| (Hassan & Lawrence) Brothers are like glue; they stick together |
| | (#)Dim 10 Jan 2021 - 15:52 | |
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Noël n’a plus la même signification pour moi depuis tellement longtemps, malgré tous les efforts que les Cabbott ont faits au fil des années pour essayer de rendre cette journée à nouveau magique pour moi. En plus, c’est la même histoire chaque année : tout le monde court d’un bord pis de l’autre comme des poules pas de tête pour trouver des cadeaux de dernières minutes et préparer le festin pour les convives. Je n’y vois aucun intérêt. Pourtant, j’ai bien l’impression que les choses pourraient maintenant changer avec l’arrivé de Maddox dans ma vie. Il adore Noël et voir l’excitation dans ses petits yeux m’a rappelé beaucoup de souvenirs que j’ai avec mon père que j’ai le goût de recréer avec lui. Pour la première fois en vingt-quatre ans, j’ai eu l’impression de passer les fêtes en famille cette année. Avec ma famille même si ma relation avec Danika est loin d’être évidente. Malgré toute la frustration que j’ai éprouvée en découvrant la vérité, je me suis surpris à aimer passer du temps à trois et je me sens aujourd’hui idiot d’espérer qu’on puisse former une famille tous les trois. Parce que je sais trop bien qu’il y a peu de chances qu’on réussisse à s’endurer avec nos caractères similaires, malgré mes sentiments pour elle qui refont surface. Avec Maddox dans le décor, je n’ai pas envie qu’on se déchire comme on s’est déchiré il y a quatre ans.
À défaut d’être avec eux ce soir, c’est avec mon autre famille que je vais passer la soirée. Malgré l’absence de lien de sang, Hassan a toujours été pour moi comme un grand frère de substitution. Je me suis tout de suite senti en confiance avec lui et je l’ai laissé m’amadouer. Il est d’ailleurs l’un des rares, avec Stacey et maintenant Danika, à connaître la vérité sur le drame qui a frappé ma famille. C’est probablement l’une des raisons qui fait en sorte que nous sommes si près l’un de l’autre aujourd’hui, je sais que je n’ai pas besoin de me cacher derrière des mensonges lorsque je suis en sa présence. Comme les dernières semaines ont été plutôt intenses de mon côté avec la découverte de ma paternité, nous n’avons pas eu l’occasion de se voir, nous en sommes donc convenus qu’il était temps de remédier à la situation.
Lorsque j’entends la sonnette retentir, cela fait déjà quelques heures que la dinde est dans le four, libérant tous ses arômes à travers mon appartement. « Hey man. » lui dis-je en souriant en ouvrant la porte. Bière dans une main, je lui fais signe d’entrer avant de retourner en direction de la cuisine pour surveiller la cuisson du repas. « J’espère que t’as faim, y’a de la bouffe pour une armée. J’espère que du filet de porc enrobé de bacon ça te va? » Je tente d’étouffer mon sourire moqueur en prenant une gorgée de ma bière. J’aurais été un très mauvais ami si j’avais vraiment prévu du porc pour le repas. Heureusement pour lui, je le connais assez pour savoir ce qu’il ne mange pas (et ne boit pas mais ça c’est un autre combat). « Qu’est-ce que tu veux boire? » Je dépose ma bière sur le comptoir de la cuisine et j’ouvre la porte du réfrigérateur pour voir les options possibles. « J’ai des boissons gazeuses, de la bière… » Sans alcool pour lui, of course, et avec alcool pour moi. « Ou de l’eau pétillante si tu sens ennuyant. » Je n’en bois jamais, n’en achetant que pour mes invités qui ont des caprices de star. Je me tourne vers lui en attendant sa réponse.
Dernière édition par Lawrence Cabbott le Dim 7 Mar 2021 - 15:25, édité 1 fois |
| | | | (#)Ven 12 Fév 2021 - 5:13 | |
| Des trois enfants de Qasim et Olivia, le petit dernier était de loin celui qui faisait le plus dire aux Khadji qu’il avait hérité de la bougeotte des Jaafari. Une sorte de retour de manivelle bien mérité pour le frère aîné d'Hassan, qui subissait de plein fouet l’impression de ne pas avoir ne serait-ce que trente secondes de tranquillité pour aller vider sa vessie, impression qu’il avait lui-même infligée à ses parents durant ses jeunes années avant qu'Hassan n’en rajoute à son tour une couche, faisant parfois regretter à leur mère de ne pas être Shiva et à leur père de ne pas être totalement sourd pour bénéficier d’un brin de silence dans sa propre maison. Leurs parents depuis longtemps disparus désormais, Amjad et Fatima Khadji étaient les seuls encore capables de témoigner de cette époque où Hassan et son frère gambadaient en culottes courtes dans les allées tranquilles de Logan City, toujours couverts de bleus, toujours les genoux écorchés et de la terre plein les vêtements. Et bien qu’il ne soit que l’oncle, le tonton cool chez qui on passait l’été et qui ne disait jamais non à un rab de glace au chocolat ou un cookie de plus, Hassan voyait lui aussi un pied de nez de son karma dans l’énergie débordante qui semblait animer Reda du lever au coucher du soleil, avec son heure de sieste de l’après-midi comme unique répit. Fort heureusement, le tempérament du petit dernier était aussi remuant que celui de l’aînée était posé : depuis qu’elle avait appris à lire Ava pouvait passer des heures dans le hamac du jardin ou sur le fauteuil du salon à dévorer des livres. Quant à Mehdi, il tentait non sans difficultés de se faire à la place d’enfant du milieu qui était désormais la sienne, et malgré la surveillance constante dont avait besoin Reda Hassan tentait au mieux de lui accorder suffisamment d’attention à lui aussi – même si cela voulait dire accepter sans broncher d’en être à la douzième partie de Puissance 4 sans que le garnement ne se soit encore lassé. Néanmoins, et bien qu’il aime ses neveux et nièces de tout son cœur, l’universitaire ne se l’était pas fait dire deux fois lorsque Lawrence lui avait proposé de passer la soirée chez lui, et après s’être assuré de pouvoir faire garder les trois enfants quelques heures il s’était empressé de confirmer sa venue à son ami. Le jour J, Hassan avait néanmoins dû ruser et profiter de la sieste de Reda et du fait que Mehdi et Ava soient captivés par les tribulations des animaux de Zootopia pour trouver le temps de prendre une douche. La fin d’après-midi s’était ensuite déroulée en cuisine, les trois frères et sœur enthousiastes à l’idée de préparer le gâteau au chocolat qu’ils comptaient dévorer en compagnie de Yasmine pour le dessert. À défaut de vouloir s’infliger un nouveau tête-à-tête avec la jeune femme pour la voir le nez vissé à l’écran de son smartphone dès que les enfants n’étaient plus une excuse suffisante pour éviter d’avoir à lui faire la conversation, il préférait l’option de lui laisser les trois terreurs pour elle seule et en cela aussi l’invitation de Lawrence était tombée à pic. Sourire de façade et léger pincement au cœur à l’appui, le brun ne s’était donc pas attardé outre mesure une fois Yasmine arrivée chez lui, et embrassant les enfants une dernière fois il avait souhaité une bonne soirée à la cantonade et attrapé son casque de moto avant de jouer les filles de l’air. Il s’en voulait d’agir comme ça presque autant qu’il en voulait à Yasmine de l'y avoir poussé, mais la brune avait fait ses choix et il se devait d’en faire autant pour tenter de se préserver – un minimum. Remonter de Logan City jusqu’à Redcliffe demandait un peu de temps, même avec la possibilité qu’offrait un deux-roues de pouvoir slalomer entre les voitures pour éviter les ralentissements. Malgré tout, Hassan était arrivé pile à l’heure en bas de l’immeuble de Lawrence et lui avait offert un sourire enjoué lorsque ce dernier lui avait ouvert la porte en faisant de même. « Hey man. » Refermant derrière eux, l’enseignant avait déposé son casque près de l’entrée et s’était débarrassé de sa veste, un éclat de rire narquois lui échappant lorsque son ami avait prétendu « J’espère que t’as faim, y’a de la bouffe pour une armée. J’espère que du filet de porc enrobé de bacon ça te va ? » - « Arrosé d’un peu de vin, et parfumé aux feuilles de laurier, je présume ? » Le laurier n’était qu’une pure question de goût cela dit, il n’avait simplement jamais aimé cela. « Ça sent super bon, en tout cas. » avait-il en tout cas fini par ajouter en suivant le sillage de son hôte jusqu’à la cuisine. Abandonnant un instant sa bière sur le comptoir, Lawrence avait ouvert le frigo et demandé tout en inspectant son contenu « Qu’est-ce que tu veux boire ? J’ai des boissons gazeuses, de la bière … Ou de l’eau pétillante si tu sens ennuyant. » Faisant mine d’être offusqué, le brun avait plissé les yeux et prétendu aussitôt « Je suis à deux doigts de te demander une eau pétillante par pur esprit de contradiction. » Le Perrier avec une pointe de citron était un incontournable, il ne voulait rien savoir d’autre. « Mais j’ai beaucoup trop chaud alors je vais plutôt prendre une bière. » De quoi étancher sa soif et lui rafraichir un peu les idées, au moins le temps qu’il se remette de son périple sous la chaleur de la fin de journée avec un blouson de motard sur le dos. « Tu as besoin d’aide pour la cuisine ? » avait-il ensuite demandé par acquis de conscience, quand bien même il se doutait déjà plus ou moins de la réponse – lui-même avait du mal à déléguer lorsqu’il était derrière les fourneaux. « Quoi de neuf sinon ? Ta sœur va bien ? » Comme tous les étés, Hassan prenait une pause dans son bénévolat à l’hôpital, soucieux de profiter au maximum de la présence de ses neveux avant qu’ils ne repartent à Sydney avec leurs parents, et n’avait donc pas recroisé Stacey depuis le début du mois de décembre. Et s’il était bien sûr curieux de savoir comment s’étaient passées les fêtes de fin d’année de Lawrence, plus particulières pour lui cette année que les précédentes, il préférait ne pas mettre les pieds dans le plat à peine arrivé en évoquant les sujets épineux.
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| | | | (#)Dim 7 Mar 2021 - 17:44 | |
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Hassan a à peine les deux pieds dans mon appartement que je ne peux pas m’empêcher de me moquer de lui affectueusement en lui faisant croire que j’ai préparé pour lui un repas qu’il ne pourra même pas goûter. Mais comme il me connait aussi bien que je le connais, il voit clair dans mon jeu alors il ne semble pas du tout offusqué lorsque je lui fais part du faux menu. « Arrosé d’un peu de vin, et parfumé aux feuilles de laurier, je présume ? » Je fronce les sourcils et je hoche la tête en essayant d’avoir l’air le plus crédible possible, troquant rapidement mon air sérieux pour un air plus moqueur. « Oh, tu fais ton difficile là. Ça ne goûte presque rien des feuilles de laurier. » Je prends une nouvelle gorgée de ma bière alors que nous nous dirigeons vers la cuisine. « T’es chanceux que je connaisse tes goûts de princesse, j’ai pas mis de feuilles de laurier. » dis-je en lançant un regard furtif dans sa direction, un sourire au coin des lèvres. « Ça sent super bon, en tout cas. » Le contraire m’aurait plutôt étonné alors que, sans vouloir me vanter, je me débrouille plutôt bien derrière les fourneaux. Afin d’accueillir Hassan comme il se doit, je lui offre tout de suite à boire en énumérant les différents choix qui s’offrent à lui en ajoutant une légère pointe de sarcasme. « Je suis à deux doigts de te demander une eau pétillante par pur esprit de contradiction. » La moitié du corps toujours dans le réfrigérateur, je tourne la tête pour regarder mon ami par-dessus mon épaule en riant. « C’est pas moi que ça va déranger, fais-toi donc plaisir. J’en bois même pas, c’est pour toi que j’achète ça. » Lui et mes autres invités. Et si vraiment ça me dérangeait qu’il boive cette boisson infecte, je n’en aurais pas à lui offrir. « Mais j’ai beaucoup trop chaud alors je vais plutôt prendre une bière. » Tel que demandé par Sa Majesté Jaafari, je sors une bière non-alcoolisée du réfrigérateur que je décapsule avant de lui tendre. « Et tu peux m’expliquer le raisonnement derrière ta prise de décision? C’est quand même pas un café que je viens de t’offrir. » Ça devait bien être rafraîchissant de l’eau pétillante, non? D’un mouvement de tête, je désigne son casque de moto qu’il a déposé dans l’entrée. « On devrait aller se faire un road trip un moment donné. » J’ai un peu trop délaissé ma moto dans les dernières semaines et de le voir tout beau avec son blouson me donne franchement envie de partir à l’aventure.
« Tu as besoin d’aide pour la cuisine ? » En temps normal, j’aurais répondu non sans aucune hésitation étant donné qu’il n’est pas question que mes invités préparent leur propre repas. Considérant que je me suis un peu beaucoup coupé l’intérieur de la main, et ma bonne main à part de ça, son aide ne sera définitivement pas de refus pour couper la dinde. Préparer la salade et couper tous les légumes racines a été plus ardu que je l’aurais imaginé. J’ai tenté d’accomplir la tâche avec ma main gauche mais j’ai failli me couper à plusieurs reprises et je n’ai franchement pas besoin d’être encore plus estropié que je le suis déjà. « Tu sais quoi? Oui, je te mets en charge de la dinde. Je me suis coupé la main solide et j’ai appris que je ne suis vraiment pas ambidextre. » dis-je en riant tout en sortant une planche à découper ainsi qu’un couteau que je pose sur le comptoir près de lui. J’évite toutefois de lui raconter comment je me suis coupé la main, peu désireux de lui expliquer que je me la suis volontairement entaillée dans l’espoir que la douleur causée par cette blessure serait plus facile à gérer que celle causée par le rejet de mon fils. « Quoi de neuf sinon ? Ta sœur va bien ? » Je hoche la tête, tout en enfilant les mitaines de four, puis je sors la rôtissoire du four pour la poser sur celui-ci. « Oui, Stacey va bien. Mila aussi, même si… tu sais, l’adolescence. » dis-je en haussant les sourcils pendant que je retire les mitaines que je pose sur le comptoir un peu plus loin. Même si je n’ai aucun lien de parenté avec la sœur de Stacey, elle me fait beaucoup penser à moi à son âge et j’ai envie d’être là pour elle comme Hassan l’a été pour moi alors que personne ne croyait en moi. « Sinon moi… pas grand-chose d’intéressant. Rien qui va rivaliser avec ce que j’ai appris en novembre en tout cas. J’essaie de tranquillement prendre ma place, c’est pas toujours facile. » J’essaie de me convaincre qu’il est petit et qu’il s’habituera à moi plus vite que je le pense. Je peux au moins me réjouir de ne plus devoir me battre contre Danika pour faire valoir mes droits. J’ouvre la porte du réfrigérateur et j’en sors un grand bol de salade que j’ai préparée un peu plus tôt cet après-midi. « Ah et j’ai une compétition qui s’en vient le 13 février. » dis-je bien loin de me douter aujourd’hui que je finirais à l’hôpital à l’issue de ce combat. Après avoir été porté le bol de salade sur la table, je reviens dans la cuisine et je sors deux assiettes que je pose à proximité de la planche à découper pour qu’il puisse servir la dinde à mesure qu’il la coupe. « Et toi, quoi de neuf? T’as quelque chose de croustillant à raconter? » Comme nous ne nous croisons plus à l’hôpital à ce temps-ci de l’année, je ne suis pas au fait de ce qui a bien pu se passer dans la vie d’Hassan dans les dernières semaines et j’espère qu’il n’a pas de mauvaises nouvelles à m’annoncer. |
| | | | (#)Jeu 8 Avr 2021 - 4:56 | |
| Appuyé contre le plan de travail de la cuisine, Hassan avait affiché un air faussement boudeur tandis que son ami le raillait gentiment sur ses supposés goûts de princesse. Mais quatre décennies étant déjà passées par là le brun avait depuis longtemps déjà appris à ne plus s’offusquer des commentaires sur son régime alimentaire, somme toute peu contraignant puisque le porc et l’alcool en étaient pratiquement les seules exclusions, par conviction plus que par goût qui plus est. Mais ça Lawrence le savait, raison pour laquelle il pouvait se permettre de plaisanter et de taquiner sans qu’Hassan ne s’en offusque outre mesure, et réfléchissant à peine un instant ce dernier avait opté pour une bière au moment de choisir quelque chose à boire. « Et tu peux m’expliquer le raisonnement derrière ta prise de décision? C’est quand même pas un café que je viens de t’offrir. » s’était néanmoins étonné son hôte avec amusement, et dodelinant la tête le brun avait répondu « Y’a rien de plus désaltérant qu’une bière. » comme si cela tombait sous le sens. Se saisissant aussitôt de celle que Lawrence lui avait tendue après l’avoir décapsulée, il avait levé la bouteille en direction du jeune homme pour trinquer et s’était accordé enfin une longue gorgée plus que bienvenue après son périple à moto sous la chaleur estivale. Désignant d’ailleurs du menton son casque laissé près de la porte d’entrée, le propriétaire des lieux avait suggéré « On devrait aller se faire un road trip un moment donné. » et prenant le temps de déglutir sa bière Hassan avait acquiescé « Quand tu veux. J’ai encore les petits pour une semaine, mais une fois que Qasim et Olivia les auront récupérés je serai libre comme l’air. » Libre de caser cela entre ses nouvelles obligations de doyen, son contrat avec ABC, son bénévolat à l’hôpital, son rôle d’entraineur pour le Rugby Club de Logan City … Mais sans que l’on on sache trop comment, le brun réussissait malgré tout à accorder du temps à tous ceux de son entourage qui en témoignaient l’envie. Probablement parce que la seule personne à laquelle il n’accordait pas de temps était lui-même, mais qui oserait seulement le juger pour s’éviter toute occasion de contempler le vide de sa propre solitude ? Il était comme ça Hassan, il se nourrissait du temps qu’il accordait aux autres. Par principe mais avec malgré tout la certitude que Lawrence s’empresserait de décliner, le brun s’était proposé de donner un coup de main à la préparation du repas – se tourner les pouces tout en regardant les autres s’activer autour de lui, très peu pour lui. Contre toute attente cependant le blond s’était fendu d’un « Tu sais quoi ? Oui, je te mets en charge de la dinde. » inespéré, et aussitôt expliqué par le « Je me suis coupé la main solide et j’ai appris que je ne suis vraiment pas ambidextre. » ajouté juste après. Secouant la tête comme on le ferait face à la même bêtise répétée encore et encore par un enfant, l’enseignant s’était rapidement lavé les mains en commentant « Tu sais ce sont les légumes qu’il faut couper, pas les petites saucisses qui s’agitent au bout de tes mains. » d’un ton léger, puis s’était saisi de bonne grâce de la planche à découper et du couteau de cuisine que lui avait sorti Lawrence. 1vs1, la dinde tout juste sortie du four contre la dextérité d’Hassan, un combat à suivre en ce moment même dans une cuisine de Redcliffe. Et puisqu’il se sentait tout de même capable de faire plusieurs choses à la fois, homme du vingt-et-unième siècle qu’il était, le brun en avait par ailleurs profité pour demander des nouvelles de la sœur de son ami, faute de l’avoir lui-même croisée dernièrement. « Oui, Stacey va bien. Mila aussi, même si … tu sais, l’adolescence. » Oh, il savait. Comme en témoignait le nez plissé et la grimace compatissante servies en guise de réponse, avant qu’il ne demande « Quel âge ça lui fait maintenant, quinze, seize ans ? » sans grande certitude. Il connaissait Stacey par le biais de Lawrence et n’avait d’ailleurs jamais manqué de l’encourager lorsque ce dernier hésitait encore à tenter de la retrouver, certain que lever le voile sur ce pan inconnu de son histoire ne pourrait que lui être bénéfique, mais le reste de la famille de la blonde n’était qu’une ribambelle de personnes dont Hassan avait déjà entendu parler via le frère ou la sœur mais sans jamais n’en avoir rencontré aucun. « Sinon moi … pas grand-chose d’intéressant. Rien qui va rivaliser avec ce que j’ai appris en novembre en tout cas. J’essaie de tranquillement prendre ma place, c’est pas toujours facile. Ah et j’ai une compétition qui s’en vient le 13 février. » Le moment de flottement n’avait duré qu’un quart de seconde, juste le temps pour Hassan de se demander ce qu’il avait appris en novembre, avant que la réponse et la réalité ne lui reviennent avec force en pleine figure. Oh, si Lawrence était heureux alors il l’était pour lui, de la même façon qu’il l’avait été lorsque Qasim et Olivia avaient annoncé l’arrivée future de son désormais troisième neveu … mais cela n’empêchait pas son cœur de se serrer un peu (beaucoup) de tous ces proches qui devenaient parents pendant que lui restait sur le bas-côté. « Et avec sa mère, ça se passe un peu mieux ? » avait-il néanmoins fini par demander avec non moins de sincérité. Ces quatre années dont elle avait privé Lawrence dans la vie de leur fils ne se rattraperaient pas, mais il ne tenait au fond qu’à elle de ne pas gâcher les suivantes … et ça Hassan le souhaitait sincèrement au père autant qu’au fils. Le blond s’éclipsant un court instant pour aller porter la salade jusqu’à la table du salon, Hassan en avait profité pour se reconcentrer entièrement sur la découpe de la volaille, ne s’interrompant qu’une seule fois pour boire une gorgée de bière et tenter de faire passer la boule de tristesse coincée au fond de sa gorge. « Et toi, quoi de neuf ? T’as quelque chose de croustillant à raconter ? » Gorge qu’il s’était raclée aussitôt Lawrence de retour avec sa question, remerciant d’un signe de tête lorsqu’il avait déposé les assiettes vides à côté de lui. « Oh moi, j’ai pas une seconde à moi en ce moment. Mais c’est chouette, ça met un peu de vie dans la maison … quoi que je soupçonne Spike et Bandit d’avoir hâte de retrouver leur tranquillité, eux. » Hassan le savait de toute façon bien, comme chaque été le blues post-neveux durerait quelques jours après leur départ, puis ses habitudes reprendraient le dessus. « C’était la pré-rentrée du staff à l’université la semaine dernière, j’avais laissé les enfants chez les Khadji. Joanne était là aussi comme elle donne quelques classes en histoire de l’art, ça nous a fait une occasion de déjeuner ensemble. » Comme à chaque fois qu’il mentionnait son ex-épouse, le brun se sentait obligé de prendre des pincettes et de tâter vaguement le terrain … Elle n’avait pas été simple, sa relation avec la blonde au fil de ces dernières années, tour à tour teintée de tristesse et d’amertume, d’incompréhensions mutuelles, de désillusions même lorsqu’Hassan avait momentanément cru la récupérer avant qu’elle ne lui préfère finalement Jamie. Ils s’étaient faits beaucoup de mal, et nombre des proches d’Hassan l’avaient suffisamment ramassé à la petite cuillère ces dernières années pour ne pas voir d’un très bon œil l’amitié que les deux anciens époux tentaient désormais de cultiver. Mais Joanne faisait partie de sa vie depuis dix-sept ans, elle avait compté trop fort et trop longtemps pour que le brun puisse accepter l’idée de tirer un trait sur l’affection qu’il portait à son égard.
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| | | | (#)Sam 8 Mai 2021 - 2:40 | |
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« Tu sais ce sont les légumes qu’il faut couper, pas les petites saucisses qui s’agitent au bout de tes mains. » Je lance un regard amusé dans sa direction tandis que je sors tout ce dont il aura besoin pour couper la dinde. « No shit smartass » dis-je en donnant une tape amicale sur son bras du revers de la main pendant qu’il se lave les mains. C’est avec affection que je le surnomme ainsi, je ne pense pas réellement qu’Hassan est un Ti-Joe Connaissant. Depuis le temps qu’on se connait, il sait très bien que je ne rate jamais une occasion de me moquer de lui et ce n’est définitivement pas près de changer. « Merci de ton conseil, mais c’est la paume que je me suis coupé, pas les doigts. » Définitivement pas l’endroit où on se coupe le plus souvent, et pour cause, le geste avait été intentionnel mais il n’a pas besoin de le savoir. Même si Hassan est pour moi comme un frère, je n’ai pas particulièrement envie de tourner le couteau dans la plaie en lui expliquant en détails ce qui s’est passé chez Danika lorsqu’elle a finalement décidé de dire au petit qui j’étais réellement pour lui. La conversation dévie plutôt sur mes sœurs à mon grand bonheur et je ne peux m’empêcher de faire un commentaire sur Mila qui a le don de jouer avec mes nerfs parfois. Malgré ça, je ne me passerais pas d’elle pour autant. « Quel âge ça lui fait maintenant, quinze, seize ans ? » Je secoue négativement la tête en avalant ma gorgée de bière. « Dix-sept ans, imagine. Je ne peux pas croire qu’elle est presque majeure déjà. Ça va tellement vite, pire que de la mauvaise herbe. » J’ai du mal à réaliser qu’à son âge, j’étais sur le point de partir en appartement tout seul pour la première fois. Dans ma tête, Mimi restera toujours une petite gamine même si je dois me rendre à l’évidence qu’elle est en train de devenir une femme.
« Et avec sa mère, ça se passe un peu mieux ? » Je demeure silencieux un court instant en hochant la tête, le regard fixé sur le goulot de ma bière que je tiens entre mes mains. « Honnêtement, ça se passe bien. Trop bien peut-être même. » À un tel point où j’éprouve l’envie qu’on se donne une deuxième chance pour qu’on puisse former tous les trois une vraie famille, mais je n’ai aucune idée si Danika ressent la même chose que moi et je me demande si ça vaut la peine de prendre le risque de briser cette harmonie pour une histoire qui est probablement vouée à l’échec de toute façon. Je ne peux m’empêcher de penser à Maddox qui pourrait souffrir d’une mauvaise décision de notre part. Je suis déchiré entre mon cœur qui me pousse vers elle et ma tête qui me dit que c’est trop beau pour être vrai. « On va voir pour combien de temps ça va durer. » Je hausse les sourcils en faisant tourner ma bière dans ma bouteille, avant d’en prendre une gorgée.
Soucieux de ce que mon ami peut traverser en ce moment, je prends de ses nouvelles à mon tour en espérant que sa vie avait été un peu moins mouvementée que la mienne dans les dernières semaines. « Oh moi, j’ai pas une seconde à moi en ce moment. Mais c’est chouette, ça met un peu de vie dans la maison … quoi que je soupçonne Spike et Bandit d’avoir hâte de retrouver leur tranquillité, eux. » Étant donné leurs races, Spike et Bandit doivent avoir beaucoup d’énergie à dépenser et il doivent aussi être bien contents de pouvoir recevoir des câlins de d’autres personnes. Je ne doute pas une seconde qu’ils risquent de dormir pendant de longues heures lorsqu’ils retrouveront leur tranquillité. « Je suis certain qu’ils vont s’en remettre. » Je lui fais un petit clin d’œil avant d’ouvrir le tiroir pour en sortir des ustensiles. « C’était la pré-rentrée du staff à l’université la semaine dernière, j’avais laissé les enfants chez les Khadji. Joanne était là aussi comme elle donne quelques classes en histoire de l’art, ça nous a fait une occasion de déjeuner ensemble. » Mon visage affiche un air sérieux dès qu’il mentionne le nom de son ex-femme que je n’affectionne pas particulièrement. C’est loin de faire mon affaire de savoir qu’il passe encore du temps avec Joanne après l’état dans lequel il s’est ramassé il y a quelques années. Elle a intérêt à ne pas lui faire mal encore parce que je ne me gênerai pas de lui dire ma façon de penser. « Comment elle va? » demandé-je poliment pour savoir si elle était un risque pour lui selon ce qui se passait dans sa vie à elle. Mon regard scrute le visage d’Hassan dans l’attente de sa réponse. Je sais que Joanne s’est remariée depuis le temps et j’espère qu’il n’a pas toujours de sentiments pour elle. Je suis bien placé pour savoir qu’il peut être difficile de dérocher quand les sentiments sont toujours présents. |
| | | | (#)Mer 30 Juin 2021 - 6:08 | |
| Plus encore à mesure que les années passaient et que le recul à ce sujet s’étoffait, Hassan observait avec bienveillance la façon dont Lawrence semblait trouver sa place dans cette nouvelle extension familiale que représentait celle qui avait accueilli Stacey. Au fond tout cela ne tenait pourtant pas à grand-chose, il aurait suffi que le blond ne rassemble jamais le courage ou la volonté pour lancer sa bouteille à la mer une décennie plus tôt, ou que sa sœur ne tombe jamais sur le message posté par Lawrence sur le célèbre réseau social qui leur avait permis de se retrouver – parfois la vie tenait à un fil, cette fois-ci elle tenait à un algorithme informatique, et en dix ans la direction qu’avait pris l’agent de sécurité était forcément influencée par ce rebondissement. Il était plus apaisée qu’une décennie en arrière, Lawrence, de cela Hassan avait la certitude, et lorsque son ami avait rectifié « Dix-sept ans, imagine. Je ne peux pas croire qu’elle est presque majeure déjà. Ça va tellement vite, pire que de la mauvaise herbe. » à propos de Mila le brun avait porté sa bouteille de bière à ses lèvres pour s’en offrir une gorgée avant de faire remarquer « C’est drôle, je pouvais dire la même chose de toi y’a encore pas si longtemps. » en souriant, amusé. Il exagérait un peu, bien sûr, mais en réalité l’époque où Yasmine ou lui n’étaient encore que des lycéens ne lui semblait pas remonter à si loin … Et pourtant, Dieu sait que bien des événements avaient pris place depuis, dans la vie d’Hassan autant que dans la leur. L’irruption dans la vie de Lawrence d’un fils dont il ignorait l’existence en était d’ailleurs un de taille – peut-être même le plus gros, mais là-dessus Hassan ne pouvait pas s’avancer, sachant seulement qu’il en aurait été ainsi s’il avait été à la place de son ami. Il en aurait rêvé, bien sûr … Mais la vie était ainsi faite, et là n’était pas la question. Là où l’amertume aurait pu le ronger au point de ne laisser la place à rien d’autre, le brun était en réalité simplement soucieux que son ami y trouve son compte, et sa place. « Honnêtement, ça se passe bien. Trop bien peut-être même. » avait-il d’ailleurs admis à ce sujet, provoquant chez le brun un haussement de sourcils interrogatif. « On va voir pour combien de temps ça va durer. » Posant sa bière sur le plan de travail pour se remettre à la découpe des légumes, Hassan avait alors questionné d’un ton sérieux « Y’a quelque chose qui te fait penser que ça pourrait changer, ou bien c’est juste un excès de prudence de ta part ? » Pas que l’on puisse réellement parler d’excès cela dit, aussi le brun s’était-il aussitôt corrigé « J’veux dire, je comprends que tu ne veuille pas t’emballer. Mais elle a peut-être juste envie que ça se passe au mieux elle aussi ? » Pour se faire pardonner les quatre années durant lesquelles elle avait gardé ce secret pour elle, peut-être … Mais il ne s’agissait là que de pures spéculations que le brun préférait garder pour lui. Estimant peut-être avoir été suffisamment longtemps le centre de la conversation, Lawrence avait fini par renvoyer la balle à Hassan en s’enquérant de ce qu’il avait de neuf à raconter … De neuf ou de « croustillant » pour reprendre ses termes exacts, mais il semblait difficile de rivaliser avec le fait de se découvrir un enfant sorti du chapeau, et la vérité c’est que l’enseignant était de toute façon bien trop pris par son travail pour avoir le temps de quoi que ce soit d’autre. Un fait dont il n’était pas en position de se plaindre, puisqu’il faisait absolument tout pour qu’il n’en soit pas autrement. « Je suis certain qu’ils vont s’en remettre. » s’était en tout cas amusé son ami lorsqu’il avait évoqué la tranquillité perturbée de ses animaux, le temps des vacances de la marmaille de Qasim et Olivia. « Plus vite que moi, c’est certain. » avait de son côté répondu Hassan sur le même ton. Gérer trois enfants n’était pas de tout repos, mais pour rien au monde l’universitaire ne renoncerait au plaisir qu’il avait chaque été d’accueillir sa nièce et ses neveux. Il n’était par ailleurs pas le seul, le père d’Olivia et les parents Khadji se faisaient eux aussi une joie de les avoir un peu pour eux, et pour cette raison Hassan n’avait eu aucun mal à confier les trois terreurs à Fatima et Amjad la semaine précédente pour remplir ses obligations universitaires. L’occasion pour lui de se glisser pour la première fois officiellement dans son nouveau rôle de doyen, mais également de passer un peu de temps avec Joanne, qu’il n’avait pas vue depuis la fin de l’année scolaire précédente. D’un ton qu’on devinait prudent, Lawrence avait demandé « Comment elle va ? » et haussant les épaules tout en terminant de réduire une carotte en rondelles Hassan avait répondu « Comme quelqu’un qui gère un second divorce, je suppose. Sauf que cette fois-ci il y a des enfants au milieu. » Y’avait-il un sentiment de gâchis en songeant au fait qu’à l’heure de choisir entre redonner une seconde chance à Jamie ou à son premier mari, Joanne lui ait préféré le britannique et sa réputation pourtant sulfureuse ? Probablement un peu. Mais pouvait-on vraiment reprocher à la blonde d’avoir choisi le père de ses enfants, plutôt que celui qui ne lui en avait donné aucun ? Hassan, lui, n’en avait plus le cœur. « J’espère que les journalistes la laisseront tranquille, maintenant. » avait-il simplement ajouté d’un ton pensif, ayant envie de croire que son nom désormais dissocié de celui de Jamie on ne chercherait plus – ou moins – à obtenir sa réaction à la mesure que les scandales rattrapaient le britannique et que le mouvement #metoo l’éclaboussait.
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| | | | (#)Mer 21 Juil 2021 - 8:58 | |
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Les années filent à la vitesse de la lumière et j’ai du mal à réaliser que Mila atteindra sa majorité sous peu alors que j’ai parfois l’impression qu’elle vient tout juste d’entrer dans ma vie. Une sensation qui me donne encore plus envie de profiter de chaque moment avec Maddox, d’autant plus comme j’ai déjà perdu les trois premières années de sa vie. « C’est drôle, je pouvais dire la même chose de toi y’a encore pas si longtemps. » Il exagère, Hassan, même s’il n’a pas tout à fait tort. Je lève les yeux au ciel en riant avant de lui répondre « Y’a encore pas si longtemps, ça fait quand même quatorze ans que je suis majeur je te ferais remarquer. Tu commences à avoir des problèmes de mémoire, le vieux? Je dois m’inquiéter de ton état? » demandé-je en lui adressant un clin d’œil amusé. Danika et Maddox viennent inévitablement sur le sujet, l’inverse aurait été plutôt surprenant d’ailleurs. « Y’a quelque chose qui te fait penser que ça pourrait changer, ou bien c’est juste un excès de prudence de ta part ? J’veux dire, je comprends que tu ne veuille pas t’emballer. Mais elle a peut-être juste envie que ça se passe au mieux elle aussi ? » Je laisse échapper un ricanement tandis que je prends une énième gorgée de ma bière sans quitter Hassan des yeux. « Les quelques mois pendant lesquels nous avons été ensemble? » réponds-je en fronçant les sourcils comme s’il s’agissait d’une évidence. En dehors des quatre mois durant lesquels nous avons été ensemble et qu’elle n’a même pas été foutue de me dire qu’elle m’aimait, notre relation n’a jamais été évidente. Même pas en 2008 lorsque j’ai commencé à m’entraîner au dojo, déjà à l’époque il y avait cette compétition entre nous, bien que j’avais encore des croûtes à manger pour lui arriver à la cheville alors qu’elle avait passé toute son enfance à cet endroit avec son père. « I don’t know man. Ça a toujours été intense entre nous deux, on se ressemble trop. Ça me semble trop beau pour être vrai. » Comme une lune de miel, le calme avant la tempête. Ou peut-être qu’Hassan a raison et que Danika souhaite que les choses se passent différemment maintenant qu’il y a Maddox dans le décor. « Peut-être que t’as raison. Peut-être qu’on va arriver à faire de quoi de pas pire maintenant qu’on n’est plus ensemble. » Comme quoi la clef c’était pas le mariage. Sauf que les sentiments sont toujours là de mon côté et je sais que ça risque de tout compliquer entre nous si mes vieilles habitudes reviennent, même si elle ne me doit absolument rien à ce niveau-là.
Assez parlé d’eux, je préfère dévier la conversation vers Hassan que de continuer de penser à Danika et aux sentiments que j’éprouve toujours pour elle malgré le coup de cochon qu’elle m’a fait. Maintenant que j’ai moi-même un fils, je peux un peu plus imaginer dans quel état la maison d’Hassan devait se trouver en la présence des enfants de Qasim et Olivia. Je n’ai aucun mal à croire qu’il devait être bien content de retrouver sa tranquillité, d’autant plus qu’il ne s’agit pas de ses enfants à lui. « Plus vite que moi, c’est certain. » Un sourire en coin, je lance un regard furtif en direction de mon ami, incapable de me retenir de passer un deuxième commentaire sur son âge. « Ça c’est la vieillesse qui parle. » Ça m’amuse de le charrier, mais je sais que je serais probablement en train de m’arracher les cheveux si je devais m’occuper de trois enfants à la fois. Je n’en avais qu’un et c’était déjà tout une adaptation. C’est avec prudence que je le questionne sur Joanne. Hassan est trop gentil avec elle à mon goût et je crains qu’elle l’entraîne dans sa chute. « Comme quelqu’un qui gère un second divorce, je suppose. Sauf que cette fois-ci il y a des enfants au milieu. » « T’aurais dû le laisser crever. » Osé-je dire en soupirant. J’ai jamais compris pourquoi elle a choisi l’autre plutôt qu’Hassan. Peut-être que je ne suis pas objectif étant donné le lien que j’entretiens avec l’iranien, mais je sais qu’il mérite d’être connu et d’être heureux. Il est l’un des rares à avoir cru en moi tandis que je traversais une période difficile et je lui en serai toujours redevable. Qu’elle ose le blesser et je ne me gênerai pas d’aller lui dire ses quatre vérités à la blonde. En tout cas, même si je désapprouve, je me vois mal faire la morale au brun alors que je suis moi-même toujours amoureux de mon ex qui m’a trahi sans hésitation. Et si Danika et moi décidons de nous redonner une chance et qu’il désapprouve, ça ne me fera pas changer d’idée alors je sais qu’il pourrait tout aussi bien faire à sa tête lui aussi s’il a encore des sentiments pour son ex. Je peux au moins lui faire part de mes inquiétudes, en espérant que ça comptera pour quelque chose. « J’espère qu’elle ne profitera pas de ta gentillesse. » Je n’ai certainement pas envie de le retrouver au bout d’une corde ou de son sang. Puisqu’il a déjà tenté de se suicider à deux reprises par le passé, je ne suis pas du tout rassuré de la savoir près de lui. « J’espère que les journalistes la laisseront tranquille, maintenant. » Je ne connais pas vraiment le bonhomme, mais disons que je ne suis vraiment pas impressionné par ce que j’ai entendu dans la presse. « Elle n’avait qu’à y penser avant de choisir son dernier mari. » dis-je en prenant les assiettes pour les apporter dans le salon. « J’espère que tu ne te sentiras pas responsable s’ils ne le font pas, en tout cas. T’as déjà bien assez souffert à cause d’elle. » Je ne peux me retenir de lui faire part de ce que je pense d’elle, même si j’espère que ça ne l’empêchera pas de m’en reparler dans le futur si le besoin se faire sentir. C’est ma façon (un peu maladroite peut-être) de lui faire comprendre que je m’inquiète pour lui. « On mange? » Après avoir apporté tout le nécessaire à la table, je m’assois et je sers un bol de salade à Hassan sans lui demander s’il en veut un au préalable. « T’as eu des nouvelles de l’organisme d’adoption sinon? » J’espère que oui, je sais à quel point ce projet compte pour lui et je me doute que l’attente doit être interminable. S’il y a quelqu’un de mon entourage qui fera un bon père, c’est Hassan sans hésitation.
Dernière édition par Lawrence Cabbott le Dim 26 Sep 2021 - 11:11, édité 1 fois |
| | | | (#)Lun 6 Sep 2021 - 2:51 | |
| Qu’elles aient compté ou pas vraiment, été dans son paysage un moment ou seulement quelques instants, Hassan n’avait jamais été le genre à s’enticher de celles qui promettaient des prises de tête à n’en plus finir. Il ne trouvait aucun plaisir dans les joutes verbales sans fin, les désaccords à la pelle et les tendances à jouer l’esprit de contradiction simplement pour le principe. Il préférait la légèreté de relations simples au conflit de celles (trop) passionnées, et si son mariage avec Joanne avait été une exception à la règle sur bien des points il n’en avait rien été pour celle-ci, fondamentale, et la blonde et lui ne s’étaient jamais fâchés plus loin durant les dix années de leur relation que pour les broutilles sans importances réservées aux couples sans nuages. Tout le contraire de Lawrence et de celle qui, bien plus tard, s’était révélée être la mère de son fils, et de cela l’agent de sécurité avait entièrement conscience puisqu’il avait lui-même résumé la chose d’un « I don’t know man. Ça a toujours été intense entre nous deux, on se ressemble trop. Ça me semble trop beau pour être vrai. » fataliste. Fatalisme ou pessimisme, c’était selon, et face à l’optimisme avec lequel Hassan tentait quant à lui de présenter la situation pour contrebalancer le blond avait admis à demi-mot « Peut-être que t’as raison. Peut-être qu’on va arriver à faire de quoi de pas pire maintenant qu’on n’est plus ensemble. » La situation pouvait difficilement être pire qu’elle l’était avant que la mère du petit ne daigne mettre Lawrence au courant de sa paternité, c’était au moins une certitude. Pour le reste, Hassan avait machinalement tapoté le bois de la planche à découper en répondant « C’est tout ce que je te souhaite, mate. » Ou au moins lui souhaitait-il que la situation ne soit plus une préoccupation de tous les instants et que la possibilité que la mère du petit mette à nouveau les voiles sans l’inclure dans l’équation cesse d’être un risque réel. « Qui sait, peut-être qu’aux prochaines vacances on pourra présenter les mini-Jaafari au mini-Cabbott, histoire de commencer à assurer la relève. » Et en parlant des mini-Jaafari, Hassan avait beau aimer sa nièce et ses neveux de tout son cœur il n’était pas entièrement mécontent de pouvoir retrouver le temps d’une soirée un volume sonore reposant, tandis que revenait à Yasmine la tâche ardue de mettre tout ce petit monde au lit à une heure (à peu près) raisonnable. Mais qu’on ne s’y trompe pas, le brun aurait beau pousser un soupir reposé lorsque les trois enfants repartiraient avec leurs parents, il aurait hâte de les revoir presque aussitôt après. « Ça c’est la vieillesse qui parle. » n’avait pu s’empêcher de le taquiner à nouveau Lawrence, et laissant échapper un bref rire l’enseignant avait dodeliné la tête en prenant une gorgée de sa bière. « Rigole, mais je crois bien que Reda est né pour nous faire réaliser à son père et à moi les mômes infatigables qu’on devait être pour nos parents. » Et si la religion des deux frères ne les incitait pas à croire à la moindre notion de karma, l’adage qui disait que l’on récoltait ce que l’on semait était quant à lui universel. D’une ex à l’autre et sans le vouloir, le sujet avait dérivé de l’ancienne flamme du blond vers celle du brun, et si une partie d’Hassan n’était pas mécontent de voir Joanne prendre ses distances avec l’homme qui, bien que père de ses enfants, avait par le passé levé la main sur elle, il ne pouvait ignorer que dans chaque divorce les choses n’étaient pas simples pour elle – elle y laisserait probablement des plumes, simplement pas les mêmes que dans leur divorce à eux. « T’aurais dû le laisser crever. » estimait quant à lui Lawrence à propos du Keynes, avec bien moins de retenue que l’enseignant à ce sujet. « Hm. » avait alors simplement marmonné Hassan en guise de réponse, certain pourtant que son inaction aurait fini par lui retomber dessus un jour ou l’autre s’il avait choisi cette voie, et qu’on ne gagnait jamais à se rendre coupable de mauvaises actions. S’il avait laissé Jamie s’arranger seul avec son coeur lui faisant défaut, un enfant se serait retrouvé orphelin – c’était ce qu’il tâchait de se répéter lorsque le mépris prenait le dessus sur la raison. « J’espère qu’elle ne profitera pas de ta gentillesse. » avait alors ajouté Lawrence pour en revenir à Joanne, quand le brun espérait de son côté que la presse cesserait d’importuner son ex-épouse. « Elle n’avait qu’à y penser avant de choisir son dernier mari. J’espère que tu ne te sentiras pas responsable s’ils ne le font pas, en tout cas. T’as déjà bien assez souffert à cause d’elle. » L’ami d’Hassan était sévère, incisif, là où ce dernier ne l’était au contraire peut-être pas assez. Pour autant, il avait secoué la tête et répondu « Non, là-dessus elle a fait ses choix. » en haussant les épaules, ferme à défaut de sévère. « Mais je m’efforce de ne pas être du genre à frapper quelqu’un qui est déjà à terre pour le simple plaisir de dire je t’avais prévenue. » Il estimait (ou plutôt il espérait) valoir un peu mieux que cela, quand bien même il n’en avait pas toujours été ainsi durant les quatre ou cinq dernières années. Estimant sans doute l’un et l’autre qu’il valait mieux laisser le « sujet Joanne » de côté, car tout aussi épineux que celui de la mère de Maddox, Jaafari avait acquiescé d’un signe de tête lorsque son hôte avait proposé de se mettre à table, et attrapant chacun ce qui y manquait pour l’amener avec eux jusqu’à la pièce voisine ils s’étaient installés l’un en face de l’autre, l’estomac d’Hassan jusque-là en sommeil se réveillant pour faire savoir qu’en effet, il faisait faim. Assez en tout cas pour que la question de Lawrence ne lui coupe pas instantanément l’appétit, son « T’as eu des nouvelles de l’organisme d’adoption sinon ? » tombant comme un pavé dans la mare, mais le brun tentant de garder la face en attrapant le poivre pour y noyer copieusement sa salade. « Oui. » Évitant soigneusement le regard de son ami, sachant bien que ce seul mot ne constituait pas une réponse, il avait finalement ajouté « Mais ça ne va pas le faire. » et tenté au mieux d’avoir l’air détaché dans ce qui était pourtant un échec cuisant. Il s’était promis de ne pas fonder trop d’espoirs dans toute cette histoire pour s’éviter une déception trop difficile à encaisser, et pour le moment il gérait la chose avec ce qu’il savait faire de mieux : le déni, et la certitude que s’il traitait la chose comme si elle n’était pas importante alors elle cesserait de l’être. « C’est pas vraiment une surprise, de toute façon. C’est pas comme si je ne m’y attendais pas. » avait-il encore ajouté, du ton de celui qui cherchait avant tout à se persuader lui-même, et haussant finalement les épaules il s’était fendu d’un « C’est comme ça. » fataliste. C’était comme ça, oui, qu’il le veuille ou non, et plus vite il l’accepterait – plus vite il accepterait que quelqu’un, quelque part, avait estimé qu’il ne ferait pas un bon parent – plus vite il ferait la paix avec ce qui resterait à jamais de l’ordre de la chimère. Peut-être. S’éclaircissant la gorge pour se donner une contenance, il avait alors demandé « T’es le seul au courant, alors si tu pouvais garder ça pour toi pour l’instant. » l’air un peu gêné. Du peu de personnes mises dans la confidence, lui non plus n’était pas encore prêt pour les regards désolés et les je t’avais prévenu, en fin de compte.
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| | | | (#)Dim 26 Sep 2021 - 14:00 | |
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« C’est tout ce que je te souhaite, mate. » Je me contente d’un sourire tout en tapotant son épaule d’une main en guise de réponse. Je juge que nous avons fait le tour du sujet Danika pour la soirée, j’ai envie de passer un bon moment avec Hassan et pas de me frustrer en repensant au mensonge de Danika ou à la réaction que le petit a eue en apprenant que j’étais son père. « Qui sait, peut-être qu’aux prochaines vacances on pourra présenter les mini-Jaafari au mini-Cabbott, histoire de commencer à assurer la relève. » Cette idée me plait bien comme en témoigne la vivacité avec laquelle j’acquiesce d’un mouvement de tête. « Ça serait vraiment cool! » Je préfère attendre que le petit m’accepte avant de le présenter à mes proches, mais lorsque ce sera le cas, Hassan est définitivement l’une des personnes auprès de qui je veux que mon fils grandisse. « Tant qu’ils ne lui montrent pas de mauvais coups sinon Danika va me tuer. » ajouté-je avec un sourire moqueur, une lueur espiègle dans le regard. Malgré la conversation moins plaisante que nous venons d’avoir, je me sens détendu en sa présence et je me rends compte à quel point sa présence me fait du bien et je devrais vraiment faire des efforts pour le contacter plus souvent même si c’est souvent compliqué de trouver un moment qui nous convient à tous les deux pour nous voir avec nos emplois du temps chargés. « Rigole, mais je crois bien que Reda est né pour nous faire réaliser à son père et à moi les mômes infatigables qu’on devait être pour nos parents. » Je ne peux m’empêcher de rire en me remémorant comment Hassan était à l’époque où je l’ai connu, bien qu’il était déjà au début de son adolescence à ce moment. De ce dont je me souviens, c’est vrai qu’il déplaçait beaucoup d’air, mais il ne demeurait pas moins quelqu’un de bien. Il a pris des risques pour me protéger tandis que nous ne nous connaissions pas tant que ça et il m’a pris sous son aile alors que j’étais un petit garçon tourmenté qui ne savait pas comment gérer ses émotions. Hassan aurait pu continuer sa vie sans se soucier de moi, mais il a gardé contact et rien que pour ça je lui serai redevable toute ma vie. Il a pris le rôle du grand frère que j’ai perdu en juillet 1996. « La pomme ne tombe jamais bien loin de l’arbre. » Peut-être qu’Hassan avait des chances de tomber sur un gamin plus calme si sa demande d’adoption était acceptée. « Si c’est ça, je n’ai pas hâte que Maddox soit adolescent. » réponds-je en laissant échapper une grimace avant de rire. Jusqu’à maintenant, je ne peux pas vraiment me plaindre de l’attitude de mon fils. Maddy écoute bien et c’est un garçon très joyeux, il ne reste qu’à voir s’il demeurera ainsi en vieillissant ou s’il héritera du caractère de cochon de ses deux parents. S’il est comme moi quand j’étais adolescent, ou même enfant après la mort de mes parents et de mon frère, il va nous en faire baver à Danika et moi.
Bien que je me sois un peu amélioré au fil des années, me retenir de dire ce que je pense alors que mes proches risquent de se faire blesser dans une situation est toujours difficile pour moi. Je suis conscient que, bien souvent, la dureté de mes mots peut déranger, mais c’est plus fort que moi et derrière mon franc-parler se cachent de bonnes intentions. Je comprends que Joanne compte toujours pour Hassan malgré leur divorce, mais je préfèrerais que leurs contacts soient limités pour qu’il ne se retrouve pas au fond du baril une fois de plus. Sauf que le brun est assez vieux pour prendre ses décisions alors je ne peux faire autrement que de les accepter. Mais je me promets de rendre la vie dure à la blonde s’il arrive quoi que ce soit au brun par sa faute. « Non, là-dessus elle a fait ses choix. Mais je m’efforce de ne pas être du genre à frapper quelqu’un qui est déjà à terre pour le simple plaisir de dire je t’avais prévenue. » Et sur ce point nous sommes très différents lui et moi. Parce que par orgueil, je serais probablement incapable de me retenir de passer ce petit commentaire, d’autant plus si la situation m’a occasionné beaucoup de frustration. « C’est tout à ton honneur. Fais juste attention ok? » J’ai déjà perdu un frère, je n’ai pas besoin d’en perdre un deuxième.
Fatigué de parler de nos ex, je dévie la conversation sur un sujet qui, à mon sens, devrait être plus heureux : la demande d’adoption d’Hassan. Je sais toutefois qu’il s’agit d’un sujet sensible alors je demeure prudent même si j’ai plus que hâte de célébrer avec lui le jour où un enfant lui sera enfin confié. « Oui. » Un mot qui pique instantanément ma curiosité, mais le regard fuyant de mon ami ne me donne pas un bon pressentiment. « Mais ça ne va pas le faire. » Je le connais suffisamment pour savoir que derrière son air détaché se cache assurément une tempête d’émotions. Avoir un enfant est un projet de vie et je sais à quel point c’est important pour lui. « C’est pas vraiment une surprise, de toute façon. C’est pas comme si je ne m’y attendais pas. C’est comme ça. » Je l’écoute attentivement sans savoir quoi dire pour le réconforter sans pour autant le rendre mal à l’aise. Ayant moi-même du mal à gérer mes émotions, je ne sais pas toujours comment agir lorsque mes proches vivent des évènements difficiles. « I’m sorry man. C’est leur perte, je ne comprends pas leur décision. » Je ne peux qu’imaginer la déception qu’il devait vivre et la tristesse du deuil de ce projet qui lui tenait tant à cœur. « T’es le seul au courant, alors si tu pouvais garder ça pour toi pour l’instant. » Je hoche la tête en lui adressant un regard compatissant. « T’en fais, je n’en parlerai pas. » lui assuré-je en portant ma bouteille de bière à mes lèvres pour en prendre une gorgée. « En tout cas si t’as besoin de quoi que ce soit, je suis là. » Autant pour un voyage à moto que pour crier ou frapper dans un punching bag s’il en ressent le besoin. Et si ça ne fonctionne pas, je suis convaincu qu’un peu de temps en présence de Mila devrait suffire à lui changer les idées. |
| | | | | | | | (Hassan & Lawrence) Brothers are like glue; they stick together |
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