I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne enfilait ses boucles d'oreille face au miroir pendant qu'il fignolait quelques détails sur son costume. Elle portait sur elle une robe couleur émeuraude, assez simple, sans trop de détails, mais finement coupée, et suffisamment classe pour être portée en soirée. Ils étaient invités à un apéritif dînatoire chez une connaissance de Jamie. Le couple n'avait rien de particulier prévu ce weekend là, et ça leur donnait une occasion de sortir ensemble. Cela allait être très certainement différent des soirées de gala, où la tenue devait être impeccable, surveiller son langage et le maîtriser à la perfection, ne pas craindre les regards posés sur soi. Mais une tenue correcte était exigée, ce qui en soi, n'était pas un problème pour la jeune femme. Elle était contente qu'il vienne lui proposer de venir avec lui -la laisser seule pendant le weekend aurait été des plus frustrants pour elle, mais elle aurait certainement fait avec. C'était certainement ce cas de figure où ça n'allait pas être un nid de vipères dans lequel il emmenait sa belle. Juste pour manger, et discuter. Depuis quelques jours, le temps s'était considérablement rafraîchi. En journée, les températures étaient tout à fait agréables, n'allant pas au delà des vingt-cinq degrés. La soirée là s'annonçait donc bien fraîche, Joanne avait enfilé un veston sur ses épaules. Il était presque vingt heures. Jamie lui demanda s'il était prête, elle acquiesça d'un signe de tête juste après qu'elle ait fini d'ajuster son rouge à lèvres. Ils quittèrent ainsi la maison, et prirent la voiture pour se rendre au centre-ville. Ca se déroulait dans l'un des buildings du centre, Joanne ne se souvenait plus de l'étage. Mais c'était suffisamment haut pour avoir une vue imprenable sur tout Brisbane, l'immense salle de séjour disposant principalement de baies vitrées. Immense, le mot est faible. Certes un apéritif dînatoire, mais il y avait au moins une cinquantaine d'invités. Apéritif dînatoire, certes, mais avant tout une exposition d'oeuvres de l'hôte en question. Il y en avait sur tous les murs. Joanne restait bouche bée un moment, quelque peu stupéfaite d'avoir manqué cette information. Qu'importe. Elle passait sa soirée avec son compagnon, c'était tout ce dont elle voulait. La jeune femme restait à son bras quand ils arrivèrent. L'hôte, et artiste, vint très chaleureusement accueillir le couple, leur proposant de se débarasser de quelques vêtements. Joanne ôta sa veste et le posa sur le porte-manteau, ainsi que son sac à main. Alors qu'ils s'avançaient dans la pièce, après qu'on leur ait dit qu'ils pouvaient se servir en nourriture comme bon leur semblait, Joanne glissa sa main sous sa veste afin de lui caresser brièvement le dos -certainement une autre habitude qui émergeait. D'un air amusé, elle le regardait tout sourire. "Avant que tu ne te penches sur n'importe quoi, je te rappelle qu'il n'y a plus beaucoup de place sur les murs de la maison." Parce qu'il était tout à fait capable de chavirer pour une des oeuvres exposées, elle le connaissait. Elle rit, et ajouta. "A moins que tu comptais faire de la pièce que tu viens tout juste de finir de peindre une salle d'exposition." Ce dont elle doutait, il ne voudrait certainement qu'on le jalouse de toutes ses acquisitions -quoiqu'il avait une certaine fierté. Elle l'emmena avec elle par la main vers l'une des grandes tables exposant une multitude de mignardises plus alléchantes l'une que l'autre. Joanne se servait en muscat et laissa son homme choisir ce dont il avait envie. Elle goûta ensuite un petit morceau de foie gras posé sur du pain d'épice, légèrement caramélisé -un délice. Ils venaient tout juste d'entamer un sujet de conversation qu'on vint les interrompre. "Mais je rêve ! Vous êtes Jamie Keynes, n'est-ce pas ? Excusez-moi, mais votre émission est vraiment brillante, j'adore." Joanne restait sans voix. C'est vrai qu'elle avait pendant un moment oublié ce détail. L'émission qu'animait Jamie, bien qu'il n'y ait eu que deux diffusions depuis, était un véritable succès. A croire que les sujets abordés plaisaient et que la communication avait fait son travail. Ils commencèrent à discuter ensemble. Involontairement, Joanne avait tenu un certain écart entre elle et Jamie. Rien d'extravagant, mais un peu plus de distance qu'à leur habitude. Elle tenait son verre à pied des deux mains, entre ses doigts, délicatement. Joanne écoutait attentivement la conversation sans oser interrompre. La belle blonde était véritablement heureuse pour lui, que tout fonctionne très bien pour lui. Il semblait beaucoup plus heureux et satisfait de ses journée depuis, bien qu'elles restaient épuisantes et un peu plus longues. Elle n'allait pas non plus se plaindre de ça, ce serait trop demandé à ses yeux à elle.
Pas besoin de cravate et encore moins de nœud papillon. Un vrai plaisir pour ma gorge trop souvent oppressée par ce gens de fioritures -et Joanne sait à quel point j'en ai horreur. Alors ce soir, je profite de cet apéritif pour arborer une tenue bien plus décontractée que lors de mes autres sorties. Pas de veston, pas de pièce hors de prix -ou plutôt, rien qui ne soit hors de prix à mes yeux. Un simple costume noir orné d'un liseré tressé aux poches et une chemise gris perle. Depuis que Joanne m'avait avoué qu'elle n'aurait rien contre m'accompagner lors d'une sortie, je n'ai rien trouvé qui ne soit pas trop sensible de la mettre mal à l'aise. Jusqu'à ce que l'invitation à cet apéritif ne tombe dans ma boîte mail. Je suis sûrement vieux jeu, mais j'aurais préféré quelle tombe dans ma boîte aux lettres. Qu'importe. Une poignée d'invités discutant autour d'oeuvres d'art, voilà qui m'avait semblé parfait pour meubler notre samedi soir. Rien de trop grandiose, pas trop de monde, une moindre pression à supporter, de quoi manger, boire, et se divertir les yeux.L'idée avait plu à la jeune femme. Nous répondions donc présents. Je sais que Jon, la connaissance qui organise cette petite réception, est un merveilleux artiste ; je l'ai connu à travers l'exposition de ses sculptures métalliques, il y a peut-être deux ans. Lassé de cet art, il avait emprunté un virage et changé radicalement de médium en passant à l'expression sur toile. Et là aussi, Joanne sait à quel point je craque facilement pour une œuvre. Alors, elle ne manque pas de se rappeler que la maison est déjà pleine à craquer de toiles pour lesquelles nous ne trouvons déjà plus de place sur les murs. « Ah oui, c'est vrai… » je souffle, déçu d'avance de devoir me refuser un achat. Je suppose que mon chéquier sera reconnaissant à la jeune femme de lui avoir accordé une soirée de répits. Elle ajoute que je pourrais faire du troisième étage une salle d'exposition, pour plaisanter. Je souris, amusé, et hausse les épaules en reprenant un air plus sérieux. « Non, en fait, je pensais faire construire une dépendance dans le jardin pour me faire un musée personnel. » Bien sûr que c'est hors de question. J'aime garder jalousement mes acquisitions pour moi et l'oeil de mes éventuels invités et amis. Je n'ai pas d'intérêt à les exposer, je les achète pour ma satisfaction personnelle. Je suis Joanne jusqu'à une table ornée d’innombrables amuses-bouche -et suis forcé que le choix est fort limité me concernant, mais je mange peu lors des soirées je dois l'avouer. Je commande un simple verre d'eau tonique, bien décidé à cesser d'ingérer de l'alcool sous tous les prétextes possibles. « En fait je risque de transférer l'atelier au troisième étage. Avec le vasistas, la vue sur le jardin est... » Un homme soudainement auprès auprès de nous m'interrompt. En deux semaines, je n'ai pas vraiment eu le temps de m'habituer à être reconnu à tout bout de champ. C'est encore assez rare. Je ne peux pas m'empêcher de détailler l'homme rapidement. Inconnu. Je m'efforce de sourire et cacher un certain embarras -non sans une pointe de contrariété à l'idée d'être dérangé. « Hum, merci, c'est très aimable. Et vous êtes ? » Il me tend fièrement sa main afin que je la serre. « Colin Hudson, journaliste à l'Australian Times. » Mon sourire se fait un peu plus sincère alors que j'attrape sa main. « Eh bien, merci Colin, je ne savais pas que vous écoutiez ABC chez les collègues du Times. Je vous présente Joanne, ma compagne, conservatrice au Musée de Brisbane. » De fil en aiguille, la conversation s'installe, forcément à propos du travail. L'homme dit être à Brisbane depuis quelques mois, débarquant lui aussi d'Angleterre. « … depuis quatre ans oui. Je me concentrais uniquement sur mon rôle de rédacteur en chef et puis l'opportunité de retourner derrière le micro s'est présentée, alors voilà. Être en studio me manquait beaucoup. Et vu que j'interviens une fois par semaine, je peux assez facilement jongler entre entre les responsabilités et l'émission. » Je ne sais plus combien de fois j'ai répété tout ceci depuis deux semaines. Le sujet vient sur la table du moindre rendez-vous ou déjeuner professionnel. Mon regard se pose sur Joanne, légèrement à l'écart. J'adresse alors un sourire à mon interlocuteur. « Excusez-moi, je crois que j'ai assez parlé travail pour ce soir. Je dois prendre soin de cette charmante jeune femme. » Il se met à rire, répondant qu'il comprenait tout à fait et nous souhaite une bonne soirée avant de partir. Je me rapproche de Joanne et passe un bras autour de sa taille. « Est-ce que je dois t'interdire d'être à plus de cinq centimètres de moi ce soir ? » je demande tout bas, lui souriant tendrement. J'ai bon espoir que nous ne serons pas de nouveau dérangés de la sorte -même si cela est peu probable. Disons, au moins, pour parler d'autre chose que du travail. « Qu'est-ce que je disais déjà ? » Je cherche notre précédent sujet de conversation en prenant une gorgée de ma boisson. « Ah, le troisième étage. Si tu as une idée pour le meubler, je prends. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Ils furent interrompus au moment où Jamie disait enfin ce qu'il comptait faire de cette pièce supplémentaire : y aménager son atelier. Que deviendrait la pièce qu'il libérerait, à ce moment là ? Il n'avait même pas le temps de finir sa phrase qu'on vint l'aborder. Bien qu'il semblait en premier lieu quelque peu gêné, voir même agacé d'avoir été coupé, il restait parfaitement calme et détendu durant la conversation. Son sourire se faisait plus vrai lorsque l'inconnu donna son nom et son métier, avec une chaleureuse poigne de main. Joanne était quelque peu embarrassée qu'il l'ait présenté ainsi. A vrai dire, il n'y avait jamais vraiment eu de soirée comme tel, donc des présentations comme celle-ci n'avaient jamais été faites. C'était la base de n'importe quel type de relation, et pourtant, dans cette situation là, cela donnait une impression plus qu'étrange à la jeune femme. Elle sourit à cet instant, puis restait silencieuse le temps de la conversation, jusqu'à ce que Jamie retourne toute son attention sur elle, disant à son interlocuteur qu'il devait s'en occuper. Elle échangea un dernier sourire avant qu'il ne s'éclipse, le couple se retrouvant à nouveau seul. Le bel homme glissa sa main sur sa taille afin de l'approcher de lui. Ses yeux bleus le regardèrent au moment où il posait sa question, cherchant à voir s'il était sérieux ou s'il plaisantait sur un ton léger. A vrai dire, elle n'en savait rien. Il était tout à fait possible qu'il lui demande ce genre de choses, étant donné qu'il était très possessif et égoïste dans ses plus grands jours. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il exhibe ainsi leur couple, elle se demandait si il ferait pareil si c'était une soirée de gala comme celle où il ne comptait jamais l'y emmener. Autant d'attentions qui étaient classiques dans un couple, qui relevait presque de l'exceptionnel pour la belle blonde. "Pourquoi ? C'est une obligation ?" lui rétorqua-t-elle en toute douceur, et avec une légère naïveté, à voix basse. Leur discussion revint rapidement sur l'aménagement de la maison. "Je ne sais pas ce que tu veux en faire, je n'ai aucune idée de quels meubles nous pourrions y mettre." dit-ele avec des yeux malicieux. "Et l'atelier actuel, au premier étage, que comptes-tu en faire dans ce cas ?" Elle piqua une nouvelle mignardise sur le buffet, puis but une gorgée de son muscat. Une fois la bouche vide, elle lui caressa tendrement la joue avant de dire. "Vous me surprendrez toujours dans votre démesure, Mr. Keynes. A toujours en vouloir plus sans nécessairement quoi faire avec." Si ce n'était pour se donner une satisfaction personnelle. Cela devait être un argument suffisant pour lui pour obtenir tout ce qu'il convoitait. "J'espère que je vous suffirai." lui chuchota-t-elle à voix basse, avec un sourire. Cela restait une crainte permanente pour elle, même si elle croyait chaque mot qu'il pensait sur leur relation. Mais ayant déjà vécu un divorce, elle avait remarqué qu'elle était tout à fait en mesure de ne rien voir venir. Elle doutait qu'il fasse la même chose que son ex-mari, vu la patience et la détermination qu'il avait pour la récupérer. Elle se donnait le bénéfice du doute, on n'est jamais sûr de rien. Sauf de son amour. Elle glissa ses doigts dans ses cheveux courts et lui vola un baiser. "Je vais juste aux toilettes, je reviens vite." lui souffla-t-elle. Elle s'éclipsa pour quelques minutes. Juste quelques minutes. Quand Joanne revint dans la pièce principale, il y avait au moins cinq personnes qui entouraient Jamie. La raison en était évidente. La belle blonde ne savait pas si elle devait se rapprocher, s'interposer, revenir à ses côtés, où le laisser parler de choses qu'elle ne comprendrait peut-être pas. Il était dos à elle. Elle n'eut même pas le temps de songer à quoi que ce soit qu'un homme vint l'aborder. "Excusez-moi... Vous êtes arrivée avec Mr. Keynes, si je ne m'abuse ?" L'inconnu esquissa un large sourire, presque pas rassurant, lorsqu'elle acquiesça timidement d'un signe de tête. "A peine deux émissions de diffusées, et le succès est déjà de taille. Ca ne doit pas être évident de vivre avec tous les jours." Joanne l'interrogea du regard. "Jusqu'ici, ça n'avait rien changé." dit-elle en toute honnêteté. "Et qu'est-ce que cela vous fait de vivre avec une personne qui sera certainement bientôt à la une de certains magazines ?" "C'est un interrogatoire ?" rétorqua-t-elle d'un ton peu rassuré. L'inconnu rit quelques instants, portant son regard sur Jamie avant de retourner sur sa compagne. "C'est un choix difficile, de revenir à la lumière. Je suppose que vous n'étiez pas particulièrement enthousiaste à cette idée." "Je l'y ai encouragé, à vrai dire." répondit-elle simplement à ces fausses suppositions. Joanne ne se sentait plus à l'aise, l'ambiance devenait oppressante. L'inconnu continuait de parler encore et encore certainement dans le but de lui soutirer davantage d'informations. Mais Joanne restait muette, déglutissant de plus en plus difficilement sa salive, ne sachant que répondre à ses remarques. Elle eut un léger mouvement de panique qui s'installa en elle. Entre Jamie qui se faisait admirer de tous, et elle qui subissait un interrogatoire forcé. L'homme continuait de parler et de ricaner, mais ses paroles n'étaient que des échos aux yeux de la jeune femme, qui avait l'impression de perdre pied à une réalité qui la dépassait un peu. Le coupant au milieu d'une de ses phrases, elle dit faiblement. "E...Excusez-moi, je dois prendre un peu l'air." Elle se faufila entre les groupes de conversation qui s'était formé afin de rejoindre un petit balcon. On pouvait s'attendre à ce que ce soit le point de rendez-vous des fumeurs, mais il n'y avait qu'un couple qui admirait le paysage. La conservatrice sentait son coeur paniquer dans sa poitrine. Elle eut quelques bouffées de chaleur et des sueurs froides. Joanne tentait de prendre de grandes inspirations, manquant cruellement d'air. Non, par pitié, pas d'évanouissement, rien de tel. Une crise de panique, des éléments anonciateurs d'un malaise, Joanne n'arrivait pas encore à faire le discernement. Sentant ses jambes faiblir, elle s'installa sur un banc qui était adossé contre l'une des rambardes du balcon. Sa respiration était difficile, ses inspirations sonores. Elle logea sa tête entre ses deux mains, appuyant ses coudes sur ses cuisses, et ferma les yeux, espérant retrouver d'elle-même son calme. Joanne était tellement anxieuse de perdre à nouveau conscience ou de vivre à nouveau cette sensation de souffle coupé, que des larmes bordèrent ses yeux bleus, regardant le paysage. "Est-ce que vous allez bien, Madame ?" demanda la femme, qui se trouvait là avec son mari, et qui avait entendu les difficultés respiratoires de la belle.
« Ca pourrait devenir une obligation si tu t'éloignes encore une fois. » je réponds à Joanne avec un léger sourire, avant de déposer un léger baiser sur sa joue. Elle sera sûrement plus à l'aise en restant à mes côtés plutôt qu'en s'éloignant dès qu'une personne approche, je pense. C'est en s'éloignant, en se mettant elle-même à l'écart, elle finira par se sentir en trop en souhaitant simplement ne pas déranger. Je crois commencer à comprendre comment elle fonctionne, sa volonté de rester discrète, sa manière de se protéger lorsqu'elle ne se trouve pas dans son environnement. J'essaye de lui changer les idées, retrouvant notre précédent sujet. Parler de chez nous peut avoir quelque chose de rassurant. Ce fameux troisième étage qui peine à trouver une utilité. Je suis assez certain de souhaiter y mettre mon atelier, mais la salle l'accueillant en ce moment sera, du coup, un espace vacant. Que pourrais-je faire de cette pièce ? « Peut-être une seconde salle de bains. » dis-je en haussant les épaules. C'est pour le moment la seule idée qui me vient à l'esprit. Après tout, la chambre d'amis se trouve juste à côté. Cela permettrait d'avoir deux suites sur le même étage. « Même si nous n'avons absolument pas besoin d'une autre salle de bains. » je murmure en soufflant. Quelle idée j'ai eu. Comme le dit la jeune femme, j'ai ce besoin compulsif d'en avoir toujours plus. Je ne réfléchis pas, je prends ce que je veux. Et une fois que je l'ai, je ne sais plus quoi en faire. C'est un caprice dont j'ai toujours été victime. Plus la chose voulue était inatteignable, plus je la convoitais. Cela ajouté à mon esprit borné fait parfois de moi le parfait stéréotype du gosse de riche. « Une mauvaise habitude, je sais… » je marmonne en me cachant derrière une gorgée d'eau. Joanne avoue qu'elle espère qu'elle me suffira. Je souris en coin, la reconnaissant bien là. « Vous me suffisez amplement, Miss Prescott. » Je lui souris tendrement, gardant mon regard dans le sien. Je prolonge son baiser juste une seconde avant qu'elle ne s'éclipse. On ne me laisse pas vraiment le temps de rester seul ; je prends à peine une mignardise entre mes doigts qu'une main se pose sur mon épaule et m'oblige à me tourner. Jon, visiblement ravi par sa soirée, arbore un grand sourire. Il fait de grandes gestes en direction de quelqu'un à quelques mètres de nous pour lui dire de nous rejoindre. « James ! Laisse moi te présenter un fan. » Je fronce les sourcils. Cet homme a une manière bien à lui d'apprécier les gens, consistant à les taquiner et les contrarier en permanence. S'il ne vous embête pas, c'est parce que vous n'êtes absolument pas digne d'intérêt à ses yeux. Et ce soir, j'avoue que je préférerais être de cette catégorie là. « Ne m'appelle pas James, s'il te plaît. J'ai horreur de ça. Je suis accompagné, j'aimerais éviter de parler travail toute la soirée. Je suis vraiment obligé de… ? Oh, bonsoir, ravi de vous rencontrer. » Mon expression change du tout au tout alors que j'accorde une poignée de main à un homme d'à peu près mon âge, ainsi qu'un large sourire. Il m'avoue avoir découvert l'émission par hasard, en allant d'une station de radio à l'autre alors qu'il était coincé dans les embouteillages. Le lendemain, une chronique de la matinale d'une autre station dont il est habitué faisait le point des audiences de la veille et soulignait les bons résultats d'ABC. Nous rejoignent un couple, plus âgé, acquiesçant et précisant que la seconde édition avait été meilleure que la première. Une jeune femme s'ajoute, curieuse de savoir qui sera invité lundi prochain. « … vous savez, c'est beaucoup trop tôt pour appeler ça un succès. Les premiers chiffres sont bons mais ça ne veut rien dire. » dis-je en cachant un certain malaise derrière une gorgée d'eau. « Pas de fausse modestie, Jay. Attendez que je vous montre quelques unes de ses toiles, ce garçon est doué dans un tas de domaines. » Je déglutis difficilement alors que mes yeux ronds, à la fois surpris et contrariés, se posent sur notre hôte. « Tu avais promis d'effacer ces photos, Jon. S'il te plaît, ne… » Trop tard, il présente déjà deux ou trois tableaux dont il avait pris les clichés chez moi, avant d'un indiquer un autre, bien réel, accroché sur un mur au fond de la salle et dont je lui avais fait cadeau. Ca m'apprendra à disséminer des toiles un peu partout. Face à ce moment de solitude, je remarque l'absence prolongée de Joanne. Je regarde à droite à gauche, mais ne la vois pas. Une voix s'élevant d'entre le petit groupe qui m'entoure me sort de mes pensées ; « Et vous approuvez toute cette communication basée sur vos jolis yeux ? » J'arque un sourcil et ne manque pas de laisser apparaître à quel point je trouve la question ridicule. Mais la demoiselle semble encore jeune, et a de la marge pour apprendre à être plus pertinente. La femme du couple secoue négativement la tête en soupirant. « Lily… » Elle reprend, pour effacer la question de cette jeune femme ; « Vous savez, Jamie, j'ai rencontré votre mère une fois à la BBC, et je dois dire qu'on voit de qui vous tenez. Elle doit être fière de vous. » A bout de patience, étouffé, mon sourire disparaît. « Vous avez plus de chances de le savoir en lui demandant vous-même que par moi. » je siffle entre mes dents. Je termine mon verre, le pose sur la table près de nous et demande au groupe de m'excuser. Je suis d'habitude plus sociable et enclin à parler travail, mais pas ce soir. Je souhaite simplement passer la soirée avec Joanne, et avoir, à la limite, quelques conversations avec les invités à propos des œuvres de Jon. Mais la jeune femme est la seule personne par qui je veux être monopolisé. Je m'approche de la première personne que je croise, au hasard. « Vous auriez vu une jeune femme, petite, blonde, dans une robe verte ? » je demande en illustrant mes propos en indiquant la taille de Joanne d'une main au niveau de mon épaule. L'homme hausse les épaules. « Je l'ai vu. Vous devriez choisir des personnes qui tiennent la pression pour vous montrer en public. » Son sourire est narquois et titille mes nerfs. « Pardon ? » Mon agacement est palpable. L'assurance de mon interlocuteur, beaucoup moins. « Je pense juste que si elle craque dès le début… » Je lève une main afin de l'interrompre. « C'est merveilleux, si vous savez penser. Maintenant dites-moi simplement où elle se trouve. » Son regard se pose sur le balcon. Sans attendre, c'est la direction que j'emprunte. Je ne l'aperçois pas avant de me tourner complètement, et la voir assise sur un banc. Pâle, le visage dans ses mains, les yeux légèrement rougis. Je m'assied à côté d'elle et la prends dans mes bras, encerclant ses épaules avec l'un et posant une main sur ses cheveux de l'autre, la prenant ainsi contre moi. « Joanne… Viens là, calmes-toi. Respire. » Je l'entends se débattre avec ses poumons. La peur qu'elle puisse faire un malaise est bien présente. Mais je me fais aussi rassurant que possible -autant pour moi que pour elle. « Je suis là. Tout va bien, d'accord ? » Ma main caresse régulièrement ses cheveux. Et dire qu'elle souhaite m'accompagner à de plus importantes occasions que celle-ci. Je n'aime pas me montrer défaitiste, mais je pense avoir eu bien raison d'avoir refusé tout ce temps. « C'était une mauvaise idée, pardonne-moi. Nous devrions rentrer. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne n'avait pas bougé d'un pouce, jusqu'à ce que quelqu'un vienne s'asseoir à côté d'elle. Sans même regard de qui il s'agissait, elle devina aisément la personne qui venait l'entourer de ses bras. Elle le pensait en train de discuter avec les personnes qu'elle avait vu avant. Sa voix était calme, apaisante, alors que sa main lui effleurait tendrement les cheveux. Sa respiration avait été jusqu'ici très irrégulière. Elle parvenait peu à peu à la régulariser, ne se focalisant qu'à la voix de Jamie, sa présence, ses paroles, ses gestes. Elle y retrouvait là comme une ancre à laquelle elle pouvait s'accrocher, retrouver un tant soit peu de calme. Les mots utilisés étaient simples, mais efficaces. La jeune femme acquiesça d'un simple signe de tête à sa question. Ses yeux s'étaient clos, ayant ainsi évacué la pair de larmes qui s'était logée sur le bord de ses yeux. Une fois qu'elle retrouvait peu à peu son calme, elle se mit à ressentir un autre malaise. Celui de se sentir faible, comme ce château de cartes qui s'effondre au moindre coup de vent. Ce n'était certainement pas le type de caractère que l'on demandait pour ce genre d'événements, et Jamie n'avait jamais rien demandé sur ce compte là. Elle comprenait pourquoi il n'avait jamais voulu l'emmener à ces galas, elle venait d'en avoir la preuve. Mais l'idée de le laisser aller seul lui était peu supportable. Et paradoxalement, elle n'osait pas déranger lors de conversations, se mettant à l'écart dès qu'on s'intéressait à lui. Comme si elle était de trop. Un mécanisme complexe où régnait une ambivalence inexplicable. Joanne elle-même n'était pas sûre de se cerner à ce sujet. Jamie lui demanda pardon, trouvant finalement que c'était une mauvaise idée de venir, suggérant même de rentrer à la maison. A ce moment là, Joanne se redressa légèrement afin de pouvoir le regarder. Elle peinait encore un peu à respirer décemment, mais elle ne se sentait pas partir comme quelques secondes auparavant. Son regard ne quittait pas le sien. Joanne finit par hocher la tête négativement, faisant un sourire qui se voulait rassurant. "Non, non. C'est bon. Ca va aller." dit-elle à voix après s'être un peu éclairci la voix. Elle se redressa, restant tout de même collée à son compagnon. Restant silencieuse pendant quelques instants, la belle blonde finit par lui demander. "Tu veux bien me chercher mon sac à main ? J'ai les comprimés pour... enfin à prendre dans ces cas-là." Encore heureux qu'elle y pense, mais elle gardait un mauvais souvenir de son précédent malaise et ne tenait absolument pas à le renouveler. Jamie ne se laissa pas prier pour répondre à sa demande et il ne lui fallait qu'une poignée de secondes pour aller chercher l'objet en question. Après qu'elle ait gobé son cachet, elle referma son sac, le gardant sur ses genoux. Elle se demandait si c'était la seule présence de Jamie qui la rassurait, ou s'il y avait une part de sa volonté. En soi, ce serait vraiment rassurant pour elle de savoir si c'était vraiment Jamie qui avait cette capacité, mais rien n'était encore certain. "Il y en a un qui a commencé à me poser des questions sur toi, à faire des suppositions. Je trouve ça un peu déplacé, de chercher autant à se mêler d'une vie privée. Qu'est-ce que cela peut-il lui apporter, de savoir si tu avais mon soutien ou non pour ton projet d'émission ?" Elle baissa ses yeux, ses doigts jouant avec la lanière de son sac à main. Bien qu'elle avait l'air triste, elle s'efforça de lâcher un rire nerveux. "Tu ne vas plus jamais vouloir m'emmener nulle part, après ça." Elle savait qu'elle avait raison. Entre la crainte qu'il avait pour elle et sa possessivité, tout avait été écrit pour qu'il la garde uniquement pour lui à la maison. Joanne se redressa un peu, daignant enfin regarder son compagnon, ses yeux revenaient régulièrement sur ses doigts agités. "Je me sens tellement ridicule... faible. De ne pas être capable de surmonter ça. Je suppose que c'est quasi usuel dans ton milieu. J'aimerais bien être un peu comme toi." C'était peut-être un côté très enfantin, mais Joanne gardait bien en tête de ne pas se confier à des personnes qu'elle ne connaissait pas. Cela faisait aussi partie d'elle-même, elle n'avait jamais vraiment aimé se confier en tant que telle, ne trouvant jamais satisfaction des mots qu'elle utilisait. "Au moins pour tenir un peu le coup." ajouta-t-elle. Joanne n'allait pas non plus se noyer dans l'alcool à chaque soirée de gala. "Je suis désolée." finit-elle par dire, comme si c'était de sa faute.
Je ne suis même pas sûr de proposer de rentrer à la maison uniquement dans l'intérêt de Joanne. J'avoue que, moi-même, à cet instant, je préférerais être chez moi. En tout cas, pour le moment, je n'ai pas plus le courage qu'elle pour retourner affronter ce pourtant petit comité. Je ne veux même pas savoir ce que cela sera au prochain gros gala. Je crois que, pour la jeune femme, ça ne sera pas pour tout de suite. Elle me demande d'aller chercher son sac pour récupérer les cachets à prendre pour soulager sa respiration encore difficile. « Bien sûr, tout de suite. » Je dépose un rapide baiser sur son front avant de m'éclipser. Je me glisse aussi discrètement que possible entre les invités -de toute manière, il semble assez clair que ce n'est pas le moment de m'aborder- puis je trouve le sac en question et effectue le chemin inverse pour le donner à Joanne. En route, j'attrape un verre d'eau auprès d'un serveur, que je donne également à ma compagne, pensant que cela pourrait lui faire du bien. De nouveau installé à côté d'elle, je laisse simplement un bras sur le dossier du banc, derrière elle, créant une discrète étreinte autour de ses bras sans pour autant l'étouffer. Elle m'explique qu'un homme -et je devine duquel il s'agit- était venu à elle afin de l'assommer à coups de questions indiscrètes. Si nous restons, je pense qu'il faudra que je me contienne pendant toute la soirée pour ne pas aller le voir et lui faire comprendre plus textuellement le fond de ma pensée. L'idée qu'on importune Joanne à cause de moi a le don de m'irriter. « Je n'en sais rien. Je t'avoue que la curiosité des gens pour tout ce qui touche à la vie privé me dépasse. » je réponds à sa question en haussant les épaules. Le monde est avide de potins, de petites histoires à raconter, à diffuser, de minuscules exclusivités à glisser dans une conversation. J'ajoute ; « Ils n'ont pas forcément de mauvaises intentions. C'est parfois déplacé, et ils ne s'en rendent pas compte. » Au contact de mon père, j'ai appris à faire la différence entre les indiscrets qui souhaitent en savoir plus afin d'utiliser les informations collectées à leur avantage, et les personnes plus simples qui cherchent uniquement à se mettre quelque chose sous la dent. Je n'ai pas assez fait attention à l'homme en question pour pouvoir le placer dans l'une de ces catégories. Joanne pense -avec raison- que je ne voudrais plus l'amener avec moi où que ce soit après ce genre d'incident. Je me connais, j'en suis parfaitement capable. La garder enfermée à double tour à la maison pour la protéger, c'est bien mon genre. Comme à Londres, lorsque j'avais hésité à verrouiller l'appartement. C'est ce côté surprotecteur contre lequel j'ai bien du mal à me battre. Je soupire, réfléchissant. Et alors quoi, je sortirai constamment seul ou uniquement au bras d'amies qui accepteront de m'accompagner ? Je me retrouverais en compagnie d'Hannah, la plupart du temps, à n'en pas douter. Je n'aurais pas à me plaindre, mais cela ne serait pas pareil. Et Joanne m'en voudra certainement de la traiter ainsi. Elle qui souhaite tant être là pour moi à ces occasions, mais qui est encore loin de le pouvoir. Prenant sur moi mes envies de jalousement garder ma belle poupée pour moi, j'articule finalement ; « Disons que je trouverais une occasion encore plus petite pour la prochaine fois. Histoire de t'entraîner. » Ce n'est qu'une question d'habitude, après tout. Quoi que, non, on ne s'habitue vraiment jamais. On s'adapte. On apprend, on tient une liste de chaque situation, et de l'attitude à adopter face à celles-ci. On apprend l'état de parfait contrôle de soi-même, de ses gestes, de ses mots. Tout ce que Joanne s'est un peu efforcé à me faire perdre au final. « Je préférerais que tu restes comme tu es. Ca n'a pas beaucoup d'intérêt d'être comme moi. » je murmure en resserrant un peu mon étreinte autour d'elle. Mon regard se pose sur la vue. Brisbane dans toute sa splendeur nocturne. Je suis assez heureux de ne pas avoir le vertige pour pouvoir toujours autant apprécier les paysages en hauteur. C'est assez apaisant. « Ne t'excuses pas. Tu vois, j'ai cherché tout ça, j'ai pensé que ça me manquait, que j'en avais besoin, mais je ne suis pas à l'aise, leurs questions me tapent sur les nerfs… » Je parle assez bas afin de n'être audible que par Joanne. J'avoue rarement lorsqu'une situation me laisse aussi désarmé, n'aimant pas avoir l'air faible ou démuni face à elle. Mais quatre ans loin de la lumière ont suffit à me faire perdre tous mes repères, et je dois bien dire que je ne m'attendais pas à peiner autant. « Tu avais raison. Je voulais juste être de nouveau derrière un micro. Faire ce que j'aime. Mais il n'y a plus qu'à faire avec tout le reste du package. » Je me pensais vénal et avare de cette pointe de célébrité à laquelle j'avais été habitué depuis toujours. Je me pensais, un moment, semblable à mon père à ce sujet. Force est de constater que je suis moins doué que lui pour gérer une popularité naissante. Le fait est que, que je la veuille ou non, elle existe désormais, elle grandit, et il faudra composer avec. « Ce ne sont que les débuts, on ne peut pas savoir ce que l'émission va donner. Mais si elle marche toujours aussi bien… » Je ne veux pas dire que cela sera de pire en pire. J'aimerais éviter une tournure de phrase aussi négative qui pourrait faire paniquer Joanne. Non, elle doit comprendre que tout ira bien. La pression augmentera, tout sera plus difficile, mais nous tiendrons. « Il faudra qu'on se soutienne mutuellement. » je finis par dire en trouvant son regard, lui adressant un fin sourire. Elle sera présente pour moi, et moi pour elle. Cela ressemblera à ces échanges perpétuels lorsque nous faisons l'amour ; je lui passerais du courage qu'elle me transmettra à nouveau, formant un cycle permettant à l'un de nourrir l'autre par sa présence sans cesse. « Je sais que ça sera difficile pour toi. Je m'en veux beaucoup de te l'imposer. » J'ai surtout peur qu'elle ne tienne pas et s'en aille de nouveau, voyant que ce monde ne sera jamais le sien. Son caractère, si proche de celui d'Oliver, me laisse craindre le pire. Pas sa mort, non. Son départ et son absence suffiraient à me détruire à nouveau. Ma main libre vient se poser sur la joue de Joanne. « Mais je suis là, et je ne te lâcherais pas de si tôt. » je murmure avant de déposer un baiser sur ses lèvres. Je songe de nouveau a ce qu'elle a dit plus tôt. Qu'elle souhaiterait être un peu plus comme moi. Je me dis qu'à la place, je peux essayer de la guider afin qu'elle fasse son propre chemin dans ce monde, qu'elle trouve elle-même ses repères. Qu'elle se forge. « Tu te souviens de l'astuce des chiffres ? » je demande, me disant qu'il y avait des chances pour qu'elle l'ait retenue. Nous en avions parlé un jour sur la plage, aux prémices de cette relation. Je lui expliquais que les chiffres formaient la barrière entre les hommes et leurs émotions. Qu'un chiffre peut traduire un sentiment, mais que ce sentiment ne sera jamais vraiment atteignable pour l'interlocuteur. Ce concept de protection, cette construction de divers stratagèmes comme celui des chiffres, ou pour moi, celui des faits, permet de mettre une partie de soi hors d'atteinte toute en restant assez intègre et fidèle à soi-même. « Il faudra simplement trouver ta propre astuce pour mettre une vitre entre toi et eux. » Mon pouce caresse sa joue alors que mon regard reste noyé dans le sien, à la fois confiant à l'idée qu'elle puisse très bien s'en sortir, et inquiet. De détacher des autres est un exercice assez simple. Y revenir est bien plus difficile. Joanne l'a bien vu me concernant. « Ca viendra, tu verras. » je murmure, lui souriant. A la fois douce et intelligente, je pense que la jeune femme pourrait être parfaitement capable de devenir un véritable requin à son tour. Le plus terrible qui soit. Celui dont on ne suspecte pas une seule seconde l'existence. Oui, elle pourrait être terrible. « Tu te sens d'attaque pour y retourner ? »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Elle n'avait jamais aimé que des personnes qu'elle ne connaissait pas cherchaient à se mêler de sa vie, juste pour leur bon plaisir et pour satisfaire leur curiosité. Se confier à sa meilleure amie était une chose, tout déballer sur sa vie à des inconnus en était une autre. Même Jamie ne comprenait pas pourquoi ces gens-là cherchaient à soutirer ce genre d'informations. Des professionnels du comérages, des messe-basses courant les rues, on n'en savait rien. Il pensait que parfois ce n'était pas intentionnel. "Dans ton monde à toi, ce n'est pas non plus que des mauvaises intentions ?" lui demanda-t-elle, en toute curiosité. Jusqu'ici, elle n'y avait rien vu de bon, mais il fallait dire qu'elle voyait beaucoup de personnes riches comme le père de Jamie, utilisant la moindre information pour que ça aille dans son sens et se faire briller davantage. Elle vit Jamie soupirer après qu'elle lui ai dit qu'il ne voudra certainement plus l'emmener où que ce soit, après ce petit incident. Une preuve qu'elle avait raison, qu'elle pensait juste. Une traduction de sa possessivité, de son envie de protéger aussi. Joanne savait que ça partait d'un bon sentiment, qu'il ne voulait tout simplement pas que quelque chose de mal ne lui arrive. Lui comme elle devait penser à Londres, la fois où il avait hésité de l'enfermer dans l'appartement le temps de son absence. Bien qu'il ne l'ait pas fait, la pensée en soi était extrême. Mais Joanne cherchait toujours à comprendre ses actions, le pourquoi, le comment. Il y avait encore juste une chose qu'elle n'arrivait pas à cerner, c'était la nuit où il l'avait violenté. Elle n'y pensait pas tous les jours non plus, mais régulièrement. Elle savait qu'il avait un côté sanguin, mais elle avait l'impression que ce n'était pas lui ce soir là. Ce n'était pas Jamie, mais quelqu'un d'autre. Peut-être était-ce une forme de déni, on n'en savait rien, mais c'était ainsi qu'elle percevait les choses. Ca la dépassait complètement. Même son médecin ne cherchait pas trop à creuser le sujet lorsqu'ils se voyaient -puisqu'elle avait un suivi un petit peu plus régulier que l'année passée. Maintenant que leur relation était stable et correctement construite, ce n'était pas le moment de remettre des sujets épineux sur table. "Des occasions plus petites ? Ca existe, ça ?" demanda-t-elle d'un ton amusé. Joanne se doutait que ça n'allait pas être évident, mais elle restait déterminée dans ses objectifs, dont un qui était de l'accompagner et de le soutenir où qu'il aille. "Nous prendrons ce qu'il y aura. Je ferais comme ce que disent les théories de Darwin, je m'adapterai au milieu." Des théories qui étaient véridiques pour elle. Le bel homme vint même à lui demander de rester elle-même, de ne pas changer. Elle était quelque peu flattée qu'il lui demande ceci. La belle blonde lui sourit tendrement. "Ca permet de tenir le coup pendant ce genre de soirées." lui souffla-t-elle, en lui caressant sa nuque, alors qu'il regardait Brisbane qui s'étendait sous leurs pieds. Il reconnaissait qu'il était un peu dépassé par les événements. "Tu as fait ce que tu désirais faire..." commença-t-elle en captant son regard. Le sien se voulait rassurant, apaisant, qu'il sache qu'elle était toujours là pour lui. "C'est pour ça que je veux être là pour toi. Pour les après-coups, le revers de la médaille. T'aider à rendre les choses irritables agréables. Si j'y arrive." Jamie pesait ses mots, cherchaient ceux qui étaient corrects, histoire de ne pas angoisser davantage sa belle. Si l'émission continuait à voler sur son succès, oui, il fallait qu'ils se soutiennent l'un l'autre. Ils pourraient peut-être arriver à se créer leur propre bulle dans cet univers de fou. Ils pouvaient devenir invincibles ensemble, inatteignables. La seule facette du pouvoir que Joanne pouvait potentiellement apprécier. Jamie ne comptait pas la lâcher, lui donnant même une première astuce faisant référence à une conversation qu'ils avaient au commencement de leur relation. "J'espère que je la trouverai, mon astuce à moi." dit-elle, retrouvant un certain optimisme. Son compagnon semblait tout aussi confiant d'ailleurs, ce qui l'étonna un peu. Lui qui avait cherché jusqu'ici à la garder pour lui, il était prêt à la voir évoluer dans un univers qu'elle ne maîtrisait et qu'elle ne connaissait pas. "Je ne suis pas sûre de parvenir à rendre la réplique comme avec tes parents, tout de suite." Elle avait su quoi dire, c'était déjà ça, mais elle était vraiment énervée, ce jour là. Elle ne voulait pas avoir besoin d'être en colère pour montrer que ce n'était pas qu'un petit bout de femme Leur complicité était sans bornes, l'un comme l'autre ne tenait pas à se mettre des bâtons dans les roues, alors autant être ensemble pour le meilleur et pour le pire. Jamie lui demanda si elle se sentait prête à retourner à l'intérieur. Elle jeta un oeil aux personnes qui étaient là, l'homme qui l'avait importuné était toujours bien là. La jeune femme prit une profonde inspiration avant de le regarder et d'hocher positivement la tête, avant de se lever. Elle restait agrippée à son bras, ils avaient tout juste eu le temps de se servir à nouveau à boire et se servir en nourriture qu'on vint déjà les aborder.
Je suis bien obligé de me résigner à l'idée que je ne pourrais pas toujours garder Joanne éloignée de toute cette partie de ma vie. Non seulement parce qu'elle est armée d'une sacré volonté pour en faire partie, au moins se trouver à mes côtés. Mais parce que je n'ai pas vraiment le choix ; si nous sommes ensemble, et si nous comptons le rester un long moment, nous serons bien obligés de sortir tous les deux pour ce genre d'occasion, et d'autres plus importantes auxquelles je ne peux pas échapper. Plutôt que de m'obstiner à refuser qu'elle se mélange à cet univers là, je devrais moi-même l'y aider, et ainsi éviter que ce genre de situation ne se renouvelle. Il n'y a pas de raison pour que la jeune femme ne soit pas capable de s'y adapter, comme le dit. Et puis, sa présence pourra en effet m'être bénéfique, je pense. Elle ne pourra pas rendre agréable ce qui ne le sera jamais, mais elle peut alléger un peu cette pression sur mes épaules. « Tu peux les rendre supportables. » je réponds avec un sourire en caressant sa joue. L'idée d'avoir une complice dans mes déplacements, quelqu'un qui sait qui je suis réellement, peut se révéler agréable. Il faut simplement qu'elle trouve le moyen de ne plus se laisse atteindre par tous les éléments de ce monde qui agressent et l'oppressent. Elle y parviendra, petit à petit. L'entraînement commence un peu ce soir. Après avoir réuni son courage, Joanne accepte de retourner à l'intérieur. Nous ne pourrons pas rester sur cette terrasse pour toujours. Nos verres à peine remplis, Jon apparaît à côté de nous -avec cette furtivité qui lui est propre, il adore surprendre et voir sursauter tout le monde lorsqu'il prend la parole. Un écureuil. « James, je peux savoir pourquoi tu n'as toujours pas dégainé ton chéquier ? » demande-t-il en appuyant son avant bras sur mon épaule nonchalamment. Je prends une gorgée d'eau avant de répondre, l'air désolé ; « Eh bien, ma douce Joanne m'a rappelé en arrivant que je n'ai plus un centimètre carré de mur libre chez nous pour accueillir la moindre toile. » J'adresse un regard complice à la jeune femme. Mon ami fronce les sourcils et, s'amusant à prendre un air trop accusateur pour être crédible, se penche vers elle. « C'est de votre faute alors ? Vous me faites perdre un de mes fidèles acheteurs ! » Un sourire vient trahir son manque de sérieux alors qu'il se met à rire. Pour ma part, j'ai repéré non loin de nous un couple à la chevelure poivre et sel assortie, et leur arrivée capte toute mon attention. Au bout de quelques secondes de réflexion, je m'excuse auprès de Joanne et de l'artiste. « Je vous laisse juste une minute, je dois saluer quelqu'un. » Je vole un léger baiser sur la joue de la belle puis me tourne vers Jon. « Prends en soin, hein ? » Je leur souris et m'éloigne en direction du vieux couple -visiblement heureux de les croiser ce soir. Je pose ma main sur l'épaule de la femme afin qu'elle me remarque. Elle m'adresse immédiatement un large sourire, que je lui rends. « Les Quincy ! Comment allez-vous ? » Elle me claque une bise alors que je sers la main de son mari, plus crispé. « Merveilleusement bien, merci. Vous aussi depuis le beau départ de votre émission, je suppose ? » Je ris nerveusement. A croire que personne n'est capable de me parler d'autre chose. Qu'importe. « Absolument. Je me sens en veine, comme on dit. » je réponds en posant mon regard sur l'homme. Je le scrute pendant que je porte mon verre à mes lèvres. Bill Quincy ; auparavant, je l'estimais assez pour lui faire confiance. J'ai été terriblement naïf le concernant. Assez pour accepter de l'essuyer à éponger quelques dettes de jeu -à la condition d'être remboursé sous deux ans, je ne peux tout de même pas me permettre de distribuer des chèques sans que mon argent me soit rendu un jour. Il me doit le genre de somme d'argent dont il peut vraiment avoir honte. Et c'est cette honte qui se lit dans son regard, sans oublier une pointe de crainte. Il sait que, ce soir, il paye les nombreux appels qu'il a refusé de prendre, les mails qu'il a ignoré. Mon rictus mauvais disparaît assez vite de mon visage. « Comment va Karen, votre fille ? » L'épouse se met à rire, et je prends l'air étonné, feintant d'avoir l'air gêné de passer pour un idiot. « Nous n'avons pas de fille. » dit-elle finalement. Je le sais bien. Mais je poursuis, crédule ; « Vraiment ? Pourtant… Vous vous souvenez, nous nous sommes croisés la semaine dernière dans ce restaurant, le Wilson. Vous étiez avec une brune, vraiment charmante. Vous m'aviez dit qu'elle s'appelait Karen, et vous étiez si complices que j'étais persuadé qu'il s'agissait de votre fille. Une nièce peut-être ? » Le couple échange un regard qui en dit long -et me fournit une grande satisfaction. « Karen est la secrétaire de Bill. » Ca aussi, je le sais. Quelques secondes d'un lourd silence s'installent. J'en profite pour jeter un coup d'oeil du côté de Joanne, et m'aperçois que Jon vient de la laisser seule. « Je vois. Je suis désolé, je dois déjà vous abandonner. J'ai laissé ma compagne aux mains de Jon, Dieu sait dans quel état je vais la récupérer. » dis-je avec un léger rire. Mon ami est un homme à femmes parfaitement assumé qui collectionne avec passion les conquêtes, avec un goût prononcé pour celles supposées être hors de sa portée car déjà prises. « C'était un plaisir de vous voir. Bill, appelez-moi surtout. » Cette fois, il y a des chances qu'il le fasse. Dès demain. Je tape amicalement son épaule puis repars. Je retrouve Joanne près d'une des tables ornées d’amuse-bouches. Par automatisme, je pose une main dans son dos. « Jon est incapable de parler plus de trois minutes avec la même personne, excuse-le. » Elle pourrait me rétorquer que moi non plus, visiblement. « Cette fois, je suis tout à toi. » j'ajoute avec un sourire.
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Ce Jon était un sacré numéro. Il n'avait pas la langue dans sa poche. Il accusait faussement la jeune femme d'empêcher son compagnon d'acheter quoi que ce soit. Ses yeux bleus se rivèrent sur Jamie, avec un sourire en coin. Avant qu'elle n'ait pu dire quoi que ce soit, il remarqua la présence d'un couple qu'il connaissait, et souhaitait aller les saluer. Jamie l'embrassa sur la joue avant de les laisser seuls. "Par contre il doit être inopposable lorsqu'il signe des chèques pour vous faire plaisir." dit Jon, pensif. Il laissa échapper un rire fermé, en regardant son ami. "Je ne le lui permettrai pas." rétorqua-t-elle doucement. "Et vous pensez franchement qu'il vous écoutera ?" répondit-il, sûr de lui. Bien sûr que non. Jamie était suffisamment têtu pour faire ce que bon lui plaisait, surtout quand il s'agissait de combler sa belle. Entre le bracelet et le robe qu'il lui avait offerte, elle ne voulait même pas savoir la somme totale qu'il avait déjà dépensé pour elle. "Remarquez, pour une femme aussi belle que vous, ça se comprend." Joanne le dévisagea, perplexe. "Qui plus est, c'est un homme qui aime garder les belles choses auprès de lui et de ne jamais les montrer." Ses yeux noirs n'arrêtaient pas de scruter la jeune femme, ne se rendant visiblement pas compte que Jon lui faisait des avances. "Ca ne vous a jamais intéressé de franchir les limites, de réaliser un interdit ?" Sa voix était moins audible, du moins de sorte à ce qu'il n'y ait que la belle blonde qui puisse l'entendre. "On désire toujours ce que l'on n'a pas, vous devriez connaître ce sentiment." Elle n'en savait trop rien. Il y avait des choses qu'elle désirait par dessus-tout, mais qui lui semblait parfois encore inatteignable. "Je le connais très bien." dit-elle, avec un début d'assurance, mais elle, à ce moment là, pensait plus à l'idée de construire une famille et non pas de coucher avec quelqu'un que l'on convoite. "Et c'est d'autant plus frustrant quand on sait que l'on ne pourra jamais l'avoir, pas vrai ?" Jon se mit à sourire malicieusement. "Avec force et persévérance, on obtient toujours ce que l'on veut." Il rit, puis but une gorgée de son champagne, comme s'il avait élaboré un plan qui s’exécutait à la perfection. "A n'en pas douter." Joanne fronça légèrement les sourcils, voyant le regard qu'il lui lançait. "Navrée pour vous, mais je lui suis fidèle." Il rit, à nouveau. "C'est ce qu'elles disent toutes, ma chère. Mais un jour ou l'autre, elles finissent toutes par céder. C'est un fait." Voilà qu'on en venait, aux faits. "Vous devez bien être la seule femme dans cette pièce à ne pas avoir couché avec quelqu'un d'autre pendant qu'elle était avec quelqu'un d'autre." Et là, il y avait les chiffres. Joanne soupira. Il était vrai que Jon était un bel homme, qui ne manquait pas d'assurance et d'audace. Trois qualités qui ne pouvait que plaire. Mais pour le moment, Joanne n'avait envie et ne désirait que d'une seule personne, et c'était Jamie. Même en tenue décontractée, il restait magnifique. Elle le regarda discuter quelques instants avec le couple, où il y avait une certaine tension palpable. Jon, quant à lui, n'hésita pas à glissa sa main sur le bas du dos la jeune femme pour venir lui chuchoter dans l'oreille. "Réfléchissez-y." Puis il retrouva immédiatement son large sourire, s'excusa auprès d'elle pour aller voir d'autres de ses invités. Elle arqua un sourcils en le regardant, se demandant si tous les hommes étaient vraiment comme ça. Voyant que Jamie n'en avait pas fini, sa compagne s'approcha du buffet pour se servir en gourmandises salées. Des doigts bien plus familiers se déposèrent son son échine, Joanne se retourna pour pouvoir le voir, esquissant un sourire. "Faut-il l'excuser d'être un peu comme ton père ?" lui demanda-t-elle, un brin amusé mais dégoûté. "Des avances, une main sur mon dos, le même schéma. A vouloir ce qu'il ne peut pas avoir, vraisemblablement." Elle apporta lentement une douceur à sa bouche, avant de reprendre. L'âme plus rieuse, elle prit plaisir à rétorquer. "Toi non plus, apparemment, tu as un peu de mal à tenir en place." Mais elle ne lui en voulait pas, elle comprenait. Elle rit légèrement, venant l'embrasser juste sur le coin des lèvres, histoire de le frustrer un peu de ne pas goûter entièrement aux siennes. "C'était des amis à toi ?" demanda-t-elle en regardant le couple en question. Ami restait un mot très relatif dans cet univers de riches. Joanne vint ensuite lui dire tout bas, le sourire pendu aux lèvres. "Je suis certaine que tu dois jubiler à l'idée d'avoir quelqu'un que personne d'autre ne pourra avoir." Elle en était sûre. Joanne n'était pas du genre à aller voir ailleurs, car l'herbe n'y était pas forcément plus verte. Malgré tous ces défauts, elle idolâtrait jamais, elle le trouvait parfait. Elle glissa sa main sous sa veste afin de lui caresser tendrement le dos, profitant enfin d'un instant où il n'y avait qu'eux deux.
C'est sans surprise que j'apprends que Jon a tenté sa chance avec Joanne. Après tout, c'est en parfaite connaissance de cause que j'ai laissé la jeune femme en sa compagnie. A vrai dire, il doit être le seul homme sur Terre à qui je ne tiendrais pas rigueur d'avoir tenu un discours enjôleur à la belle -même lorsque je ne me trouvais qu'à quelques mètres, ce qui pourrait paraître encore plus scandaleux. Je souris même à l'écoute du récit de Joanne, le reconnaissant bien là. Je ne l'ai jamais vu capable de se tenir. Que la femme en question soit jeune ou âgée, belle ou plus banale, l'artiste n'a qu'un seul critère pour ses conquêtes ; qu'elle soit déjà acquise par un autre. « Il n'est pas aussi écoeurant que mon père. » dis-je en haussant les épaules. Je ne dirais pas que Jon est un ami, encore moins que je le connais parfaitement. Mais, pour avoir assisté à certaines de ses frasques, je sais qu'il n'insiste jamais beaucoup. Il sait comprendre qu'un non et un non. Il passe rapidement qu'un gibier à l'autre, prenant sûrement plus de plaisir à le chasser qu'à le consommer une fois qu'il l'a attrapé. Alors certes, il lui a fait des avances, mais il se contente de vivre dans un jeu sans fin. Je suis bien plus amusé que jaloux. « Il n'est pas méchant. » Mon regard tombe sur lui, je souris en coin. J'ai le chic pour m'entourer de personnes étranges. Joanne récupère mon attention à l'aide d'un baiser sur le coin des lèvres. Je plisse les yeux, accusateur ; le reste de mes lèvres aussi réclame une marque d'affection, non mais. Elle me demande si le couple auprès duquel je me suis absenté étaient des amis. « Pas vraiment, non. » je murmure avant de reprendre une gorgée d'eau. J'ai conscience que Joanne désapprouverai le discours que j'ai tenu là-bas. Que, même si je lui expliquais la raison de celui-ci, elle ne comprendrait pas. Je suppose qu'il n'y a pas grand-chose à comprendre. Lorsqu'il n'y a plus d'autre moyen d'atteindre quelqu'un afin d'obtenir ce que l'on veut, on fait avec des techniques moins reluisantes. Je n'avouerai la touche de satisfaction personnelle que la vue d'un homme à ma merci peut procurer. Avec un léger sourire, j'ajoute simplement ; « Disons qu'il fallait que j'aille jouer les requins. » Pour illustrer, je montre les crocs, puis ris doucement. Je ne me considère pas comme une personne terrible et intimidante. Je sais juste qu'il est préférable de m'avoir dans son camp. J'attrape une mignardise que je porte à ma bouche. Joanne fait remarquer que, me connaissant, je dois être ravi de savoir que ni Jon, ni personne d'autre que moi ne pourra l'avoir. Je ris à nouveau. Je dois être un véritable monstre de jalousie pour qu'autant de monde me fasse des remarques à ce sujet. « Ma possessivité me précède, c'est merveilleux. » dis-je en souriant, amusé. Si cela peut faire comprendre rapidement à notre entourage qu'il vaut mieux ne pas approcher de trop près ce qui m'appartient, je m'en accommode avec plaisir. Je ne peux pas m'empêcher de songer tout de même à Lionel, et ses mains baladeuses. Ou encore au baiser qu'elle m'avait avoué avoir reçu un jour. Je ne peux pas être certain qu'elle sera toujours uniquement mienne. Je n'ai pas la naïveté de croire que les écarts n'arrivent jamais. Et même si Joanne n'a pas conscience de plaire, je ne veux pas être l'idiot qui aura pensé qu'elle ne pourrait pas tomber dans d'autres bras. Néanmoins, je lutte pour ne pas me laisser dévorer par une montagne de doutes à son sujet. Je veux croire qu'elle est heureuse avec moi, et qu'elle sait que je ferais toujours tout pour qu'elle le soit. « J'ose espérer que plus personne ne viendra me voler ces lèvres. » dis-je en approchant mon visage du sien jusqu'à lui offrir un long baiser. Je ne suis pas du genre à avoir honte d'agir ainsi en public -restant toujours dans la limite du bienséant. Tant mieux si certains nous jalousent, ou si d'autres nous souhaitent d'être heureux. Je suis heureux avec Joanne, avec ma compagne ; qu'ils le voient. « Et toi alors, qu'est-ce que ça te fait d'être la personne choisie par ce très bel homme qu'on voit partout dans Brisbane ? » je demande, toujours souriant. Je garde ma main dans son dos, la serrant légèrement près de moi. Les couples absorbés l'un par l'autre sont rarement dérangés. Dans la poche de ma veste, mon téléphone vibre. Je fronde les sourcils et sort l'appareil. Un appel de mon assistante. Je secoue négativement la tête ; pas de travail ce samedi soir, point barre. Alors je range le téléphone après avoir rejeté l'appel.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Oui, il avait raison. Edward Keynes était écoeurant, dégoûtant. Que cette peu fripée puisse toujours avoir de jeunes femmes dans son lit pour son bon plaisir et en utilisant des arguments qui empêchaient un refus. Joanne se refusait d'avoir de telles images dans sa tête, cela ne lui ferait qu'avoir des nausées. Parlant de Jon, son compagnon disait qu'il n'avait rien de menaçant. Il ne semblait pas inquiet par son comportement, encore moins de savoir qu'elle l'avait laissé avec lui pendant de longues minutes. C'était peut-être une pensée ridicule, mais Joanne espérait qu'il montre un brin de jalousie, un brin de sa possessivité. Ca n'avait rien d'envahissant pour elle, ça avait un aspect un peu rassurant. De savoir que l'on était toujours aimé et désiré par quelqu'un. Qu'on lui appartenait. Cette idée, au fond, lui plaisait beaucoup. Jamie précisa que le couple qu'il était allé voir n'était pas des amis. Sa compagne haussa légèrement les sourcils, surprise qu'il ait tout de même décidé de les voir. "Un requin très séduisant." réajusta-t-elle, les yeux pétillants. Il n'avait pas à être intimidant. Sa posture, son assurance était largement suffisant pour convaincre et savoir qu'il ne fallait pas le contrarier. Son allure en dégageait toujours beaucoup. Jamie avait toujours eu beaucoup de prestance. "Qu'ont-ils fait ?" demanda-t-elle, en toute curiosité. La jeune femme avait parlé ensuite de la possessivité de son cher et tendre, ce qui le fit sourire. "J'aime ta possessivité." dit-elle à voix basse. S'il pouvait l'enfermer quelque part et être le seul à pouvoir la voir, il le ferait très certainement. Ou alors, si elle se montrait, il s'assurerait certainement pour que la gente masculine comprenne qu'elle appartenait déjà à un homme qui n'aimait pas du tout que l'on touche à ce qui était sien. Ce sont deux extrêmes, certes, mais on n'y était peut-être pas si loin. Il ne tarda pas à prendre ces lèvres, après avoir dit qu'il espérait qu'on ne les lui prenne pas. Elle eut à peine le temps d'esquisser un léger sourire avant ce baiser un peu long. Il fallait avouer que Joanne était un petit peu surprise de voir qu'il voulait l'embrasser ainsi en public. Au début de leur relation, elle craignait qu'il avait honte de se montrer en sa présence, et là, il faisait parfaitement l'inverse. Juste après à la fin de leur baiser, elle dit. "Ce que j'allais dire, c'est que si tu veux que personne ne vienne les voler, il faut que tu t'assures que l'on ait bien compris qu'elles appartiennent à quelqu'un qui y tient énormément. Et tu viens juste de le faire." Elle avait un large sourire. Ses mains s'étaient déposées sur ses épaules pendant qu'ils s'embrassaient et n'avaient pas bougé de place. Encore une fois, un nouvel événement se montra au moment où elle allait répondre à sa question. Il n'était pas difficile à deviner qu'ABC était derrière cet appel téléphonique et Joanne était heureuse de voir qu'il avait annulé l'appel. "Dur à dire..." commença-t-elle, l'air gêné. "Pour être honnête, je n'arrive pas trop à réaliser. Et je ne sais pas pourquoi, je crains le jour où l'on saura que cette inconnue qui te sert de compagne n'est que moi." Joanne devenait particulièrement sensible lorsque des regards jugeurs se posaient sur elle, la critiquaient d'une simple lueur. "Je ne sais pas trop ce que je suis sensée faire." dit-elle en haussant les épaules. Ses yeux devinrent un peu plus malicieux, mais embarrassés. Un sourire en coin, elle ajouta. "Mais j'avoue aussi que c'est assez plaisant de savoir que ce bel homme dont le visage est placardé de partout et que beaucoup de femmes rêvent certainement d'avoir dans son lit, soit en fait dans le mien tous les soirs, prêt à me prendre dans ses bras..." Elle se mordilla la lèvre, les joues un peu roses. "...et plus si affinités." Et il y en avait largement, de l'affinité, entre eux deux. "Je ne veux pas être enviée ou être la victime de leur jalousie. Je te veux juste toi." lui chuchota-t-elle, approchant son visage du sien. C'était avec lenteur qu'elle approcha sa bouche de la sienne, pour l'embrasser à nouveau, profiter de son étreinte. Ils furent une nouvelle fois interrompus par le téléphone de Jamie, qui vibra une nouvelle fois. L'ABC ou quelqu'un d'autre, elle n'en savait rien. Elle avait tout de même besoin d'être rassurée sur un point. "Nous passerons tout de même tout le weekend ensemble, pas vrai ?" Déjà que le temps passé en semaine ensemble s'était beaucoup plus limité que la dernière fois où elle était venue vivre chez lui.
Alors que je passe un à un le bout de mes doigts dans ma bouche pour ne pas perdre une miette de la petite bouchée que je viens de manger, Joanne me demande la raison pour laquelle il avait fallu que j'aille me faire relativement menaçant auprès du couple de tout à l'heure. Ne voyant pas d’inconvénient à lui confier cette information, je dis, tout de même assez bas ; « Le mari me doit une certaine somme d'argent. » Idiot que j'ai été de croire qu'il me rembourserait un jour. Je n'ai aucun recours pour l'y obliger. Si ce n'est désormais d'immiscer le doute dans son mariage et sous-entendre la relation que je sais pertinemment qu'il entretient avec sa secrétaire -ce n'est sûrement pas à moi que qui que ce soit peut espérer cacher ce genre de choses. Et si cela ne suffit pas, je n'aurais plus qu'à m'asseoir dessus. « Ne jamais prêter à un accroc au poker. » j'ajoute en haussant les épaules, souriant face à ma naïveté. Joanne avoue aimer ma possessivité. Elle me l'avait déjà dit par le passé. Cela me semble toujours étrange. C'est un traite de caractère qu'on me reproche le plus souvent. Au fond, c'est assez rassurant de voir qu'elle n'en a pas peur, qu'elle le comprend sans jamais s'offusquer. Après l'avoir embrassée, je la garde près de moi. Je crois que, même si elle m'a assuré qu'elle n'avait pas répondu à ce fameux baiser venu empiéter sur ma propriété, l'idée continue de rester dans ma tête et de me déplaire. Je n'ai pas tellement besoin de ce genre de piqûre de rappel ; je sais que Joanne est une très belle femme et la preuve en est qu'elle ne laisse jamais indifférent partout où nous allons. Je ne la blâme pas non plus. A vrai dire, je ne sais pas pourquoi il me travaille autant. « A ce qu'il paraît, je sais très bien marquer mon territoire. » je murmure en réponse. La preuve en est que tout le monde sait à quel point je garde jalousement tout ce qui m'appartient. Je n'aurais jamais de honte à afficher fièrement l'amour que j'ai pour elle, pour une femme qui sait me combler. Mais Joanne dit avoir peur du jour où elle sera également reconnue comme ma compagne par n'importe qui. Quand, finalement, elle perdra elle aussi son anonymat. « Tu n'as pas à avoir peur de ce jour là. Tout ira bien. » dis-je en posant une main sur sa joue. Je crois que je rougis légèrement lorsqu'elle parle du fait que des femmes que je ne connais strictement pas puisse me vouloir dans leur lit -c'est un aspect de la popularité que je n'avais jamais expérimenté et qui me laisse fortement mal à l'aise, moi qui n'ait jamais été capable de voir lorsque je plais à quelqu'un. « Bien sûr qu'elles vont te jalouser. Et je le serais aussi, parce que j'ai la chance de t'avoir. » dis-je avec un sourire. Doucement, elle s'approche de nouveau de moi. J'ai à peine le temps de goûter ses lèvres que mon téléphone vibre à nouveau. Je le dégaine ; Daisy encore. Me connaissant par coeur, elle sait qu'il ne sert à rien d'insister si j'ai refusé un appel la première fois, surtout en week-end et le soir. Si elle persiste, c'est que la raison mérite mon attention. Joanne demande si, malgré cet appel, nous resterons ensemble ce week-end. J'acquiesce d'un signe de tête. « Promis. » Je lui vole rapidement un baiser avant de décrocher. La conversation ne dure pas longtemps. Il suffit de quelques secondes pour me faire complètement perdre mon sourire. A vrai dire, plus elles passent, plus mon coeur décélère jusqu'à complètement s'arrêter, ma respiration se coupant également. Je n'arrive plus à déglutir, à articuler quoi que ce soit. Un très léger vertige me traverse et me fait pâlir. Je ne dis rien d'autre pendant ces quelques instants que ; « D'accord. Merci, Daisy. » avant de raccrocher. Fébrile, je range le téléphone et prends une gorgée d'eau. Ma main passe sur mon visage. « Edward vient d'atterrir à l'aéroport. Daisy l'a déposé à la maison. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Elle n'aurait jamais pensé qu'il serait du style à prêter de l'argent. Il devait sacrément faire confiance à cet homme à ce moment là. Jamie avait certainement vite compris qu'il n'en était pas digne, et il semblait nécessaire qu'il fasse quelques piqûres de rappel à cet "ami" pour qu'il lui rembourse la somme prêté. Les jeux faisaient partie des vices des grands riches, pouvant se retrouver sur la paille en quelques coups de poker. Joanne aimait bien jouer aux cartes, mais ne misaient jamais rien. A vrai dire, elle n'étais jamais entrée dans un casino où un lieu où l'argent est ouvertement posé sur la table, misé et surenchéri tour après tour. Elle espérait pour lui qu'il récupère rapidement la somme prêtée. Elle savait bien qu'il était dans le besoin, mais c'est surtout par question de principe. Et cet argent était à lui. La jeune femme se répétait beaucoup, parce qu'elle avait toujours l'impression qu'il ne la croyait pas, qu'il ne la prenait pas au sérieux. Elle pensait chacun de ses mots pourtant. Elle essayait de trouver dans ses défauts les bonnes choses, celles à laquelle elle peut s'attacher. Un sourire s'afficha sur son visage de porcelaine lorsqu'il dit qu'il savait bien marquer son territoire. Ou était-ce plutôt une constatation des personnes qui le connaissaient, de près ou de loin. Jamie savait très bien se faire comprendre quand il le voulait, surtout sur ce point là, apparemment. "Comment as-tu marqué ton territoire sur moi ,alors ?" lui demanda-t-elle, les yeux pétillants, cherchant à le cuisiner un peu. La main de Joanne était toujours logé sous la veste de son compagnon, ne bougeant que son pouce en guise de caresse. Ses yeux bleus ne voyaient que lui, dans la pièce. Elle avait partagé ensuite ses craintes, l'aval de cette célébrité naissante. Jamie lui garantit que tout irait bien, qu'il ne fallait pas avoir peur de ces jours là. Elle ferma ses yeux au contact de sa main posée sur sa joue. Joanne ne savait surtout pas à quoi s'attendre. S'il y avait des choses particulières à faire ou à dire, s'il y avait des habitudes qui allaient changé. Elle n'avait pas pensé à cet aspect. Elle appréciait l'intimité qu'ils avaient, la tranquillité qui s'était instaurée depuis qu'ils vivaient ensemble. Leur bulle à eux. La belle blonde avait peur que celle-ci ne soit lésée par la célébrité de son compagnon. Elle verrait bien le jour où ça arriverait, mais elle n'était pas certaine que ce serait un beau jour. Jamie semblait apprécier que des inconnues allaient être jalouses de sa compagne, mais c'était une idée qui enchantait guère cette dernière. La deuxième partie de sa phrase la fit tout de même sourire. Bien sûr, le vibreur de Jamie retentit une seconde fois, interrompant leur agréable moment. Il s'efforça tout de même à décrocher, juste après l'avoir furtivement embrassé. Son beau sourire s'effaça progressivement, ce qui inquiéta la jeune femme. Elle le regardait, essayant de décrypter son regard afin de comprendre ce qui était en train de dire. Non, là, il ne s'agissait pas de la radio, il aurait réagi tout à fait différemment, c'était autre chose. D'autant plus inquiétant. Il remercia son assistante avant de décrocher. Il déglutit difficilement sa gorgée d'eau, passe sa main sur son visage avant d'annoncer une bien mauvaise nouvelle. "Quoi ?" lui dit-elle, tout en le dévisageant. Elle baissa les yeux, trouvant quoi dire. Il savait très bien qu'elle n'allait pas se réjouir de son arrivée surprise, loin de là. Elle bégaya quelques instants. "Mais que fait-il ici ?" Pourquoi diable aurait-il fait le déplacement jusqu'à Brisbane. Joanne voyait son weekend complètement gâché par un père qui devait certainement savourer cet instant, dans la maison de son fils. Elle n'avait absolument pas envie de le voir, pas ce soir. Elle soupira, restant silencieuse. Son regard le suppliait, puis elle partagea la première idée qui lui vint en tête. "Ne peut-on pas dormir dans un hôtel ce soir ? N'importe lequel..." Elle l'enlaça de ses deux bras, qui se glissaient sous sa veste, ayant l'étrange impression que ce sera leur dernière soirée tranquille avant un long moment. La tête posée contre son épaule, la belle blonde resta longuement songeuse. Elle se redressa un peu pour pouvoir le regarder, d'un air triste. "Les soucis peuvent très bien attendre jusqu'à demain midi, non ?" Parce qu'elle comptait bien faire une grasse matinée logée dans ses bras. Il fallait le dire, mais Joanne avait extrêmement peur d'Edward Keynes, et de ce dont il était capable.
Je suis quelque part entre la surprise et la crise d'angoisse, me laissant parfaitement tétanisé le temps d'encaisser la nouvelle. Mon père sur le sol australien, ses valises posées chez moi, paré à me faire payer toutes les erreurs qu'il estime que j'ai commises. Ou simplement à me torturer un peu sur ma nouvelle île, pour le plaisir de me faire comprendre qu'être exilé à l'autre bout du globe n'est pas assez pour lui échapper. Je peine toujours à respirer, à me mouvoir, à penser. Mon regard est perdu dans celui de Joanne, mais parfaitement absent. Je m'extirpe de ma léthargie lorsqu'elle propose d'aller dormir à l'hôtel pour cette nuit. Par automatisme, mes bras viennent l'encercler, et la serrer fermement contre moi. Je pose une main sur sa tête, caressant ses cheveux pour la rassurer autant que moi. Elle insiste. Mais pour le moment, je reste complètement bloqué sur l'information la plus basique ; Edward est à Brisbane. « J'ai besoin d'air, pour réfléchir. » dis-je doucement, m'efforçant de retrouver contenance. J'attrape Joanne par la main et l'attire à l'autre bout de la pièce. Nous retournons sur le petit balcon où nous nous trouvions tout à l'heure, où traîne une seule personne fumant sa cigarette. L'air est frais, et me fait un bien fou immédiatement. Appuyé contre la rambarde, je respire profondément, les yeux fermés. Je ne supporte pas de me montrer aussi fragile devant la jeune femme, mais la surprise a pris le dessus sur tout le reste, et ma façade assurée a tout bonnement volé en éclats. Les poumons à nouveau remplis d'air, le coeur capable de battre normalement et le cerveau moins engourdi, je parviens à réunir mes pensées pour réfléchir. « Je ne sais pas pourquoi il est là. Il n'a pas daigné prévenir. » dis-je, même si cela semble parfaitement évident. Je souffle un rire traduisant mon agacement alors que je secoue négativement la tête. « Il n'allait pas se refuser une occasion de me mettre dos au mur, hein ? » Bien sûr que non. Pensez-vous. Il me manquerait plus que j'ai le temps de me préparer avant de l'affronter. Il en avait fait l'expérience la dernière fois, à Londres, et cela ne lui avait certainement pas plu. J'ouvre enfin les yeux, mais garde le regard rivé sur la ville. C'est dommage que nous ne puissions pas voir l'océan d'ici. C'est le genre de vue qui m'aurait apaisé. « Ca doit être pour cette histoire de titre. » j'ajoute avant de reporter mon attention Joanne. Je quitte la rambarde et lui fais signe de se rapprocher afin que je puisse de nouveau la prendre dans mes bras. Elle n'a pas de veste pour lui tenir chaud. Et puis, l'avoir contre moi me fera le plus grand bien. Mes bras la serrent tendrement. Je dépose un baiser sur le haut de son crâne, restant silencieux et immobile quelques minutes. J'imagine mon père chez moi, attendant un peu avant de savoir s'il peut encore espérer me voir rentrer ou non. Je le vois faire le tour des tableaux accrochés au mur, pourquoi pas se faire un thé, s'asseoir dans la véranda. Il peut être en train de monter les escaliers, avant d'explorer chaque pièce une à une, récoltant toutes les informations possibles de ma vie à Brisbane, relevant chaque détail exploitable. Je l'imagine entrant dans l'atelier, la seule pièce qui n'appartient qu'à moi, et rire devant la quantité de poussière ; jeter un coup d'oeil à la chambre d'amis qu'il trouvera parfaite pour lui -parce qu'il voudra nécessairement s'installer chez moi ; puis la salle de bain, qui ne lui plaira pas, pas assez classique ; enfin la chambre que je partage avec Joanne, n'hésitant pas à s'asseoir pour juger le matelas, vérifier les penderies. Toucher les affaires de la jeune femme. Toutes ces images me révulsent. « Je suis désolé Joanne, mais je ne vais pas laisser ce type me faire fuir ma propre maison. » dis-je finalement, la détermination inspirée par les scènes de mon imagination. Je suis chez moi. C'est ce que je me répète. C'est une notion qu'il cherche à m'arracher avec sa venue. Non, je suis chez moi. J'embrasse la belle sur le front, avant de poursuivre ; « Tu peux rester ici si tu veux, et prendre un taxi pour rentrer plus tard, ce n'est pas un problème. Mais je dois y aller et le déloger de là. » Je n'ai pas plus envie qu'elle de le voir, de devoir l'affronter ce soir, mais je ne veux pas que son arrivée soit une première bataille de gagnée à ses yeux. « La seule personne qui dormira à l'hôtel ce soir, c'est lui, d'accord ? »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie était dans un sâle état. Son teint était pâle, presque gris, il n'y avait aucune expression positive qui se refletait sur son visage, qui se dessinait dans ses traits ou qui se refletait dans ses yeux. Juste de la peur, de l'angoisse, la surprise. Joanne l'avait déjà vu triste, mais jamas ainsi. Tout devenait comme hors de contrôle pour lui, il ne maîtrisait plus rien. Le simple fait de savoir son père sur le terrain australien le tétanisait. Il avait beau dire qu'il le haïssait, qu'il n'hésitait jamais à lui dire les quatre vérités, mais Edward restait avant tout son père, un homme puissant, qui plus est. La jeune femme avait l'impression qu'elle retrouvait en face d'elle ce pantin qu'elle n'avait jamais connu, elle ne l'avait jamais vu ainsi. Son père devait jubiler à cette idée, de savoir son dernier fils dans cet état. La jeune femme avait tenté de lui proposer des alternatives, afin de ne pas confronter tout de suite cette réalité qui pesait considérablement lourd. Elle était très inquiète, et le regardait silencieusement jusqu'à ce qu'il parvienne à articuler quelque chose. Sans qu'elle s'y attende, et après avoir parlé, il saisit sa main afin qu'elle vienne avec lui à l'extérieur. Une fois dehors, elle le regardait s'appuyer contre la rambarde, rafraîchissant ses poumons après chaque bouffée. Le voir ainsi lui était particulièrement destabilisant. Comme si leur monde s'effondrait par la présence d'un seul homme. La belle blonde ne savait pas quoi répondre, ni quoi suggérer. Elle ne tenait pas à voir la personne qui sera peut-être un jour son beau-père. Quel être méprisable, comment peut-il vivre en sachant qu'un nombre incalculable puisse le haïr. Joanne préférait le laisser penser à haute voix, elle ne savait pas quoi lui répondre, de toute manière. Ses yeux le regardaient d'un air désolé, ses bras s'étaient croisés, à cause de l'air frais qui soufflait à l'extérieur. C'était à parier que le père Keynes finisse par intervenir pour cette histoire d'héritage de titre. Il n'était pas foutu de le laisser vivre tranquillement, il fallait toujours qu'il intervienne au moment le moins adéquat. Joanne était perdue dans ses pensées lorsque son compagnon s'était retourné face à elle, lui tendant une main, l'invitant à revenir dans ses bras. Son regard se posa brièvement sur le sien, regardant ensuite cette main tendue. Elle s'approcha et se blottit contre lui, serrant le tissu de sa chemise au niveau de son dos. De longues minutes passèrent ainsi, tous les deux immobiles. Jamie lui caressait doucement les cheveux. Elle se demandait ce qu'il pouvait penser à cet instant. Elle espérait aussi qu'Edward n'ait même pas le temps de défaire ses valises pour qu'il rentre en Angleterre. Elle qui pensait avoir un weekend tranquille avec celui qui l'aimait. Jamie reprit le parole, la jeune femme se redressa légèrement afin de pouvoir le regarder. Ses yeux le regardaient, perplexes, dans l'incompréhension. Il lui proposa de rester ici et de rentrer plus tard, lui assurant qu'ils dormiront bien dans leur lit ce soir-là. Peut-être qu'il espérait qu'elle ne vienne pas avec. Manque de pot, il avait choisi de partager sa vie avec une femme qui savait être têtue quand bon lui semblait. "Hors de question que tu y ailles tout seul." dit-elle à voix basse, non sans détermination. Ses iris bleus se noyaient dans les siens. "C'est notre maison." Elle se permettait de corriger cette fine nuance. "Notre vie." Et dans cette vie là, elle ne comptait pas y intégrer un homme aussi écoeurant que le père de Jamie, il n'y avait clairement pas sa place. Il pouvait tenter de ruiner de la manière dont il voulait la vie de son dernier fils, la jeune femme fera tout son possible pour l'en empêcher. Elle savait bien qu'elle ne faisait pas le poids face à tout cela. "Je ne voudrais pas le laisser croire qu'il est capable de nous séparer." Un sourire complice se dessina progressivement sur son visage. "C'est nous, ou rien du tout, pas vrai ?" lui chuchota-t-elle. Joanne approcha doucement son visage du sien, afin de l'embrasser tendrement. Sa main se posa sur sa joue de manière délicate, se fichant que son baiser gagnait un petit peu en fougue. Qu'importe, personne ne regardait. Quand leurs lèvres se quittèrent, elle lui dit à voix basse. "Allons chercher ma veste." A son tour, Joanne le prit par la main, et se dirigèrent vers la sorte. Plus vite ce problème était réglé, plus vite ils seraient à nouveau tranquilles.