Que mes larmes ont coulé. Mes promesses et l'envie d'avancer. Seulement croire en ma vie. Tout ce qui m'est promis. Pourquoi, où et comment. Dans ce train qui s'éloigne. Chaque instant. C'est bizarre cette cage. Qui me bloque la poitrine. Je ne peux plus respirer. Ça m'empêche de chanter (Je vole, Michel Sardou)
☆ Kieran & Eve ☆
2020 prenait fin. 2020 était finie.
Comme ma relation, comme le semblant de vie que je menais. Cette vie sociale.
Mes maladies ont empiré. Les deux. Ayant passé noël avec Alex et Caleb, j’avais souri. J’avais fait comme si, comme si tout allait bien. Comme si je n’avais pas recommencé mes conneries. Je me sentais chuter, je me sentais être envahie par mes angoisses. Par ce mensonge que j’avais tenté d’alimenter devant tout le monde pendant les semaines qui avaient suivi ma rupture. Ce n’est pas ce que tu voulais Ève ? Ce prince charmant ? Cette personne qui se tiendrait devant toi, qui te sourierait, te prendrait dans ses bras et t’aimerait comme tu le méritais.
Sauf que tu ne le mérites pas.
Je l’avais compris alors que la mère d’Ezechiel avait tout lâché entre deux sanglots. Alors que je ne voulais pas y croire. Alors que je lui avais confié ma vie, mes peurs, mes combats. Il n’avait pas eu confiance en moi. Il n’avait pas eu confiance en nous. Et la réalité m’avait frappée fin novembre alors qu’à bout de force, mon fils avait fini par être hospitalisé. Je n’avais appelé personne. Si ce n’était lui. Et il n’était pas venu. Notre relation avait explosé en mille morceaux. N’étant au final que du physique et m’en dégoûtant presque totalement.
Alors oui, j’avais bu outre mesure. Oui j’avais envoyé des messages à Ivanka, Alex, Caleb et sans doute ma plus grosse erreur: Kieran. Je n’aurai pas du briser son monde parfait, son idylle naissante avec cette jeune fille qui était mille fois plus séduisante que moi. Car vois-tu Kieran j’ai chuté alors que tu t’es envolé. Pour te rassurer je me suis connectée, je t’ai parlé de ma voix joyeuse alors que ma vie s’effritait derrière. Jacob n’allait pas mieux, Lisa m’en voulait pour la rupture et faisait n’importe quoi à l’école, rejetant mon affection. Je ne pouvais pas me reposer sur vous. La honte s’abattait sur moi alors que j’avais clamé au monde entier vivre le grand amour.
Sauf que je vivais rien du tout. Et certaines personnes doivent s’en réjouir.
Ce soir n’avait pas dérogé à la tradition du 31 décembre en âme esseulée et enfermée dans son appartement. Quand je disais que j’avais rechuté, je ne sortais plus que pour aller sur la tombe de Jacob, chez Enoch pour garder les enfants et enfin faire mes courses. Je souriais, faisais semblant alors que les neuf kilos pris recommençait à s’envoler. Alors que je reprenais mes cigarettes délaissées - car j’avais stoppé pour lui- et que l’alcool coulait dans mes veines.
Je me suis connectée comme tous les soirs pour discuter un peu. Pour maintenir l’illusion. Oui je passerais le nouvel an avec mes chiens, mes enfants. Sauf que ma belle mère n’était pas dupe. Elle avait pris les enfants et ne m’avaient laissé que Debussy. Mon gardien. Mon gardien qui dormait sur le balcon alors que l’heure tournait. Et que je prenais des décisions toutes plus immatures que d’autres. Et si je peignais un immense chien protecteur sur le mur de ma chambre ? Allez chiche.
Et si je réservais des billets d’avion pour me barrer ? Allez chiche. Et là nous sommes dans la partie la plus fun. Celle où je détruis mon appartement. Je prenais bien le temps de détruire mon corps après. Tout était bon a souffrir. A essayer de ressentir quelque chose. Car je n’éprouvais plus rien. Avec la seule certitude d’une nana saoule que personne ne m’avait jamais aimé. Foutue dramaqueen à la con.
Car c’est de ça dont il est question. Du regard d’Ezechiel quand je lui avais demandé s’il m’aimait réellement. Et de son signe de tête. Non. Tu vois que je me suis trompée au bout du compte. Pierre n’a jamais tenu à moi. Jacob était parti avant même que nous puissions jouir de la vie maritale et enfin Zeke, ah Zeke. Lui était encore en vie. Il habitait encore en Australie. C’est pour ça que je vais me barrer. Et que je compte démolir cet endroit au passage. Caleb se ferait une raison. Il avait Alex. Tout comme Kieran avait sa copine.
Je l’entends. Mon téléphone qui vibre. Il me gêne. Je l’entends cette sonnerie sur mon ordinateur. Et je me vois l’étaler au sol. Cela ferait disparaître les photos de Zeke. Oui. Mais mes mains se posent sur mon clavier alors que je poste un statut sur Skype: en train de se barrer. Que j’écris un message. Que je clique sur envoyer. Et que je m’en fous de ce dont cela a l’air.
« Je vais te foutre la paix. Je vais tous vous foutre la paix. Sois heureux avec Ivy et bonne année. » Quelle conne. Si j’étais sobre, je l’insulterai de conne. Mais à la place, je coince une clope dans mes dents pour l’allumer. Et mon téléphone vibre de nouveau. Il m’agace et donc je le jette contre le mur. Non, je le pulvérise contre le mur. Et cela me fait un bien fou. Je le regarder tomber au sol et je tire une bouffée de nicotine. Putain, je vais devoir ranger. Bien sûr que oui. Alors je me penche mais mes gestes sont moins précis et ma maladresse ne semble pas avoir quitté le navire comme mes sentiments. La cendre tombe au sol alors que le verre laissé par l’iPhone décédé me transperce la main. Je le regarde un moment et je l’ote sans grimacer. Je ne saurai dire par quoi je suis anesthésiée.
L’alcool ? La maladie de mon fils ? Le comportement de ma fille ? L’échec de ma vie amoureuse ?
Je ne saurai dire. La main blessée goûtant sur le sol. Je me laisse tomber contre mon mur. Et sur le coup, je m’isole complètement comme j’ai l’habitude de le faire. J’entends plus rien. J’ai cette envie irrationnelle de me coucher en chien de fusil. Je le fais donc en oubliant ma cigarette. La braise brûle mon avant-bras alors que je ramène mes jambes contre mon visage.
Et là, alors que je suis toute seule, que le monde m’a quitté. Et qu’il s’en fout surtout. Je fonds en larmes.
ÂGE : trente-cinq (14.07). aïe. SURNOM : « kiki » (couché, grrrrhhhh). STATUT : c’est bien aussi la solitude, on s’y habitue (non, pas du tout #help). MÉTIER : illustrateur (fauché) en freelance et prof (dépité) d’arts visuels. LOGEMENT : #18 james street, fortitude valley, avec cesar (le coloc) et waterproof (le corgi). POSTS : 4054 POINTS : 200
TW IN RP : dépression, pensées suicidaires, tentative de suicide, relation toxique, maltraitance, abus physiques et psychologiques, harcèlement scolaire, dépréciation, troubles anxieux, distorsion corporelle, mention d'agression physique (j'adapte mes rps au besoin, contactez-moi ♡). ORIENTATION : J'aime les jolies filles. PETIT PLUS : placé en foyer, très proche de la dernière famille qui s’est occupée de lui ≈ souffre néanmoins de cette absence d’identité propre ≈ réservé, maladroit, optimiste, vit dans un monde imaginaire ≈ a quitté sa fiancée il y a deux ans, soulagé malgré sa phobie de la solitude ≈ essaie de reprendre confiance en lui, de renouer avec ses proches, de retrouver sa place ≈ préfère la compagnie des pop et des jeux vidéo aux humains ≈ du talent au bout des doigts, aucune motivation d’en faire quelque chose ≈ trop mou, trop paresseux, trop paumé ≈ a fait une tentative de suicide fin novembre 2022. CODE COULEUR : kieran bafouille en rosybrown. RPs EN COURS : halstay #12, #13 & ua #3 (parents) ⊹ i hope your ghost will haunt me, i hope i hear you calling my name at 3am. 'cause honey, i love you dearly and i cannot bear you leaving again, not again. oh, i hope your ghost will haunt me 'til the end.
spencer #5 ⊹ i've been begging, hope you're listening. i've done my wrongs but i'm someone different.
ally ⊹ oh, if i can take something to make me feel better than i'm feeling now and everything else will work itself out.
(13/06 - vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bon ou de mauvais compte. moi, si je devais résumer le rp aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres) › ginny (fb) › cecilia › shiloh › wild › alfly #17 (ua) › danaë › olive #2 › greta #2 RPs EN ATTENTE : flora #3 RPs TERMINÉS :
kieyer ⊹ close your eyes and think of me and soon i will be there to brighten up even your darkest night. you just call out my name and you know wherever i am i'll come running, to see you again.
@EVE ZIMMER & KIERAN HALSTEAD ⊹⊹⊹ what is this? if it ain't love then it's over. understand me when i tell you that we just can't keep on holdin' on to this and all your friends, they are saying that i'm no good, are you kiddin'? this is mental cause you know what we had was broken from the start.
Imbécile, nom et adjectif. Définition : personne dépourvue d’intelligence. Exemple : cet imbécile va encore nous attirer des complications. Synonymes : abruti, crétin, idiot. Illustration : Kieran Halstead.
Je sais. Je ne suis pas censé enfoncer notre protagoniste plus qu’il ne le fait lui-même, mais franchement, comment suis-je supposé réagir à cet instant, alors qu’il s’empare de sa veste et claque la porte de son appartement dans une précipitation telle qu’il ne prend même pas la peine d’éteindre la lumière ?
Qu’est-ce qui justifie un tel empressement et surtout une furieuse envie de voir sa facture d’électricité prendre l’ascenseur parce qu’après tout, il n’est plus à une dette près, hein ? Non, ce n’est pas drôle et je n’ai pas envie de rire. Encore moi quand la responsable de tout ce bazar est cette foutue Evelyn Zimmer. 31 décembre, 22h. Kieran devrait ouvrir une nouvelle bière entre deux classiques des ‘80s en dansant de manière ridicule, entouré des gens qu’il aime. Bon. Je sais que l’image présentée relève seulement de mon désir et que ce réveillon, il le passe seul. À défaut, il devrait au moins être en train de profiter de sa soirée et c’est très exactement ce qu’il faisait en rageant contre les bugs de Cyberpunk 2077 (surcoté, mais divertissant quand même) avant de recevoir le message d’Eve.
Je vais te foutre la paix. Je vais tous vous foutre la paix. Sois heureux avec Ivy et bonne année.
Il n’a pas relevé le fait qu’elle croit encore en son honteux mensonge – preuve qu’il l’a parfaitement exécuté. Il ne relève pas ses vœux, ni le fait qu’elle désire lui foutre la paix. Mais le fait qu’il n’est pas l’unique individu qui bénéficiera d’un silence de sa part. Et pour l’avoir au quotidien, cette pensée, Kieran sait ce que cela implique. L’inquiétude grandit, l’intérêt pour son jeu devient inexistant quand seul le visage d’Eve s’imprime dans sa boîte crânienne et que de nombreuses questions, autant que des scénarios désastreux, occupent ses pensées. J’essaie de soulager celles-ci en faisant comprendre à Kieran que cet appel à l’aide n’en est pas vraiment un, et quand bien même il le serait, en quoi cela le concerne ? N’est-ce pas ce qu’elle, elle désirait, que les rôles soient inversés ? Qu’il lui foute la paix, à elle et son géant, qui aux dernières nouvelles ne fait plus partie de l’équation ? Le départ de celui-ci semble justifier un empressement de recontacter un Kieran qui n’a rien demandé et qui commençait enfin à faire le deuil de ses sentiments pour la jeune femme. Pas qu’ils n’existent plus, mais j’étais parvenu à l’aider à les masquer, de manière à ce qu’il ne ressente plus ce trou béant à la place du cœur à chaque fois qu’il pense à elle. Un message, une alerte et cela suffit pour qu’il n’ait plus que son prénom à la bouche, alors qu’il devrait plutôt lui cracher au visage.
Je suis vulgaire ? Tant mieux, je ne suis même pas désolé. Parce que je sais pertinemment que tous mes efforts sont réduits en poussières en une fraction de seconde ; le temps qu’il a fallu à la blonde pour appuyer sur la touche envoyer et continuer à malmener notre protagoniste avec la candeur qui la caractérise, celle-là même qui me rend dingue tant elle est prétendue naturelle alors que je ne cesse de répéter à Kieran qu’il ne devrait pas être dupe. Qu’il a déjà été la cible – et la victime, bien qu’il ne l’admette pas – de telles manipulations et qu’il sait les conséquences qui en découlent pour le subir encore au quotidien. Mais il ne m’écoute pas, parce que son cœur, pourtant en milliers de morceaux, continue d’être plus fort que sa raison (moi).
Si ça ne dépendait que de moi, elle pourrait crever dans son coin qu’à la rigueur, j’accorderais à Kieran le droit de verser une larme, allez, deux pour l’équité. Lui, bien évidemment, songe à la première perspective sans écouter la suite ; et le simple fait qu’elle puisse se mettre en danger suffit pour qu’il commande un taxi au lieu de l’habituel bus. Encore de l’argent qu’il n’a pas qui est dépensé pour une connerie, disons-le franchement, parce que je suis persuadé que mademoiselle va très bien et que tout ceci fait partie de son plan. Il lui manque. Elle l’a dit, il a confirmé la réciproque sans accéder à sa demande masquée de la rejoindre. Il sait qu’il doit être plus fort que ses sentiments ; et pour ceci la seule option consiste à ne plus se confronter à elle. Et je pensais qu’il serait fort, Kieran, jusqu’au bout : suffisamment pour ne pas craquer. Il l’a été. Et bien sûr, comme toujours, elle a pris l’avantage par une simple phrase.
Il n’y a pas à dire, je comprends mieux pourquoi tu les confonds. Elle est tout aussi douée que son double, si ce n’est plus, parce que tu ne te méfies pas autant que tu le devrais, Kieran. Trop aveuglé par ton cœur qui persiste à battre malgré qu’Eve se fasse plaisir à le piétiner depuis le premier jour, le réanimer, et recommencer, encore et encore, dans une régularité devenue malsaine.
La même régularité avec laquelle il frappe à sa porte, encore et encore, s’interrompant, recommençant dans l’espoir d’obtenir une réponse. Il ignore si son empressement a duré une minute ou une dizaine, toujours est-il que selon lui, ça lui a paru être une éternité avant que la jeune femme ne vienne finalement ouvrir, ne lui provoquant aucun soulagement sur le moment, avant que ses prunelles n’aient pu passer en revue sa silhouette et s’assurer qu’elle est toujours intacte ou du moins, suffisamment pour que son inquiétude se stabilise à défaut de s’effacer.
« Eve ! » Sa voix traduit de son affolement alors qu’il l’interpelle dans l’espoir d’obtenir une réponse et d’évaluer son état dans sa totalité. « Bordel, j’ai eu peur ! » Qu’il poursuit sur le même ton, avant de réaliser la vigueur avec laquelle il l’a verbalisé, se reprenant rapidement. « Désolé, je... Evie, ça va ? » Non, bien sûr que non, et plutôt de te soucier de son état, tu devrais te soucier du tien, Kieran. « Evie, dis-moi ce qui se passe. » Il supplie, je m’énerve ; le mélange de deux ne fait pas bon ménage, que je préviens, mais là-aussi il ne m’écoute pas. Il ne pourra pas dire que je ne l’ai pas prévenu.
On ne pourra pas dire qu’on ne m’avait pas prévenue. Que je n’avais reçu de signaux d’alerte quant à ma violente chute de ce soir. Sans doute ai-je pris conscience de ma propre solitude en me retrouvant seule dans ce salon hanté ? Car il l’était n’est-ce pas ? Alors que depuis des semaines, des mois, je me gommai de chaque dessin petit à petit. Que tout a commencé il y a des années. Que tout n’est que cendres du fait du trou béant qui ne cessait de grandir en moi. Que chaque geste, chaque pensée était désormais mécanique depuis fin novembre. Beaucoup, on crut que mon état était dû à ma rupture, au fait que j’avais mis un terme à l’histoire des suites d’un gros manque de confiance. Mais ce qui bloque ma poitrine est dû à un autre fait. Je me suis rendue compte d’une chose beaucoup plus importante qu’un vulgaire chagrin d’amour. Brindille sur le sablier qui caractérisait ma vie. Car dans le fond, je n’étais plus à un abandon près. J’avais négligé ma seule source de joie, mon seul trésor. Je l’avais négligé lui.
Les médecins ne me l’avaient pas dit. A vrai dire, ils ignorent même à cause de quoi mon petit dernier souffre autant. Mais je savais que c’était entièrement ma faute. Comme le fait que j’ai rejeté tous mes déboires sur mes amis. Que j’ai repoussé tout le monde hors de ma vie. Pourquoi ? Parce que lorsque la solitude devient une si grande habitude, il est difficile de s’y arracher. A cette ombre qui ne faisait qu’un avec nous. Qui nous collait à la peau. Incapable d’aimer, incapable de ressentir une quelconque chaleur. Je l’ai senti. Cette main invisible qui a étreint mon cœur avec violence alors que je me trouvais seule, debout dans ce couloir si blanc à les regarder l’emmener si loin de moi. Son hospitalisation n’a pas duré plus longtemps qu’un battement de cils. Mais pour moi, elle sembla être une éternité. J’ai failli le perdre en le négligeant, en négligeant ma santé. En n’étant pas seulement une mauvaise mère, mais également une mauvaise amante, une amie pitoyable, en étant une lamentable personne. Je me sentais si proche de la folie. Je ne voulais pas céder. Je ne voulais pas leur donner raison. A tous ceux qui ne désiraient que ma chute. Chute qui a commencé fin septembre. Alors que mon cœur tentait de se conforter dans le fait que je devais rompre tout lien avec Kieran. Que je devais cesser d’osciller entre deux sentiments et m’en tenir à mon choix d’une amitié. Ainsi, pour éviter toute tentation, j’ai coupé les réseaux quelques temps. Je ne suis plus venue sur nos plateformes habituelles pour lui laisser le temps de s’installer dans sa nouvelle histoire. Et de m’oublier car j’étais devenue comme elle. aussi toxique, aussi malfaisante. Une véritable sorcière alors que je ne voulais être qu’une fée.
Mais la fée clochette n’a pas une ombre constante qui la suit. Qui lui murmure des choses. Qui essaie de l’installer dans une relation des plus confortables. Oui, il y a eu de la passion, oui il y a eu de la chaleur humaine. Mais sans sentiment du côté de l’homme qui a partagé ma vie pendant six mois. Sans doute étais-je réellement incapable de me faire aimer d’un Australien ? Ce peuple cruel qui n’aimait pas les contacts, qui demeurait froid. La malédiction n’a jamais semblé aussi pesante au-dessus de ma tête que ces dernières semaines. J’ai mis combien de temps à sauter mon câble ? Avant que Caleb ne vienne à ma rescousse et que malgré moi, je me montre odieuse. Parce que j’avais un mal. un mal de chien. Animal blessé, non soigné qui a comme seul réflexe que de mordre la main qu’on lui tend car il n’a pas appris autrement. Animal condamné, voué à l’euthanasie car c’est mieux pour tout le monde.
Mais j’avais pris une décision plus radicale que de me donner la mort. Pour cause qu’elle serait trop douce. Et que mes enfants comptaient sur moi.
Je ne voulais pas en venir à les abandonner. Je m’y refusai. Pas comme ma propre mère l’avait fait. Je voulais être une mère présente. Mais la chute est douloureuse. Surtout en m’en tenant à mes sourires forcés, à dire à mon entourage que je vais bien. Car j’essaie de m’en convaincre dans le fond. Que je me porte au mieux. Que je marche sur des petits nuages. Bien qu’en vérité, il soit au-dessus de ma tête. Que l’orage gronde. Et que l’eau revient m’engloutir de nouveau, véritable tsunami. Pourquoi ce soir ? Je n’en ai aucune idée. Mais elle se fait plus violente à mesure que mon corps est pris en étau. A mesure que je tente de calmer ma nouvelle crise égocentrée par des longues rasades d’alcool. Que mon estomac à jeun émet de petites suppliques sans être entendu par un cerveau voué à me faire du mal.
Je vais bien. Je vais bien.
Non, je ne vais pas bien. Mais qui en a quelque chose à foutre dans le fond ?
Je demeure pantoise au milieu de la pièce à fixer le carnage autour de moi. Des toiles nous représentant tous les quatre, éventrées. Des photos coupées en mille morceaux. Et ce téléphone qui est brisé. Dont le cadavre jonche le sol. Je l’ai tué. J’ai fait tant de mal dans ma vie. Je me saisis du verre et sur le coup, l’idée me traverse l’esprit. Car oui, je songe à le faire. Je fais plus de mal que de bien aux personnes qui m’entourent. Qui gravitent dans ma vie. Aveugle, égocentrique, égoïste, toxique. Le matériau tranchant entaille ma paume et je les vois couler, les gouttes de sang à mesure que le débris s’enfonce dans ma peau. Et que je l’ôte.
Lâche, me hurle le monstre. Le cri se bloque dans ma gorge alors que mon cœur essaie de reprendre vie. Il essaie de se battre contre ce vide abyssal qui envahit tout mon être. Il me supplie de me battre bien que je me couche à même le sol dans cette lourde robe rouge et faite de velours. J’avais promis que à Alex que je la mettrais pour quelqu’un d’important. Mais on me les avait retirés. Car je suis une mauvaise mère. Je laisse les larmes couler le long de mes joues déjà si blanches. Le long de mon menton à mesure que la cigarette entaille mon poignet, se mêlant au son qui en découle.
Et là, on frappe à la porte. Quelle heure est-il ? Le matin est-il déjà là ? L’année est-elle déjà terminée ? Je me redresse avant de déglutir. Avant de manquer de vomir. Je me relève, je tente du moins puisque ma première tentative est soldée par un échec. Je chute au sol avant d’en venir à me tenir au mur. Mon regard se perd dans le vague. Je tangue. J’écrase mon mégot dans le cendrier et j’observe la fumée qui s’élève et je l’envie. Car elle est libre alors que je suis enchainée à cette enveloppe mortelle que je néglige depuis des années. Quelques secondes seulement se sont écoulées. Ma tête demeure basse alors que j’admire les chaussures de mon interlocuteur.
Kieran. Je reconnaitrais ses pompes entre milles.
« Bordel, j’ai eu peur ! » Mon premier réflexe est de serrer mon poing blessé. La douleur me vrille les tempes alors que quelques gouttes de sang s’écoulent le long de mon poignet pour se confondre avec le rouge du tissu. Mon visage blanchi alors que je ne comprends pas pourquoi il est là. Ne lui avais-je pas dit que j’envisageai de quitter le pays ? Ne devrait-il pas être avec sa compagne ? Plutôt qu’avec quelqu’un d’aussi futile que moi ? Je devrais les chasser mes larmes mais stupide comme je suis, je pourrais utiliser la mauvaise main. « Désolé, je... Evie, ça va ? » Bien sûr que non, Kieran ? « Et toi ? » J'ose articuler ce retour de banalités sans pour autant répondre à sa question. à la place, ma silhouette se transforme en marbre. Incapable d’émettre un son, me contentant de pleurer en silence. Je pourrais faire un pas et le prendre dans mes bras mais il découvrirait ma blessure. Je pourrais faire un pas en arrière au risque qu’il interprète ceci comme un rejet. Je pourrais écouter mon cœur, beaucoup trop content de le voir. Alors que mon cerveau lui tempête de ne pas céder, que Kieran n’est pas un second choix. Il a été le premier mais j’ai laissé l’ombre de son passé planer au-dessus de nos têtes, le reléguant en dernière place. « Evie, dis-moi ce qui se passe. »
Oh mais par quoi je commence Kieran ? Par le fait que je suis bien plus brisée par mon passé que je ne l’aurai cru ? Devrais-je te parler à nouveau de mon être malade ? (Non). Devrais-je te parler de la maladie de mon fils ? (Non.) Devrais-je te dire la douleur qui vrille mon cœur depuis bientôt trois ans ? Que je suis désormais plus morte que vivante ? Et que je désire faire de cet état, une chose permanente tellement j’en ai assez ?
« Je… » Ma voix me semble si lointaine. Si fluette sur le coup à mesure que les larmes redoublent. Elles m’obstruent ta vue. Et c’est sans doute pour le mieux car je ne veux pas rejeter mon malheur sur toi. Je ne veux pas que tu voies mes souffrances. « Je ne suis pas quelqu’un de bien. » Et le verbaliser me fait d’autant plus mal alors que c’est un fait avéré. « J’ai… J’ai… J’ai fait du mal à tout le monde. » Un gémissement plaintif d’animal blessé ponctue cette phrase. Mais vois-tu, je ne veux pas te mentir. Cela ne servirait à rien de maintenir l’illusion. Alors, je m’écarte pour le laisser passer et l’inviter à entrer à mesure que je me colle contre le mur du côté de ma porte, que j’essaie de faire un avec. Ma bouche s’entrouvre pour laisser échapper cet odieux couinement sort d’entre mes lèvres. « Tu ne devrais pas être là. Je ne mérite pas que tu sois là. » ma tête se baisse un peu plus alors que je sens mon corps manquer de glisser. Que je me retiens comme je peux. « Retourne auprès d’elle. » Non, reste avec moi me hurle mon cœur. Reste s’il te plaît. « Je suis désolée. Je suis désolée si tu savais. » Des excuses qui viennent bien tard, ne crois-tu me susurre mon ombre. Je choisis donc de me taire. Mon cœur et le monstre sont trop occupés à se battre pour avoir le contrôle de mes maux et de mes mots. « Retourne auprès d’elle. » Et surtout sois heureux. Tu le seras sans aucun doute plus sans moi qu’avec moi.
Véritable être toxique. Véritable petite chose inanimée laissée pour compte. Tout petit tas de cendres. Qui au matin, sera balayée par le vent. Mais qui se sentira plus libre et mieux. Et qui cessera de faire du mal aux autres.
ÂGE : trente-cinq (14.07). aïe. SURNOM : « kiki » (couché, grrrrhhhh). STATUT : c’est bien aussi la solitude, on s’y habitue (non, pas du tout #help). MÉTIER : illustrateur (fauché) en freelance et prof (dépité) d’arts visuels. LOGEMENT : #18 james street, fortitude valley, avec cesar (le coloc) et waterproof (le corgi). POSTS : 4054 POINTS : 200
TW IN RP : dépression, pensées suicidaires, tentative de suicide, relation toxique, maltraitance, abus physiques et psychologiques, harcèlement scolaire, dépréciation, troubles anxieux, distorsion corporelle, mention d'agression physique (j'adapte mes rps au besoin, contactez-moi ♡). ORIENTATION : J'aime les jolies filles. PETIT PLUS : placé en foyer, très proche de la dernière famille qui s’est occupée de lui ≈ souffre néanmoins de cette absence d’identité propre ≈ réservé, maladroit, optimiste, vit dans un monde imaginaire ≈ a quitté sa fiancée il y a deux ans, soulagé malgré sa phobie de la solitude ≈ essaie de reprendre confiance en lui, de renouer avec ses proches, de retrouver sa place ≈ préfère la compagnie des pop et des jeux vidéo aux humains ≈ du talent au bout des doigts, aucune motivation d’en faire quelque chose ≈ trop mou, trop paresseux, trop paumé ≈ a fait une tentative de suicide fin novembre 2022. CODE COULEUR : kieran bafouille en rosybrown. RPs EN COURS : halstay #12, #13 & ua #3 (parents) ⊹ i hope your ghost will haunt me, i hope i hear you calling my name at 3am. 'cause honey, i love you dearly and i cannot bear you leaving again, not again. oh, i hope your ghost will haunt me 'til the end.
spencer #5 ⊹ i've been begging, hope you're listening. i've done my wrongs but i'm someone different.
ally ⊹ oh, if i can take something to make me feel better than i'm feeling now and everything else will work itself out.
(13/06 - vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bon ou de mauvais compte. moi, si je devais résumer le rp aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres) › ginny (fb) › cecilia › shiloh › wild › alfly #17 (ua) › danaë › olive #2 › greta #2 RPs EN ATTENTE : flora #3 RPs TERMINÉS :
kieyer ⊹ close your eyes and think of me and soon i will be there to brighten up even your darkest night. you just call out my name and you know wherever i am i'll come running, to see you again.
Sa main rougit sous la violence des coups qu’il adresse contre la porte de la jeune femme à intervalles réguliers, traduisant de sa panique. Et si le gros plan se fait actuellement sur ses mains qui tapent en rythme, s’il s’agissait d’un film l’on pourrait faire un zoom arrière pour s’arrêter quelques instants sur l’ensemble de la silhouette de notre protagoniste.
Lèvres entrouvertes : preuve que les battements de son cœur autant que ses poumons fonctionnent à plein régime et qu’il a besoin d’expulser l’air par fortes expirations pour ne pas tomber dans les pommes. Yeux écarquillés : le regard est vif, s’accroche à cette porte, à cette serrure, à cette sonnette sur laquelle il appuie de temps à autre sans obtenir plus de réponses. Pied qui tape au sol : signe d’impatience, sa jambe ne lui obéit plus lorsqu’il passe sa frustration en frappant le béton du couloir, comme si ce geste avait le pouvoir de permettre à la porte de sortir de ses gonds (littéralement). Peau qui se colore : à mesure qu’il hurle ce prénom et qu’il s’acharne contre cette porte, c’est l’ensemble de son visage qui prend des teintes cramoisies, qui traduit de son inquiétude autant que son agacement de ne pas pouvoir s’enquérir de l’état de la jeune femme.
En d’autres termes, le simple fait qu’il s’acharne à vouloir entrer et s’assurer qu’Eve est toujours en un seul morceau n’est qu’un détail parmi tous les autres qui démontrent de la panique qui l’habite depuis qu’il a quitté son appartement. Panique qui dénote évidemment avec mon calme tout relatif. Relatif car, évidemment, je ne peux guère prétendre ne pas être moi-même paniqué puisque je ressens absolument tout ce qu’il ressent. La réciproque m’arrangerait d’ailleurs fortement, pour que je lui inculque un peu de ce calme qu’est le mien, afin de préserver son cœur à deux doigts d’exploser dans sa poitrine. Et si je sais que les sentiments qu’il ressent pour la jeune femme dictent sa conduite, je sais aussi que le simple fait qu’il ne puisse avoir aucune preuve concrète quant à l’état de celle-ci sera plus fort que tous les arguments que je pourrais utiliser pour tenter de l’apaiser. Pour quelqu’un qui croit en Dieu, je le trouve étrangement rationnel, à cet instant, Kieran, alors qu’il ne veut croire que ce qu’il voit et qu’il ne m’écoutera tant que cette petite voix dans sa tête (la sienne, cette fois-ci, en l’occurrence) cessera de lui faire imaginer le pire. Il n’a jamais été connu pour son optimisme et aujourd’hui ne fait pas exception à la règle alors qu’au lieu de simplement supposer qu’elle ait pu s’endormir sous le poids de la tristesse, de la colère ou tout autre sentiment décuplé, il n’a qu’une seule hypothèse en tête, la plus déplaisante, la plus angoissante : celle qui suggère qu’elle ait pu se faire du mal.
Et si tel était le cas, Kieran, quel est le problème ? Elle t’a fait suffisamment de mal pour qu’elle s’en fasse aussi un peu à elle, tu ne crois pas ?
Bien sûr qu’il ne me croit pas. Et n’allez pas croire que je suis partisan de la violence ou que je souhaite le décès de la jeune femme, loin de moi cette idée – mais je souhaite sa disparition, c’est vrai. Pas de la surface de cette terre, seulement de la vie d’un Kieran qui continue d’être un pantin entre ses mains. Les cinq dernières années ne t’ont pas suffi, peut-être ? Elle l’a toujours repoussé ; pourtant elle continue de l’appeler lorsqu’elle a besoin d’être sauvée. Mais ne vois-tu pas, chère Eve, que Kieran a besoin de l’être aussi ? Et que chaque fois que tu daignes lui donner de l’intérêt, tu l’empêches toujours un peu plus de l’être ?
Il ne voit pas les choses ainsi, Kieran, mais je conserve l’espoir qu’un jour, cela puisse être le cas. Et ce jour-là, Eve, je t’assure que tu disparaitras enfin.
Pour l’heure, ses sentiments sont plus forts que sa raison alors qu’il persiste à signaler sa présence, s’en fichant bien de déranger les autres âmes qui vivent dans le même immeuble. Comme trop souvent, plus personne ne compte à part elle et comme trop souvent, elle le sait très bien. L’excuse d’être visiblement éméchée fonctionne peut-être sur le dessinateur, il n’en va pas de même pour moi ; ce n’est pas parce que je me faisais silencieux que je n’ai pas vécu les dernières années avec toi, Kieran et je sais très bien comment les choses fonctionnent dans ces cas-là. Ta naïveté te préserve encore, profite-en ; je compte bien t’ôter ces œillères auxquelles tu t’accroches.
Et c’est à cette porte que bientôt il ne s’accroche plus lorsqu’elle finit par s’ouvrir, le soulagement de la vision de la silhouette d’Eve étant bien vite empêché par la prise de conscience de son état. L’air hagard, les mouvements hasardeux, les joues mouillées, la voix brisée ; sa question est évidemment stupide et il s’en veut aussitôt qu’elle lui la renvoie, lui faisant réaliser sa bêtise. Il ne répond rien, conscient que ce soir il n’est pas question de lui. Mais avec elle, il n’est jamais question de toi, Kieran.
Elle est tellement plus douée qu’Autumn. Plus subtile, plus violente, aussi. Et je l’entends ton désaccord, mais je ne l’écoute pas. À croire qu’on s’accorde sur quelque chose, finalement.
Sur le pas de la porte, notre protagoniste demeure muet. Il prétend l’être pour laisser le libre choix à Eve de s’épancher sur les raisons de son mal-être, je perçois ses hésitations alors qu’encore une fois, ce sera à lui de la rassurer. Mais jamais elle ne le rassure, lui, toujours elle l’accuse, n’est-ce pas ? Il fait mine de ne pas entendre ma voix, mais je sais qu’il ne peut pas lui résister ; il sait que j’ai le pouvoir quoi qu’il puisse en penser et qu’à force de le répéter, à force de l’assaillir de mes opinions, il ne peut pas prétendre ne pas les entendre. Il entend. Et peut-être même qu’il y croit sans vouloir l’admettre. Un peu, un tout petit peu ; et c’est déjà une grande victoire. « Wow, okay, viens là. » Qu’il finit par reprendre la parole pour l’avertir du geste qu’il s’apprête à faire lorsqu’elle se rattrape maladroitement au mur à côté d’elle. Il passe son bras derrière elle pour poser sa main contre son dos, baissant légèrement la tête pour l’inviter à passer le sien autour de son épaule, pour l’aider à maintenir un certain équilibre qui, à défaut d’être parfait, lui évitera au moins de se blesser. Et il réalise vite que c’est déjà trop tard lorsque son regard se porte sur sa main parsemée de sang. « Hé, calme-toi, ça va aller. » Il demande d’une voix qui se veut douce pour ne pas paraître trop ferme face à ce qui semble être un ordre, alors que son regard croise ses larmes qui continuent de couler. « Il faut que... qu’on nettoie ça, d’abord, d’accord ? » Il souligne en désignant sa main, alors qu’il lève ensuite la tête pour chercher la salle de bain, réalisant l’ampleur des dégâts que la jeune femme a causés autour d’elle. « Ensuite tu vas boire quelque chose qui... qui ressemble pas à de l’alcool et te reposer un peu, ça t’évitera de dire n’importe quoi. » De dire la vérité, surtout, ne penses-tu pas ? Il esquisse un sourire, tente d’apaiser la situation, alors qu’il l’invite à se mettre en marche. « Allez, viens et... hm montre-moi où est la salle de bain, ce sera plus pratique. » Il esquisse un léger rire, traduisant de sa gêne et de sa nervosité. Parce que tu sais très bien ce qui t’attend, Kieran, n’est-ce pas ? Comme la dernière fois, c’est toi qui es appelé quand le géant se comporte mal, c’est toi qui dois panser les plaies qu’il dessine. Quand les mots qui sont les siens ne sont pas ceux qu’elle espère, c’est toi qu’elle appelle pour les entendre. Quand rien ne va entre eux, c’est toi qui tente de réparer les choses et quand ils sont à nouveaux heureux, c’est toi qui reste malheureux. Et tu ne veux toujours pas comprendre.
« C’est ce qu’il t’a dit ? » Qu’elle n’est pas quelqu’un de bien ? Qu’elle fait du mal à tout le monde ? Qu’elle ne mérite pas qu’on soit auprès d’elle ?
C’est bien, Kieran, je te félicite, tu t’interroges. Peut-être que tu veux comprendre, finalement.
La douleur était insoutenable. Celle qui vrillait mon cœur à cause de mes actes. Je me suis enlisée, embourbée dans mes mensonges. Tout ça parce que je ne voulais plus vivre seule. parce que je voulais être avec quelqu’un. Mais la vérité était encore plus difficile à accepter : je suis seule depuis bientôt trois ans. Trois longues années de solitude. A être quelqu’un que je n’étais pas pour faire plaisir aux autres. Pour lui faire plaisir. Nous avions bâti notre relation sur un château de cartes et il s’était effondré à la première bourrasque. Je savais que mon comportement de ce soir était impardonnable. Je n’aurai jamais dû envoyer un tel sms à Kieran mais à vrai dire, je pensais chaque mot.
Et si je n’avais pas été lâche, Si je n’avais pas été mère de deux enfants, Je serai passée à l’acte.
Je le savais pourtant, que mes pensées noires ne devaient pas régir ma vie. Mais pour l’instant, elle englobait tout mon être. Étouffant le peu de lumière qui subsistait en moi pour ne faire corps qu’avec l’ombre. La blessure à ma main pouvait paraître anodine. Si on ne s’arrêtait qu’à la coupure superficielle et pas à l’entaille profonde qui siégeait non loin de mon poignet. Et surtout si on ne baissait pas le regard vers l’intense brûlure qui parsemait mon articulation. Le souci étant que je ne ressentais rien. Aucune douleur si ce n’était l’écoulement poisseux du sang qui vint tâcher le parquet déjà bien amoché par le désordre que j’avais causé. Il n’était pas tant de faire disparaître toute trace d’Ezechiel. Car encore une fois, il n’y était pour rien dans cette histoire. J’étais l’unique fautive comme celle vécue avec Pierre, comme la mort de mon mari. Il n’était pas compliqué de rejeter les fautes sur autrui. Et même si mon meilleur ami avait tenu le discours inverse, les mots étaient ancrés dans mon esprit et ne voulaient pas s’en aller. Toutes mes idées se bousculaient dans ma tête, comme à chaque fois que je buvais. Les paroles de Pierre qui me sont parvenues quelques semaines plus tôt, le regard meurtri de Kieran alors que je lui annonçai être en couple. Ou encore la nonchalance de Zeke alors que je mettais fin à notre idylle. J’avais fait tout ça, toute cette mascarade pour ne pas rester seule. Mais elle était là l’odieuse vérité. Je suis seule depuis si longtemps.
Je me relevai donc, péniblement, perdant encore plus du liquide rougeâtre qui était symbole de vie avant de me décider à essuyer le tout sur ma robe. Les deux couleurs étant similaires, la personne qui tambourinait à ma porte quitte à me fêler le crâne ne verrait pas la différence. La main sur la poignée, je crus entendre mon prénom. Murmuré comme une supplication avant de l’ouvrir. Je vacillai un peu d’avant en arrière alors que mon regard restait vrillé au sol. Quiconque me connaissant et ayant un peu d’estime à mon encontre verrait que je me laissais volontairement couler. Les larmes le faisaient bien alors que j’essayai de réprimer mes sanglots tout en contenant ma blessure. Un effort surhumain pour quelqu’un d’aussi aviné. Sa voix me prodigua un bien fou. Plus que je devais l’admettre. Alors pendant un instant, quelques secondes, je fermai les yeux pour me focaliser sur sa tonalité. Cependant, je devais le faire partir. Oui, il devait fuir. Loin, très loin. Je ne voulais pas la détruire plus que je ne l’avais fait. Et il avait sa compagne. Ou son plan éphémère. Mais il méritait cent fois plus que moi. Une personne digne de confiance qui ne le briserait pas. Qui ne me briserait pas. Car renoncer à lui serait sans doute extrêmement douloureux.
Alors pourquoi étais-je en train de l’inviter à entrer ? Dans ce lieu de vie où ne régnait que le désespoir et où le fantôme de mon défunt mari hantait les pièces. Contre le mur, ma voix fut prise de tremblements tout comme mon corps, réprimant au possible ma crise. L’angoisse. Cette angoisse qu’il voit que j’étais toxique, qu’il le pense et qu’il se joigne à mon avis. Mais je savais que je l’étais. « Wow, okay, viens là. » Je n’ose pas lever le regard. Je ne voulais pas. Alors que mon corps réagit à son geste. J’en vins à me mâchouiller avec virulence l’intérieur de ma joue pour voir qu’il baissait la tête. Mais mon bras si chétif et non stable se referma autour de sa taille. Je ne voulais pas le blesser à la nuque, n’oubliant pas les centimètres qui nous séparaient. « Hé, calme-toi, ça va aller. » Un sanglot des plus audibles sortit de ma gorge. Puis, je vins secouer la tête en signe de dénégation. Ma vie part en cacahuètes, je t’ai menti et tu penses que ça va aller ? Je ne pense pas non. Et pour aller mieux, il faut le vouloir et le mériter. « Il faut que... qu’on nettoie ça, d’abord, d’accord ? » Je lève la tête pour voir que son regard est dirigé vers ma main blessée. Je secouai donc le bras pour laisser le tissu retomber le long de mon bras et cacher la misère. « C’est rien. Ça va. » Bien sûr que non, ça ne va pas. Mais nous n’étions plus à un mensonge près lui et moi non ?
« Ensuite tu vas boire quelque chose qui... qui ressemble pas à de l’alcool et te reposer un peu, ça t’évitera de dire n’importe quoi. » Boire. Je suis d’accord pour boire. « Je ne fais que dire la vérité cha… » Le surnom tellement donné lors de nos soirées où tout allait bien meurt sur mes lèvres avant même de sortir. Je ne verbaliserai pas mon manque de courage car Zeke m’avait dit, m’avait fait comprendre que c’était faire reposer trop de poids sur les épaules d’une personne. Et Kieran avait trop souffert pour que je refasse ça. En effet, je l’avais trop fait souffrir. Et je ne voulais plus. « Allez, viens et... hm montre-moi où est la salle de bain, ce sera plus pratique. » Je me redresse. « C’est la porte en f… face. » Je manque de trébucher avant de me rattraper avec ma main blessée au premier meuble sous la main. Heureusement pour moi, je suis plus endurante qu’une toute petite douleur à la main.
« C’est ce qu’il t’a dit ? » Je déglutis avant de resserrer ma prise autour de sa taille sans pour autant le blesser. De toute façon, je sais que je suis une brindille. Donc je ne risquais pas de lui faire mal. Je secouai donc la tête. « Tu sais que je penses ça depuis plus longtemps. Huit ans pour être exact. » Bien avant la naissance de Lisa, bien avant que je ne vienne ici. « Je… Je fais du mal à toutes les personnes que j’… » Que j’aime, oui. Mais je ne pouvais pas verbaliser ceci à voix haute. « J’ai imposé à Pierre un enfant alors que j’aurai dû prendre mes précautions. » La douleur me prit à la gorge alors que je pris appui sur le mur pour essayer de reprendre ma respiration. J’avais vraiment du mal à tout contenir pour le coup. Avec un peu de chances, je m’étiolerai. « J’ai fait du mal à ma fille en étant une trainée. Elle… Elle a été renvoyée de son école car elle s’est battue pour me défendre. » Sa salope de mère. Celle qui copulait et se retrouvait enceinte comme on claque des doigts. « Jacob est mort parce qu’il m’a aimé. » Je baissais la tête, ne désirant qu’une chose : me remettre en chien de fusil pour capituler. « Mon fils est en train de mourir parce que j’ai été incapable de prendre soin de moi pendant ma grossesse. C’est de ma faute s’il est dans cet état. » Et pour une fois, je ne dramatisai pas la situation. Puisque les hospitalisations s’enchainaient les unes derrière les autres alors que je me retrouvais de plus en plus impuissante.
Je parvins à me détacher de Kieran pour lui faire face avec du mal. « Et enfin, il y a toi. » Les yeux embués, je ne savais pas si je serai à même de soutenir ton regard. Ma main intacte se porta à sa joue alors que ma respiration se bloqua dans ma trachée. « Je suis tellement désolée. Je sais que t’as aucune raison de me pardonner. Mais je voulais te présenter mes excuses. » Mon regard dériva du sien bien assez vite alors que j’entrai dans la salle de bain pour venir m’asseoir sur le meuble et déglutir. « Tu devrais aller retrouver Ivy, Kieran. Je vais bien. » Mensonge que ceci. « Tu devrais passer le nouvel an avec quelqu’un que t’aime et pas avec… » Je pris une profonde inspiration. « Une cinglée, un monstre. Appelle-moi comme tu veux. Mais je mérite pas que tu sois là. » Et pourtant, encore une fois, mon cœur n’avait aucune envie qu’il parte. Mais il le fallait. « Si tu t’en vas pas, je vais tout déballer. » Et je n’en avais pas le droit. "Le pourquoi j'ai fait... ça." Pas alors qu’il avait trouvé le bonheur auprès de quelqu’un d’autre.
ÂGE : trente-cinq (14.07). aïe. SURNOM : « kiki » (couché, grrrrhhhh). STATUT : c’est bien aussi la solitude, on s’y habitue (non, pas du tout #help). MÉTIER : illustrateur (fauché) en freelance et prof (dépité) d’arts visuels. LOGEMENT : #18 james street, fortitude valley, avec cesar (le coloc) et waterproof (le corgi). POSTS : 4054 POINTS : 200
TW IN RP : dépression, pensées suicidaires, tentative de suicide, relation toxique, maltraitance, abus physiques et psychologiques, harcèlement scolaire, dépréciation, troubles anxieux, distorsion corporelle, mention d'agression physique (j'adapte mes rps au besoin, contactez-moi ♡). ORIENTATION : J'aime les jolies filles. PETIT PLUS : placé en foyer, très proche de la dernière famille qui s’est occupée de lui ≈ souffre néanmoins de cette absence d’identité propre ≈ réservé, maladroit, optimiste, vit dans un monde imaginaire ≈ a quitté sa fiancée il y a deux ans, soulagé malgré sa phobie de la solitude ≈ essaie de reprendre confiance en lui, de renouer avec ses proches, de retrouver sa place ≈ préfère la compagnie des pop et des jeux vidéo aux humains ≈ du talent au bout des doigts, aucune motivation d’en faire quelque chose ≈ trop mou, trop paresseux, trop paumé ≈ a fait une tentative de suicide fin novembre 2022. CODE COULEUR : kieran bafouille en rosybrown. RPs EN COURS : halstay #12, #13 & ua #3 (parents) ⊹ i hope your ghost will haunt me, i hope i hear you calling my name at 3am. 'cause honey, i love you dearly and i cannot bear you leaving again, not again. oh, i hope your ghost will haunt me 'til the end.
spencer #5 ⊹ i've been begging, hope you're listening. i've done my wrongs but i'm someone different.
ally ⊹ oh, if i can take something to make me feel better than i'm feeling now and everything else will work itself out.
(13/06 - vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bon ou de mauvais compte. moi, si je devais résumer le rp aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres) › ginny (fb) › cecilia › shiloh › wild › alfly #17 (ua) › danaë › olive #2 › greta #2 RPs EN ATTENTE : flora #3 RPs TERMINÉS :
kieyer ⊹ close your eyes and think of me and soon i will be there to brighten up even your darkest night. you just call out my name and you know wherever i am i'll come running, to see you again.
Il s’offusque lorsqu’on utilise ce surnom qui lui donne l’impression d’être un chien, pourtant il ne devrait pas Kieran, parce qu’il partage une caractéristique commune avec les quadrupèdes : on ne fait pas plus fidèle.
Cette précipitation avec laquelle il a rejoint cet appartement en est la preuve vivante : bien qu’ayant été insulté, battu et traumatisé par les actes d’Eve ; il persiste à revenir à ses pieds. Docile, fidèle. Stupide, surtout.
Un instant, je me demande s’il souffre de démence précoce qui justifierait l’oubli d’autant de peine causée par une seule personne ; mais ce n’est pas le cas et il se souvient très exactement de tous les mots qu’elle a pu tenir à son encontre, notamment lors de ce fameux soir de juin, à l’abri des caméras de Race of Australia. Son souhait est de ne plus parler de cette émission et il le respecte, Kieran, alors qu’il ne devrait pas. Oh, bien sûr, il n’a pas la cruauté nécessaire pour revenir sur ce sujet en sachant pertinemment que cela semble avoir été un déclencheur de sa maladie, pour autant je n’ai pas la même bienveillance et je ne peux m’empêcher de trouver cela facile. Parce qu’il n’y a pas que cette question de maladie et qu’une semaine me semble bien peu pour avoir été un déclencheur ; non, Kieran, ce qu’elle ne veut pas, c’est d’admettre toutes les blessures qu’elle t’a causées ce jour-là. Parce que tu te souviens de tous ses reproches, n’est-ce pas ?
« Le mec de qui j’aurai pu potentiellement tomber amoureuse m’a comparée à son ex après trente secondes de rendes-vous. Ce qui a eu le don de me plonger dans une profonde déprime car bon qu’on se le dise, boy, aucune femme n’a envie qu’on lui dise ça au premier rendez-vous. » Je suis à l’origine de son mal-être. « D’un, tu m’as brisé le cœur et deux, je me demande sans cesse si c’est moi que tu vois ou si c’est elle. » Je l’ai brisée. « Je suis tombée avec un mec charmant. Merci, les hommes ne sont pas tous des enfoirés. » Je suis le pire des enfoirés. « Tu ne tiens pas à moi, tu tiens à ton ex. Ce n’est pas moi que tu vois mais elle. » Elle ne croira jamais en mes sentiments. « Tu attendais quoi de moi ? Que je m’aplatisse ? Putain mais c’était déjà compliqué. Tu crois quoi ? » Je lui ai donné cette impression. « Tu savais très bien que j’avais peur qu’on me voie pour ensuite décider que j’étais mieux invisible et c’est ce que tu as fait. » Je lui ai donné envie de disparaître. « T’es pas un mauvais gars. T’es juste paumé. » Tellement paumé que j’ai fait d’elle un dommage collatéral. « Mais je suis fatiguée. Fatiguée de culpabiliser d’exister en ta présence. » J’ai fait tout ça et tant d’autres choses encore. « Tu m’as laissé toute seule affronter mes démons. » Je croyais avoir été là depuis le début alors que tu me rejetais sans cesse.
Tu te souviens comme si c’était hier et elle, elle prétend que rien n’a jamais existé. C’est bien plus facile, n’est-ce pas ? Ça aurait pu l’être aussi pour toi, si elle ne t’avait pas laissé seule avec les conséquences de ses paroles. De simples mots, qui pourtant n’ont cessé de concrétiser ce que tu craignais : tu n’es pas quelqu’un de bien. Et je ne sais pas pourquoi tu t’es mis cette idée en tête simplement parce qu’Eve était trop bourrée pour assumer ses propres comportements, mais le résultat est ce qu’il est et vos récents échanges n’ont rien fait pour atténuer cette impression. Parce que c’est toujours ainsi, entre vous deux, malgré que tu ne veuilles pas y croire et que tu te rattaches aux bons moments pour ignorer les pires. C’est ce que tu faisais aussi avec elle, c’est ce qui t’a coincé pendant cinq longues années dans cette relation où tu n’étais plus épanoui depuis longtemps. Et aujourd’hui encore, tu ne comprends pas qu’il ne faut pas refaire les mêmes erreurs, que cette fois-ci il me sera difficile de t’aider à t’en sortir si tu continues à t’enliser de la sorte. Je donnerais tout pour que Kieran réagisse ; et je sais qu’il le désire. Je sais qu’il n’a qu’une envie, avoir lui-aussi la possibilité de dire tout ce qu’il a sur le cœur, quitte à se montrer blessant. Mais c’est justement ce qui le retient, incapable de vivre avec ce poids sur la conscience, alors qu’Eve n’a jamais été dérangée par cela. Ni après ses reproches, ni après ses rejets, ni après ses retours dans sa vie, ni après toutes ces fois où elle a compté sur lui parce que celui sur lequel elle aurait dû compter n’était pas là.
Parce qu’il vaut mieux être une solution de secours que pas de solution du tout, Kieran, n’est-ce pas ? Et j’aimerais tellement qu’il comprenne qu’il n’a pas à accepter la moindre bribe d’attention qu’on lui offre et qu’il prend pour de l’amour, qu’il a le droit d’en mériter un vrai, mais il n’y croit pas, Kieran, leurré par des abus d’aussi loin qu’il s’en souvienne. Ça lui a toujours fait mal d’aimer et d’être aimé, alors il présume que les choses sont supposées se passer ainsi. Si tu savais, gamin, que l’amour ce n’est pas ça.
Il ne devrait pas être là et pourtant il est le premier à accourir ; elle est probablement la première à savoir qu’il accourrait en toutes circonstances. Sa main s’accroche à sa frêle silhouette, le cœur brisé de la voir dans un tel état, ses sanglots qui résonnent en lui et ne font que renforcer son attachement. Mais où était-elle, elle, lorsqu’elle était à l’origine des tiens ? Il pince les lèvres lorsqu’elle manque de l’appeler par ce surnom, celui qu’il a appris à aimer de ses lèvres et qui aujourd’hui semble tabou. Elle t’appelle, mais tu n’existes toujours pas pour elle, Kieran, alors qu’elle doit contrôler chacun de ses mots en ta présence, qu’elle marche sur des œufs. Tu te souviens lorsqu’elle n’osait pas te parler de son déménagement par peur que tu lui cries dessus ? Tu te souviens du rôle qu’elle te donne ? Oublie-le, parce qu’il n’a aucun sens et je suis le seul que tu devrais écouter. Pas cette femme qui se nourrit du mal-être des autres et plus particulièrement du tien.
« Okay, allons-y doucement... » Il suggère lorsqu’elle trébuche à nouveau, calquant le rythme de ses pas sur les siens alors qu’ils avancent jusqu’à la salle de bain dans un silence qu’elle finit par briser en s’épanchant. Kieran, lui, persiste à se vouloir muet, incapable de savoir ce qu’il est supposé répondre à tout ça. Ce n’est pas la première fois qu’elle lui fait par de ses problèmes ; mais il sait aussi qu’il n’a jamais cessé de les accentuer. Après tout, n’a-t-il pas dit qu’il était une des raisons derrière son anorexie parce qu’il lui a donné envie de disparaître ? Après une telle révélation, difficile pour lui de se permettre des confessions.
« Non, s’il te-. » Qu’il veut s’opposer lorsqu’elle le mentionne, interrompu par ses mots autant que son geste surprenant – qu’il ignore désirable ou indésirable. « T’as pas d’excuses à me présenter. » Si, elle en a des milliers. Mais il ne le dira jamais, Kieran, bien trop persuadé qu’il est celui qui doit offrir et jamais celui qui est supposé les recevoir. La délaissant alors qu’elle s’installe sur le meuble, il se permet de mouiller du papier, le posant sur la main d’Eve, l’invitant à maintenir la pression le temps qu’il fouille les lieux à la recherche d’une trousse de secours, son oreille toujours attentive à ses mots, d’autant plus lorsqu’elle évoque l’existence d’Ivy et qu’il se mord la lèvre. Est-il supposé lui dire la vérité ? Poursuivre son mensonge ? De toute évidence, elle ne s’en souviendra pas demain matin. « Je n’ai pas envie de t’appeler ainsi. » Il souligne, son regard qui s’arrête un instant sur elle, avant qu’il ne mette la main sur ce qu’il recherchait. « Ce n’était pas à toi d’être plus vigilante que lui. Pierre, je veux dire. Il faut être deux pour faire un enfant, il savait très bien ce qu’il faisait. » Il débute, un peu hésitant, ôtant la compresse de fortune de sa paume, ses doigts entourant sa main pour la faire quelque peu bouger et estimer les dégâts. « Désolé, tu dis si je te fais mal. » Si je te fais encore plus mal que d’ordinaire. Il précise, tandis qu’il ausculte toujours la plaie. « Vouloir être aimée ne fait pas de toi une traînée et Lisa est à un âge où elle se battrait pour une barre de chocolat. Alors, estime-toi heureuse qu’elle le fasse pour une vraie raison. » Pour de vrais valeurs qu’elle distingue déjà du haut de ses six ans. « Tu as des morceaux de verre dans la peau, j’imagine que tu ne veux pas aller à l’hôpital ? Je peux essayer de te les enlever, mais... enfin, je risque de te faire mal. » Il annonce tandis qu’il s’empare d’un papier sec pour nettoyer le sang frais autour de la blessure. « Jacob est mort parce que c’était un risque de son métier, il était là au mauvais endroit au mauvais moment. » Du moins, il suppose. « Ça ne rend pas son décès plus juste, mais tu n’as aucune responsabilité là-dedans. » Il lui assure en descendant les yeux vers elle, toujours assise sur le meuble alors qu’il lui fait face. « Jacob n’est pas en train de mourir, il est seulement malade. » Bien qu’à vrai dire, il n’en sache pas beaucoup plus sur cet aspect-là que sur le sort de Jacob premier du nom. « Et s’il l’est, ce n’est pas à cause de toi. Il l’aurait été, que tu prennes soin de toi ou non. Et tu as vécu un tel stress que... ton corps n’aurait pas pu réagir autrement et que tu n’aurais jamais pu faire en sorte que ce soit le cas. Les... les lois de la nature, j’imagine. » Il conclut, hésitant, alors qu’il repose la main de la jeune femme, lui laissant le papier dans la main pour tenter d’arrêter le saignement en attendant de savoir s’il l’emmène à l’hôpital ou s’il tente de s’occuper lui-même de la blessure.
« Je ne suis pas avec Ivy. » Qu’il finit par admettre après un instant de silence. Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu’il faut que tu continues à lui donner des éléments pour qu’elle prenne l’ascendant sur toi ? Savoir que quelqu’un t’aime aurait été pourtant la plus belle des vengeances, mais elle aurait été aussi trop douloureuse et il s’est senti obligé de l’atténuer. « Et tu es trop bourrée pour qu’on ait cette conversation ce soir. » Il ajoute, avec un rire nerveux, tandis qu’il finit par ancrer son regard dans le sien. « Tu sais très bien que je ne peux pas partir et te laisser dans cet état. » Tu le savais à la minute même où tu m’as envoyé ces messages.
Elle fut lente, très lente cette chute. Elle a duré des années et me pendait au nez depuis qu’il était parti. Depuis que je m’étais retrouvée devant ce cercueil, un nouveau-né au creux de mes bras et une fillette dans ma main valide. Nous pleurions toutes les deux la disparition d’un être blessé. Mais pendant presque trois ans, je me suis refusée à montrer mon chagrin à quiconque. Sauf à lui. Je me rappelai encore très bien cette nuit de février -je me souvenais encore de la date exacte à vrai dire- où j’ai pris la parole pour la première fois. Avant ma rencontre avec le jeune dessinateur, ma vie était morne et insipide. Elle n’était faite que de gris, de noir et de blanc. Il avait réussi à induire quelques couleurs mais elles se sont vites fânées comme moi. La raison de nos maux à tous les deux, je la connais. Je les connais toutes mais j’avais cette difficulté à ne pas réussir à les verbaliser. Pourquoi ? Parce que cela reviendrait à briser le peu de cœur qu’il nous restait à tous les deux. J’aurai dû être celle qui aurait contribué à panser ses blessures et non à les aggraver. J’ai beau faire comme si tout ceci ne comptait pas, comme si cela n’avait pas compté. J’en suis venue à me rappeler de tout. Mais très tardivement. Comme une sorte de verrou que l’on aurait levé dans mon esprit. Mais je me rappelai exactement ce que j’avais ressenti ce soir-là alors que la voix douce de mon ami, de celui qui aurait dû être plus, était parvenu jusqu’à mes oreilles. De cet éclat de rire qui était sorti de mes lèvres, de ce sourire alors que nous jouions à l’un de ses jeux favoris en ligne. Que par désir d’être en sa compagnie, je me suis laissée entrainer dans ce monde virtuel. Et je ne regrettai pas un seul instant. Des regrets j’en avais bien assez.
J’avais pour regret d’avoir écouté cette phrase à la con et d’en avoir fait la source-même de mes insécurités. Ou plutôt qu’elle ait contribué à les renforcer, à les accentuer. Mes peurs, mes tocs étaient déjà nombreux avant que mon regard ne croise l’azuré de celui de Kieran. Je me suis servie de ce prétexte pour le fuir alors que j’aurai dû agir tout autrement. Et je savais comment encore une fois. J’avais pour regret d’avoir fait étalage de mes sentiments de la pire des manières le soir où j’avais bu en sa présence pour la première fois. Par peur de lui alors qu’il n’y avait pas plus doux que Kieran. De cette image erronée que l’ombre avait dressée de lui dans mon esprit, d’avoir laissé les dires de mes amis gangréner mon cœur. J’avais pour regret de ne pas avoir cédé à mes pulsions lorsque nous nous sommes retrouvées à son anniversaire, alors que nous étions en proie à ce doute temporel. Que se serait-il passé si jamais nous avions cessé aux sirènes de notre inclination ? Je suppose que nous ne le serons jamais. Parce que nous ne pouvions pas revenir une année en arrière. Pas après avoir vécu une seule souffrance. Et j’aurai dû le choisir lui. Bien sûr que j’aurai dû le choisir lui. Combien de fois cette certitude est-elle venue me hanter ces six derniers mois alors que j’alimentai le mensonge d’une relation parfaite ?
Alors, oui j’avais bu plus que de raisons ce soir. Enfin si l’on se plaçait d’un point de vue d’une personne normale, je n’avais rien ingéré. Une personne qui n’avait pas une taille ridicule et une silhouette aussi menue, cela va sans dire. Mais à vrai dire, je ne serai jamais aussi charpentée que toutes les autres femmes. Celles que j’enviai d’avoir des formes, celles sur qui cette étoffe rouge ne ferait tâche. Mais je ne serai jamais à même d’être belle à la fois à l’extérieur qu’à l’intérieur. J’avais contribué à la dégradation de mon mental aussi bien que celui de Kieran. Mauvaise personne, vile, infâme. Une sorte d’insecte que l’on rêverait d’écraser. Que l’on rêverait de voir disparaître de la surface de cette planète. Mais mon ami était trop doux, trop gentil pour le verbaliser. Je devrais donc le faire pour nous deux, n’est-ce pas Kieran ? Je désirai porter le blâme de cette année car dans le fond, mon comportement fut aussi absurde qu’infâme tant me draper dans ma solitude fut une excuse des plus douces. « Okay, allons-y doucement... » N’est-ce pas ce que nous avons fait cette année ? Y aller doucement ? Je pus raffermir la pression autour de ma poigne tant ma force était ridiculeusement inexistante. Qu’elle avait quitté le navire en même temps que mon bon sens. Et pour cause que je n’ai jamais fait étalage de temps de sentiments négatifs devant lui. Si pendant cette course stupide à laquelle je n’aurai pas dû participer. Bien sûr. Mais le contexte était tout autre, il s’agissait ni plus ni moins qu’une énorme accumulation. Prête à exploser en plein vol. Je ne montrerai pas l’étendue des dégâts infligés sur mon esprit par l’arrêt de mon traitement. Ou encore des sévices que mon corps endurait depuis maintenant deux mois. Un mois ? Je ne saurai dire tant le temps est devenu une donnée inconnue.
Assise sur ce meuble, le velours de cette robe cachant les affres de mon mal-être, je n’osai toujours pas rencontrer le regard de mon compagnon. Les lourds sanglots mourraient avant même de franchir la barrière de mes lèvres tant je ne voulais pas l’effrayer ou accentuer le malaise qu’il devait éprouver en ma présence. T’as pas d’excuses à me présenter. » J’aurai pu rire tant j’en avais des milliers, des millions, tant je pourrais t’en présenter à l’infini. « Va falloir t’habituer, commençai-je d’une voix plus enrouée, car je ne cesserai pas de le faire. » Elle était là, l’odieuse vérité tant je m’en voulais de ce que nous avais fait. Car je ne me suis pas seulement fait souffrir en agissant de la sorte mais je l’ai fait à lui également. Il y avait cependant une petite zone qui me réconfortait dans la mesure où lui il avait quelqu’un. Qu’il ne resterait pas seul alors que je le serai. Que j’avais accepté cette fatalité de demeurer dans la solitude tant ma compagnie ne pouvait faire que blesser autrui. Et encore là, ce raisonnement n’avait rien de purement altruiste puisqu’il demeurait à semi-égoïste. « Je n’ai pas envie de t’appeler ainsi. » Alors, je le ferai pour nous deux. Mon dos se posa contre le mur alors que je gardai le nez baissé. Ma main s’ouvrit peu à peu au contact des doigts délicats de l’Australien. Que les pleurs ne cessaient de couler silencieusement. A quoi bon me mettre à hurler ? A tempêter ? Cela ne servirait à rien et j’étais fatiguée. Il suffisait de regarder un instant mes traits tirés, de saisir les tremblements infimes de ce corps décharné pour comprendre que physiquement, j’étais épuisée. « Ce n’était pas à toi d’être plus vigilante que lui. Pierre, je veux dire. Il faut être deux pour faire un enfant, il savait très bien ce qu’il faisait. » Je le regardai commencer à faire les soins alors que je déglutis. Le tissu se retira de par-dessus mon poignet, en dévoilant la brûlure. Et je priai pour ne pas qu’il le fasse davantage. Cependant, je dus me mordre l’intérieur de la joue pour ne pas prendre la parole et ne pas l’interrompre. Il fallait que j’apprene à écouter Kieran. C’était sans doute la leçon la plus évidente après un an à le cotoyer autant physiquement que virtuellement.
« Désolé, tu dis si je te fais mal. » Je hochai la tête à la négative alors que mes doigts continuaient de pianoter dans le vide. Vois-tu, je ne ressens plus rien depuis si longtemps que j’accueillerai la douleur comme une vieille amie. Et que je la prendrai dans mes bras. Mais encore une fois, je ne verbaliserai pas ça. « Vouloir être aimée ne fait pas de toi une traînée et Lisa est à un âge où elle se battrait pour une barre de chocolat. Alors, estime-toi heureuse qu’elle le fasse pour une vraie raison. » Ma main vacante passa sur mon visage. Encore une fois, il avait raison. Caleb m’avait verbalisé la même chose. Alors pourquoi mes épaules se voutèrent d’elles-mêmes ? Pourquoi est-ce que mes larmes ne voulaient pas se tarrir ? De nouveau, je les chassais, faisant corps avec le silence. S’il y avait bien une chose que m’avait apprise cette relation avec Ezechiel, c’était me taire quand la nécessité le demandait. Quand la situation l’exigeait. « Tu as des morceaux de verre dans la peau, j’imagine que tu ne veux pas aller à l’hôpital ? Je peux essayer de te les enlever, mais... enfin, je risque de te faire mal. » Je me penchai alors pour regarder le tout. « Je vois rien sans mes lunettes. » Et elles étaient sans doute poser soit dans la chambre ou dans le salon. « C’est rien, c’est juste le téléphone. On aura qu’à y aller après. » Note-le dans l’agenda Kieran que je serai prête à t’écouter. Et à te suivre alors que quelques mois auparavant, j’en refusai cette nécessité. Mais à force de côtoyer les chambres stériles, à force de voir les docteurs, de me lier d’amitié avec les infirmiers, j’ai appris à avoir moins peur. « Tu resteras avec moi ? » Stupide, espèce de nana complètement débile. Je regrettai la question à peine fut-elle énoncée.
« Jacob est mort parce que c’était un risque de son métier, il était là au mauvais endroit au mauvais moment. » C’était exactement ce que m’ont dit les militaires quand ils sont venus m’annoncer sa mort. Sur une mine. Et n’importe qui aurait pu marcher dessus. Je hochai la tête, laissant mon regard vagabonder sur la seule pièce qui était rangée. « Ça ne rend pas son décès plus juste, mais tu n’as aucune responsabilité là-dedans. » Je pris une profonde inspiration, sans doute trop sifflante, alors qu’un gémissement eut bon de tarir mes larmes. Il fallait que je garde une bonne respiration tant le sujet était difficile, sensible, douloureux. « Jacob n’est pas en train de mourir, il est seulement malade. » Décidément, il avait tout bon. Si j’avais été sobre -il ne serait pas là- je pense que j’aurai pu lui énoncer cette voix de fait. Mais encore une fois, je n’ouvris pas les lèvres. « Et s’il l’est, ce n’est pas à cause de toi. Il l’aurait été, que tu prennes soin de toi ou non. Et tu as vécu un tel stress que... ton corps n’aurait pas pu réagir autrement et que tu n’aurais jamais pu faire en sorte que ce soit le cas. Les... les lois de la nature, j’imagine. » Je le regarde poser ma main avec une papier alors que je tentai de me relever pour ramener mon corps vers lui. le premier essai fut un échec alors que le second eut bon de me redresser partiellement.
« Je ne suis pas avec Ivy. » Je relevai la tête pour venir rencontrer son regard pour la première fois depuis le début de la soirée. Et ce que j’y lus me terrifia pendant quelques secondes. Je crus bon de garder le silence, de ne faire aucune remarque. Cependant, ma main, la valide, se leva pour venir caresser doucement sa joue. Comme si ce geste interdit ne l’était plus totalement. Je n’en reste pas moins nocive pour lui. « Et tu es trop bourrée pour qu’on ait cette conversation ce soir. » Je le regardai saisir mon regard avec une intensité que je ne lui connaissais pas. Mes doigts continuèrent de caresser son épiderme avec douceur, du moins, je l’espérai. « Si t’aimes pas, dis-le. » J’avais cru remarquer qu’il était peu à l’aise à l’idée qu’on le touche. Non, à l’idée que je le fasse. « Tu sais très bien que je ne peux pas partir et te laisser dans cet état. » Je déglutis alors que ses paroles me frappèrent.
« Quelle odieuse manipulatrice, je fais, hein ? » Après tout, ne lui avais-je pas dit que je désirai m’en aller, ce qui était la raison de sa venue ? « C’est justement parce que je suis dans cet état que nous devons avoir cette discussion. Et ne crois pas que je ne m’en souviendrai pas. Je me rappelle tout. » Sous-entendu, je me rappelle très bien cette soirée-là mais que j’avais volontairement omis de la mentionner. Doucement mon index se posa sur ses lèvres pour l’intimer au silence à son tour. « Alors déjà, je vais commencer par des excuses. Je sais que tu ne veux pas les entendre mais je les fais quand même. Je m’excuse pour ce soir-là. j’ai été injuste, odieuse. Si la proposition de remonter le temps tient toujours, j’en effacerai cette soirée. » A vrai dire, il n’y a pas que cette soirée que j’effacerai. Ma main libre s’attarda sur l’une des siennes alors que je la pris pour venir enserrer mon poignet déjà blessé. « Mon rythme cardiaque. C’est pour que tu vois que je ne mens pas. Ou du moins, je ne mens plus. » Car je l’avais assez fait pour nous deux. Et que nous devions avoir cette conclusion durant cette année-là avant de repartir sur des bases saines dans celle qui arrivait à grand pas.
« Je t’ai menti quand j’ai dit que j’aurai pu tomber amoureuse de toi. En fait… » J’ouvris la bouche pour laisser l’air gonfler mes poumons et espérer ainsi me donner une bonne dose de courage. Car j’allais en avoir besoin pour nous deux. J’allais devoir jouer avec les mots sans viser à le blesser lui, tout en infligeant des dégâts colossaux au mien. « J’en avais depuis bien avant que je ne te vois. Je te l’ai déjà dit et c’est sincère. Depuis février de l’année dernière pour être exact. J’ai laissé cette phrase dicter mes actes car par lâcheté j’ai cru que tu ne me verrais jamais. Sauf que tu l’as fait et que j’ai décidé moi-même de me rendre invisible. » Et pas seulement à ses yeux. à ceux de Caleb, à ceux d’Alex, à ceux de mes enfants. « J’ai choisi Zeke non parce que je l’aimais plus que tout mais parce que mon second choix me semblait être mieux que le premier. Il n’avait aucun point de comparaison donc je me suis dit que si je merdais, cela n’aurait aucune quelconque importance. Car oui, t’es pas le second, ni le dernier. T’as été le premier. Et ça m’a fait peur. » Peur de bien des manières. Celle de refaire de ma vie pour commencer après avoir perdu mon mari. Avec la culpabilité grandissante. Celle aussi de ressembler à Autumn, de faire comme elle alors que j’ai fini par faire pire. « Tu sais déjà ce qu’il se serait passé si… » De nouveau, les larmes se mirent à couler alors que mes épaules furent prises de tremblements à cause de mes sanglots. « Tu sais ce qu’il se serait passé si je t’avais choisi car tout était inscrit dans le carnet. Que j’espère tu as jeté. Je pense que si j’étais restée plus longtemps à ton anniversaire, j’aurai fini par t’embrasser. Car l’attraction que j’ai pour toi est plus forte que tout le reste. Tu m’as… tu as été la plus belle rencontre que j’ai pu faire ces trois dernières années et j’ai tout gâché. » la douleur qui s’insuffla dans mon cœur commença à tout balayer à mesure que je continuai le vent de mes confessions. Que je voulais m’épancher pour mon propre bien. « J’ai joué avec toi mais j’ai encore plus joué avec moi. Je comptais… j’avais pour projet d’y mettre un terme à mon anniversaire. Je te l’ai dit à demi-mot dans mes sms. Que durant cette année passée, j’ai jamais cessé de t’aimer et j’étais prête à te choisir. Mais je ne pouvais pas le quitter puisque c’était son anniversaire. » Je laissais les sanglots tarir mes joues, je les laissais creuser mon cœur à mesure que ce dernier était voué à la disparition. « T’es l’une des rares personnes auprès de qui je ne me suis pas sentie seule. T’es la première à qui j’ai parlé de ma rechute, t’es la seule pour qui je me suis soignée. Et je l’ai fait toute seule. » Un léger rire s’éleva dans les airs. Ainsi, je verbalisai que Zeke n’avait jamais fait parti de l’équation de ma guérison. « T’as toujours été là pour moi alors que j’ai servi à rien. Si à te briser le cœur un peu plus. Des fois, on aime tellement certaines personnes qu’on finit par les faire souffrir et qu’on commence à se faire souffrir nous-même. » Je levai un peu le nez avant de revenir vers son regard. A mesure que j’essayai d’y mettre toute ma sincérité, à mesure que ma main ne bougeait pas aux prises de la sienne. « Je demande pas une autre chance. Je demande pas un happy end, j’ai compris que je n’y aurai jamais droit. Je veux juste… je ne sais pas ce que je veux. Enfin si, je sais mais je n’ai aucun droit à y prétendre. » Car ce que je veux, c’est toi Kieran. Ce que je veux depuis ce soir de février, depuis que mon regard a croisé le tien, depuis mon corps s’est trouvé à proximité du tien. Mais je nous ai trop fait souffrir l’un comme l’autre.
« Je vais le dire. Pas parce que je suis saoule ou parce qu’avec Zeke ça n’a pas marché. Je te le répèterai dans toutes les langues que je connais mais t’es pas un dernier choix. T’as été mon premier choix mais j’ai eu peur. J’ai eu peur de refaire ma vie avec Jacob. J’ai eu peur que tu ne m’aimes pas pour moi. j’ai eu peur qu’il t’arrive quelque chose. J’ai eu peur de trouver le bonheur pour une fois dans ma vie et que tu fasses comme tous les autres. Enfin, comme Pierre plutôt. J’ai eu peur de lui ressembler. » A elle, ta fameuse. Celle qui aura toujours ton cœur comme Jacob aurait toujours le mien. Mais en somme, était-ce important ? « J’aurai dû t’embrasser au moins cent fois. Mais surtout, j’aurai dû te montrer que j’étais différente. J’aurai dû t’aimer comme tu le mérites. » Mais on referait le monde avec des si n’est-ce pas ? « Voilà. Si tu me crois pas, c’est pas grave. Je sais que tu ne m’aimes plus et je ne veux pas prétendre à ce cœur que je ne mérite pas. » Je me penchai cependant, mon visage sans doute trop près du sien sans franchir cette barrière entre nous. « Brise-moi le cœur. Explose-le. Si tu ne le fais pas, je vais t’embrasser comme tu aurais aimé que je le fasse avant. Mais on sait tous les deux que c’est trop tard. »
Qu’il n’y avait aucun retour en arrière. Que nous ne pouvons pas revenir six mois en arrière. Que je ne le méritais pas. Que je ne le mériterais jamais.
Alors, je crus bon de quitter son regard après une énième élan de sincérité. Alors que je baissais la tête, courbant l’échine dans l’attente de son verdict. J’avais dit tout ce que j’avais sur le cœur. Et ce dernier reposait désormais entre nos mains et que j’étais prête à le broyer une bonne fois pour toute. Une dernière fois. Car nous ne pourrons jamais remonter le temps. Que nos lignes temporelles seraient à jamais inversées. Et qu’il n’y aurait jamais de nous. Ni même de happy ending.
ÂGE : trente-cinq (14.07). aïe. SURNOM : « kiki » (couché, grrrrhhhh). STATUT : c’est bien aussi la solitude, on s’y habitue (non, pas du tout #help). MÉTIER : illustrateur (fauché) en freelance et prof (dépité) d’arts visuels. LOGEMENT : #18 james street, fortitude valley, avec cesar (le coloc) et waterproof (le corgi). POSTS : 4054 POINTS : 200
TW IN RP : dépression, pensées suicidaires, tentative de suicide, relation toxique, maltraitance, abus physiques et psychologiques, harcèlement scolaire, dépréciation, troubles anxieux, distorsion corporelle, mention d'agression physique (j'adapte mes rps au besoin, contactez-moi ♡). ORIENTATION : J'aime les jolies filles. PETIT PLUS : placé en foyer, très proche de la dernière famille qui s’est occupée de lui ≈ souffre néanmoins de cette absence d’identité propre ≈ réservé, maladroit, optimiste, vit dans un monde imaginaire ≈ a quitté sa fiancée il y a deux ans, soulagé malgré sa phobie de la solitude ≈ essaie de reprendre confiance en lui, de renouer avec ses proches, de retrouver sa place ≈ préfère la compagnie des pop et des jeux vidéo aux humains ≈ du talent au bout des doigts, aucune motivation d’en faire quelque chose ≈ trop mou, trop paresseux, trop paumé ≈ a fait une tentative de suicide fin novembre 2022. CODE COULEUR : kieran bafouille en rosybrown. RPs EN COURS : halstay #12, #13 & ua #3 (parents) ⊹ i hope your ghost will haunt me, i hope i hear you calling my name at 3am. 'cause honey, i love you dearly and i cannot bear you leaving again, not again. oh, i hope your ghost will haunt me 'til the end.
spencer #5 ⊹ i've been begging, hope you're listening. i've done my wrongs but i'm someone different.
ally ⊹ oh, if i can take something to make me feel better than i'm feeling now and everything else will work itself out.
(13/06 - vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bon ou de mauvais compte. moi, si je devais résumer le rp aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres) › ginny (fb) › cecilia › shiloh › wild › alfly #17 (ua) › danaë › olive #2 › greta #2 RPs EN ATTENTE : flora #3 RPs TERMINÉS :
kieyer ⊹ close your eyes and think of me and soon i will be there to brighten up even your darkest night. you just call out my name and you know wherever i am i'll come running, to see you again.
Ce n’est pas ainsi qu’il devait finir l’année. Elle était supposé se terminer bien mieux qu’elle n’avait commencé et s’il n’est pas surprenant que Kieran ne voit pas les choses sous cet angle compte tenu de la personne avec laquelle il passe cette soirée (bien qu’il aurait espéré un meilleur contexte), il n’est pas non plus surprenant que je m’oppose à lui. Je ne suis pas seulement une conscience, un ami imaginaire, une voix dans sa tête, nommez-moi comme vous le désirez, je suis surtout sa raison qu’il tend à mettre de côté dès que cela l’arrange. Mais ce n’est pas ainsi que les choses fonctionnent dans la vie réelle, Kieran. Il nous a mis, moi et les précédentes bribes de rationalité, au placard durant de trop nombreuses années – et on voit où cela l’a mené. Il ne s’en rend pas compte, il ne veut pas s’en rendre compte du moins, mais réduire ces voix au silence est ce qui l’a amené à ne pas en avoir une propre. Il ne dit jamais rien, Kieran, se contentant du silence, supposant qu’il peut se montrer blessant et qu’il veut s’éviter l’humiliation d’être rejeté. Mais regarde avec Eve ; tu ne lui as jamais dit tout ce que tu avais sur le cœur la concernant – et je ne parle pas de tes sentiments amoureux – et elle t’a néanmoins rejeté. Je sais, encore une fois, qu’on ne peut pas dicter ses sentiments et qu’elle n’avait aucune obligation de l’aimer (sur ce point, je ne peux en vouloir à la jeune femme et Kieran non plus), mais elle aurait dû s’abstenir de le manipuler comme elle l’a fait. Parce que c’est très exactement à cause de ce genre de comportements que Kieran a décidé de taire sa voix, de ne jamais faire valoir son opinion ou ses envies ; parce qu’elles étaient décrédibilisées à la moindre occasion. Eve n’a pas l’air d’être une mauvaise personne, néanmoins elle s’est rendue coupable de cet acte, en accentuant toujours plus les fautes de Kieran. Elle voulait disparaître ? Tant mieux, les compteurs sont à égalité alors que cette idée ne quitte plus sa boîte crânienne depuis leur dernière rencontre, depuis la dernière fois où elle lui a brisé le cœur – et j’aurais aimé dire que c’était la première fois. Et cet instant ne fait pas exception à la règle alors qu’il a envie de disparaître, d’être partout sauf ici. Il ne le dira pas, mais je peux apporter un semblant de réponse : ça fait mal, ça fait trop mal, d’avoir à la regarder et d’avoir à jouer la comédie face à elle. De prétendre qu’il ne lui en veut pas, de prétendre que tout va bien, qu’il n’est plus blessé par les mots qu’elle a pu tenir, par le rôle de son jouet personnel qu’il a tenu simplement pour lui faire plaisir. Pourtant, il est un excellent menteur, Kieran ; il l’est quand il est à peu près stable. Et la stabilité n’est pas un concept qui s’adresse à lui lorsqu’il fait face à Eve. Je sais, vous allez me dire que ma simple existence traduit du fait qu’il a un souci là-haut, mais je vous assure qu’il n’a pas de peine à mener sa vie, Kieran, quand bien même j’existe. Mais dès qu’il est face à elle, tout s’effondre. Tous les efforts sont anéantis, tous les pas en avant deviennent une marche à reculons. Il ne voit plus qu’elle à défaut de m’entendre moi, et croyez-moi qu’il n’accorde pas son intérêt à la bonne personne. Je sais que je n’ai pas toujours été doux avec toi, gamin, ni même patient et encore moins bienveillant – mais j’ai été là. Peut-elle en dire autant, elle, du haut de ses silences, reproches et absences ?
Et toutes les excuses du monde ne parviendront pas à effacer ce qu’elle a fait au cours des derniers mois. Je sais que Kieran aimerait y croire, je sais aussi qu’il commence, doucement, à m’écouter. À se rendre compte qu’il mérite mieux que ça ; et croyez-moi ce n’est pas mince affaire d’en arriver à lui faire entendre raison (mon rôle, ne l’oublions pas). Bien sûr, il est inutile de crier victoire trop vite : je sais également à quel point il peut s’enfermer à nouveau dans les schémas (toxiques) dont il a l’habitude. « Je t’assure, Eve, c’est pas nécessaire. » Oh que si, Halstead. Tu es celui qui en a présenté pendant des semaines, des mois, sans qu’elle ne daigne les accepter ; alors c’est à elle de ramper, désormais. Il y a des milliers de raisons pour lesquelles elle devrait s’excuser, à commencer par son attitude, mais ce serait trop lui demander, n’est-ce pas ? Elle se contente de phrases préconçues, sans entrer dans les détails – comme si elle ne s’en souvenait pas et que son comportement bienveillant est parfaitement guidé par un réflexe plus que par une réelle volonté. Elle pourrait commencer par s’excuser de se servir de toi comme d’un faire-valoir, du pauvre type qui accourt tout le temps pour lui glisser les mots qu’elle veut entendre, car c’est très exactement ce qu’elle fait lorsqu’elle se morfond sur son sort. N’allez pas croire que je suis insensible – évidemment que je suis touché par tant de malheurs vécus par une seule personne. Mais Eve n’est pas seule au monde ; ce n’est pas toujours aux autres de se plier en quatre pour la rassurer. Il ne fait que ça, Kieran, encore et toujours et s’il a toujours été d’une bonne écoute, est-ce qu’elle peut en dire de même, elle qui n’a jamais cessé de retourner ses mots contre lui ? Il connait chaque bribe de sa vie ; il n’a jamais pris le monopole de la conversation et lorsqu’il s’est essayé, elle a retourné toutes ces choses contre lui. Alors, évidemment qu’il ne dit rien Kieran, sur ce qu’il ressent : il a appris à se taire pour éviter qu’on s’en serve contre lui. Il réprime tellement ses émotions, son ressenti, ses opinions que j’en suis venu à exister ; ça en dit long sur son état mental et ça en dit surtout long sur l’impact (négatif) d’Eve, même s’il persiste à ne voir que le positif.
« Tu resteras avec moi ? » Elle ne s’arrête jamais. Qui est-elle pour quémander sa présence en plus de son affection, alors qu’elle les a tant repoussées lorsqu’il ne cherchait qu’à les lui donner ? Tu ne devrais pas, Kieran, car plus tu lui donnes, plus elle t’en demande – tu devrais le savoir, avec le temps. « Oui, bien sûr. » Pitoyable. Je ne devrais pas me montrer aussi virulent avec lui, je sais et mon but n’est pas tant de le blesser que de lui faire comprendre qu’il s’engage sur la mauvaise direction ; tu vas avoir mal, Kieran et tu ne pourras pas dire que je ne t’ai pas prévenu. S’il suppose que le fait d’avoir suggéré l’idée implique nécessairement qu’il l’accompagne, je lui souligne qu’elle n’avait aucunement le droit de requérir sa présence simplement parce qu’elle veut toujours s’assurer que son emprise sur lui est aussi intact qu’au premier jour. Mais il l’accompagnera, Kieran, parce qu’il est ainsi malgré toutes mes réprimandes ; parce qu’il tend l’autre joue au lieu d’abandonner ceux qui lui font du mal.
Et il aurait dû la laisser avec ses idées noires prétendues simplement pour s’assurer de sa venue, tout comme il devrait la laisser avec l’idée qu’il s’épanouit dans une autre relation. Il n’est pas avec Ivy, pas au sens strict du terme – et peut-être même pas au sens imagé. Ils ne sont pas même amis, les propos de la jeune femme l’avait particulièrement affecté ce soir-là ; et peut-être que la raison derrière l’énonciation de cette vérité vise plus à lui faire réaliser que ni Eve, ni Ivy, n’auraient d’intérêt à s’intéresser à lui ; il est bien trop ridicule par rapport à elles, il est bien trop ridicule comparé à tout le monde. Comparé à Ezechiel, comparé à Martin, comparé à tous les autres qu’elles ont pu connaître. Personne ne voulait de lui avant Autumn, personne ne voudra de lui après ; c’est la seule certitude qu’il a, à cet instant. Oh, Kieran. Tu as tellement plus de qualités que tu ne veux le croire ; seulement elles ont tellement pointé du doigt tes défauts que tu es incapable de les mettre en avant. Il ravale sa salive par nervosité lorsque la main de la jeune femme se porte à sa joue, caressant celle-ci avec douceur tandis qu’elle s’interroge, bien trop tard. Ce n’est pas ça, le consentement, Eve. Et c’est valable pour toi aussi, Kieran, qui tend à accepter l’affection physique des autres parce que tu es supposé l’accepter ; parce que ça fait de toi un type ridicule si tu ne le fais pas. Il s’est persuadé que le fait d’être un homme ne nécessitait pas qu’on lui demande sa permission – et je sais aussi qu’il le regrette tous les jours. Eve est bien placée pour le savoir, pourtant. A-t-elle oublié toutes ces fois où tes muscles se tendent à son contact, où ton aisance, déjà peu développée, disparaît à chaque fois qu’elle initie un rapprochement ? Il n’aime pas ça, Eve et tu le sais très bien. Pourtant, il se laisse faire, par la force des choses, par obligation autant que par envie ; mais sa volonté de satisfaire les attentes d’autrui prime toujours sur les siennes et si Eve veut ce contact, qu’il en soit ainsi.
Je ne pensais pas que je pourrais lui reprocher d’autres choses ; et elle m’épate à chaque fois, derrière ses airs angéliques, Eve. C’est un démon déguisé en ange et il en fait les frais quand elle lui demande de partir. De qui tu te moques, exactement ? Une demi-heure avant, elle menaçait de se faire du mal en exprimant sa volonté de disparaître, et maintenant, il devrait partir ? Elle savait très bien ce qu’elle faisait depuis le début et il a foncé tête baissée dans le piège ; je ne devrais pas m’en étonner, mais ça n’en rend pas la chose plus facile. Pour lui, aussi, d’ailleurs, quand il comprend que c’est une énième manipulation – mais il ne lui rejettera jamais la faute, oh non, il préfère se flageller tout seul en insistant sur le fait que c’est un abruti complet.
« Quelle odieuse manipulatrice, je fais, hein ? » Il fronce les sourcils. Est-ce une attaque ? Il s’interroge, je le confirme – elle verbalise ce que je pense pour mieux t’amadouer, Kieran, tu ne devrais plus lui accorder le bénéfice du doute et pourtant c’est ce qu’il fait. Oui, Eve, tu es une odieuse manipulatrice. Et tu as de la chance que Kieran ne m’écoute pas assez pour le dire, car c’est tout ce que tu mérites d’entendre. Mais je la laisse s’exprimer, s’enfoncer devrais-je dire, alors que ses mots résonnent en Kieran ; probablement pas de la manière dont elle le voudrait, exactement comme je le voudrais. Oh. Voyez-vous ça, Madame se rappelle de tout ? C’est pour ça qu’elle a passé sous silence les attaques dont elle s’est rendue coupable, qu’elle n’a jamais voulu les admettre et qu’elle préfère prétendre que ce jeu n’a pas existé pour ne pas à avoir à assumer ses torts ? Belle stratégie, Eve. Cela fonctionne pour l’instant, mais crois-moi que le jour viendra où ce ne sera plus le cas. « Non, vrai-. » Vraiment, cette conversation ne doit pas avoir lieu ce soir. Mais là-aussi, elle décide pour toi, Kieran n’est-ce pas, lorsqu’elle pose son index sur tes lèvres pour te réduire au silence ? Tu as été pire qu’odieuse. Tu as été pire qu’injuste, Eve. Ce soir-là et les autres, mais ça, il ne le dira pas alors je le pense pour lui. Et ça te fait mal, Kieran, pas vrai ? D’avoir toutes ces idées en tête sans pouvoir les supprimer. De savoir qu’elles ne sont pas complètement fausses, aussi. Un fin sourire naît sur ses lèvres lorsqu’elle suggère de revenir en arrière ; oh Eve, il y a tellement plus que cette soirée à effacer. Fronçant les sourcils lorsqu’elle s’empare de sa main pour glisser celle-ci autour de son poignet, il relève les yeux vers elle dans l’attente d’une explication qui ne tarde pas.
Que je ne mens plus. Alors, elle l’a fait, elle-aussi. Elle a menti. Comme toutes les personnes que tu laisses entrer dans ta vie. Et je sais qu’il serait risible qu’il s’en offusque quand il est le premier à faire usage du mensonge ; mais il vise à se préserver de ceux des autres. Qu’en est-il de ceux d’Eve ? « Je t’ai menti quand j’ai dit que j’aurai pu tomber amoureuse de toi. En fait… » Elle n’aurait pas pu. Parce que personne ne le peut réellement, sauf Méduse, dans son esprit malade et brisé. Il n’y a qu’elle qui puisse l’aimer. Elle s’y prend mal, au point où il souffre constamment, mais elle est la seule à le voir. Pour ce qu’elle voudrait qu’il soit plus que pour ce qu’il est, certes, mais c’est mieux que rien pour Kieran.
Mais tu ne l’as jamais dit directement, Eve. Et tu l’as dit trop tard. Tu n’as jamais cessé de prétendre qu’il ne te voyait pas, jusqu’à sous-entendre qu’il était responsable de ta maladie, comment est-il censé te croire ? Mais, surtout, comment peux-tu la croire, Kieran ? Après tout ce qu’elle t’a fait ? Après tout ce qu’elle t’a fait croire, espérer ? Elle n’a pas choisi Ezechiel par sécurité, elle l’a choisi parce qu’elle le voulait, elle n’a jamais cessé de te dire à quel point il la voyait, à quel point elle était heureuse avec lui et que le bonheur qui lui apportait n’était rien en comparaison à celui que tu aurais pu lui l’apporter. Elle te l’a dit, elle n’avait pas de sentiments pour toi, contrairement à Ezechiel. Et elle le dit encore, ce second choix était mieux que le premier. Mieux que toi. Et je le sens qui se tend sans même que je n’aie besoin de dire grand-chose de plus. Je crois que tu commences à comprendre, Kieran, qu’il est temps de ne pas boire toutes ses paroles. Tu étais le premier choix ; et pourtant tu n’étais pas assez important. Je ne suis jamais assez important. Elle sanglote, il voudrait la réconforter, mais je l’en empêche. Ecoute-la, Kieran, entends ses mots et fais-toi ta propre opinion, qui n’émane peut-être pas de moi, mais surtout, qui n’émane pas d’elle, je t’en supplie. « Je l’ai gardé. » Je l’ai gardé et il m’a fait mal, Eve. Parce qu’elle lui a fait croire des choses qu’elle ne lui a pas offert, jusqu’au point de prétendre que ce carnet n’avait jamais existé. « Je croyais... » Je croyais que ça voulait dire quelque chose et tu as tout détruit. « Rien. » Je ne croyais rien. Rien, oublie que j’ai parlé. Il ne sait plus ce qu’il est supposé dire, Kieran, alors que la douleur du rejet vécu à l’anniversaire de la jeune femme est encore bien présente, de tous ses espoirs qu’elle avait fait naître en lui pour mieux les détruire par la suite en les ignorants.
Non, Eve, tu te trompes. Tu as bien plus joué avec lui qu’avec toi-même, parce que toi, tu y trouvais ton compte dans cette relation malsaine. Tu trouvais du plaisir dans les bras d’Ezechiel et tu recherchais celui des mots de Kieran. Tu as eu les deux et lui, il n’a rien eu si ce n’est le cœur brisé que tu lui as rendu après l’avoir piétiné. « C’était mon anniversaire aussi, tu sais. » Ce jour de juillet et pourtant, elle n’avait pas hésité à évoquer cette belle relation avec Ezechiel et sa maladie. Tu n’as pas plus d’importance pour elle aujourd’hui que tu n’en avais ce jour-là, Kieran, il faut que tu l’intègres. C’était ton anniversaire aussi et à aucun moment elle ne l’a pris en compte, alors pourquoi aurait-elle dû avoir autant d’attention pour celui d’Ezechiel, si l’on suit sa logique, en supposant qu’elle n’a jamais cessé d’aimer Kieran ? Rien de tout ce qu’elle peut dire ne résonne à mes oreilles et semble cohérent – même s’il en va de l’inverse pour Kieran. Ce dernier fronce les sourcils lorsque les paroles d’Eve continuent à contredire ce dont elle a voulait le persuader il n’y a pas si longtemps. Elle se sentait invisible en sa présence, elle voulait disparaître et désormais il est le seul à l’avoir aidé à ne pas se sentir seule et à s’engager dans un processus de guérison. C’est à ne rien y comprendre. « Et il faut que tu continues ainsi. » Il se permet de verbaliser ; et s’il veut lui laisser la possibilité de s’exprimer, il veut néanmoins applaudir ses efforts et qu’elle continue ainsi ; parce que le bonheur d’autrui reste sa priorité. « Mais tu ne souffrais pas avec lui, tu me l’as dit, Eve. » Il exprime, non pas pour enfoncer le couteau dans la plaie, simplement pour lui souligner qu’il ne sait pas s’il peut lui faire confiance. Je connais la réponse, Kieran, mais je crois aussi que, pour une fois, je dois te laisser faire tes propres expériences. Peut-être que tu m’écouteras enfin, quand ce sera le cas. Elle ne souffrait pas avec Ezechiel, alors pourquoi voudrait-elle de Kieran qui est responsable de ses plus grandes blessures ?
« Je demande pas une autre chance. Je demande pas un happy end, j’ai compris que je n’y aurai jamais droit. Je veux juste… je ne sais pas ce que je veux. Enfin si, je sais mais je n’ai aucun droit à y prétendre. » Tu as un an de retard, Eve. Et elle se trompe, la Zimmer. Elle n’a jamais su ce qu’elle voulait. Il se pince les lèvres, son regard qui se perd au sol alors qu’il ignore que répondre à cela. Il voudrait lui dire qu’il sait, lui-aussi, ce qu’il veut. Mais qu’il sait aussi à quel point ce serait douloureux – et il n’est pas prêt à repasser par-là malgré qu’il en meurt d’envie. Eve n’a pas eu à panser ses blessures pendant des mois, c’était moi ; et je suis heureux qu’il m’écoute, qu’il ait cette loyauté pour s’empêcher de céder aux pulsions qui l’animent depuis le début, depuis que cette attraction est réelle.
Et tu n’as jamais été le premier choix, Kieran. Ni le sien, ni celui d’autres ; tu es le premier uniquement quand les autres options ont échoué et Eve ne fait pas exception à la règle. Ezechiel a été relégué au rang de dernier choix, t’érigeant au premier ; mais tu ne l’étais pas au début et tu dois t’en souvenir. « Tous les autres... » Que je lui fais répéter alors qu’un sourire triste s’affiche sur ses lèvres. Il est comme tous les autres ; elle avait peur de lui, elle avait peur de sa réaction lorsqu’elle a voulu lui annoncer son prochain déménagement. Il est à l’image de tous ces hommes auxquels il ne pensait pourtant jamais arriver à la cheville et maintenant qu’il en a la confirmation, il ne sait pas s’il doit en être heureux ou terrifié. « Dis pas ça. » Qu’il murmure en fermant les yeux un bref instant, ravalant la larme qui tente de se frayer un chemin sur sa joue ; c’est trop pour un seul soir, toutes ces choses qu’il n’aurait jamais voulu entendre, toutes ces choses sur lesquelles il a un avis qu’il s’empêche d’exprimer. Elle ne peut pas l’avoir rejeté, encore et encore, pour lui dire aujourd’hui qu’elle aurait dû plutôt l’embrasser. Il ne demandait que ça, mais par respect pour son couple, il ne l’a jamais exprimé – de la même manière qu’il n’a jamais souligné tous les espoirs qu’il s’était fait le jour de son anniversaire. « T’as pas le droit de dire ça. » Il répète alors que son front vient se poser doucement sur celui de la jeune femme, les yeux fermés un bref instant, imaginant ce que pourrait être ce moment auquel il n’a jamais cessé de penser. Mais elle n’a pas le droit de dire ça, autant qu’il ne peut pas céder à cet appel, malgré tout son être qui ne demande que ça.
« Tu me connais pas. » Il souligne en ravalant sa salive, tendu, un nœud dans la gorge alors qu’il fuit son regard. Mais qui te connais, Kieran, dans le fond ? Toi-même tu es incapable de répondre à cette question. « Si tu penses que je-je n’ai plus de sentiments pour toi ou que... que je peux te briser le cœur, tu me connais pas, Eve. » Et il le réalise, rendant plus aisé de s’épancher, même s’il aurait voulu tenir le discours inverse, celui qu’elle voudrait entendre. Continue, Kieran. Je sens que tu es sur la bonne voie. « Mais tu es saoule et je ne veux pas profiter de la situation. » La plus belle des déclarations n’enlèvera pas ce fait ; et pour illustrer ses propos, il se permet de reculer et séparer leurs mains. « Et... » Il s’arrête, incapable de dire ce qu’il a sur le cœur. Allons, Kieran. C’est sur le bout de tes lèvres et ça a besoin de sortir, alors dis-le. Dis-lui à quel point elle t’a blessé, à quel point tu la détestes autant que tu l’aimes.
« La dernière fois que tu l’étais, tu as ensuite prétendu que cette conversation n’existait pas. » Ou du moins, qu’elle ne devait pas être évoquée puisque s’étant déroulé durant ce jeu qu’elle préfère oublier. Mais il n’oublie pas, lui. « La dernière fois que nous nous sommes vus, tu as prétendu que ce carnet, que ces sms, n’existaient pas. » Il se mord la lèvre ; il pourrait lui dire à quel point il avait espéré que ce jour serait leur jour, alors que ça n’avait été qu’Eve qui a piétiné son cœur, une fois de plus. « Volontairement ou non, tu m’as effacé, Eve. » De sa vie, de ses pensées, de ses sentiments ; tout le démontre, peu importe si sa déclaration tente de tout réanimer. « Et je... j’arrive pas à m’empêcher de penser que, demain, tu le feras aussi. » Tu auras trop honte, peut-être, tu seras désolée, j’en sais rien, mais tu disparaîtras.
Il relève les yeux sur elle, sur ses yeux rougis, ses sanglots, et son cœur se brise encore un peu plus de contribuer à cet état, Mais ses prunelles se portent aussi sur sa blessure qu’il désigne d’un signe de la tête. « Mais... nous sommes encore aujourd’hui, pas vrai ? Alors pour l’heure, on va aller à l’hôpital, d’accord ? » Il souligne avec un fin sourire. Il ne sait pas où ils en seront demain, mais ce soir ils sont encore tous les deux. Et il l’a promis : « Et je vais rester avec toi. » Il lui assure, sa main qui se tend pour qu’elle s’en saisisse et lui en donne la preuve qu’elle prend enfin soin d’elle comme elle le devrait. Peut-être qu’un jour, lui aussi arrivera à prendre soin de lui, mais pour l’heure il la laisse encore le briser un peu plus.
C’est facile de briser un cœur. Tout comme c’est facile d’étouffer ses sentiments. J’en savais quelque chose. Je le savais mieux que personne et pour cause que j’ai fait les deux. J’ai effacé mes sentiments non pas parce que j’aimais plus Ezechiel, mais parce que je savais que je ne méritais pas Kieran. Dès l’instant où j’ai vu son expression, où mon regard a rencontré le sien, j’ai su que nous ne serions jamais un nous. Que la chose serait impossible entre nous pour cause d’une ressemblance. Je n’ai pensé qu’à moi durant les premiers temps et ce n’est que récemment que je me suis posée pour réfléchir. Je me suis interdit de parler de mes sentiments auprès de lui pour cause que j’ai été trop nocive avec lui. J’avais besoin de mettre ma tête au clair et j’avais surtout besoin de voir les choses sous un autre angle. Et si cela avait été l’inverse ? Et si Kieran lui avait ressemblé ? Non pas à Zeke, non pas à Pierre mais à Jacob. Et si en posant mes yeux sur lui, j’y avais trouvé le visage de mon défunt mari, comment aurais-je réagi ? Après tout, il suffisait de voir ce qu’il s’était passé ensuite. Car dans cette peur de refaire ma vie, de voir autrement, de voir plus loin, je me suis effacée. Je nous ai effacé de la matrice. Nous reléguant au stade de connaissances. Nous n’avons jamais été incapables de devenir amis car j’attendais plus. Je voulais plus. J’aurai voulu égoïstement qu’il se batte pour moi alors qu’il portait encore les séquelles de sa séparation d’avec Autumn. J’aurai voulu qu’il me montre que j’étais une femme et non plus une mère. Non plus une petite chose fragile, une personne malade. Je me suis haïe d’avoir rejetée tous mes démons au visage de Kieran. Je me suis détestée de bien des manières. Au point où mon corps portait encore les stigmates de ma folie. De cette anorexie dans laquelle je m’étais plongée à l’adolescence alors qu’on m’avait reléguée au rang d’invisible. De mes récents troubles à cause d’un surplus dans ma vie. Et ce n’était pas le bon moment. Cela ne le serait jamais. Car je ne méritais pas Kieran. Et que cela n’arriverait jamais.
J’en ai encore plus conscience alors que je dois lever la tête si haut pour le regarder. Alors que je dois travailler de concert avec son regard. et que je m’efforçai de lire en lui. de passer outre la personne que j’étais. De passer outre le fait que je n’étais qu’égocentrisme. Que devait-il voir alors que je portais cette robe trop lourde ? Que mon visage était rougi par les larmes et cerné par mes insomnies ? Que ma main gouttait à même le sol à cause de ma bêtise. Bêtise qui n’en était pas une, je vous le concède. Pour cause que je l’avais fait exprès. J’avais jeté ce téléphone contre le mur avec hargne, j’avais enfoncé ma chair dans le coupant des débris dans le but de ressentir quelque chose. J’avais envoyé ce sms. J’aurai pu m’abstenir. Non, j’aurai dû m’abstenir. J’aurai dû stopper tout ceci il y a bien longtemps. Quitter cette terre maudite. Le quitter lui pour lui donner une chance d’être heureux. De ne plus m’avoir dans sa vie. Je me suis rendue compte au travers de me séjours à l’hopital, au fur et à mesure que je me drapais dans ma solitude, que j’étais néfaste pour tout le monde. Une belle menteuse. J’avais menti sur tout à presque tout le monde. Sur mon état qui ne cessait de jouer au yoyo car un coup, j’allais bien et le lendemain, je pouvais donner l’illusion de vouloir sauter d’un pont. Ensuite, de mes émotions que je ne contrôlais pas. Régie par cette impulsivité qui découlait sur la présence d’un Kieran qui ne comprenait rien à la situation. Car en somme, je l’avais maintenu à l’écart à cause de sa relation avec Ivy. Pour qu’il puisse trouver le bonheur dont je serai à jamais dépourvue. Mon bonheur s’était envolé trois ans auparavant. Je me rappelai encore de la sensation, je me rappelai encore de ce que j’avais ressenti. De ce sentiment de solitude qui ne me quittait jamais. Quelque chose s’est définitivement brisé en moi. Et en plus récemment dans les bras de Caleb alors que je me suis rendue compte que je n’avais pas fait mon deuil. J’aimais Kieran. Mon amour était pur, sincère. Mais je l’avais terni à cause de mes trop nombreuses blessures. Par cette peur qu’il fasse comme lui. Qu’il s’en aille. De manière permanente. Que je ne puisse jamais le revoir. Que je ne puisse pas lui dire au revoir. J’avais trahi Jacob de bien des manières. Je l’avais fait également à la personne qui tentait de soigner ma main alors que mes sanglots ne voulaient pas sortir. Que j’aurai aimé tout verbaliser. Une fois, une fois seulement, je me suis autorisée à craquer en sa présence. A lui parler de Jacob, de ce que j’avais ressenti, de ce que j’avais vécu. Il méritait mieux. Il méritait quelqu’un de sain, quelqu’un qui l’aimerait sans avoir peur de démons, sans avoir peur de vivre quelque chose de sincère pour la première fois. Tout ce que je n’ai pas su lui offrir. Et le saurai-je un jour ?
« Je t’assure, Eve, c’est pas nécessaire. » Je fermai les yeux, la tête baissée alors qu’il avait toujours sa main dans la mienne. Je le réprimais. Ce cri d’animal blessé qui menaçait de bondir entre nous. Je la réprimais cette douleur. « Je… Je te mérite pas, Kieran. » Ma voix était tremblotante. Certains pourraient y avoir une sensation de l’amadouer. Mais je trouvais la force physique de refermer ma main blessée sur ses doigts pendant quelques secondes avant de la relâcher. Si tu savais à quel point je suis navrée. Si tu avais à quel point je m’en veux de ce que je nous ai fait. Non, de ce que je t’ai fait. Car ai-je un jour compté ? Je n’en avais pas trop l’impression. « Tu… Tu mérites d’être heureux. Vraiment. » Alors que moi non. J’y avais goûté et il s’était envolé. Jamais je n’aurai plus l’occasion de le toucher du bout des doigts alors que ceux-ci cherchaient désespérément ton contact. Que j’en avais besoin. Mais avoir besoin et le mériter est deux choses n’est-ce pas ? « Oui, bien sûr. » Mon dos touche le mur avec fracas alors que mes yeux semblent toujours perdus dans le vague. Dans ses souvenirs trop douloureux. Je ne parvenais pas à m’y soustraire. Leur emprise était trop forte. Elle était trop forte pour que je parvienne à ne pas les laisser noircir mon cœur, mon corps. Je l’avais dit cent fois à Caleb. Cela aurait dû être moi. J’aurai dû être celle qui aurait dû disparaitre pour cause que Jacob était bien meilleur. Que traverser cet enfer sans lui, sans eux, était trop douloureux. Que j’aurai aimé ne pas les mettre sur un pied d’égalité. Mais elle était là l’abominable fatalité. Que Kieran eût fini par effacer mon mari dans mon palpitant, dans mon esprit au point où cela n’était plus la voix de ma moitié qui me réconfortait. Mais bel et bien la sienne. Que comme une lâche, j’avais fui. J’avais fui au plus loin, le plus vite, le plus ardemment possible dans les bras d’un autre.
N’allez pas croire que je n’ai pas aimé Ezechiel. C’était différent. Moins intense, certes. Mais différent. Nous avons eu nos bons moments, comme les mauvais. Mes doigts se posèrent sur la bouche de Kieran pour que je puisse lui dire. Lui dire tout ce que je pensais. Car l’alcool me donnait ce genre de courage n’est-ce pas ? « Je l’ai gardé. » Mes yeux ne cessèrent de faire la navette alors que la voix douce de l’Australien se fraya un chemin dans les ténèbres qui m’entouraient ce soir. « Je croyais... » Je fermai les yeux, consciente de savoir par quoi finirait cette phrase ? Mes dents vinrent pincer ma lèvre inférieure avec force alors que je serrai le poing. Que la douleur semblait atténuer un peu celle de mon cœur. Que je m’attendais à ce qu’il le verbalise. « Rien. » Mes épaules restèrent tendues alors que je vins à déglutir et que ma main vacante se posa dans sa nuque. « Dis-le. Qu’est-ce que tu croyais ? » Même si cela doit me faire souffrir. Même si cela doit me renvoyer à cette image odieuse que j’avais déjà de moi. Je pensais pour ma part que tu oserais me dire ce que tu ressentais pour moi. Que tu en viendrais à me demander de le quitter pour toi. Et le pire, l’abominable vérité est que je l’aurai sans doute fait. Mais notre relation n’aurait pas reposé sur des bases solides. Que si jamais dans une dispute j’aurai fini par te jeter ce genre de mots au visage. Qu’il ne faut pas quitter une personne pour se mettre avec une autre.
« C’était mon anniversaire aussi, tu sais. » Je m’autorisai à déglutir. Je sais, bien sûr que je le sais. Que c’était le sien. « Et je l’ai gâché. Comme notre première rencontre, comme ce soir-là, ton anniversaire, le mien et… » Cette fois-ci, je ne pus le réprimer alors que je fermais les yeux et qu’un atroce sanglot sortit d’entre mes lèvres. « Ce soir. J’ai encore gâché ce soir. » Un vrai fiasco n’est-ce pas ? Quelle aberration de la nature fais-je. Et encore une fois, j’ai envie de lui dire que cela aurait dû être moi. mais je ne peux pas faire reposer ça sur ses épaules. Pas comme je l’ai fait avec mon anorexie. « Je suis odieuse. Non c’est vrai. Je t’ai reproché mon anorexie et ma lâcheté. Je suis anorexique depuis… je ne sais même plus depuis quand. C’est ni de ta faute, ni de celle de Jacob, mais la mienne. Je suis un monstre. » Pitoyable, n’est-ce pas, la propre image que j’avais de moi ? Que cette fois-ci, tu pouvais voir les fêlures de mon existence ? Je ne voulais pas instaurer une quelconque pitié entre nous. Il était bien trop tard pour ça. « Et il faut que tu continues ainsi. » Je hochai la tête à l’affirmative. « Je te l’ai promis, non ? » Même si je n’avais pas toujours tenu mes promesses. Que je n’en avais tenu aucune à vrai dire. « Mais tu ne souffrais pas avec lui, tu me l’as dit, Eve. » J’eus un soupir alors que je fermai les yeux. « Je n’ai pas envie de parler de ma relation avec Ezechiel, ce soir. C’est de la notre dont il s’agit. Mais si ça peut te rassurer, j’ai souffert. » Et je souffrais encore de l’avoir manipulé ainsi. D’avoir fait croire à ce pauvre homme qu’il pourrait être le seul alors que je ne lui faisais pas confiance. Et que lui non plus. Que l’image avait fini par se briser et m’avait renvoyé à mon exil. Cette errance solitaire que je me suis choisie. . « Tous les autres... » Je prends conscience que je me suis mal exprimée. Alors, je prends une profonde inspiration. « Kieran, toutes les personnes que j’ai aimées, elles sont mortes. » Mais ça, je lui avais dit. Je lui avais dit un million de fois. Que je me pensais maudite. « Victoria, ma mère, Ja… » Je déglutis avec difficulté alors que ma poigne vint se raffermir pour essayer de m’ancrer dans cette réalité. « Au début, j’avais peur que tu sois comme Pierre. Au tout début. Mais après ce soir-là, celui où j’ai commencé à éprouver des sentiments sincères, je me suis rendue compte que… que… que.. » Je baissais la tête, essayant de reprendre ma respiration. « Sa voix s’est effacée. J’ai eu l’impression de le trahir car quand je faisais des crises, quand j’avais peur, c’était la tienne qui me réconfortait. » Et elles étaient là, les intenses fêlures. La douleur que j’aurai voulu hurler et qui régissait toujours mon cœur. Qui régissait chacun de mes gestes depuis trois ans. « Je me suis rendue compte que je pouvais pas… je pouvais pas endurer ça une nouvelle fois. Je pouvais pas perdre de nouveau quelqu’un que j’aimais. Que tu serais mieux sans moi. » Qu’il serait en sécurité au moins. Qu’il n’aurait plus à travauller de concert avec une malade mentale. Ma respiration se fit plus sifflante alors que mon regard se perdit dans le vide et ma poigne se relâcha.
« T’as pas le droit de dire ça. » Son front vient doucement se coller contre le mien, alors que je ferme les yeux aussi. Que je tente de caler ma respiration sur la sienne. Doucement, sûrement. Je pourrais tenter de briser la barrière qu’il y avait entre nous. Ma voix s’élève, encore rauque. Encore un peu incertaine. « Je ne veux pas que cela se fasse comme ça. J’en ai envie, maintenant. Comme à chaque fois que je suis en ta présence. Mais pas comme ça. » pas dans les larmes, pas alors que j’avais bu. Pas alors que j’étais blessée. Sans me détacher de lui, je m’autorisai à ouvrir les yeux. Je pouvais sentir son souffle contre le mien. C’était tentant, trop tentant. Mais à la place, je laissais mes lèvres se perdre sur sa mâchoire avec tendresse. « Tu me connais pas. » Je le laisse s’éloigner doucement, ne le regardant. Fermant les yeux et me laissant bercer par sa voix. Car dans le fond, lui non plus, ne me connaissait pas. Nous n’étions que deux étrangers l’un pour l’autre, unis dans le malheur. « Si tu penses que je-je n’ai plus de sentiments pour toi ou que... que je peux te briser le cœur, tu me connais pas, Eve. » Comment le pourrais-je ? Après tout, il ne m’en avait jamais vraiment fait part. de ses sentiments pour moi. Je pourrais lui jeter ce reproche en plein visage mais à la place, je décide de garder le silence. « Mais tu es saoule et je ne veux pas profiter de la situation. » Je pensais avoir démontré que j’avais dessaoulé mais visiblement. Après tout, ce n’était pas avec le peu d’alcool que j’avais ingéré que cela serait difficile d’évacuer de mon corps. « Je viens de te le dire, si ça doit se faire. Cela ne se fera pas comme ça. » Pas alors que je venais de me couper la main, que mon appartement était en désordre. Que moi-même, je ne ressemblais à rien. Je voulais me faire belle, m’apprêter, lui faire quelques sourires. Flirter pour de bon. Et voir si une véritable connexion serait possible entre nous. « La dernière fois que tu l’étais, tu as ensuite prétendu que cette conversation n’existait pas. » Je m’autorisai à hocher la tête. Il avait raison. Bien sûr qu’il avait raison. « La dernière fois que nous nous sommes vus, tu as prétendu que ce carnet, que ces sms, n’existaient pas. » Je m’autorisai à lever un regard vers lui alors que mon cœur se serra devant sa détresse. « La dernière fois, j’ai cru que tu étais en couple. Et crois-moi, ça m’a fait un mal de chien. » Ce qui était l’entière vérité. Ne lui avais-je pas dit dans chacun de mes sms, dans chacun de nos derniers échanges, qu’il devait être avec sa copine plutôt qu’avec moi ? « Volontairement ou non, tu m’as effacé, Eve. » Et là-dessus, il avait tout faux. « Et je... j’arrive pas à m’empêcher de penser que, demain, tu le feras aussi. » Nos regards s’accrochent. Alors que je semble plus déterminée que jamais. « Non. » Bien sûr que non. « Je n’ai pas l’intention d’effacer ça. » Je le laisse me tendre la main. Main que je saisis. Mes doigts caressent les siens avec une infime lenteur avant de les saisir. « Je dois te montrer quelque chose avant. Je dois te montrer que tu as tort. Et que toi non plus tu ne me connais pas. » Me remettant debout, je rabats la lourde étoffe sur mes cuisses laiteuses sans me défaire de sa poigne.
Mon pas est plus assuré, ayant eu le temps de laisser disparaître les vapeurs d’alcool. Je devrais d’ailleurs songer à me changer puisque la robe était désormais foutue mais ce n’était qu’un détail. L’entrainant à ma suite d’un pas encore quelque peu vacillant mais je n’ai jamais eu un bon équilibre. « Première chose à savoir sur moi, je ne tiens pas sur mes deux jambes. Une vraie calamité. » Me mettant sur la pointe des pieds, me voilà à sautiller sur place devant la porte. Mes doigts se referment sur la clé. Je m’autorisai à lui donner un coup d’œil à la dérobée. « Mais j’y travaille. » Je glissais le tout dans la serrure avant de l’ouvrir sur le lieu où je jouais, où je m’entrainais aussi. Mais faisant fi de tout ça, je me dirige vers l’endroit où je rangeai tous mes dessins et où j’avais enfoui certains d’entre eux. Ma main blessée restant en retrait, je dus lâcher celle de Kieran avant de sortir le portfolio en cuir que j’avais acheté avec Alex. Qui était plein. Plein de dessins, de dessins datés. D’esquisses faites à chaque retour. Que les larmes avaient sans doute tâché. Je lui tendis. « Regarde les dates. Le lendemain de notre rencontre, de ton anniversaire, du mien et la première fois. » J’en sortis l’esquisse alors qu’on voyait une jeune fille devant un écran, en train de toucher ce dernier avec un homme derrière. « Le 26 février 2020. » Je reculai cependant d’un pas, pour le laisser fouiller. Pour qu’il constate que je n’avais rien inventé. Que cela n’était pas sorti d’un chapeau. « C’est ce jour-là que je… » Je marquai un temps d’arrêt avant de baisser la tête. « Que je suis tombée amoureuse de toi. » Je serrai la mâchoire avant de me tourner vers l’ordinateur. « J’ai streamé tous nos moments. Toutes nos parties. Je t’ai écrit des millions de lettres. » Je marquai un temps d’arrêt sur les touches du clavier avant de tapoter le code. Avant de choisir une vidéo au hasard et que nos voix se mêlent. Que mon image s’infiltre avec la sienne, que nos sourires se mêlent, que nos rires se chevauchent. Que c’étaient les moments où nous étions heureux. « Je suis tombée amoureuse de toi le 26 février et jamais je n’oublierai cette date. Parce que c’est à cette date qu’il… qu’il est parti. Que ce jour-là, je me suis connectée, que tu m’as parlé. Le fond de la conversation n’est pas important. Mais cela faisait deux ans que je n’avais pas ri. Cela faisait deux ans que je n’avais pas souri. Et j’ai fait tout ça grâce à toi. Alors oui, je suis infâme parce que j’ai eu peur. Mais je t’aime, Kieran. Et c’est bien parce que je t’aime que je ne te saute pas dessus. Que je ne t’embrasse pas parce que je ne veux pas que cela se fasse comme ça. Mais demain, je ne reviendrai pas dessus. Ni après-demain. Je ne vais pas reprendre ce que je viens de te dire. » Je séchai mes larmes avant de rester à distance pour lui laisser le temps de digérer. Je n’avais aucun droit d’y prétendre. Mais je voulais qu’il ait tous les éléments. « La pochette est ton cadeau de noël. Je veux que tu y mettes tes dessins, les ébauches de ton comics. Car j’ai vu ton talent et je crois en toi. » Je me mordillai la lèvre inférieure si fort à presque m’en faire saigner. Me collant contre le mur, faisant fi de la barre qui se tenait entre nous. De ce secret que je venais de dévoiler mais je lui en parlerais plus tard. Car pour le moment, il n’y avait que nous qui comptait Un nous qui n’existerait jamais. Mais qui avait connu quelques prémices. Et que je voulais que la nouvelle année commence autrement.
Kieran Halstead
les cicatrices de la mémoire
ÂGE : trente-cinq (14.07). aïe. SURNOM : « kiki » (couché, grrrrhhhh). STATUT : c’est bien aussi la solitude, on s’y habitue (non, pas du tout #help). MÉTIER : illustrateur (fauché) en freelance et prof (dépité) d’arts visuels. LOGEMENT : #18 james street, fortitude valley, avec cesar (le coloc) et waterproof (le corgi). POSTS : 4054 POINTS : 200
TW IN RP : dépression, pensées suicidaires, tentative de suicide, relation toxique, maltraitance, abus physiques et psychologiques, harcèlement scolaire, dépréciation, troubles anxieux, distorsion corporelle, mention d'agression physique (j'adapte mes rps au besoin, contactez-moi ♡). ORIENTATION : J'aime les jolies filles. PETIT PLUS : placé en foyer, très proche de la dernière famille qui s’est occupée de lui ≈ souffre néanmoins de cette absence d’identité propre ≈ réservé, maladroit, optimiste, vit dans un monde imaginaire ≈ a quitté sa fiancée il y a deux ans, soulagé malgré sa phobie de la solitude ≈ essaie de reprendre confiance en lui, de renouer avec ses proches, de retrouver sa place ≈ préfère la compagnie des pop et des jeux vidéo aux humains ≈ du talent au bout des doigts, aucune motivation d’en faire quelque chose ≈ trop mou, trop paresseux, trop paumé ≈ a fait une tentative de suicide fin novembre 2022. CODE COULEUR : kieran bafouille en rosybrown. RPs EN COURS : halstay #12, #13 & ua #3 (parents) ⊹ i hope your ghost will haunt me, i hope i hear you calling my name at 3am. 'cause honey, i love you dearly and i cannot bear you leaving again, not again. oh, i hope your ghost will haunt me 'til the end.
spencer #5 ⊹ i've been begging, hope you're listening. i've done my wrongs but i'm someone different.
ally ⊹ oh, if i can take something to make me feel better than i'm feeling now and everything else will work itself out.
(13/06 - vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bon ou de mauvais compte. moi, si je devais résumer le rp aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres) › ginny (fb) › cecilia › shiloh › wild › alfly #17 (ua) › danaë › olive #2 › greta #2 RPs EN ATTENTE : flora #3 RPs TERMINÉS :
kieyer ⊹ close your eyes and think of me and soon i will be there to brighten up even your darkest night. you just call out my name and you know wherever i am i'll come running, to see you again.
« Je… Je te mérite pas, Kieran. » C’est au moins un aspect sur lequel nous sommes d’accord, Zimmer. Tu ne mérites pas Kieran, pas plus qu’il ne mérite d’être attendri par ta voix tremblotante et tes yeux mouillés. Pourtant, c’est bien ce qu’il se passe alors que sa tête se penche légèrement sous le poids de sa désolation. Il aimerait tellement l’aider, il voudrait tellement la rendre heureuse ; mais tu dois te débarrasser de ce syndrome du sauveur que tu traînes dans chacune de tes relations, Kieran. Et s’il y a une voix à écouter, ce n’est certainement pas celle de la blonde qui a trop souvent joué avec ton cœur ; as-tu déjà oublié que c’est moi qui tente, à chaque fois, de le réparer ? Et tout réside dans le fait que je tente et non que j’y arrive ; son cœur a trop souvent été brisé pour prétendre retrouver son état initial. Mais je peux le panser à défaut de le guérir – quand Eve continue à l’écrabouiller, encore et encore, alors que Méduse avait pourtant fait de son mieux pour qu’aucune bribe de son palpitant ne survive à son passage. Quelques miettes subsistent, sur lesquelles l’allemande s’est fait un plaisir de danser, d’étaler son bonheur pendant de trop longs mois quand il se complaisait dans le malheur de l’avoir perdue, de ne jamais être en mesure d’être suffisamment bon pour elle, quand elle se vantait de son histoire avec Ezechiel. « Tu… Tu mérites d’être heureux. Vraiment. » Et bien sûr qu’il le mérite, Zimmer et j’ose espérer que la façon dont tu le formules traduit de ta prise de conscience quant à cette fatalité : il ne le sera que lorsque tu seras loin de lui. Et s’il te veut encore dans sa vie, crois-moi que je ne partage pas tous ses bons sentiments et que tu finiras pas disparaître sous mon emprise. C’est bien toi qui en a sur lui pour l’heure, mais les rôles sont voués à être échangés ; tu es vouée à l’abandonner encore une fois, comme tu l’as déjà fait à plusieurs reprises, alors je sais qu’il ne s’agit que d’une question de temps avant que ce soit à nouveau le cas et que l’ordre des choses se rétablisse. Un ordre qu’il ne tolère pas ; pourtant l’idée est ancrée en lui et je ne suis pas le seul fautif. N’oublions pas que nos pensées se mêlent et se dissocient, mais partent pourtant de la même base. S’il perçoit cette perspective, si son cœur se serre à celle-ci, c’est bien parce qu’il a autant conscience que moi que l’adage jamais deux sans trois pourrait parfaitement se vérifier avec les sentiments d’Eve. Qu’elle est revenue à lui aujourd’hui, mais que dès le lendemain, il ne sera plus rien pour elle, pas plus qu’il n’a l’impression de l’avoir été par le passé. Et ce n’est pas ça, le bonheur, Kieran. Ce n’est pas ça d’être heureux et oui, tu mérites mieux. Tellement mieux, tellement plus que ce que cette femme ne pourra jamais t’offrir – mais pour cela, il faudrait que tu puisses y croire. Et d’ici que ce soit le cas, tu accepteras ce qu’on veut bien te donner, peu importe si ça fait mal, peu importe si cela maltraite toujours plus ton psychisme déjà bien fragilisé et piétine ton cœur bientôt inexistant ; c’est ce que tu mérites, tu t’en es convaincu, malgré toutes mes belles paroles visant à attester du contraire. Alors oui, en ce sens, Eve te mérite peut-être et c’est le seul cas de figure où je le reconnaîtrai. Parce que reconnaître tes sentiments les concrétisent toujours plus et ça, je ne le veux pas. Pas plus que toi, si tu étais capable d’admettre tes opinions et pas uniquement de les dissimuler derrière les actes dictés par les autres.
Comme le fait de l’accompagner à l’hôpital, alors qu’elle ne t’a jamais accompagné nulle part, pas vrai ? Elle n’a jamais été là pour toi et tu persistes à l’être pour elle. Elle y arrive très bien, la manipulatrice, à obtenir ce qu’elle veut de toi. Mais tu ne m’écoutes pas, tu refuses de le faire, trop accaparé par ce contact perdu avec ses doigts, autant que ses yeux toujours plus rougis dans lesquels tu n’arrives pas à lire. Ce serait tellement plus facile de savoir ce que pensent les autres, d’avoir accès à leur subconscient comme tu as accès à moi, ce serait tellement moins douloureux d’avoir des indicateurs de leurs véritables intentions et pas d’avoir seulement à croire celles qu’ils verbalisent. Celles d’Eve sont honorables, des belles promesses auxquelles tu voudrais croire – auxquelles tu crois puisque tu ne peux pas me duper – mais il y a toujours cette barrière que tu n’arrives pas à outrepasser, celle qui te permettrait d’avoir pleinement confiance en elle comme tu avais pu avoir confiance en elle au départ. Avant qu’elle brise ton cœur à Race of Australia, avant qu’elle le fasse une nouvelle fois durant ton anniversaire puis au sien. Finalement, l’adage s’est réalisé, pourquoi devrait-il y avoir une quatrième fois ? Et les pensées de Kieran vont toujours à l’encontre des miennes, lorsqu’il y voit une issue qui lui serait belle, alors que je persiste à ne voir que la tragédie dans celle pour laquelle il veut opter. Tu ne peux pas lui faire confiance. Ce carnet qu’il a conservé parmi d’autres souvenirs en est la preuve ; dans celui-ci se lisait l’histoire qui aurait pu être la leur, celle qu’il aurait voulu voir se réaliser et qu’elle avait oubliée dès leur rencontre suivante. Leur vie, même imaginée, n’était pas en mesure d’exister pour elle, alors qu’il avait cru à tant de choses. Tu te fais toujours des films. C’est l’idée qui l’avait par la suite persécuté, celle avec laquelle j’ai dû batailler des semaines durant pour qu’il veuille m’écouter quant au fait que, si sa personnalité est naïve et peut justifier de l’induire en erreur, les éléments démontraient de sa maîtrise du sujet : il n’était pas totalement à côté, pour une fois et il n’avait pas à s’en vouloir d’avoir cru à des promesses qui ne se sont jamais réalisées. Cela ne fait pas de toi un forceur, Kieran, pas plus que cela ne fait de toi quelqu’un de mauvais : malgré la connaissance de ce carnet, malgré les espoirs qu’il a pu animer en toi, tu n’as jamais voulu interférer dans sa relation avec son géant. « Dis-le. Qu’est-ce que tu croyais ? » Il relève les yeux sur elle et il se mord la lèvre, tandis que j’hésite quant à la conduite à adopter. Lui mentir serait approprié et serait exactement ce qu’elle mérite. Lui dire la vérité est exactement ce qu’elle attend ; en ce sens la solution semble toute trouvée, mais c’est sans compter sur Kieran qui hésite, qui me fait hésiter. « Que ça voulait dire quelque chose. » Il finit par admettre, un rire nerveux au bout des lèvres ; qu’il a été stupide, encore une fois, Kieran, mais qui s’en étonne encore ? Je serre son cœur face à cette dépréciation qui n’a pas plus de sens aujourd’hui qu’elle n’en a par le passé ; tu mérites mieux, Kieran. Mieux que le traitement qu’elle t’inflige, mieux que celui que tu t’infliges toi-même. Et j’anticipe la réponse de la jeune femme, je commence à la connaître suffisamment pour que Kieran ajoute : « Et que tu l’assumerais. » Je sais ce qu’on pourrait en dire ; qu’il est mal placé pour décider de ce que les autres peuvent assumer ou non. Mais il aurait voulu qu’elle l’assume, ne serait-ce que pour le faire sentir moins bête à l’idée d’admettre ses sentiments que, à ce moment-là, il croyait partagés. Elle n’a pas eu à vivre avec la douleur de réaliser que ce n’était pas le cas ; et je crois que pour cela il lui en veut un peu. Oh, bien sûr qu’elle va lui dire qu’ils étaient partagés, mais elle a prétendu l’inverse, lorsqu’ils se sont vus et que ce carnet n’avait plus aucune valeur malgré le message laissé sur son répondeur lui assurant du contraire. Alors oui, il aurait voulu qu’elle l’assume, pour ne pas qu’il soit le seul à le faire et qu’il se heurte à ce mur de la plus violente des façons.
« Et je l’ai gâché. Comme notre première rencontre, comme ce soir-là, ton anniversaire, le mien et… » « J’ai gâché notre première rencontre. » Il reprend rapidement et je ne peux lui donner tort, c’est bien lui qui l’a comparée à son ancienne petite amie quelques minutes seulement après leur rencontre. Il s’en veut tous les jours et si j’étais destiné à me moquer de cette méprise au départ, je me rends compte à quel point elle le touche encore autant aujourd’hui, suffisamment pour que j’essaie d’apaiser sa culpabilité quant à cette indélicatesse qu’il aurait tellement préféré oublier. « Et tu n’as rien gâché ce soir. » Il lui assure, un sourire sur les lèvres pour contrer ce sanglot qu’est le sien. Elle n’a rien gâché, il veut s’en persuader, tandis que je reste cette petite voix dans sa tête qui lui dicte le contraire. Il ne sait plus qui croire, Kieran et peut-être que cela fait de moi la pire des ordures, mais je suis une ordure avec laquelle il doit composer, qui le veuille ou non, une ordure qui interprète aussi sa part sombre.
« Je suis odieuse. Non c’est vrai. Je t’ai reproché mon anorexie et ma lâcheté. Je suis anorexique depuis… je ne sais même plus depuis quand. C’est ni de ta faute, ni de celle de Jacob, mais la mienne. Je suis un monstre. » Ouvre les yeux, Kieran, je t’en conjure. Ouvre les yeux sur la manière dont elle se joue de toi, sur la façon dont elle a piétiné ton estime pour mieux s’en servir par la suite. Facile de rentrer à nouveau dans les bons papiers du brun, après l’avoir écrasé de pareille façon, n’est-ce pas ? De l’avoir bouleversé en déposant le poids de cette anorexie sur ses épaules, pour mieux se considérer elle-même comme un monstre aujourd’hui. Elle te donne la responsabilité et veut que tu l’aides à assumer les conséquences, ne vois-tu pas que tout ceci finira inévitablement mal ? « Ne dis pas ça, Eve, c’est pas vrai. » Bien sûr que ça l’est. Bien sûr qu’elle est un monstre, quoi que tu puisses vouloir croire, Kieran. Je sais qu’au fond de toi, les blessures qu’elle a laissées ne seront pas guéries par son retour en arrière ; alors je peux bien appuyer sur celles-ci pour te prouver qu’elles existent encore et que l’unique responsable est face à toi. Que passer sur l’éponge sur tout ce dont elle s’est rendue coupable ne sera d’aucune efficacité sur les résultats de ses paroles. Que malgré ce qu’elle peut dire, elle t’a fait porter le chapeau de son envie de disparaître et que jamais tu n’arriveras à vivre avec cela. « Je te l’ai promis, non ? » Tu as promis beaucoup de choses, Eve ; et tes promesses ont une valeur toute relative. Pourtant, Kieran hoche la tête avec un léger sourire. « Je n’ai pas envie de parler de ma relation avec Ezechiel, ce soir. C’est de la notre dont il s’agit. Mais si ça peut te rassurer, j’ai souffert. » Non, Eve, ça ne le rassure pas. Non, Eve, il n’est pas ravi que cette relation soit passée sous silence alors qu’il était si facile de la mettre en avant lors de vos précédentes rencontres. Tu vois, Eve, il n’arrive plus à te suivre. Il n’arrive plus à savoir la distinction entre sincérité et mensonge, entre faux-semblants et réels sentiments. Et tu ne peux pas lui en vouloir pour ça, après tout ce qu’il s’est passé entre vous. « J’en suis désolé. » Et pourquoi tu t’excuses, Halstead, de la souffrance qu’elle a méritée ? Elle voulait de cette relation, elle voulait d’Ezechiel plus qu’elle n’avait jamais voulu de toi, alors pourquoi tu devrais t’excuser d’une décision qui est la sienne ? « Au début, j’avais peur que tu sois comme Pierre. Au tout début. Mais après ce soir-là, celui où j’ai commencé à éprouver des sentiments sincères, je me suis rendue compte que… que… que... » Et elle est là, l’abominable vérité, le fait qu’il soit au même niveau que tous ces hommes auxquels il rêve de ressembler sans pour autant y parvenir. Il n’est pas assez affirmé, il n’est pas assez viril, il n’est pas assez blessant. Une part de lui voudrait être comme Pierre, comme Ezechiel, comme Clyde, comme Ichabod, comme tous ceux qu’il a pris pour référent masculin au cours de sa vie, il voudrait avoir tous leurs défauts si cela implique d’avoir quelques-unes de leurs qualités. Celles qui feraient de lui un homme, un vrai, que l’on pourrait regarder et aimer sans ridiculiser le garçon qu’il persiste à être. « Sa voix s’est effacée. J’ai eu l’impression de le trahir car quand je faisais des crises, quand j’avais peur, c’était la tienne qui me réconfortait. » Sa gorge se serre et je le sens qui voudrait s’effondrer face à cette révélation. Pourquoi ne l’a-t-elle pas dit plus tôt ? Pourquoi, là-aussi, elle n’a pas été en mesure de l’assumer ? « Je me suis rendue compte que je pouvais pas… je pouvais pas endurer ça une nouvelle fois. Je pouvais pas perdre de nouveau quelqu’un que j’aimais. Que tu serais mieux sans moi. » « Tu n’avais pas le droit de décider pour moi. » Tu n’avais pas le droit de mettre un terme à notre histoire avant même qu’elle ne commence. Elle n’avait pas le droit à beaucoup de choses, pas quand cela impliquait de décider pour vous deux. Mais elle l’a fait, et si elle t’avait laissé un droit de regard, probablement que vous n’en seriez pas là aujourd’hui. Mais avec des et si, vous pouvez refaire le monde, Kieran et je ne suis pas sûr que le tien mérite d’être refait avec elle à tes côtés.
De la même façon qu’elle n’a pas le droit de vouloir t’embrasser, pas aujourd’hui, pas alors que tu t’es retenu toute cette journée de septembre d’en faire de même par respect pour son couple, pour celui qu’elle semblait décrire comme son deuxième grand amour, qui avait une importance avec laquelle il semblait inconcevable d’espérer rivaliser. Il était si parfait à l’entendre, si différent de toi, suffisamment pour que tout ce qu’elle avait pu te dire n’existe pas, soit oublié, justifie de briser un peu plus ton cœur. Elle n’a pas le droit d’arriver aujourd’hui avec ses demandes et ses sentiments, pas quand elle a des mois de retard. « Je ne veux pas que cela se fasse comme ça. J’en ai envie, maintenant. Comme à chaque fois que je suis en ta présence. Mais pas comme ça. » Et elle ne peut pas dire qu’elle en a toujours eu envie, pas quand tu t’es retenu de briser cette barrière qui ne pouvait l’être de par son statut. Je sais à quel point tu t’es débattu lors de votre précédente rencontre, à quel point tu voulais voler ses lèvres pour lui offrir son cadeau ; mais ton cœur avait été suffisamment brisé pour que t’abstiennes. Elle n’a pas le droit de faire ça, pas plus qu’elle n’a le droit de continuer à jouer ; pas avec ton cœur cette fois-ci, mais ton corps alors que ses lèvres se perdent sur la peau du jeune homme, que son échine se parsème de milliers de frissons à ce contact. Il voudrait plus, il voudrait tellement plus à cet instant. Il le voudrait autant qu’elle, mettre fin une bonne fois pour toute à ce désir qui éveille ses sens depuis le premier jour sans qu’il ne se l’y autorise. Mais ils ne peuvent pas, il ne peut pas. Et il me faut batailler de nombreuses secondes qui me paraissent une véritable éternité pour qu’il s’éloigne de la tentation qu’elle représente et pour qu’il s’ose à lui parler, sincèrement. Elle ne le connait pas, pas plus qu’il ne se connait lui-même ; mais elle n’a pas à croire que ce soit le cas. « Je viens de te le dire, si ça doit se faire. Cela ne se fera pas comme ça. » Et ça ne se fera jamais, Eve. Ça ne se fera pas plus aujourd’hui que ça ne se fera demain, parce que je serai toujours là pour mettre une barrière entre vos deux corps ; pour être la raison de Kieran lorsqu’il ne voudra obéir qu’à ses envies. Ses envies qui l’ont amené sur de nombreux chemins périlleux au cours des années et tu en es un de plus, Eve. Un de ceux dont je dois pourtant l’éloigner. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas totalement mon inimité de la jeune femme qui dicte ma décision. C’est l’instinct de survie de Kieran que je représente, et tous ces souvenirs que la perspective d’une intimité éveille.
Et ce sont les souvenirs de leurs précédentes discussions que j’active désormais pour que son cœur ne cède pas à l’impulsion de la prendre dans ses bras, pour que ses mots soient ceux d’un homme qui lui tient tête et qui, fait rare concernant le dessinateur, partage les blessures qu’elle a pu lui causer. Elle a prétendu beaucoup de choses face à lui et peut-être qu’elle prétend ses sentiments comme elle les prétendait auparavant. « La dernière fois, j’ai cru que tu étais en couple. Et crois-moi, ça m’a fait un mal de chien. » Oh, ironie, douce ironie. « Alors peut-être que tu peux te faire une idée de ce que j’ai ressenti ce soir-là. » Ce soir qu’ils ne sont pas supposés évoquer, celui où elle l’a blessé plus que de raison. Et il y a tant d’autres choses qui mériteraient d’être évoquées, à commencer par le fait qu’elle n’est pas gênée de venir parler de son couple à lui (inexistant, certes), quand il a dû la voir se pavaner dans le bonheur. « Non. » Le regard est dur, la voix est ferme, mais l’intention est-elle sincère ? Il n’en sait rien, alors qu’il voudrait la croire sans parvenir à lui accorder la totalité de sa confiance. Elle s’est trop jouée de ses sentiments pour que la confiance qu’il ait en elle soit aveugle, pour qu’il ne puisse s’empêcher que demain sera comme les autres jours. « Je dois te montrer quelque chose avant. Je dois te montrer que tu as tort. Et que toi non plus tu ne me connais pas. » Sa main dans la sienne, il obéit, Kieran, comme toujours avec la jeune femme, mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. Trop tard, il est déjà sur ses talons.
« Première chose à savoir sur moi, je ne tiens pas sur mes deux jambes. Une vraie calamité. » Un rire nerveux s’échappe d’entre ses lèvres alors qu’il baisse la tête. « Je crois le savoir, ça. » Ce n’est pas une surprise ; peut-être qu’il la connait mieux que la réciproque s’applique. La porte s’ouvre, ses yeux se posent sur ce qui l’entoure, se surprend de ce qu’il peut voir au milieu de la pièce avant que son regard retrouve très vite la silhouette d’Eve. Sa main désormais libre vient de se saisir de l’esquisse qu’elle lui tend. « Regarde les dates. Le lendemain de notre rencontre, de ton anniversaire, du mien et la première fois. » Ses yeux s’exécutent, tandis qu’elle verbalise cette date. « C’est ce jour-là que je… » Fêtais l’anniversaire de sa mort. « Que je suis tombée amoureuse de toi. » Ce n’est pas la bonne réponse, Eve. Ce n’est pas celle que je voulais entendre, même si elle réchauffe le cœur de Kieran. Tellement, que je m’empresse de contrebalancer cette vérité par des faits, à mesure qu’elle s’affaire pour prendre toujours plus l’avantage sur le jeune homme avec sa déclaration, particulièrement touchante. Particulièrement fausse, à mes yeux. Oh, je sais, je ne devrais pas être aussi catégorique, mais vous n’avez pas été là pour panser l’esprit tourmenté de Kieran après chacune de ses apparitions dans son quotidien, après chaque blessure qu’elle a pu causer. Ce fut mon rôle ; et je vous assure que je ne le souhaite à personne. Que malgré l’assurance qu’il prétend en ce sens, il est encore particulièrement blessé par les actes de la jeune femme, par cette indifférence et ces mots qui faisaient aussi mal que des lames. Son regard se porte sur les images qu’elle lui montre, sur tout le travail accompli au cours des derniers mois. Puis, ce sont les prunelles de la jeune femme qu’il croise, tandis que ses lèvres s’entrouvrent sans que jamais aucun son n’en sorte. « Mais je t’aime, Kieran. Et c’est bien parce que je t’aime que je ne te saute pas dessus. Que je ne t’embrasse pas parce que je ne veux pas que cela se fasse comme ça. Mais demain, je ne reviendrai pas dessus. Ni après-demain. Je ne vais pas reprendre ce que je viens de te dire. » Son cœur se serre et son souffle se coupe. Ses mots s’enchaînent, son mutisme se poursuit. Et je vous assure, qu’une fois encore, c’est dans ces moments-là que vous ne voudriez pas être à ma place.
Car si une partie de lui voudrait lui dire ces mêmes mots, je l’en empêche. Je sais que tu l’aimes, Kieran. Je sais que tu l’aimes depuis trop longtemps et je sais que tu souffres de l’aimer – c’est bien pour ça que tu ne peux pas lui le dire. Parce que ce n’est pas comme ça que tu devrais aimer et être aimé, bien que tu penses le contraire. Ce n’est pas lorsqu’elle manque de te perdre qu’elle doit se souvenir de ton existence, ce n’est pas lorsqu’elle perd son petit ami que tu apparais comme le premier choix, alors que tu ne l’as jamais été auparavant, peu importe ce qu’elle peut te dire. Et toutes ces craintes vont bien au-delà des belles paroles qu’Eve peut t’offrir ; c’est tout ce que tu ne peux pas lui offrir qui te rend muet à cet instant. Tu ne peux rien lui offrir, concrètement. Tu ne pourras jamais être aussi tactile et attentionné qu’elle l’attend, tu ne pourras jamais la guérir de ses démons, bien trop accaparés par les tiens. Tu ne pourras jamais être cette personne qui se dévouera corps et âme pour elle, parce que tes peurs t’empêcheront toujours d’avancer comme d’autres le feraient. C’est bien ce que t’avais coûté ta chance ce jour-là et c’est ce qui semble coûter cette nouvelle qu’elle t’offre. Et tu lui avais couru après, Kieran, je te rappelle. Je sais qu’il tend à considérer ne pas l’avoir courtisée comme elle l’aurait mérité, mais il est toujours revenu. Même après cette confrontation durant Race of Australia, même après ce bonheur exposé à son visage le jour de son anniversaire et lors de celui de la jeune femme. Il est toujours revenu, jour après jour, quand elle le faisait disparaître. Il était toujours là, toujours à tendre la joue et à supplier de son affection ; et maintenant qu’il l’a obtenue, il ne sait quoi en faire. Il ne sait pas comment réagir, parce qu’il veut qu’elle lui prouve qu’aujourd’hui sera différent des autres jours, qu’elle ne l’oubliera pas sitôt la nuit tombée et que demain il aura la même importance que ce soir, parce que bordel, elle ne sait pas à quel point cela fait mal d’être oublié, d’être effacé, d’être ignoré. Elle ne sait pas la douleur d’avoir cru à une affection qui lui glisse entre les doigts aussitôt celle-ci obtenue, elle ne sait pas à quel point ça fait mal de se forcer à sourire pour masquer les blessures ; elle ne sait rien de tout ça, parce qu’elle lui l’a infligé et jamais il n’en a fait de même. Jusqu’à aujourd’hui, alors que je ne me surprends pas de l’incohérence de ses réactions, mais que je l’en félicite quand il daigne m’écouter, quand il daigne se protéger, même si les raisons derrière un tel désir ne sont pas celles qui me conviennent. Le résultat est le même et c’est le plus important ; aujourd’hui elle n’obtiendra aucune déclaration de sa part, parce que c’est à elle de regagner sa confiance.
Pourtant, je sais qu’elle l’a déjà, alors qu’il lutte de toutes ses forces avec l’envie de rapprocher sa silhouette de la sienne, de profiter de mur qui la rendrait prisonnière de ses embrassades et ses caresses ; il ne se sentirait même pas responsable en sachant que son désir est partagé. Mais tu n’as pas le droit, Kieran, tu n’as pas le droit de céder à cette impulsion – parce que c’est ce qu’elle attend, parce qu’aujourd’hui, je t’interdis de faire ce que les autres veulent et de penser à toi et uniquement à toi. Oui, ce sont tes envies, immédiates, irrépressibles, mais qu’en est-il de reste ? De cette peur qui coule dans ton sang, de cette panique à laquelle tu n’essaies pas de céder en réalisant que tu n’y comprends foutrement rien à tout ceci à l’exception que tu ne veux pas revivre ça. Tu ne veux pas revivre le jour où elle te dira qu’aujourd’hui n’était rien et qu’Ezechiel est revenu dans sa vie. Parce que dès l’instant où il existera à nouveau, tu disparaîtras comme toujours. Tu as suffisamment vécu la leçon pour l’avoir enregistrée. Et je sais que tu te focalises sur Eve, sur son ex, sur ce qu’ils étaient et ce qu’ils pourraient être sans que tu sois une ombre sur leur tableau – mais c’est bien sur ton tableau à toi que plane désormais l’ombre d’Eve. Tu as peur de la laisser s’en aller. Et ce n’est pas de la blonde devant toi dont il est question, mais de celle qui continue d’accaparer chacune de tes pensées, celle qui justifie chacune de tes respirations, celle qui vient jusqu’à concrétiser la raison de ton existence. Je ne peux pas te laisser t’en aller, Autumn. Je ne veux pas te laisser t’en aller, Autumn.
Il a menti. Ce n’est pas lui qui mérite mieux, c’est Eve. Elle mérite mieux que d’avoir à rivaliser avec un fantôme, que d’avoir à gérer un homme qui n’arrive pas à avancer quand elle ne semble vouloir que ça. Et je ne la blâme plus, cette fois-ci. Pas plus que je ne blâme Kieran. Sa douleur est la mienne ; et je ne peux décemment accentuer celle-ci alors que son cœur se déchire entre sa raison et son envie, entre son passé et son futur, entre celle qu’il aimera toujours et celle qu’il voudrait aimer pour toujours.
« Merci. » Il se sent plus que stupide que jamais, alors qu’il ne sait pour quelle raison il la remercie. Pour cette déclaration ? Pour avoir dit les mots qu’il voulait entendre des mois plus tôt ? Pour enfin avoir l’impression de compter pour elle ? Pour ce cadeau qu’elle lui fait ? Pour ce talent en lequel elle est la seule à croire ? « Je... » Dis quelque chose. Dis quelque chose, Kieran, n’importe quoi, mais surtout pas ce que tu veux réellement lui dire, encore moins ce qu’elle désire entendre. « Mais je... j’ai besoin de le voir pour le croire. » Pour lui accorder cette confiance qu’elle semble regagner ; pour ne pas lui offrir plus qu’il ne le faisait déjà par le passé pour qu’elle lui en demande toujours plus. Il ne peut pas, il ne veut plus ; se perdre dans cette relation à sens unique fait mal, beaucoup trop mal et il ne veut lui donner cet avantage. « Ne me déteste pas, je t’en supplie. » Parce qu’il le fait déjà pour deux et je sais que cette haine n’a de frontière que cette lâcheté qu’il l’empêche de se faire du mal. Alors à défaut, il leur en fait à tous les deux, alors que du plat de la main, il essuie une larme qui s’échappe de son œil. Tant d’autres aimeraient suivre, mais il se pince les lèvres dans une grimace probablement ridicule, se mord l’intérieur de la bouche, ravale sa salive et accepte ce malaise dans sa gorge, dans son cœur, partout dans son cœur alors que la silhouette d’Eve se veut floutée par cette humidité qu’il ne laisse pas couler le long de ses joues. « Je... je pourrais pas le supporter. » Il admet, sa tête qui se baisse, sa main qui repasse au coin de ses yeux. Il se flagelle ; il est ridicule. Non, Kieran. Tu es simplement humain. Plus humain que tu ne l’as été depuis longtemps. « Je pourrais pas supporter un nouvel abandon. » D’elle, des autres, de tout le monde ; il ne peut plus le supporter, il n’a plus la force d’évoluer dans un monde où sa place ne semble pas être acquise, ni même existante. Il pensait l’avoir trouvée à ses côtés, puis aux côtés d’Eve ; elle l’avait remplacé et ne s’en était jamais cachée. Et si quelques mois auparavant il parvenait à se faire à cette idée, aujourd’hui il n’y arrive plus ; parce que trop de choses se sont passées, parce que trop de souvenirs se sont rappelés à lui, parce que les fantômes du passé n’arrêtent pas de le chasser, de la même manière que ce point d’ancrage que représentait la blonde s’est finalement avéré être une torture de plus. Et même si c’est la condition pour laquelle il a été formaté, il n’en peut plus Kieran, je sais à quel point il n’en peut plus de ce mal-être provoqué par les autres, par lui-même, par toutes ses émotions contradictoires en lui, par cet amour qui fait mal, trop mal, par cette responsabilité qu’il fait peser sur les épaules de la blonde, par cette lâcheté de totalement l’abandonner, par cette faiblesse de céder à l’appel de ses désirs, par cette inconstance qui le caractérise. Tout ce qu’il sait, il l’a dit ; c’est déjà beaucoup : il ne le supporterait pas, alors qu’un sanglot vient briser la confiance qu’il essaie de transparaître et que, déjà, sa honte oblige sa silhouette à s’éloigner de la jeune femme pour prendre le chemin du départ. « Il faut aller à l’hôpital, maintenant. » Et il faut que je fasse mon travail, qu’il me souffle. Qu’il supplie, alors qu’il ne demande qu’à éloigner tous ces démons de son esprit ; mais je ne le peux pas, Kieran, parce qu’ils font partie de toi, parce qu’ils sont là sur ta demande, par ton histoire et que malgré toute la force que je peux mettre, jamais ils ne disparaîtront sans que toi-même tu arrives à t’y confronter. Mais il y a déjà eu bien trop de confrontations pour un seul soir – et je concède cette défaite, qui n’en a le statut que de nom.