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24 décembre 2020

@elise williams

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A défaut de pouvoir entendre le bruit des flammes crépiter dans la cheminée du salon, la nuit s’était confortablement installée au delà des murs de cette maison qui n’avait d’un foyer plus que le nom. La neige n’était pas au rendez-vous et pourtant, avec les lumières autour du sapin qui se mettaient à scintiller à intervalles réguliers, la magie de Noël semblait faire quelque peu effet. Quelques cadeaux soigneusement emballés avaient été déposés au pied de l’arbre, roi de la forêt, même si l’humeur n’était en rien à venir échanger des présents. Certaines habitudes restaient malgré tout en place, même si le reste du monde semblait se fondre dans un tas de décombres.

En réalité, c’était le coeur de Damon qui ressemblait à une bâtisse en ruines depuis les derniers jours. Les nouvelles qui avaient été mises en lumière devant ses yeux innocents n’avait en rien arrangé son quotidien, et il peinait à se remettre correctement en marche. Tout ce qu’il avait cru savoir durant les vingt dernières années avait été chamboulé et annihilé par quelques mots prononcés par Elon, son grand-père, lors du dernier diner de famille. Lui avait été avoué que ses parents, les deux figures qu’il avait nommées comme tels depuis sa naissance, n’en étaient rien en réalité. Saül avait encore la prétention de pouvoir garder le titre d’oncle, mais Elise - elle, elle devenait une étrangère à cette lignée, là où elle avait pourtant toujours été celle qui avait été à ses côtés.

Et surement ça, qui blessait le plus Damon dans cette histoire. Lui qui avait porté et voué un amour inconditionnel à cette femme se retrouvait à croiser tous les jours au sein de leur maison une personne qu’il ne connaissait finalement pas du tout. Le fantôme d’une vie, la brise d’un souvenir. Il avait préféré éviter la jeune femme plutôt que de venir la confronter sur toute cette histoire, cependant, ayant eu besoin de temps pour venir digérer les moindres informations qui étaient déjà parvenues jusque lui. Pourtant, elle lui avait dit, elle lui avait promis qu’elle lui expliquerait tout. Elle l’avait même presque supplié de la laisser faire, là-bas alors qu’ils étaient encore au milieu du chaos du restaurant. A ce moment là, Damon n’en avait rien fait. Il n’avait pas le temps, la patience, le coeur, l’envie - la liste était longue des ressentis qui avait été siens en cet instant là - de tout ça, et avait préféré s’éloigner des siens le temps de reprendre un semblant de contenance pour avoir cette conversation avec Elise.

Le jour du réveillon était peut-être pas le plus adéquate, et pourtant ce fut ce jour là qu’il vint descendre d’un pas hésitant les escaliers qui menaient dans le salon, où sa mère attendait sur le canapé. Il ne vint pas terminer de fouler le bois des marches, mais vint plutôt s’asseoir sur ces dernières, en bas de l’escalier, laissant ses opales se perdre un instant parmi les lumières du sapin de Noël. Le silence fut roi encore une poignée d’instants, également, avant que le jeune homme ne trouve le courage nécessaire pour venir formuler ce qui occupait ses pensées, ce qui pesait sur son coeur. « Je suis prêt. » Il vint tourner, lentement mais surement, ses yeux pour que ces derniers puissent désormais se poser sur le visage de celle qu’il ne cessait de considérer comme sa mère. « A entendre la vérité. » Parce-qu’après avoir passé un long moment à faire les comptes, il préférait encore entendre l’histoire de la bouche d’Elise que de n’importe qui d’autre - surtout pas celle de Saül.

Habituellement à ce temps-ci de l'année, c'est dans la belle Italie que tu te trouves depuis déjà vingt-et-une année. Jamais encore, Noël ne s'était fêter ailleurs. Aujourd'hui, non seulement il ne se passera pas en pays italien, il se passera également relativement seul. Tu pourrais sûrement aller ailleurs. Tu pourrais te sauver, jusqu'à Bayside - sa fille à lui, elle l'honneur de la présence ou il est aussi seul que toi ? Tu pourrais, mais tu n'en as pas envie. Tu n'as pas l'esprit festive ce soir. Tu n'as pas l'esprit des fêtes, parce que la seule personne avec qui tu voudrais passé cette soirée n'a pas envie de la passer avec toi. Il a beau être à l'étage. Il ne sera plus là avant que minuit sonne, ou il ne descendra simplement pas.

Tu es épuisé. Tu es vidé. Tu ne dors que très peu ces derniers jours. Tu n'arrives qu'à fermer les yeux que lorsque tu entends Damon passer le pas de la porte, ce qui n'arrive pas si souvent que ça. Alors, les nuits blanches, tu les cumulent depuis trop longtemps. Ton voyage à Paris à simplement suffit à t'achever; le sommeil entre-coupé dans l'avion, le décalage horaire, les fortes émotions. Non, rien pour aider. Mais tu ne regrettes rien du tout, puisque c'est un énorme poids qui a quitté tes épaules à la seconde où la signature de Saül s'est posé aux côtés de la tienne.

Tu les entends les marches qui craquent sous le poids des pieds de Damon qui y descend. Tu les entends craquer au même rythme que ton coeur se fissure un peu plus. Tu restes silencieuse, alors que ton regard dévie vers lui. Tu voudrais savoir où il s'en va. Tu voudrais qu'il te rassure qu'il sera bien accompagné en ce jour de fête. Il ne devrait pas être tout seul ce soir. Ni aucun autre. « Je suis prêt. » Ça. Tu ne l'avais pas vue venir du tout. Ton coeur se serre si fort, alors que tu le vois s'asseoir à quelques marches de la fin de l'escalier. Il explose en des milliers de morceaux lorsqu'il pose son regard dans le tien. C'est quand la dernière fois qu'il a daigné te regarder ? « A entendre la vérité. » Alors, vous y êtes, à ce jour là. Peu importe à quel point tu as envie d'étriper Saül en ce moment, tu voudrais qu'il soit là.

Tu te relèves du canapé pour aller t'installer à même le sol. Juste en bas des escaliers, là où tu n'es ni trop loin, ni trop près de lui. « J'arrive de Paris. » La veille à peine. S'est-il seulement rendu compte de ton absence ? Ou il avait lui aussi déserté cette maison, encore ? « On a finalisé le divorce. C'est terminé pour de bon cette fois. » C'est pas ça qu'il a envie d'entendre Damon, mais c'est quand même par ça que tu vas commencer. « Sa nouvelle femme est française. » que tu viens justifier la destination non-conventionnelle pour les papiers de divorce. « Je te dis ça maintenant, parce que je sais pas si tu vas encore vouloir me parler après. » Et tu voulais qu'il sache. Tu ne peux pas être plus honnête que tu ne l'es en ce moment. Elle n'est pas belle la vérité. Elle ne l'est pour personne d'autre que toi. Aussi ignoble ce geste peut-il être, c'est la plus belle chose qui te soit arrivé.

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24 décembre 2020

@elise williams

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Il savait parfaitement qu’il en était responsable, mais à partir du moment où il s’était mis à descendre les escaliers, l’ambiance qui aurait du se voir festive et appréciable s’était transformée en quelque-chose de pesant et oppressant. Il savait que c’était du au sujet qu’ils s’apprêtaient à discuter, Elise et lui, mais il ne pouvait continuer de vivre à travers ce voile de mensonges et de non-dits. Il avait eu besoin d’un temps, d’un instant, pour intégrer l’idée que sa vérité n’était pas celle qui était universelle mais désormais, Damon voulait tout connaître. Il était prêt - et il comptait sur sa mère pour honorer sa promesse et venir apporter les réponses à ses questions.

Elle était venue se lever du canapé pour s’installer en bas des marches de l’escalier. Elle était désormais assez proche pour que Cosco puisse venir détailler toutes les nuances de couleurs de ses yeux, mais assez loin pour que sa main ne puisse pas attraper celle de sa mère. Pour la première fois depuis des années, depuis un long moment, il se trouvait soulagé qu’elle n’ait pas tenté de venir plus proche de lui. S’il l’aurait accepté avec grande joie pendant longtemps, ce n’était désormais plus le cas. « J'arrive de Paris. » Une précision qui ne lui semblait pas nécessaire présentement, mais il ne vint cependant pas faire le moindre commentaire. Il savait qu’elle était partie pour Paris ces derniers jours, en témoignaient les billets d’avion et l’étiquette portée par la poignée de sa valise. Il savait qu’elle était partie pour Paris car, malgré ce qu’elle devait penser présentement et de lui ces derniers jours, il remarquait le moindre détail. « On a finalisé le divorce. C'est terminé pour de bon cette fois. » Ses yeux vinrent croiser un instant un seul ceux de sa mère, alors qu’elle prononçait ces derniers mots. Il ne savait en revanche pas que c’était pour cette raison là qu’elle s’était échappée en territoire français, et ne savait même pas que c’était là-bas que se déroulerait la phase finale de ce divorce plus que compliqué. Ce qui voulait également dire que c’était en France que se trouvait son père - que se trouvait Saül. Il déglutit avec grand peine.

Il n’eut cependant pas le temps de venir froncer complètement les sourcils que déjà, Elise venait ajouter une précision à ses paroles. « Sa nouvelle femme est française. » Elle était donc française. Une partie de ses pensées vint s’accaparer de l’information comme quoi Elise faisait référence à l’autre femme comme sa nouvelle femme et non sa nouvelle compagne ou sa nouvelle copine. Le patriarche qui n’en était plus un avait-il fait de nouvelles folies avec celle dont il tombait amoureux ? Les questions se bousculaient dans l’esprit de Damon et pourtant, ce n’était en rien vers tout ça qu’il désirait aller lorsqu’il avait avoué à haute voix qu’il était prêt à entendre la vérité. Ce que faisait son père dans la noirceur de la nuit ne l’intéressait plus depuis que ce dernier avait préféré lui tourner le dos plutôt que de recoller les morceaux qu'il avait volontairement fait éclater. « Je te dis ça maintenant, parce que je sais pas si tu vas encore vouloir me parler après. » Les lèvres de Cosimo vinrent se pincer en une ligne fine. Elle n’avait pas tout à fait tort, Elise - il ne saurait répondre à sa question cependant. Il ne savait rien de ce que l’avenir lui réservait après cette discussion. Il savait juste que tout ce qu’il avait eu de côté pour lui ces derniers jours, alors que c’était l’ignorance de l’histoire originelle qui prônait, ne le satisfaisait en rien.

Il préférait venir prendre le taureau par les cornes que de faire l’autruche une journée de plus. « Je peux pas te dire. » Sa voix était presque murmurée, presque soupirée. Si ses parents n’avaient pas pris cette habitude là avec lui, Damon avait décidé de son côté d’être toujours honnête avec sa mère sur ce qu’il ressentait et sur comment il se sentait. Nier qu’il n’avait aucune idée de comment allait se dérouler la suite serait mentir, et il ne marchait pas sur ces plates bandes là. « Quoi d’autre à savoir ? » Après tout, ils n’étaient pas pressés. Ils avaient toute la soirée et la nuit qui s’en venait s’il fallait. Et il prendrait les informations qu’Elise daignerait lui donner - qu’elles soient directement ou non reliées à son histoire personnelle à lui.

« Je peux pas te dire. » Non. Il ne peut pas. Pas encore. Mais toi, tu sais que les prochaines annonces ne seront pas faciles. Que ça, c'est le facile. Que tes paroles vont simplement monter en complexité. Qu'elles vont devenir de plus en plus blessantes. Tu sais qu'il mettra probablement plus de journée à encaisser la suite que ce qui s'était passé au dernier dîner. Tu sais qu'il y a une possibilité qu'il y ait des cris, des larmes, des insultes, des mots durs. Tout ce que tu espères, c'est qu'un jour il arrive à te pardonner. Tu es cruellement égoïste de penser que s'il te prend pas toi, il n'en a pas de mère. C'est facile de changer Saül pour Auden. Une mère, il n'en a pas d'autre.

« Quoi d’autre à savoir ? » Elle va faire mal, celle-là. « Elle est enceinte. » Tu t'étais longtemps dit que ce n'était pas à toi de lui apprendre tout ça, que c'était à Saül de prendre ses responsabilités en main et de dire à son fils à quel point il avait merdé. Mais visiblement, Saül n'aura jamais cette discussion avec Damon. Parce qu'elle gagne toujours contre toi sa nouvelle petite famille, et même contre celui qui a été son fils pendant vingt ans. « J'arrive plus à me souvenir depuis quand je le sais. Je crois que c'est pour bientôt. » Tu réfléchis un peu à quand Auden est arrivé sur le pas de ta porte avec ce cadeau empoisonné. C'était après le dernier repas familiale dans la demeure de Saül et Elise. C'était après l'annonce officielle de votre rupture à Damon. C'était avant quoi ? Tu ne sais plus. L'annonce a été un réel coup de massue pour toi. Tu as broyé du noir. Tu as perdu la notion du temps. Tu n'arrives pas à t'en souvenir parce que tu ne veux pas t'en souvenir. Mais tu sais quand même que l'annonce date de quelques mois. Le bedon rond d'Ariane à Paris confirme que c'est pour bientôt aussi.

« On a plus d'argent. Il a tout perdu au jeu. » Et dans la cocaïne, mais ça, tu ne le sais même pas encore toi-même, croyant qu'il y avait simplement l'alcool pour le rendre en véritable connard ces dernières semaines. L'argent, il en a sûrement rien à faire Damon. Il est bien le seul dans cette famille qui ne s'en ait jamais soucier. Le seul pour qui ça n'a jamais eu d'importance. De toute manière, il ne s'est rendu compte de rien et il n'aurait jamais rien su si tu ne lui avais pas dit. Saül fait faillite. Toi, tu vends des maisons pour retourner à la vie d'avant. Mais qui aurait cru, quand même, que vous, les Williams, vous en viendrez à devoir vendre vos demeures secondaires pour tenir la tête hors de l'eau.

« J'ai cru tomber en bas de ma chaise quand on a appris que Auden allait être père. Nous, on essayait depuis des mois, et jamais rien. » C'était frustrant que lui, se tape une fille une fois et qu'elle tombe enceinte, alors que vous, des mois et des mois d’essais et jamais un foutu positif sur ces millions de test de grossesses. Pourquoi est-ce que la vie donne des enfants par accident, mais pas à ceux qui en veule vraiment ? Tu te souviens aussi du scandale que ça l'a fait éclaté au sein de la famille Williams, alors que leur fils avait fait un enfant à une fille qui n'était pas d'une bonne famille.

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24 décembre 2020

@elise williams

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La question allait surement rapidement regrettée, mais elle était désormais posée. Il ne savait pas s’il avait besoin d’en savoir plus sur les déboires - récents ou non - de son père, mais il ne saurait rester en bordure de la vérité bien plus longtemps désormais. « Elle est enceinte. » Comme par instinct, ses yeux vinrent se fermer et un long soupire vint se faire entendre. « J'arrive plus à me souvenir depuis quand je le sais. Je crois que c'est pour bientôt. » Saül allait donc être père, mais dans une version réelle cette fois ci et non simplement dans cette fiction qu’il semblait s’être construit au fil des années. Un enfant allait naitre et une partie de Damon se sentait blessé de savoir qu’il ne s’agirait en rien d’un frère ou d’une soeur pour lui. C’était idiot de penser ça, d’avoir des idées de la sorte, alors que pas plus tard qu’une semaine plus tôt il était allé voir son vrai frère venant de pousser son premier cri dans ce monde. Il se sentait tout de même blessé d’apprendre que son père, que l’homme qui avait tenté de l’élever, préférait construire quelque-chose d’autre qui ne l’impliquait en rien dans les plans et qui laissait, bien sur, Elise autant en dehors.

Pour la suite, il n’eut pas besoin de venir demander à sa mère de lui annoncer la nouvelle suivante car ses paroles semblaient désormais se déverser comme l’eau d’une fontaine. « On a plus d'argent. Il a tout perdu au jeu. » Cette information là ne semblait même pas venir étonner le jeune italien. Il n’avait aucune peine à imaginer son père vivre comme si le monde lui appartenait et comme s’il était le première richesse mondiale. S’ils avaient toujours de quoi vivre plus que confortablement, cette information ne venait pourtant pas valider cette hypothèse - et cela venait surtout prouver qu’il était autant égoïste qu’il y paraissait. « C’est pas grave ça. » Il vint soupirer une nouvelle fois, ouvrant de nouveau les yeux, n’osant croiser le regard de sa mère cependant. « On trouvera une solution. » Qu’il vint dire comme si Elise et lui formait toujours ce duo inséparable qui les avait pourtant caractérisé pendant tant d’années. L’argent n’était pas un point qui inquiétait le jeune homme, cela ne l’avait jamais réellement inquiété - peut-être parce-qu’il avait toujours vécu dans l’opulence et la possibilité de tout avoir d’un claquement de doigt. Mais il savait que des solutions étaient toujours envisageables et que cela restait des soucis matériels. D’autres soucis, bien plus proches de son coeur, nécessitaient des explications que sa mère tentant, tant bien que mal, de lui fournir.

« J'ai cru tomber en bas de ma chaise quand on a appris que Auden allait être père. » Elle avait tellement parlé des problèmes qui se présentaient dans le présent et qui concernaient les agissements de Saül et uniquement de ce dernier, qu’en première intention, Damon ne comprit pas exactement ce qu’elle voulait dire par ses dernières paroles. « Nous, on essayait depuis des mois, et jamais rien. » Et alors, son souffle manqua un soupire et son coeur loupa un battement. Elle n’était en rien de continuer la liste des soucis du présent, désormais, Elise. Elle venait de faire un bond de plus de vingt ans en arrière, lorsque lui-même n’était en rien encore de ce monde. Elle en venait aux origines de toutes les illusions qui venaient bercer les comptines de l’enfance de Cosimo, qui l’accompagnaient depuis le berceau. Le jeune homme vint ouvrir la bouche, avant de la refermer aussi délicatement. Il ne savait que dire, et pourtant il avait envie de venir d’or et déjà s’exprimer sur le sujet. Il avait tellement été longtemps évincé de la discussion que son premier réflexe fut d’opter pour le silence plutôt que pour la liberté d’expression.

Une longue minute de silence s’imposa entre la mère et le fils, alors qu’en fond sonore conjurait de résonner des airs de jazz et de noël. Dans d’autres salons, des familles profitaient de cet instant particulier pour se réunir, pour renouer parfois des liens du sang. Elise en était, elle, venue à expliquer à Cosimo comment ils n’avaient finalement jamais été reliés que par des mensonges et des histoires à dormir debout. « Continue, s’il te plait… » Ses mots étaient murmurés, alors qu’une larme se permettait déjà de trahir son ressenti en venant tracer un sillon sur sa joue rosie par les émotions.

« C’est pas grave ça. » Le contraire t'aurait étonné. Bien sûr que ce n'est pas grave. Que c'est même le dernier de ses soucis en ce moment. « On trouvera une solution. » Le on te fait sourire immédiatement même s'il ne le devrait pas. Le on n'aura peut-être plus sa place d'ici quelques minutes. C'est facile encore de le dire quand tu ne fais qu'exposer les fautes de Saül, quand les tiennes sont encore mises de côtés. «Je sais. » Juste en vendant les biens de cette maison, la fortune reviendra assez rapidement. Vendre la maison à Grenade suffirait a assuré votre avenir pour des années encore. Tu es encore trop égoïste - et brisé - pour la vendre même si tu n'y remettra probablement jamais les pieds.

Parlant de pauvre...

« Quand ton- » Tu as encore droit d'appeler Saül son père ? Tu as encore droit de te considéré comme sa mère ? Probablement pas. « Quand Saül est partie à Vegas, j'ai passé beaucoup de temps avec Jack. » Oui. Jack. Celui qu'il n'y a pas si longtemps te faisait soupirer de désespoir à chaque mot qui sortait de sa bouche, celui que tu trouvais qui n'avait jamais eu sa place au sein de cette famille, celui que tu n'avais jamais voulu prendre le temps de réellement le connaitre. Il aura fallu dix ans pour comprendre qu'il te désintéressait autant, parce qu'il t'intéressait justement. C'est tellement idiot. Tellement. Mais tu jurais que celle-là, il ne l'aura pas vu venir du tout Damon, mais alors vraiment pas. « Je suis amoureuse de lui. » Et le retour de Saül au sein de cette maison n'aura que confirmer que c'est avec Jack que tu as envie d'essayer. Pour de vrai cette fois.

Bon, voilà, ça fait le tour des dernières nouvelles de l'année.

Et vous y venez finalement, sur le fameux sujet. Le seul qui lui importe vraiment au finale. À peine le sujet abordé que tu voudrais déjà faire demi-tour. Mais tu as promis. Et tu vas tenir cette promesse jusqu'au bout. « Continue, s’il te plait… » Ton regard qui n'avait jusque là pas lâché son visage une seule seconde depuis le début des révélations se détourne vers le mur en face de toi en venant voir la larme qui s'écoule sur la joue de ton fils. Tu es tout simplement incapable de voir que tes paroles lui font et lui feront du mal. Tu ne veux pas voir la possible haine qu'il aura dans son regard pour toi après tout ça.

« On était si jaloux qu'on est allé consulter. » Parce que habituellement, il faut attendre au moins un an d'essai avant d'aller faire des examens. Parce que ça ne marche pas toujours du premier coup ses choses là. Ça peut prendre du temps. Rien à faire du temps quand on est un Williams. On paie et on reçoit ce qu'on veut. Ce que tu voulais ? Toutes les hormones possibles pour que le mois prochain ce soit le bon. « Après quatre médecins - » Quatre médecins sur lesquels tu as gueulé toute ta rage, les traitant tous d'incompétents, ne croyant pas un seul mot qui sortait de leur bouche de traites. C'était impossible que ça t'arrives à toi. Toi, à qui la vie réussis tous les jours. « - j'ai compris qu'on en aurait jamais. Pas moi, du moins. » Il y a ton regard qui s'abaisse sous ses douloureux souvenirs que tu avais passé vingt longues années à oublier. Ils font toujours aussi mal aujourd'hui. « Puis, il y a eu les FIV qui n'ont pas fonctionnés. » Les fausses couches, l'avortement. « Et les papiers d'adoption qu'on a jamais vraiment eu envie de remplir. » Parce que la vérité ni lui ni toi n'avait vraiment envie de l'accepter. « Puis, il y a eu toi. Et soudainement, tout avait un sens. » Et maintenant plus rien n'a de sens. C'est à ton tour cette fois de venir essuyer cette larme qui menace de s'écouler contre ta joue.

« Je ne peux pas te dire grand chose sur ta mère. Il faudra que tu demandes à Auden si tu as des questions. » Parce que sa mère, tu ne la connaissais pas du tout. Tu ne l'a même jamais vu de ta vie. Tu ne sais pas comment elle était. Tu espères que Auden saura lui dire à quel point elle l'aimait, à quel point elle le désirait. Tu ne veux surtout pas que Damon ait l'impression qu'il n'était pas voulu malgré les circonstances de sa naissance. C'était un accident, mais il était aimé tu en es convaincu. « Tout ce que je peux te dire, c'est qu'elle t'a mise au monde toute seule. Et qu'elle est morte toute seule. » Il était pas là Auden. Personne n'était là. Vient en scène les voleurs d'enfants. « Je suis désolée. » Qu'elle ne soit plus de ce monde. Qu'il ne pourra jamais la rencontrer. Elle devait être extraordinaire pour mettre au monde un enfant si parfait - parce que forcément qu'il tient tout d'elle et rien d'Auden.

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24 décembre 2020

@elise williams

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« Quand ton- » Il n’était donc pas le seul à venir buter sur ce mot, pourtant si simple d’utilisation, portant toute autre signification désormais. « Quand Saül est partie à Vegas, j'ai passé beaucoup de temps avec Jack. » Il se doutait que la vérité ne serait pas simple à entendre. Il se doutait que cette dernière viendrait laisser des cicatrices sur des tissus qui ne méritaient pas ce traitement de faveur. Mais il ne pensait pas que ces traces indélébiles viendraient également du côté de sa mère. Il plissait toujours davantage les yeux, Damon, comme si le fait de s’isoler de la réalité lui permettrait de ne pas entendre la suite des mots qu’elle s’apprêtait à prononcer. Il voulait connaître la vérité sur son origine; il était légitime qu’Elise en profite pendant qu’il était tout ouïe pour le mettre au courant des dernières péripéties familiales - il n’avait juste pas envie d’entendre les conclusions qu’il tirait seul dans sa tête depuis quelques temps désormais. « Je suis amoureuse de lui. » « Maman… » A peine murmuré, à peine prononcé, pourtant porté d’une voix du coeur. Il était prêt à entendre toutes les fautes et tous les torts de celui qui était supposé être son père depuis vingt ans; que sa mère fasse partie de cette grande mascarade ne lui plaisait en rien cependant. Elise avait toujours eu le droit à sa petite place privilégiée dans la vie et le coeur de Damon, et malgré les annonces récentes il n’avait jamais pu imaginer l’en déloger. Mais c’était ce genre d’information qui finirait par le rendre chèvre, qui finirait par lui retirer toute logique dans cette mise sur un piédestal. Le reste de cette nouvelle, en revanche, il ne désirait pas y prêter l’attention nécessaire ce soir. Jack venait de faire son entrée dans la partie et il préférait le laisser aux écuries le temps que la bataille principale de la course se déroule, plutôt que de lancer toutes ses cheveux tête dans le tas de suite.

Alors, il vint demander - supplier - à sa mère de continuer ses explications. Parce-que ce n’était pas la partie qu’il avait envie de discuter, ce n’était pas les éléments qu’il avait envie de décortiquer. Il voulait en savoir davantage sur l’origine de ce mensonge, sur ses origines à lui finalement - même s’il n’osait les nommer en ces termes. Il ne prit même pas la peine de venir effacer la larme traitresse qui s’était échappée. « On était si jaloux qu'on est allé consulter. » Jaloux de Auden, jaloux de sa paternité annoncée; ce petit jeu n’avait donc jamais cessé d’exister. « Après quatre médecins - j'ai compris qu'on en aurait jamais. Pas moi, du moins. » Elle était donc là, la rancoeur. Elle résidait ici, cette dent qui faisant tant mal dans la mâchoire de Saül. Ils ne pouvaient pas avoir d’enfant parce-qu’Elise ne pouvait pas avoir d’enfant. Ce qui vint remuer le couteau dans la plaie béante du coeur de Damon une fois de plus. Dans tout ça, ce n’était pas monsieur qui ne pouvait pas mais madame. Et en même temps, cela donnait sens au fait que Elise venait de lui avouer que la nouvelle compagne de son père était prête à mettre son enfant au monde. Mais ce qui faisait le plus mal à Damon, c’était qu’elle n’aurait jamais pu, même en y mettant tout son coeur et toute son envie, sa mère. « Puis, il y a eu les FIV qui n'ont pas fonctionnés. Et les papiers d'adoption qu'on a jamais vraiment eu envie de remplir. Puis, il y a eu toi. Et soudainement, tout avait un sens. » Comme si cela pouvait faire sens, un jour passé ou un jour présent. Comme si il était possible de donner une raison, ou pire une excuse, à leur comportement. « Ce ne fait aucun sens… » Pour son esprit d’enfant piégé dans une histoire dont il n’avait jamais désiré, ça ne faisait aucun sens. Comment deux personnes pouvaient-elles en venir à la conclusion qu’il était plus simple de s’approprier un enfant qui n’était pas le leur, pour leur propre bonheur - pour combler une jalousie les rongeant de l’intérieur ?

« Je ne peux pas te dire grand chose sur ta mère. Il faudra que tu demandes à Auden si tu as des questions. » Auden, désigné par le titre de père désormais. La personne qu’il avait été volontairement voir avant Elise mais avec qui il n’avait eu aucune de ces discussions. Il ne désirait pas en discuter avec lui de suite - qu’avaient-ils à se dire, si ce n’était des excuses d’un côté et des reproches de l’autre ? Damon voulait que la vérité sorte de la bouche de ses parents, ou de ceux qui s’étaient prêtés au rôle pendant la première vingtaine d’années. « Tout ce que je peux te dire, c'est qu'elle t'a mise au monde toute seule. Et qu'elle est morte toute seule. » Suivi rapidement d’un « Je suis désolée. » alors que le jeune homme venait enfin ouvrir les yeux de nouveau, venait tourner son regard embué de larmes vers celle qui se souciait encore malgré tout de son bonheur. Cependant, là n’était pas la question, là n’était plus le point. Il n’en avait que faire, Damon, que la femme Williams soit désolée - les mots qu’elle venait de lui avancer, sans même s’en rendre compte surement, avait terminé d’achever le coeur de l’enfant sous ses yeux. « Elle est… morte ? » Non seulement il ne pourrait jamais rattraper le temps perdu car ses parents lui en avaient privé dès sa naissance, mais en plus la personne qui l’avait mis au monde n’en faisait plus partie depuis ce même instant. Ce fut le signal pour les larmes de Damon, qui vinrent inonder son visage et ses joues, ses yeux et ses lèvres. Leur gout salé n’avait rien de plaisant. « Tu es désolée ? » Il les sentait, les sanglots, qui s’apprêtaient à venir s’emparer de sa gorge à tout instant. Il avait mile et une parole qui semblait vouloir se former, issues de pensées dans son esprit - mais aucune d’entre elle ne pouvait passer la barrière labiale inondée d’eau salée.

Il vint finalement se relever, quelque peu chancelant, menaçant de s’écrouler jusqu’en bas de l’escalier. Mais il ne pouvait rester assis à la suite de telle nouvelle. « Elle… je… non… » Aucune formulation ne viendrait faire sens présentement, mais c’était le parfait reflet de ce qu’il se passait dans son coeur: rien ne faisait sens dans ses émotions. Et il ne faisait aucun effort pour tenter d’y mettre des formes, pour tenter d’y donner un ordre. S’il n’était pas du genre à le faire devant n’importe qui, il n’endosserait pas ce costume là devant sa mère. Tout le monde, mais pas elle. « Vous… » Là où il était venu traiter son père de noms d’oiseaux facilement le jour du repas de famille, il n’arrivait même plus à leur donner à adjectif à ses parents aujourd’hui. Comme si la colère avait laisser simplement sa place à de l’amertume et à du chagrin. Rien d’autre.

« Elle est… morte ? » La nouvelle tombe douloureusement sur le jeune Williams, très douloureusement, plus que tu ne l'aurais pensé à vrai dire. « Tu es désolée ? » Qu'est-ce que tu pourrais dire d'autre ? Tu n'as quand même pas mis de mort au rat dans son jus au petit matin. Tu ne l'a pas regardé mourir à petit feu dans l'attente de lui voler son bébé. Tu n'as jamais comploté une seule seconde à lui retirer son enfant. Ce n'est certainement pas de ta faute si l'accouchement a eu raison d'elle, si personne n'avait arrivé à la sauver - cette idée aussi d'accoucher dans un hôpital public remplis d'incompétent. Il se lève d'un coup Damon. Il n'était peut-être pas si près que ça d'entendre toute la vérité. Il ne savait pas à quoi s'attendre. Comment aurait-il pu s'en douter ? Tes lèvres se pincent au même rythme que les larmes déferlent sur le visage de ton fils. Tes ongles se plantent dans tes cuisses pour t'empêcher de bouger d'un seul millimètres de l'endroit où tu te trouves. « Elle… je… non… » Tu voudrais qu'il ait de nouveau cinq ans et que tu puisses le bercer toute la nuit pour chasser les monstres sous son lit. Mais ce n'est plus un bébé. Il ne veut certainement pas trouver réconfort auprès de toi. Et dans cette histoire-ci, l'horrible réalité, les monstres se sont ses supposés parents. « Vous… » Les mots lui manquent ou il y en a tellement qu'il ne sait pas par lequel commencer.

« On a jamais souhaité ça. » Tu ne vas quand même pas prendre des torts qui ne sont pas les tiens dans cette histoire là. Ils sont déjà assez nombreux. Pas besoin d'en rajouter une couche. La vérité est que ni toi, ni Saül n'en avait rien à faire du fils de Auden. Jamais vous ne vous étiez soucié de cet enfant une seule seconde. Vous aviez vos propres problèmes à gérer. La relation des deux frères avait déjà commencé à se dégrader. Rien à faire de l'avenir de ce bébé qui serait élevé par des gamins immatures qui n'étaient pas prêts. Rien à faire de lui, de Cosimo, jusqu'à ce qu'il devienne la solution à tous vos problèmes, qu'il devienne la manière d'avoir un enfant sans exposer ton infertilité. Quoi demander de mieux pour préserver cette apparence parfaite ? Oh ce qu'elle fait mal la vérité. « On t'a pris parce que tu étais tout seul. » Il n'avait pas de parents. Vous n'aviez pas d'enfant. Personne n'était présent pour empêcher la suite.

Tu t'en souviendras toujours de ce jour où Saül t'a guidé jusqu'à la maternité, qu'il t'a montré du doigt le bébé qui portait l'étiquette Williams, qu'il t'a annoncé que, maintenant, c'était le vôtre. Tu n'en avais absolument rien à faire des moyens qu'il prendrait pour effacer sa vrai famille, rien à faire des sommes versées au médecin, encore moins des mots durs pour son frère. Tu étais taré au point d'y croire toi-même quand il annonçait à tout le monde que tu avais fait un déni de grossesse. Comment tout le monde pouvait-il croire que, dans la même journée, un Williams était mort et qu'un autre était né ? Personne n'y croyait. Tout le monde faisait semblant. « Je t'ai aimé dès qu'ils t'ont mis dans mes bras. » Le reste, c'est pas important. C'est que de la génétique. Tu dois t'en mordre les joues pour ne pas le laisser sortir, le fameux discours de Saül auquel il ne croyait même pas lui-même. Tu espères qu'au moins là dessus, il n'a aucun doute Damon. L'amour que tu portes pour lui est bien réel. Qu'importe sa véritable nature.

balancin' on
breaking branches.

24 décembre 2020

@elise williams

***
« On a jamais souhaité ça. » Il manquerait plus que Elise daigne venir dire le contraire à son fils, ce dernier ayant déjà du mal à garder l’équilibre n’aurait pu faire autrement que de tomber des nues si elle avait osé clamer le contraire. Les larmes venaient brouiller sa vue mais Damon se força tout de même à venir poser ses yeux sur la jeune femme, toujours assise en bas des escaliers. Bien heureusement, qu’ils n’avaient jamais souhaité ça. Il était déjà à deux doigts de perdre foi en elle, il aurait perdu foi en toute l’humanité si elle était venue affirmer telle infamie. « On t'a pris parce que tu étais tout seul. » Il secoua quelque peu son visage, venant poser le pied sur la marche d’en dessous où il s’était assis jusqu’alors. Les mots qu’Elise prononçait parvenir jusque lui, mais ses pensées étaient incapables de focaliser dessus. Elles étaient encore quelques instants plus tôt, sur d’autres nouvelles, d’autres annonces. Bien sur qu’il était tout seul à ce moment, bien sur que la solitude était ce qui l’entourait lorsqu’ils l’avaient pris avec eux. « Parce-qu’elle était morte… » Les mots qui vinrent s’arracher autant à ses lèvres qu’à son coeur, comme un soupire qu’on aurait forcé se faire entendre. Il était tout seul à cet instant là parce-que sa mère, sa véritable mère, était morte en lui laissant une place dans ce monde. A dire vrai, le reste de l’histoire ne semblait plus pouvoir impacter autant Damon que ce détail là. C’était idiot, en réalité. De se trouver à être démuni par une information qui ne changerait pas votre vie. C’était idiot, il fallait l’avouer. D’être complémentèrent désemparé par une personne que vous n’aviez jamais connu. Et pourtant, idiot il l’était présentement, Damon. Parce-qu’une fissure dans son coeur s’était comme réouverte sans qu’il n’ait eu précédemment notice de sa présence.

« Je t'ai aimé dès qu'ils t'ont mis dans mes bras. » Les paroles qui tentaient de venir l’ancrer de nouveau dans la réalité, qui semblaient vouloir le tirer vers un présent plutôt qu’un passé. Ce dernier était lourd, déjà d’ordinaire, mais il se chargeait de plomb au fur et à mesure de cette discussion. Cependant, il pourrait prétendre ne pas avoir entendu les paroles d’Elise mais ce serait ici mentir. Il les avait parfaitement écouté, même, Damon; il ne savait juste comment se tenir après autant de vérités lui éclatant au visage - car, pour lui, il n'y avait aucune part de mensonge dans ce que sa mère lui disait ce soir, aussi étrange que cela pouvait paraitre en regard de toutes les années écoulées avant cet instant. Alors, peut-être que ce fut ça, qui lui permit de reprendre l’équilibre - autant physiquement que temporairement dans ses pensées. Peut-être que ce fut ces paroles là, qui vinrent le réconforter un brin, alors qu’il ne demandait que ça. Elles n’étaient pas assez puissantes pour venir sécher en un clin d’œil les larmes qui ne cessaient de venir parsemer d’étoiles salées ses joues, mais au moins il avait arrêté de chanceler pendant un instant. Parce-que de telles paroles de la part d’une mère, c’était tout ce qu’un enfant voulait réellement entendre, qu’il vienne le dire ou non; savoir que celle qui vous avait protégé - à défaut de vous avoir donné la vie, présentement - vous chérissait depuis les premiers instants réussissait, en tout temps, à venir quelque peu mettre du baume au coeur.

Venant inspirer un bon coup entre deux sanglots un brin plus contrôlés que les précédents, Damon essaya les ses joues d’un revers de la main. Les larmes n’avaient cessé mais au moins, il était apte à venir reprendre la parole - au moins assez pour que ce soit compréhensible. Mille et une questions tournoyaient dans son esprit, et il savait qu’il n’aurait pas d’autre occasion en or comme celle présentent pour venir avoir de vraies réponses à ses questions. Dès demain, la réalité reprendrait le dessus, et Elise et lui seraient de nouveau attendus ailleurs. Au moins, ce soir n’était qu’à eux deux et Damon pouvait en profiter. Et puis, elle lui avait promis d’être franche avec lui. « C’est pour ça que papa… » Bien sur qu’il vint tiquer en deuxième intention sur ce mot. « .. agit comme ça avec moi depuis tout ce temps ? » Il aurait pu venir décrire exactement le comportent de Saül au fil des années, à savoir à quel point il avait pu être distant et exigeant avec son fils; mais il savait parfaitement qu’Elise connaissait les agissements de son mari, désormais ancien, envers leur fils. « Et toi, aussi ? » Là où elle connaissait parfaitement les travers de Saül, elle savait aussi à quel point elle pouvait être maman ours avec Damon. Que ce fusse au fil des années lorsqu’ils étaient entre l’Italie et le Canada, lorsqu’il était parti de l’autre côté de la frontière pour ses études, ou même désormais qu’il était sur les terres natales de la jeune femme - elle avait toujours été extrêmement protectrice envers son petit.

« Parce-qu’elle était morte… » Parce qu'elle était morte et, surtout, parce que Auden était disparu dans la nature. Lui non plus, il n'était pas là, mais tout ce qu'il en retient Damon s'est que sa mère est morte. Tu gardes tout de même ce commentaire pour toi. C'est pas facile de ne pas tout mettre sur le dos de Auden, de ne pas insister sur le fait qu'il n'était pas prêt - décision prise par Saül et toi, pas par lui - de privilégier ses fautes à lui au lieu des vôtres. Tu ne crachera pas sur lui. Tu oses espérer qu'il en fera de même quand viendra son tour de répondre aux interrogations de Damon. Parce que, bien sûr, le gamin va forcément aller chercher l'autre version aussi. Il ne se contentera pas de la tienne. Peut-être même doute t'il que tu sois complètement transparente avec lui. Il n'aurait pas tout-à-fait tort. Tu ne comptes pas vraiment lui en dire plus que tu ne l'as déjà fait. Tu répondras à tout ces questions avec le meilleur de tes connaissances - tu n'as pas suivis toutes les étapes, tu en avais rien à faire du reste - mais si tu peux zaper la partie où Auden apprend sa mort… ouais, tu vas garder ça pour toi s'il ne pose plus de questions. C'est déjà assez pénible ainsi.

« C’est pour ça que papa… agit comme ça avec moi depuis tout ce temps ? » Est-ce que Saül aurait été différent si Cosimo aurait été son fils légitime ? Tu ne saurais dire. L'éducation qu'il a donné à son fils est celle qu'il a lui-même reçu. Est-ce que les choses auraient été différentes ? Tu ne sais pas. Tu aurais tendance à dire que non. « Et toi, aussi ? » Oh ce qu'elle pique celle-là. Elle pique et elle blesse. Comme s'il avait quelque chose à te reprocher à toi. C'est quand même grâce à toi qu'il n'a pas eu une vie aussi merdique que celle de Saül ou de la tienne. Il devrait plutôt être reconnaissant. « Je peux pas te dire si on aurait été différent. » Personne ne le saura jamais. Saül et toi n'aurez jamais la chance de former une vraie famille - biologiquement parlant. Lui, il a beau être en train de s'en former une, ça ne donnera quand même jamais la réponse à sa question. Ce n'est pas parce qu'il sera un père possiblement différent avec son enfant à devenir qu'il l'aurait été avec Cosimo. Les choses ont changées depuis et lui aussi. Il n'est plus celui qu'il était. Plus personne ne le sera après la bombe qui vient d'éclater. Reste que c'est fort probable que de ton côté, tu aurais été moins étouffante. Pour la simple raison que Damon n'aurait pas été enfant unique. Tu n'aurais jamais pu être aussi intense avec plus d'un enfant. Pour le reste, tu ne sais pas.

« Il y a longtemps que j'avais choisis d'oublier toute cette histoire. » Tu devrais en faire autant. Tu l'as oublié du moment où Saül te l'a mis dans tes bras pour la première fois jusqu'à ce qu'il t'annonce il sait, Auden au lendemain du Noël dernier. À partir de là, tout a commencé à mal aller. Un an plus tard, on ne peut pas dire que les choses soient vraiment entrées dans l'ordre. Elles sont même pires qu'elles étaient. Saül n'est plus là. Le divorce est prononcé. Et tu perdras peut-être ton fils avec tous tes mensonges. C'est la merde. « Je peux te prendre dans mes bras ? » que tu lui demande en tournant de nouveau la tête vers lui à la recherche de son regard. Ça te démange depuis les premières larmes qui se sont écoulées contre ses joues. Tu n'as pas bougé d'un poil depuis le début de cette conversation. Tu ne bougera pas plus s'il ne t'autorise pas à le faire.

balancin' on
breaking branches.

24 décembre 2020

@elise rinehart
(purée ça fait mal de changer ça ahah)

***
Ils étaient venus racler sa gorge et son palais, bruler sa langue et ses lèvres à Damon, les mots qu’il venait de prononcer. Il aurait surement pu y mettre les formes, trouver des tournures bien plus adaptées. Mais les émotions qu'il ressentait présentement l’empêchaient de penser avec autant de justesse dont il était capable. Elles venaient tout renverses sur leur passage et sa bienveillance de paire avec. « Je peux pas te dire si on aurait été différent. » Le coeur de Damon vint comme recevoir un coup de marteau en pleine plaie béante en entendant les mots d’Elise. La réponse n’était pas la bonne, elle aurait du lui dire que tout aurait été pareil, que l’idée que Cosimo ne soit pas leur fils biologique ne changeait rien dans cette histoire. Peut-être que cela changeait tout, même si elle ne saurait apparemment venir le dire. Peut-être que leur histoire de famille aurait été toute autre s’il n’était pas né d’un autre Williams. Peut-être que - il vint déglutir avec grand peine, alors que sa vision devenait floue de nouveau, alors que les larmes étaient bien trop présentes à son goût.

« Il y a longtemps que j'avais choisis d’oublier toute cette histoire. » Un petit rire amer vint s’échapper, étonnement, d’entre les lèvres du gamin. Après tout, ce n’était pas grand chose, qu’un détail tout au plus. Quelque-chose qui pouvait s’oublier facilement. Ca devrait pourtant le rassurer, Damon, d’entendre ça. De savoir que sa mère avait préféré oublier cette histoire et ne garder par la suite que le nouveau rôle qui lui avait été confié à la naissance de cet enfant qui n’était pas le sien. ll devrait se sentir un peu mieux de savoir qu’elle avait préféré être présente pour lui plutôt que de rester à tergiverser pendant des heures et des jours sur des détails administratifs. Pourquoi se sentait-il toujours autant seul au milieu de la tempête ? Pourquoi avait-il toujours autant l’impression qu’on lui tournait le dos dans cette histoire ? « C’est pas quelque-chose que je vais oublier de si tôt. » Qu’il vint prononcer du bout des lèvres, un brin hésitant. C’était même quelque-chose qu’il ne risquait jamais d’oublier, et il avait l’impression que tout le monde semblait justement ne pas se rappeler de ce détail là. S’ils étaient au courant depuis vingt ans de cette mascarades, quelques jours s’étaient écoulés tout au plus depuis la révélation pour Damon. Quelques jours pendant lesquels tout s’était écroulé autour de lui.

« Je peux te prendre dans mes bras ? » Le regard de Cosimo vint s’abaisser un brin, pour venir se loger dans celui de sa mère. La jeune femme ne s’était pas encore relevée, n’avait osé faire le moindre mouvement qui aurait pu mettre un terme à cette conversation. Il pouvait au moins lui accorder ce point là, Damon: elle n’avait pas fui à l’autre bout du monde, elle. Et elle lui demandait la permission désormais avant d’agir. Avant, elle aurait tendu les bras et il s’y serait réfugié sans y repenser à deux fois. Aujourd’hui, elle marchait sur des oeufs et il avait les mains moites à l’idée de se laisser aller à pleurer dans les bras d’un inconnue au visage pourtant si familier. Venant alors prendre une longue inspiration, ce fut sur l’expiration que Damon vint finalement hocher doucement, lentement, la tête. Et, parce-qu’il avait tout de même été bien élevé - Elise pouvait se remercier seul pour ce détail là, Saül n’en était en rien responsable -, il vint même tendre une main en direction de sa mère pour l’aider à se remettre debout. Il n’était pas question de fierté ou de quoi que ce soit, présentement. Elise voulait être présente pour lui et il crevait d’envie de pouvoir se sentir soutenu. Alors, à peine fut-elle debout à ses côtés qu’il vint serrer le corps de la brune dans ses bras, qu’il vint nicher son visage dans le cou de sa mère, qu’il vint laisser aller les larmes et les sanglots qui semblaient comme retenus, eux, jusque maintenant.

Et il aurait pu rester des heures, désormais, comme ça. Il aurait pu rester tout le reste de sa vie dans ce cocon formé autour d’eux, dans une réalité alternative où il n’aurait pas à affronter l’idée que la femme qu’il serrait aussi fort que son corps à elle pouvait le supporter n'avait rien en commun avec lui si ce n’était qu’un tissu de mensonges. Il aurait pu se contenter de cette vérité là, si celle du monde extérieure n’était pas venu le rattraper. Ca lui aurait été suffisant - mais les adultes en avaient décidé autrement, sans le concerter avant. Alors, après être resté peut-être une minute, voire deux, dans les bras d’Elise, il vint faire un pas en arrière pour se défaire de son étreinte. Jamais il n’aurait osé agir de la sorte, auparavant. Déjà, il était en train de changer, Damon. « D’autres choses que je dois savoir, pendant qu’on y est ? » Sa voix était rauque et mal assurée, mais il voulait aller jusqu’au bout de ce tunnel de malheur avant de retourner à la vie normale.

Il est mauvais le rire qui sort d'entre ses lèvres à Damon. C'est à l'entendre que tu réalises à quel point c'était stupide ce que tu viens de lui dire. « C’est pas quelque-chose que je vais oublier de si tôt. » Ouais voilà. Si toi, tu as mis une fraction de seconde à oublier toute cette histoire, lui, il ne l'oubliera jamais. Cette révélation changera sa vie à jamais. « Je sais. » Bien sûr que tu en es parfaitement consciente. Même s'il arrive à vous pardonner, Auden prendra à jamais une place différente dans sa vie. Un retour en arrière n'est plus possible.

Il hoche la tête de haut en bas après ce qui t'a paru une éternité. Tu peux le prendre dans tes bras. Tu étais convaincu qu'il refuserait. Tu t'étais déjà préparé mentalement à accepter son refus. Mais il dit oui et il vient même tendre sa main vers toi. Ça y'est. Le tract te prend dans la seconde même, alors que la dernière chose que tu voudrais gâcher est ces quelques minutes où il t'autorise à être sa mère - quelques minutes que tu oses espérer s'allonger, faut pas trop en demander quand même. Ta main se glisse dans la sienne alors que tu te redresses du sol, que tu arrives à sa hauteur. Et à la seconde où il passe ses bras autour de toi, tu as l'impression de retrouver ce petit garçon qui venait se réfugier au même endroit pour soigner ses peines et ses blessures. Ton coeur se brise et se réchauffe en même temps. L'une de tes mains se porte à la base de son crâne lorsqu'il vient enfouir son visage dans ton cou. Ton autre bras vient entourer ses épaules que tu resserres contre toi au même rythme qu'il fait de même. « Je t'aime. » Qu'il n'en doute jamais. Tu l'aimes plus que tout au monde. Il est définitivement ce que tu as de plus précieux dans ta vie. « Tellement. » Ta gorge se noue sous tes paroles, sous ses sanglots qui semblent impossibles à calmer. Tes yeux se ferment quelques secondes, juste le temps de mieux profiter de ce moment qui, peut-être, ne se représentera pas de si tôt. Submergé par l'émotion, les larmes se mettent à couler toute seule. Tu perds un baiser contre sa tempe. Et il se recule aussi rapidement qu'il s'est avancé. Tout ce que tu voudrais, c'est de le retenir. Mais tu le laisses filer. Encore. Tu te surprends à le laisser respirer le temps qu'il faudra.

« D’autres choses que je dois savoir, pendant qu’on y est ? » On jurerait votre vrai fils à cet instant près. Alors qu'il tente de reprendre une certaine contenance. Ça te tue de le voir faire même si, au fond, c'est toujours ce que vous aviez attendu de lui. La biologie n'y est pour rien. L'éducation y est pour tout. Vous l'avez élevé comme vous aviez été élevé. Vous avez commis les mêmes erreurs. Mais à le voir faire, ça t'oblige un peu à tenter de le faire à ton tour, en tentant de masquer du revers de ta main les larmes qui s'étaient tracées un chemin jusqu'à tes joues.« Je- je sais pas. » que tu hésites un peu.Tu as la tête qui tourne un peu, les idées qui ne sont plus aussi claires qu'elles l'étaient au début. Ta main vient se passer sur ton front comme si ça pouvait t'aider à mieux réfléchir. C'est assez pour une seule soirée, non ? Ce sera assez quand il décidera que ce sera assez. « Tu as d'autres questions ? » Des questions auxquelles tu n'aurais pas répondu. D'autres choses qu'il voudrait clarifier ? Tu répondras à chacunes des questions qu'il aura, que tu es envie ou non d'y répondre.

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24 décembre 2020

@elise rinehart

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« Je t’aime. » Il ne nierait pas que les mots de sa mère vinrent lui arracher un frisson le long de l’échine. « Tellement. » Et il ne fit pas le moindre effort pour venir retenir les larmes qui coulaient de plus belle le long de ses joues. Il ne s’était jamais retenu en présence de la jeune femme, il ne commencerait pas aujourd’hui. Même si Cosimo savait que bien des choses avaient changé avec les dernières informations révélées, il savait aussi qu’au fond de lui des éléments resteraient malgré ça toujours les mêmes. L’affection toute particulière qu’il vouait à Elise ne changerait jamais, les deux avaient traversé trop de choses ensemble, main dans la main, comme une vraie famille, pour qu’il vienne faire table rase sur cette partie là.

Il savait aussi cependant que pour son propre bien-être, il ne pouvait rester dans les bras de sa mère une éternité de plus et qu’il se devait de faire un pas en arrière. De reprendre une certaine contenance, de tenter de remettre ses idées au clair. Cette discussion n’était pas anodine et il se devait de la mener à bout - de ne pas abandonner avant la fin. Alors, après s’être éclairci la gorge une fois ou deux, il vint demander à sa mère si d’autres éléments se devaient d’être mis en lumière ce soir. Cosimo savait que si tel était le cas, elle ne reculerait pas - elle ne reculerait plus. Ils étaient passés à autre chose, dans leur relation, les mensonges ayant été congédiés. « Je - je sais pas. » Il n’était pas le seul à être troublé par cette discussion, ça avait un côté rassurant. « Tu as d'autres questions ? » Les lèvres pincées et le regard fuyant, après avoir hésité quelques instants, Damon vint secouer lentement la tête. Les questions qui lui brulaient la langue, il les avait déjà formulé. Le reste ne saurait pointer le bout de son nez pour le moment, et de toutes façons il avait l’impression que sa tête allait exploser.

« Pas pour le moment, non… » Parce-que si cette discussion là se terminait pour aujourd’hui, le sujet ne serait jamais vraiment clôt. Il aurait surement des interrogations qui viendraient à retarder, le gamin, tard lorsque les nuits seraient moins tranquilles. Pour le moment, la seule chose qu’il désirait, c’était regagner les draps de son lit et vivre une nuit sans mauvais rêves. Déglutissant avec grand peine, il vint finalement déposer un baiser rapide sur la joue de sa mère. « Merci… » Que ses lèvres vinrent murmurer à son oreille. Après tout, Elise avait au moins pour elle le fait de ne pas s’être défilée cette fois-ci. Il pourrait lui trouver du tort sur d’autres éléments, mais pas ce soir. L’instant d’après, seul l’écho des pas du jeune garçon montant l’escalier venait résonner à travers la maison devenue étrangement silencieuse.