Durant quatre mois, j’ai littéralement mis de côté mon premier bébé. Dès la naissance des jumeaux et avec les complications qui ont suivi, je n’avais plus le temps pour le studio. Haley me tenait au courant de tout, elle jurait que je devais prendre du temps pour ma famille et je lui ai laissé les rênes de toute l’affaire. Sebastian s’en est donné à cœur joie pour mettre son nez de partout, pour foutre le bordel entre les artistes et les musiciens. Il est parti désormais, de retour à Londres, à des milliers de kilomètres d’ici. Il a obtenu ce qu’il voulait, une partie de l’entreprise familial, il a hérité du label en son entièreté – ou presque – et du studio en Angleterre. Il est temps que je reprenne ce pourquoi j’ai si durement travaillé durant des années. Je ne viens pas encore tous les jours, je m’arrange avec Jill pour les jumeaux, on tente de gérer du mieux que l’on peut. Il a fallu voir tout le monde, m’excuser pour mon absence, prendre des nouvelles, se tenir pleinement au courant des projets en cours. Tout est assez calme au studio, assez pour que ceux qui y travaillent tous les jours ont le temps de blablater sur les dernières rumeurs de la ville. Rumeurs qui sont arriver à mes oreilles et l’une d’entre elle comprenant le prénom de Lena. La jeune femme est connue par tout le monde ici, elle a fait son stage de fin d’études avec nous, on a de nouveau travaillé ensemble par la suite. Entendre qu’elle semble perdre son temps dans des soirées enflammées m’a énormément étonné de sa part. Et je ne sais pas si c’est le côté professionnel ou le nouvel instinct de papa poule qui m’a poussé à lui demander de passer au studio.

Assis derrière mon bureau pour ce qui me semble être la première fois depuis un siècle, je prends le temps d’étudier les dernières chansons écrites par Seth. Le jeune homme n’a cessé de réclamer mon avis ces derniers mois, je n’avais pas de temps, pas assez de force mentale pour lui accorder tout mon temps. Je me plonge à nouveau dans ce qui m’a toujours plu, ce qui me fait vibrer depuis le tout premier jour. Les heures semblent se mélanger, je perds la notion du temps et sursaute presque lorsque le visage de Lena apparaît sur le pas de la porte. « Oh bonjour. » Je lui souris quelque peu, retire mes lunettes et lui fait signe de prendre place sur le siège face au mien. « Comment vas-tu ? Ça fait un moment. » Un bien trop long moment à croire tout ce que j’ai pu entendre.

@lena edwards

Pour Lena, la vie suivait son cours depuis plusieurs mois sans qu'une catastrophe ne vienne exploser dans sa vie - un miracle, en somme. L'été était là, la reprise du surf avec lui, les journées à la plage aussi, et il n'y avait rien qui pouvait la ravir plus que ça. Elle avait bien rencontré quelques difficultés dans ses relations avec le père Bradford, qu'importe, tout lui glissait dessus tant elle était concentrée dans ses résolutions de vie. Certes, elle avait craqué et couché une dernière fois avec Knox - qu'elle disait - mais elle considérait cet écart plus comme un adieu à son ancienne vie de débauche qu'autre chose. Elle se sentait bien à tous points de vus, et c'était si rare qu'elle en profitait vraiment.

Cela faisait un moment que Bailey était sorti des viseurs de Lena, qu'elle n'avait pas travaillé avec lui. Quelques mois en réalité, où elle avait cru entendre qu'il était très pris par sa famille, ce qu'elle pouvait comprendre - et qu'elle jalousait au plus profond d'elle. Alors elle fut surprise de recevoir son message inattendu, elle qui pensait ne plus avoir la chance de travailler avec celui qui avait fait de son stage de fin d'études un franc succès depuis qu'elle avait organisé plusieurs soirées pour ses concurrents directs. Oui, le monde de la musique était rude et compétiteur ; elle était pourtant ravie de voir que Bailey savait faire abstraction de ça. Elle s'était donc dirigée au studio dès le lendemain, comme il le lui avait demandé et sans se poser trop de questions, confiante. « Oh bonjour. » Il semblait avoir été dérangé dans ses pensées, et la blonde s'avançait, souriante. Bonjour, j'espère que je ne te déranges pas. Qu'elle lançait poliment. C'est lui qui lui avait demandé de venir, mais elle ne comprenait que trop bien à quel point on pouvait se laisser déborder dans ce genre de métiers, surtout lui qui, de ce qu'elle avait compris, n'était plus à plein temps depuis quelques mois déjà. Elle entrait dans le bureau pour se mettre face à lui qui venait de lui faire signe d'entrer. « Comment vas-tu ? Ça fait un moment. » Elle opina du chef à ses derniers mots, et souriait, contente de se retrouver dans son bureau. Je vais bien merci. Et toi ? Désormais installée face à lui, Lena sortait de son sac de quoi prendre des notes, comme à son habitude. Ça fait si longtemps qu'on ne s'est pas vus que j'avoue avoir été surprise de ton message. Toujours honnête, la blonde préférait d'emblée jouer cartes sur table pour savoir exactement ce que Bailey avait eu derrière la tête pour la recontacter sans lui donner de quelconques précisions - ce qui n'était pas son genre, d'après ses souvenirs.

Cela faisait bien trop longtemps que je ne m’étais pas perdu dans mes pensées à juste écouter de la musique. J’avais oublié à quel point cela faisait du bien, a quel point j’avais besoin de cela dans ma vie. Je prends des notes, je sifflote l’air de la mélodie de Seth et je finis par envoyer un message au jeune homme pour lui donner rendez-vous dès le lendemain. Petit à petit, je reprends les rennes de mon studio, je remets les pieds dans mon quotidien avec une vision bien plus neuve, bien plus déterminé. Cela veut aussi dire reprendre contact avec tout le monde, petit à petit. « Bonjour, j'espère que je ne te dérange pas. » et Lena en fait clairement parti. Je souris à la jeune femme, lui faisant signe d’entrer dans mon bureau. « Tu me déranges pas du tout. » Après tout, c’est moi qui lui aie demandé de venir ici. Elle semble aller bien la jeune femme, toujours le même sourire aux lèvres. Cela faisait bien longtemps que je ne l’avais pas vu, mais il semblerait que c’était comme hier. À mon goût, notre collaboration c’est arrêter bien trop tôt, mais elle avait trouvé un meilleur boulot ailleurs et je ne pouvais pas lui en vouloir pour cela. Enfin, juste un peu. Après tout, il n’est pas trop tard pour reprendre contact, pour voir un peu ce que cela pourrait donner. « Je vais bien merci. Et toi ? » « Ça va, ça va. » Elle est toujours bizarre cette question. On ne sait jamais réellement quoi répondre, parce que ce serait socialement inacceptable d’admettre à haute voix que quelque chose ne va pas. Non pas que ce soit réellement le cas, mais ce n’est jamais le genre de question auquel j’ai envie de répondre.

« Ça fait si longtemps qu'on ne s'est pas vus que j'avoue avoir été surprise de ton message. » Elle semble presque nerveuse la blonde et je dois avouer que mon message n’était peut-être pas des plus explicite. « On m’a parlé de toi dernièrement. » que j’avoue, sourire aux lèvres. « Il paraît que tu… Fais beaucoup la fête ? » Je sonne réellement comme un père bien trop concerné, mais je crois que c’est juste plus fort que moi. « Je sais que ça me regarde pas, mais pour que ça arrive à mes oreilles, c’est que beaucoup de monde en parle. » j’avoue timidement. « Enfin, tu vois… »

Lena ne savait pas pourquoi ce message lui était parvenu, et pourtant elle n'avait pas réfléchi une seconde avant d'accepter de venir rendre visite au Fitzgerald. Il lui avait permis de réussir sa première expérience professionnelle et en ça, la blonde le respectait énormément. Elle s'excusa de sa venue alors qu'elle ne faisait que répondre à sa demande. « Tu me déranges pas du tout. » Lena entra dans le bureau sans poser plus de questions, s'installant face à Bailey qui l'avait convoqué pour une mystérieuse raison. Les politesse étaient de mise, et Lena lui demandait des nouvelles. « Ça va, ça va. » Elle se doutait bien qu'il n'allait pas lui raconter sa vie personnelle, leur relation n'en avait jamais été à ce stade là. Mais elle espérait sincèrement que ce soit le cas après sa disparition des radars durant quelques semaines.

L'écossaise préférait être honnête en précisant qu'elle était loin de s'attendre à ce qu'il lui demande de venir après tout ce temps, se contentant de sourire en attendant de savoir à quelle sauce elle allait être mangée. Et elle fut loin d'être déçue en l'entendant. « On m’a parlé de toi dernièrement. » Il sourit, elle lui rendit sans réfléchir. En réalité, la blonde était plus stressée qu'autre chose, sachant très bien ce qui se disait sur elle ces derniers temps. Elle n'avait aucune envie que tout ça soit arrivé aux oreilles de Bailey - ce qui semblait déjà être le cas. « Il paraît que tu… Fais beaucoup la fête ? » Le couperet était tombé, il savait bel et bien. Elle balbutiait, ne réussissant à répondre quoi que ce soit d'audible. Je.. euh... Elle ne chercha pas à en dire plus, préférant prendre quelques instants pour réfléchir à ce qu'elle allait pouvoir dire.

« Je sais que ça me regarde pas, mais pour que ça arrive à mes oreilles, c’est que beaucoup de monde en parle. » Elle baissa les yeux, ayant la sensation d'être comme réprimandée. « Enfin, tu vois… » Mais elle était une adulte maintenant, une professionnelle : à elle d'assumer. Je sais ce qui se dit sur moi Bailey, j'ai déjà eu des échos. Son air était sérieux mais elle restait pour autant souriante, refusant de montrer que quoi que ce soit la touchait là dedans. Après tout, elle était justement en train de remonter la pente, de faire des efforts ; elle regrettait que cet épisode puisse nuire à son image. Tu sais comment ça marche dans le milieu. Fais un faux pas et tout le monde le saura. Elle levait les yeux au ciel. Je suis contente de voir que tu t'inquiètes pour moi, mais ça ira, j'ai juste.. dérapé. Il ne savait pas quel était son passé, ne savait pas qu'elle avait déjà fait bien pire - à moins qu'il s'était renseigné ? Dans tous les cas, Lena voulait sauver les meubles et estimait bien trop Bailey pour qu'il n'ait une mauvaise opinion d'elle. Mais je... tu m'as appelé pour me prévenir ? Demandait-elle, curieuse.

Je n'ai pas pour habitude de me mêler des ragots et autres rumeurs qui circulent dans le milieu. Bien trop souvent, ce sont les mêmes conneries à raconter en boucle pour ruiner la carrière de l'un ou mettre à mal l'histoire d'amour naissant d'un autre ou que sais-je encore. Mon frère s'est toujours basé sur ce genre de choses pour construire ses relations, alors que je cherche avant tout à connaître l'humain en premier. Ce n'est donc clairement pas une habitude que de demander à Lena de me rejoindre pour discuter de ce que j'ai pu entendre à son sujet. Mais ce n'est pas non plus courant d'entendre des ragots la concernant. Elle a toujours été discrète lorsqu'elle travaillait avec nous, ce n'était pas de celle à finir sur les blogs populaires avec des photos de sa personne à différentes soirées tous les weekends. C'est probablement ce qui m'a poussé à la convoquer dans mon bureau. Tel le père que je suis devenu, je m'inquiète pour elle. Lena est une jeune femme brillante qui a un véritable avenir dans sa profession, je m'en mordrais les doigts de ne pas avoir eu le courage de lui tendre la main au pire moment. Elle semble beaucoup plus timide lorsque je lui annonce ce que j'ai pu entendre. Elle balbutie et je m'en veux de la mettre aussi mal à l'aise alors que ce n'est clairement pas l'effet recherché. « Je sais ce qui se dit sur moi Bailey, j'ai déjà eu des échos. » Son visage se referme et soudainement, j'ai peur d'avoir dépassé la limite et de m'être trop imposé dans sa vie privée. « Tu sais comment ça marche dans le milieu. Fais un faux pas et tout le monde le saura. » Elle n'a aucune idée d'à quel point je connais tout cela justement. C'est ce qui a conduit mon père à m'imposer un mariage avec une fille de bonne famille. C'est ce qui a nourri la haine de mon frère, fait grandir l'indifférence de ma mère. J'ai été celui qui s'explose en soirée, celui qui abuse de la bouteille et des drogues en tout genre. Celui qui ramenait une fille différente chaque soir, se souciant bien peu du lendemain. « Je connais, oui... » que je souffle doucement alors sans trop m'étaler dans les détails. On est pas vraiment là pour parler de moi. « Mais je... tu m'as appelé pour me prévenir ? » Elle semble étonnée de la démarche et cela me fait sourire. Je hausse les épaules comme prit la main dans le sac. « Je t'ai avant tout appelé pour m'assurer que tout va bien. » que je lui confie alors sans détour. J'ai trop connu les soirées de perdition, celles où l'on pense avoir le contrôle, mais qui nous bouffe de l'intérieur. « Je suis devenu papa poule faut pas m'en vouloir. » que j'ajoute pour la blague en lui souriant quelque peu. « Alors, tout va bien ? »

Elle savait bien que Bailey n'avait pas pour habitude de se mêler des rumeurs circulant à droite à gauche. Elle savait aussi bien que s'il avait prit le parti de lui en parler, les choses étaient bien plus sérieuses que ce qu'elle n'avait espéré. Mais elle ne perdait pas espoir, la situation pouvait encore se régler si elle montrait patte blanche, si elle ne faisait plus aucun écart : c'était son objectif, dans tous les cas. « Je connais, oui... » Lena n'avait jamais entendu aucune rumeur ou ragot sur Bailey. Elle l'avait toujours imaginé comme un exemple à suivre, comme celui qui n'avait aucune tâche sur son CV, qui avait tout réussi avec brio dans sa carrière. Il devait pourtant avoir des secrets lui aussi, avoir eu des épisodes moins glorieux, bien chaudement cachés dans un recoin de son esprit. Elle aurait aimé se montrer curieuse au vu de sa réaction, mais elle était visiblement surtout là pour s'expliquer, alors elle se reconcentrait sur elle et ses problèmes du moment - il y en avait bien assez pour les occuper. Étonnée de voir que le Fitzgerald ait prit le temps de la convoquer pour en savoir davantage elle le lui fit comprendre. « Je t'ai avant tout appelé pour m'assurer que tout va bien. » Un large sourire s'étendait sur le visage de la blonde, ravie de voir que dans ce monde il y avait encore des personnes qui pensaient à son bien être avant sa productivité, à elle avant son image. « Je suis devenu papa poule faut pas m'en vouloir. » Qu'il ajoutait en blaguant. « Alors, tout va bien ? » Elle hocha la tête pour tenter de le convaincre, de manière peu convaincante - étant elle même peu convaincue. Ça va, Bailey. C'est gentil, mais c'est que des rumeurs, je m'en sortirais. Elle se voulait rassurante, elle ne l'était pas autant que prévu avec sa voix qui tremblait parfois. Alors elle se rattrapait comme elle le pouvait, n'ayant pas réellement prévu de raconter sa vie et ses soucis à Bailey. Et même si ça n'allait pas, je préfèrerais mille fois que tu me parles de ta nouvelle vie de papa. Parce qu'une bonne nouvelle comme ça méritait qu'on s'y attarde pleinement, selon elle. Un jour, elle aussi, elle aurait une famille - elle ne pouvait que l'espérer. Alors dis moi, toi, comment tu vas ? Elle préférait échapper au sujet de sa propre vie pour s'intéresser à celle de son mentor, sachant pertinemment qu'il reviendrait sans doute à la charge. Qu'importe, ça lui laissait au moins un peu de temps avant de devoir y faire face.

Elle aurait tous les droits de m’envoyer paître Lena. Elle pourrait me demander de m’occuper de mes affaires avant de faire demi-tour. Oui, vraiment, elle pourrait avoir tout un tas de réactions négatives quand je suis clairement en train de lui dire faire comprendre que les rumeurs à son sujet sont remontées jusqu’à ma personne. J’aurais pu ignorer tous ces ragots de bas étage et dans le fond, ce n’est pas ce qui me fera changer d’avis sur la jeune femme. Néanmoins, j’ai par le passé, été victime de ce genre de rumeurs et je veux simplement m’assurer que tout va bien pour la jeune blonde. Elle est encore nouvelle dans le milieu et je ne voudrais pas que tout cela ait un impact négatif sur sa carrière. En bref, je m’inquiète, et je me devais de voir Lena. Son sourire un brin timide me confirme que je n’ai pas fait d’erreurs non plus. Elle semble vouloir mettre une certaine distance malgré tout et je respecte tout cela. « Ça va, Bailey. C'est gentil, mais c'est que des rumeurs, je m'en sortirais. » Je lui souris quelque peu. « Je n’en doute pas Lena. » Ce n’a jamais été le cas, je ne doute pas qu’elle soit capable de gérer seule. Je voulais simplement la voir et me rassurer en sortes. Je voulais aussi lui faire savoir que si nécessaire, elle pouvait se tourner vers moi. On ne se connaît pas tant que cela, mais c’est dans mon tempérament de vouloir aider les gens qui font partit de mon entourage que ce soit privé ou professionnel.

« Et même si ça n'allait pas, je préférerais mille fois que tu me parles de ta nouvelle vie de papa. » Je ris quelque peu, levant les yeux au ciel pour la forme. « On peut aussi combiner le côté, tu vas bien et on parle de mes deux monstres ! » J’aurais pu dire merveilles, je préfère diaboliser les deux petits êtres qui sont venus transformer ma vie, il y a q de cela plusieurs mois désormais. « Alors dis-moi, toi, comment tu vas ? » Je réalise que cela ne servira à rien de l’interroger bien plus longtemps sur son quotidien. Si elle veut discuter, elle sait désormais, qu’elle pourra venir me trouver. Je ne doute pas qu’elle a compris le message que je cherchais à lui faire passer. À nouveau, je lui offre un sourire, alors que l’on s’installe un peu plus confortablement sur le canapé de mon bureau. « Je vais bien. » que je lui assure préférant passer sous silence tous les problèmes que mon couple a pu traverser. Ce n’est pas le plus important, ce n’est pas ce qui pourra l’intéresser alors que je sors mon téléphone pour lui montrer une photo des jumeaux. « Je te présente Bowie et Tracy. » Et c’est probablement mon pire moment de papa poule, fan de ses enfants, complètement gaga. « Ils sont en pleine forme, parfois un peu trop même. » que je plaisante quelque peu. « Je me suis beaucoup concentré sur eux, donc j’étais bien moins présent ici, pour ça que tu me voyais plus trop. » Ce n’était pas réellement volontaire, c’est la vie qui a pris le déçu, c’était nécessaire que je me concentre sur les deux bébés. « Maintenant, qu’ils décident de dormir la nuit, complète et qu’ils savent se tourner tout seul comme des grands, ils ont demandé que papa les laisse un peu tranquille pour vivre leur vie de bébés. » que je plaisante à nouveau. « Je suis trop gaga hein ?! »

Il n'avaient plus rien à voir ensemble, Bailey et Lena. Il lui avait laissé sa chance au début de sa carrière, et la blonde lui en avait été plus que reconnaissante. Mais le temps était passé, ils n'avaient fait que se croiser depuis de longs mois. Chacun avait ses projets, sa carrière, ses objectifs. Et s'ils s'appréciaient pour avoir travaillé ensemble, ils avaient aussi rencontré des discordes, l'écossaise ayant choisi parfois de travailler pour des concurrents. Rien qui ne puisse pourtant dégrader assez leur relation, bien au contraire : visiblement Bailey semblait s'inquiéter pour elle, sa récente paternité ayant fait émerger des instincts protecteurs. « Je n’en doute pas Lena. » L'entendre lui faisait du bien. Ça la confortait dans ses pensées, elle qui essayait de se convaincre jour après jour qu'elle franchirait cette ultime étape comme toutes les autres auparavant. Le fait que ça vienne de Bailey appuyait plus encore la confiance qu'elle se fatiguait à entretenir. Elle se contentait de lui sourire en retour avant de détourner la conversation sur lui. « On peut aussi combiner le côté, tu vas bien et on parle de mes deux monstres ! » Mais elle n'était pas prête à se confier sur quoi que ce soit, n'ayant pas tout à fait accepter que l'on s'amuse à la réduire au silence, à détruire son image. Difficile de faire face à de tels affronts lorsqu'on a pris l'habitude d'être appréciée sur tous les fronts. Alors elle réitérait sa question, s'amusant à interroger le Fitzgerald sur lui et ses enfants. « Je vais bien. » Il avait l'air sincère, aussi sincère en tout cas que tout ceux qui n'auront que cette réponse à la bouche pour ne pas embêter leur entourage de leurs problèmes. Elle ne pouvait que le comprendre. Ravie de le savoir. Elle hocha la tête pour appuyer ses propos, se penchant sur le téléphone de Bailey lorsqu'il lui montrait une photo de ses deux merveilles. « Je te présente Bowie et Tracy. » Ils étaient vraiment beaux et Bailey semblait déjà fier d'eux. Ils sont adorables ! Qu'elle lançait sincèrement. « Ils sont en pleine forme, parfois un peu trop même. Je me suis beaucoup concentré sur eux, donc j’étais bien moins présent ici, pour ça que tu me voyais plus trop. » Elle opina du chef, la blonde. C'est compréhensible. Si sa carrière traversait une période peu aisée, Lena ne pouvait qu'imaginer à quel point le travail pouvait passer au second plan face à la possibilité de fonder une famille. « Maintenant, qu’ils décident de dormir la nuit, complète et qu’ils savent se tourner tout seul comme des grands, ils ont demandé que papa les laisse un peu tranquille pour vivre leur vie de bébés. » Lena se mit à rire, voyant un aspect de Bailey qu'elle n'aurait pu imaginer auparavant. « Je suis trop gaga hein ?! » Elle secouait doucement la tête en souriant. Mais non, t'as raison de profiter, c'est précieux la famille. Elle espérait elle aussi pouvoir un jour vivre ces moments là, ceux desquels elle est passée à côté avec ses parents à elle. Ça doit pas être facile de ton côté non plus, de devoir gérer tout ça. C'est beaucoup de changements ! Son regard fixé sur ses mains, un élan d'émotions traversait son regard. Mais je suis sûre que tu gères tout comme il faut. On a pas le choix après tout, toi comme moi, tout ce qu'on a à faire, c'est de gérer. Et de continuer à avancer coûte que coûte.

Il ne faut pas être devin pour réaliser à quel point Lena cherche à détourner mon attention de sa personne. Je n'avais eu vent que des rumeurs, des bruits de couloir à son sujet sans jamais réellement connaître l'élément déclencheur. Elle faisait un peu trop la fête ? En quoi cela pouvait bien déranger ? Ce n'est pas comme si elle avait la quarantaine passée et qu'elle était mère de famille. Elle n'est qu'une jeune femme parmi tant d'autres qui cherche probablement sa place dans notre société. Rien n'est simple lorsque l'on s'embarque dans un milieu comme le nôtre, lorsqu'il faut toujours être au parfum des dernières tendances. Parfois, il arrive que l'on se perde et si je n'ai jamais évoqué ce genre de sujet avec la jeune femme, j'étais passé par là bien avant elle. Mon cas était probablement plus aggravé que le sien, profitant de la fortune de papa pour vivre une vie par procuration avec des amis qui n'en sont pas réellement. J'avais plongé tête baissée et sans jamais l'avoir tellement regretté. J'aimerais pouvoir expliquer tout cela à la jeune femme, mais elle insiste pour que la conversation se focalise bien plus sur mon nouveau rôle de papa. C'est là que réside le danger lorsque je me transforme en ce père complètement gaga de ses enfants. Le mec un brin chiant qui t'impose la photo de ses marmots. C'est que je me transforme en cliché ambulant, mais assume parfaitement ce nouvel aspect de ma vie. « Ils sont adorables ! » « Juste en photo. » que je plaisante, remerciant tout de même la jeune femme par un sourire. Je tiens tout de même à lui expliquer les raisons de mon absence si prolongée. Il avait fallu s'adapter, revoir les priorités. « C'est compréhensible. » Elle devait bien être l'une des rares à me l'affirmer sans gêne. Certains n'avaient pas compris mon absence, avaient pris cela comme le droit à plus de liberté. De retour, je sais qu'il va me falloir corriger quelques trajectoires désormais.

Le rire de la jeune femme me rassure quelque peu alors que me voilà à faire l'idiot en parlant de mes enfants. Ils ont grandi, les jumeaux, ils demandent encore beaucoup d'attention, mais sont désormais capables de dormir la nuit complète à mon plus grand bonheur. C'est du travail, c'est beaucoup de moments de doute, mais c'est probablement le plus changement dans ma vie. « Mais non, t'as raison de profiter, c'est précieux la famille. » Je hoche la tête, en accord avec ces quelques mots. Toute ma vie, j'ai pensé que la famille n'était qu'un boulet à devoir se traîner, puis mes propres enfants sont venus tout chambouler. « Ça doit pas être facile de ton côté non plus, de devoir gérer tout ça. C'est beaucoup de changements ! Mais je suis sûre que tu gères tout comme il faut. On a pas le choix après tout, toi comme moi, tout ce qu'on a à faire, c'est de gérer. » S'il est vrai que j'adore parler de ma nouvelle vie de famille, je dois dire que les propos de la jeune femme me laissent quelque peu sans voix. Elle a voulu clore le sujet et pourtant, je crois que je m'en mordrais les doigts de ne pas insister un peu plus. « Est-ce que tu as besoin d'aide Lena ? » En rien, je ne veux me montrer trop intrusif, mais si je comprenais son discours sur le fait que je me doive de gérer deux autres êtres humains désormais, j'avais beaucoup de mal à faire le parallèle avec elle. « Si tu as besoin pour le boulot, tu sais qu'on sera toujours ravi de bosser avec toi. » Ou de faire comprendre aux autres qu'ils ne devraient même pas hésiter lorsqu'il s'agit de collaborer avec elle. « Ou n'importe quoi en réalité, si je peux aider... »

Il était aisé pour Lena de dévier de sujet de conversation à sa guise. Toujours une nouvelle chose à dire ou une nouvelle question à poser, elle était contente de pouvoir éviter les discussions fâcheuses avec bon nombre de personnes. Mais si son talent avait des limites, c'est bien ici qu'elle les avait atteintes : Bailey la connaissait bien. Mieux que quiconque dans le monde fermé qu'ils côtoyaient tous les deux, mieux que tous les clients pour qui elle avait travaillé, mieux que ces autres influenceuses qui ne comprenaient rien à la subtilité de ses sentiments. Bailey avait la politesse de n'avoir insisté, mais la blonde avait bien compris qu'il reviendrait à la charge la concernant : elle préférait profiter, pour l'heure, d'échanger sur la toute nouvelle famille qu'il était en train de se construire. « Juste en photo. » Des photos de sa famille, elle aurait adoré pouvoir en montrer Lena. Elle était pourtant loin d'avoir un joli portrait de famille à présenter, pas si loin que ça, en revanche, d'imaginer que si une telle photo existait, les Edwards auraient paru bien plus adorables qu'ils l'étaient en réalité. Dysfonctionnels, voilà tout ce qu'ils étaient. Sans s'en rendre compte, l'écossaise s'était donc extasiée un peu trop longuement sur ces deux petites merveilles et sur le choix qu'avait fait le Fitzgerald de se concentrer à eux, lui qui avait compris qu'une carrière ne devrait pas être la priorité dans une vie lorsqu'on à tellement plus à partager. Ses yeux perdus dans le vide, elle fut ressortie de ses pensées par la voix de Bailey. « Est-ce que tu as besoin d'aide Lena ? » Son expression faciale ne cachait pas sa surprise, son regard fixait désormais le directeur artistique. Rarement quelqu'un avait fait si attention à Lena, pas assez pour se demander si elle pouvait avoir besoin d'une quelconque aide. Elle était bien trop fière pour montrer toute la tristesse qu'elle avait enfouie, bien trop heureuse de vivre pour se laisser submerger à nouveau par ses problèmes. La question qu'il venait de lui poser retentissait cependant en elle à la manière d'un son de cloche, comme si elle se remémorait chaque instant où cette simple question aurait pu lui faire éviter l'un de ces drames qu'elle aura injustement vécu. Je crois que... peut-être que oui. Qu'elle se surprenait à avouer non sans mal, la gorge nouée. « Si tu as besoin pour le boulot, tu sais qu'on sera toujours ravi de bosser avec toi. » Elle hochait la tête, se forçant à sourire, ravie de voir que même en temps de crise elle était soutenue et ceux malgré les quiproquos qu'il y avait pu avoir entre les deux professionnels. « Ou n'importe quoi en réalité, si je peux aider... » A cela elle ne souhaitait pas répondre, ne sachant pas ce qu'elle aurait pu lui demander en réalité. Son soutien dans son travail serait déjà bien assez pour elle, elle en était convaincue. C'est adorable, vraiment. Merci Bailey. Elle ne comptait pas s'épandre en sentiments, il ne méritait pas de subir ses plaintes plus longtemps. Si tu as des boulots pour moi, ça sera avec plaisir. Pour le reste t'en fais pas, t'en fais déjà beaucoup pour moi. D'autant plus qu'elle aurait pu lui porter préjudice à plusieurs reprises en travaillant, quelques années auparavant, avec l'un des plus sérieux concurrents de Fitgerald's Records. Je t'ai jamais vraiment remercié de m'avoir aidé au début, et aujourd'hui te voilà de nouveau à mon secours. Va falloir que je te rende la pareille un jour. Un sourire sur ses lèvres, elle se voulait taquine mais ses paroles étaient pourtant bel et bien sincères.

Toute ma vie, j’ai eu un don, assez développer, pour mettre les pieds dans le plat au cours d’une conversation. Ce n’est jamais réellement intentionnel, c’est toujours dans le désir de venir en aide à la personne en face de moi, mais c’est bien trop souvent complètement maladroit. Rien ne change lorsque j’interroge Lena. L’idée n’étant pas de la mettre mal à l’aise, bien au contraire. Tout ce que je souhaite, c’est de pouvoir lui apporter mon aide si elle en ressent le besoin. Le monde étant devenu un peu dingue ces derniers temps, je pourrais comprendre si elle avait un peu de mal à trouver des contrats. Je la vois hésiter et tente de lui offrir un léger sourire. « Je crois que... Peut-être que oui. » Sa voix semble craquer sur la fin et je comprends que clairement les choses n’ont pas été simples pour elle ces derniers temps. Il est simple de lui proposer une nouvelle collaboration quand je sais à quel point il est aisé de travailler en sa compagnie. Ce n’est pas grand-chose, juste un geste comme un autre de mon simple avis. « C'est adorable, vraiment. Merci Bailey. » Je hausse les épaules, ne considérant pas qu’elle est nécessaire besoin de me remercier.

« Si tu as des boulots pour moi, ça sera avec plaisir. Pour le reste t'en fais pas, t'en fais déjà beaucoup pour moi. » Je me doutais bien qu’elle allait me dire de ne pas m’inquiéter une fois encore. C’est probablement sa tactique de défense et je serais bien mal placé pour lui en vouloir lorsque j’ai souvent agi de la sorte moi aussi. « C’est assez calme en ce moment, mais l’activité reprend doucement. » Je n’ai pas été assez présent pour que les concerts s’enchaînent, pour que tout fasse sens, mais je compte bien m’investir de nouveau pleinement dans l’activité. « Je te dirais dès que j'aurais quelque chose d'intéressant à te proposer. » Je ressens à nouveau ce besoin d’aller chercher de nouvelles têtes, de passer des heures au studio pour créer quelque chose. Si j’avais perdu le goût à tout durant un temps, c’est bel et bien en train de revenir me démanger plus que jamais. « Je t'ai jamais vraiment remercié de m'avoir aidé au début, et aujourd'hui te voilà de nouveaux à mon secours. Va falloir que je te rende la pareille un jour. » Une nouvelle fois, je hausse les épaules, y ajoutant un signe de main signant l’idée que ce n’est absolument rien. « C’est rien, vraiment. » Je souris quelque peu. « Tu es toujours la bienvenue ici, même si c’est juste pour un café. »

Le réseau, c'est ce qui permet à quelqu'un de s'épanouir professionnellement parlant. C'est une notion importante et nécessaire lorsque, comme Lena, on travaille de son image, de sa réputation, et dans un monde sélect comme celui de l'influence et des soirées mondaines. Avoir quelqu'un comme Bailey dans son entourage était quelque chose de gratifiant pour elle, et elle mesurait la chance qu'elle avait de l'avoir. Si tout le monde était aussi bienveillant, il y avait fort à parier que tout serait bien plus simple. « C’est assez calme en ce moment, mais l’activité reprend doucement. » Elle ne doutait pas une seconde sur le fait que Bailey était un homme de confiance, sur le fait aussi qu'il réussirait à reprendre en mains son entreprise et à la remettre au niveau où elle était juste avant que ses enfants pointent le bout de leur nez. Non, Lena n'avait aucun doute à émettre sur le Fitzgerald et ça piquait presque sa jalousie, à la blonde, de voir qu'il était possible d'avoir une telle réputation sans failles. Sans doute avait-il rencontré lui aussi des soucis au cours de sa carrière, mais Lena rêvait d'avoir son nom associé à de si belles choses que l'était celui de Bailey. Elle avait encore du travail à réaliser pour ça, même si, avant toutes ces rumeurs, elle n'était pas loin de se faire un nom dans le domaine. « Je te dirais dès que j'aurais quelque chose d'intéressant à te proposer. » Elle hocha la tête de haut en bas. Ça me va, j'ai hâte de rebosser avec toi. Qu'elle lançait, visiblement motivée et sincère, son sourire collé à son visage. La blonde se confondait en remerciements, elle le lui devait vraiment. « C’est rien, vraiment. » Si pour lui ce n'était pas grand chose, pour elle ça signifiait beaucoup. « Tu es toujours la bienvenue ici, même si c’est juste pour un café. » C'est gentil. J'essaierais de passer plus souvent, comme ça tu pourras me parler de tes deux petits monstres. Qu'elle lançait, persuadée qu'il avait mille histoires à raconter sur eux. Et tu sais, tu peux aussi me demander de venir quand c'est toi qui a besoin de parler. Il était là pour elle et elle n'hésiterait pas à lui rendre la pareille. Que ce soit des enfants ou de ce que tu voudras. C'était un doux euphémisme tant la blonde ne pouvait s'imaginer le bouleversement qu'était de devenir parent, tant son changement de vie devait être brutal.

Il fallait savoir tenir ses relations dans le milieu. Je n’ai jamais été du genre à jouer au requin préférant laisser ce genre d’exercice à mon frère qui semblait maîtriser la partition depuis le jour de sa naissance. À son inverse, j’avais toujours préféré une autre méthode d’approche, faisant de ceux que je considérais comme indispensable, des amis qui avaient alors le droit de pénétrer mon cercle proche. Dans le fond, ce fut le cas avec Lena. Elle était arrivée complètement par hasard, elle était partie à la concurrence, mais elle avait su conserver le lien, elle avait su graviter jamais trop loin pour que mon intérêt subsiste malgré tout. Je voyais en elle le potentiel de pouvoir relancer nos activités en termes d’événementiels, faisant alors oublier les quelques mois qui furent particulièrement compliqués. « Ça me va, j'ai hâte de re bosser avec toi. » Un sourire se dessine sur mes lèvres tandis que je décèle toute la part de vérité qui se cache entre ces quelques mots. « On va reprendre tout cela très sérieusement. » Il faudrait que j’en parle un peu autour de moi, que je me renseigne, mais il y a probablement moyen d’engager un contrat sérieux avec elle.

« C'est gentil. J'essaierais de passer plus souvent, comme ça, tu pourras me parler de tes deux petits monstres. » Une nouvelle fois, je hoche la tête approuvant toutes les propositions. « Et tu sais, tu peux aussi me demander de venir quand c'est toi qui as besoin de parler. Que ce soit des enfants ou de ce que tu voudras. » « Je prends note, c’est promis. » Rien n’est dit que je prendrais action sur tout cela, je n’ai jamais été du genre à m’étendre sur ma vie privée, mais elle faisait amende honorable et je ne pouvais pas lui refuser cela de manière abrupte.

La conversation se poursuit encore quelques minutes, le temps de se promettre une dizaine fois de reprendre notre collaboration professionnelle, avant que je ne la raccompagne vers la sortie.