On s’est donné rendez-vous devant l’immense sapin, plus facile pour se retrouver. Je ne pouvais pas l’éviter éternellement. Surtout que c’est même à lui que j’en veux, pas à lui que j’ai des raisons d’être gêné. Mais comme on a toujours été un trio et que je n’en veux jamais à personne, tout de suite mon ignorance de l’un des maillons impacte forcément l’autre.  Je n’ai pas envie de lui mentir à Matt, pas envie de devoir lui raconter une énième connerie parce que je ne pourrais jamais lui dire la vérité sur ce qui s’est passé. Alors c’est plus facile d’espacer mes visites au DBD, plus facile

Mon anniversaire est passé, Noel pas encore et j’ai l’impression que cette semaine a été la pire de ma vie. Je n’ai qu’une hâte à présent, terminer cette année, noyer la fin des jours de 2020 dans un nuage d’alcool pour chasser mes pensées sombres. La seule bonne nouvelle de ces dernières semaines aura finalement été la naissance de Sloan.

Je lui ai proposé qu’on aille se bourrer la gueule ce soir et qu’on profite peut être en même temps des attractions de Noel pour peut être arriver à me mettre dans l’ambiance. Je sais bien que je ne pourrais pas l’éviter éternellement et que ça commence à paraître suspect, le silence radio était total depuis ma fête d’anniversaire où j’avais enfin avoué à sa sœur mes sentiments pour me faire rejeter amèrement.

Je vois Matt arriver et mon éternel sourire revient, une clope au bec et en guise d’introduction j’attaque direct, pointant du doigt la patinoire éphémère aménagée à côté du sapin. « Jte préviens, Molly a essayé de me faire patiner, je suis le pire patineur artistique de tous les temps. Genre médaille d’or dans le genre. Donc si je dois tournoyer sur moi-même c’est avant de boire je ne sais quel alcool que tu vas me trouver. » On avait parlé il y a quelques semaines de faire un tour du marché de Noel pour aller faire un bar crawl de vins chauds. Je ne sais plus qui de nous deux a eu cette idée stupide mais clairement on devait être en train de faire je ne sais quel plan sur la comète. Je ne m’excuse pas du silence radio, faut dire que je m’excuse rarement.

@Matt Mcgrath

On a l’air du plus cliché des couples dès lors que j’arrive aux côtés de Pete avec des gobelets de café pimpés à souhait, le sien marqué de coeurs faits de tous les marqueurs que j’ai près de la caisse du DBD donc d’un arc-en-ciel d’amour. Les gens sont regardent avec des yeux amoureux, avec des sourires qui signifient un gros “vous êtes beaux les gars” “ça respire la passion jusqu’ici” lorsque je lui fous une écharpe assortie à la mienne autour du cou - écharpe qui doit le faire chier autant que moi vu la température estivale d’Australie. Quand je lui ébouriffe les cheveux et lui envoie un baiser volé, c’est la consécration, c’est la couronne qui devrait nous revenir. Le sapin est immense et illuminé, derrière nous.

« Jte préviens, Molly a essayé de me faire patiner, je suis le pire patineur artistique de tous les temps. Genre médaille d’or dans le genre. Donc si je dois tournoyer sur moi-même c’est avant de boire je ne sais quel alcool que tu vas me trouver. » puis il casse tout le con. Il casse la belle ambiance d’amoureux profitant de la patinoire en parlant de Molly et d’à quel point il a l’air d’un Bambi mi-égaré mi-furieux sur la glace dès qu’il tente de patiner. Dommage, prochaine étape je lui claquais une fesse en improvisant un poème à son nom. « Vin chaud et après concours de figure sur la glace, du coup? » oh Matt, quel idiot au sourire qui vaut pas mieux, alors que le planning est tout trouvé dès que Pete se met à rager.

« T’as pas un si mauvais teint que ça pour un gars plus vieux d’un an. » c’était son anniversaire et comme une année sur deux je l’oublie tout le temps. C’est pas contre lui, c’est juste la malédiction de m’avoir comm meilleur ami. Un an tu peux être sûr que je t’organise un party surprise à thématique dont tu te rappelleras pour toute ta vie, la suivante je le capte un mois et demi plus tard - comme aujourd’hui. « Ton cadeau est au DBD. Faudra que tu passes ça veut dire ; ça fait longtemps, casse ta mauvaise habitude un peu. » ça fait longtemps qu’il est venu au café aka depuis au moins plus de 48h. Quelle honte.

On nous regarde comme si on était un vieux couple et ce n’est sans doute pas loin de la vérité. J’attrape le gobelet qu’il me tend, je regarde les multiples cœurs sur mon gobelet, ça me fait sourire.  Matt est un peu ma maison, mon refuge, son coffee shop l’endroit où je retourne inlassablement parce que je m’y sens chez moi. Je roule des yeux par contre quand il m’enroule une écharpe de Noel autour du cou. Elle est assortie à la sienne,  vraiment il n’y a plus rien à faire pour nous.  Je parle de la patinoire et de Molly et je me dis qu’il va me falloir bien des verres de vins chauds si je dois retourner sur la glace.   « Vin chaud et après concours de figure sur la glace, du coup? »  Il est toujours partant Matt, toujours partant dans chacune des aventures que je pourrais lui proposer et c’est peut-être ça qui fait qu’on est toujours amis aujourd’hui.  Je lui voue une loyauté que je vous à peu de gens, moi qui préfère me concentrer sur ma petite personne. « T’as tout compris ! » Je lance avec un grand sourire. « Je suis nul mais tu vas quand même perdre ! » [/color] J’annonce fanfaron buvant mon café l’appréciant.


« T’as pas un si mauvais teint que ça pour un gars plus vieux d’un an. »  « C’est parce que t’étais pas là à ma fête d’anniversaire alors tout de suite j’ai des rides en moins ! »  Je me marre et jamais je ne pourrais lui en vouloir pour l’oublier quand la plupart du temps je n’ai pas envie de le fêter. Mais surtout, je suis bien trop égoïste moi-même pour m’attacher à ce genre de détails, persuadé que l’année suivante il m’organisera la fête d’anniversaire du siècle. «  Ton cadeau est au DBD. Faudra que tu passes ça veut dire ; ça fait longtemps, casse ta mauvaise habitude un peu. »  Je l’évite depuis des jours, je l’évite depuis que l’ouragan Jill a tout détruit sur son passage. Je souris, j’hausse les épaules, mon regard le fuit. « Oui faudra que je passe. »  Mon ton n’est pas assez enthousiaste mais tant pis. Je préfère me concentrer sur le cadeau. Je souris comme un gamin, penchant la tête sur le côté. « Tu me donnes un indice pour le cadeau ? Alleeeez allleeeez ! »  Un peu plus et je sautille sur place. Pete trois ans bonjour.  Je finis mon café soupirant presque tellement le café du DBD m’a manqué. « Ton café est vraiment à tomber. »  Je ne devrais plus avoir besoin de le souligner mais je le fais quand même. Seulement j’aimerais bien boire mon vin chaud alors je le tire vers des chalets non loin, bras dessous bras dessus, un vrai couple.

@Matt Mcgrath  

« Je suis nul mais tu vas quand même perdre ! »
« Fais pas le malin, le karma aime pas ça. »

La blague, que je parle de karma comme si j’en savais quoi que ce soit. C’est une foutue de jolie ironie mais elle me tapisse un immense sourire sur le visage, alors on risque d’en être complètement convaincus. C’est pas comme ça que ça marche?  « C’est parce que t’étais pas là à ma fête d’anniversaire alors tout de suite j’ai des rides en moins ! »   «  T’as eu une fête? Dis-moi qu’il y avait des ballons et des chapeaux. Oh, vous avez jouez à l’âne? »  que je nargue, le nez froncé et l’oeil moqueur. La vérité, c’est que ça me fait chier de pas avoir été celui tout en haut du trône du roi de la fiesta à lui hurler tout ce qu’il l’attend pour souligner sa nouvelle année au compteur. Mais il faut croire que la fac est loin et que les années à boire comme des trous jusqu’à pas d’heures aussi. Ça me manque, des fois (souvent). Lui?

« Oui faudra que je passe. » « Cache ta joie. » il le dit dans un soupir et ça, ça passe pas inaperçu. Mais comme je le connais par coeur, je sais aussi que la moindre question ou pression de dire les choses le fait se refermer comme une huître en un claquement de doigts. Autant lui laisser le temps de dire ce qu’il a à dire, s’il le veut et pour de vrai.   « Tu me donnes un indice pour le cadeau ? Alleeeez allleeeez ! »   « Ça c’est mieux. » en clair : il en aura pas d’indices, faudra qu’il passe. Mais son enthousiasme retrouvé et sa manie de trépigner comme un gamin aident à sa cause à fond. C’est déjà ça.

En une gorgée, il est séduit et moi avec. « Ton café est vraiment à tomber. » son bras sous le mien s’additionne d’un baiser que je perds sur son front en pouffant. On nous regarde, on fabule en souriant, je suis prêt à parier que quelqu’un quelque part nous a mis sur un compte Instagram quelconque célébrant l’amour sous toutes ses formes. Damn qu’on aurait été un beau couple, avouez. « Et toi, ce sont tes yeux qui sont à tomber. » dans un rire, je bois une gorgée de mon propre café à tomber, évidemment qu’il l’est. J’ai pas 30 ans et des poussières d’expérience en la chose pour être nul avec les espresso. « Quoi, comme ça ils croient que l’amour existe encore. » je pouffe de plus belle, souris au public, initie le choix des patins avec. Quel enfer quand ni lui ni moi on sait pas patiner - si on se casse quelque chose, au moins on pourra avoir accès aux pansements de super-héros à la station infirmerie.

Mais bon, ses beaux yeux c’est une chose - « T’as pas l'air tout à fait là par contre. » - son air absent, dissipé et pas particulièrement au top de sa forme en est une autre.

« Fait pas le malin, le karma aime pas ça. »

Je n’y crois pas une seule seconde, me contentant de fanfaronner. « Le karma il m’aime bien Mcgrath !  Toi en revanche, regarde ta coupe de cheveux, clairement il ne t’aime pas ! » Je ris doucement, venant ébouriffer ses cheveux avec malice. Je fais sans doute beaucoup le malin. Parce qu’il est clair que le karma ne me fait pas de cadeaux depuis longtemps.

«  T’as eu une fête? Dis-moi qu’il y avait des ballons et des chapeaux. Oh, vous avez jouez à l’âne? »  Il me nargue le brun, alors qu’il n’était même pas présent. J’aurais bien aimé qu’il le soit au fond, alors je lui tire la langue. « Il y avait tout ça et c’est juste que t’es jaloux de pas avoir pu jouer le rôle de l’âne ! » Il m’a manqué au fond le bougre, mais ce n’est peut-être plus mal qu’il n’est pas été présent au vu de comment c’est terminé la soirée.

Il m’annonce que je vais devoir passer parce que mon cadeau d’anniversaire se trouve au DBD. Mon ton n’est pas des plus enthousiastes, loin des habituels.  « Cache ta joie. » Je fronce le nez, mon regard refusant de croise le sien, conscient qu’on est loin de mon ton habituel. J’essaye de contrebalancer en lui parlant de mon cadeau « Ca c’est mieux. » Mais pas d’indices à l’horizon et je plisse les yeux vers lui. « T’es pas drôoooole. » Je gronde comme un enfant de huit ans, bien que le sourire revienne vite.

Son café est et restera mon préféré et ce depuis que je l’ai rencontré. Mon bras sous le sien, un baiser sur le front et mon dieu ce qu’on est beau.  « Et toi, ce sont tes yeux qui sont à tomber. » roucoule-t-il en buvant de son mug brulant. « Arrête tu vas me faire rougir ! » mon léger mouvement de main accompagne mon air de mijaurée qui ne tient pas longtemps face à mon éclat de rire.  « Quoi, comme ça ils croient que l’amour existe encore. » Il n’a pas tort.

Les patins sont enfilés mais je sais qu’au fond mon esprit n’est pas tout à fait présent . « T’as pas l'air tout à fait là par contre. » « Tu vas voir si je vais être présent quand on va faire la course et que je vais te battre ! » Je fanfaronne, mais c’est bien pour cacher mon air penaud, mon regard fuyant. J’hausse les épaules plus sérieusement. « Ca va, je suis fatigué c’est tout. » Mots jamais prononcés par Peter Mulligan.  «  Alors. Raconte. » Pas de noms mentionnés, mais il flotte dans l’air entre nous deux. Lily.

@Matt Mcgrath  

La scène est aussi douce que clichée à foison et c’est probablement avec le sourire le plus immense du vainqueur toutes catégories confondues que je finis par me redresser bien comme il faut et faire face à un Pete aussi hilare que moi. On a passé notre vie à se pourrir en bar dès qu’une fille rôdait autour de l’un l’autre en se faisant des manières, y’a pas la moindre raison qu’aujourd’hui fasse exception.

« Le karma il m’aime bien Mcgrath !  Toi en revanche, regarde ta coupe de cheveux, clairement il ne t’aime pas ! » qu’il rigole, qu’il m’ébouriffe les cheveux, qu’il me tire la langue. Qu’il pense que je lui laisse le champ libre aussi. Amateur. « Il y avait tout ça et c’est juste que t’es jaloux de pas avoir pu jouer le rôle de l’âne ! » « Ça c’est le discours de quelqu’un qui a perdu. » le temps que je plaque mes mains sur son torse pour le repousser en arrière, c’est son équilibre précaire qui risque de le faire finir en commotion sur la glace si vous vous demandez.

Et non, il en saura rien. Faudrait qu’il arrête de faire son adulte sérieux qui bosse de jour et qui joue à l’âne de soir et qu’il se bouge à passer au DBD. « T’es pas drôoooole. » « Ah non mais mon humour est ma plus grande qualité t’as pas eu le mémo? » râle, râle, et râle encore. Moi j’en lasse mes lacets, je finis par pratiquer mes plus belles figures c’est-à-dire tourner en rond et freiner. On a pas les mêmes talents sur la glace qu’en équipe à un tournoi de beer pong. Mon café goûte bon, personne ne s’en étonne. Le front de Pete lui, est salé. C’est qu’il faut chaud dans ce pays, j’arriverai jamais à m’y faire à ce temps-ci de l’année. « Tu vas voir si je vais être présent quand on va faire la course et que je vais te battre ! » ah ouais, c’est vrai, on doit faire la course. « Fuyard. » que ce soit lui ou moi qui annonce un faux départ, la ligne est mince. N’en reste qu’il ne s’élance pas plus que moi. La seconde d’après, je nous allume des cigarettes.

« Ca va, je suis fatigué c’est tout. » ouais, ouais, à d’autres. Mais qu’il parle pas ça le regarde, moi, je bois mon café et je fume ma clope le temps qu’il se garde de ses petits soucis à lui.  «  Alors. Raconte. » oh okay, donc on parle pas des siens, mais on aborde les miens? Bah, c’est pas comme si j’étais pas un livre ouvert non plus avec lui. « Raconte quoi? » pourtant, on est deux à jouer à ce jeu et il sait aussi bien que moi que ça me fait chier, de gratter de ce côté-là. Elle est là sans même l’être. « Ce que j’ai mangé hier? Ce que j’ai cuisiné ce matin? » continue comme ça Matt, c’est vraiment très mature de ta part on te l’a déjà dit? « Ou à qui? » fais pas genre, même quand on était séparé Lily et moi, y’a (presque) pas eu le moindre moment où j’aurais pu cuisiner pour qui que ce soit d’autre que moi, Jill ou même Pete.

« On réessaie. » j'aurais pu dire qu’on recommence du début, qu’on a tout biffé. J’aurais pu dire que c’est la seule façon qu’on a trouvée pour pas avoir l’impression de devoir ajouter des murs sur des fondations qui sont parties en fumée, mais ce serait de tomber dans la métaphore d’architecture boboche qui lui ferait rouler des yeux. Je simplifie. « C’est pas ce que c’était, pas encore. Mais on retente quand même. » parce que ce que c’était, ce que ça pourrait être à nouveau, on y tient bien plus qu’on l’aurait cru.

« Ca c’est le discours de quelqu’un qui a perdu. »  Ses mains me propulsent en arrière, je perds l’équilibre, pantin désarticulé titubant me rattrapant in extremis. L’équilibre retrouvé, mon majeur se tend vers sa tête d’ange en même temps que je lui tire la langue. Il le mérite ce tout sauf ange, pour ne pas être venu à mon anniversaire. En plus de ça il refuse de me donner un indice sur mon cadeau. « Ah non mais mon humour est ma plus grande qualité t’as pas eu le mémo? » Je pourrais rouler des yeux à l’infini et ça ne sera jamais suffisant.  « Encore un cours que j’ai dû louper parce qu’il y avait une soirée plus intéressante et que j’avais la gueule de bois ! » dis-je en y ajoutant mon sourire le plus moqueur.

Il tourne en rond le Mcgrath et je ne peux m’empêcher d’y aller de mon petit commentaire. « Heureusement que t’as choisi de faire du café plutôt que du patin à glace, t’aurais vite été au chômage sinon. » Je me moque mais je ne suis pas beaucoup mieux, voir je suis pire, pataud sur la glace, manquant de tomber à de bien trop nombreuses reprises.  L’idée de lancer une course est stupide pourtant je le fais quand même. « Fuyard. » Fuyard je le suis sans aucun doute et je lui renvoie mon plus beau sourire pour seule réponse. Heureusement qu’aucun de nous ne lance ce faux départ,  peut-être un peu trop flemmard, fumer une énième cigarette nous semble être une meilleure option.

Je ne peux pas lui expliquer ce qui ne va, tout simplement parce que cela concerne un sujet que je lui cache depuis bien trop d’année. Du moins c’est ce dont j’essaye de me persuader quand en réalité cela aurait sans doute pu être un tout autre sujet et je n’aurais pas su m’ouvrir non plus. A défaut de vouloir parler, je cherche à ce que lui me raconte où en est sa relation avec Lily.

« Raconte quoi? » Mon regard se plante dans le sien, du genre Joue pas au petit con avec moi tu sais exactement de quoi je veux parler.  « Ce que j’ai mangé hier? Ce que j’ai cuisiné ce matin?  Ou à qui ? »   Mes sourcils se lèvent, je souffle ma fumée de cigarette vers sa figure pour lui faire comprendre que je ne crois pas une seule seconde à son bullshit. « Accouche chaton. » je susurre moqueur.

« On réessaie. C’est pas ce que c’était, pas encore. Mais on retente quand même. »  Je reste silencieux un instant, parce que je pourrais lui dire que c’est pas une bonne idée, parce qu’au fond j’ai peur qu’il soit blessé encore une fois. Mais je ne dis rien, parce que j’ai vu comme l’un comme l’autre était malheureux sans être avec l’autre et parce que je ne pense pas que Lily refera une erreur de ce genre. « Je l’ai vue au DBD il y a quelques temps. » Avant qu’ils réessaient. « Elle était moins insupportable que d’habitude. » Je tente avec un sourire, provoquant,  enfonçant mon doigt dans ses cotes avec un petit rire.  « Plus sérieusement. » Oui parce que je peux être sérieux de temps en temps, shocker.

« Si ça te rend heureux c’est le principal. » J’ai pas mon mot à dire, peu importe mon opinion de Lily, peu importe son opinion de moi, peu importe en vérité tout le reste tant que je n’ai pas à ramasser son cœur à la petite cuillère.  « Tu lui as pardonné ? » je demande malgré tout, en tirant sur ma cigarette.


@Matt Mcgrath  

« Accouche chaton. » et fuck.

Pour un gars qui parle 24/7, je déteste parler de ces choses-là. Je peux être imbattable sur n’importe quel autre sujet, énerver la planète en entier à déblatérer de la merde pendant des heures et d’autres décennies encore. Je peux trouver quelque chose à dire sur tout, crever les oreilles et les tympans de qui que ce soit à proximité comme à des mètres de moi. Me contenter du pire small talk de l’univers ou des blagues les plus recherchées (à mon sens). Inventer mon monologue au fur et à mesure qu’il sort ou avoir préparé un discours en quarante exemplaires sans même avoir eu l’impression de le forcer.

Sauf là. Sauf sur Lily. Sauf sur – tout ça. Le silence de Pete est pas de mauvaise augure ni de bonne, il réfléchit. Il a pas l’air du gars qui est sur le bord de me pousser à terre en me disant que je fais une connerie, pas plus que de me taper sur l’épaule en mode j’y crois moi aussi. Ouais non, il est illisible quand il cogite et il me fait autant chier sur l’instant que je l’en remercie. Une chose à la fois, et juste d’en parler déjà c’est immense pour moi. « Je l’ai vue au DBD il y a quelques temps. Elle était moins insupportable que d’habitude. » à son rire se joint le mien, il est jaune mais il est là quand même. Qu’ils s’aiment pas faisait partie des petits caractères au contrat. Je leur en aurais jamais voulu autant que j’aurais jamais forcé la donne même si c’était chiant. Par contre, après tout ce qui s’est passé avec Ezra je m’attendais pas à ce qu’il ait ce discours-là sur la brune. « Plus sérieusement. » explique-toi, voir.

« Si ça te rend heureux c’est le principal. » ouh.  
« Tu lui as pardonné ? » ouhhh.

À sa clope à ses lèvres s’additionnent mes doigts qui la lui volent d’abord pour faire genre acte de lui sauver la vie, mais surtout pour lui en piquer une bouffée et quatre autres après. Need. « Tout de suite les grands mots. » c’est pas la réponse à laquelle il s’attend, probablement parce que je l’ai pas moi-même la réponse. Ou plutôt, je la connais, la réponse. J’ai juste jamais eu à la dire à voix haute à qui que ce soit. « Ouais. Elle m’a expliqué ce qui s’est passé, ce qui a fait qu'elle a agi comme elle l’a fait. » et c’est de ça dont j’avais besoin, de décortiquer la chose de son angle à elle. De m’assurer aussi un peu que ça ne se reproduise pas. « J'ai compris pourquoi. Ça faisait du sens.» pour moi en tout cas. Et pour lui?

Il y a des gens qui ne sont pas faits pour s’entendre. Moi et Lily n’avions jamais été compatibles, trop différents,  trop opposés sur bien trop de sujets. Bien sûr il avait fallu que ce soit elle que Matt choisisse de tomber amoureux, que ce soit elle qu’il épouse. Quelle idée.  Je n’avais toujours pas compris comment elle avait débarqué dans nos vies, pardon, dans sa vie, mais j’aurais préféré qu’elle en parte loin, surtout depuis qu’elle avait fait le choix de jouer avec le cœur de Matt comme si c’était un vulgaire jouet qu’on pouvait briser en morceaux.  Je n’étais pas loyal à beaucoup de gens, à peu à vrai dire, ma petite personne bien plus importante pour que je me focalise sur les autres. Mais lui, lui il avait toute ma loyauté. Elle était ancrée au fer rouge à coup de beer pong, de blagues douteuses, de pancakes en remède de gueule de bois et de café partagé. Elle était ancrée au point que je voulais le voir heureux. Même si cela impliquait de devoir supporter Lily Mcgrath au quotidien, même si cela impliquait de lui pardonner.

Il fuit les conversations sérieuses Matt, il la fuit comme moi je les fuis et parfois je me dis que sur ça on se ressemble un peu trop.  Il me vole ma cigarette je lève mon majeur avec un sourire par réflexe.  « Tout de suite les grands mots. »  Est-ce qu’il va essayer de m’entourlouper ? Dévier le sujet, attirer mon regard sur quelque chose de plus brillant pour ne pas avoir à parler d’elle ?  J’attends patiemment, sans le presser.  « Ouais. Elle m’a expliqué ce qui s’est passé, ce qui a fait qu'elle a agi comme elle l’a fait.  J'ai compris pourquoi. Ça faisait du sens.» Je le regarde en haussant un sourcil, j’ai dû mal à le croire. Mais qui suis-je pour la juger quand j’ai trompé toutes les personnes avec qui j’ai été sans remords, préférant fuir toute relation un tant soit peu sérieuse ?

« Pourquoi alors ? » je demande doucement,  sans once de jugement dans ma voix, à croire que ma dernière rencontre avec Lily avait au moins eu le mérite de faire, au moins un peu, évoluer mon opinion d’elle. Un pas en avant, pour Matt, uniquement pour lui.  Je lui repique ma cigarette. « Allume toi la tienne ! » dis-je en râlant pour en tirer une bouffée.  « Lily, elle te rend heureux ? » je souffle et s’il me répond oui je n’essaierais pas de le convaincre du contraire, j’accepterais qu’elle soit de nouveau dans l’équation, tout simplement.  Je pourrais lui dire que c’est la pire idée qui soit, j’pourrais lui dire qu’elle mérite mieux que Lily, je le pense au fond, mais ça n’a pas vraiment d’importance ici, ça ne fera que lui faire du mal à lui s’il lui a pardonné et je n’ai pas envie de lui en causer. Alors je ne joue au petit con, je ne crache pas mes remarques acerbes sur Lily, non je grandis pour une fois, et j’arrête de penser à ma petite personne et je pense à lui.

@Matt Mcgrath  

« Pourquoi alors ? »
« Marie-toi avec la femme de ta vie j’te donnerai toutes les réponses qu’après. »

C’est ma façon à moi de dévier, encore et toujours. C’est ma manière de lui dire qu’un jour, je lui en parlerai. Pas quand c’est encore à chanceler, pas quand j’ai peur de tout casser, structure de cristal et de porcelaine qu’on peut bien être. N’en reste qu’il comprendrait Pete : ça allait trop bien. Elle trouvait que ça sonnait faux. Elle voulait reprendre le contrôle, que si ça casse ça soit sa faute à elle, pas une surprise qui la terresserait d’ors et déjà. Pete fait toujours ça, bousiller ses relations. Il trouve des nanas bien comme Molly, elles lui glissent entre les doigts parce qu’il les y pousse. Mais c’est pas à moi de donner des leçons, et c’est encore moins à moi de dévoiler les cartes d’une Lily à fleur de peau. Chacun prend son temps, chacun fait de son mieux. Et ce que j’aime le plus de Pete, c’est qu’il sait autant que moi que c’est pas une question de confiance ou d’être à l’aise de lui parler. C’est juste une question de rythme. Le mien est plus lent en ce moment. Ça change rien au fait qu’il est le seul au courant de tout ça.  

« Allume toi la tienne ! » ça change rien au fait qu’il est aussi un foutu connard pas capable de partager. Sa clope devenue mienne redevient sienne, je le repousse rien que pour le voir revenir avec plus d’aplomb encore. « Lily, elle te rend heureux ? » il fait comme il peut Pete. Il est à chier en amour, il est une perle en amitié. Ce gars-là, c’est le pote le plus loyal que je connais, le type le plus fidèle à ses amis que j'ai bien pu côtoyer. Il a eu peur, personne pensait me voir dans l’état dans lequel il a dû me ramasser, lui qui a aussi dû ramasser l’état pitoyable de mes affaires dans l’appart au-dessus du DBD. Là où j’ai plus jamais mis les pieds depuis que Lily et Ezra y vont - well. « De plus en plus. De mieux en mieux. » c'est une question de temps, mais elle fait tout ce qu’elle peut elle aussi. Quand mes prunelles attrapent celles de Pete, je sais qu’il le comprendra. Ça en plus du reste.

Prends ta propre cigarette qu’il disait. Ouais, okay, c’est bon, j’en cale une de mon paquet de sûreté entre mes lèvres. Mais j’ai pas dit mon dernier mot non plus. « Tu m’passes ton briquet? » un emprunt sans date de retour déterminée.