case que lui. Était-ce l'influence de ces garçons avec qui Archie traînait qui lui valait d'être aussi impitoyable par moments ? Ou bien est-ce qu'il avait grandi avec l'idée que ce genre de choses étaient normales, comme une partie du bahut semble-t-il ? James n'avait aucune idée ce qui pouvait se passer derrière les murs d'une maison comme celle d'Archie, la seule chose dont il soit certain c'est qu'il ne devait jamais avoir peur de rentrer chez lui tout seul après les cours. N'importe qui savait qu'on ne s'en prenait pas à l'un des garçons les plus populaires du lycée. Même James le savait, c'est aussi pour ça que son aide l'avait tant troublé quelques instants plus tôt. Troublé, parce qu'il était maintenant de nouveau face au garçon qui riait de lui avec ses amis quand un peu plus tôt, pourtant, il avait empêché Davis de s'en prendre à lui. James ne s'expliquait pas cette ambivalence, mais il en venait à penser qu'il s'était retrouvé au milieu d'une bataille d'egos. Deux garçons populaires qui se disputaient le respect et l'allégeance de leurs camarades, ça ressemblait presque à un épisode de série où lui serait le second rôle qui servait de ressort dramatique lorsque l'intrigue le nécessitait. Il haussa les épaules, alors, convaincu que si Archie ne l'avait pas dit il ne l'avait pas moins pensé. Le garçon se mit à rire et cette fois, c'est vrai, James sentit l'embarras courir à travers ses veines. Archie avait toujours eu le don de le déstabiliser plus que n'importe quel autre garçon, peu importe qu'il ait souvent fait en sorte de ne pas le montrer. Il ne voulait pas qu'il sache à quel point son jugement affectait certains jours l'opinion qu'il avait de lui-même et combien il aurait encore à travailler pour que ce genre de choses ne l'atteignent plus du tout. Au fond, il aurait préféré qu'Archie l'apprécie, qu'il trouve de l'intérêt dans ses dessins et qu'il lui trouve un peu d'intérêt, à lui. Il se serait sûrement senti moins idiot d'être à ce point fasciné par tout ce qu'il représentait. « Je leur ait pas encore dit, mais je crois que mon père s'en doute un peu, lui. » Sa mère ne le voyait sûrement pas assez souvent pour pressentir les choses de la même manière. Mais son père était si proche de son seul fils qu'il ne pouvait pas ne pas nourrir des doutes. « Je préfère quand même attendre d'être diplômé pour lui en parler. » Simplement parce que s'il y avait la plus petite chance pour que l'annonce soit mal accueillie par son père, il aurait la possibilité de partir étudier, faire des stages dans des ateliers à travers le pays, ce serait infiniment plus simple que de vivre sous le même toit que son père en sachant qu'il avait honte de ce qu'il était. Au fond de lui, il avait envie de croire qu'il l'accepterait, que c'était ce que faisaient les pères. Mais probablement qu'Archie aurait un avis bien différent sur la question. Comment était son père, à lui ? Comme une version adulte du jeune garçon ?
James ne saurait dire ce qui l'embarrassa le plus : qu'Archie éprouve un si grand besoin de fuir à présent son regard ou qu'il s'empresse de se couvrir comme s'il craignait que ses yeux s'attardent trop longuement sur son torse et ses épaules sculptées par le sport. Il était évident qu'il l'imaginait maintenant errer dans ce vaste gymnase avec nulle autre intention que celle de reluquer les autres garçons, et il ne servirait à rien qu'il tente de s'en défendre après l'avoir lui-même partiellement avoué. Seulement, James était convaincu que ça les dérangeait bien moins lorsque c'était les filles de la classe qui poussaient ces portes pour les regarder boxer. Son seul tort, c'était celui d'être un garçon et de les trouver beaux, quand il devrait normalement vouloir les rejoindre et taper de toutes ses forces dans un de ces sacs de frappe. « Je suis sûr que tes copains et toi vous seriez ravis de me donner des cours de virilité mais tu vois, moi je préfère encore rester comme je suis plutôt que de vivre dans un mensonge. » Après tout, c'était ce qu'Archie lui proposait à demi-mots en lui suggérant de s'intéresser plutôt aux filles, quand bien même il ne pourrait pas se forcer à éprouver une attirance physique à leur égard même s'il le voulait. Il les trouvait jolies et mystérieuses, ça n'était pas pour rien si du haut de ses seize ans elles lui inspiraient déjà la plupart de ses dessins, mais il savait bien ce qui se passait à l'intérieur de lui quand son regard croisait celui d'un garçon. C'était différent. Et la remarque fielleuse d'Archie lui valut de froncer les sourcils. « Arrête, t'es dégueulasse ! » L'espace d'une seconde, il avait presque souhaité que ce soit lui qui possède un bâton pour lui asséner un coup franc et l'inciter à tourner sa langue sept fois dans sa bouche la prochaine fois. Pourtant, Archie était maintenant tout proche et son regard peinait à soutenir le sien. Il l'intimidait, bien sûr, et cet échange devenait de plus en plus inconfortable pour lui à mesure que son camarade redevenait cette brute qui l'humiliait pendant les interclasses. La seule différence, c'est qu'ici ils étaient seuls et que tout ce qui le troublait déjà habituellement chez Archie était comme amplifié. « T'en profites juste parce que tu sais que tout t'est permis, mais ce sera pas toujours comme ça. Dans quelques années on aura un boulot, des responsabilités, et tout le monde s'en fichera de savoir que t'étais le plus populaire du lycée si t'es juste un gros nul. » James redevint silencieux, déglutissant au moment où il s'aperçut qu'il avait pour la première fois tenu tête à Archie avec autant d'aplomb. Il soupira finalement. « 'Faut croire que j'suis le seul à te voir comme t'es vraiment. » Mais il l'avait dit lui-même, son avis ne l'intéressait pas et jamais James n'aurait été assez crédule pour penser le contraire. Ce n'était même pas tout ce qu'Archie représentait à ses yeux, car par bien des aspects il aurait probablement voulu être comme lui, en réalité. Et parfois, quand son regard s'attardait un peu trop dans sa direction, il se surprenait à espérer ne plus lui inspirer un jour un tel dédain. Pas sûr que ça puisse seulement arriver, car en attendant le garçon semblait plutôt trouver tout ça amusant. Le regard du blond, subitement un peu perdu, suivit la silhouette de son camarade et ne comprit qu'une seconde trop tard ce qu'il était entrain de faire. « Archie ! Non ! » Il se précipita contre la porte du gymnase à présent close, se retrouvant enfermé à l'intérieur quand il n'aurait jamais du y mettre les pieds la première fois. « Archie, c'est pas drôle. Ouvre-moi ! » Ses deux paumes s'abattirent contre la porte, l'idée de passer les prochaines heures et peut être la nuit entière dans ce gymnase le terrorisant subitement. « S'il te plaît, ouvre... » Mais plus un bruit ne se faisait déjà entendre de l'autre coté de la porte et il comprit qu'Archie était parti. James n'avait aucun moyen de joindre son père pour le prévenir et il le savait, il s'inquiéterait de ne pas le voir rentrer ce soir. Assis contre la porte, cachant sa tête entre ses bras, il songea qu'il aurait préféré qu'Archie laisse les autres joueurs lui refaire le portrait une bonne fois pour toutes. Le résultat aurait été le même pour lui.
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| | | | | | | | The hero and the coward both feel the same thing [Jarchie] |
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