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 raise your glasses all my kings and queens (alfly #4)

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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptySam 2 Jan 2021 - 3:25

Pour certains patients, les règles et les normes volent momentanément en éclat. Pour une Lily qui s’essaye déjà aux remplacements dans des services qui ne sont pas les siens, un nom tel que Maslow attire forcément l’attention. Croyez-le ou non, pourtant, elle a vérifié son groupe sanguin sur le dossier avant de s’attarder sur son prénom. Elle le lui a demandé, un jour, et elle s’en est toujours souvenue ensuite, agissant comme si elle était un genre de vampire en quête de bonnes cellules à boire. Lui dire qu’elle s’inquiétait surtout du jour où il se serait trop battu pour être encore conscient et où il aurait besoin d’une transfusion ne lui est jamais venu à l’esprit, il aurait été bien trop heureux de savoir qu’elle continuait de tenir à lui malgré tous les coups bas de ces trois dernières décennies. L’affirmation est toujours valable aujourd’hui alors qu’elle attrape son dossier in extremis, décidant finalement qu’elle fera quelques heures supplémentaires un jour où elle aurait dû rejoindre Matt pour qu’ils recollent les morceaux de leur couple abîmé. Ses doigts agités parcourent rapidement les feuilles imprimées, elle y lit des blessures qui lui font froncer les sourcils et la voilà déjà qui grogne, la McGrath. Elle a bien trop encore en mémoire sa dernière discussion avec Alfie pour croire que les mots échangés ne sont pas liés à son arrivée soudaine aux urgences de l’hôpital. Une part d’elle est déjà bien étonnée qu’il soit arrivé jusqu’ici, en réalité, et c’est pour cette raison qu’elle compte bien attendre d’avoir planté une aiguille dans sa chair avant de lui faire la morale : ainsi au moins, il sera plus difficile de fuir.

La jeune femme entre sans se faire annoncer et elle prend encore moins le temps de demander à Alfie comment il se porte ni même à quel point sa journée est merdique, sur une échelle comprise entre 10 et 10. “Enlève ton tee-shirt.” Ils ne sont séparés des autres patients que par des rideaux opaques et c’est pour cette raison et celle-là seule qu’elle se retient de lui parler trop fort, si ce n’est lui crier dessus. Leurs histoires ne regardent qu’eux, au fond, et Alfie est la seule raison pour laquelle elle perd peu à peu de son phlegme alors qu’elle essaye simplement d’enfiler des gants en latex. Elle s’attend à toutes les blagues du monde venant de lui mais aucune ne saurait lui décocher le moindre sourire, encore moins alors qu’elle se décide à réellement commencer à faire son travail et se rapproche de lui pour examiner l’état de sa plaie sur l’abdomen. Elle grimace par simple réflexe tout en sachant pourtant que s’il n’est pas au bloc opératoire c’est que ses jours ne sont pas en danger et que tant qu’elle continuera à être consciencieuse, cela restera ainsi. Elle a beaucoup de raisons de vouloir le tuer mais elle en a plus encore pour qu’il reste en vie.

Des compresses stériles sont délicatement posées autour de la plaie pour nettoyer le sang superflu et déjà séché pour la plupart et tant qu’elle s’applique à cette tâche-ci, elle continue de soigneusement éviter d’avoir à faire à Alfie. Lorsque ses yeux bleus toisent les siens, ce n’est qu’au moment de poser deux doigts sur son front pour l’intimer muettement à se coucher sur le lit pour la laisser faire son travail dans les meilleures conditions. Ses yeux ne sont pas vitreux et son teint n’est pas plus pâle que d’habitude ; c’est aussi ce qu’elle vérifie en même temps qu’elle lui décoche un regard noir et lourd de sens. Qu’elle ait raison ou non sur l’origine de cette plaie, elle sait que ça a tout à voir avec son insupportable caractère et son attitude pire encore. Les compresses s’imbibent rapidement de son sang avant de finir jetées à la poubelle, elle ajoute un parfait mélange de produits en tout genre pour éviter infections et sur-infections. Il n’aura pas envie de revenir et elle, elle n’a déjà pas envie de le revoir. Elle a encore moins envie de savoir qu’il sera de retour à l’hôpital possiblement un jour où elle sera dans un autre service. “C’est ton sang ou celui de mon frère que je suis en train de nettoyer, là ?” Incapable de garder ses questionnements pour elle éternellement, elle pose la question qui lui importe le plus avant de passer à la dizaine d’autres qui attend sagement, chacune prête à être envoyée au visage d’un Maslow incapable de fuir l’arène de combat. Elle fera son métier, oui, mais personne ne dit que ce sera sans douleur.

@alfie maslow :l::l:
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyLun 11 Jan 2021 - 20:30


@LILY MCGRATH & ALFIE MASLOW ⊹⊹⊹ Who can I blame with everything I've done Is this the price we pay for too much fun, Don't be misled it's not a twist of fate, It's just what happens when you stay out late, So raise your glasses all my kings and queens.

Il a troqué une infirmière pour une autre et si d’autres auraient considéré avoir perdu au change quant au fait de perdre l’amie (Norah) au détriment de celle qu’il est incapable de qualifier (Lily), Alfie s’avère plutôt satisfait de cette situation. Ce n’est pas qu’il veut fuir la première ; c’est surtout qu’il veut confronter la seconde. Évidemment, le plus logique serait qu’il soit celui qui doit rendre des comptes et en réalité la finalité de cette rencontre n’est pas tant de poursuivre dans la dynamique qui les caractérise avec un ratio reproches à la minute qui ferait pâlir de jalousie les meilleurs avocats que de simplement lui annoncer (à sa drôle de façon) qu’il lui est sincèrement redevable. À le voir ainsi, une plaie importante au ventre, on peut se demander à quel moment il est supposé remercier Lily, pourtant l’état psychologique de l’anthropologue contraste avec son état physique ; c’est un soulagement qu’il ressent encore, quelques heures après son méfait. À cette heure-ci, Joseph est probablement en train de crever dans une ruelle et aucune autre image ne pourrait autant lui réchauffer le cœur que celle de son meilleur ami payant pour ses fautes, tandis que le plan du plus jeune se met doucement en place pour s’assurer que Joseph ne va pas se contenter de payer, mais également de le regretter, amèrement, lorsque chaque éclaircie dans sa vie sera balayée par l’ombre d’un Alfie qui n’en a pas fini avec lui malgré ce qu’il laisse présager. Il a toujours été un prédateur, Alfie et il n’a pas fini de s’amuser avec sa proie. Il n’a pas fini de la torturer, autant qu’il n’a pas fini de laisser sa marque sur tout ce qui compose l’entourage de celle-ci et une fois encore, Lily fait office de dommage collatéral des attitudes destructrices des deux hommes qui n’ont jamais vraiment grandi, finalement. C’est elle qu’ils ont toujours traité de gamine et pourtant les rôles devraient être reconnus comme étant inversés, l’infirmière n’ayant jamais cessé d’être là pour rattraper leurs erreurs, quitte à s’oublier dans le processus.

Aujourd’hui encore, c’est elle qui doit tenter de réparer les pots cassés alors qu’Alfie s’est rendu à l’hôpital plus par intérêt qu’inquiétude quant à son état. Et s’il baissait les yeux, il constaterait l’ampleur des dégâts ; peut-être qu’il cesserait d’afficher ce sourire satisfait. Mais c’est bien dans le regard de Lily que ses prunelles s’ancrent, alors qu’elle lui donne un ordre qui ne fait qu’étirer ses lèvres. « Ici, Lily, vraiment ? » Il fait mine de regarder autour de lui pour s’offusquer du choix de l’endroit, réprime une grimace de douleur lorsque le geste ravive sa blessure, poursuit son sarcasme à outrance, signe de la fierté qu’est la sienne à cet instant. « Enfin, à tes ordres. » Et alors qu’il se tord péniblement pour tenter d’ôter son vêtement, grimaçant légèrement lorsqu'il s'accroche aux plaies de son dos qui n'ont jamais réellement cicatrisées. Il ne manque pas de poursuivre, quitte à véritablement user de la patience de la jeune femme – n’est-ce pas là son objectif depuis qu’ils sont enfants ? « Même si en tant que soignante, ce serait à toi de m’aider à l’enlever. Le service laisse vraiment à désirer. » Il râle, venant à bout de la besogne alors qu’il laisse tomber le tissu par terre pour croiser à nouveau son regard et persister à afficher son air de con, peu importe si toute l’attitude de Lily lui suggère de changer d’attitude au plus vite. Il n’y compte pas. Comment le pourrait-il, de toute évidence ? L’euphorie, mêlée à une certaine adrénaline, sont encore bien trop présentes dans ses veines pour qu’il ne parvienne à se calmer, son corps qui persiste à s’agiter et ses lèvres qui ne demandent qu’à laisser échapper toutes les pensées qu’il voudrait partager. Le délit dont il s’est rendu coupable n’est pas la seule explication à son agitation, mais Lily n’a pas à savoir le reste de ses méfaits quand seule compte la satisfaction d’avoir obtenu cette vengeance tant espérée depuis des mois.

Il perd de sa bonne humeur alors qu’elle s’applique à nettoyer la plaie ; et cette fois-ci, c’est à lui de s’offusquer et, surtout, de le verbaliser lorsqu’elle essaie même de le rendre plus docile qu’il ne l’est en l’obligeant à se coucher. « Arrête. » Il ordonne à la jeune femme en posant sa main sur la sienne pour l’interrompre dans sa tâche, resserrant ses doigts autant de sa paume. « C’est une preuve. » Il souligne, se relevant, reprenant rapidement : « J’en ai besoin, alors on fait comment, dans ces cas-là ? On appelle la police, vous faites un joli rapport ? » À mon avantage, Lily et tu n’auras pas le choix. Elle a déjà vendu son frère une première fois, elle n’est plus à une trahison près. Son frère, d’ailleurs, dont il n’a pas besoin de souligner l’existence pour qu’elle comprenne qu’il n’est pas innocent à tout ceci. « Pour qui tu me prends ? » Il s’offusque (faussement), reprenant rapidement : « Le mien. J’ai nettoyé celui de ton frère avant de venir. » Et il papillonne des yeux pour exagérer sa réponse, dans une tentative de la faire douter de cette certitude qu’elle a pourtant toutes les raisons d’avoir. Et si leurs deux attitudes contrastent fortement, Alfie n’oublie pas qu’il est redevable. De la même manière, il sait pertinemment lire en Lily et à travers son silence et ses regards noirs, suffisamment pour que son visage soit plus sérieux lorsqu’il lui murmure : « je t’avais rien promis. » dans le but d’apaiser ce qu’il imagine être ses tourments. Elle n’est pas fautive, elle n’est pas responsable, elle doit se pardonner ce qu’elle serait susceptible de se reprocher ; elle l’a sauvé, comme toujours, parce qu’elle est celle qui a assure toujours ses arrières et pour cela, elle vaut bien qu’il mette son égoïsme de côté.  
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyMer 13 Jan 2021 - 3:15

Il se concentre sur ses blagues qui n’ont pas évoluées depuis l'adolescence ; elle ne voit que le sang séché qui a imbibé son tee-shirt. Plus jeune, elle aurait rougie à l’idée même de l’imaginer torse nu. Aujourd’hui, force est de constater que bien des choses ont changées et qu’il a participé à sa façon à faire de Lily une adulte. « Ici, Lily, vraiment ? » Ses lèvres à lui s’étirent dans un sourire carnassier ; celles de la brune se retiennent d’être pincées par des incisives déjà à bout de patience. Il a toujours eu l’ascendant sur elle et la jeune femme enrage encore maintenant à l’idée que ce soit toujours le cas, quand bien même il est pâle et avec une plaie qui fait peur à voir. Même au plus mal physiquement, il a toujours le dessus, et c’est une chose difficile (impossible) à accepter pour une enfant, adolescente, adulte, qui s’est toujours battue pour être la meilleure, la plus forte. « Enfin, à tes ordres. » Le bleu de ses yeux ne dérivent en la direction du brun que lorsqu’il est occupé à se battre avec son habit. Elle l’observe lutter en silence sans jamais penser un seul instant à venir l’aider ou lui proposer de couper le bout du tissu, de toute façon inutilisable désormais. Dans d’autres circonstances, elle aurait payé cher pour qu’il obéisse justement à ses ordres en formulant aussi peu de plaintes. « Même si en tant que soignante, ce serait à toi de m’aider à l’enlever. Le service laisse vraiment à désirer. » - “Fais doucement, ne rouvre pas ta plaie.” Elle retient à son tour des remarques et autres reproches à son égard. Il a au moins raison sur une chose, Alfie : ce n’est pas le lieu approprié. Elle ne veut pas que l’hôpital tout entier apprenne la vie et les déboires du brun et encore moins qu’ils apprennent qu’elle est bien plus liée à lui qu’elle ne le voudrait. Ce n’est pas qu’elle s’inquiète qu’il se fasse mal, c’est surtout qu’elle n’a pas envie d’avoir du travail supplémentaire et, par conséquent, plus de temps à passer en sa compagnie. Déjà, elle regrette de s’occuper de son cas. L’ampoule “mauvaise idée” clignote d’un rouge vif quand le sang de son ami a déjà eu tout le temps de s’oxyder. La jeune femme continue d'éviter son retard comme la peste et agit bien plus méticuleusement à ce sujet qu’à propos de sa plaie au ventre qu’elle ausculte rapidement avant de commencer à soigner. Tout est pire qu’elle pouvait le penser et si Alfie est dans cet état là, elle s’inquiète aussi et surtout de savoir comment se porte son grand-frère.

Deux doigts posés sur le plexus du chercheur l’enjoignent à se coucher sur le matelas et bien qu’elle prenne avec lui bien plus d’initiative qu’avec n’importe quel patient, elle oublie parfois bien trop rapidement à quel point il diffère justement de ses autres patients. « Arrête. » Lily se fige sous le geste inattendu du trentenaire avant de rapidement se reprendre, brièvement paniquée à l’idée que le passé puisse se répéter. Aussi paradoxal le sentiment puisse-t-il être, elle sait pourtant qu’elle est bien plus en sécurité avec Alfie qu’avec qui que ce soit d’autre sur cette Terre, ou presque. Cela n’empêche pas ses yeux d’enfin croiser les siens dans le simple but de leur lancer des éclairs, pourtant. “Ne me touche pas.” Ses mots, froids, n’existence que pour souligner une évidence. Il sait qu’il n’a pas le droit d’agir ainsi, quand bien même il continue d’être un insupportable être humain. « C’est une preuve. » Qu’est ce qu’elle disait. Il se relève, elle le déteste. Elle se rapproche instinctivement de la plaie, comme si ses doigts allaient servir à rapprocher les chairs abîmées pour ne pas que la plaie n’empire encore plus. C’est pathétique. Les mots d’Alfie n’arrivent à son cerveau que bien après, et ce n’est qu’à ce moment qu’elle a finalement un bon millier de questions à lui poser, à commencer par : une preuve de quoi, Alfie (putain) ? Ce n’est pas parce qu’elle le connaît depuis toujours qu’elle arrive à le cerner. Bien loin de là. Certains jours, elle aimerait que ce soit le cas ; d’autres, elle s’estime heureuse de ne pas comprendre son esprit tordu. « J’en ai besoin, alors on fait comment, dans ces cas-là ? On appelle la police, vous faites un joli rapport ? » Est ce qu’il est sérieux, là ? Oui, absolument. Elle n’a aucun doute à ce sujet, quand bien même elle ne cesse de lui laisser le bénéfice du doute depuis trente ans. Insupporte être humain qu’on disait donc, voici quelques mots qui pourraient le décrire avec précision. “Je participerai pas à ton petit jeu, Alfie. T’auras toujours une cicatrice comme preuve, mon seul but c’est qu’elle ne te tue pas.” Elle voudrait entamer un argumentaire sans fin mais une part d’elle sait bien que ce n’est ni le moment ni l’endroit, et qu’elle parle encore moins à la bonne personne pour ce genre de choses. Peu importe ce qu’elle pourrait lui dire, elle serait la dernière qu’il écouterait. A ses yeux, elle le sait bien, elle est une moins que rien. Si avant elle était au moins la petite soeur intouchable de son meilleur ami, aujourd’hui elle est le trophée poussiéreux dont il ne voit sûrement plus l’utilité. Les choses changent, mais pas Alfie. Pas le regard qu’elle pose sur lui, non plus, alors qu’elle grince des dents à chacun de ses mouvements et que la seule raison pour laquelle elle ne le confronte pas c’est parce qu’elle ne veut pas voir son état empirer. Même lorsqu’elle s’amusait à le recoudre, à l’époque, c’était bien plus par besoin de l’aider que par envie de s’entraîner pour son futur métier. La police s’occupera de son histoire après, quand elle sera bien trop loin pour entendre tous les mensonges qu’il aura à dire, ou pire encore : l’horrible vérité qui dérange.

Ses gestes lents et professionnels tentent à nouveau de garder le brun sous contrôle. Elle ne veut pas avoir à lui donner un calmant, quand bien même une partie d’elle rêve encore et toujours de lui enfoncer une aiguille dans la peau. Ses veines ressortent sous le coup de la colère, de l’agitation, de l’excitation. Rayez la mention inutile, sûrement. « Pour qui tu me prends ? » Elle en aurait beaucoup, des adjectifs à lui coller sur le front. Le qui est-ce serait interminable. Il a eu tous les rôles à ses côtés, les pires comme les meilleurs. Compagnons de ses rêves, il l’a aussi été de ses pires cauchemars, lesquels ressemblaient parfois bien trop à la réalité. Aucune réponse ne pourrait être apportée à cette question qui n’en a de toute façon que le nom. Lily aussi a changé, elle a perdu en naïveté et gagné en assurance. En apparence, au moins, c’est le cas. C’est ce qui lui permet de poser une main autour du bras de son ami, infiniment plus doucement qu’il a pu le faire avec elle alors qu’elle applique une faible pression pour tenter de le ramener contre le lit. « Le mien. J’ai nettoyé celui de ton frère avant de venir. » A défaut de se laisser aller à une gifle qui n’aurait rien de professionnelle, elle ne peut pour autant pas s’empêcher d’enfoncer ses doigts contre sa chair. Il lui parle trop doucement, trop fièrement, alors qu’en face l’infini self-control de Lily ne sait que voler en éclat. “Tu te crois drôle ?” Il est le blagueur, elle est la rabat-joie. Les rôles sont actés depuis la première heure et elle est incapable de se dérober du sien ; force est de constater qu’il en est de même pour lui. L’air de la jeune femme est grave, autant que n’importe qui aurait jugé l’être toute cette situation. Seul Alfie ne semble pas comprendre les conséquences de ses actes, sur lui même comme sur autrui, et elle ne sait pas si elle doit rejeter la faute sur son insupportable caractère ou sur l’adrénaline. La réponse ne lui plairait sans doute pas. “Non, ne répond pas.” Bien sûr qu’il se croit drôle. Bien sûr qu’il pense pouvoir jouer avec tout et tout le monde comme si le monde était son terrain de jeu et chaque être humain ses marionnettes. Quand cela ne concerne qu’elle, elle ne peut s’en prendre qu’à sa propre personne pour mieux lui lancer des reproches ensuite. Cette fois-ci, ce ne sera pas possible. Oh, Joseph n’est bien sûr pas tout blanc dans cette histoire, mais elle n’est pas cupide au point de dire qu’il mérite ce qu’il lui est arrivé. Jamais elle ne pensera que la violence est une réponse appropriée. « je t’avais rien promis. » Il pense la calmer mais ne sait faire que tout le contraire. Peut être qu’il n’a finalement pas toutes les clés pour comprendre la Keegan, en fin de compte. Peut être qu’il ne fait que souffler le chaud et le froid, aussi, parce que ce serait bien une malice de plus dont il serait capable.  “Comme si me mentir t’aurait dérangé.” Il l’a sûrement déjà fait et il le fera encore, parce que même après cette journée elle ne se résoudra pas à le rayer de sa vie. Joseph aurait payé le prix fort pour moins que ça. Pourtant c’est à cause de Joseph justement qu’elle s’est accrochée à Alfie comme s’il était une bouée de secours alors qu’il représente justement tout l’inverse que des secours. Il ne personnifie pas les lumières qui arrivent au bout du chemin pour la sauver ; il sont celles qui vont repasser sur son corps pour bien s’assurer de ne pas avoir laissé de blessés derrière elles, seulement des cadavres. Il passe et repasse sur son cœur abîmé depuis des décennies. “Est ce qu’il est vivant ?” Si elle risque de tuer Alfie s’il continue de se moquer d’elle à ce niveau, il aura au moins eu le mérite d’arriver en un seul morceau à l’hôpital. Pour le moment encore, ce n’est pas le cas de son frère. Si un Keegan s’était présenté, on le lui aurait dit. Personne ne crie son nom, personne ne l’appelle, personne ne cherche à entrer dans leur salle d’auscultation de fortune. Joseph n’est pas à l’hôpital ; il n’y ira pas non plus. Pour la première fois depuis longtemps, elle s’inquiète réellement pour son aîné, les mains tâchées d’un sang qu’elle soupçonne encore d’appartenir à sa propre famille. Sujette à un trop plein d'émotion qu’elle rejette, elle abandonne un instant sa lutte contre le Maslow pour se nettoyer les mains et recommencer à zéro un processus qu’elle anticipe déjà être long et éreintant. “Je peux très bien expliquer que la plaie était plus profonde que prévu et que tu es mort sans que je n’ai rien pu faire. Est ce que j’ai l’air de rigoler ?” Elle a sa propre vision du bien et du mal et pour elle, un tel geste ne l’empêcherait en rien de toute de même accéder au Paradis. S’il a effectivement tué son frère, elle ne ferait que rendre justice - beaucoup diraient que justice n’est pas synonyme de revanche, elle menacerait de les faire taire à jamais eux aussi. A sa question rhétorique n’existe qu’une seule réponse : elle ne rigole pas le moins du monde, ses yeux plongés dans les siens lui confirmant cette folle théorie. Leur lien restera toujours incompréhensible pour le reste du monde en plus d’eux même mais s’il s’avérait qu’il avait effectivement franchi la ligne rouge avec son frère, elle n’hésiterait pas à lui faire payer à son tour pour continuer cette escalade de violence qu’elle est la première à avoir détesté. “Tu pouvais pas te contenter d'aller voir la police avant de te faire justice toi même, pas vrai ?" Les reproches ne sont pas voilé, son ton ne cache rien. Elle est fatiguée de perpétuellement se retrouver au milieu d'une bataille à laquelle elle participe bien malgré elle : Alfie contre Joseph, Lily contre Joseph. Joseph contre le reste du monde - mais c'ets bien parce qu'il l'a cherché, faut dire. "On est obligés de signaler les blessures par couteau, oui. Mais ne compte pas sur moi pour t'aider à ce sujet." Elle rendra un rapport tout ce qu'il y a de plus factuel et tout ce qu'il y a de moins utilisable pour la police. Joseph ne sera pas puni en plus d'avoir eu à faire face à Alfie. Même elle, elle trouve que ce serait injuste. "Continue de bouger et je jure que je vais demander à ce qu'on t'attache." Les douces paroles d'une enfant à son premier amour.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyLun 25 Jan 2021 - 2:27

C’est une histoire longue de plusieurs décennies, pourtant Alfie prend toujours un plaisir (malsain) à tenter de pousser Lily dans les limites de ce qu’elle peut accepter, dans l’espoir de lui provoquer la moindre réaction qui saurait le divertir, lui être utile ou, à défaut, simplement lui prouver que la jeune femme n’est pas celle qu’elle prétend être. Il aurait dû se lasser de ce petit jeu avec les années, prétendre que l’âge va évidemment de pair avec la maturité et qu’il ne peut plus s’adonner à de telles gamineries. À l’inverse, il aurait simplement pu se satisfaire des quelques expériences qui se sont avérées satisfaisantes (plus pour lui que pour elle) et se reposer sur ses lauriers plutôt que de continuer à concrétiser son avance dans ce jeu qui les unit depuis des années. Parce que c’en est devenu un, de jeu, avec les années, sans que des règles soient réellement fixées et qu’aucun but ne menant à la victoire ne soit mis en avant. Mais une compétition s’est mise en marche entre eux et il semblerait que finalement, l’intérêt réside dans le fait de rendre l’autre dingue autant que de ne jamais l’abandonner – mais ça, bien sûr, il est interdit de le souligner. Aujourd’hui en est la preuve, Lily aurait toutes les raisons de l’abandonner à son sort et de prôner une certaine éthique pour justifier de ne pas s’occuper de lui, pourtant elle est bien l’infirmière responsable de ses soins. Il pourrait s’en offusquer, user de l’idée que le patient a tous les droits pour exprimer son malaise et demander une autre professionnelle ; il ne le fera pas. L’envie de lui montrer son œuvre, qu’elle en soit consciente est aussi importante que le simple fait que ce soit elle, et personne d’autre, qui soit face à lui. Et que, dans cette situation et tant d’autres, ça ne peut être personne d’autre qu’elle, en réalité.

Et il joue, Alfie, alors que la situation ne s’y prête en aucun cas, étirant ses lèvres pour lui offrir ce sourire fourbe qu’elle connaît déjà par cœur. Il s’amuse de la gêne passée de Lily qui, il en est persuadée, n’a pas totalement disparue. Les réflexions n’ont rien de surprenantes, elles sont même dépassées, mais cela n’empêche Alfie d’en faire l’usage : il sait que cela fonctionne toujours autant à en voir la mine de Lily, alors il en abusera tant que sa mâchoire se crispera et que ses yeux s’empêcheront d’être levés au ciel. Il fait le malin, Alfie, comme toujours ; néanmoins malmené dans sa fierté par ce tissu qu’il peine à ôter sans grimacer. Il aurait pourtant tellement d’autres raisons pour s’agacer : la situation en elle-même, le sort de Joseph qui représente un point d’interrogation, le simple fait de se montrer faible face à Lily même si l’on peut penser le contraire. Faible, il l’est, à cet instant et pas uniquement parce que ses blessures l’empêchent de parader fièrement pour accentuer toujours plus la colère de Lily. C’est son corps tout entier, dénudé à moitié, qui démontre de toutes ses faiblesses qu’il a caché même à Jules. Et s’il n’a honte de rien Alfie, il y a certains aspects qui auraient dû rester dissimulés sous le confort filtrant d’une chemise, même tâchée d’un sang qui n’est pas le sien. Surtout tâchée d’un sang qui n’est pas le sien. « J’ai vu pire, tu sais. » Son sourire fier ne quitte pas ses lèvres, mais son regard traduit de la difficulté à le maintenir en place lorsque les images lui reviennent en mémoire, celles qui reviennent sans cesse depuis quelques semaines. Il jure que c’est la faute de Joseph, pourtant le mal était installé depuis longtemps, son meilleur ami n’a fait que lancer le décompte avant l’explosion, en prenant soin de dissimuler à Alfie celui-ci pour qu’il soit le premier surpris lorsque tout se déclenchera. « Mais c’est adorable de ta part de t’inquiéter. » Et il s’accroche à sa fausse assurance autant qu’aux pupilles de Lily, qui reprend son rôle de dommage collatéral de ses propres démons. Il ne peut pas les laisser s’exprimer, pas aujourd’hui, pas face à elle, alors il lui mènera la vie dure une fois encore, juste pour penser à autre chose, juste pour lui faire du mal à elle plutôt qu’accepter celui qu’on lui a fait à lui.

La docilité dont il fait preuve est surprenante – mais pas lorsqu’elle est ordonnée par Lily, même si elle pourrait être la première à prétendre le contraire. Il l’a souvent été à son contact, mais jamais longtemps, c’est bien ça le problème. Ses doigts se resserrent autour des siens, son ton se veut ferme ; comme toujours, elle ne peut savourer une victoire qu’éphémère. Mais Lily est une adversaire redoutable sous ses airs d’ange (et c’est bien cette partie d’elle qu’il apprécie tant et à laquelle il veut toujours plus accéder) et l’ordre qui est le sien lui permet de regagner sa liberté lorsqu’il desserre ses doigts pour faire tomber sa main à côté de lui. « T’aimais ça, à une époque. » Il est lourd, Alfie, il le sait et il s’en fiche : il a besoin d’être cette personne pour la déstabiliser plus qu’il ne l’est lui-même. Car il sait très bien que tout ce qui se passe dans sa tête n’a rien de normal, de cohérent, de logique – comme c’est le cas d’ordinaire. À la différence que cette fois, il est autant excité que terrifié par tout ce qu’il se passe dans ce cerveau qu’il n’arrive jamais à éteindre, dans ces pensées qu’il n’arrive jamais à rendre silencieuses. Et pour celles-ci, le constat est sans appel : la vengeance dont il rêve depuis des mois n’a pas encore lieu ou, du moins, n’est pas terminée. Elle ne le sera que lorsque Joseph se lèvera chaque jour avec la boule au ventre, autant parce qu’il craindra pour sa vie que parce qu’il doit vivre avec les conséquences de ses actions, comme lui l’a vécu pendant des mois dans le mépris le plus total de son meilleur ami. Il est hors de question que le Keegan s’en sorte avec une telle facilité – s’il l’avait réellement souhaité, jamais il n’aurait dû s’attaquer à un adversaire comme Alfie. Il ne va pas se contenter d’avoir ruiné son visage, il veut lui prendre toutes les bribes de sécurité, de justice, de soutien auxquels il pourrait s’accrocher. Il veut ruiner chaque pan de sa vie, avec une lenteur peut-être sadique mais ô combien jouissive. Il a commencé par sa santé, il s’est attaqué à ses valeurs (encore faut-il qu’elles existent réellement), il va poursuivre le travail jusqu’à lui ôter les quelques lueurs qui existent encore dans sa vie, à commencer par ses proches. Lily en tête de liste – ultime preuve qu’elle n’est et ne restera qu’un dommage collatéral. Il va lui ôter tout ce à quoi il croit, tous ceux qu’il aime, anéantir ses objectifs les uns après les autres, le détruire à petit feu et s’en satisfaire sans même s’en cacher. « Tu y participes déjà. » Qu’elle soit d’accord ou non, qu’elle en ait conscience ou non, elle fait partie intégrante de la partie qui se joue entre son frère et lui. Elle est leur Dame, la pièce la plus puissante du jeu, celle qui peut être manipulée dans toutes les directions et qui assurera la victoire à celui qui saura le mieux l’utiliser. Et pourtant, malgré cela, elle reste la pièce la plus imprévisible et celle qui peut mettre les autres en danger. Il le sait, Alfie, mais ce n’est pas pour autant qu’il tente d’user de justifications auxquelles elle ne croirait pas pour masquer ses réelles intentions ; elle le connaît mieux que personne, mieux que lui-même et elle est probablement au courant de celles-ci avant même qu’il ne puisse vraiment y réfléchir.

Et elle reprend l’avantage, Lily, lorsqu’elle met ses remontrances de côté pour faire son travail et qu’il est forcé d’admettre (mais pas à voix haute, il y a des limites qu’il ne dépasse pas), qu’il en a besoin. Il ne grimace pas plus qu’il ne le ferait avec Norah, ce qui a le don de le surprendre : elle n’appuie pas volontairement pour lui faire mal, elle n’a pas la main généreuse sur le désinfectant juste pour le brûler un peu plus que de raison. Même lorsqu’il la provoque, encore et encore, la pression sur son bras se fait presque douce. Et ça le déstabilise une fois encore ; parce qu’il n’aime pas la douceur et qu’il est le premier à ne pas être gêné par cette douleur pourtant si vive au niveau de son abdomen. Il l’accepte, il l’accueille à bras ouverts et il pourrait presque en redemander. Elle le sait, probablement et elle l’énerve à son tour. Il ne laisse rien paraître tandis que ses lèvres s’étirent en un sourire en guise de réponse à sa question qui n’en est finalement pas une. Il ne répond pas ; de toute évidence elle connaît déjà la réponse et son sourire s’agrandit lorsqu’elle commence – enfin – à se venger sur lui, de ses ongles qui laissent des marques sur sa peau. Et peut-être qu’il veut accentuer un peu plus cette rage qui s’imprime sur sa chair lorsqu’il en parle enfin. Pas au détour de grossières plaisanteries, pas au détour d’un sourire satisfait tandis que son visage se veut plus sérieux. Il n’avait rien promis ; il n’a pas d’excuses à formuler. Néanmoins, s’il en avait à faire, ce ne serait pas Joseph qui en serait le destinataire, mais la femme qui se trouve en face de lui. Pour quelles raisons exactement, il l’ignore et il n’est pas certain de vouloir le savoir. Ses épaules se soulèvent en un geste las à sa réflexion : il a conscience qu’elle a raison. « J’aime encore moins me justifier. » Et pourtant, il le fait. Il aurait pu dire les choses plus simplement et évoquer le fait que malgré que ce soit quelque chose qu’il déteste de tout son être, il le fait pour elle. Que les mensonges ne sont pas un problème, contrairement aux explications ; mais il a préféré le désagrément des secondes plutôt que le confort des premiers. Parce qu’il le fait pour elle.

Peut-être que la survie de Joseph tient à ce détail, parce qu’il n’aurait pas eu de justifications suffisantes si l’inverse s’était produit. L’idée lui effleure l’esprit. Elle est tout aussi vite balayée. « J’en sais rien. » Car lui mentir le dérangerait, en réalité. Il y en aurait eu, pourtant, des bons mensonges à utiliser, l’esprit créatif d’Alfie aurait su lui apporter une issue favorable au sort de son frère pour soulager le poids sur son cœur qu’elle est la première à ne pas assumer. Mais Alfie n’a jamais été là pour la rassurer – ou jamais longtemps – et son rôle consiste à appuyer (si ce n’est lui en créer de nouveaux) ses tourments. « Il l’était quand je l’ai laissé partir. » Il l’était et j’espère qu’il agonise dans un caniveau. Mais il a la décence de préserver (pour une fois) Lily de ses pensées les plus impures. Elle se doute probablement de ce qu’il se passe dans sa tête, de toute manière, alors autant ne pas l’ébruiter si ce n’est pas nécessaire. « Non. » Il répond à sa question tandis que son regard ne quitte pas le sien : « Mais est-ce que j’ai l’air d’espérer que tu plaisantes ? » Non plus. Elle peut faire ce qu’elle veut ; elle sait mieux que personne à quel point il est capable de s’autodétruire, il peut bien laisser le travail aux autres, pour une fois. Joseph s’y était mal pris, peut-être que sa sœur se montrera plus douée que lui dans le domaine et peut-être même qu’il y a un Keegan à qui il n’en voudra pas d’attenter à sa vie.

Et le voilà, le discours moralisateur qu’il attendait depuis le début ; et les voilà, ses vieilles habitudes qu’il ne réprime même pas lorsqu’il lève les yeux au ciel et laisse échapper un soupir. « Et tu ne peux pas te contenter de désapprouver sans te sentir obligée de faire la morale, pas vrai ? » À son attaque, il répond par une autre, ça a toujours fonctionné ainsi entre eux et aujourd’hui semble être l’apogée du combat qu’ils mènent depuis des années. « Continue de me juger et je jure que c’est deux Keegan à qui je vais pourrir la vie. » Sa voix se veut plus ferme, son regard sévère, sa silhouette s’approche de la sienne. « Tu sais très bien que j’en suis capable et tu remercieras ton frère pour ça. » Il est celui qui a appuyé sur le bouton, celui qui a déclenché tout ça, qui a mis fin à des années d’une quiétude qu’il a mis des décennies à espérer, à trouver et à construire. Il a tout détruit d’un simple mensonge qui s’est poursuivi, encore et encore, alors qu’il se délectait des conséquences de son geste. Aujourd’hui, les rôles ont changé et il est celui qui prendra plaisir à détruire Joseph, comment peut-elle le juger pour ça ? « La police a eu un an pour mettre la main sur ton connard de frère. Et ils n’ont pas réussi. Tu crois vraiment que ma parole de mec à moitié ravagé par une agression aurait eu du poids ? Que j’aurais pu me ramener avec une impression et des aveux qui n’existent même pas ? » C’est peut-être ça, le pire. Même quand Alfie lui a offert une porte de sortie, Joseph n’a pas voulu s’en saisir. Alors il n’avait plus aucune raison de ne pas claquer celle-ci et de piéger son meilleur ami à son propre jeu. « J’ai mis des semaines à réapprendre à manger ne serait-ce qu’une putain de pomme ou à me tenir debout sans manquer de me casser la gueule tous les trois mètres. » Et son équilibre, déjà précaire, ne sera jamais regagné. « J’ai mis presque une année avant de réussir à de nouveau parler plus de dix minutes sans chercher mes mots. » Et s’il se félicite tous les jours d’y être parvenu, le débit qui le caractérisait a disparu à tout jamais. Il s’essouffle, il se perd, il s’embrouille et les grandes théories qu’il pouvait faire en quelques minutes appartiennent au passé. Pratique, dans le cadre de son travail. « J’ai oublié des mois entiers de ma vie, des détails que je suis censé connaître depuis des années, des recherches que j’ai menées pendant des années et que j’ai détaillées dans des revues. Va dire à ton mari que tu te souviens pas de sa couleur préférée ou retrouve-toi devant un auditoire sans savoir ce que t’es censé leur présenter. » Mets-toi à ma place, Lily. Mais elle n’en a jamais été capable, comme il n’ a jamais fait l’effort de se mettre à la sienne. « J’ai été prisonnier de mon propre corps pendant des mois et maintenant je suis prisonnier de mon psychisme parce que ton frère n’a pas pu se contenter d’aller voir la police après s’être déchainé sur moi. » Il a verbalisé ses difficultés physiques sans en être fier à quelques personnes, mais jamais il n’a admis que le problème est bien plus profond, bien plus ancré et qu’il n’arrive pas à s’en débarrasser : parce que l’acte de Joseph n’est que le dernier d’une longue série qui a attenté à son intégrité psychologique et qu’il n’y a plus rien pour préserver celle-ci, désormais. Jules devient un vague souvenir, sa vie professionnelle est ruiné et cette adrénaline, destructrice, coule à nouveau dans ses veines. « J’ai dû regarder ma vie m’échapper, Lily, pendant que ton frère continuait la sienne. » Sans désagréments, sans remords, sans conséquences. Mais cette époque est révolue et à cette idée, le cœur d’Alfie ne peut que s’emballer d’excitation. « Alors ta morale, tu te la mets où je pense et t’essaies de te mettre deux minutes à ma place. » Bien qu’elle en soit incapable, bien trop ancrée dans sa vision manichéenne du monde qui l’oblige de considérer Alfie comme le grand méchant. À raison ou à tort, lui-même l’ignore. « Et accessoirement, tu fais ton boulot pour que je puisse me barrer au plus vite et aller me calmer loin d’ici. » Loin d’ici, loin d’elle, loin de celui qu’il était ; alors qu’il ne s’est jamais autant rapproché de celui qu’elle a connu lorsqu’ils étaient adolescents et qu’elle a retrouvé quelques années plus tard, celui qu’elle a détesté de tout son être et qui lui le rendait bien, comme c’est le cas aujourd’hui.

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raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) Empty
Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyLun 1 Fév 2021 - 0:57

Une part d’elle a envie de remonter le temps pour le pousser dans un ravin pour qu’il y termine ses jours. Elle aurait utilisé une de ces nombreuses occasions où elle avait réussi à se faire accepter (comprendre : qu’ils ne la tapent trop fort et se lassent de vouloir la rejeter) lorsque Joseph et Alfie décidaient de partir faire les quatre cent coups. L’autre part d’elle regrette de ne pas lui avoir dit, à l’époque, à quel point elle pouvait déjà énormément tenir à lui, bien au delà du fait qu’il soit l’ami de et qu’elle lui trouve bien des qualités qui ne le définissait pas. Dans cette option là, elle regrette surtout de ne pas s’être elle-même forcée une place à ses côtés parce qu’elle est assurée, aujourd’hui encore, que s’il avait un jour réellement abaissé ses barrières alors elles n’auraient jamais existées à nouveau. Même avec Alfie, elle ne peut s'empêcher d’être bercée de douces illusions, lesquelles tranchent plus nettement encore avec la réalité des faits de cet instant précis. « J’ai vu pire, tu sais. » Elle sait et puisqu’il décide de maintenir son regard alors elle en fait de même, à la seule différence que Lily ne souffre pas et qu’elle n’a aucun mal à garder le bleu de ses yeux plongé dans les siens. Le jeu devient à celui qui ploiera le premier et qui essuiera par conséquent sa première défaite, la première d’une très longue bataille débutée il y a longtemps déjà. « Mais c’est adorable de ta part de t’inquiéter. » Personne n’a de mal à être faux, alors elle ajoute un bref et immense sourire pour marquer toute la fausseté de cette discussion et des mots échangés. Il serait bien trop simple de lui dire qu’elle ne veut que son bien et son bonheur autant pour lui que pour son frère mais il semble de plus en plus évident que les deux ne peuvent coexister ensemble.

Même dans les pires moments, ils continuent toujours d’appliquer certaines règles et se respecter un minimum, au moins selon leurs standards. Personne d’autre ne pourrait comprendre et ils n’ont jamais eu à statuer ces règles-ci mais pour eux, tout est clair. Ils jouent à un jeu que seul Alfie trouve amusant et lorsqu’elle juge que la limite est atteinte, ils reprennent au début. C’est donc naturellement que les doigts d’Alfie se délient de son fin poignet et que rapidement, elle se souvient qu’il ne peut être comparé à qui que ce soit d’autre. Il a des défauts, beaucoup, mais pas celui-ci. « T’aimais ça, à une époque. » Il rétorque comme à son habitude pour toujours avoir le dernier mot et nier l’évidence faisant de lui celui qui, pour une fois, obéit à un ordre. Bien qu’elle ne soit pas étonnée de sa réaction, Lily a aussi ses propres habitudes et son regard glacé croise momentanément celui de son ami, une fois supplémentaire. “Pas comme ça.” Répondre “non” aurait été un mensonge bien trop immense, même pour elle, raison pour laquelle la jeune femme prend la tangente et tente de se défendre en répondant à côté de la plaque. Elle aimait sa douceur à une époque parce qu’elle pouvait enfin entrapercevoir une part de lui qu’elle savait existante mais qu’il gardait éternellement cachée du reste du monde. Elle aimait sa proximité, elle aimait la façon qu’il avait de la regarder et elle aimait se sentir appréciée. Elle aimait beaucoup de choses, en réalité, mais elle ne se risquera jamais à en dresser la liste, ni à lui ni à personne. Il est question d’un passé révolu qu’ils ne prendront jamais la peine de tenter de réitérer. Ils étaient jeunes et stupides. « Tu y participes déjà. » Malheureusement, c’est une évidence. Lily ne prend pas la peine de lui faire part de son mécontentement à ce sujet puisqu’il l’a sans aucun doute déjà anticipé.

Lorsqu’il soulève ses épaules par habitude, son premier réflexe reste encore celui de grimacer ; non pas par mécontentement face à son attitude mais bien parce qu’elle craint qu’un geste aussi anodin que celui-ci ne vienne lui faire un peu plus mal au niveau de ses plaies qu’elle s’applique à suturer avec minutie. Elle a joué avec la douleur du brun pendant un temps mais est rapidement revenue à la normale. Aussi horripilant puisse-t-il être, il est aussi un patient et, par-dessus tout, il est Alfie. « J’aime encore moins me justifier. » Ses yeux ne se dégagent plus du fil et de l’aiguille se mêlant dans une parfaite harmonie à sa chair blessée, passée d’une teinte blanche à une bien plus rosée. “Je sais. Je te connais.” L’inverse est tout aussi vrai. C’est un fait qu’elle n’avait jamais pris le temps de formuler à l’oral mais dont aucun des deux ne peut oser douter. Elle connaît le pire de lui et elle a aussi bon espoir d’en connaître le meilleur ou, en tout cas, de pouvoir se l’imaginer. Par dessus tout, ce sont ses réflexions qu’elle connaît, à défaut de pouvoir les comprendre. Il lui mentira comme bon lui semblera et il ne se justifiera pas ; elle le sait et elle le fera pour deux, comme s’il y avait réellement un “nous” dans toute cette histoire.

Après avoir pris soin de s’occuper des problèmes urgents d’Alfie, la jeune femme prend enfin le temps de quémander des nouvelles de son frère. Officiellement, il n’existe pas, officieusement, elle est rongée à l’idée de le savoir seul sans personne pour lui venir en aide. « J’en sais rien. » Et en face, il ne lui est d’aucune aide. Il est le boulet à sa cheville qu’elle refuse de couper parce qu’elle ne veut pas le laisser seul, lui non plus. L’enfant en elle continue de dicter les réactions de l’adulte qu’elle est désormais devenue, quand bien même la réalité des nouvelles relations au sein du trio la heurte bien trop souvent de plein fouet. « Il l’était quand je l’ai laissé partir. » Alors elle se raccroche à ça, au moins. S’il l’a laissé partir c’est qu’il ne l’a pas tué, s’il est parti c’est qu’il en était au moins capable. L’infirmière en elle ne peut que se dire que l’adrénaline devait faire son effet et que cela ne prévaut pas sur un bilan complet à son égard. Est ce que Joseph viendrait même à l’hôpital ? Sûrement pas. Est ce qu’il oserait appeler sa soeur pour lui dire qu’il a besoin d’elle ? Toujours pas. Alfie ne l’a pas fait non plus, ceci dit, mais elle a au moins eu la possibilité de s’imposer à lui. Tout ce qu’elle souhaite faire c’est les soigner et les aider tous les deux, quand bien même elle sait que cela ne sera qu’un moyen pour les deux hommes de s’affronter une fois de plus. « Non. » En effet, elle ne rigolait pas. Lui non plus, à en juger par le regard prolongé qu’ils continuent de s’échanger. « Mais est-ce que j’ai l’air d’espérer que tu plaisantes ? » - “Si tu n’as pas voulu qu’il t’achève, tu ne laisseras pas sa sœur le faire à sa place.” Lily le reprend parce que oui, bien sûr qu’elle sait tout bien mieux que tout le monde et même à propos de ce qu’il pense. Elle n’a pas mérité le droit de le tuer et s’est toujours trop évertuée à lui venir en aide pour tout mettre à mal aujourd’hui. Si quelqu’un devait l’achever, elle voudrait effectivement que ce soit sa personne mais la date du jour n’est pas la bonne pour une telle chose. Non, il ne plaisante pas. Mais non, elle ne lui donne pas le droit de mourir sous sa garde, ni aujourd’hui ni demain. Il n’a pas le droit d’être égoïste à ce point.

Un, deux, trois, cinq, sept. Elle a perdu le compte. Ce n’est pas important. Elle doit refermer la plaie, c’est son seul travail. Il comptera tout seul le nombre de points pour mieux se vanter ensuite d’être une gueule cassée, et dès l'instant où il ira mieux elle sera la première à toujours faire claquer la paume de sa main à l’arrière de son crâne. « Et tu ne peux pas te contenter de désapprouver sans te sentir obligée de faire la morale, pas vrai ? » Ce jeu de questions rhétoriques déplaît déjà beaucoup à Lily, elle qui se jette dans la tourmente bien trop facilement. Je te connais, qu’elle avait dit. Lui, il pourrait statuer la même chose, sûrement même avant Joseph, avant Matt aussi. Il a eu toutes les histoires depuis toujours, l’officiel et l’officieux. Il a eu le droit à ses histoires familiales, fraternelles, amoureuses, sexuelles, maternelles. Il l’a vu rire et pleurer, il l’a vu au pire d’elle comme au meilleur. Il est passé outre tous ses mensonges parce qu’il connaît ses tactiques, ses yeux brillants, ses dents qui mordent à peine l’intérieur de ses lèvres. Il aurait pu la briser, s’il l’avait voulu, et c’est bien autant dans la peur que dans un espoir infini qu’un jour tout s’arrange qu’elle continue de le fréquenter malgré les décennies et ses tourments. « Continue de me juger et je jure que c’est deux Keegan à qui je vais pourrir la vie. » Un jour, elle lui a dit qu’elle l’aimait. Un autre, elle lui a souhaité de crever comme un chien sur le bas côté d’une route, sans personne pour lui tenir la main. Aujourd’hui, elle ne sait toujours pas quel sentiment prévaut sur l’autre dès lors qu’il est question du chercheur. “J’ai pas peur de tes menaces Alfie.” Qu’elle ment, la brunette. Elle est terrifiée à l’idée qu’il devienne un ennemi et non plus un “Alfie”, ce genre d’entre-deux qu’elle côtoie quand les astres sont en leur faveur et qu’elle se plaît à détester le reste du temps. “Je ne suis plus une Keegan.” C’est aussi ce qu’elle voulait avancer dans cet argument qui n’en a que le nom. Elle a passé une vie entière à répéter ne rien avoir en commun avec sa famille et surtout son frère et aujourd’hui, elle peut enfin le prouver grâce à ses nouveaux papiers et sa nouvelle identité. S’il pourrit la vie de Joseph, elle pourrira la sienne en retour. Ainsi fonctionne la loi du talion, remaniée selon ses propres principes. Ce n’est pas simplement leur guerre, c’est aussi celle de Lily, qu’ils le veuillent ou non. « Tu sais très bien que j’en suis capable et tu remercieras ton frère pour ça. » Joseph est blâmé pour bien des choses et elle n’ajoutera pas l’attitude d’Alfie à la liste. Il agit ainsi par sa seule faute et jamais elle n’en viendra à penser le contraire, même elle qui a pour habitude de toujours rejeter la faute ailleurs. Elle toise son regard, accepte la proximité nouvelle qu’il impose entre eux. Essaye si tu l’oses qu’hurlent ses yeux qui n’ont plus rien d’amoureux depuis longtemps. “Tu ne me veux pas en ennemi.” Elle lui confère des pensées qu’elle souhaiterait être réelles. Des deux, elle est sûrement la première à ne pas vouloir le considérer comme un ennemi, pas après tout ce qu’ils ont vécu et tout ce par quoi ils sont passés. Elle ne peut pas le perdre lui aussi, quand bien même sa présence à ses côtés semble aujourd’hui rimer avec menaces et pressions constantes. Lily l’a accepté une première fois pour quelqu’un d’autre, elle peut courber l’échine pour lui aussi, surtout si le plan revient à lui faire croire tout le contraire.

Il ne se justifiera pas, mais c’est pourtant ce qu’il fait pour la première fois depuis longtemps, si ce n’est toujours. Il ne se justifiait pas à chaque fois qu’il lui faisait porter le chapeau, qu’il jetait un objet sur elle, qu’il rencontrait malencontreusement son tibia avec son pied, qu’il tirait sur ses couettes parfaitement réalisées. Il ne s’est pas justifié non plus après ce soir là. Pour peu, elle aurait pu croire qu’il ne savait tout simplement pas comment le faire, comme ce genre de -pathes (peu importe lesquels) qui ne savent pas comment fonctionnent normalement les émotions et encore moins comment les partager. « La police a eu un an pour mettre la main sur ton connard de frère. Et ils n’ont pas réussi. Tu crois vraiment que ma parole de mec à moitié ravagé par une agression aurait eu du poids ? Que j’aurais pu me ramener avec une impression et des aveux qui n’existent même pas ? » Il n’est pas un mec à moitié ravagé. Il est Alfie, juste Alfie. Devant la police, il aurait même été Alfie Maslow. Peu importe à quel point il aurait pu rendre fou tout le commissariat tout entier et les horripiler, il aurait été un citoyen comme un autre. Si seulement il avait franchi le pas, il aurait été écouté. Aujourd’hui il ne se base que sur des hypothèses pour expliquer son geste et c’est un argument qui ne peut pas tenir. “J’aurais été là si t’avais ne serait-ce mis ton ego de côté pour me le demander.” Face à la justice, il n’y a pas de camp à avoir. Joseph l’avait agressé, il méritait d’en payer les conséquences. Aujourd’hui elle pense la même chose pour un Alfie qui a voulu se faire justice lui-même. Elle aurait été une aide de poids, un témoin, un réceptacle à confessions. Elle aurait pu porter un micro, elle aurait pu faire n’importe quoi pour que la vérité soit révélée. Elle aurait pu, s’ils ne l’avaient pas une fois de plus privée de se trouver au cœur de leur jeu. Les règles ont changé depuis le temps mais elle souhaite encore et toujours s’en faire le juge, à défaut de vouloir participer. “Et surveille ton langage.” Ils parlent d’attaque à main armée et de conséquences graves sur chacun d’eux et pourtant Lily s’insurgera toujours d’un “connard” mal placé dans un discours donné à la volée. Ce ne sera pas le Maslow qui pourrait en être choqué.

Le brun a souvent joué avec le cœur de Lily et aujourd’hui encore, il sait le faire bien mieux que personne. Puisque la convaincre ne semble pas possible, il tente plutôt la persuasion. La connaître bien mieux que quiconque signifie aussi pouvoir la manipuler à sa guise, lui qui a fait d’elle son petit Golem il y a longtemps déjà. Elle qui s'en voulait déjà de ne pas avoir été plus présente pour lui durant cette année difficile, la voilà qui perd tout usage de sa langue et de son éternel besoin de contradiction. Les derniers points se posent dans un parfait silence de sa part et elle fait mine d’avoir à désinfecter sa plaie ou à le garder sous étroite surveillance, simplement parce qu’il est hors de question qu’ils se quittent déjà, surtout pas comme ça.

Plusieurs semaines pour manger. Un an pour parler. Des mois oubliés. Va dire à ton mari qui fait mouche. Elle ne parle jamais de Matt et Alfie lui en parle tout aussi peu, simplement parce qu’elle pensait naïvement pouvoir le protéger de cette guerre à laquelle il n’a pas à prendre part. Une fois de plus, pourtant, il a tout à fait raison : elle ne voudrait jamais oublier quoi que ce soit se rapportant à Matt, tout comme elle comprend enfin à quel point tout a pu être compliqué avec Juliana aussi. Il a bien des défauts, mais elle reste persuadée qu’il tient réellement à la jolie jeune femme. « J’ai été prisonnier de mon propre corps pendant des mois et maintenant je suis prisonnier de mon psychisme parce que ton frère n’a pas pu se contenter d’aller voir la police après s’être déchaîné sur moi. » Il a perdu de sa splendeur mais il sait toujours autant choisir ses mots, lesquels résonnent douloureusement dans l’esprit de la jeune femme. Même en s’avouant plus faible, il gagne du terrain ; justement parce qu’il n’a jamais avoué ce genre de choses face à elle. Lily doute même qu’il ait formulé de tels mots face à qui que ce soit. Elle retient aussi et surtout le déchaînement de Joseph, cet être qui perd un peu plus sa part d’humanité à chaque fois qu’il est question de parler de lui et de ses agissements. Ils partagent le même sang et tout s’arrête là, parce qu’elle ne se trouve aucun point commun avec cet homme qui accumule tous les défauts qu’elle ne sait que haïr. « J’ai dû regarder ma vie m’échapper, Lily, pendant que ton frère continuait la sienne. » La voilà qui baisse donc les yeux, incapable de savoir sur quel pied danser ni quelle attitude avoir. Les arguments s’accumulent toujours de son côté sans qu’elle ne soit capable de collecter ceux de son frère. « Alors ta morale, tu te la mets où je pense et t’essaies de te mettre deux minutes à ma place. » Ton langage résonne faiblement dans son esprit. Elle trouve elle-même ce réflexe pathétique, maintenant. Il pourrait insulter Dieu qu’elle ne dirait plus rien, ses pensées toutes occupées ailleurs. Son souffle s’est accéléré, ses pupilles tremblantes ne savent plus où se poser. Tête baissée, elle tente encore de cacher ce spectacle à un Alfie qui gagne toujours à tous les coups. « Et accessoirement, tu fais ton boulot pour que je puisse me barrer au plus vite et aller me calmer loin d’ici. » Ses désirs ne sont pas des ordres. Avant, oui, peut-être, mais plus maintenant. Dotée d’une nouvelle force inexistante, elle relève ses yeux pour rencontrer ceux d’Alfie et enfin lui faire part de ses demandes. “Je reste avec toi. Je me moque que tu veuilles être seul, c’est pas mon soucis.” Elle refuse de le laisser partir maintenant. Il est le plus âgé et il est toujours celui qui fait mine de veiller sur elle (à sa façon, certes, mais elle l’a tout de même bien observé) mais ce n’est pas pour autant qu’elle ne tient pas à lui non plus et qu’elle souhaite le laisser vagabonder dans les rues sans savoir ce qu’il a en tête. Elle a déjà veillé sur un criminel et a assez de place dans son cœur pour un second, quand bien même elle ne le fera grâce à aucun de ses reproches. Son esprit maternel ne la lâchera jamais, surtout pas alors qu’elle a grandi avec lui. “Je vais dire que ma mère a besoin de moi et que je prends mon après midi.” Les détails ne l’intéressent sans doute pas mais la jeune femme a besoin de préparer oralement son plan. Elle lui fait grâce des menaces pour le moment encore, mais elle a tout autant prévu l’éventualité dans laquelle il ne voudrait pas se plier à cette simple demande. Vu son état et ses aveux, elle n’aurait aucun mal à demander que la sécurité s’occupe de lui, voire même la police. "Est ce que Juliana sait que tu es là ?" Est ce qu'il a même pensé à elle une seule fois au milieu de sa stupide Vendetta ? Dans le doute, Lily le fait pour deux, réfléchissant à sa place parce qu'elle ne le juge pas apte à le faire - pas correctement, en tout cas. Il ne pense qu'à lui et ce n'est qu'une fois que les conséquences s'accumulent qu'il envisage la possibilité de penser à ses proches. Depuis toujours, le problème reste le même, surtout pour une jeune femme qui s'est voulue le parfait petit dommage collatéral obéissant au fil des années et autres décennies. "S'il est mort, tu l'es aussi." Elle avance d'un ton bien plus bas, cette fois-ci, mais non moins assuré. Ce ne sont pas des menaces mais une simple explication de ce qu'il adviendra d'eux si jamais Joseph ne répond plus à aucun de ses messages ou de ses appels. Elle lui reproche de s'être fait justice lui-même mais n'aurait aucun mal à agir de la sorte à son tour. Peu importe à quel point elle nie cette évidence, ils sont tous les trois faits du même bois pourri. Certains le cachent simplement mieux que d'autres. "T'étais le premier à jouer à l'imbécile avant et tu l'entraînais avec toi à chaque fois. Maintenant il a pris cette même habitude et puisque ça s'est retourné contre toi, t'as décidé que le jeu n'était plus marrant." Ose me dire que j'ai tort, Alfie. "T'as pas le droit de venir pleurnicher devant moi." Quand bien même ses mots ont été efficaces et qu'elle continue d'éprouver une immense empathie pour lui, à tel point qu'elle souhaite prendre soin du bourreau de son frère pour la journée au moins, quitte à le ramener chez elle (comprendre : chez ses parents) et lui laisser entrevoir la plaie béante au fond de son coeur faisant d'elle une mariée en berne. Elle défend son frère, attaque Alfie, défend Alfie et lui laisse finalement toute la possibilité du monde pour qu'il la mette à terre lorsque bon lui semblera. Il sait qu'elle n'est pas comme son frère et qu'à ce jeu là, de simples paroles pourraient la forcer à s'avouer vaincue là où les coups n'ont jamais fait que renforcer sa sale habitude à cacher une réalité dérangeante. "Est ce que tu as mal quelque part d'autre ?" Elle reprend dans un dernier souffle, jamais bien loin de son métier et de sa tâche principale à ses côtés : le soigner et s'assurer qu'il quitte l'hôpital dans un moins piteux état que celui dans lequel il y est rentré.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptySam 13 Fév 2021 - 22:53

Les sourires sont faux, les intentions semblent l’être tout autant ; pourtant cet échange entre les deux anciens amis, amants, ennemis (les termes viennent à manquer les concernant) est des plus naturels. Ils ont toujours oscillé entre l’amitié et la haine et encore aujourd’hui, alors que la colère qu’il ressent à l’égard de Joseph dérive vers sa sœur, il n’arrive pas à la détester autant que son meilleur ami. Il n’arrive pas pour autant à apprécier sa sollicitude qui l’agace plus que de raison alors qu’elle ne fait que son travail. C’est pourtant un point qui n’a que peu d’importance pour Alfie ; le problème ne vient pas de son professionnalisme, mais du simple fait que ce soit elle. C’est toujours elle le problème, autant qu’elle est souvent la solution. Mais l’un ne va pas sans l’autre et si elle panse les blessures de son corps, elle est la responsable d’autres fêlures, bien plus profondes, bien plus ancrées – de celles dont elle est l’une des seules à avoir eu un aperçu. Et pour ça, il peut l’assurer sans crainte : il la déteste. Il la déteste de l’avoir vu sous ce jour à plusieurs reprises, autant qu’il la déteste qu’elle en ait encore une démonstration aujourd’hui, spectatrice privilégiée de ses faiblesses. À ce constat, il en appelle d’autres : bien sûr qu’il a vu pire, les cicatrices dans son dos et sur son torse en sont les parfaits témoins. Incapable de revêtir une fausse assurance qui ne duperait pas celle qui le connaît probablement mieux que lui-même, autant s’appuyer sur des faits : quoi qu’elle en pense, quoi qu’elle puisse supposer, elle se trompe. Cette blessure n’est de loin pas la pire qu’il ait vécu ; et même si elle a laissé des séquelles plus psychologiques que physiques, là-aussi elle n’arrivera pas à obtenir le titre tant convoité de celle qui lui maltraite l’esprit un peu plus chaque nuit. Elle peut se targuer d’être sur le podium, mais il est hors de question de lui donner plus d’importance que nécessaire : ce serait, par extension, céder du terrain sur Joseph et il ne veut pas lui faire ce plaisir. D’eux deux, Alfie doit rester le dominant et même l’état dans lequel il a été plongé n’inversera pas cette dynamique.

De la même manière, il est hors de question d’accorder plus d’importance que nécessaire à une Lily qui épouse décidément plus vite que son ombre ; cette fois-ci elle renoue avec ses vieux travers moralisateurs. En réalité, il est persuadé qu’ils ne l’ont jamais quittée, mais il s’est suffisamment tenu loin d’elle pour ne plus en être le bénéficiaire et ce retour aux sources a un goût de nostalgie agréable qu’il chasse pourtant rapidement à l’aide de plaisanteries qu’il sait lourdes, mais qui ont le mérite de fonctionner. “Pas comme ça.” Pour une fois, il concède à lui laisser l’avantage plutôt que de lancer une surenchère de réparties qui serait interminable. Parce qu’il peut lui reprocher beaucoup de choses, il ne peut lui enlever que Lily a toujours été une adversaire à la hauteur, parfois même meilleure que lui. Jamais il ne le verbalisera ceci dit, cela fait partie de la toute aussi interminable liste des choses qu’il ne lui dira jamais, mais à chaque fois qu’il l’a emmenée sur ce terrain, il n’a pas été déçu par ses efforts. Parce qu’elle est ainsi, Lily, malgré la banalité qui émane d’elle, qu’il met un point d’honneur à souligner à la moindre occasion, elle est pourtant la seule qui arrive à le surprendre à ce point. Tristement, même Juliana n’y arrive pas, mais il n’y a pas de point de comparaison à avoir par le fait que Jules n’a jamais été un jouet, contrairement à Lily. Le terme est probablement offensant (et ce serait bien normal), pourtant pour quelqu’un d’aussi peu matérialiste qu’Alfie, ce statut relève d’un privilège, parce que malgré le rôle qu’il lui a donnée à son détriment, il a toujours pris soin d’elle, elle a toujours eu une véritable importance – quoi qu’il en dise. Bien sûr, l’importance qu’est la sienne est contrebalancée par son esprit tordu : cette fois-ci, le rôle qu’elle joue est le plus beau de tous, celui d’une complice, qu’elle le veuille ou non. Elle devrait le connaître, depuis le temps, elle ne devrait pas s’étonner de la manière dont il l’implique sans son consentement, du moment que ses propres intérêts sont servis. Et en ce sens, il lui en est redevable, à Lily. Redevable de lui avoir ouvert les yeux, redevable de l’avoir aidé à se libérer des tourments de l’inconnu. Il a rejeté la faute sur Joseph, pourtant il félicite Lily, alors que leur rôle est équivalent. Peut-être que dans le fond, c’est elle qui l’a aidé à retrouver ses vieilles habitudes, celles que personne ne veut féliciter et pour lesquelles il avait besoin d’une excuse pour les embrasser à nouveau. Peut-être que cette déchéance n’est pas totalement l’œuvre de son meilleur ami, peut-être que celle qui a tiré les ficelles est Lily et il ne serait pas étonnant ; elle a toujours gravité autour de lui dans les moments les plus heureux, mais surtout les plus difficiles. Elle a souvent été une ombre sur son quotidien tourmenté et aujourd’hui, c’est elle qui l’a réactivé, qu’elle le veuille ou non. Alors son rôle est bien plus important que cette petite vengeance, mais ça aussi, il ne le dira pas.

Ses yeux s’affairent à suivre les contours de sa blessure qu’elle essaie de refermer, se reportant sur la jeune femme lorsqu’elle verbalise l’évidence. “Je sais. Je te connais.” C’est bien ça, le problème, Lily. Elle le connait mieux que personne et elle est en mesure d’anticiper chacune de ses actions ; elle a anticipé les raisons qui l’ont amené ici, elle a toujours anticipé chacune de ses erreurs par le passé, au point où s’il peut la considérer comme surprenante, il n’est pas sûr qu’elle puisse appliquer la réciproque. Et c’est un combat inégal, qui l’exaspère sincèrement. Mais peut-être voit-il sa défaite là où elle lui accorde la victoire – c’est bien le souci avec l’histoire de chacun, il y a toujours deux versions. Aujourd’hui, il n’y a que la sienne qui compte par rapport à celle qui l’unit à Joseph ; que le fait que celui-ci est en train – il l’espère – de comater dans une ruelle sombre où il finira détroussé ou pire. Surtout pire, apothéose de ce traitement infligé par Alfie et qui n’est qu’une introduction à tout ce qu’il compte lui faire subir. Là-aussi, Lily le connaît, suffisamment pour ne pas s’étonner qu’il y ait répondu à la violence par la violence et qu’il se soit rendu coupable d’avoir enclenché ce qui n’est que le début d’une escalade. “Si tu n’as pas voulu qu’il t’achève, tu ne laisseras pas sa sœur le faire à sa place.” Il laisse échapper un rire froid ; oh Lily, tu ne me connais pas si bien, il fait croire. « Ne me sous-estime pas. » C’est une histoire de perspective ; certains s’offusqueront de cet intérêt pour la destruction, pour une certaine fascination quant à la mort, d’autres seront outrés par l’identité de ceux dans les mains desquels il laisserait ce pouvoir. Lui-même, évidemment, Joseph et Lily ; le trio cabossé et malsain, qui peut s’en étonner ? « Et je n’ai pas eu le choix concernant Joseph. » Je te rappelle. Il met un point d’honneur à insister là où elle tente encore de dédouaner son frère. Oh, bien sûr, c’est son sang, sa loyauté ira toujours à l’ancien taulard, mais cela n’empêche pas Alfie de vouloir la faire douter, chavirer, peu importe si elle revient à la croyance initiale par la suite ; du moment que cette loyauté se veut partielle par moment, il est le plus heureux des hommes.

Presque. À l’instant où l’enfant qu’elle était reprend le pas sur l’adulte qu’elle est devenue, Alfie roule des yeux. Cette morale, il la supporte en temps normal. Lorsqu’il a les capacités de lui la renvoyer en pleine figure, de s’en moquer, de la détruire – à cet instant, c’est surtout l’agacement qui prime, celui qui impose à la jeune femme de fermer les yeux sur la situation, de ne pas reconnaître les faits, de vouloir protéger un frère qui, de son côté, ne l’a jamais fait. Il ne l’a pas plus protégée par le passé, Alfie, mais il se considère toujours supérieur aux autres, à tel point qu’il se considère même comme plus important que son propre sang ; après tout n’est-il pas le seul des deux ayant quémandé (par la force des choses, il est vrai), l’aide de Lily ? “J’ai pas peur de tes menaces Alfie.” Un sourire amusé, qui demeure froid, naît sur ses lèvres, tandis que ses yeux se plissent légèrement ; le prédateur reprend le dessus. Oubliées les politesses d’usage, oubliés les reproches à peine dissimulés, désormais c’est le défi qui prime. Et si elle le connaît, elle devrait savoir que ce n’est jamais bon signe quand cela devient sa préoccupation principale ; les dégâts sont considérables et les victimes sont collatérales. « Tu devrais. » Et le sourire qui suit, lui, se veut désormais sincère autant qu’il se veut mauvais. Il l’a souvent adressé à Lily au fil des années, mais cette part de lui avait disparue derrière le semblant de stabilité qu’il prétendait avoir trouvé. Celui-ci volant en éclat, il ne s’agit que d’une des mauvaises habitudes qu’il peut se permettre de réactiver. Oh, que ça lui a manqué. Oh, que Lily l’innocente lui a manqué encore plus. “Je ne suis plus une Keegan.” « Tu seras toujours une Keegan. » Il rétorque, appuyant sur son pire cauchemar sans délicatesse aucune. Malgré les stratagèmes, malgré ses rêves d’évasion, malgré toutes les tactiques qu’elle pourrait mettre en place, elle est une Keegan et elle le restera. C’est un calvaire autant que c’en est un soulagement, il ne doute pas qu’elle oscille entre les deux versants, parce que Lily, aussi banale qu’elle puisse être, soufflera toujours le chaud et le froid. Sur sa famille, sur sa vie, sur lui et c’est ce qui la rend aussi unique. “Tu ne me veux pas en ennemi.” Et son sourire au coin la défie autant qu’il admet cette vérité ; il ne la veut pas en ennemie. C’est très exactement pour cela qu’il veut lui donner ce rôle. Son regard soutient le sien, sa silhouette s’avance quelque peu pour qu’elle ne se défile pas – elle ne le ferait pas de toute évidence, mais l’excuse est adéquate. « Prouve-le. » Et à cet instant, il sait très exactement où il se positionne sur l’échelle de ses sentiments concernant Lily. Il l’adore, il en est fasciné et une part de lui ne peut s’empêcher d’être fier ; parce que la gamine qu’il a connu n’aurait jamais dessiné les contours d’une telle confrontation, mais l’adolescente qu’il a manipulée à son image en est la première cliente.

Elle est aussi la première auprès de qui il s’épanche ; et si ses barrières l’empêchent toujours de montrer une telle vulnérabilité face à quiconque, surtout pas face à elle, ses mots résonnent dans son esprit : elle le connaît. Alors, il ne fait que verbaliser ce dont elle se doute déjà, ce qu’elle a déjà pressenti dès qu’il s’est assis dans ce box, avant même qu’il n’ouvre la bouche, parce que cela a toujours été ainsi entre eux. Ils se sont souvent compris, ou agacés, par des jeux de regard, par des soupirs exaspérés, par un silence inhabituel et en second lieu seulement, la répartie qui concrétisait la première impression. “J’aurais été là si t’avais ne serait-ce mis ton ego de côté pour me le demander.” À cette affirmation, elle reçoit un regard dubitatif. Oh, bien sûr que la justice aurait primé sur tout le reste ; mais les liens du sang auraient plané malgré tout et qui lui assure qu’elle aurait tenu parole vis-à-vis de lui, plutôt que de ranger celle-ci du côté de son propre frère ? Il ne s’en serait pas formalisé, Alfie, sa loyauté étant la première à balancer d’un fil à l’autre, d’un intérêt à l’autre. Mais les choses sont toujours différentes en fonction du degré de proximité qui les lie au principal concerné. Pourtant, la réponse de la jeune femme le déstabilise, plus qu’il ne voudrait l’admettre. Il n’est pas étonné, autant qu’il s’en surprend. « Mais où aurait été le plaisir ? » Alors il fait ce qu’il sait faire de mieux, il fait l’innocent, il provoque, il divague, pour ne pas admettre qu’il est touché – peu importe la façon dont c’est le cas, le simple fait de l’être est déjà intolérable. “Et surveille ton langage.” Un « oui, maman » à peine kinky en guise de réponse, il l’admet alors que son regard croise le sien : jamais il ne concédera à lui offrir le dernier mot.

Ces mots, ceux-là même qui lui ont manqué durant des mois, des semaines, lorsqu’il n’était qu’un légume de la pire des espèces ; de ceux qui ont encore conscience de leur état, mais qui ne peuvent pas agir sur celui-ci. Ça ne devait être qu’une réflexion perdue au milieu des autres, un moyen pour lui de l’écraser comme elle l’étouffe sous sa morale, c’en devient une véritable nécessité, un besoin de laisser échapper tout ce qu’il a contenu pendant tant de temps, qui dépasse le cadre physique. Ce ne sont pas seulement des blessures, ce sont des lésions qui ne s’en iront pas de sitôt, qui persistent malgré sa bonne santé et qui l’accompagneront pendant de trop nombreux mois. Ce sont surtout des couches nouvelles qui s’ajoutent sur les plus anciennes et qui, à l’image de Lily, l’empêchent de respirer, l’empêchent d’avancer. Ce sont des traumas qui s’ajoutent à d’autres, qu’il persiste à refuser de voir en face ; mais ils sont partout, ils l’accompagnent constamment et il devient de plus en plus difficile de les ignorer. C’est ce qui justifie d’en parler et son interlocutrice lui semble être la moins bien placée pour cela autant qu’elle est la plus évidente. Son agacement à l’issue de cette tirade est palpable, autant que l’énergie déployée pour ne pas hésiter, pour ne pas trembler. Les pensées que tout ceci éveille, elles, sont déjà déployées dans son esprit, investissant chaque recoin de celui-ci et la quiétude obtenue par l’anesthésie (celle dont Lily n’est pas la responsable) devient de plus vague. Il lui en faut plus ; mais pour cela, il faut surtout sortir d’ici. “Je reste avec toi. Je me moque que tu veuilles être seul, c’est pas mon soucis.” Et il rit, Alfie, de son plus beau rire, de celui qui est froid, moqueur, celui qui est destiné à Lily en lieu et place des sourires chaleureux qu’il peut lui adresser, parce qu’il n’y a jamais de demi-mesure entre eux. Ils sont passés des reproches à une journée ensemble ; c’est insupportable et pourtant si naturel. “Je vais dire que ma mère a besoin de moi et que je prends mon après midi.” À mesure qu’elle persiste, son rire se prolonge. « C’est hors de question. » Peu importe la fermeté avec laquelle elle a émis l’idée, peu importe s’il sait très bien qu’il n’a pas le choix – il aime croire que oui, il aime croire qu’il sera suffisamment imbuvable pour la faire fuir. Mais ça n’a jamais marché par le passé, alors pourquoi maintenant ? "Est ce que Juliana sait que tu es là ?" « Regarde autour de nous. » Si elle était au courant, jamais elle ne l’aurait laissé seul ; et à cet instant il n’a jamais été aussi ravi des disputes qui s’enchaînent avec sa petite amie, lui permettant d’avoir l’assurance qu’elle ne reviendra pas ce soir, et probablement pas les suivants, dans l’appartement qu’ils sont supposés partager. C’est une façon de s’assurer qu’elle est en sécurité, bien que s’il a une certitude, c’est que Joseph ne s’en prendra jamais à la bibliothécaire. Alfie ne s’en est jamais pris aux êtres chers du fugitif, du moins jamais officiellement ; il serait étonnant que cette vendetta dépasse le cadre de leur guerre d’égo. « Et tu t’abstiens de l’appeler. » C’est une supposition autant qu’un ordre. Son impulsivité lui cause bien des tracas, mais il n’est pas assez stupide pour supposer que la blessure passera inaperçue. Et en ce sens, c’est à lui de l’annoncer à sa moitié et non une tierce personne, encore moins celle qui prend le rôle de fantôme d’un passé qu’Alfie dissimule avec précaution à Juliana. "S'il est mort, tu l'es aussi." Il a menti, il a des situations où il lui laisse avoir le dernier mot, bien que l’expression qui suive soit une manière de garder l’avantage : il rit, Alfie, légèrement, presque comme un soupir, de ceux qui suggèrent que le sérieux accordé à une telle menace est balayé aussitôt celle-ci entendue. Elle sait. Elle sait mieux que quiconque à quel point cette perspective n’est pas perçue comme terrifiante par Alfie, bien au contraire. Elle est séduisante, elle est enviée, parce que même s’il ne le fera jamais de lui-même, son envie de jouer avec le feu le fait pour lui. Elle a été témoin de la manière dont il jouait par le passé, elle l’est encore aujourd’hui. Il serait faux de considérer que la boucle est bouclée – elle ne le sera jamais tant qu’ils se côtoieront. Peut-être est-ce pour ça qu’ils n’arrivent pas à se séparer et que l’un finit irrémédiablement par revenir dans la vie de l’autre, parce qu’ils sont tous les deux terrifiés par une finalité sur laquelle ils n’auraient aucun contrôle. "T'étais le premier à jouer à l'imbécile avant et tu l'entraînais avec toi à chaque fois. Maintenant il a pris cette même habitude et puisque ça s'est retourné contre toi, t'as décidé que le jeu n'était plus marrant." Voyez-vous ça. "T'as pas le droit de venir pleurnicher devant moi." Cette fois, il la déteste. Elle ne se rend pas compte à quel point cela lui a coûté de s’ouvrir, de révéler ces quelques détails qu’il aurait voulu garder pour lui. Elle ne sait pas à quel point cela relève autant d’un immense effort de sa part qu’une confiance infinie – et voilà qu'elle jette l’un et l’autre avec le même empressement que ses compresses pleines de sang. "Est ce que tu as mal quelque part d'autre ?" Nulle part. Partout. Mais tu ne peux rien y faire, Lily. « Ne me touche pas. » C’est lui qui exprime son rejet cette fois, quand son regard se baisse sur la plaie recousue. Le désinfectant, les compresses et autres pincements l’attendent à la maison, le devoir de la jeune femme se termine là. Parce qu’il l’impose, parce qu’il préfère s’assurer d’une belle infection que de passer une minute de plus en sa compagnie. C’est le pire des rejets qu’elle vient de lui offrir, celui où ses paroles ne sont d’aucun poids, quand elle l’a tant habitué au contraire. Ses mains entourent les siennes, les pressent légèrement pour s’assurer de sa liberté. Il se relève avec le même empressement, sans lui adresser un regard alors qu’il tente avec maladresse de s’habiller. La nudité ne l’a jamais dérangé, mais exposer ses faiblesses aux autres est le fond du problème. C’est ce qu’il a fait avec Lily, c’est ce qu’elle a utilisé contre lui de la plus belle des manières. Félicitations, l’élève surpasse le maître. « C’est pour ça que j’aurais jamais pu te faire confiance. » Pourtant, regarde, Lily, il y a quelques secondes tu l’avais toute entière. « Parce que tu changes les règles, Lily, mais t’es incapable de l’assumer. » Il sait qu’il serait facile de lui renvoyer pareil argument ; mais il peut se vanter d’être droit dans la multitude de défauts qu’il possède, contrairement à Lily. « T’as pas le droit de mettre ce qu’il a fait au même niveau que ce que j’ai fait. » Il en a fait des choses, Alfie, des bonnes et des terribles, il les assume parfaitement, mais il y a un point sur lequel il est intraitable : « J’ai jamais délibérément cherché à le tuer avant qu’il s’y essaie. » Il n’a fait que lui rendre la monnaie de sa pièce ; mais avant cela, jamais il n’en était arrivé à un tel extrême avec Joseph. Bien sûr, il est loin d’être innocent et il a été le premier à le confronter à des méthodes plus subtiles pour en finir, mais il n’a jamais été à l’origine de celles-ci. Il l’a exposé, mais n’a jamais pris les décisions pour lui. « Mais soit, si pour toi c’est équivalent, je peux comprendre. » Absolument pas. Il ne lui demande pas d’être de son côté, mais juste de comprendre, ce que personne ne peut. Et il ne s’agit pas que de cette confrontation, mais de celles qui ont précédé au cours des dernières années. « C’est drôle, quand même. » Il s’amuse, un rire forcé aux lèvres, sa chemise boutonnée à la va vite, son regard noir qui soutient celui de Lily. « Je suis le premier à avoir déclenché tout ça, c’est certain. » Autant avec son frère qu’avec elle, il a toujours été l’investigateur, il ne renie pas ce rôle de leader qui lui plaît plus que de raison. « Je suis aussi le premier à avoir su que le père David abusait de Joseph. » Est-elle au moins au courant ? Peu importe, ce n’est pas comme s’il doit quoi que ce soit à son meilleur ami. « Je suis le premier qui a parlé de ton ex qui te frappait. » Et ça, l’a-t-elle oublié ? Peu importe, ce n’est pas comme s’il doit quoi que ce soit à la jeune femme. « Pas mal la confiance, pour un imbécile qui vous entraîne avec lui. » Les faits sont là et s’il avait la patience, il serait curieux de savoir quels arguments elle usera pour lui prouver le contraire. « Et pourtant. C’est moi qui pleurniche. » Est-ce qu’elle comprend, maintenant ? Cette sensation d’abandon qu’il n’aurait jamais pensé ressentir face à elle, qu’il se déteste de ressentir face à elle. « Tu seras toujours une Keegan. » Il poursuit, s’emparant de ses affaires et glissant un désinfectant dans sa poche – tant qu’à faire. « Tu rejetteras toujours la faute sur les autres pour nier l’évidence. » Et comme souvent, il anticipe avec elle. « Je dis pas que c’est mal. » Bien sûr que non, il serait mal placé pour cela. « Je suis juste curieux de savoir jusqu’à quel point tu pousseras le déni. Regarde Joseph et moi... ça nous a pas réussis, cette explosion. » Et le sourire carnassier ne quitte plus ses lèvres. C’est une question de temps avant que ce ne soit ton tour, Lily. « Alors pardonne mon langage, Lily. » Son sourire s’élargit alors qu’il s’approche d’elle, suffisamment pour se pencher à son oreille et lui glisser, de sa voix la plus glaciale : « Va bien te faire foutre. » Et le sourire a disparu, autant que sa silhouette qui quitte le box au plus vite ; à son mépris, il cause de nouvelles blessures, parce qu’elle vient lui offrir la pire de toutes, certainement bien méritée, mais pas pour autant acceptée.

@Lily McGrath  raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) 2395598822
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyDim 14 Fév 2021 - 1:45

« Ne me sous-estime pas. » n’est pas la réponse qu’elle attendait. Elle ne sera jamais stupide au point de le sous-estimer, tout comme elle restera toujours la plus utopiste du trio de fortune, à éternellement croire qu’un jour ils iront tous bien et qu’ils seront tous heureux, chacun avec leur belle famille - parce que c’est bien sûr ce à quoi aspire tout un chacun. Pas demain, pas après-demain, mais peut-être l’an prochain. Il ne suffit que d’un simple déclic de leur part pour que leur engrenage s’enraille et qu’ils aient le droit à un temps de répit et un brin de bonheur avec. Cela ne semble pas si compliqué, dit comme ça, et c’est la raison pour laquelle elle ne le tuera jamais, même si elle en a l’occasion et parfois même l’envie qui va avec. Non pas que cela la dérangerait le moins du monde d’ajouter “assassin” sur son CV, mais elle ne s’adonnera pas à ce genre de pratique avec Alfie. En guise de seule réponse, son regard se voile un instant et ses sourcils parfaitement dessinés se froncent. Lily se reprend bien vite, par simple habitude. Il a le droit de voir le pire d’elle mais pas ses minuscules doutes du quotidien. Un paradoxe parmi tant d’autres.

Ses gestes sont bien plus terrifiants que ne le seront jamais ses mots. Elle perd de sa superbe à l’instant même où il sourit après qu’elle lui ait assuré ne pas avoir peur de lui et de ses menaces ; elle n’avait même pas besoin qu’il y ajoute la parole. « Tu devrais. » Mais elle ne le fera pas. Elle n’a pas le droit de lui montrer la moindre faiblesse, surtout pas une qui lui donnerait un ascendant évident sur elle. Elle a le droit d’avoir peur de son ex petit-ami mais pas de celui qui a tenu bien des rôles protecteurs à ses côtés au fil des décennies. Encore une fois, il a le droit de la voir tétanisée et en pleurs, mais il n’a pas le droit de la voir hésité à prononcer le moindre mot ou faire le moindre geste face à lui. Il n’est qu’Alfie, et bien que ce terme englobe tout le dictionnaire à lui seul, cela lui retire une quantité de droits par la même occasion. Alors elle soutient son regard même lorsqu’il réduit la distance entre eux et elle s’en veut d’avoir son sac à main bien trop loin d’elle : elle rêverait de l’asperger de bombe au poivre. « Tu seras toujours une Keegan. »  - “Ce ne sont pas tes affaires.” Est la seule chose qu’elle trouve à rétorquer, parce que sur ce terrain là elle ne peut pas le laisser avoir le dernier mot. C’est sans doute toujours mieux qu’un “arrête Alfie, t’es méchant” qu’elle pense pourtant très fort. Elle le jure, elle a des papiers pour le prouver, elle a une alliance au doigt, elle a des centaines de courriers demandant à changer son nom de famille. Elle n’est plus une Keegan et elle ne l’a jamais été puisqu’à part quelques liens du sang, elle n’a jamais rien partagé d’autre avec sa famille, que ce soient ses parents ou même son frère qui est encore Dieu sait où. Elle n’a même pas partagé de son précieux temps avec ces derniers, rapidement bien trop occupée à tourner autour d’un certain Maslow pourtant inatteignable. En théorie. « Prouve-le. » Pas maintenant. Impossible de lui trouver une telle chose à l’instant présent mais c’est pourtant un défi qu’elle ne risque pas d’oublier, surtout pas alors que le relever lui procure déjà une infinité de sentiments grisants. Ils n’ont jamais été ennemis, peu importe ce qu’il s’en dit, et l’idée même qu’une telle chose arrive un jour la terrifie autant que l’excite. Ce n’est pas parce qu’elle clâme haut et fort rêver d’une parfaite et lisse petite vie de famille bien rangée que tout son corps et son âme désire la même chose. Dans ses rêves, il n’est jamais question de telles choses et c’est bien auprès de ces derniers qu’elle devient une aventurière, une guerrière, une exploratrice ; bien souvent auprès d’un brun fougueux qu’elle fustige pour un rien. Même dans ses rêves, elle ne peut pas s’empêcher d’y retrouver quelques brins d’un passé bien concret.

Enfant, elle était toujours aussi fascinée qu’agacée lorsqu’Alfie ne répondait jamais de la manière dont elle l’espérait ou même le voulait. Adulte, ses sentiments à ce propos restent inchangés. Alors qu’elle pensait s’être ouverte à lui pour la première fois depuis longtemps en lui faisant comprendre que sa loyauté aurait penché en sa faveur bien plus qu’envers son frère, il ne semble pas étonné. Pire encore aux yeux de Lily : il reste indifférent. C’est sans doute là le pire sentiment qu’elle peut créer chez lui. Quand il est énervée au moins, il la place au centre. Quand il rigole, c’est grâce à elle. Quand il sourit comme un imbécile, elle en est l’instigatrice. Quand il reste indifférent, ce n’est que la faute qui repose sur elle, et ça lui est insupportable. « Mais où aurait été le plaisir ? » Il aurait gagné. Il aurait gagné, une bonne fois pour toutes. Cela aurait compté comme toutes les batailles réunies, ça aurait été l’affrontement final, la dernière guerre. Joseph ne se serait jamais relevé après avoir vu sa sœur auprès d’Alfie, de son plein gré qui plus est. Alfie n’aurait même pas eu à la modeler, à l’influencer, à la formater. Ce n’aurait été que le résultat logique de dizaines d’années passées à le côtoyer bien plus lui que son propre sang, ça aurait été le dernier fruit d’un premier amour toxique. Ça aurait été le résultat de bien des choses, en réalité, bien plus qu’on ne peut en décompter. Même ça, il n’arrive pas à le voir. La vérité, c’est qu’il se moque bien du nombre de victoires ou de défaites de chacun. Il ne veut pas que le jeu s’arrête.

Le stupide brun lui rigole encore au nez lorsqu’elle lui propose (ordonne) de rentrer avec elle mais la plus jeune n’en démord pas. Elle lui a laissé avoir tous les derniers mots qu’il voulait sur bien des sujets et elle lui a concédé des centaines de milliers de choses au fil des décennies écoulées mais ça, là, n’en fera jamais partie. Peu importe s’il se transforme en une version bizarre du Joker à ne jamais s’arrêter d’être hilare, ce sera le cadet de ses soucis. Il a mis sa patience à rude épreuve depuis toujours, elle est habituée. « C’est hors de question. » - "Je ne te demande pas ton avis." Et ça, elle le lui a déjà dit. Il aura beau râler et protester autant qu’il le veut, elle s’en moque. Elle est prête à le faire passer pour son cousin atteint de maladie du cerveau, si jamais ça peut lui donner l’aide de quelques infirmiers pour sagement ramener le malade jusqu’à sa voiture. Il sait pourtant qu’au jeu des mensonges, elle gagnera toujours. Au jeu des yeux doux aussi, parce que pourquoi une jeune femme aussi douce et fragile que Lily McGrath serait-elle en train de mentir à propos d’un patient déjà en très mauvaise état et, qui plus est, hystérique ? Il se débattrait en fond en rétorquant qu’étymologiquement parlant l’hystérie ne peut être associée qu’aux femmes, elle ferait semblant d’écouter avant de replonger ses yeux bleus dans ceux de son interlocuteur, souffler doucement, rouler à peine des yeux et ajouter un faible “vous voyez” qui semblera être le résultat d’une fatigue immense. Elle aurait été une incroyable actrice, à se faire des scénarios dans sa tête qui ne verront sans doute jamais le jour. Les questions reprennent, le scénario imaginaire n’est plus d’aucune utilité. Jusqu’à la prochaine fois. « Regarde autour de nous. » Par ces mots elle comprend donc que sa petite-amie n’a pas été prévenue et puisque ses histoires de cœur ne l’intéressent pas le moins du monde, c’est un fait qu’elle trouve finalement plutôt arrangeant : elle n’aura personne à prévenir en retour. Peu importe pourquoi il ne souhaite pas la tenir au courant de son état de santé, c’est bien le cadet de ses problèmes. Elle ne doit rien à cette inconnue.  « Et tu t’abstiens de l’appeler. » C’est au tour de Lily de rire enfin. Ce n’est pas à gorge déployée, certes, mais le simple souffle qu’elle expire avec délicatesse est le résultat d’un rire simple mais franc. “Je ne comptais pas le faire.” Rassurer Alfie n’est généralement pas dans ses priorités mais pour cette fois, elle fait exception à la règle avec plaisir. Lily a sa propre vision de ce qui est bien et mal, cela va de soi, et dans sa perspective, Juliana n’a tout simplement aucune place. Tout était chaotique avant qu’elle n’intervienne et tout le sera encore lorsqu’elle finira par sortir du tableau - parce qu’elle est bien placée pour savoir que dans la vie d’Alfie, elle est la seule à pouvoir tenir le cap. Surtout celles qui s’approchent trop près ; elles se brûlent les ailes et tombent de bien trop haut pour leur petit cœur fragile. Elle, elle pense sûrement encore pouvoir faire de lui quelqu’un de bien. Elle ne voit pas qu’elle ne fait que perdre son temps, son énergie, toute sa vie.

Malgré tout, jusque là ils avaient été bien plus doux l’un envers l’autre que depuis de longues années. Ils avançaient doucement vers une relation qui aurait pu être qualifiée de saine, d’un point de vue extérieur qui n’y aurait rien compris. « Ne me touche pas. » Lorsque la sentence tombe, Lily comprend que même un stupide point de vue extérieur ne pourrait s’y méprendre. Ils ont fait un pas en avant et dix en arrière, et cette fois-ci tout est de sa faute. Quand bien même Alfie est le seul à s’être attaqué à son frère au point de jouer littéralement avec sa vie, c’est désormais contre sa propre personne qu’elle est énervée. Même Joseph est soudainement exempté de tous reproches alors que sa sœur serre la mâchoire comme une enfant qu’on gronde pour une bêtise du quotidien. Quand elle redevient une enfant, ce n’est généralement pas une bonne nouvelle pour elle mais cela facilite le jeu d’Alfie : elle était bien plus façonnable à son image, dans le temps. Lily ne lui reproche pas qu’il s’accroche à ses mains, elle ouvre ces dernières sans y opposer la moindre résistance. Son regard incrédule l’observe lui couler entre les mains et s’échapper, littéralement, alors qu’il remet déjà sur lui ses habits pourtant tâchés de sang. Elle en aurait des propres à lui proposer dans sa voiture, elle aurait même pu terminer de lui poser son pansement s’il l’avait laissé faire. Elle lui aurait dit de faire attention à ne pas rouvrir ses points, aussi, et de ne surtout pas se retrouver dans la position dans laquelle il est en ce moment même. C’est à croire qu’il fait exactement toujours tout pour la contredire, même lorsqu’elle n’a rien dit. « C’est pour ça que j’aurais jamais pu te faire confiance. » Ironiquement, elle est touchée par ces paroles. Dans le bon sens du terme, parce que son cerveau en transforme les mots. Le “pu” devient un “dû” et tout le sens en est modifié, à son avantage bien sûr. La seule chose qu’elle en retient, c’est qu’elle a eu sa confiance. Perdue ou pas, ce n’est pas ce qui l’intéresse le plus (parce que ce n’est pas ce qui l’avantage non plus). Elle l’a eu. A un moment donné, au cours de ces trente dernières années, elle a eu la confiance d’Alfie Maslow. Est ce que Joseph l’a eue, lui aussi ? Si les garçons jouent à un jeu qu’elle a fini par comprendre, ils ne se doutent pas qu’il en est de même pour elle, à s’amuser de savoir dans quels moments ils préfèrent la compagnie de la petite brune à celle du stupide brun (ndlr : ce terme peut autant correspondre à Alfie qu’à Joseph). Si aujourd’hui elle fait tout pour se tenir aussi loin d’eux que possible, à l’époque elle voulait tout le contraire et était prête à prendre les mêmes habitudes qu’eux, celles-là même qu’elle a passé une vie à critiquer. Ils ont toujours été un trio, quoi qu’ils racontent. Elle le sait. « Parce que tu changes les règles, Lily, mais t’es incapable de l’assumer. » Et alors ? Tout le monde fait ça, non ? Sinon comment le reste du monde arrive à se donner raison ? Ce n’est pas un défaut, alors ce ne peut pas être un reproche. Il n’a pas le droit de l’attaquer là-dessus - et justement, ce n’est pas une attaque non plus. « T’as pas le droit de mettre ce qu’il a fait au même niveau que ce que j’ai fait. J’ai jamais délibérément cherché à le tuer avant qu’il s’y essaie. » C’est l’éternelle question de qui de l'œuf ou la poule est arrivé le premier, ça. Bien que l’opinion de Lily penche désormais pour la théorie d’Alfie (et cela a beaucoup à voir avec le fait que ce soit la seule qu’elle ait entendu), une part d’elle sait que ce n’est pas la réponse entière à la question. Peut être que Joseph a effectivement commis en premier le plus grand pas de côté, mais ce n’est pas comme s’il ne s’était rien passé de nocif avant cet événement. Il parle trop fort, Alfie, il ameute tout l’hôpital, il éveille la curiosité des patients et du personnel. Il éveille bien trop de questions chez eux et Lily ne veut pas avoir à répondre à aucune d’elles, surtout pas alors qu’elle fait justement tout son possible pour faire profil bas et ne pas être reconnue après son passage à la télévision nationale.

« Mais soit, si pour toi c’est équivalent, je peux comprendre. » - “Arrête.” Dans sa voix, on pourrait entendre la fermeté et la force. On pourrait croire qu’elle mène toujours la danse et qu’elle a son mot à dire. On pourrait même supposer qu’Alfie obéirait. Et quiconque irait dans ce sens là serait sacrément stupide parce qu’en réalité, elle ne fait que le supplier. Il va trop vite pour qu’elle réplique quoi que ce soit et lui explique le fond de sa pensée, alors elle doit se contenter d’une réponse monosyllabique qu’il aura tôt fait d’ignorer. L’infirmière en elle autant que la connaissance de toujours du Maslow comprend bien rapidement qu’il ne sera pas capable de s’arrêter de lui-même dans son interminable monologue / réquisitoire, alors elle tente au moins d’en anticiper la suite. Tel un sac de sable dans une salle de boxe, elle ne fait qu’encaisser les coups du mieux qu’elle le peut, incapable de répliquer. « C’est drôle, quand même. » Pour Alfie, en effet, c’est sûrement d’une jouissance absolue alors qu’il a réussit à renverser le jeu de pouvoir simplement en le voulant, faisant de nouveau d’elle une simple poupée de chiffon se pliant à sa volonté. Chaque coup de poignard dans son coeur est symbolisé par des mots provenant du plus vieux et elle en est rapidement réduite à la frêle Lily qui, effectivement, ne sait plus que se mordre l’intérieur des joues pour garder au moins la tête hors de l’eau et de ses tourments. Il est le premier à parler à voix haute de ce que son frère faisait avec le père David une fois la porte de son bureau fermée ; il est le premier à rappeler (comme si elle avait oublié) à Lily comment se passaient les soirées en compagnie de son ex petit-ami. Il se vend lui-même, pourtant, lorsqu’elle comprend que si Joseph en est venu à être au courant ce n’est que parce qu’Alfie est passé par là, pour d’obscures raisons qu’elle n’a pas le temps de chercher à déceler.

« Tu seras toujours une Keegan. » Et un jour, c’est promis, elle sera capable de l’accepter alors que ses rêves de gamines faisaient d’elle une Maslow.

Malgré tout, c’est l’infirmière en elle qui garde le dessus dans cette situation et elle ne peut pas s’empêcher d’observer ce qu’il pense emmener avec lui dans sa fuite, entre ses affaires de pacotille et le désinfectant quasiment vide. Il agit avec hâte mais reste trop lent pour réellement avoir une chance de s’enfuir - et pourtant, il est toujours trop rapide pour son corps traumatisé qui n’a pas eu le temps de se remettre du coup de couteau et encore moins des points de suture. Déjà, elle les entend craquer, quand bien même la voix d’Alfie est ce qui bourdonne à ses oreilles ; ses reproches avec. Ses reproches à la chaîne font déglutir la plus jeune qui a au moins su se débarrasser de ses pupilles tremblantes. « Alors pardonne mon langage, Lily. » Statue de marbre, elle ne recule pas d’un seul centimètre lorsqu’il réduit une ultime fois la distance entre eux. Il sourit alors qu’en face le visage de Lily reste figé dans une expression qui ne traduit absolument rien de ses émotions du moment. « Va bien te faire foutre. » Ses mains commencent à trembler, elle les enferme dans un poing qu’elle cachera du regard intrigué de ses collègues. Pour le moment encore, c’est au dos d’Alfie qu’elle parle.

Sécurité !

Ou peut-être pas. Il est sorti du boxe de pacotille, il lui laisse la vue sur la salle immense et sur la sécurité habillée de noir. Elle ne peut pas l’arrêter toute seule, c’est bien vrai, mais puisqu’elle change les règles du jeu à sa guise alors elle se permet de faire intervenir des personnages extérieurs comme bon lui semble. Les figurants sont à sa botte, ils ne lui demandent pas de longues explications puisqu’ils n’en ont pas besoin le moins du monde. La cible est pointée du bout de son index (ne pointe pas du doigt Jo, c’est pas poli) alors qu’elle ajoute “Il n’est pas en état de sortir de l’hôpital ni même de décider pour lui.” (t’as pas le droit de répéter les secrets que je te dis Alfie, c’est pas juste). Les règles sont différentes parce qu’aujourd’hui, c’est elle qui joue. Les règles sont différentes parce que justement, tout se passe aujourd’hui et non plus trente ans plus tôt. “Dans sa poche. Il a volé une bouteille de désinfectant.” Consiste en le dernier argument de Lily pour prouver sa bonne foi et le fait qu’elle ne souhaite que le bien de ce patient qu’elle ne connaît bien sûr ni d’Eve ni d’Adam. Et puisqu’elle anticipe déjà qu’Alfie se débattra tel un chien enragé à l’instant même où on posera une main sur lui, c’est une dose de sédatif qu’elle prépare en hâte, prévoyant sans doute bien plus que la dose normalement recommandée sans prévenir aucun de ses collègues. Cette histoire ne regarde de toute façon qu’eux. Ils sont les seuls à pouvoir se comprendre, et cela pourrait sûrement devenir la métaphore de l’aiguille qu’elle enfonce sans aucun remord dans la chair de celui qu’elle a un jour sincèrement aimé, avant de le détester de tout son coeur et de recommencer le même schéma une infinité de fois. Cette fois-ci, elle donne des instructions au dessus de son corps dont il se détache peu à peu, jusqu’à ne plus en être maître le moins du monde.

D’un point de vue extérieur, on la nommerait grande gagnante de cette bataille. Une fois de plus, pourtant, Alfie en est le seul vainqueur. Il a gagné tous les arguments, il l’a poussée à bout, il a révélé des secrets interdits sur son lieu de travail. Elle lui a fait mal et même ça, il va le considérer comme une victoire.
Déjà, pourtant, elle demande une revanche.

La jeune femme a insisté pour qu’il ne soit pas attaché, ni des pieds ni des mains. Elle leur a donné l’autorisation de laisser un agent de sécurité dans le couloir, au cas où, mais lui a formellement interdit de rester dans la chambre. Lorsque ses collègues lui ont unanimement donné le droit de prendre sa fin de journée, elle l’a simplement utilisée pour rester auprès d’Alfie et être celle qui suturerait, pour la seconde fois déjà, sa plaie de nouveau souillée. Certains ont ouvert la bouche pour protester ; ils l’ont refermé bien rapidement sous son regard sombre. Elle a perdu son rang de petit ange de l’hôpital et ça aussi, c’est une preuve que même inconscient, il ne fait que gagner des points dans cette guerre qui n’en finit pas. Tout ce qu’elle a pu gratter, ce sont quelques heures de silence qu’elle n’a même pas été capable de transformer en repos, incapable de se laisser le droit de s’assoupir à ses côtés. Il était là par la faute de Joseph dans un premier temps et s’il est monté deux étages au dessus et est désormais dans une chambre à lui seul, c’est par la faute de Lily. Les Keegan ont sponsorisé sa journée sur la thématique “visite personnalisée de l’hôpital”. Sa chemise tachée et trouée a été jetée à la poubelle parce qu’elle ne tient pas à ce qu’il en fasse un trophée. En attendant, il a le droit aux blouses blanches de l’hôpital alors que sur la chaise vide près de lui se trouvent deux chemises qu’elle garde éternellement dans sa voiture (pliées, dans leur protection, cela va de soi). Elle n’a peut-être temporairement plus de mari mais il y a des habitudes rapidement acquises qu’elle n’arrive pas à perdre. Surtout, malgré tout ce qu’elle peut lui reprocher de plus aujourd’hui, Lily refuse de lui rendre la vie plus compliquée. L’instant serait mal choisi, même pour elle. La jeune femme a pris sa main libre en otage il y a déjà une ou deux heures (trois, quatre en réalité) et elle ne peut s’empêcher de la tenir contre ses doigts, comme si elle pouvait le rassurer par ce biais là. Alfie refuserait sûrement même qu’on le rassure mais puisqu’il ne peut pas parler, elle a encore la possibilité de se bercer de douces illusions. Ses doigts courent contre sa chair, ils lui massent la paume de sa main, ils lui inventent une alliance qu’il ne portera sans aucun doute jamais. Elle a prévenu sa mère qu’elle ne serait pas là pour le dîner ; elle est prête à répondre à n’importe quel sms provenant de Juliana sur le téléphone d’Alfie. Il n’y en a aucun, pourtant, et le brun commence à reprendre connaissance alors que la nuit s’est déjà installée depuis longtemps. Le sédatif était sans doute un peu trop dosé, en effet. “Tu pourras parler et bouger dans quelques minutes. Je t’ai administré un sédatif. Si t’essayes de partir à nouveau, je t’en donne un second.” Généralement, les premiers mots lorsqu’un patient revient à lui sont bien plus rassurants. Pour lui, elle se contente d’être pragmatique. Il n’a pas besoin d’en savoir davantage pour le moment, tout comme elle n’a pas besoin de défaire sa main de la sienne tant qu’il ne peut pas l’en forcer. Ce qu’il peut faire, pourtant, c’est écouter. Malheureusement pour lui, il ne peut justement faire que ça. “Le problème, c’est que tu dis une chose et que tu l’oublies juste après. Tu l’as dit toi-même : je change les règles du jeu. J’ai le droit de te rejeter la faute dessus si j’en ai envie, peu importe qui a décidé de tuer qui le premier.” Elle en parle d’une voix calme et détachée parce qu’elle sait que cette fois au moins, personne ne viendra la couper, surtout pas Alfie. Elle a un doux sourire au coin des lèvres et une posture rassurante. Sans le con, la scène serait touchante à observer. Avec, l’ambiance devient soudainement bien plus sombre. Parler de meurtre semble devenu quelque chose d’anodin, désormais. “Si je voulais me rendre à la police pour te décrire comme un assassin manipulateur et réduire ta vie et ta carrière à néant, je pourrais le faire. Si je voulais te donner une dose mortelle de n’importe quel médicament indétectable à l’autopsie pour ensuite leur faire croire que tu as succombé à tes blessures et que mon frère est tout aussi coupable et qu’il mérite de retourner derrière les barreaux, je pourrais le faire.” Ce ne sont pas des menaces en l’air et il la connaît bien assez pour le savoir, malgré ce que sous-entend Lily. Elle a toujours eu une vie bien rangée, elle est aimée des téléspectateurs, elle a un chaton qu’elle expose sur les réseaux sociaux et une alliance brillante qui va avec. Elle a un sourire de surfeuse et, justement, une passion dévorante pour ce sport comme 105% des australiens. Elle a un mari parfait, connu et apprécié lui aussi, et des dizaines de tournées gratuites au DBD à offrir aux officiers du poste qui useraient de leur temps pour l’écouter raconter tous ses pauvres déboires ficelés d’une main de maître. Et à aucun moment on ne pourrait croire qu’elle a un esprit tout aussi tordu et malsain que les deux hommes qu’elle décrit tels des Ted Bundy modernes. En ce moment encore, elle ne fait que jouer entre les doigts du brun sans lui faire mal ni chercher à le faire. “Mais aucun policier ne t’attend derrière cette porte.” Elle ne l’a pas fait pour le moment. Cela ne signifie pas qu’elle ne le fera jamais. Son regard le lui fait bien comprendre, maintenant qu’il n’y a plus la moindre once de tremblement. “Par contre, à la seconde où tu franchis la ligne rouge, je te conseille de fuir vite et loin.” Après tout ce qu’ils ont déjà vécu et surmonté, pourtant, même elle ne sait plus où pourrait se trouver cette fameuse ligne rouge. Ce sera sûrement le moment où elle ne voudra plus jouer et où elle aura de nouveau changé les règles sans juger nécessaire de prévenir qui que ce soit. “C’est pour ça que tu ne me veux pas en ennemie.Est ce que tu veux toujours que je te le prouve ?

Après avoir soutenu son regard quelques secondes supplémentaires, elle juge ne plus rien avoir à rajouter à ce sujet là et préfère éluder tout ce qui se rapporte au père David et à son ex petit-ami, pour le moment encore. Cela appartient au passé, non ? C’est ce que disent toujours les gens partout, que ce soit à la télévision ou dans les journaux. Cela ne sert à rien de ressasser le passé. “Arrête de me tenir à l’écart. Je veux faire partie de votre jeu.” Parce qu’essuyer le sang après chacune de leurs nouvelles bagarres ne lui correspond pas et se contente d’y ajouter quelques points de suture de ci de là ne l’amuse déjà plus. Elle veut être au cœur du combat pour que, enfin, ils la considèrent comme une égale et non plus une petite âme chétive à protéger - quand ils n’ont font pas leur arme de guerre préférée à utiliser contre l’ennemi.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyJeu 25 Fév 2021 - 20:58

“Ce ne sont pas tes affaires.” Il concède à lui laisser le dernier mot alors que ses lèvres qui s’étirent en un sourire carnassier démontrent du contraire. Aucun mot ne s’est échappé d’entre ses lèvres pour lui répondre malgré son évidente envie de toujours être celui qui lui assène le coup de grâce, tout simplement parce qu’il l’a fait, par le simple fait qu’elle soit vexée par cette pique là-aussi évidente, mais tellement efficace. Son sourire, fier, provocateur, lui fait comprendre qu’elle n’a pas gagné bien que les dernières paroles émanent d’elle ; parce qu’elle ne gagne jamais, Lily, elle ne peut pas gagner face à lui. Alfie essaie de s’en persuader depuis autant d’années qu’il la connait, alors, à force, évidemment qu’il y croit. Et même lorsque les éléments sont contre lui, même quand il doit reconnaître que Lily est la seule qui a pu avoir un aperçu de ses faiblesses et de ses doutes, même lorsqu’il s’est rendu lui-même coupable de lui avoir offert cet accès, ce sentiment de supériorité ne lui est jamais accordé bien longtemps. Très vite, il reprend l’avantage dans cette partie commencée il y a si longtemps qu’aucun d’entre eux ne pourrait en évoquer le départ et lorsqu’elle peut se vanter du contraire, Alfie ne la laisse jamais savourer sa victoire bien longtemps. Car il aura toujours un avantage sur elle et cette image de lui qu’il n’a aucun besoin de préserver, quand Lily s’épuise à la parfaire jour après jour. S’il mettait sa mauvaise foi de côté, il lui concéderait quelques victoires, mais jamais à l’unanimité, jamais considérées comme lui étant propres : il est toujours là, quelque part et ses victoires proviennent de sa propre impulsion, lorsque cette Lily, celle qu’il apprécie, prend le dessus et fait fi de cette image. C’est quand elle abaisse ses barrières qu’elle est la meilleure des adversaires et des années de théorie n’ont toujours pas réussi à en faire une pratique quotidienne. Il ne perd pas espoir, Alfie, en démontre son attitude aujourd’hui, son besoin de la provoquer qui n’est pas uniquement à mettre sur le compte de sa seule personnalité. Il a besoin de la piquer comme il vient de le faire en mentionnant son nom, il a besoin de l’obliger à sortir hors de sa zone de confort pour qu’elle en soit la première outrée, alors que, de son côté, il en est le premier ravi. Elle lui donne des éléments par dizaines, intentionnellement ou non il l’ignore et cela importe peu, et s’ils se sont accumulés au fil des années, il en revient toujours au facteur à l’origine de tout le reste : son identité. Keegan ne signifie rien, Keegan signifie pourtant tout. Elle sera toujours une Keegan, qu’elle le veuille ou non, parce qu’il ne s’agit pas uniquement de quelques lettres ou d’un simple nom, c’est une identité qui est ancrée en elle et dont elle ne pourra jamais se séparer. Elle a ce gène qui coule dans le sang de tous les Keegan ; la biologie s’opposerait à ce raccourci qui n’a aucun sens et qui pourtant est si cohérent : elle est aussi détraquée que son frère et ses parents. Et n’allez pas croire qu’Alfie considère cet aspect comme péjoratif ou déplaisant, bien au contraire ; c’est peut-être la raison pour laquelle la douce Lily, la parfaite Lily, continue d’avoir une telle importance dans sa vie alors que n’importe qui d’autre aurait eu le droit au traitement radical auquel il soumet les autres quand ceux-ci n’ont plus son intérêt : ils n’existent plus, parce qu’il ne leur laisse plus aucune place dans sa vie. Lily est toujours là parce qu’elle n’est pas uniquement la douce et parfaite Lily – il ne l’a jamais dit à l’oral, mais il n’en pense pas moins. Elle est plus, elle est tellement plus ; un jouet, peut-être, l’objet de sa fascination, surtout.

Il persiste à croire qu’il peut anticiper chacun de ses gestes, chacun de ses mots ; elle le surprend sans-cesse avec ces révélations auxquels il n’aurait jamais pu croire et auxquels il ne veut surtout pas croire. Elle ne se serait jamais retournée contre la chair de sa chair, pas même quand celle-ci prend les traits de Joseph, d’un frère qu’elle aurait préféré ne jamais avoir. Parce que tout est dans ce lien qui les unit ; et malgré les déceptions, malgré la rancœur, la colère, la haine et tous les sentiments qu’il lui procure, il reste son frère, alors qu’Alfie n’est qu’Alfie. Il est indéfinissable et si d’ordinaire il s’en satisfait, ça n’aurait jamais suffi à long terme. Ça lui interdit le droit d’avoir un quelconque statut aux yeux de Lily, autant que ça lui en confère un tout particulier ; elle aurait constamment oscillé entre deux extrêmes avec lui, comme elle le fait depuis des années, comme il le fait lui-aussi depuis tout autant de temps. Ils étaient presque alliés la dernière fois qu’ils se sont vus, ils sont dorénavant des ennemis, alors même qu’elle persiste à proposer une trêve – tout est toujours compliqué entre eux et la loyauté de la jeune femme l’aurait été tout autant. Elle ne peut pas lui promettre qu’elle n’aurait pas retourné sa parole contre la sienne au prochain conflit – probablement très vite arrivé. Pourtant, s’il y a une chose dont il n’a jamais eu à douter concernant Lily, c’est cette même loyauté qu’elle lui offre depuis leur premier échange. Alfie lui a donné des raisons par dizaine de la retirer, elle l’a parfois menacé, mais jamais elle ne l’a exécuté. Et c’est très exactement parce qu’elle ne l’a jamais fait qu’il reste dans cet état de doute. Si elle avait déjà agi de la sorte, il saurait à quoi s’en tenir, il ne serait pas suspendu à ses actes, conscient de ce dont elle est capable. Mais il ne sait pas ce dont elle est capable, parce qu’elle ne lui donne pas les réponses à de tels questionnements ; sa loyauté en est la preuve. Elle la retirera, un jour, juste pour lui asséner ce coup de grâce qu’elle rêve de lui offrir depuis des années. Ils sont là pour s’épauler lorsqu’il le faut, mais ils sont aussi les premiers à s’enfoncer ; et sur ce dernier aspect une inégalité demeure par l’avantage qu’il a pris avec les années. Il n’est pas suffisamment dupe pour croire qu’elle ne tentera pas une percée fulgurante un jour ou l’autre ; et à ce moment-là il sera le plus heureux des hommes dévastés.

"Je ne te demande pas ton avis." Ses yeux qui se lèvent au ciel remplacent ce rire qui ne s’arrêtait pas, pour ne pas lui laisser l’occasion de se satisfaire de la surprise qu’elle lui a provoqué. Ce n’est pas tant le fait qu’elle veuille rester à ses côtés qui soit surprenant, c’est le fait qu’elle le veuille alors même qu’il n’y a plus rien qui ne le justifie. Elle a sa famille, désormais, Lily, elle l’a dit elle-même : elle n’est plus une Keegan et la McGrath n’a aucune raison d’accorder dans son présent plus de place que nécessaire aux fantômes du passé. C’était l’histoire de quelques points de suture et de soins lui permettant de se maintenir en vie ; pas d’une surveillance accrue dans un moment où il n’a décidément pas besoin que l’on contrôle ce qu’il fasse – ou ce qu’il prend. « Belle définition du consentement. » Il soupire, le regard qu’il lui adresse lui interdisant de retourner cet argument en sa faveur ; oh qu’il a dépassé les limites avec la jeune femme au cours des années, mais toujours avec son accord, car il n’y a rien de plus beau que de s’en assurer pour avoir l’honneur de renvoyer leurs propres fautes à ceux qui essayent de les rejeter sur autrui. Et bien sûr que l’hôpital se fout de la charité, mais si ce n’était pas le cas, où serait le plaisir de dicter les limites des autres quand il est hors de question de se les imposer à soi-même ? Ce sont ses mêmes limites qu’il n’a pas qu’il ne peut pas imposer à une Juliana qui serait probablement morte d’inquiétude si elle était au courant des dernières actualités concernant son petit ami – et dernièrement, plus elle est tenue éloignée de celles-ci, mieux elle se porte. “Je ne comptais pas le faire.” Malgré sa menace, c’est pourtant son cœur qui se serre en songeant à celle qui vit ses derniers instants à ses côtés ; car si Alfie sait quelle décision il se doit de prendre pour protéger la jeune femme, le fait de la rendre concrète lui est encore difficile. Elle n’est pas encore sortie de sa vie qu’elle lui manque déjà et c’est un problème : elle est sa plus grande faiblesse à un moment où il ne s’autorise plus à en avoir. Le fait qu’elle soit la plus importante ne veut pas dire qu’il n’en reste pas d’autres qu’il doit éliminer, à commencer par sa réaction loin d’être aussi neutre qu’il l’aurait voulu et qui démontre à quel point Lily vient de prendre l’avantage. Il ne voulait pas lui faire un tel plaisir, pourtant il n’arrive pas à se contenir quand sa vision étriquée et manichéenne des choses l’empêche de véritablement les comprendre. Elle redevient cette Lily qu’il ne peut supporter, pire, qu’il déteste avec ses grands discours et sa morale. Elle n’en sait rien. Elle ne sait rien de tout ce qu’il a vécu après Joseph, tout ce qui s’est ajouté à ce qu’il a vécu en Colombie et qui donne lieu à un cocktail explosif qu’il peine de plus en plus à maîtriser. Il y a le sentiment de trahison, celui qu’il met en avant, mais il y a aussi cette perte de contrôle indescriptible et non désirée. D’ordinaire, même ces moments-là sous son contrôle, mais Joseph lui a enlevé ce droit lorsqu’il l’a sauvagement agressé, lorsqu’il a fait de lui ce qu’il est (re)devenu, lorsqu’il a jeté le premier caillou dans le mécanisme qui s’est désormais enrayé. Il avait une vie banale, peu satisfaisante, à tendances ennuyantes, mais où il avait le mérite de ne pas se perdre lui-même, d’être en proie à tous ses souvenirs, toutes ces images, qu’il ne peut plus contrôler. C’est constamment, c’est épuisant, c’est dévastateur – mais ça, Lily n’est pas fichu de le comprendre, elle qui n’a jamais tendu la main à son frère lorsque leur père le battait, lorsque le Père le touchait, pas vrai ? Elle ne peut rien comprendre, Lily, parce que jamais elle n’a été face à de telles difficultés, jamais sa vie ne lui a échappé, jamais son propre corps l’a trahie, jamais elle ne s’est retrouvée prisonnière de ses propres pensées et souvenirs.

Il s’en fiche que sa plaie saigne à nouveau, que tout le travail soigné de Lily soit détruit en quelques secondes – cette souffrance, il l’a acceptée au moment où il a pris la décision de quitter les lieux, il l’épouse avec plaisir, il ne fait qu’un avec elle. Ce n’est pas celle qui s’impose à lui toutes les nuits, sur son lieu de travail, dès qu’il entend un bruit ressemblant à s’y méprendre à une détonation, dès qu’il interprète une parole comme il ne devrait pas, dès que la fatigue l’empêche de se raisonner. Encore une fois, elle ne sait rien de tout cela, alors quelle légitimité possède-t-elle ? Il compte la détruire seconde après seconde, quand ses paroles s’enchaînent, quand ses critiques deviennent des attaques – il veut lui faire mal comme elle vient de lui faire mal, comme il a été heurté par cette bribe de confiance qui lui a mis entre les mains en arrivant ici et qu’elle a écrasé de toutes ses forces pour en former des poussières qui s’écrasent au sol. “Arrête.” Son ton froid ne fait que lui provoquer un bref sourire carnassier entre deux attaques ; oh non, Lily, je n’arrêterai pas. Elle a voulu prétendre être une adversaire à la hauteur, il est désormais temps de l’assumer. Elle était parvenue à titiller ses meilleurs côté ; elle a fini par activer tous les plus mauvais. Il prend plus de plaisir qu’il ne le devrait, il se justifie (s’il a besoin de se justifier) en se remémorant la manière dont elle a lancé les hostilités. De sa propre volonté ou malgré elle, ça n’a pas d’importance quand le résultat lui a été aussi déplaisant, c’est du pareil au même et le traitement infligé à sa victime sera là-aussi le même. Elle reste muette, Lily, enfin elle cesse de discourir sur des sujets qu’elle ne comprend pas ; elle reste une enfant, finalement et comme toujours, son opinion sur la jeune femme change après un seul acte, une seule parole. Elle redescend du piédestal où il la place bien malgré lui, pour qu’elle ne soit qu’une fourmi qu’il prend plaisir à brûler. Il n’y a plus rien qui compte dans l’esprit dérangé d’Alfie de l’atteindre autant qu’elle l’a atteint, de réaliser que le soutien (maladroit, peut-être, mais bien existant) qu’il lui a offert par le passé a été réduit en poussières. Et là, ce n’est pas une question de donnant-donnant, c’est une question de logique. Elle aurait dû savoir. Elle aurait dû savoir qu’il avait besoin qu’elle prenne ce rôle aujourd’hui et non celui de l’antagoniste. Il avait besoin qu’elle soit son alliée et même si elle l’a voulu à sa façon, ce n’est pas ainsi qu’il le voulait. Il ne voulait pas d’une justicière ou d’une héroïne, seulement d’une alliée qui aurait pu l’épauler dans ses doutes qu’il verbalise pour la première fois. Elle est la mieux placée pour savoir à quel point cela coûte d’offrir cette vulnérabilité à l’autre, parce que c’est lui mettre de nouvelles cartes en main, pourtant, elle sait aussi à quel point cela représente quelque chose qu’elle soit celle qu’il a choisie pour cela. Mais elle a failli à la tâche, Lily, et peut-être que cette fois-ci, il ne pourra pas se raisonner, il ne pourra pas lui pardonner et que jamais elle ne retrouvera la place qu’elle occupe, parfois, à quelques occasions, à ses yeux. Il lui faudra frapper bien et fort pour justifier qu’il ne l’écrase pas totalement et à cet instant, il doute qu’elle en soit capable.

“Sécurité !”

Et il n’apprend jamais, Alfie, lorsqu’il sait pourtant mieux que personne qu’il ne doit pas la sous-estimer. Quand la voix de Lily résonne à ses oreilles, ce sont de multiples insultes qu’il lui adresse dans sa tête. Pourtant, aucune ne franchit la barrière de ses lèvres. Elle ne lui fait pas peur, bien au contraire ; elle l’impressionne presque alors qu’il se retourne pour lui faire face et que son sourire fait office de seule réponse à son stratagème. Tu vois, quand tu veux, que lui suggèrent ses yeux qui ne lâchent pas les siens. “Il n’est pas en état de sortir de l’hôpital ni même de décider pour lui.” Il fronce les sourcils, outch, ça fait mal à son égo. “Dans sa poche. Il a volé une bouteille de désinfectant.” Le mélange est justement équilibré entre la détraquée et la parfaite ; et s’il voit avant tout la première, il sait que les employés de cet hôpital ne connaissent que la seconde. Son sourire s’agrandit et un certain plaisir est retrouvé quand ladite sécurité s’approche de lui. Pour une fois, c’est elle qui établit les règles et c’est à lui de les suivre. Pas aussi longtemps qu’il l’aurait voulu quand son corps cède à un état second, mais suffisamment pour hurler quelques insultes et insister sur ce nom qu’elle veut absolument effacer ; elle sera toujours une Keegan, dès qu’elle veut le réduire au silence, surtout lorsqu’elle y arrive.

Il court après le silence éternel ; elle rêve de le lui offrir probablement autant que lui, mais comme trop souvent, la tranquillité n’est que brève et bientôt (une éternité) il reprend ses esprits. Tente, en réalité, alors que la voix de Lily résonne à ses oreilles alors que ses yeux peinent à se maintenir ouverts pour encore quelques minutes. “Tu pourras parler et bouger dans quelques minutes. Je t’ai administré un sédatif. Si t’essayes de partir à nouveau, je t’en donne un second.” Oh, Lily, si tu savais. Pourtant, elle sait. Elle sait que de toutes les punitions qu’elle pourrait lui infliger, celle-ci est la plus belle et qu’il serait capable de vivre cette boucle indéfiniment si le résultat est celui qu’elle lui propose. Et s’il ne peut l’exprimer clairement, ce sourire qu’il lui offre le fait pour lui. Il la défie autant qu’il la remercie. Elle voulait peut-être se vanter d’avoir eu le dessus, il ne peut que se réjouir d’avoir perdu cette bataille et si l’échec ressemble à ça, il se fera un plaisir de les accumuler. S’il te plaît, Lily, encore, que supplient ses yeux qui ne veulent pas lui donner d’arguments, mais qui ne peuvent s’en empêcher. Car, déjà, le réveil se fait petit-à-petit, ses pensées s’ordonnent (ou se désordonnent à nouveau dans un joyeux bordel) et il voudrait les faire taire à nouveau. “Le problème, c’est que tu dis une chose et que tu l’oublies juste après. Tu l’as dit toi-même : je change les règles du jeu. J’ai le droit de te rejeter la faute dessus si j’en ai envie, peu importe qui a décidé de tuer qui le premier.” Son visage devient plus sérieux tandis que ses yeux la quittent pour se poser autour de lui. Il lui a offert sa gratitude et il se déteste d’en ressentir alors que chacune de ses paroles lui donnent envie de hurler des mots qui se perdraient dans les derniers effets de l’anesthésiant. Il se déteste encore plus de laisser sa main dans la sienne et de lui donner ce nouvel avantage. “Si je voulais me rendre à la police pour te décrire comme un assassin manipulateur et réduire ta vie et ta carrière à néant, je pourrais le faire. Si je voulais te donner une dose mortelle de n’importe quel médicament indétectable à l’autopsie pour ensuite leur faire croire que tu as succombé à tes blessures et que mon frère est tout aussi coupable et qu’il mérite de retourner derrière les barreaux, je pourrais le faire.” Son regard revient sur elle autant que son sourire sur ses lèvres. Enfin. Enfin, elle se montre à la hauteur, enfin, elle montre ce visage qu’il veut tant voir au quotidien. Elle est tellement plus que ce qu’elle montre Lily et c’est un tel gâchis que le monde ne puisse le percevoir, autant que c’est un privilège d’avoir le droit à ce cadeau qu’elle lui fait à cet instant. Elle peut se vanter, elle peut se placer sur un piédestal, il n’en demeure pas moins qu’il est celui qui tire les ficelles. S’il n’avait pas commencé, autant auprès de Joseph que d’elle, aucun d’entre eux n’en serait là. Dans un sens, elle est sa plus belle œuvre et le regard qu’il porte sur elle est celui d’un artiste qui ne peut s’empêcher de contempler son travail. Et ce n’est pas parce que sa colère s’est muée en admiration qu’il ne porte pas moins attention à ses menaces. Bien sûr qu’il l’en croit capable, bien qu’il l’en sait capable. Tout comme elle sait qu’il répondra à cette escalade et qu’une différence notable se met entre eux. “Mais aucun policier ne t’attend derrière cette porte. Par contre, à la seconde où tu franchis la ligne rouge, je te conseille de fuir vite et loin. C’est pour ça que tu ne me veux pas en ennemie.” Il secoue légèrement la tête, lèvres pincées, l’air d’accorder du crédit à ses propos tout en s’en moquant ouvertement. “Arrête de me tenir à l’écart. Je veux faire partie de votre jeu.” Un rire s’échappe d’entre ses lèvres, c’est tellement plus qu’un jeu et Lily redevient une enfant au moment même où elle en fait cette demande. « Si tu continues ainsi, c’est toi qui va y passer en premier. » Qu’il prononce finalement d’une voix encore quelque peu éteinte, tentant de se redressant sur ce lit, en profitant pour desserrer ses doigts des siens. « Tu ne peux pas rejoindre la partie en étant une alliée. » Impensable, indiscutable, le seul statut qu’il lui concède est celui d’ennemie – du moins, quand il s’agit d’en parler et non d’y penser. « Et ce n’est pas un jeu, Lily. » Ils ne sont plus des enfants. Ce sont des adultes qui ont entamé une guerre dont il ne peut y avoir aucun gagnant. Les batailles s’enchaînent, les conséquences aussi ; ce n’est pas un problème pour Joseph et Alfie, c’en sera inévitablement un pour Lily. « Tu ne pourras jamais rivaliser. » Son vocabulaire enfantin impose le traitement qu’il lui inflige ; il la tient à l’écart comme il le faisait par le passé, allant à l’encontre de sa demande. « Tu pourrais aller à la police, oui. Et je sais que tu en es capable. Mais tu sais aussi que je riposterai. » Pour la première fois, les choses sont verbalisées : il n’y a plus de sous-entendus, il n’y a plus de yeux fermés ; cette escalade est admise et approuvée et ils ne font plus semblant. « Tu pourrais le faire. Et tu peux aussi croire que tu t’en sortiras juste avec ta gueule d’ange. » Son regard vient s’ancrer dans le sien, son air provocateur qui reprend place sur son visage. « Ce sera certainement le cas. Mais ton image... Oh, Lily, même avec le plus beau des discours et les plus beaux battements de cils, il en sera quoi de ton image ? » Il l’interroge, restant silencieux un bref instant avant de reprendre. « Tu peux prétendre être innocente, mais le monde, ton mari, tes collègues et tous les autres, ils ne verront que la complice. » Il fronce les sourcils, pince les lèvres, l’air attristé est évidemment surjoué. « Ils ne verront que la poussière que tu as caché pendant si longtemps. » Il accentue, son sourire qui reprend place sur ses lèvres. « Tu as tout à perdre, Lily et nous... c’est déjà fait. » Le constat n’est pas triste, mélancolique, une simple exposition de faits, un avantage, même, qu’ils auront toujours sur elle. Un avantage qu’elle doit préserver, surtout. Parce qu’elle n’est pas comme eux et si elle semble s’en plaindre, elle ne devrait que s’en réjouir. Pourtant, son regard va à l’encontre de ses pensées lorsqu’il l’ancre à nouveau dans le sien, quand il ne la lâche pas, quand il la défie, plus que jamais. La décision lui reviendra ; pourtant il sait qu’en la mettant à l’écart ainsi, il ne fera qu’accentuer celle-ci.

Alors, Lily, est-ce que tu veux toujours jouer ?

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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyMer 3 Mar 2021 - 22:08

Alfie la fascine. Il l’exaspère en premier lieu, oui, mais juste ensuite il la fascine. Il est impossible à comprendre même après toutes les décennies passées à ses côtés. Peu importe à quel point ses mots peuvent être incisifs, elle souffre bien plus du fait qu’il retire ses doigts d’entre les siens. La jeune femme espérait au moins que les gestes pourraient dénoter des mots mais même ça, il ne le lui offre pas. A défaut, elle se repose donc dans le fond de sa chaise, le dos droit, ses yeux vifs posés uniquement sur l’homme alité qui peine à simplement se relever. Les menaces sont écoutées d’un air impassible, avec une attitude qui l’est tout autant. Qu’elle y passe en premier, donc. Il n’a jamais levé la main sur elle et il ne le fera jamais, elle en est assurée. “Je n’ai jamais demandé à être une alliée.” Alliée de qui, même ? Elle voudrait faire office de drapeau blanc et si pour cela elle doit devenir leur ennemie alors soit. Lily n’a pas l’esprit guerrier et elle fera tout pour trouver un terrain d’entente autant que possible. Une fois l’occasion manquée, pourtant, elle n’aura jamais peur non plus de prendre part à la guerre. A leur propos, elle comprend enfin qu’aucun des deux ne s’arrêtera tant que l’autre ne sera pas mort.

« Tu ne pourras jamais rivaliser. » - “T’en sais rien.” Ils lui dictent tous ce que serait sa vie si mais personne ne la laisse essayer quoi que ce soit. Elle ne pourrait pas rivaliser, mais elle n’a pas le droit de prouver ce dont elle est capable. Elle ne pourrait pas rivaliser, mais ils l’ont toujours tenu aussi loin que possible pour ne jamais avoir à la voir. “Mon image ne changerait pas. Tu ne peux pas riposter, ni devant moi, ni devant la police.” Elle serait la pauvre infirmière qui pense que le monde entier est empli de bonnes intentions et qui aurait cru en un patient trop instable. Pour appuyer son argument, elle n’aurait aucun mal à s’entailler la joue pour prouver à quel point elle a raison et Alfie, lui, bien sûr, à tort. Elle pourrait se faire un œil au beurre noir, cela émeut souvent bien plus que n’importe quelle blessure. Un bras cassé pour aller avec ? Ce serait sans doute beaucoup, il faudrait dans ce cas oublier l’entaille au visage et disperser quelque peu les blessures. Dans un cas comme dans l’autre, elle serait soutenue par tout le monde, allant de son frère à la police, en passant par son mari et ses amis. Personne n’aurait accès à l’envers du décor, parce que personne ne pourrait la soupçonner capable de pareilles idées. Tout semble couler de source pour elle, pourtant.  « Ils ne verront que la poussière que tu as caché pendant si longtemps. » Il est trop fier et trop heureux alors que Lily, elle, ne voit qu’un plan voué à l’échec et une stratégie déjà répétée mille fois. Cela n’a plus aucun effet sur elle. “Quelle poussière, Alfie ? Mon père qui battait Jo ou mon ex qui en faisait de même avec moi ? Ou tu préfères parler de mon frère qui a cedé à l’appel de la drogue parce que le monde s’est acharné sur lui depuis la première heure ?” Si elle fait tout pour garder ces secrets enfouis aussi profondément que possible, leur révélation ne l’ébranlerait pas. Au contraire. Elle serait une martyre, une femme qui a survécu à bien des épreuves. Elle pourrait ajouter avoir perdu un bébé au milieu de tout cela et elle s’accaparerait toute l’empathie du public. La poussière ne servirait qu’à faire pleurer même les cœurs de pierre, parce qu’il n’a absolument rien en sa possession qui puisse lui faire du mal. Persuadée, elle veut croire à ce mensonge. « Tu as tout à perdre, Lily et nous... c’est déjà fait. » A son tour de rire doucement. Elle a appris des meilleurs. “C’est là où tu te trompes. J’ai rien à perdre.” Cela n’engage qu’eux et cela n’atteindra jamais Matt, n’est-ce pas ? C’est ce qu’elle se dit et se répète assez pour s’en assurer et pouvoir statuer ces phrases devant le brun, les yeux dans les yeux, plus certaine que jamais. L’enfant en elle est certaine qu’il lui a déjà fait tout le mal qu’il pouvait et qu’il arrive à court, aujourd’hui. L’adulte sait désormais qu’elle ne peut rien attendre d’un homme dans son genre, si ce n’est qu’il reste un éternel boulet à sa cheville - lequel elle raccroche d'elle-même lorsqu’il tente de s’en détacher comme dans des instants comme celui-ci. "Quoi que tu fasses, tu ne pourras pas rivaliser avec la parfaite petite chrétienne dont l'Australie toute entière a envié le mariage sur leurs écrans de télévision. Tu sais qu'ils veulent faire une suite, d'ailleurs ? Tu sais que je serai enceinte, quand les caméras reviendront ?" Non bien sûr qu'il ne le sait pas. Matt non plus n'en sait rien, d'ailleurs, parce que dans ses projets d'avenir elle espère d'avoir se réconcilier avec son mari avant de pouvoir parler à nouveau famille. Son plan est parfait, pourtant, et elle ne doute pas qu'il se réalisera. Alfie n'aura rien à se mettre sous la dent. Une chrétienne infirmière au coeur d'or vivant le parfait amour ; qui pourrait bien lui reprocher quoi que ce soit derrière ses deux iris bleus prêts à pleurer sur commande ? Évoquer son passé ne pourrait qu'apporter plus d'empathie encore de la part des inconnus et pour peu elle utiliserait ces instants pour leur dire qu'elle a dû apprendre le morse pour survivre et qu'en plus de tout le reste, le petit ange est intelligent. Elle doit parler du chat qu'elle a adopté pendant sa lune de miel avant ou après l'évocation du morse ? Oh, peu importe sûrement. Ils l'adoreront tous. C'est déjà le cas.

Ils n'ont pas les mêmes armes en leur possession et la McGrath reste persuadée que les siennes, plus féminines, sont bien meilleures. "Arrête de te battre contre moi, c'est tout ce que je demande." Reposant de nouveau les pieds sur Terre, elle avoue enfin ces quelques mots dans un souffle fatigué. Cela ne veut pas dire pour autant qu'elle ne serait pas capable de le combattre ; ça explique simplement que ce n'est pas ce qu'elle désire. Si il ne lui donne pas le choix, elle pourra au moins dire qu'elle l'aura prévenu.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyDim 28 Mar 2021 - 17:59

“Je n’ai jamais demandé à être une alliée.” Et pourtant, c’est le seul rôle qu’il concède à lui donner, le seul qu’il est capable d’officialiser du moins, alors qu’elle a déjà souvent été une adversaire. Mais puisqu’elle désire que sa place soit validée, c’est bien suffisant pour qu’Alfie minimise l’importance de la jeune femme ; elle ne peut prétendre qu’à ce rôle-là et toute tentative de négociation serait balayée d’un revers de main. Lily ne peut pas être à la hauteur, c’est impensable, alors même qu’elle vient de le lui prouver de la plus belle façon en l’empêchant de quitter les murs de cet hôpital. Il la déteste pour ça autant qu’il l’admire, ravi de l’avoir poussé à cet extrême, ravi de l’avoir mis dans l’embarras d’une quelconque manière, même pour quelques secondes avant qu’elle ne reprenne l’avantage. Sa crise n’est pas passée inaperçue et par extension, Lily non plus ; c’est bien suffisant pour lui donner l’impression que la victoire n’est pas uniquement celle de la jeune femme (ça ferait mal à l’égo, comprenez). C’est bien suffisant également pour lui donner raison, sans autant l’admettre : sa place n’est pas celle d’une alliée et s’il doit la considérer, c’est à sa juste valeur. Il ne se fait néanmoins aucun espoir, conscient que du trio, Lily est peut-être la plus instable, celle qui n’hésitera pas à sortir du jeu dès qu’elle ne le trouvera plus intéressant, dès qu’une plus belle opportunité se présentera, dès que les conséquences deviendront trop difficiles à assumer. Son refus anticipe ce qu’il a toujours su sur la jeune femme : qu’elle continuera de courir après son rêve de vie parfaite, peu importe si elle ne pourra jamais l’espérer de par les fragilités qui sont les siennes, les craquelures qui vont de pair avec son nom – le vrai s’entend – et qu’elle continue d’ignorer alors qu’elles ne cessent de s’agrandir. Elle ne veut pas être une alliée, elle peut être une adversaire, mais, surtout, elle sera une ennemie. Un jour ou l’autre, elle le deviendra, pas volonté ou par obligation, et c’est un risque qu’il refuse de courir. Malgré tout l’intérêt qu’elle représente lorsqu’elle est à cette position, le jeu en vaut la chandelle si elle demeure victime et non qu’elle se transforme en bourreau. C’est injuste, mais c’est ainsi et ça l’a toujours été concernant la jeune femme, elle a toujours été la pièce rapportée d’un duo qui, comme son nom l’indique, n’était à l’origine composé que de son frère et Alfie. Elle n’a jamais eu sa place, même si elle a su la gagner, même si elle est légitime, même si parfois ils se surprennent tous les trois à la considérer comme faisant partie du groupe ; ça ne sera jamais totalement le cas. Ni hier, ni aujourd’hui, certainement pas demain. “T’en sais rien.” Il le sait, en réalité, il le sait et s’il ne vante pas ses mérites, ce n’est pas pour autant qu’il les ignore. Elle peut rivaliser, elle vient de le prouver, mais sur le long terme elle ne sera jamais à la hauteur. Elle ne le sera jamais, car elle n’arrivera jamais à se libérer comme son frère et son meilleur ami l’ont fait – parce qu’ils n’ont rien à perdre, eux, alors que Lily commence à tout construire. Une part d’Alfie y voit un certain défi dans la volonté de tout ruiner, une autre se sent cet instinct qu’il renie qui vise à protéger tout ce qu’elle semble prête à mettre en danger. “Mon image ne changerait pas. Tu ne peux pas riposter, ni devant moi, ni devant la police.” Un nouveau rire moqueur s’échappe d’entre les lèvres de l’anthropologue. « Tu crois ? » Lily est une pauvre petite infirmière, Lily est innocente, Lily a un dossier qui lui sert d’argument ; Lily est intelligente et il ne doit pas la sous-estimer : c’est très exactement pour cela qu’il pourrait être tenté de riposter. De trouver un moyen de la piéger à son propre jeu, de se montrer plus intelligent qu’elle par simple fierté, par simple envie de l’humilier comme elle se permettrait de le faire de son côté. Il sait que l’avantage est à l’innocente Keegan et c’est ce qui lui donne envie de lancer un tel défi. Il n’a peut-être pas autant d’arguments qu’elle, un dossier aussi impeccable, mais son travail consiste à convaincre les autres de lui céder du terrain, un adage qu’il tente pourtant de ne pas (toujours) appliquer sur le plan privé, sauf des cas de force majeurs. Une situation pareille, face à Lily, en serait un. “Quelle poussière, Alfie ? Mon père qui battait Jo ou mon ex qui en faisait de même avec moi ? Ou tu préfères parler de mon frère qui a cedé à l’appel de la drogue parce que le monde s’est acharné sur lui depuis la première heure ?” Le fait qu’elle le verbalise le déstabilise un court instant, trop habitué à ce qu’elle ne pose aucun mot sur ces faits-là, qu’elle n’a probablement raconté à personne dans cet entourage qui compose sa vie d’aujourd’hui ; mais il n’est pas dupe, Alfie et très vite il parvient à ne pas s’en surprendre en glissant son regard sur cette porte fermée qui abrite les confessions de la brune. Ici, elle est libre d’en parler, ailleurs, qu’en est-il ? « Pourquoi choisir ? » Il rétorque avec un large sourire aux lèvres. Si elle est capable de ne plus les dissimuler aux yeux du monde, pourquoi choisir ? “C’est là où tu te trompes. J’ai rien à perdre.” Il ne peut contenir son étonnement, cette fois-ci, quand ses sourcils se haussent légèrement et que son regard s’accroche au sien. Vraiment, Lily ? Ce mari, cette vie parfaite, cette famille qui s’annonce, ce métier qui lui plaît, tout ceci relève du « rien » ? Il n’y croit pas un seul instant, Alfie et s’en retrouve presque à voir cette affirmation comme un nouveau défi. Tu ferais quoi, Lily, si j’ébranlais tout ça ? Tu n’aurais toujours rien à perdre ? « Outch, c’est ton mari qui doit avoir les oreilles qui sifflent. » Si elle considère qu’il fait partie de cette indifférence générale, sa place n’est donc pas assurée. Contrairement à la sienne et à cette idée, un sourire se dresse sur ses lèvres, la volonté d’attester de cette suprématie qu’est la sienne pourrait être réellement tentante. « Il ne faut pas me dire ça, Lily. » Il poursuit, son regard qui ne lâche pas le sien. Parce qu’elle sait. Elle sait mieux que personne ce chemin d’autodestruction qu’il emprunte par obligation, par réflexe, dès que les choses vont trop bien autour de lui, ce chemin sur lequel il n’hésite pas à emmener d’autres avec lui si la solitude se fait trop pesante. Cette manière qu’il a de se soucier de ses propres désirs en écrasant ceux des autres, de ces réflexions qui sonnent toujours comme des défis à ses oreilles, de cette manière de penser qu’il sait maladive, mais qu’il ne parvient pas à faire taire. Elle sait mieux que personne ce qu’il est capable de faire, elle sait mieux que personne qu’il n’aurait aucune honte à considérer Matt comme le quatrième joueur, comme le seul véritable dommage collatéral de toute cette histoire. "Quoi que tu fasses, tu ne pourras pas rivaliser avec la parfaite petite chrétienne dont l'Australie toute entière a envié le mariage sur leurs écrans de télévision. Tu sais qu'ils veulent faire une suite, d'ailleurs ? Tu sais que je serai enceinte, quand les caméras reviendront ?" Son regard quitte enfin ses yeux pour se porter sur son ventre, s’interrogeant un bref instant sur le crédit à accorder à de tels propos. Mais ce ne serait que logique ; du pain et des jeux, donnez ce qu’ils veulent aux spectateurs et ils en demanderont toujours plus. C’est la continuité des choses, le bébé suit le mariage et le simple fait qu’elle épouse enfin cette vie parfaite(ment normale) suffit à lui enlever tout intérêt quant à sa demande précédemment formulée. Jamais elle ne pourra faire partie du jeu en ayant des attaches, c’est un critère qui justifie une disqualification. « Comment l’Australie toute entière se sentira quand ils découvriront que la douce Lily n’a fait que mentir depuis le premier jour ? » Il l’interroge, en pinçant les lèvres d’un air moqueur. « Tu pourrais cocher toutes les cases du cliché de la gamine à l’enfance misérable qu’ils ne prendront en compte qu’une seule chose : tu as joué un personnage durant tout ce temps. » Lily McGrath n’est qu’un nom de scène, qu’il serait aisé de détruire avec un peu de volonté. « Après tout, t’as joué la comédie pour cette émission. Alors... pourquoi tu ne l’aurais pas fait auprès de ton mari et du reste ? » Pourquoi elle n’aurait pas joué son meilleur rôle en dehors des caméras, comme elle le fait depuis des années ? Car la volonté de la jeune femme de faire partie du jeu ne s’explique pas par un sentiment d’abandon ou une envie de garder un œil sur les deux principaux protagonistes ; elle est faite du même sang, qu’elle le veuille ou non. Elle a le même esprit dérangé en perpétuel recherche de contrôle pour oublier son sentiment d’impuissance persistant, la même volonté de faire subir à d’autres ce qu’elle a traversé, le même goût pour l’adrénaline et les mauvaises décisions. « Et ils fouilleront. Ils déterreront tout ce qu’ils pourront utiliser contre toi et ton statut de femme battue sera vite oublié au profit des questions. Pourquoi personne n’a réagi pour Joseph ? Pourquoi tu n’as pas réagi ? Pourquoi tu acceptes toujours tes parents malgré ce qu’ils ont fait ? Comment ton copain est mort ? Comment ça se fait qu’il soit mort pile au moment où tu étais enceinte ? » Ils s’acharneront pour faire leurs gros titres en se délectant de l’histoire tragique de Lily Keegan, mais le fait qu’elle soit une victime n’est pas intéressant. Il faut complexifier la chose, il faut donner de la profondeur à l’histoire, il faut provoquer des interrogations, il faut que jamais personne ne soit innocent ou parfaitement coupable, tout bon auteur de thrillers le sait parfaitement. « La parfaite petite chrétienne est chiante à mourir, elle ne tiendra pas éternellement. Tout le monde veut voir ce qui se cache sous la surface, peu importe ce qu’il faut inventer pour ça. » Ils déterreront l’histoire familiale, ils déterreront celle qu’elle est ; et il sait mieux que personne qu’elle n’est pas juste une parfaite petite chrétienne. "Arrête de te battre contre moi, c'est tout ce que je demande." Ses yeux se lèvent au ciel ; signe qu’il n’a aucune envie, une nouvelle fois, d’accéder à sa demande. « J’arrêterai le jour où tu arrêteras. » Pas de se battre contre lui, mais de se battre contre elle-même. De s’enfermer dans cette parfaite vie qui ne lui ressemble pas, qui n’a aucun sens. Qu’elle cessera de regarder les autres à travers son arrogance et son mépris, pour admettre, finalement, qu’elle n’est pas meilleure qu’eux. Bien au contraire. Et que c’est très exactement ce qui la rend fascinante.  
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyMar 6 Avr 2021 - 2:59

Lily statue et assure qu’elle n’a rien à perdre, mensonge éhonté qu’Alfie ne met pas longtemps à mettre à mal, comme elle aurait pourtant dû s’y attendre. « Outch, c’est ton mari qui doit avoir les oreilles qui sifflent. » - “Je ne le perdrai pas.” Il ne peut pas leur faire plus de mal qu’elle ne s’en est déjà elle-même chargée, n’est-ce pas ? “Il sait tout.” La brune se permet de rapidement préciser pour éviter qu’il ne commence à lui sortir la liste infinie de tous les moyens qu’il pourrait utiliser contre son mari. Au fond, elle sait que si une guerre était ouvertement déclarée entre eux, elle sortirait elle-même l’anglais de sa vie pour ne pas qu’il en ait à souffrir parce qu’elle sait qu’il serait incapable de comprendre une telle situation. Si elle n’était pas une des protagonistes principales, elle ne le comprendrait pas non plus. Cette histoire ne fait du sens que parce qu’elle l’a écrite au jour le jour depuis trente ans. « Il ne faut pas me dire ça, Lily. » Elle vient de lui lancer un défi. Si elle s’en mord déjà les doigts, elle ne peut faire autre chose que de continuer à garder son regard ancré dans le sien, se concentrant pour qu’il tremble le moins possible. Peu importe à quel point elle arrive à jouer avec les apparences, Alfie sait déjà qu’il a gagné. Elle peut parfois reprendre du terrain mais ce ne sera que temporaire. Ça l’est toujours. Habitué des défaites et acculée, elle n’a d’autres choix que d’utiliser des armes qu’elle avait jusque là préféré laisser en dehors de leur histoire. “Et à Jules, tu lui dis quoi? Ses oreilles sifflent plus ou moins que celles de mon mari, tu penses?” Se basant sur ses propres sentiments, elle ne peut pas croire que la jolie brune lui est indifférente alors qu’elle partage sa vie depuis aussi longtemps.

Puisque les sujets se regroupent à son sens tous, elle n’a aucun mal à évoquer sa grossesse à venir juste après avoir parlé de sa petite-amie, jaugeant la réaction de l'australien en le regardant droit dans les yeux. Il cherche des indices qu'il ne trouvera pas alors que seule la parole de Lily fait foi, à nouveau et comme toujours. Son ventre n'a pas changé: elle n'est pas enceinte et encore bien loin de l'être. Elle aurait abordé le sujet avec une délicatesse bien plus infinie s'il avait été question de n'importe qui d'autre mais Alfie Maslow est une fois de plus l'exception à la règle et le seul avec qui elle cesse parfois de jouer ce rôle qui lui colle à la peau. Bien souvent, elle ne le fait plus que par habitude. Dans cette chambre d'hôpital, tout est bien différent. « Comment l’Australie toute entière se sentira quand ils découvriront que la douce Lily n’a fait que mentir depuis le premier jour ? » Ils ne voient pas les faiblesses de l'autre au même endroit qu'autrui se les imagine, même après toutes ces années. Alfie a un air moqueur et Lily, elle, n'a même pas l'air de faiblir un seul instant. "Quels mensonges?" Elle s'entraîne comme elle le ferait devant des caméras ou face à des journalistes, affichant un air faussement choqué et déçu à la fois. A son sens, pourtant, il n'existe réellement aucun mensonge - aucun qu'on pourrait découvrir, en tout cas. La seule personne qui soit au courant, c'est Alfie. Comme elle l'a déjà statué, sa parole n'aura pas plus de poids que la sienne. Des deux, elle sera la seule à pouvoir papillonner des cils, utiliser ses grands yeux bleus et même pleurer sur commande. Il a lui aussi un très bon jeu d'acteur mais aussi un besoin bien trop présent de toujours tout gâcher. Quand bien même son plan serait exécuté à merveille, il finirait par s'ennuyer et n'aurait plus de défi à réaliser. « Tu pourrais cocher toutes les cases du cliché de la gamine à l’enfance misérable qu’ils ne prendront en compte qu’une seule chose : tu as joué un personnage durant tout ce temps. » Lily McGrath est autant un personnage que l'était Lily Keegan. La réalité se confond avec la fiction et alors qu'elle même peine à différencier le vrai du faux, elle reste certaine que des inconnus ne la connaissant ni d'Eve ni d'Adam n'en seront pas capables. « Après tout, t’as joué la comédie pour cette émission. Alors... pourquoi tu ne l’aurais pas fait auprès de ton mari et du reste ? » Il se répète et commence à jouer sur les nerfs de la jeune femme qui, bien trop plongée dans son rôle, refuse catégoriquement d'entendre parler d'un mensonge ou d'un autre. Après tout, elle a donné son véritable nom et la date de naissance allant avec, omettant simplement de préciser l'existence de son frère sur le formulaire. Libre à elle d'inventer l'incroyable histoire de la fratrie perdue, du Joseph qui s'est enfui de la maison et avec qui elle n'a eu aucun contact pendant vingt ans. Ce sera un mensonge de plus, certes, mais il n'imagine pas à quel point ce dernier pourrait lui faire gagner des points du public. Encore. Le reste, ils l'auront vécu en même temps qu'elle, du premier regard échangé avec son futur mari jusqu'à leur voyage au bout du monde et le début de leur vie ensemble. Sur ça, elle n'a pas menti. A propos de son bonheur non plus, elle n'a jamais rien inventé. "Ce n'est pas le cas." Et pour lui?

« Et ils fouilleront. Ils déterreront tout ce qu’ils pourront utiliser contre toi et ton statut de femme battue sera vite oublié au profit des questions. Pourquoi personne n’a réagi pour Joseph ? Pourquoi tu n’as pas réagi ? Pourquoi tu acceptes toujours tes parents malgré ce qu’ils ont fait ? Comment ton copain est mort ? Comment ça se fait qu’il soit mort pile au moment où tu étais enceinte ? » - "Qu'est ce que tu sais là dessus?" Le masque de Lily ne peut pas être maintenu dans toutes les situations, surtout celles qu'elle a été incapable de prévoir: la mort soudaine de son petit-ami en est une. Si Alfie a su pour les complications qu'on prises leur relation, elle n'a jamais cru bon de lui faire part de sa mort dans la fleur de l'âge. Des personnes meurent tous les jours dans des accidents, elle ne voulait pas lui donner plus d'importance qu'il en avait réellement. Le fait qu'ils parlent à nouveau de lui en cet instant précis prouve pourtant bien que l'anthropologue en sait plus qu'il ne le laisse paraître, ce qui n'a rien pour rassurer Lily. C'est non seulement une menace pour elle-même mais aussi contre son frère avec lequel elle semble à peine s'être réconciliée, pour le temps que ça durera. Elle a cessé de préserver son expression immuable alors que ses yeux sont désormais bien plus globuleux qu'ils ne l'avaient encore été. Les autres sujets sont relégués au second plan comme le cadet de ses soucis alors que son esprit ne se focalise plus que sur sa question, pour laquelle elle imagine autant Alfie se vanter en racontant l'histoire que préférer se jouer un peu plus d'elle en restant religieusement muet.

Lorsqu'elle conclue en lui demandant simplement d'arrêter de se battre contre elle, la réponse que donne Alfie prouve que leur relation est toujours la même que celle de deux gamins. Ils en ont toujours les mêmes réactions. « J’arrêterai le jour où tu arrêteras. » Fatiguée, elle laisse échapper un rire qui n'en a que le nom. Retrouvant sa place dans le fond du fauteuil et laissant sa main se poser contre ses tempes douloureuses, elle ferme les yeux un instant. Elle rêve encore d'une vie dans laquelle elle pourrait organiser des repas quelques week-ends par an durant lesquels elle pourrait inviter Alfie et Joseph pour qu'ils se racontent tous ensemble les anecdotes du bon vieux temps et rigolent de leurs querelles désormais passées, un Matt non loin en profitant pour noter tout ce qu'il pourrait et qui serait ensuite utilisé contre sa femme pour rire d'elle. Elle voulait leur attention, pas leur dédain. Elle souhaitait encore moins prendre part à une guerre sans fin dans laquelle tout se résumerait à un "je le fais si tu le fais". "Toutes les fois où je t'ai parlé sincèrement, tu as fini par le retourner contre moi." Cela ne l'a jamais empêché de recommencer de nouveau, jusqu'à aujourd'hui en tout cas. Il suffit pourtant d'une simple assurance qu'il ne recommencera pas et elle serait prête à de nouveau tenter d'arranger les choses entre eux. Ce ne sont après tout pas les confessions qui manquent et elle pourrait lui prouver qu'il avait effectivement raison: sa vie est loin d'être aussi rose et parfaite qu'elle continue de le laisser croire. "Quand je te montre la moindre brèche, tu te faufiles à l'intérieur. Comment est-ce que tu veux que tente l'expérience avec le reste du monde?" Il demande de la sincérité et c'est enfin ce qu'elle lui propose, ses yeux à nouveau dans les siens.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyLun 26 Avr 2021 - 0:32

“Je ne le perdrai pas. Il sait tout.” Il n’aime pas laisser le dernier mot, Alfie, encore moins à Lily, mais à cette assurance il se contente de hausser un sourcil pour illustrer ses doutes qui subsistent. Il sait tout ? Qu’il a envie de lui demander, s'abstenant en réalisant que cette conversation ne connaîtrait alors pas de fin et même si ça n’a jamais été un problème pour le brun, le fait est qu’il désire regagner cette liberté dont elle l’a privé par la force des choses quelques heures auparavant. Car chaque minute supplémentaire en compagnie de Lily ne font qu’accentuer ses vieux travers, les mauvais, évidemment, par cette arrogance dont il fait preuve en enfonçant son doigt dans ses plaies et en les triturant jusqu’à ce qu’elles se remettent à saigner. Les bons, aussi, bien qu’il ne l’admettra jamais, même sous la torture et la manière dont elle arrive à le faire parler mieux que quiconque, mieux que son propre frère, mieux que sa petite amie qu’il a longtemps présenté comme la personne la plus essentielle à ses yeux. N’importe qui ne verrait pas les signes derrière ce masque d’arrogance, de provocation, de malaise qu’il se plaît à créer, mais les plus initiés pourraient reconnaître l’œuvre du temps, d’un lien acquis malgré son évidente fragilité et finalement, l’un ne va jamais sans l’autre. C’est parce qu’elle sait le faire parler qu’il se met toujours au défi de la rendre dingue, c’est parce qu’il se plait à la rendre dingue qu’il s’ose à s’ouvrir auprès d’elle ; le cercle n’est pas seulement vicieux, il est indestructible. “Et à Jules, tu lui dis quoi? Ses oreilles sifflent plus ou moins que celles de mon mari, tu penses?” Dans d’autres circonstances, il aurait pu être déstabilisé. Il aurait pu être déstabilisé que la femme qui s’inscrit comme celle de sa vie (même s’il ne croit pas à ce concept) puisse être amenée dans la conversation de pareille manière (même en étant celui qui a pourtant commencé). Il aurait pu être déstabilisé par toutes les vérités que Lily a en sa possession et dont elle pourrait user pour prendre l’avantage – il a toujours été surpris que ce ne soit pas le cas, à vrai dire. Elle est la seule qui possède autant d’éléments en mains, pour une raison bien précise : si quelqu’un doit le détruire, il faut que ce soit elle. Mais elle n’en a jamais eu l’occasion, tout comme elle ne l’aura pas plus dans le futur : il se sabote toujours lui-même avant que d’autres puissent s’y essayer. Jules a probablement les oreilles qui sifflent depuis le début de leur relation avec tous les mensonges dont il fait preuve pour la protéger. Une protection toute relative, peut-être, mais qui est sincère : jamais elle n’aurait pu le regarder dans les yeux, encore moins l’aimer, si elle savait la véritable nature de celui qui partage sa vie, si elle le connaissait aussi bien que Lily. C’est ironique, quand on y pense, la manière dont il prétend être lui-même alors qu’il est terrifié de se montrer au grand jour face aux seules personnes capables de l’aimer. « Beaucoup plus, voyons, on connait tous les deux la réponse à cette question. » Et comme toujours quand on s’approche de ce qu’il pourrait ressentir, là, bien caché derrière cette carapace qu’il offre au monde et cette tête à claque qu’il perfectionne depuis des décennies, la provocation est la meilleure des armes. Jules ne sera bientôt plus un problème, de toute évidence, même si Lily sera sûrement la dernière au courant.

Comme l’Australie sera la dernière à prendre connaissance de la vie qu’est réellement celle de Lily Keegan – pardon, McGrath, puisqu’elle a travaillé son besoin d’une autre identité au point d’en épouser le premier venu. Ce sens du sacrifice est presque émouvant. "Quels mensonges?" À nouveau, sa seule réaction consiste à hausser un sourcil, s’agaçant presque face à cette fausse naïveté que, pourtant, il ne connaît que trop bien. « J’ai le droit de les crier maintenant qu’on est seuls, c’est ça ? » Il l’interroge, un sourire satisfait sur le visage. Les mêmes vérités dont il a fait l’usage avant qu’elle ne le gratifie du bonheur d’être sédaté. Il pourrait les répéter, oui, les crier des milliers de fois, elle sait autant que lui qu’il en serait capable. Et pourtant, il ne l’est pas. Il ne l’est pas, alors que ce sont des sujets qu’il aurait préféré garder pour lui-même. Sa loyauté a toujours été discutable, pourtant celle qu’il a offerte à Joseph et Lily n’a jamais été rien d’autre que de sincère. Il n’avait jamais verbalisé ce passif avec son petit ami, il ne l’avait jamais utilisé comme un argument avant qu’il ne s’en sente obligé et il n’a aucune envie, cette fois-ci, de continuer à triturer la plaie. Serait-il enfin parvenu à atteindre ses limites, après trente-cinq à les chercher ? Et si tel est le cas, pourquoi faut-il qu’elles impliquent Lily ? "Ce n'est pas le cas." « C’est vrai, il sait tout. » Il rétorque, toujours sceptique quant à cette affirmation. Mais il concède à lui accorder le bénéfice du doute, car jamais elle n’aurait autant impliqué son mari s’il était la pureté personnifiée dans toute cette histoire.

"Qu'est ce que tu sais là dessus?" « Que les sédatifs altèrent ma mémoire. » Il hausse les épaules, le sourire aux lèvres, trop satisfait de lui causer des failles pour être coopératif. En réalité, il ne sait pas grand-chose ; juste des suppositions quant à cet heureux concours de circonstances et les connaissances médicales d’une Lily vivant dans la peur de son petit ami de l’époque. Il ne la juge pas, si elle s’est rendue coupable de se libérer, bien au contraire. C’est presque un regard de fierté qu’il pose sur elle, sans pour autant n’avoir aucune certitude sur ce qu’il avance. Les sédatifs altèrent sa mémoire, sa manière d’être, peu importe. Et s’il veut la provoquer, s’il veut l’inquiéter plus que de raison, jamais ces propos n’existeront en dehors des murs de cette chambre d’hôpital. Il prétendra que c’est par nécessité de conserver un avantage de poids sur lui, il ne peut que reconnaître que c’est elle qui a l’avantage, cette fois, alors que cette vérité-là, il est bien incapable de la crier sur tous les toits.

Alors non, s’il ne la considère pas comme une ennemie, il n’arrêtera pas pour autant de se battre contre elle ; les habitudes sont trop ancrées pour être changées, quoi qu’elle puisse en dire alors qu’il pourrait presque avoir de la peine pour elle. "Toutes les fois où je t'ai parlé sincèrement, tu as fini par le retourner contre moi." « Et t’es toujours revenue. » Encore et encore, indéniablement. Peu importe la manière dont il la repoussait, peu importe la violence du rejet, elle en a toujours redemandé, elle en redemande encore. Il se cache derrière toutes les excuses pour réitérer ses actes, sans admettre la plus profonde des raisons derrière cette attitude : peut-être qu’un jour, elle le verra enfin pour ce qu’il est et qu’elle cessera de se battre pour avoir une place à ses côtés. Peut-être qu’un jour elle ouvrira les yeux et qu’elle se rendra compte qu’il n’y a rien de bon à sauver, comme tant d’autres avant elle, et que l’un des derniers liens qui, paradoxalement, lui permet de ne pas complètement disjoncter sera enfin réduit à néant pour lui laisser la pleine liberté de s’exprimer comme il le veut, sans plus qu’aucune attache ne puisse tenter de le raisonner, surtout pas Lily. "Quand je te montre la moindre brèche, tu te faufiles à l'intérieur. Comment est-ce que tu veux que tente l'expérience avec le reste du monde?" « Et ton mari ? » Il demande, presque innocent, presque sérieux. Et son mari, alors, c’est le reste du monde ? Non, parce qu’elle a su lui offrir une place, elle a su se faire une place et c’est tout le problème. « Tu me laisses faire. » Il insiste. Elle revient toujours, elle le laisse faire : les responsabilités sont partagées. « Pourquoi ? » Qu’elle n’imagine pas faire usage d’une quelconque notion de faiblesse, là-aussi ils savent tous les deux que du trio qu’ils composent depuis leur enfance, Lily a toujours été la plus forte.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyMar 27 Avr 2021 - 13:06

Il y a longtemps, Lily se surprenait parfois à envier la place que Juliana a gagné aux côtés d’Alfie. Aujourd’hui, elle ne peut que s’estimer chanceuse de ne jamais avoir connu une telle position - ou pas plus d’une nuit, et pas ailleurs que dans sa propre imagination. « Beaucoup plus, voyons, on connait tous les deux la réponse à cette question. » Elle en est d’autant plus soulagée lorsqu’il parle d’elle ainsi, après tout ce temps passé à ses côtés et la considérer comme sa petite-amie. Lily a toujours pris grand soin de ne jamais s’immiscer dans son couple et ce n’est pas en cet instant que cela risque de changer, surtout pas alors qu’il leur concède une défaite aussi franche et rapide là où la brune cherchait malgré elle à lancer une énième compétition du meilleur couple. Ce n’est pas comparable que diraient les mauvaises langues, ceux-là très précisément que l’infirmière n’écoutera jamais. Prise de court par cette victoire inespérée et inattendue, elle ne trouve plus rien de quoi répondre. Cela a sans doute beaucoup à voir avec le fait qu’elle ne soit pas sur le bon champ de bataille, elle s’en rend d’autant plus compte lorsqu’Alfie recentre le sujet sur son passé. Son petit-ami aurait été ravi de toute l’attention que le monde lui porte tout particulièrement depuis quelques mois, et toujours plus que de son vivant. « J’ai le droit de les crier maintenant qu’on est seuls, c’est ça ? » La guerre entre eux ne s’arrêtera jamais, ils continueront de gagner et perdre du terrain sans cesse, à tour de rôle. Il est fier et amusé, Alfie, comme à son habitude. “Il sera toujours temps pour moi de te faire arriver dans l’aile psychiatrique.” S’il soulève trop de sujets difficiles, elle n’aurait aucun remord à faire une telle chose et l’accuser de peu-importe-quoi simplement pour préserver son image. Lily reste implacable, preuve supplémentaire qu’elle est loin de lancer des mots en l’air. Il le savait déjà, de toute façon.

Alfie continue de douter des paroles de la plus jeune lorsqu’elle annonce avoir tout raconté à son mari mais elle ne relance rien et préfère agir comme si de rien n’était. Si elle l’a volontairement tenu éloigné de sa vie de couple pendant tous ces mois, ce n’est pas sans raison. Elle avait hâte de présenter son mari à tous ses proches mais l’heure d’Alfie n’est pas venue. Une part d’elle sait qu’elle ne viendra jamais: il représente bien trop de choses qu’elle s’obstine à minimiser auprès de son mari. Leur rencontre ne créerait jamais rien de bon et son ami d’enfance (vraiment?) ne voudrait sans doute pas rencontrer un mari qu’il juge sorti de nulle part. C’est en tout cas ce qu’elle se dit puisqu’elle ne lui posera jamais la question. Qu’est ce que tu sais là dessus? « Que les sédatifs altèrent ma mémoire. » Circulez il n’y a rien à voir et Lily, elle, n’a pas la force de reposer la question ou de se faire plus précise. Il sait des choses et c’est déjà trop, elle n’a pas besoin de savoir à quel point il se fait le gardien de ses secrets.

"Toutes les fois où je t'ai parlé sincèrement, tu as fini par le retourner contre moi." « Et t’es toujours revenue. »

Elle continuera de le faire. Sans savoir pourquoi, elle sait que ce sera le cas. Parce qu’il est Alfie, parce qu’elle est Lily, parce que Joseph gravite non loin et leur histoire commune restera toujours la même. Puisqu’elle apprécie toujours aussi peu être prise à son propre jeu, la jeune femme fronce à peine les sourcils et serre la mâchoire. Elle a parfois eu besoin de quelques mois ou années pour revenir auprès de lui mais elle en vient toujours à le faire, peu importe ce qu’il aura fait ou dit. Il est sa plus grande faiblesse mais se transforme en sa plus grande force quand ils arrivent à s’entendre pour une courte durée. Jamais elle n’a autant pardonné à une seule personne, et ça aussi il le sait. Intransigeante avec le reste du monde, elle continue de se plier en quatre simplement pour pouvoir compter Alfie dans son entourage. « Et ton mari ? » - “Chaque règle a son exception.” Son mari est arrivé de nulle part et il s’est fait une place sans qu’elle ne le voit venir. Ce n’est pas une histoire qu’elle veut raconter, surtout pas à Alfie. Il voudra s’amuser et tester la solidité de leur couple et leur mariage avec, ce n’est pas une chose dont ils ont besoin. Surtout pas. Encore moins en ce moment. « Tu me laisses faire. » Non c’est faux que tente de répondre la petite voix dans sa tête, l’éternelle guerrière prête à se lancer dans la première bataille venue. « Pourquoi ? » Il pose une question à laquelle elle n’a jamais réfléchi. Alfie est une évidence dans sa vie, sa présence n’a jamais été questionnée, elle est encore moins questionnable. Quiconque en viendrait à le faire serait renvoyé manu militari comme Lily seule en a l’art et la manière. “T’es le seul qui puisse y arriver.” Il est le seul à avoir l’audace en même temps que tous les instruments à sa disposition. Les autres ne jouent pas dans la même cour, sûrement parce que justement ils ne jouent pas, tout court. “Qu’est ce que tu veux que je te dise? C’est comme ça, c’est tout.” Qu’elle s’énerve rapidement, préférant agir ainsi pour ne pas qu’il trouve l’occasion de lui poser de nouvelles questions du genre. Le changement de sujet est une fois de plus rapide et brutal mais ils ne sont sûrement plus à ça près. “T’as raté la tarte de maman.” Il aura les plateaux repas de l’hôpital alors que Lily, elle, continuera de refuser de s’éloigner de son chevet. Officiellement, elle veillera à ce qu’il ne pousse pas le personnel hospitalier à bout. Officieusement, elle s’assurera qu’il ne fasse rien de stupide qui pourrait mettre à mal sa santé ou sa sécurité. “Tu devrais essayer de dormir maintenant. On te laissera sortir demain matin.” La discussion s’arrête là et elle ne bouge pas, voilà ce que cela signifie.
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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyLun 3 Mai 2021 - 18:44

Évidemment qu’ils connaissent tous les deux la réponse à cette question et c’est la seule victoire qu’il accepte de concéder avec autant de facilité, influencée par la nécessité de ne pas pousser Lily sur un terrain où il ne pourrait jamais rivaliser malgré toute l’assurance qu’il peut prétendre. Car elle possède des informations qu’il cache depuis des années à Jules, ce versant de lui qu’il n’assume pas autant qu’il envie son retour chaque jour un peu plus et s’il n’est pas en mesure de se situer dans un extrême concernant cette facette, il sait que sa petite amie ne manquera pas d’avoir une opinion très tranchée sur celui que Lily a pu connaître, sur celui dont elle connaît les secrets et qu’elle pourrait utiliser à son encontre. À juste titre, il ne prétendra pas s’en offusquer puisque cela serait justifié, d’autant plus après ce qu’il s’est permis de laisser échapper plus tôt dans la journée. Mais ce n’est pas pour autant qu’il veut délibérément mettre ces cartes entre les mains de Lily et si pour n’importe quel autre sujet il n’hésiterait pas à jouer la surenchère, lorsqu’il est question de Jules son attitude diffère de celle qu’il offre au reste du monde. Différait, en réalité, puisque depuis quelques mois les rancœurs à l’égard de celle qui partage sa vie depuis quatre ans deviennent de plus en plus nombreuses et leur incapacité de communiquer de plus en plus grandissante ; ils vont dans un mur et Alfie ne fait rien pour éviter la collision. Est-ce qu’il désire pour autant que Lily soit à l’origine de celle-ci ? Hors de question de lui donner plus de pouvoir qu’elle n’en possède déjà, hors de question qu’autrui se rende coupable de blesser Juliana à sa place. Pas qu’il le désire, pas qu’il envisage de le faire, mais il connaît suffisamment sa petite amie pour savoir qu’elle ne lui pardonnerait pas son manque d’honnêteté si celui-ci venait à être mis en avant par quelqu’un d’autre. Elle ne le lui pardonnerait pas plus s’il en était à l’origine, mais il aurait au moins la possibilité de conserver un certain contrôle sur la situation et, surtout, de ne pas donner celui-ci à une Lily qui sera bien trop fière de l’importance qui lui est accordée dans la volonté d’Alfie d’envoyer toute forme de stabilité et de bonheur droit dans le mur parce qu’il n’arrive pas faire autrement. “Il sera toujours temps pour moi de te faire arriver dans l’aile psychiatrique.” Un large sourire naît sur ses lèvres à cette annonce, alors qu’il papillonne des yeux et qu’il pourrait presque avoir des étoiles dans ceux-ci. « Tu ferais ça ? » Le ton provocateur fait place à un ton presque enfantin, rêveur, volontairement aigu alors qu’il ne surjoue qu’à moitié, Alfie, la perspective de l’aile psychiatrique ne lui faisant pas plus peur qu’elle ne le devrait quand il songe aux vieux clichés qui ont la vie dure sur l’anesthésie générale dont il bénéficierait là-bas et le tout, sous surveillance en plus d’être valorisé par la société. Alors oui, ce serait presque le rêve, l’un de ceux à la hauteur de ses ambitions actuelles.

Elle ne joue pas la comédie auprès de son mari et il ne sait pas quel crédit il doit accorder à cette information, parce qu’il ne sait jamais vraiment quoi penser des paroles de Lily, alors même qu’il est le premier à la considérer comme terriblement prévisible. Elle l’est, dans un sens, dans ses réactions, dans la manière dont il est facile de toujours s’assurer de la piquer, du mot à utiliser pour cela ; elle est terriblement prévisible avec lui, sans pour autant l’être avec le reste du monde. Elle navigue trop souvent entre vérité et dissimulation (puisqu’on ne peut pas parler de mensonges, voyons, Lily Keegan n’en est pas capable) pour qu’il puisse réellement se faire une idée de son attitude avec les autres alors qu’il est parfaitement capable de lire celle à son égard. S’il n’aurait jamais été capable d’imaginer qu’elle accepterait de se marier à un illustre inconnu, bafouant au passage tous les préceptes du mariage, il n’a par contre aucune peine à imaginer qu’elle tienne à accentuer la perfection de celui-ci, même s’il repose sur des bases défectueuses. Elle l’a fait quelques instants plus tôt, prête à dégainer le discours qu’elle aurait pu tenir adolescente et il n’aurait pas été étonné qu’elle lui tende un carnet sous le nez dans lequel aurait été inscrit une multitude de petits cœurs et de longs récits sur chaque moment passé avec le fameux Matt. Lily a grandi et n’est plus un adolescente, alors à défaut de retracer ce récit de vie sur papier, nul doute qu’il est bien ancré dans sa tête, prêt à être balancé au premier venu qui douterait de la sincérité de ses sentiments ou de l’épanouissement de leur couple, la longue liste des éléments permettant de parfaire les faux-semblants probablement déjà réfléchie depuis le moment où elle a prononcé ce fameux oui. Mais il n’est pas dupe, Alfie et il connaît suffisamment la jeune femme pour savoir que s’il n’y a rien à espérer sauver d’autrui, ce n’est pas une relation dans laquelle elle peut se jeter à corps perdu. Il a été concerné par le passé, il a été mis dans la confidence de ce que Callum lui faisait subir, il est bien assez conscient que Lily peut tenter de s’y opposer autant qu’elle le souhaite, sur ce plan-là ils ne sont pas bien différents et si les choses sont susceptibles de bien se passer, c’est très exactement ce qui leur pose problème. En quoi Matt dérogerait à la règle, après toutes ces années ? S’il est aussi parfait qu’elle semble le dire, quel intérêt pour elle qui n’espère que mettre en place des stratégies pour acquérir un idéal de perfection et non pas réellement l’atteindre ? La seule façon dont elle réagit lorsqu’il évoque Callum lui démontre qu’elle est toujours ancrée dans ses vieux schémas, Lily et que Matt n’est que le semblant de normalité qu’elle s’autorise sous une pression qu’elle est pourtant la seule à se mettre et ne fait qu’accentuer sa volonté de révéler celle qu’elle est réellement, donnant lieu à son sourire satisfait pour seule réponse lorsqu’elle ne s’épanche pas plus sur le sujet après une réponse qui ne vise qu’à la torturer un peu plus.  

Et elle a raison, Lily. Il a retourné les choses contre elle alors qu’elle lui avait parlé sincèrement quelques années plus tôt et que, cette fois, elle aurait pu croire qu’il garderait parole et qu’il n’utiliserait pas la sienne contre elle. Mais elle devrait aussi le savoir, depuis le temps, qu’il n’a jamais su se montrer fiable et aujourd’hui plus que jamais, il est bien incapable de l’être. Influencé par une façon d’être qui n’est plus vraiment la sienne, par un retour en arrière aussi agréable que détestable, réactivant tous les schémas qu’il avait cru réduire au silence voilà une dizaine d’années. Et comme souvent, Lily est la première à faire les frais de sa frustration. Ça a toujours été ainsi et si certains mettraient en avant que c’est une raison suffisante pour justifier un changement, de son côté c’est surtout l’élément essentiel pour ne pas l’envisager. Et s’il a envie d’accentuer son emprise sur elle par le simple fait qu’elle s’autorise une telle confession qui n’a jamais eu lieu d’être entre eux par le passé alors qu’ils avaient tous les deux conscience de celle-ci, le simple fait qu’elle le verbalise avec sincérité s’avère déconcertant pour un Alfie qui, pour la première fois, semble conscient qu’il risque de la perdre. Ils n’en avaient jamais vraiment parlé par le passé, jamais aussi directement, jamais avec un tel constat sans appel ; tout était toujours évoqué à demi-mot, comme si le fait de ne pas l’expliciter permettait de ne pas l’accepter. Mais elle vient de le faire, elle vient d’accepter sa position dans leur relation et Alfie prend conscience que c’est très exactement ce nouveau statut qui pourrait l’amener à refuser celui qu’il lui a toujours donné. Alors ce ne sont pas de mots qui blessent qui sortent de sa bouche, c’est une sincérité, une peine presque, alors qu’il prend conscience que, peut-être, il a enfin atteint les limites de la jeune femme. Ces mêmes limites dont il a toujours rêvé de s’approcher desquelles, à l’instant, il voudrait pourtant s’éloigner. Chaque règle a son exception et si Matt est celle d’une vie fracassée, Alfie se veut être celle de sa vie parfaite. Les deux versants de Lily qui ne pourront pas coexister continuellement et si en début de journée il était encore ancré dans la confiance de ne jamais être celui qu’elle pourrait abandonner sur le chemin, elle vient de redistribuer les cartes, encore. Il devrait la détester pour ça, d’ailleurs, pour être aussi prévisible que surprenante, mais il n’y a qu’une certaine fierté qui se mêle à sa peur inavouée. Il aurait pu moquer sa franchise et pourtant, elle vient de sortir sa plus belle arme. “T’es le seul qui puisse y arriver.” Et il devrait se satisfaire qu’elle les dise enfin, ces mots qu’il a toujours voulus entendre, la confession qui met un terme à ce concours débuté il y a de trop nombreuses années (décennies), la confirmation qu’il aura toujours l’avantage bien qu’il puisse perdre des batailles. Mais aucun sourire satisfait ne s’affiche sur ses lèvres, aucune provocation ne sort d’entre ses lèvres. “Qu’est ce que tu veux que je te dise? C’est comme ça, c’est tout.” Elle n’a pas d’argument. Il aurait dû lui rire au nez, il aurait dû se moquer d’elle, il aurait dû savourer sa victoire, prendre toujours un peu plus de place, l’écraser avec une entière satisfaction. Mais il ne rit pas Alfie, il ne bouge plus et c’est à peine s’il ose soutenir son regard. Car elle n’a pas d’argument. Elle qui en a toujours, elle qui refuse bien souvent de lui céder le dernier mot, elle qui n’est jamais avare en reproches et en critiques, elle qui le rend folle en ayant toujours un avis sur quoi que ce soit, il n’y a rien d’autre qui s’échappe d’entre ses lèvres. Elle n’a pas d’argument et c’est le début d’une fin qu’il s’était toujours refusé à imaginer. Une fin qui le terrifie plus que toutes les autres ; parce que pour la première fois depuis Amelia, il n’est pas à l’origine de celle-ci.

“T’as raté la tarte de maman.” Il revient à lui alors qu’il ravale sa salive et pose un regard calme sur une Lily qu’il dévisage. Cette fois-ci il n’est plus question de déceler la moindre expression qui lui donnerait un indice quant à l’émotion qu’elle ressent et dont il pourrait jouer ou se moquer, il n’est question que de faire passer son regard sur des traits qui s’éloignent déjà. « C’est dommage. » Il répond sans ironie, avec une neutralité, une banalité affligeante qui ne leur ressemble pas. “Tu devrais essayer de dormir maintenant. On te laissera sortir demain matin.” Acquiesçant silencieusement, il s’avoue vaincu. Il pourrait s’agir d’une stratégie visant à souffler le chaud et le froid pour que jamais elle ne puisse reposer sur ses acquis comme il l’a toujours fait, pourtant c’est bien lui qui voit tous ses acquis s’effondrer en quelques phrases qu’il a toujours attendues et qui, désormais exprimées, ébranlent toutes les certitudes qu’elles maintenaient par le passé. Il aurait voulu s’agacer, il aurait voulu que sa colère soit à nouveau plus forte que lui, il aurait voulu que sa lassitude à l’égard de la jeune femme remette les choses là où elles étaient lorsqu’il est arrivé plus tôt dans la journée, il aurait voulu quitter cette chambre avec le même sourire satisfait sur le visage et la même lueur dans les yeux. Si ses yeux brillent pourtant, ce n’est pas à cause de celle-ci et si un fin sourire étire ses lèvres, ce n’est plus par satisfaction, mais par supplication lorsqu’il demande : « tu restes avec moi ? »

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Message(#)raise your glasses all my kings and queens (alfly #4) EmptyMar 4 Mai 2021 - 13:17

Alfie est son reflet dans un miroir brisé. Elle se voit à travers ses yeux et son regard changeant, quand bien même elle préférerait bien souvent que ce ne soit pas le cas. Il représente son passé, son présent et son futur et peu importe à quel point elle pourra parfois le rejeter, cela ne changera pas. Preuve en est qu’aujourd’hui elle s’est battue pour le garder à ses côtés et s’assurer de sa santé (officiellement), quitte à mettre à mal sa couverture de femme parfaite et médecin qui l’est tout autant. Pour lui, elle serait prête à recommencer. Rares sont les personnes pour qui elle en ferait autant; et aucune d’entre elles ne s’est jouée de Lily, surtout pas autant de fois qu’il l’a fait, lui. Sa mère est alors ce qui ressemble le plus à une issue de secours, raison pour laquelle Lily n’a aucun scrupule à l’utiliser dans la conversation. Plus tard, cela lui servira à annoncer au brun qu’elle va mal et que ses mois sont comptés. Il dira qu’il s’en moque, elle sait que ce ne sera pas le cas. Maman Keegan a toujours été gentille avec lui, même quand il venait d’entraîner Joseph Dieu sait où encore pour ne faire que des bêtises et des mauvaises choses. Elle le laissait se laver à la maison avant qu’il ne retourne chez ses parents, pour au moins faire semblant qu’il n’avait pas trop fait n’importe quoi. Elle était gentille avec tout le monde, Marie, de toute façon, et elle détesterait qu’on parle déjà d’elle au passé. « C’est dommage. » C’est dommage, en effet, qu’il ait raté sa tarte. Beaucoup d’autres choses le sont, comme le fait qu’il doive passer la nuit à l’hôpital plutôt que dans le lit qu’elle lui avait proposé, infiniment plus confortable et à l’abri de tout regard indiscret et autres commérages. A défaut de vouloir mettre de l’huile sur le feu, c’est au contraire tout l’inverse qu’elle cherche à atteindre, proposant enfin à Alfie une trêve. Ils pourront recommencer à se battre le lendemain matin s’il y tient tant. Il a besoin d’une nuit de sommeil et elle veillera à ce qu’elle soit reposante pour lui.

Elle ne s’attendait certainement pas à ce qu’il lui concède le dernier mot si facilement mais pour une fois elle ne cherchera pas à se plaindre d’avoir eu la victoire aussi rapidement, après une simple requête. Au contraire, elle en vient même à expirer silencieusement, soulagée. Lily hoche même de la tête, toujours silencieuse. C’est sans doute sa façon à elle de le remercier, puisqu’elle sait par expérience que ce n’est pas une réaction naturelle ou facile pour lui. Si elle avait été dans la même situation, elle aurait eu tout autant de mal à s’avouer vaincue et plus encore à lui faire comprendre qu’elle a besoin de lui à ses côtés. Pourtant, c’est ce qu’Alfie fait, le plus étrangement du monde. « tu restes avec moi ? » Elle laisses les secondes s’écouler pour lui laisser le loisir de mieux lui rire au visage ou lui avouer que tout ceci est une blague et qu’il n’a bien sûr pas besoin d’une gamine comme elle à ses côtés. Rien ne vient. Elle a beau sonder son regard, elle n’y trouve rien de plus. Alfie Maslow serait-il en train de dire la vérité, pour la première fois de sa vie? Peu importe, Lily ne veut pas le questionner et risquer qu’il la fasse chuter de sa Tour de Babel. “Bien sûr.Comme toujours. A nouveau, la trentenaire hoche doucement de la positive, se voulant rassurante au possible. Elle reste avec lui ce soir, comme elle est restée à ses côtés depuis plus de trente ans. Ce n’est pas comme si quelqu’un l’attendait chez elle, de toute façon, et elle aura tôt fait d’appeler sa mère pour lui dire de ne pas l’attendre.

Ses yeux n’ont eu de cesse de couver le Maslow fatigué, autant par sa propre faute que par celle de Lily, et quand bien même elle aurait été la première à s’effondrer de fatigue une fois arrivée chez elle, la jeune femme refuse de se laisser aller aux bras de Morphée avant d’être certaine qu’il soit paisiblement endormi. Elle voudrait reprendre sa main dans la sienne pour être alertée du moindre mouvement, du moindre problème, mais elle se doute qu’il ne serait pas du même avis. A défaut, la McGrath reste sur la chaise à ses côtés durant tout le temps nécessaire. Ils n’avaient jamais su rester aussi proches l’un de l’autre depuis le temps qu’ils se connaissent et ce simple fait laisse un faible sourire sur ses lèvres. Peut-être qu’un jour ils finiront réellement par s’entendre.
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