Elle avait mis des heures à se préparer, à chercher la tenue parfaite et les chaussures qui correspondraient. Cette soirée de Nouvel An, elle l’avait attendue avec impatience. Elle allait la passer en compagnie d’Asher et de ses amis, sur les collines de Brisbane. Elle trépignait d’impatience — ils avaient parlé de cette soirée pendant des heures, et elle s’annonçait fabuleuse. En tout cas, c’était l’idée que Naomi s’en était faite… Mais à vrai dire, c’était surtout l’idée de passer la soirée avec son petit-ami qui la mettait en joie.


Elle avait laissé ses cheveux sécher naturellement, afin de pouvoir les laisser cascader sur ses épaules partiellement dénudées. Elle avait opté pour une robe noire, légèrement vaporeuse, qui mettait en valeur son généreux décolleté. Elle avait entrepris de faire un maquillage charbonneux pour ses yeux, mis une touche de gloss sur ses lèvres charnues, et s’était observée dans le miroir. Elle s’était trouvée belle, et n’espérait qu’une chose : que sa pensée soit partagée par son compagnon. Elle sursauta lorsqu’elle entendit la sonnette de son appartement retentir. Une partie d’elle mourait d’envie de courir lui ouvrir la porte pour l’inviter à entrer, tandis que l’autre partie d’elle-même (nettement plus raisonnable, celle-là), la raisonna. « C’est ouvert ! » Scanda-t-elle, sans bouger de sa chambre. Elle était déjà en retard, et devait impérativement terminer de transférer ses affaires d’un sac à main à un autre.


« J’arrive ! » S’exclama-t-elle avec joie, vérifiant une dernière fois dans le miroir qu’elle était présentable. « Tu en penses quoi ? » Demanda-t-elle en tournant sur elle-même, l’étoffe de sa robe se soulevant légèrement, dévoilant partiellement ses cuisses hâlées. Il n’y avait aucune arrière pensée, aucune séduction dans l’attitude de Naomi ; elle savait qu’elle n’en avait pas besoin. Asher n’avait d’yeux que pour elle, et elle le savait. « J’espère que ce n’est pas trop court. » Murmura-t-elle, craignant que la tenue ne soit pas au goût de son petit-ami. Il n’avait pourtant jamais fait le moindre commentaire à ce sujet. Elle enfila une paire de talons vertigineux et soupira de satisfaction, désormais grandie d’une dizaine de centimètres. Elle glissa sa main dans celle d’Asher, et posa machinalement ses lèvres sur les siennes pour le saluer. Ses paupières closes, elle savourait cet instant de douceur offert. « Tu sens bon. » Dit-elle avec un sourire malicieux en s’éloignant. Elle attrapa son sac à main, dans lequel elle jeta machinalement un coup d’oeil : trousse de maquillage, vêtements, porte-feuille et téléphone portable. L’essentiel, donc. « J’ai pris mon maillot de bain, au cas où on veuille finir sur la plage. » Déclara l’Australienne, alors qu’ils se dirigeaient vers l’extérieur. Elle ne savait pas comment la soirée allait évoluer, et elle avait préféré anticiper sur les issues possibles. La seule conviction que Naomi avait, c’était qu’elle allait dormir dans les bras de son compagnon ce soir, et ça lui suffisait. « On se retrouve tous là-bas ? » Demanda-t-elle, alors qu’Asher la guidait jusqu’à sa voiture. Elle prit place sur le siège passager, et enfila ses lunettes de soleil.

« Merci. » Murmura-t-elle en rougissant. Elle avait l’impression d’être une adolescente ridicule, qui minaudait et ne pouvait s’empêcher de rougir aux compliments de l’homme qui la courtisait. Comment pouvait-elle être aussi sensible ? Comment pouvait-elle être aussi mielleuse, lorsqu’elle était en compagnie d’Asher ? « C’est nous, qui sommes parfaits. » Souffla Naomi, un sourire amusé étirant ses lèvres. Elle savait que leur couple faisait des envieux. Pourtant, au début de leur relation, personne n’avait voulu parier sur eux : trop différents, trop atypique. Mais les semaines, puis les mois avaient passé, et ils avaient tenu bon.


« Sans doute. » Confirma-t-elle en hochant la tête, même si elle était franchement pessimiste concernant l’état de la circulation. D’ordinaire, il n’était pas aisé de rouler en centre-ville ; avec le Nouvel An, ce serait probablement pire. Toute la jeunesse de Brisbane était de sortie à cette occasion, et l’endroit qu’Asher et ses amis avaient choisi pour fêter le passage à la nouvelle année était particulièrement prisé. C’était aussi pour cela que tous les deux avaient décidé d’être vigilant, et de partir tôt. « Tu sais comment me faire plaisir. » Ronronna Naomi en souriant, alors qu’Asher lui disait qu’il avait pris quelques bouteilles de champagne. Il s’agissait de l’alcool préféré de l’escort-girl, et elle ne refusait jamais une coupe. « Eh ! » S’exclama-t-elle, faussement outrée, alors que l’Australien révélait ses véritables desseins pour le début de leur soirée. Un moment privilégié, qu’ils passeraient ensemble — seuls, tous les deux. Elle en frémissait d’impatience. « Tu m’as réservé autre chose ? » Demanda-t-elle, malicieuse. Son regard brillait de tendresse pour Asher, et elle prit sa main droite, qu’elle serra entre les siennes. Elle était heureuse, avec lui. Elle n’avait jamais été aussi épanouie, et priait pour que cette sensation de félicité dure éternellement. Elle finit par porter la main de son amant à ses lèvres, et en embrassa le sommet avant de murmurer : « Merci beaucoup. »  Elle était touchée de cette petite intention, qui la faisait tomber amoureuse de lui encore davantage — enfin, si cela était possible. Ses joues rosirent légèrement et, à cet instant précis, elle était heureuse d’avoir un jardin secret. Heureuse qu’Asher ne puisse pas lire dans le fond de ses pensées, alors qu’elle se sentait plus vulnérable que jamais. « Pourquoi tu fais une fixette sur tes cheveux ? » Demanda l’Australienne en fronçant les sourcils. Elle posa sa main gauche sur sa joue, et la fit glisser jusqu’à sa nuque. Son index et son majeur jouèrent un instant avec ses cheveux, et elle poursuivit : « Ils sont très bien. » Naomi savait que le cadet des Buckley, contrairement à son frère aîné, manquait cruellement de confiance en lui. Si au début, elle avait été déroutée par cet homme discret et réservé, elle avait vite été charmée par sa personnalité. « Mais sans problème pour la photo. Ça nous fera un souvenir de cette soirée. » Elle s’imaginait déjà, assise dans l’herbe avec Asher, son dos posé contre son torse, tous les deux souriant à l’objectif. Ou tous les deux, debout et enlacés, prêts à immortaliser cette soirée.

« Non… » Commença-t-elle en arquant un sourcil, surprise. Hormis de lui demander de dormir chez elle, elle n’avait rien prévu. « J’aurais dû ? » Elle craignait d’avoir manqué quelque chose, qu’elle ne soit pas au fait pour un point, ou pire encore : d’avoir évoqué ou sous-entendu quelque chose pour ce premier jour de l’année qu’elle ne serait, en fin de compte, pas en mesure de tenir.  Décevoir Asher était inconcevable. Il la rassura bien vite, et elle garda sa main dans la sienne. Être en couple était une chose ; avoir la sensation d’être un duo en était une autre. Sur ces points, Naomi savait qu’elle gagnait sur les deux plans ; d’ailleurs, elle n’avait pas été aussi épanouie depuis bien longtemps. Elle n’espérait qu’une chose : que ça durerait longtemps. Le plus longtemps possible. « Je veux dire, ils sont toujours très bien. » Rectifia-t-elle, consciente qu’Asher s’était engouffré dans cette petite brèche qu’elle avait laissé ouverte, alors qu’elle voulait le rassurer sur son apparence. « Même décoiffé, ça te donne un petit air badass. » Gloussa-t-elle. Elle ne lui avait jamais dit, mais elle ne le trouvait jamais aussi beau qu’au réveil. Quand ses traits étaient détendus, que ses cheveux étaient dans tous les sens, et que sa peau pâle irradiait.


« Chez moi, carrément ? On oublie ses habitudes de gentleman et on s’invite directement dans mon lit ? » Elle plaisantait, évidemment, et le sourire qui étirait ses lèvres rassurerait Asher quant aux intentions de la brune : non, elle ne l’obligerait pas à rentrer chez lui après l’avoir déposée, à l’aube. Et, à vrai dire, elle était soulagée de savoir qu’il n’envisageait pas de la faire dormir chez ses parents. Elle savait qu’elle ne faisait pas l’unanimité chez les Buckley — loin de là, d’ailleurs — et elle avait tout, sauf envie de subir les critiques du clan Australien dès le premier jour de la nouvelle année. « Tu ne t’es quand même pas imaginé que j’allais te laisser boire tout seul. » Commenta Naomi, alors qu’elle s’installait à côté d’Asher. Elle lissa le tissu de sa robe sous ses cuisses, pour s’assurant en même temps être un minimum couverte. Si la pudeur ne l’étouffait pas en privé, elle veillait néanmoins à être respectable en public. Elle était pourtant convaincue qu’Asher se fichait de l’image qu’elle pouvait renvoyer ; mais sa relation avec lui était trop importante pour que Naomi se montre superficielle ou négligente. Elle ne voulait pas le mettre dans l’embarras. Elle voulait le préserver, le plus possible. Alors, elle tâchait de faire les choses bien — et pour le reste, elle veillait à rester discrète. En parfait gentleman qu’il était, il lui avait laissé le choix du spot. Et, sans surprise, elle avait opté pour un coin où la vue était dégagée, et où on pouvait voir l’océan à perte de vue. « Je me fiche de l’endroit où on passe la nuit. » Confia-t-elle en haussant les épaules. Que ce soit chez lui, chez elle, dans sa voiture ou sur le sable, la seule chose qui importait réellement, c’était qu’ils soient ensemble. Elle était rassurée de le savoir à ses côtés, de pouvoir sentir sa peau contre la sienne. « Merci. » Dit-elle en s’emparant de la bouteille. Elle ne savait pas quand les amis d’Asher allaient arriver, mais qu’importe : ils n’allaient pas attendre après eux pour profiter de la soirée. « On trinque à quoi ? » Demanda-t-elle, arrêtant la bouteille à quelques malheureux millimètres de ses lèvres. Les raisons étaient nombreuses : leur relation, le passage à la nouvelle année, aux projets pour l’avenir. Ils étaient jeunes : ils avaient la vie devant eux, et des horizons chantants et ensoleillés s’annonçaient. Naomi inclina légèrement la bouteille de champagne, et fit couler quelques gouttes de ce précieux nectar dans sa bouche. Elle avala une première gorgée, puis une deuxième, et tendit finalement la bouteille à son compagnon.

« Tu es un drôle de personnage, Asher Buckley. » Commenta Naomi en souriant, passant une main dans les cheveux clairs de son amant. Elle songea, non sans qu’une certaine pointe d’inquiétude ne s’éveille en elle, qu’elle ne s’était que trop rarement sentie aussi bien en compagnie d’un homme. Il n’avait pourtant en commun avec les autres hommes pour lesquels elle avait auparavant craqué — tous avaient indéniablement plus bruns, plus ténébreux, plus sûrs d’eux. Naomi, comme beaucoup de femmes, avait longtemps eu un penchant affirmé pour les mauvais garçons. Mais convenaient-ils réellement ? Ses précédentes relations avaient été des échecs cuisants. « Et je suis contente que tu fasses partie de ma vie. » Peu importe la façon dont il était présent, finalement : l’important, c’était qu’il soit là, dans les parages. Au-delà d’un couple, ils étaient un duo. Deux personnes de confiance, sur laquelle ils pouvaient tous deux compter. Une entité.


« Arrête, tu vas me faire rougir. » Avoua-t-elle en baissant les yeux, alors qu’il admettait se trouver chanceux. Elle n’avait pas l’habitude d’être ainsi traitée par la gent masculine, et cela la mettait mal à l’aise. Et pour cause : elle avait du mal à comprendre comment Asher avait pu s’enticher d’elle. Comment il pouvait supporter rester avec elle, tout en ayant pleinement conscience que d’autres hommes la désiraient et étaient prêts à dépenser des sommes folles pour être en sa compagnie. Il méritait mieux qu’elle, mais il ne s’en était pas encore rendu compte : ça, Naomi en était intimement convaincue. « Puisse tout cela perdurer lors de l’année à venir, alors. » Suggéra-t-elle avec un sourire timide, avant de reporter la bouteille à ses lèvres pulpeuses pour boire une gorgée du liquide pétillant. Elle la passa ensuite à Asher, qui l’imita — scellant définitivement ce souhait. Elle posa sa joue sur son épaule, et se perdit pendant quelques secondes dans la contemplation du paysage. Une fois de plus, la beauté de ce point de vue la laissa sans voix ; l’Australie était vraiment un pays magnifique. Un semblant d’idée saugrenue germa dans son esprit. « Qu’est-ce que tu as de prévu, les prochains jours ? » Demanda-t-elle, en se redressant. Elle plongea ses ongles manucurés dans la petite pochette qu’elle avait pris, et en retira son téléphone portable. Elle ouvrit le navigateur, et tapota rapidement sur son clavier. Elle soupira en constatant que le chargement était long, mais bientôt, un sourire glissa sur son visage. « Tu connais ? » Elle retourna son téléphone, jusqu’à ce que les images paradisiaques de l’île Moreton soient face à Asher. « On peut y accéder en ferry, depuis Brisbane. » Asher n’était pas idiot ; il devait avoir compris où elle voulait en venir. Cependant, patient, il la laissa poursuivre sa démonstration. « On pourrait prendre une chambre, et y rester quelques jours. Juste toi et moi, pour célébrer cette nouvelle année. » Ils pourraient faire du snorkeling, partir à la recherche des quelques koalas qui avaient élu domicile sur l’île, ou tout simplement lézarder sur la plage. À vrai dire, Naomi se fichait royalement des activités proposées aux touristes et de la façon dont ils choisiraient d’occuper leurs journées ; la simple idée de passer du temps avec son petit-ami suffisait à la réjouir.

« Je ne sais pas. » Dit-elle en faisant la moue. Les lieux paradisiaques ne manquaient pas, en Australie. Malheureusement, ils étaient aussi particulièrement prisés ; parfois, il fallait attendre des semaines entières avant de trouver quelques jours consécutifs disponibles à la réservation. « On pourra regarder demain, si tu veux. » Proposa-t-elle en souriant. Évidemment, elle aurait aimé claquer des doigts et se retrouver directement là-bas avec Asher. Mais elle ne se plaignait pas ; puisqu’il était partant, elle savait que ce projet prendrait forme. Elle posa sur lui un regard plus de malice, et lui vola un baiser avant d’entendre des voix s’adresser à eux. Naomi se redressa, le temps d’aller saluer les amis d’Asher. Elle les avait déjà croisés à plusieurs reprises, mais n’avait jamais réellement noué la moindre relation amicale avec eux. Et pour cause : son petit-ami, même s’il s’obstinait à passer du temps en leur compagnie, ne semblait pas être pleinement épanoui lorsqu’il était en leur présence. L’escort-girl s’était longtemps interrogée sur les raisons qui poussaient donc Asher à les fréquenter, sans jamais oser lui demander directement. S’il désirait lui en parler, il le ferait. Alors, en attendant, elle faisait les efforts nécessaires. Non pas que ce soit difficile ou pénible pour elle ; elle était sociable, et aimait rencontrer de nouvelles personnes. « On devrait avoir une vue superbe, d’ici. » Déclara l’escort-girl pour engager la conversation avec eux. Ils hochèrent la tête, et s’installèrent à leurs côtés. Les tintements de leurs sacs laissaient deviner qu’ils n’étaient pas venus les mains vides ; en même temps, un soir de Nouvel An, l’inverse aurait été surprenant.


Naomi retira ses escarpins, qu’elle déposa précautionneusement au pied du siège avant de la voiture d’Asher. Inutile d’essayer de marcher dans du sable avec de telles échasses ; elle risquait de se tordre une cheville avant même d’avoir fait une dizaine de pas. Un sourire étira ses lèvres, alors qu’elle se retournait et voyait deux des amis d’Asher se précipiter en direction de l’océan. Elle vit voler une chemise, puis une deuxième, qui retombèrent sur le sol. Elle gloussa en voyant l’un des deux hommes sauter sur un pied pour retirer son pantalon, tout en essayant d’éviter de tomber. Il y parvint, non sans mal, et plongea ensuite dans l’eau, tête la première. « Ils sont cinglés. » Commenta-t-elle en secouant la tête. Les moins courageux — ou, plus exactement, les moins alcoolisés — s’installèrent sur la plage. Naomi aida une des filles à étendre un linge sur le sol, tandis que les garçons portaient les bouteilles d’alcool. Quelques autres groupes d’amis étaient déjà présents sur la plage, et levèrent leurs bouteilles en guise de salut amical. Naomi aimait tout particulièrement cette atmosphère détendue, où tout le monde avait le même but : profiter de cette soirée et s’amuser.


Elle hocha légèrement la tête, et se redressa pour suivre Asher, qui avait pris une bouteille de champagne. « Tu sais, l’endroit que tu avais choisi pour le feu d’artifice était superbe. » Commenta-t-elle, alors qu’ils s’éloignaient momentanément du groupe. Ils entendirent les rires et autres exclamations des amis d’Asher, alors qu’ils les voyaient s’éloigner. Remarques graveleuses et autres encouragements inutiles, auxquels ni Asher ni Naomi ne répondirent, complètement indifférents à cet engouement qu’ils suscitaient. « Tu m’amènes ou ? » Demanda-t-elle, alors qu’ils avançaient  Elle le connaissait suffisamment pour savoir que, parfois, il avait besoin d’un peu de calme. « T’as un autre endroit magique à me faire découvrir ? » Interrogea-t-elle, faisant naturellement référence au lieu qu’ils avaient choisi pour admirer le feu d’artifice. Elle espérait simplement qu’ils n’aient pas à crapahuter dans les rochers, parce qu’elle était pieds-nus, et que l’alcool avait déjà quelque peu altéré son équilibre.