@SAWYER HARDING & KIERAN HALSTEAD ⊹⊹⊹ It's beginning to look a lot like Christmas, toys in every store But the prettiest sight to see is the holly that will be On your own front door. Sure, it's Christmas once more.

« À quel moment tu te réveilles un matin en te disant ‘’mais oui, mais bien sûr, de la lavande dans un chocolat chaud, quelle idée de génie !’’ » De sa plus belle imitation du savant fou, yeux écarquillés, voix nasillarde qui monte dans les aigus et mains qui se lèvent dans le ciel pour caresser l’ampoule au-dessus de sa tête, Kieran partage la réflexion de sa sœur. Reprenant son sérieux, il déplace sagement la tasse en question – pas finie, évidemment, parce que rappelons que mélanger chocolat et lavande est au moins une déclaration de guerre – sur sa droite, constituant le classement de leur dégustation loin d’être terminée. « J’ai préféré la guimauve au caramel, perso. » Il se permet d’informer, des fois que cette opinion serait susceptible de bousculer ce classement purement informatif devant eux, alors qu’il dépose la boisson à la guimauve à côté de celle au caramel, non sans porter une nouvelle fois le contenu à ses lèvres par pure gourmandise.

Leur serveuse attitrée revient vers eux et son sourire disparaît à mesure que les tasses s’enchaînent devant eux, probablement agacée par le nettoyage qui va suivre au moment où ils daigneront enfin quitter les lieux (s’il n’y a pas besoin de les rouler par terre pour cause d’indigestion). Kieran a fixé son regard depuis plusieurs mètres sur les deux tasses qu’elle leur amène, tel le gamin qu’il est face à du chocolat : il sait que la crise de foie est inévitable, mais il n’arrive pas pour autant à s’arrêter de s’empiffrer, jusqu’à ce que son mal au ventre le force à se raisonner (mais celui-ci n’est pas encore totalement présent, ce qui laisse encore du répit le temps de commander quelques tasses supplémentaires). Fronçant les sourcils d’un air faussement désapprobateur, il n’est en réalité par mécontent d’avoir le droit au chocolat à la framboise, l’odeur qui émane de la tasse ne faisant que réveiller sa gourmandise alors qu’il ne peut s’empêcher d’y goûter avant de prêter attention aux propos de Sawyer. « Pas forcément. » Qu’il souligne en haussant les épaules alors qu’il repose la tasse sur la table, se calquant sur le ton hautement sérieux de sa sœur pour proposer sa propre analyse de grande qualité (évidemment). « Justement, le vin rouge seul, c’est bon, Le chocolat aussi. Du coup, le mélange des deux ? Ça devrait carrément être dingue ! » Il s’exclame avec enthousiasme, à tel point qu’il se précipite sur la tasse en question pour en boire une grosse gorgée, convaincu par son argument quant au fait que ses papilles seront aussitôt séduites... Et bien évidemment, il manque de recracher et s’étouffe à moitié en daignant rester poli quand il comprend que, non, définitivement, ce mélange n’a rien de savoureux et relève plutôt d’un cocktail de bienvenue en enfer. « Okay, okay, tout réside dans le conditionnel. » Ça ne l’est pas, en l’occurrence et grossière erreur d’y avoir cru alors que le goût lui reste en bouche et qu’il ne peut s’empêcher de grimacer comme un chat qui aurait une boule de poils dans la gorge, entrouvrant la bouche à quelques reprises dans l’espoir que le goût s’évapore. Ce n’est évidemment pas le cas. Pire ; il réitère l’expérience et accentue toujours un peu plus son dégoût lorsqu’après un « oh, euh... » d’hésitation quant à la question de sa sœur, la réponse la plus évidente est celle qui consiste à s’occuper comme il peut de manière à retarder l’échéance du moment où soit il lui mentira ; soit il la décevra. Et bien sûr, ses doigts étant encore sur l’anse de la tasse, il la porte à ses lèvres pour vider le contenu de celle-ci, s’occupant ainsi quelques secondes... et manquant réellement d’arrêter la dégustation là quand son estomac lui remonte dans la gorge et qu’il gonfle ses joues tel un écureuil en période de crise de la noisette. Il se reprend, grimace encore un peu durant la minute de flottement qu’il laisse, finit par ne plus avoir d’option que la vérité (ou presque) : « Ouais, tu sais, avec les fêtes, mes projets sont mis de côté, parce que, enfin, les contrats fonctionnent bien en ce moment, tu vois. Des cartes de vœux personnalisées, des dessins encadrés, tout ça, c’est la bonne période pour les gens comme moi. » Des artistes, mais le terme lui semble trop présomptueux pour qu’il se le permette. Il ne ment qu’à moitié, Kieran ; il est certain que cette période est propice aux contrats freelance... encore faut-il se donner la peine de les chercher, ce qui n’est pas vraiment le cas. « Et puis, finalement, être prof, ça occupe vachement. » Il ajoute en haussant les épaules et affichant son plus beau sourire. « Et toi, Tom, les criminels ? » Le changement de sujet est maladroit, heureusement qu’il précise : « Ça connait pas la crise ? » avant d’avoir une furieuse envie de se flageller comme s’il était l’un d’eux de par cette maladresse. Fort heureusement, le regard peu convaincu de Sawyer est vite remplacé par une grimace qui lui sauve la vie – littéralement. Ne pouvant s’empêcher de rire au visage de sa sœur, il ne peut que commenter : « Tu veux pas tester un nouvelle fois la lavande pour être sûre ? » Non ? Non. Tant pis, il aura essayé. « Tiens, pour faire passer le goût. » Il tend sa tasse à la framboise, haussant les sourcils pour la convaincre face au scepticisme qu’il perçoit depuis que cette commande est arrivée sur la table. « Je t’assure, framboise c’est une bonne surprise. » Non, c’est absolument immonde, mais ça, elle n’est pas censée le savoir. Au pire, ce sera toujours mieux que menthe et lavande.

Les avis sont unanimes, les deux experts qu’ils ne sont pas parviennent sans difficulté à dessiner le classement actuel ; la guimauve l’emporte effectivement sur le caramel. Pas nécessairement au goût, oh ça non, mais par l’esprit de Noël qui accompagne la friandise. Bien sûr, dans le monde sans fantaisie et bourré d’approbation sociale dans lequel évolue Kieran, le caramel devrait avoir sa préférence – après tout, c’est dans l’ordre des choses et la guimauve est trop particulière pour être appréciée à l’unanimité. C’est un premier pas vers une certaine évolution, l’accentuation d’une opinion peut être anodine en apparence, mais ô combien importante dans le fond. Alors il se satisfait de cette position d’expert et on pourrait presque placer des micros devant eux qu’ils auraient l’air de commentateurs des plus sérieux et efficaces. Le public n’est pas acquis à leur cause à en croire les quelques remontrances – silencieuses – auxquelles ils ont le droit à intervalles réguliers, mais cela n’interdit pas à nos deux professionnels de poursuivre le partage de leurs expertises, Kieran hochant vigoureusement la tête pour confirmer les propos de sa sœur. Et quand bien même il ne serait pas d’accord qu’il ne le verbaliserait pas. Il n’est cette fois-ci pas question d’un avis qu’il n’ose transmettre, mais du simple fait qu’en tant que cadet, c’est à lui de se plier à son opinion s’il tient à son intégrité physique, bien évidemment.

L’expertise de l’aînée se poursuit avec un argument a priori indiscutable, qu’en tant que petit frère insolent et détestable, il est cette fois-ci bien obligé de remettre en question pour le simple plaisir de la contredire (et parce que, pour une fois, il croit dur comme fer aux arguments qu’il s’apprête à avancer). Il n’a jamais aimé les maths, Kieran, mais il a bien retenu que plus et plus font plus (beaucoup de plus dans une seule phrase, vous en conviendrez). Bien sûr, si l’on suit sa logique, cela implique que des lasagnes au Nutella est un plat délicieux sous prétexte que les pâtes autant que la pâte à tartiner en question sont elles-mêmes délicieuses lorsque prise séparément. Ensemble... le succès est discutable et pourtant guère discuté par le dessinateur, persuadé de la bonne logique de son idée (il ne tiendrait assurément pas le même discours si le plat en question devait être son déjeuner, qu’on se le dise). Mais persuadé du bien-fondé de son explication, la tasse se porte à ses lèvres pour une succulente gorgée... de poison, évidemment ; difficile pour lui de conserver un minimum de contenance en ne recrachant pas tout sur la table ou sur sa sœur telle une scène exagérée d’une parodie comique – et en vue du rire dont elle se rend coupable, elle aurait pourtant bien mérité qu’il se transforme en distributeur de vomi, pour la peine. « Merci, merci. » Il glisse entre deux toussotements, tentant d’exagérer les remerciements dignes des plus grands acteurs de théâtre. « Ce sera toujours mieux que cette... chose. » Dit-il en désignant la tasse devant lui. À moins qu’il ne tombe sur la lavande et dans quel cas, la roulette russe du chocolat chaud aura réussi à s’occuper de son cas (est-ce vraiment un souci pour Kieran ? Pas le moins du monde, en réalité). Et alors que son regard se porte sur la tasse en question, il s’arrête de respirer autant que de vivre lorsque Tom lui pose la question qu’il aurait préféré ne pas entendre en cette journée. La tasse dans ses mains se porte à ses lèvres avec un naturel qu’il aurait préféré éviter en vue de son propre empoisonnement auquel il prend volontiers part. Et il ne ment pas vraiment, Kieran, alors que cette période est effectivement propice aux gens comme lui – seulement, le concernant personnellement ses projets tendent à être en stand-by. À quoi bon se lancer dans ceux-ci alors qu’il sait pertinemment qu’il ne le finira pas – et pas uniquement pour une question de motivation ? « C’est la bonne période pour moi, professionnellement parlant. » Il rétorque d’un ton solennel, les yeux qui soutiennent les siens, la main qui s’égare pour se saisir d’une tasse apportée par la serveuse. Professionnellement parlant, tout va (presque) bien pour lui. Les élèves sont en vacances, ce qui lui permet de passer ses journées devant sa console pour oublier que, en dehors de ça, ce n’est pas une bonne période. Elle ne parlait pas de cet exercice-là ? Tant pis pour elle. Elle peut s’enquérir de son travail, mais rien ne l’interdit d’en faire de même bien que la profession de sa sœur soit à mille lieux de la sienne. « Mes élèves sont moins chiants. » Il se contente de rétorquer en haussant les épaules ; une réflexion qu’il ne se serait jamais permis d’ordinaire et qui, face à Sawyer était largement autorisée et légitime – il va sans dire, de son air absolument pas biaisé, voyons.

Heureusement pour lui, la menthe aura eu raison d’elle et servi de vengeance à sa place, tandis que le rire de Kieran perce l’air suite à la réflexion de sa sœur. « Mais carrément ! Propose l’idée à tes chefs, tu peux faire ça pour moi, non ? » Il interroge, manquant d’ajouter : ça me fera au moins un contrat, s’empêchant de glisser sur ce terrain alors que son regard se veut plus sérieux. « Mais tu n’as pas répondu à la question. » Qui demeure sincère bien que mal formulée et si Sawyer se soucie de sa réussite, il se soucie autant de la sienne et souhaite avoir l’assurance que tout se passe bien pour elle. Et si la grimace sur le visage de Sawyer est plaisante et qu’il pourrait s’en satisfaire de longues heures, il a néanmoins la décence de s’assurer qu’elle ne perdue pas au-delà du supportable pour sa sœur. « Sérieusement, Sawyer ? » Il lui demande, sa moue se calquant sur la sienne alors qu’il plisse les yeux de la même manière pour s’offusquer des doutes qu’elle peut émettre à son intention. Ce n’est pas son genre, tout le monde sait qu’il s’avère être la gentillesse incarnée, voyons. Et c’est un éclat de rire franc qui s’échappe d’entre ses lèvres lorsqu’elle déguste le chocolat en question, Kieran finissant par hausser les épaules et les mains en l’air. « J’ai dû confondre avec cannelle, pardon. » Framboise, cannelle, c’est du pareil au même, après tout. « T’es au courant que ça fait mauvais genre pour un policier d’être lui-même à l’origine de violences ? » Il souligne, son air innocent plaqué sur le visage. Voyons, Tom, tu ne te le permettrais pas, n’est-ce pas ? Du moins, il ne l’espère pas, parce qu’il est certain qu’il ne se relèvera pas d’un tel combat. « Ton propre frère, quelle honte. » Et à cet instant, lèvres serrées et yeux plissés, il atteste mieux que jamais la raison derrière ce surnom dont elle l’a affabulé quelques années plus tôt – pas plus glorieux que Patricia, mais néanmoins bien plus affectueux.

La bonne fée qui distribuait la panique s’est peut-être penchée un peu trop sur son berceau, mais ce n’est pas pour autant qu’il n’a pas bénéficié d’une pincée d’instinct de survie, Kieran. Oh, bien sûr, celui-ci ne consiste pas à fuir devant un ours ou à boire sa pisse pour survivre, mais plutôt à enchaîner les mensonges quand il s’agit de se sortir des situations (souvent foireuses) dans lesquelles là-aussi, il a une prédisposition grâce à la bonne distribution de ses attributs à la naissance (distribution complètement aléatoire et chaotique, il va sans dire). Quoi qu’il en soit, elle aurait pu persister que Kieran serait parvenu à garder la face. On ne dirait pas lorsqu’on le voit, mais il a un répertoire de mensonges qui ne cesse de s’allonger à mesure qu’il se retrouve dans une situation désastreuse. Soit, je ne peux pas totalement l’accuser, je peux porter une partie de blâme quant au fait que je l’aide à réfléchir à ceux-ci ; mais après tout, un petit mensonge n’a jamais tué personne, alors on peut supposer qu’un second, un troisième et un centième ont un effet similaire, n’est-ce pas ? Et puis... ce n’est qu’une omission de la vérité, peut-on vraiment considérer cela comme un mensonge ? Professionnellement parlant, les choses ne se passent pas si mal. Bien sûr, elle pourrait se passer bien mieux et Kieran a souvent réfléchi à ce que serait ce mieux, ce qui fait qu’en cas de besoin, celui-ci pourrait être prétexté. Les idées ne manquent pas dans sa petite tête (je peux l’attester puisque je vis avec elles) et Kieran pourrait être, à choix, en train de plancher sur un comics relatant les histoires d’un individu ayant pour super pouvoir un alter-égo qui émane de son esprit, des planches pour un projet global sur la santé mentale ou simplement en train de mettre en place des ateliers gratuits pour initier les plus jeunes à l’Art. Quoi qu’il en soit, aucun de ces projets ne dépassera de simples paroles, le jeune homme ne se faisant pas confiance pour les réaliser, même s’ils sont préparés de A à Z dans sa tête (et que s’il y a beaucoup d’idées à éliminer dans celles-ci, ça n’en fait pas partie). Alors qu’il songe à quelle option utiliser, Sawyer semble se contenter de sa fausse assurance, mettant un terme au sujet. Oh, bien évidemment qu’il perçoit le doute de sa sœur, mais comme souvent, il se fait passer pour plus stupide qu’il ne l’est en affichant un sourire convaincu. Tout va bien sur certains aspects, alors généralisons la chose, n’est-ce pas ?

Il ne lui est pas difficile de noyer les doutes de Sawyer, tout comme il ne lui est jamais difficile de changer de sujet lorsque la nécessité l’impose ; et provoquer (doucement) sa sœur semble être la parade parfaite. Notons une facilité à l’insulter comme un frère le ferait, lui qui d’ordinaire n’a jamais un mot plus haut que l’autre, signe de l’importance de Sawyer. « Tu veux vraiment que je te donne des exemples ? » Il l’interroge, provocateur et je m’avère surpris : j’ai tellement l’habitude de le côtoyer dans sa mauvaise passe qu’il m’est difficile de le voir sous ce jour plus détendu. C’est l’effet Sawyer, la seule, à l’heure actuelle, avec laquelle il se sent à peu près lui-même (si on considère qu’il sache réellement qui il est). Cette aisance se confirme lorsqu’il s’agit de se faire embaucher ; il est évident que Kieran serait un élément fort de la police et que Sawyer ne regrettera jamais de l’avoir pistonné (hm, hm). « J’ai tellement hâte de travailler avec toi, on va former une super équipe et on va botter les culs des enfoirés. » Est-ce qu’il exagère le sourire sur ses lèvres et sa petite danse de la victoire ? Parfaitement. « Enfin, tu arrêteras les enfoirés et moi je t’apporterai du chocolat à la menthe pour fêter ça. » Est-ce qu’il exagère cet air moqueur sur son visage ? Oui, complètement. « Sauf si tu préfères vin rouge. » Est-ce qu’il reprend goût à leurs chamailleries ? Là aussi, il plaide coupable. Kieran redevient sérieux lorsqu’il s’agit de s’intéresser à la vie de sa sœur et plus particulièrement son travail. Comprenez qu’il a besoin de s’assurer de la bonne santé mentale de sa sœur en vue de ce qu’elle voit tous les jours et en frère aimant qu’il est, il se doit d’anticiper son potentiel internement en cas de nécessité (ou alors simplement se préparer à être une épaule sur laquelle se reposer, mais la première idée est plus pertinente dans la continuité de leurs chamailleries). « Pas assez convaincante pour proposer une trêve pendant les fêtes, je vois. » Il souligne avec un sourire faussement innocent, néanmoins soucieux de ce que Sawyer voit au quotidien dans le cadre de ce travail. Loin d’avoir les épaules pour partager ces choses, il peut néanmoins proposer quelque chose à la hauteur de ses capacités : « Et je vois aussi qu’il faut qu’on fasse une soirée maman j’ai raté l’avion. » Il secoue vivement la tête, façon pour lui de lui dire qu’aucune négociation n’est possible et qu’il apparaît évident qu’elle doit se changer les idées. Et quoi de mieux qu’un enchaînement de films de Noël pour oublier la réalité ? On se le demande (il aurait bien proposé Die Hard aussi, mais il semblerait que la question soit encore largement discutable).

Dans l’immédiat, la manière de changer les idées de sa sœur semble peu agréable (pour elle, pour lui c’est une autre histoire à voir le sourire ravi qu’il affiche sur le visage après qu’elle ait manqué de s’étouffer). Et malgré mon affection pour Sawyer, je ne peux que féliciter Kieran de faire à nouveau preuve d’un certain naturel. Le regard qu’elle lui lance ne manque pas de lui causer des sueurs froides, d’autant plus quand elle évoque sa vengeance sur un terrain. Autant dire qu’il est foutu, le Halstead et que jamais il ne pourra échapper à la colère de son aînée. La date n’est pas actée, mais nous penserons à faire un testament (nous, car inutile de préciser qu’il oubliera la moitié de ses biens et que celui-ci n’aura aucune valeur, je connais l’animal). Il tente une parade, qui bien évidemment n’a aucun effet sur la cruauté de Sawyer (oui, oui). « Ah ouais, façon association Blake, quoi, c’est du propre. » Probablement qu’il est le seul à saisir la référence, peu importe, à cet instant il est simplement outré par une chose... « Autant d’années pour découvrir le vrai visage de ma sœur, je suis... choqué. » Complètement choqué, quelle personne a-t-il face à lui à cet instant ? Menacé ainsi par son propre sang (okay, pas vraiment), la réaction de Kieran est évidemment des plus matures : il lui tire la langue avant de froncer les sourcils lorsqu’elle laisse sa phrase en suspens, l’observant mélanger les tasses. « C’est petit ça, Sawyer. » Il s’offusque avant de se saisir de la tasse tendue par sa sœur, la portant à ses lèvres dans un geste traduisant de ses doutes. Lorsque le liquide s’écoule dans sa gorge, il peine à réprimer la grimace sur ses lèvres ; foutue lavande. « Pain d’épices, délicieux. » Ignoble. Imitant les gestes de Sawyer, il finit par lui tendre à son tour une tasse. « Tu crois pas qu’il faudrait que tu m’apprennes à jouer correctement du baseball avant de pouvoir te vanter de m’écraser ? » Il questionne, à peine provocateur. Mais après tout, l’exercice est inégal et s’il peut justifier de passer un peu plus de temps avec elle en cette période, qu’il en soit ainsi.

L’aisance de Kieran face à sa sœur me surprend, mais ne me déplaît pas. Au contraire, je suis ravi de le découvrir sous ce jour plus détendu et cela ne fait que concrétiser l’importance de Sawyer, que j’avais déjà pu apercevoir ce terrible soir où il avait frappé à sa porte, perdu et démuni. Elle avait été là pour lui, tout comme elle est là pour lui aujourd’hui et je suis ravi qu’elle ne soit pas contrainte de le supporter que dans les mauvais moments, mais qu’elle soit également la privilégiée quant à tous les bons moments qu’il passe. Aujourd’hui en est, je le sens à la légèreté dans le cœur de Kieran autant qu’à ses piques peut-être puériles, mais qui ne font que renforcer son impression de bien-être. Si sa sœur conserve son sérieux en s’adressant à lui, ses gestes qui n’ont rien à envier aux meilleurs comédiens de théâtre, Kieran, lui, ne se gêne pas pour pouffer de rire. « Ose seulement. » Vraiment ? Et je le sens, qui tente déjà de faire la liste de sa tête et... ce n’est même pas pour faire semblant, il en a des dizaines et des dizaines d’exemples à lui balancer à la figure, juste pour agacer sa sœur, alors à défaut, il répond : « Pfiou, le temps va nous manquer. » Il affiche une moue boudeuse qui s’accompagne d’un haussement d’épaules. Ah, si seulement ils avaient le temps de lister tous les exemples la concernant ; mais le temps leur manque et à ce constat, il espère simplement provoquer doucement sa sœur. Bien sûr, son sérieux ne dure que quelques instants alors qu’il laisse échapper un rire à peine moqueur ; preuve en est qu’il n’arrive décidément pas à être crédible face à elle, tant la perspective de la faire tourner en bourrique lui plaît. Et c’est un vrai problème s’ils sont amenés à travailler ensemble, maintenant que cette option est envisagée – et est parfaitement sérieuse, évidemment, il suffit de voir sa danse de la victoire parfaitement ridicule. « Ça me semble déjà plus crédible. Mais si tu veux je te donnerai des crayons de couleur et une petite feuille de papier pour gribouiller dans ton coin pendant ce temps-là. Faut pas croire, on a tout ce qu’il faut pour occuper les enfants. » Et il ne doute pas que cette proposition est tout à fait sérieuse, ce qui implique une réponse au même niveau... alors que son majeur se tend en sa direction et qu’il affiche un sourire des plus forcés, l’air de remercier sa sœur pour cette attention ô combien touchante. « Et tu seras bien évidemment forcée d’afficher mes dessins dans ton bureau. » Son sourire se veut plus sincère alors qu’il s’élargit, imaginant sans difficultés les dessins en question. Et pour avoir le droit aux images, je peux vous assurer que je n’envie pas Sawyer lorsqu’elle aura le droit à la collection automne/hiver des plus belles croûtes d’un enfant de cinq ans. Des symboles phalliques en veux-tu en voilà, des portraits bien peu flatteurs, des paysages d’enfer pour lui faire comprendre ce qui l’attend dans le futur... Assurément, Sawyer regrettera bien vite cette proposition. Et son sourire de parfait petit frère chiant disparaît bien vite lorsque son pied vient cogner son tibia, son réflexe le faisant heurter à son tour le dessous de la table. « Aïïïe. » Il grimace, il exagère, il soupire lorsque la serveuse juge à nouveau leurs chamailleries. « Faites pas attention, ça lui arrive des fois…on cherche plus à comprendre. » Un sourire pincé à l’attention de la serveuse pour la convaincre de poursuivre son chemin, il réfléchit déjà au sort qui attend sa sœur. « Tu sais que le catch porte des protège-tibias au baseball ? Je pense que c’est un poste fait pour toi. » Et elle en rajoute une couche, alors qu’il fronce les sourcils face à tant de provocations et que son regard s’arrête sur son oreille, que sa tête se penche. « Attends Sawyer, bouge pas. » Il lance sérieusement, se rapprochant rapidement de la table afin que sa main soit en mesure de s’abattre doucement contre sa tempe. « Je l’ai pas eue. » Il marmonne quand son regard croise le sien et qu’il sait très bien qu’elle a deviné son plan (probablement à la minute même où il a ouvert la bouche pour la première fois, à vrai dire), mais il ne s’excuse pas, Kieran, son sourire d’imbécile sur les lèvres alors que d’ordinaire, les rôles se veulent inversés. « Deal. Tu sais d’ailleurs que je t’imagine parfaitement avoir été comme Kévin plus jeune ? Très créatif, mais aussi très prompt à dire et faire tout un tas de conneries…Bon…en fait ça n’a pas tellement changé, si ? » Un air angélique sur le visage et un haussement d’épaules innocent plus tard, il souligne : « Mais Kevin a jamais eu de mentor. » Contrairement à lui et Sawyer, qui ne peut se plaindre d’avoir engendré un monstre – il a été élevé à la dure en ce sens et elle y a contribué.

Pour l’heure, c’est surtout concernant le vrai visage de sa sœur qu’il est troublé, Kieran, alors qu’il réalise qu’elle appartient à cette association Blake dont il serait préférable de se tenir éloigné. Et il la voit, hésitante, à réfléchir quant à la référence utilisée, avant de se lancer. « Appelle-moi John Le Rouge ? » « Yeah, bitch ! » Il s’exclame en levant les bras, attirant une nouvelle fois l’attention de la serveuse qui roule des yeux comme jamais auparavant. Peu importe, à une référence, il en ajoute une autre et c’est un jeu qui pourrait ne jamais s’arrêter avec Kieran. « Tu vois quand tu veux ! » Il souligne, ravi des efforts de sa sœur, qui ne semble finalement pas un cas si désespéré en matière de pop culture. Il y a encore beaucoup de boulot, la route semble encore longue, soit, mais ils arrivent à quelque chose, finalement. Sans surprise, son insolence lui vaut d’en payer les conséquences et malgré ses espoirs, Sawyer n’est pas dupe, tandis qu’il maudit, encore et encore, celui qui a eu l’idée de mélanger de la lavande à du chocolat chaud. Quelle abomination. Sa sœur, elle, semble plus chanceuse que lui ; pire encore, elle s’en vante. « Gnagnagna. » Qu’elle a le droit en guise de réponse parfaitement mature. Ce qui l’est tout autant, c’est la facilité avec laquelle elle se vante de pouvoir l’écraser alors qu’elle ne lui laisse aucune chance. « Hé ! Je sais courir ! Regarde un peu Race of Australia ! » Il s’offusque, avant de froncer les sourcils. « Nan, en fait, nan, oublie. » Parce que ses chutes dans l’émission démontrent d’une chose : elle a parfaitement raison. « Si j’étais toi, Tom, je n’aurais pas aussi confiance. » Il souligne en soutenant son regard. « La chance du débutant, tu connais ? » Sourire fier sur les lèvres, il espère bien en bénéficier au moment opportun. « Mais fais la maligne, on verra comment tu te débrouilleras le jour où je vais t’inscrire à un cours de dessin à la fac, en auditeur libre. » Après tout, elle peut se vanter de ses compétences pour (gentiment) l’humilier, il n’y a pas de raisons qu’il n’en fasse pas de même, bien qu’il soit le premier à douter de ces mêmes compétences qu’il prétend vanter à cet instant.

@Sawyer Harding