when the past comes right back to you-- @Lawrence Cabbott    

☽ septembre 2018 Il faisait beau aujourd'hui sur Brisbane, une nouvelle journée pour elle. Ces derniers mois, Joy avait vraiment brillé dans son service. Sa spécialisation en chirurgie pédiatrique la rendait heureuse, elle semblait toucher son rêve du bout du doigt. Elle commençait de loin... Elle n'était pas prédite à ce destin et pourtant, elle s'était battue pour en arriver là. Aujourd'hui, elle était en couple avec un grand chirurgien, une des meilleures de sa promo, et vivait une vie presque parfaite à Brisbane, qui l'aurait cru encore quelques années en arrière ? La brunette s'était montrée vaillante, aussi longtemps qu'elle avait pu, et entouré par les bonnes personnes elle avait su faire la différence. Elle espérait que son frère jumeau était fier d'elle, loin, perdu trop tôt, elle espérait qu'il soit content de ce qu'elle devenait. Après avoir vécu une adolescence compliquée, à jouer avec les limites, avec le feu... elle avait fini par ressortir plus forte de cette expérience. Elle ne regrettait rien, tout ce qu'elle avait pu vivre avait construit la femme qu'elle était aujourd'hui...

Quand elle marchait dans cet hôpital après toutes ces années, elle se sentait comme chez elle. Elle connaissait tout le monde, et tout le monde la connaissait. Bon... tout le monde la connaissait pour être "la petite amie de", mais peu importait elle se faisait peu à peu connaître pour son travail également. Elle savait qu'elle réussirait à se faire un nom dans ce métier, elle travaillait tous les jours pour, son ambition était si grande qu'elle ne doutait plus d'elle-même. Elle venait d'aller chercher un café à emporter à l'extérieur de l'hôpital, elle adorait le macchiato caramel que vendait le marchand ambulant à quelques mètres de l'hôpital. Quand elle pouvait donc prendre le temps d'une pause, elle fonçait généralement là bas pour récupérer une boisson caféinée pour l'aider à finir sa garde. Elle avait travaillé une grande partie de la nuit et elle allait finir aux alentours de midi probablement, si aucune urgence se présentait jusque-là... Elle n'était pas du genre à rechigner sur les heures supplémentaires. Joy revenait donc de l'extérieur, son café dans une main, un dossier d'un patient dans l'autre... Elle lisait son dossier en marchant, elle n'avait même plus besoin de regarder devant elle, elle connaissait par coeur les couloirs de cet hôpital. Mais ce qu'elle n'avait pas prévu c'était de rentrer directement dans quelqu'un. Dans quelqu'un de grand, baraqué, et qui ne l'avait probablement pas vu arrivé non plus... « Oh my god! Désolée, je ne regardais pas où j'allais. » dit-elle en se pressant au sol pour ramasser son dossier. Elle se redressa pour croiser le regard de cet homme. Elle en resta bouche bée, incapable de bouger. Elle était figée telle une statue, la bouche à moitié ouverte, sans son possiblement audible... « Kirby ? » eut-elle la force de dire, c'était comme si un fantôme du passé revenait de nul part. La jeune femme était comme tétanisée face à lui, incapable de dire ou faire quoique ce soit. Mais que faisait-il ici ? Il était le premier homme qu'elle avait aimé, le premier homme à qui elle avait tout donné... Le premier homme qu'elle avait aimé terriblement fort qu'elle en avait beaucoup souffert... Son silence après son internement en école de redressement avait été dur à dépasser, et ça avait aussi fait partie de sa thérapie. Elle avait l'impression de retourner près de dix ans en arrière, un bon dans le passé qui lui serra le coeur si fort qu'elle était incapable de parler.

Je ne sais pas quelle compagnie a obtenu le contrat de la conception de l’hôpital mais clairement le mot simplicité ne fait pas partie de son vocabulaire. C’est à se demander si les hôpitaux servent de laboratoires et que les humains qui s’y trouvent servent de souris afin de voir combien de temps ils mettront pour sortir de ce foutu labyrinthe. Aujourd’hui, c’est ma deuxième journée de travail et j’ai dû me perdre une bonne vingtaine de fois en essayant de trouver les toilettes. Toutes les ailes se ressemblent et les affiches sont loin d’être évidentes à comprendre. Je plains ceux qui doivent trouver la chambre d’un membre de leur famille qui est hospitalisé. Peut-être que je comprends un peu pourquoi il y en a qui s’énervent après le personnel médical même si ce n’est clairement pas de leur faute. Malgré l’agacement que l’endroit me provoque, je sais que c’est un coup à donner et que je finirai par trouver mes repères. Au final, je suis conscient que cet emploi est mieux pour moi que mon ancien travail de videur. Les horaires risquent d’être plus intéressants, à la longue, et j’ai enfin des avantages sociaux. Que je le veuille ou non, j’approche rapidement de la trentaine et il est probablement temps que je fasse autre chose de ma vie que d’intervenir auprès de jeunes cons bourrés qui croient pouvoir tripoter qui ils veulent. Qui plus est, ma sœur a fait des pieds et des mains afin que je puisse obtenir ce poste, je ne vais certainement pas lui faire honte en abandonnant dès la première semaine. Même sans elle, ce n’est pas mon genre d’abandonner aussi facilement.

Alors que j’ai un petit peu de temps libre devant moi, j’en profite pour rejoindre ma sœur pour discuter un peu avec elle. « Comment ça se passe jusqu’à maintenant? » Je hoche lentement la tête en camouflant la légère irritation que je ressens à force de me perdre dans les nombreux couloirs de l’établissement. « Ça va. Je dois m’adapter, mais ça ira je pense. » J’allais tout faire pour que ça fonctionne parce que May a des goûts assez dispendieux et je sais qu’elle croit que j’ai pas mal plus d’argent que j’en ai réellement. Nous continuons à discuter un instant jusqu’à ce que la pause de ma sœur se termine. Alors qu’elle part, je me fais rentrer dedans par derrière. « Oh my god! Désolée, je ne regardais pas où j'allais. » Les sourcils froncés, je me retourne pour voir qui est l’aveugle qui ne m’a pas vu. On va se le dire, ce n’est pas comme si j’étais facile à manquer. « Kirby ? » Malgré que mon visage soit impassible, moi aussi je l’ai reconnue. « Jo. » Je reste immobile pendant que je fixe la première femme avec qui j’ai partagé ma vie. On ne peut pas dire que notre relation était actuellement à son meilleur (pour ne pas dire inexistante), je sais que je ne l’ai pas supporté comme j’aurais dû alors qu’elle passait au travers une période difficile. Sauf que d’investir plus de temps dans cette relation aurait été, à mes yeux, qu’une énorme perte de temps alors que je savais très bien au fond de moi que nous n’irions nulle part. « Tu travailles ici à ce que je vois. » Je le devinais à son style vestimentaire du moment et au dossier qu’elle tenait dans ses mains. Tout comme elle le devinerait sans doute à mon uniforme elle aussi. « On dirait bien qu’on va travailler ensemble. » dis-je en haussant légèrement les sourcils en pinçant mes lèvres ensemble. Je ne peux pas dire que j’étais très enchanté à l’idée de devoir la côtoyer régulièrement. En même temps, je me disais que l’hôpital était assez grand pour qu’on ne se pile pas trop sur les pieds. « Tu as l’air… bien. » Ou mieux, mot que je m’empêche de dire pour ne pas trop la ramener à l’époque où j’étais parti comme un lâche.

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☽ septembre 2018 Joy ne pouvait pas prédire l'avenir, elle ne savait pas ce qui allait arriver, et deviner que les prochains mois allaient être un calvaire pour elle. La brune pour l'instant était sur son petit nuage, elle se perfectionnait en chirurgie pédiatrique et vivait une belle histoire d'amour avec son petit ami. On pouvait dire que tout lui réussissait, après tout, la roue tournait, non ? Après tout ce qu'elle avait vécu, Joy avait bien droit à un petit moment de répit dans sa vie...

Enfin c'était ce qu'elle pensait... Elle venait d'aller chercher son café préféré, et lisait le dossier d'un patient quand elle rentra dans quelqu'un. Elle qui ne levait pratiquement jamais la tête, voilà qu'aujourd'hui, ça lui portait préjudice. La jeune femme ramassa son dossier en s'excusant avant de relever la tête et croiser le regard de cet homme. Son cœur manqua un battement, et s'il avait pris un peu de muscles, qu'il semblait encore plus grand que dans ses souvenirs, Joy le reconnut à la seconde où son regard se posa sur lui. « Jo. » Il l'avait reconnue lui aussi. En même temps, on ne pouvait pas oublier une personne qu'on avait aimé de ses tripes. Joy s'était totalement perdue dans cette relation et pourtant elle n'oubliait pas la douleur qu'elle avait ressentie quand tout s'était terminé... Il avait fait partie de sa thérapie, dans cette école de redressement, sa psy lui avait fait remonter des choses de son passé, de son frère, mais aussi de cet homme qu'elle avait aimé et qui ne s'était jamais plus retournée sur elle au moment où elle n'avait pourtant le plus besoin. « Tu travailles ici à ce que je vois. » Joy jeta un oeil à sa blouse, c'était ce qu'il regardait. Puis elle releva la tête, encore incapable de dire quoique ce soit, paralysée devant lui elle comprit à son tour qu'il travaillait ici. Mais depuis quand ? Elle connaissait tout le monde, et tout le monde la connaissait... « On dirait bien qu’on va travailler ensemble. » Allez, Joy, c'était le moment de prendre la parole avant de paraître débile.  « Tu... enfin... euh, depuis quand tu travailles ici ? » dit-elle, elle avait vraiment dû mal à reprendre ses esprits. La brune le fixait comme si elle regardait un OVNI. Il semblait toujours aussi inaccessible et pourtant le temps s'était écoulé, il avait forcément lui aussi vécu tout un tas de choses, mais ça remuait des choses chez Joy qu'elle n'avait apparemment toujours pas digéré... « Tu as l’air… bien. » Joy continua de le fixer, elle était face à un fantôme du passé et qu'il le veuille ou non, il la ramenait direct à cette époque où elle était fragile, fêtarde, peste, jalouse, possessive et insupportable. Cette période où, également, tout le monde lui avait tourné le dos...  « Merci. Toi aussi, tu sembles... mmh, changé. » dit-elle, restant évasive.  Tous les souvenirs lui revenaient en tête, autant les bons que les mauvais. Elle concluait qu'il allait bosser ici, et n'avait probablement pas fait le rapprochement avec sa soeur encore... Elle le fixait toujours droit dans les yeux, tentant de desceller ce qu'il pensait mais comme toujours, c'était impossible. Joy aurait bien voulu lui dire tout ce que son départ avait provoqué chez elle, elle aurait aimé qu'il comprenne toute la douleur qu'il avait provoqué en partant ainsi, mais ce n'était ni le lieu ni le moment... Et puis, faut dire que Joy était complètement hypnotisée, tétanisée, paralysée, bref elle n'arrivait pas à se ressaisir. C'était comme si la présence de Lawrence l'envoûtait complètement, elle avait l'impression d'avoir seize ans à nouveau...

Plus d’une dizaine d’années se sont écoulées depuis notre dernière rencontre, depuis que j’ai craché sur notre relation et que je suis parti sans me retourner. Nous avons tous les deux changé à notre manière depuis le temps, pour le meilleur ou pour le pire. Joy ne m’a pas connu dans mes meilleures années et notre relation en a payé le prix. L’aimer était beaucoup trop difficile alors que je me cherchais moi-même, pressé de partir de chez mes parents adoptifs et d’entreprendre des recherches pour retrouver Stacey, quand je n’étais pas en train de me battre avec le premier qui me regardait de travers. Je n’avais plus d’énergie à consacrer à notre relation alors que je savais très bien que nous étions en train de nous bouffer par en-dedans. Je regrettais parfois comment je m’y étais pris, mais je ne pouvais pas changer le passé et réécrire l’histoire. Je ne pouvais qu’assumer mes décisions et regarder en avant. Joy n’a pas changé à l’exception de son visage qui a pris un peu de maturité. Ces quelques années de plus lui vont d’ailleurs comme un gant. « Tu... enfin... euh, depuis quand tu travailles ici ? » Dans sa voix résonne toute son hésitation face à ma présence. Après la façon dont tout s’est terminé entre nous, je ne peux la blâmer d’être mal à l’aise de me recroiser aujourd’hui et le malaise est partagé. Je me retourne une seconde pour pointer Stacey qui s’éloigne en marchant avant de rapporter mon attention sur Joy, croisant mes bras contre mon torse. « C’est ma sœur qui m’a aidé à trouver ce boulot. C’est ma première semaine. » Il était temps que je passe à autre chose, je commençais à avoir mon quota de gérer les débordements des gens qui ne savent pas se comporter quand ils sont bourrés.

Après toutes ces années, la conversation ne me vient plus aussi facilement avec elle. Alors je dis la première chose qui me vient à l’esprit. « Merci. Toi aussi, tu sembles... mmh, changé. » Je hausse le sourcils en me frottant la barbe d’une main. « No shit, ça fait dix ans qu’on ne s’est pas vus. » Mes muscles étaient beaucoup plus développés qu’à l’époque et je portais maintenant la barbe, en plus des différents tatouages que j’arborais sur mes deux avant-bras. Je traînais également un plus gros bagage qu’à l’époque, le cœur un peu plus égratigné qu’il y a dix ans. J’avais au moins réussi à reprendre contact avec ma sœur biologique, après avoir été séparé d’elle pendant treize ans. Stacey m’aidait beaucoup malgré notre différence de caractère. Retrouver notre complicité d’antan avait demandé beaucoup de patience et de persévérance des deux côtés. Lorsque Joy me fixe de son regard perçant, le mien se durcit pour lui bloquer l’accès à ma tête. Malgré tout, je soutiens son regard pour ne pas la laisser gagner, voulant ainsi cacher qu’elle me rend mal à l’aise. Parce que je ne veux pas lui laisser entrevoir la moindre vulnérabilité, tout comme j’ai l’habitude ne pas montrer mes faiblesses à mes adversaires lors de combats d’arts martiaux. « Tu fais quoi comme boulot? » Je lui pose la question pour détourner l’attention. Parce que je n’ai pas envie qu’on se mette à ressasser le passé, conscient qu’il y a probablement plus de choses à me reprocher qu’à elle. Je commençais à le comprendre à force de revivre les mêmes situations encore et encore.

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☽ septembre 2018 Elle faisait face à un fantôme du passé, impuissante elle fixait Lawrence devant elle. Elle avait dû mal à tout comprendre même si elle fit vite les calculs dans sa tête pour voir qu'il travaillait ici. Elle allait donc le croiser tous les jours... Si jamais, Aiden l'apprenait ça pourrait virer mal entre les deux. Enfin, Lawrence était sanguin dans ses souvenirs, et il ne semblait pas avoir changé de ce côté-là... Du moins, elle déduisait ça du fait qu'il semblait toujours autant fermé et inaccessible. Pourtant à l'époque la brune avait su le charmer, et ils étaient tombés amoureux l'un de l'autre. Tomber était le bon mot, elle était tombée de dix étages quand il était parti sans se retourner au moment où elle avait eu le plus besoin de lui... L'interne tenait son café sans faillir, elle avait le coeur qui battait vite alors que tout un tas de souvenirs revint la hanter. La brune se sentait extrêmement mal face à lui, elle était partagée entre la colère et le désarroi. Elle était totalement perdue et ne savait pas quelle attitude adoptée face à lui. Il restait courtois envers elle comme si jamais rien ne s'était passé entre eux, c'en était presque blessant... « C’est ma sœur qui m’a aidé à trouver ce boulot. C’est ma première semaine. » Joy suivit du regard la personne qu'il lui montrait. « Stacey est ta soeur? » répéta-t-elle, elle n'était pas sûre d'avoir tout suivi là... Joy travaillait ici depuis plus de huit ans maintenant, et elle connaissait presque tout le monde de près ou de loin, elle avait déjà eu l'occasion de travailler avec Stacey et elle n'arrivait pas à croire qu'elle était la soeur de Lawrence... Depuis tout ce temps.

La brune était déboussolée, elle avait envie de le frapper, lui montrer tous les coups qu'elle avait appris à maîtrise avec le temps grâce à la boxe. Elle pourrait se défouler sur lui, et sortir toute cette haine qu'elle avait contre lui... Nick avait été là pour la sortir de ce cercle vicieux, heureusement car elle ne serait probablement pas sortie de cette école de redressement totalement intacte sinon... « No shit, ça fait dix ans qu’on ne s’est pas vus. » Joy était perplexe, elle ne savait pas s'il ironisait la situation exprès ou s'il réalisait à voix haute que ça faisait près de dix ans qu'il s'était barré. « Dix ans que tu es parti sans te retourner, oui en effet. » rétorqua-t-elle d'un ton plus sec qu'au préalable, mais en même temps elle tentait de contenir sa haine, ses souvenirs du passé qu'elle pensait avoir oublié... « Tu fais quoi comme boulot? » Lawrence tentait réellement de s'intéresser à elle, là ? Elle fronçait les sourcils, à quel jeu jouait-il ? « Je suis interne ici, je me spécialise dans la chirurgie pédiatrique. » répondit-elle, presque par politesse... Elle n'avait pas besoin de retourner la question, elle savait très bien ce qu'il faisait ici au vue de sa tenue. « Comme tu peux voir, je me suis relevée. » ajouta-t-elle avec un rictus forcé, c'était plus fort qu'elle mais son coeur était en train de se serrer comme un citron pressé. Elle n'arrivait pas à croire qu'il était là, et pire encore, qu'elle allait devoir le croiser au quotidien... Le sort s'acharnait.

« Stacey est ta soeur? » Joy semblait surprise et avec raison puisque je n’avais pas encore entrepris les démarches pour retrouver ma sœur à l’époque où elle et moi étions toujours ensemble. C’est seulement deux ans plus tard que j’avais décidé de publier un message sur les réseaux sociaux et que j’avais enfin pu localiser Stacey et reprendre contact avec elle. « Oui, ma sœur biologique. » Ou plutôt demi-sœur, ce que nous avons appris à l’issu du test d’ADN que nous avons passé lorsque nous nous sommes retrouvés. Puisque nous pouvons affirmer avec certitude que notre mère était bien notre mère et que Stacey ressemble comme deux gouttes d’eau à celui que j’ai toujours considéré comme mon père, il n’a pas été trop difficile de conclure que je n’ai pas eu le même géniteur. Mais ça, Joy n’a pas besoin de le savoir. « Vous vous connaissez? » Visiblement si elle connait son nom. Au nombre d’employés qu’il y a dans un hôpital, toutefois, peut-être qu’elles ne se connaissent que de vue et sans plus. Il n’est pas non plus impossible qu’elles soient amies, je ne connais pas toutes les amies de Stacey. J’espère que ce n’est pas le cas, ça risquait de compliquer un peu les choses.

Sans aucune surprise, la discussion dévia vers notre rupture, visiblement le seul lien qui nous unissait. Malgré les années qui se sont écoulées, Joy a visiblement encore beaucoup de rancune quant à ma décision de partir. « Dix ans que tu es parti sans te retourner, oui en effet. » Je lève les yeux au ciel en soupirant, secouant ma tête négativement. « Oh fuck off, c’était fini entre nous et tu le sais très bien. Ça aurait donner quoi qu’on reste ensemble plus longtemps? Il fallait bien qu’un de nous deux la prenne cette décision. » dis-je sèchement en plantant mon regard dans le sien. Elle est bien naïve si elle croit qu’on serait encore ensemble aujourd’hui si je n’étais pas parti. Notre relation a durée à peine plus d’un an et nous étions déjà en train de nous déchirer. Prolonger cette torture n’aurait donné rien de bon. « Je suis interne ici, je me spécialise dans la chirurgie pédiatrique. » J’essaie d’être poli, de faire un effort parce que nous sommes au travail, mais son petit commentaire sur le fait que je suis parti m’irrite. Les bras toujours croisés contre mon torse, je hoche donc la tête en serrant la mâchoire, ne pouvant m’empêcher de lui lancer une pique. « Super. Je vais savoir dans quel service ne pas trop aller. » Ou du moins ne pas traîner pendant mes pauses. Parce que je ne décide ni où je patrouille, ni dans quel service une intervention pourrait être requise dans le cas où un patient ou un membre de la famille d’un patient deviendrait agressif. « Comme tu peux voir, je me suis relevée. » Je la fixe en silence hochant simplement la tête en pinçant mes lèvres, les sourcils haussés. « Je vois ça. Mes félicitations, j’imagine que c’est pour ça que tu me dis ça. » Au fond de moi je suis content, parce que je ne lui ai jamais souhaité de malheur, mais je suis trop fier pour l’admettre, trop fier pour m’excuser aussi. Joy fait partie du passé et ce n’est pas un endroit où j’ai le goût de retourner alors je m’arrange pour la repousser pour me protéger.

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☽ septembre 2018 Joy s'approchait doucement des dix années présentes dans cet hôpital, donc forcément elle croisait souvent les mêmes têtes. Elle disait bonjour tous les jours aux gardiens, aux personnels divers et variés de l'hôpital. Elle côtoyait plus ou moins les mêmes personnes au quotidien, mais elle croisait tout de même pas mal de gens qui travaillaient ici. Au final, elle connaissait Stacey également et n'avait jamais su auparavant qu'elle était la soeur de Lawrence. Pas que ça aurait changé grand chose de le savoir, Joy était assez mature pour savoir faire la part des choses, mais cette information l'étonna, sans se cacher derrière elle exprima sa surprise. « Oui, ma sœur biologique. » Joy acquiesça, surprise de cette nouvelle.  « Vous vous connaissez? » Joy leva le regard vers lui, évidemment que les deux jeunes femmes se connaissaient, l'hôpital était grand mais pas à ce point. Et puis, Joy avait passé son internat ici elle avait donc fréquenté tous les services avant de choisir sa spécialité. « Bien sûr, ça nous arrive d'être sur les mêmes cas parfois. » répondit-elle, laconique, impassible. Elle tentait de faire aussi bien que lui sur ce point-là...

Bien qu'elle perdit à ce jeu étant donné qu'elle ne put s'empêcher de lui faire une remarque désobligeante. Elle savait qu'il réagirait au quart de tour, Lawrence n'était pas connu pour savoir garder son sang froid après tout. « Oh fuck off, c’était fini entre nous et tu le sais très bien. Ça aurait donner quoi qu’on reste ensemble plus longtemps? Il fallait bien qu’un de nous deux la prenne cette décision. » Sa remarque lui pinça le coeur, il était vulgaire et sans âme avec elle, après tout ce qu'ils avaient vécu, il pensait avoir un peu plus compté pour lui... Mais il semblait qu'il ne gardait que les mauvais souvenirs en tête. « Il y a des manières de faire, tu m'as abandonné dans une période déjà assez compliquée pour moi, mais bon c'est du passé, je suppose. » dit-elle plus calmement, elle n'avait pas envie de s'énerver ni maintenant, ni jamais. Elle avait fini par l'oublier, par passer à autre chose, enfin. L'interne avait le coeur serré de le voir face à elle, aussi impassible, comme si leur passé n'avait jamais compté, c'était tout de même blessant de faire ce constat...  

« Super. Je vais savoir dans quel service ne pas trop aller. » Joy avait lancé les hostilités mais on ne pouvait pas dire que Lawrence y allait de mains mortes. Elle fronçait les sourcils, encore une fois blessée par ses propos, elle avait dû mal à le cerner... Elle ne préférait pas répondre, elle n'avait pas envie que sa voix la trahisse. « Je vois ça. Mes félicitations, j’imagine que c’est pour ça que tu me dis ça. » Son sarcasme ne faisait qu'en rajouter une couche, elle ravala sa salive, maintenant très agacée d'être face à lui. « Je ne pensais vraiment pas t'avoir laissé de si mauvais souvenirs.  » finit-elle par lâcher, se rendant compte qu'il enchaînait les sarcasmes et que c'en devenait vexant. Bien sûr que la brune lui en avait voulu longtemps, surtout cette longue année dans ce centre... Mais elle se souvenait aussi de beaucoup de ses premières fois qu'elle avait partagées avec lui... Pourtant, pour lui, il semblait que cela n'ait jamais existé, c'était triste de se rendre compte qu'elle n'avait été qu'une erreur pour lui.

Je suis surpris de constater que Joy et Stacey se connaissent, réalisant alors que l’hôpital me semble peut-être plus immense qu’il ne l’est vraiment, étant donné que je n’arrive pas encore à m’y retrouver. « Bien sûr, ça nous arrive d'être sur les mêmes cas parfois. » Je hoche lentement la tête sans rien rajouter. Le monde est petit malgré que la ville ne soit pas si minuscule que ça. Quelles étaient les chances que ma sœur biologique et la première femme avec qui j’ai partagée ma vie travaillent ensemble? Il était presque surprenant que les deux n’aient pas fait de liens avant aujourd’hui. Peut-être n’étaient-elles pas si proches que ça l’une de l’autre finalement.

« Il y a des manières de faire, tu m'as abandonné dans une période déjà assez compliquée pour moi, mais bon c'est du passé, je suppose. » Je croise mes bras contre mon torse dans un geste qui se veut défensif. « Alors quoi, t’aurais préféré que je reste avec toi juste parce que tu n’allais pas bien? Même si je voyais bien que peu importe ce que l’on fasse, on s’en allait droit dans un mur? » Je hausse les sourcils en la fixant, espérant qu’elle comprenne l’absurdité de ses paroles. Je décroise mes bras et je hausse les épaules en tournant mes paumes vers le plafond. « Parce que là tu ne m’aurais pas mis sur le dos de t’avoir plaquée alors que tu commençais à peine à aller mieux peut-être? » Elle aurait visiblement trouvé moyen de me mettre la faute dessus encore une fois, Joy. Je le sais parce que je ne fais jamais rien de correct quand je suis en couple, on me l’a fait assez comprendre depuis le temps. Je m’approche d’elle un peu, visiblement irrité par cette conversation dont je me serais royalement passée, surtout sur mon lieu de travail. « Vas-y Joy, explique-moi. Explique-moi de quelle façon j’aurais dû m’y prendre alors. Pour que ça passe, pour que ce soit correct. » Je sais au fond de moi que notre rupture lui aurait fait mal peu importe les mots que j’aurais utilisés. Parce qu’il n’y avait aucune façon possible que ça se termine bien, pas dans l’état où notre relation était rendue au moment de notre rupture. Rester avec elle plus longtemps n’aurait fait que nous faire plus de mal à nous deux pour rien. Je le sais et je suis certain qu’elle le sait bien au fond d’elle.

« Je ne pensais vraiment pas t'avoir laissé de si mauvais souvenirs.  » Je fronce les sourcils, surpris par son commentaire. Je lève un index comme pour lui dire d’attendre un instant. « Hey, tu me mets des mots dans la bouche là. Je n’ai jamais dit ça. » Je recule d’un pas pour reprendre mes distances, pour me faire un peu moins menaçant. Je tourne la tête à gauche et à droite pour m’assurer que notre conversation n’attire pas trop de curieux, avant de rapporter mon attention sur elle. « Je ne regrette pas. » dis-je d’une voix un peu plus douce, les traits de mon visage se relâchant légèrement. Je suis trop fier pour m’excuser mais je peux au moins lui faire comprendre que je ne regrette pas l’année que nous avons passée ensemble, malgré la mauvaise note sur laquelle notre relation s’était terminée. « Mais je me serais passé de tes petits commentaires. » C’est elle qui a commencé après tout et on ne peut pas dire que ne sait pas à quoi s’attendre avec moi. D’autant plus que je me contrôle plus qu’à l’époque où nos vies se sont croisées.

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☽ septembre 2018 Il n'y avait rien de surprenant à savoir que Joy et Stacey se connaissaient. Joy croisait tous les jours les mêmes visages, bien sûr elle travaillait avec plus ou moins les mêmes personnes, mais elle croisait aussi des gens d'autres services, d'autres équipes, et parfois des événements étaient organisés pour permettre à tout le personnel d'avoir une cohésion de groupe. Même si très vite, Joy se rendrait compte que les gens pouvaient être néfastes et se réjouir de son propre malheur... La jeune femme ne s'attendait pas à ce qu'un fantôme du passé resurgisse ainsi de la sorte, en plus, en affirmant travailler ici. Donc, elle allait croiser dans les couloirs son premier amour, l'homme qui l'a probablement le plus détruite après son propre père. « Alors quoi, t’aurais préféré que je reste avec toi juste parce que tu n’allais pas bien? Même si je voyais bien que peu importe ce que l’on fasse, on s’en allait droit dans un mur? » Law était aussi impassible et sans coeur que dans ses souvenirs. Ils avaient beau eu avoir de bons souvenirs ensemble, Joy avait gardé cette image dure de lui. Apparemment, les années ne l'avaient pas adouci.  « Parce que là tu ne m’aurais pas mis sur le dos de t’avoir plaquée alors que tu commençais à peine à aller mieux peut-être? » Joy avait la gorge qui se serrait, le voyant réagir au quart de tour. Elle fronçait les sourcils, et serrait son gobelet encore chaud, tout ceci l'irritait à elle aussi. Elle n'avait rien demandé. C'était lui qui déboulait dans sa vie sans prévenir. Elle le fixait alors qu'il semblait demander des comptes. Il avança d'un pas, elle en recula d'un aussi. Elle le revoyait ces scènes d'engueulades avec lui, où ils s'envoyaient des piques si blessantes... Joy avait appris à devenir tellement dure avec lui, et par la suite, sans lui.  « Vas-y Joy, explique-moi. Explique-moi de quelle façon j’aurais dû m’y prendre alors. Pour que ça passe, pour que ce soit correct. » Elle leva les yeux au ciel, elle était désespérée d'avoir cette confrontation, maintenant, sur son lieu de travail.   « Après tout ce que l'on a vécu Law, t'étais mon premier, j'étais ta première. J'pensais que j'aurais au moins eu droit à une conversation. » dit-elle simplement en haussant les épaules, elle le regardait et on pouvait certainement lire dans ses yeux à quel point elle était brisée. Du moins, à quel point, à l'époque, elle avait vécu cela comme un abandon et qu'elle aurait au moins aimé lui parler une dernière fois, au lieu de ne plus entendre parler de lui du jour au lendemain. « Hey, tu me mets des mots dans la bouche là. Je n’ai jamais dit ça. » Elle soupira, secouant la tête. Il regarda autour de lui avant de reposer ses yeux sur lui. Personne ne le connaît encore ici, Joy ferait mieux de s'en inquiéter elle par contre, si quelqu'un rapportait à Aiden qu'elle était en train de prendre la tête avec un homme, il y aurait probablement des étincelles. « Je ne regrette pas. » Il disait probablement ça pour se rattraper, mais Joy était convaincue du contraire. Elle avait fini par conclure qu'il était parti car il aurait tout bonnement préféré que ça n'arrive pas. Elle allait dire quelque chose, puis il reprit la parole : « Mais je me serais passé de tes petits commentaires. » Elle eut un petit rire ironique, ça l'aurait étonné qu'il finisse sur une bonne note. Il ne voulait jamais dire ce qu'il pensait vraiment. « Et moi je me serai passée que tu te fasses embaucher au même endroit que moi. Comme quoi, on a rarement ce que l'on veut, pas vrai ? » dit-elle, insipide. « Sur ce, je dois aller travailler. Je te remercie de tes commentaires. » il avait beau parler de ses commentaires, Joy retenait surtout les siens. Il n'y avait pas été de mains mortes non plus, elle finit par boire une gorgée de son café maintenant presque froid, et passa à ses côtés, frôlant presque son épaule avec la sienne pour s'en aller en direction de l'aile pédiatrique, service qu'il savait qu'il pouvait éviter, volontiers.