Il règne une ambiance de mort dans la salle. Charles a rassemblé tout le monde pour une réunion d'équipe autour du prochain spectacle mais Eddie n'est pas vraiment dedans, ses capacités de concentration ce matin laissent sacrément à désirer et sa motivation a un peu foutu le camp, aussi. Ce n'est pas simple de travailler avec quelqu'un qui vous adresse à peine la parole, surtout pour Eddie qui préfèrerait laisser les ressentiments des uns et des autres aux portes de la compagnie. C'est une chose qu'il n'aime pas devoir gérer ici, et dont les répercutions peuvent être réelles sur son boulot s'il ne s'emploie pas à ravaler proprement sa frustration. Il peut supporter sans problème les médisances de ses collègues, ça ne l'empêchera jamais de trouver le sommeil mais il en a sa claque de l'ignorance de Clément car elle dure depuis deux ans déjà. Il n'en voit pas le bout Eddie, et il ne fait rien non plus pour que la situation s'améliore. La communication n'existe plus entre eux aujourd'hui, la relation qu'ils ont désormais est tout au plus professionnelle et encore, même à ce niveau-là leurs interactions se font rares. Tant que ça n'impacte pas directement les shows Charles restera probablement en dehors, mais il n'ignore pas que ces deux-là sont en froid car à vrai dire la Northlight toute entière a connaissance de cette histoire. « Bon je file, Clément et Eddie je vous laisse ranger ? Merci les gars. » Tiens, c'est nouveau ça. Il ne sait pas si Charles souhaite apporter sa petite contribution dans l'idée de les rabibocher mais Eddie ne va pas s'en plaindre, l'occasion lui est enfin donnée de se retrouver en tête-à-tête avec Clément et ça, ce n'est pas arrivé depuis beaucoup trop longtemps. Quand c'est justement en passe de se produire l'un ou l'autre s'arrange toujours pour déguerpir et éviter ainsi la confrontation qu'ils n'ont jamais été prêts à avoir tous les deux, et qui ne serait pourtant pas du luxe à ce stade. Seulement ce matin personne ne pourra se dérober car quand le metteur en scène demande de remettre la salle en ordre, même si ce n'est pas fermement exigé de sa part, on ne discute pas et on s'exécute. Ils vont devoir coopérer et quelque chose lui dit que l'idée ne ravit pas du tout celui qu'il considère de son côté toujours comme un ami, malgré tout ça.

« T'es une crapule Eddie ! C'est vraiment dégueulasse ce que t'as fait à Clément ! »

« T'arrives encore à te regarder dans un miroir ? »

« Il va super mal et toi tu l'enfonces, tu parles d'un ami ! »

« C'est comme ça que t'as prévu de réussir toi, en écrasant les autres ? Félicitations t'as tout gagné mec. »

« Ce type vendrait père et mère pour briller, à gerber. »

Il a bien senti que les choses avaient changé pendant la convalescence de Clément puis au retour de celui-ci dans la compagnie mais il a mis du temps à l'admettre, même lorsque les collègues lui sont tombés dessus les uns après les autres pour l'accuser du pire truc jamais commis au sein de la Northlight ce n'était apparemment pas assez concret pour lui. Il y a deux ans, donc, Eddie se payait la réputation la moins glorieuse entre ces murs et c'était assez mérité. Encore aujourd'hui certains collègues détournent le regard quand ils le croisent dans un couloir, d'autres sont même assez mal à l'aise à l'idée de collaborer avec lui car s'il a pu sacrifier son amitié avec Clément pour booster sa carrière, de quoi est-il capable encore ? C'était une situation pesante au départ à laquelle il a fini par s'habituer, et il laissera couler tant ça ne mettra pas en péril ses projets et que tout le monde restera pro. Jusqu'ici il s'en sort plutôt bien, les reproches qu'on peut encore lui faire se font en dehors de la scène, le plus souvent dans les loges lorsque chacun revêt ou quitte ses habits de lumière car c'est là que la vraie proximité existe entre danseurs, et là aussi qu'Eddie est finalement le plus accessible. On ressent bien moins d'animosité à son encontre que lorsque cette histoire a éclaté mais il sait qu'il n'y aura jamais prescription dans son cas et que personne n'oubliera ce qu'il a fait. Ils peuvent bien le diaboliser encore dix ans si ça leur chante, le seul jugement qui importe pour lui est celui de Clément. C'est le seul aux yeux duquel il s'en fait pour son image et c'est joliment ironique, quand on sait qu'il n'a justement pas assez songé à lui deux ans plus tôt.

L'un conjugue leur amitié au passé tandis que l'autre erre encore dans un certain déni. Eddie a toujours beaucoup de mal à reconnaitre ses torts car il l'a vu à l'époque comme une chance à saisir, avant même de considérer qu'il allait enterrer son pote déjà au fond du trou car c'est ce que font les gens trop ambitieux, ils agissent au nom de leur propre morale. On a bien trop dit de lui qu'il n'avait pas de conscience, or si c'était le cas il suppose qu'il aurait lâché l'affaire depuis longtemps avec Clément. Si cette amitié ne comptait pas pour lui, oui, c'est ce qu'il aurait fait. Il s'accroche pourtant à l'espoir de retrouver ce qui les liait avant, en se doutant bien que son complice d'autrefois ne lui ouvrira pas les bras comme ça et qu'il n'est pas uniquement question de ce que lui veut, dans cette histoire ils sont deux. Il va ramer Eddie, il le sait mais il préfère encore ça au fait de continuer à contempler les ruines de leur amitié sans rien faire. S'il veut renouer avec ce qu'il a perdu il faut qu'il se bouge les fesses, car clairement ça doit venir de lui. « Clément. » Il fait tomber sa voix sans prévenir dans le silence pesant qui s'est emparé de la pièce depuis le départ de Charles. Et aussitôt il soupire, constatant que c'est encore si difficile pour Clément de le regarder dans les yeux. Ça fait à vrai dire bien longtemps que ces deux-là n'échangent plus de regards, Eddie tente parfois de créer ce simple contact mais en face c'est un éternel mur auquel il se heurte. « Il va bien falloir qu'on parle quand même, un jour. » Alors pourquoi pas aujourd'hui ? Pourquoi éternellement repousser le moment en sachant de toute façon que ce ne sera agréable pour personne. Il prend le risque Eddie parce qu'il aimerait voir les choses enfin bouger, quitte à devoir passer par une discussion houleuse qui viendra troubler sa grande tranquillité. Il sait que rien ne s'arrangera si le premier pas ne vient pas de lui et dieu sait que ça lui coûte, car il n'aime pas prendre des initiatives aussi casse-gueule quand ça revient à offrir l'occasion aux autres de l'envoyer bouler. S'il se fait planter là comme un con une fois la salle rangée sa fierté en prendra un coup mais au moins il aura fait un pas vers lui, ce ne sera peut-être pas totalement vain - on se rassure comme on peut. « Ça fait deux ans Clément. Tu comptes emporter ta rancune dans la tombe ? » Il le questionne alors que son regard ne le lâche pas, et se veut d'ailleurs très insistant. Lui en vouloir à vie pour un rôle et une histoire qui commence à dater selon lui il ne comprend pas bien le concept mais il ne faut pas s'attendre à autre chose venant d'Eddie, il ne se met pas assez à la place des gens pour être en mesure de les comprendre. Alors c'est vrai, il ne s'est pas excusé une seule fois en deux ans. Et il est peu probable qu'il le fasse un jour, parce qu'il s'accroche encore et toujours à ses foutus principes. Pour lui ce n'était pas une trahison, mais bien une opportunité à saisir. On ne lui enlèvera pas de la tête que c'était son moment et qu'il aurait été bête de le laisser filer. « Tu pouvais plus danser et il y avait des shows à assurer, j'étais censé faire quoi ? Fallait bien l'honorer ce rôle. » La grenade est dégoupillée, il sait qu'à tout moment ça peut lui péter à la tronche. La discussion qu'ils auront mis tant de temps à avoir tous les deux est à peine amorcée qu'Eddie aborde déjà les choses qui fâchent. Il avance tel un équilibriste et espère qu'en dépit de cette approche assez effrontée, mais finalement à son image, Clément ne lui claquera pas au nez cette porte qu'il vient d'entrouvrir.

Comme il s'y attendait Clément ne veut pas de cette discussion. Il estime même qu'ils peuvent s'épargner cette peine, à croire que la situation lui convient comme telle ou qu'il part simplement du principe qu'on ne pourra plus rien sauver entre eux. Eddie est étrangement le plus optimiste des deux, il y croit un minimum sinon il ne s'embarquerait pas là-dedans avec en face un Clément particulièrement sur la défensive. Il a toujours préconisé le dialogue pour tenter de résoudre un problème et puisque l'occasion leur est donnée de s'expliquer autant en profiter pour briser la glace, de son point de vue. Il espère une discussion pacifique mais ce n’est pas vraiment comme ça que les choses semblent s’annoncer aujourd’hui, ce n'est même pas du tout exagérer de dire que ça part plutôt mal. Son calme il le conserve sans problème contrairement à Clément mais pour combien de temps encore, il n’en sait rien. Eddie n’est pas quelqu’un que l’on pousse facilement à bout seulement si le ton monte un peu trop à son goût il sera obligé d’élever la voix lui aussi, or il déteste devoir crier pour se faire entendre. Et il est déjà tellement absorbé par cet échange qu'il tente d'initier qu'il en oublie cette salle qu'ils sont censés ranger à deux, mais il est bien vite ramené à la réalité par la chaise que Clément laisse lourdement retomber au sol dans un bruit sourd, aussi surprenant que désagréable, mais qui n'est pourtant rien à côté de ce qu'il se prend en pleine figure la seconde d'après.

Ah oui d'accord. Connard, carrément. Le premier truc qu’il entend de la bouche de Clément après quasi deux ans de silence c’est une insulte, là c’est officiel l’époque où ils étaient comme cul et chemise tous les deux lui semble très loin. « T’avais manifestement besoin de l'expulser celui-là.. » Il sent que ça vient des tripes et que Clément maronne ça depuis un moment. Ce n'est pas ce qu'il espérait entendre en tentant de renouer avec son ami d'autrefois mais au moins il ne l'ignore pas, c'est déjà ça. Clément s'avance vers lui d'un pas décidé et lui intime de ne plus évoquer ce qu'il a traversé il y a deux ans, un sujet sur lequel Eddie n'a apparemment pas le droit de s'aventurer car il ne sait pas vraiment de quoi il parle. Et c'est vrai, ça lui échappe encore pas mal cette histoire de burn-out. Il ne bouge en tout cas pas d'un pouce malgré la distance sensiblement réduite entre eux, et les poings serrés de son interlocuteur dont le sang-froid ne semble déjà plus tenir qu'à un fil. Cette montée en pression n'ébranle pas Eddie, mais ça l'étonnera toujours cette capacité qu'ont certaines personnes à se laisser si rapidement dépasser par leurs émotions. La discussion est à peine lancée qu'elle en est déjà chaotique, il ne sait pas où c'est susceptible de les mener et il ne peut de toute façon plus faire marche arrière. « On ira nulle part si tu montes direct dans les tours. » Qu'il balance avec flegme en allant à son tour rassembler quelques chaises, ça lui occupera un peu les mains. En fin de compte il doit être le seul à vouloir arranger les choses, Clément n’a pas l’air disposé à lui faciliter la tâche ni à entendre ce qu’il peut avoir à dire sans fulminer en guise de réponse, autant dire que pour la discussion pacifique qu'Eddie avait en tête on repassera. Malgré tout il ne veut pas croire que les choses puissent dégénérer si vite, ni même tout court en fait, et encore moins que son ancien allié puisse employer la force avec lui alors des précautions durant cet échange il n'en prendra aucune. Eddie n'a de toute façon jamais su peser ses mots et ce n'est pas aujourd'hui qu'il va apprendre.

Ce qu'il n'a jamais fait non plus, c'est s'embrouiller aussi longtemps avec quelqu’un. Il n'aurait pas pu prédire que cette histoire de rôle prendrait de telles proportions car il évolue dans son propre monde Eddie, il fait des choses et s’étonne ensuite des conséquences en venant dénoncer une dramatisation pure et simple. Pourtant quelqu’un a été blessé ici, Clément ne lui en veut pas par plaisir mais parce qu'il a vécu à l'époque son opportunisme comme une trahison. Il le lui fait d'ailleurs bien sentir, sa rancœur est intacte et l'affront qu'il lui a fait n'est toujours pas digéré. Clément est d'ailleurs à deux doigts de lui sortir que son burn-out était finalement du pain bénit pour lui, mais vu qu'il le prend pour un salopard aux yeux duquel le mot amitié n'a jamais rien signifié il est à peu près sûr que c'est ce qu'il pense à défaut de le dire. Il entend des choses qu'il ne pourra pas contester, et puis d'autres vis-à-vis desquelles il ressent le besoin de se défendre par contre. « J’me suis pas dit que j’allais à tout prix te remplacer, ce que je voulais c’était gagner de la place et de l’importance dans la compagnie. Ouais, j’ai pensé qu’à ma gueule tu peux le dire. » Et c’est bien là tout le problème. On ne peut même pas mettre ça sur le compte de la jeunesse car aujourd’hui encore Eddie est un arriviste faisant de sa propre ascension une priorité. Il en a bien trop bavé pour en arriver là pour laisser qui ou quoi que ce soit lui barrer la route, et la carrière d’un danseur est aussi bien trop courte pour qu’il puisse se permettre de remettre ses accomplissements à plus tard quand il peut les concrétiser tout de suite. Alors oui, Eddie avoue sans honte ne pas avoir considéré son ami à un moment qui était crucial pour tous les deux, mais il maintient qu'il n'a pas délibérément agi contre lui. Ce n'était pas son but, même si c'est ce qui en a résulté. Eddie passe en mode individualiste quand il est question du boulot, c'est sa pomme avant celle des autres et cette fois ça l’a perdu. Il voulait s’élever aussi haut qu’il le pouvait sans penser à celui qu’il enfoncerait pour y parvenir. C’est moche, mais il doit une bonne partie de ce qu’il a aujourd’hui à cette décision prise il y a deux ans. « J’ai pas assuré comme pote, je le sais. Mais bêtement je m’étais dit que tu pourrais comprendre, parce que le monde s’est pas arrêté de tourner pendant que t’allais mal Clément. » Bon. Il aimerait rembobiner cette dernière réplique à peine sortie car il se trouve un peu dur, et il se doute bien que Clément ne va pas du tout apprécier. Il y a deux ans Eddie était en attente d'opportunités à saisir pour lancer une bonne fois pour toutes sa carrière et il se trouve qu'on a fini par lui en offrir une, qui ne lui était pas destinée à l'origine mais quand on veut se faire une place dans un milieu aussi compétitif on met ses états d'âme de côté. C'est comme ça qu'Eddie a raisonné à l'époque, et comme ça qu'il raisonnerait encore aujourd'hui. Il n’allait pas attendre de voir quand Clément allait se rétablir et prendre ainsi le risque de passer à côté d’une occasion en or comme celle-ci, pour lui ça n'aurait pas été envisageable car il sait qu'il l'aurait par la suite regretté. Et à la fin de sa vie s'il veut être délesté de quelque chose c'est bien de regrets. Dans quelques années quand la danse sera derrière lui il veut pouvoir se dire qu'il a absolument tout entrepris pour vivre de sa passion, même si pour ça il lui aura parfois fallu tirer avantage d'une situation au détriment des autres.

Il y pense, Eddie. C'est là et ça ne demande qu'à sortir, car puisqu'ils en sont à cracher ce qu'ils ont sur le cœur il ne voit pas de raison de garder ça pour lui plus longtemps. Il pourrait prendre quelques secondes de réflexion pour décider comment l'amener et le formuler de façon à ménager un minimum Clément, sauf que son truc c'est plutôt de balancer les choses comme elles lui viennent, sans grande surprise. Son regard cherche à rencontrer le sien tandis qu'il choisit enfin de se débarrasser de cette question qui le hante depuis deux ans. « Pourquoi tu m’as pas dit que t'étais à bout ? Tu t'es barré d’un coup, j’ai rien compris. » Ils n'en ont jamais parlé après tout, les clés pour comprendre il ne les possède pas et tout seul il ne les trouvera pas. Ce burn-out est arrivé si soudainement, du jour au lendemain son pote était mis en repos forcé et il se demande si c’est Clément qui n’a pas senti l’épuisement physique et moral le guetter ou si c’est lui qu’on n’a juste pas mis dans la confidence à l’époque en pensant qu’il ne pourrait pas comprendre. Et c’est vrai, pour Eddie c’est toujours compliqué de dealer avec la faiblesse humaine que ce soit les siennes ou celles des autres. Il tolère difficilement qu’on puisse se laisser abattre, mais il aurait aimé que Clément lui en touche un mot et il se dit que s’il avait eu une infime chance de trouver en lui un peu d'empathie à l'époque on ne lui a tout simplement pas donné. Car oui, c'est bien connu qu'avec Eddie les autres sont toujours beaucoup plus fautifs que lui ne l'est.

Les premiers mots de Clément sont assez violents mais dans la mesure où ce dernier doit mariner tout ça depuis deux ans c'est à peine étonnant. Eddie préfère ne pas s'attarder sur le connard dont il se voit gratifié, et il refuse aussi de considérer qu'un nouveau cap est franchi dans cette petite guerre qui les oppose car il a voulu cette discussion, maintenant il doit assumer de voir la tournure de celle-ci lui échapper. Il est même prêt à en passer par là et à se manger tous les missiles que son pote lui enverra si ça leur offre au moins la garantie de pouvoir enfin se parler. Alors c'est sûr, ce n'est pas vraiment le dialogue qu'il espérait mais Clément a peut-être juste besoin de cracher ce qu'il a gardé pour lui pendant tout ce temps, et si c'est le cas Eddie veut bien faire office de punching-ball à condition de pouvoir en placer une pour livrer lui aussi son ressenti sur tout ça. Une histoire a souvent deux versions mais dans la leur ils sont au moins d'accord sur une chose : Eddie a agi en parfait égoïste et n'a pensé qu'à sa tronche, et s'il n'avait pas été dévoré depuis toujours par des ambitions plus grosses que lui ils n'en seraient pas là tous les deux aujourd'hui. Il l'avoue sans peine, son désir d'ascension a été plus fort que tout à l'époque et ce rôle qui lui a été proposé suite au départ de Clément était juste l'opportunité rêvée pour l'audacieux rookie qu'il était. Il ne peut pas regretter une décision à laquelle il doit la carrière qu'il a maintenant, mais il peut au moins admettre qu'il a été vraiment nul à chier comme pote. Clément méritait mieux et il lui a objectivement donné toutes les raisons d'être déçu de lui. Ses agissements n'étaient pas dignes de la grande complicité qu'ils avaient et du duo qu'ils formaient, Eddie commence enfin à le réaliser même s'il est toujours difficile pour lui d'accepter de mettre le mot trahison là-dessus.

C'est important que Clément sache qu'il n'a jamais souhaité lui nuire d'un point de vue professionnel car à la base ils fonctionnaient à deux, le côté individualiste d'Eddie s'est vraiment révélé quand il a dû avancer en solo et à partir de là on ne pouvait pas l'arrêter. On dit beaucoup de choses le concernant depuis deux ans, notamment le fait qu'il n'accorde aucune valeur à l'amitié et est prêt à écraser ses plus proches alliés pour se hisser toujours plus haut. Techniquement c'est ce qu'il a fait mais son intention n'était pas celle-là. Il n'a pas voulu voir plus loin que l'objectif qu'il visait à ce moment-là et là a été sa faute, car s'il avait été un peu plus consciencieux il se serait rendu compte qu'il ne pourrait pas briller à travers ce rôle sans enterrer encore un peu plus Clément à côté. Et contre toute attente, c'est une chose que le comédien parvient à comprendre. Il dit avoir toujours admiré sa détermination, et à vrai dire Eddie a rarement l'occasion d'entendre que cette facette de sa personnalité plait à quelqu'un, on le pointe même souvent plus comme un défaut chez lui. C'est bien de savoir ce qu'on veut et de tout entreprendre pour l'obtenir, mais Eddie emploie sa propre témérité à l'extrême depuis des années au point d'éclabousser tout son entourage et de dégoûter de la danse une partie de celui-ci. Les professionnels du milieu apprécient forcément un peu plus d'avoir à faire à un danseur aussi hardi mais ça, c'était surtout avant que les trois quarts de la compagnie lui tournent le dos par rapport à cette histoire. Il sait qu'il n'a pas volé sa réputation Eddie, et c'est franchement bien fait pour sa gueule si aujourd'hui son propre pote le voit comme le dernier mec scrupuleux sur terre. « T'as jamais cessé d'exister pour moi, je voudrais vraiment pas que tu penses ça. » Ses traits durs et tendus révèlent d'ailleurs à quel point ça l'embête que Clément puisse se mettre une telle chose en tête, mais il a vraiment tout fait pour lui donner cette impression et pour entacher son image auprès de lui. Alors foutu pour foutu il peut bien lui avouer ce qu'il s'était promis de ne jamais dévoiler par fierté, car pour optimiser ses chances de réconciliation avec Clément il préfère ne plus rien lui cacher à ce stade. « Je sais pas trop ce que ça vaut aujourd'hui mais pendant les premiers mois de ta convalescence je demandais souvent de tes nouvelles autour de moi, quand on voulait bien m'en donner.. » Se renseigner sur son état s'est vite avéré être un parcours du combattant, entre les collègues qui le jugeaient et n'étaient pas disposés à lui offrir la moindre information, et Clément qui a très vite su qu'il s'était approprié son rôle et avec lequel la communication a été rapidement rompue à partir de là. Il a galéré Eddie et il a d'ailleurs fini par lâcher l'affaire puisqu'il était voué à faire cavalier seul, mais c'est une façon de lui dire que malgré ce qu'il a fait et ce qu'on lui reproche encore deux ans après, non, il ne l'a pas zappé. S'il est vrai qu'il a poursuivi son désir d'ascension au sein de la compagnie il ne s'est pas pour autant foutu de savoir comment Clément allait à côté. Certes il n'a pas compris qu'il ait sombré aussi soudainement et surtout sans rien lui dire, mais il n'a jamais pu ni voulu ignorer que son ami était mal. Egoïste oui, mais pas totalement insensible. Ça lui parait plus anecdotique qu'autre chose aujourd'hui avec toute l'eau qui a coulé sous les ponts depuis mais s'il a une chance d'avoir l'air un peu moins ignoble il suppose que c'est dans son intérêt de la saisir.

Clément a donc tu son mal-être jusqu'à atteindre le point de rupture, seul face à lui-même. La honte, pas un sentiment qu'Eddie a beaucoup expérimenté dans sa vie et pourtant sur ce point il le comprend, car lui non plus n'aurait pas accepté que son corps et sa tête ne suivent plus. Tout ce qu'il lui dit est loin de tomber dans l'oreille d'un sourd mais présentement il retient surtout qu'il était une sorte de modèle pour Clément alors qu'il n'en avait absolument pas conscience jusqu'ici. Ils ont toujours été une source d'inspiration l'un pour l'autre en tant que duo de scène mais de là à entendre qu'il est la personne pour laquelle il avait le plus d'admiration, non, il ne s'en doutait pas. « Le meilleur partenaire qu'on ait jamais connu.. vraiment ? » Il répète dans un sourire, alors que le ton de la discussion prend un virage à 180 degrés ce qui n'est vraiment pas pour lui déplaire. Clément s'adoucit et Eddie soupire, mais cette fois parce qu'il est soulagé de pouvoir enfin dialoguer dans de bonnes conditions. Il ne perd pas de vue son désir d'arranger les choses, et peut-être que Clément l'y aidera finalement plus qu'il ne l'imaginait au départ. « La vérité c'est qu'à aucun moment j'ai pensé que ça t'achèverait. Tout ce que je voyais c'était mon objectif, j'imaginais vraiment pas ces conséquences-là et pour tout te dire j'ai même halluciné quand les collègues me sont tombés dessus. Je comprenais pas ce qu'il leur prenait, pour moi ils dramatisaient complètement et ça allait très vite se tasser. » Pour quel résultat, au final.. Deux ans après on lui en parle encore, cette histoire n'en finit plus de le poursuivre et quasiment plus personne ne lui fait confiance dans la compagnie. Il paie cher son opportunisme Eddie, et d'une certaine façon on peut considérer que son ami aura été un peu vengé. Ce dernier dit être tombé de haut en découvrant un côté de sa personnalité qu'il ne soupçonnait pas, ou dont il n'imaginait tout du moins pas l'ampleur. « Je suis comme ça Clément. T'auras fini par t'en rendre compte, ma vraie nature c'est celle-là. » Il hausse les épaules, conscient de se trimballer pas mal de défauts et d'arborer une personnalité pouvant s'avérer fortement problématique dans le cadre de son travail, qui plus est lorsqu'à celui-ci se mêle le facteur amical. Le verbe pardonner est quand même lâché et il n'en attendait pas tant pour ce premier échange après deux ans, il semble avoir vraiment sous-estimé la bonne volonté dont Clément pouvait faire preuve et il se dit que le problème devait définitivement être son approche initiale. « Tu sais, je veux pas te forcer la main pour ton pardon. T'imagines déjà pas comment je suis content qu'on soit enfin capables de dialoguer. » C'est une sacrée avancée dont ils peuvent se féliciter car c'était loin d'être gagné, sachant que ces deux-là partent de très loin. Leur amitié n'est pas restaurée comme au bon vieux temps mais le contact est renoué lui, enfin l'heure n'est plus à l'ignorance et aux regards de travers.

Et maintenant Clément se réjouit pour lui, affirmant qu'il a même toujours souhaité sa réussite dans le milieu. D'un coup il ne perçoit presque plus aucune rancœur, juste une bienveillance qu'il sait ne pas mériter. Son sourire s'élargit mais c'est une façade derrière laquelle Eddie vient se cacher, car intérieurement c'est un joyeux bordel qui se joue. Il n'est pas prêt pour ce qu'il entend là, ce soudain passage de rien à tout lui provoque même une montée interne assez indescriptible qui le prend aux tripes et vient lui saisir la gorge. « Ah punaise, t'y vas fort là. » Sur ces mots un peu fébriles il lui tourne le dos quelques secondes afin de trier ses pensées, mais surtout pour ne pas montrer que ça le secoue bien plus qu'il le voudrait. Il n'aime pas dévoiler ce qu'il ressent et paraitre vulnérable Eddie, même si là tout de suite il ne faudrait plus grand-chose pour le terrasser comme on ferait voler un vulgaire bonhomme de papier. Une fois ressaisi il lui fait à nouveau face, alors qu'une question le démange. « Bon. Mais est-ce qu'au moins tu vas mieux ? » C'est un Eddie réellement soucieux qui l'interroge, et il accorde beaucoup d'importance à la réponse qui va lui être fournie. Forcément en ne s'étant pas adressé la parole durant deux ans chacun a mené sa vie de son côté, et il n'est plus du tout à jour sur la vie de Clément. Ça le frustre Eddie, autrefois ils se disaient tout et à présent c'est comme s'ils ne se connaissaient plus vraiment. Pour lui les choses ont pas mal bougé durant cette période de grand froid entre eux alors il suppose que pour son ancien binôme aussi, c'est simplement triste de se dire qu'ils n'auront pas assisté à leur évolution personnelle respective pendant tout ce temps parce qu'ils préféraient s'ignorer. « T'en es où maintenant ? Parce qu'on en a jamais parlé non plus de ça. » Ça, ce sont les suites et conséquences de ce fameux burn-out. Il ne sait pas quand, ni si Clément en est complétement sorti et il se rend compte que cette histoire l'a aussi pénalisé par rapport à tout ce qu'il a manqué, et qu'il ne pourra pas rattraper. Aujourd'hui il ignore où celui qu'il n'a jamais cessé de considérer comme un pote en est dans sa vie, il n'y a qu'au niveau professionnel qu'il peut à peu près suivre son développement mais il a accumulé un retard de deux ans sur le reste, c'est énorme quand on sait qu'à l'origine ils partageaient tout et n'avaient aucun secret l'un pour l'autre. Eddie aimerait se mettre à la page et pourquoi pas -dans un second temps- envisager de retrouver progressivement la place qu'il a perdu si les signaux sont favorables pour ça du côté de Clément, mais si dans un premier temps ils se reparlent un petit peu et mettent l'un et l'autre leur foutue fierté de côté ils auront déjà fait un grand pas. Il ne veut pas trop en attendre non plus car il est bien plus facile de le décevoir que le contraire, cela dit ce net changement d'ambiance le rend plutôt confiant pour la suite. Peut-être qu'il a pris la bonne décision finalement en forçant le dialogue, car il ne sait pas quand il aurait pu espérer renouer avec Clément s'il n'avait pas profité du bon alignement des choses cet après-midi.

Le dialogue est renoué, enfin. Eddie n'y croyait plus trop après s'être fait sèchement envoyer bouler une première fois, mais il faut dire aussi que le bonhomme soigne rarement ses approches et qu'après autant de temps à s'éviter prendre quelques pincettes n'aurait pas été du luxe. Il continue en tout cas de penser que parler est nécessaire car ils n'ont jamais pris le temps de le faire, et qu'à ses yeux la situation n'aurait pas pu rester comme ça éternellement. Si le bruit court dans les couloirs de la Nortlight que ces deux-là se reparlent ça va en étonner plus d'un par contre, et il ne serait vraiment pas surpris que certains s'empressent de dire à Clément qu'il fait une grosse erreur en saisissant sa main tendue. Il n'est pas bête Eddie, il se doute bien qu'il n'en a pas fini avec cette histoire quand bien même ses rapports avec son pote s'arrangent, car son pardon n'est toujours pas acquis et pas mal de gens ici ne sont pas près non plus de passer à autre chose. Mais c'est un sacré pas de franchi déjà, le silence n'est plus de mise entre eux et le ton s'est aussi considérablement adouci par rapport au début de cet échange. « Deux ans tu te rends compte. » il souffle tandis que son regard divague un instant autour d’eux. Il a bien vu le temps passer Eddie et pourtant pendant ces deux ans il n’a pas chômé, et a eu de nombreuses occasions de focus sur autre chose. Mais l’ignorance et la rancune de Clément étaient en permanence sous son nez même quand il ne voulait pas les voir, alors oui deux ans c’est définitivement trop long quand le pote dont il était autrefois inséparable va jusqu’à nier son existence en travaillant pourtant dans la même compagnie. Deux ans c’est peut-être bien le temps dont Clément avait besoin pour digérer en partie cette histoire mais celle-ci n’est certainement pas enterrée sous prétexte qu’ils se reparlent enfin. Il y a eu une confiance brisée, et cette confiance Eddie n’est sûrement pas près de la récupérer. Il doute de retrouver un jour avec Clément leur complicité de l’époque même s’il adorerait Eddie, car aujourd’hui ses vrais amis ne sont pas bien nombreux étant donné qu’il lui est compliqué de conjuguer son travail avec une vie sociale. Avant c’était plus simple car il avait des potes au théâtre seulement ça c’est fini, maintenant rares sont ceux qui lui parlent encore, et  qui ne grimacent pas à l’idée d’être placés sur le même projet que lui. C’est un environnement de travail auquel il a fini par s’adapter et il prétend toujours que ce ne l’atteint pas, même si certains jours Eddie ne serait quand même pas contre l’idée de faire un peu oublier cette histoire. Ce n’est pas tellement pesant en soi pour un type qui estime connaître sa valeur et qui se fiche assez de ce qu’on peut penser de lui, mais c’est redondant surtout, à croire qu’en trahissant Clément c’est la Northlight toute entière qu’il a trahi et qu’on l’épinglera à vie pour ça.

Il va bien. Clément va bien, très bien même et la nuance est importante. Un sourire empreint de bienveillance vient très légèrement étirer les lèvres du danseur, sourire qui s'estompe bien vite quand il prend connaissance de toutes les galères que son pote a connu et qui ne se limitent finalement pas à un « simple » burn-out. « Et pendant ce temps moi j’en savais rien. » Il aurait préféré le savoir, et non l’apprendre autant de temps après. Ça le frustre d’entendre que Clément a eu des moments compliqués dont il ignorait tout, et de se dire aussi que quelques collègues devaient le savoir mais n’ont pas daigné l’en informer avec toute cette histoire. On dit que les choses vont vite dans les couloirs de la compagnie mais quand on veut vraiment exclure quelqu’un et faire en sorte que la moindre information ne passe jamais par lui on y arrive aussi très bien, et là tout de suite Eddie a vraiment du mal avec cette idée-là. Être un paria ne le dérange pas, mais être tenu à l’écart des problèmes de son pote si par contre. « La vache.. T’as vraiment cumulé Clément. » il déplore dans un soupire et c’est encore quelque chose qu’il apprend et qui le fait sombrement chier pour lui. Certains diraient qu’il n’y a pas de justice, car un gars comme Eddie qui trahit ses potes s’est porté comme un charme pendant deux ans tandis que Clément a de son côté enchaîné un burn-out, des crises d’anxiété et une rupture du tendon d'Achille. Et c’est assez vrai, dans un sens. Enfin aujourd’hui heureusement Clément dit aller beaucoup mieux, tandis qu’Eddie voit sa santé décliner doucement à force de trop tirer sur la corde - et peut-être aussi parce que tôt ou tard il allait bien devoir subir un retour de karma dans les règles. Son remplaçant est devenu son copain lui confie Clément, et cette idée l'amuse assez vis-à-vis de leur propre historique. Ils sont donc ensemble depuis un an et prévoient d'ouvrir leur studio, il ajoute d'ailleurs qu'ils recherchent un professeur de danse et qu'il pourrait être ce professeur si ça lui dit. Ça fait pas mal d'informations qui lui parviennent d'un coup alors il tâche de les intégrer dans l'ordre, mais même s'il ne le montre pas forcément il se réjouit vraiment des actualités de Clément, après tout ce que celui-ci a traversé. « Un studio, tu veux faire concurrence à ton vieux pote ? » il relève dans l'esquisse d'un sourire tout en continuant de rassembler les chaises. C'est un projet qu'il trouve évidemment très cool et à aucun moment il ne craint réellement l'ouverture d'un nouveau studio de danse en ville, sachant que Brisbane en compte déjà un paquet. Il ne sait même pas si Clément se souvient de son groupe dont il lui parlait souvent du temps où ils étaient très proches. « T'as déjà repéré l'endroit pour ça ? » C'est qu'il s'intéresse du coup, et si ce n'est pas encore fixé il peut toujours lui conseiller de bons coins puisqu'il avait lui-même étudié pas mal de possibilités avant d'opter pour Fortitude Valley. Certains jours il regrette juste un peu de ne pas avoir choisi plus près du théâtre, car ça lui aurait permis de gagner un peu de temps sur ses perpétuels déplacements de l'un à l'autre. « Plus sérieusement je suis content pour toi que tout marche aussi bien aujourd’hui. Dans le boulot et puis dans le reste. » Il ne s’étend pas mais Clément a compris, il fait référence à sa vie sentimentale dans laquelle il semble épanoui et c’est tout ce qu’il a toujours voulu pour lui, de connaitre le bonheur sur tous les plans car il le mérite sans l'ombre d'un doute. Eddie ne ressent pas le besoin de faire une mise à jour sur son propre cas étant donné qu’il n’y a rien à signaler sur le plan perso de son côté, et qu’à vrai dire pour lui les choses bougent uniquement dans le cadre du travail - et elles bougent bien, pour le moment. « Mais vraiment, après tout ça tu serais prêt à ce qu'on retravaille ensemble ? » Il ne dit pas oui et pas non Eddie, même s’il ne voit pas comment il pourrait trouver le temps pour ça alors qu’il gère déjà les cours de son propre studio et son boulot à temps plein dans la compagnie. C'est en tout cas une proposition qui le touche autant qu'elle le surprend, car la dernière fois que ces deux-là ont vraiment été des collègues on sait comment ça a tourné. Sa confiance n'est peut-être pas morte finalement, ou il fait juste très bien la part des choses entre ce qu'il reste de leur différend personnel et le boulot, qui continuera peut-être de les réunir en dépit de tout ça.

L'atmosphère dans la salle est beaucoup plus respirable qu'un quart d'heure plus tôt, et cette reprise de dialogue inspire à Eddie une question qui le taraude depuis un petit moment mais qui n'est peut-être pas à placer dans le contexte actuel sans prendre certaines précautions. Or les précautions il ne connait pas, car ça se saurait si le bonhomme avait une once de prudence et de raisonnabilité en lui. « Tu vois toujours Alexis, sinon ? » Il demande simplement pour poursuivre la discussion instaurée, mais amener Alexis de cette façon pourrait laisser penser à Clément que tout ça n’était au final qu’un prétexte pour glisser sur le sujet de son ex, avec laquelle Eddie n’est plus du tout en contact contrairement à Clément qui, lui, est sauf erreur de sa part toujours un ami de la jeune femme. Sur le moment il ne réalise pas sa possible bourde, et pourtant il sait combien il est facile de douter de sa bonne volonté et de sa sincérité après le sale coup qu’il lui a fait. « Elle va bien ? » il renchérit même et ce n'est décidément pas très fin de sa part d'évoquer Alexis alors qu'ils se reparlent à peine, comme si finalement il n’attendait que ça depuis le début. Il aurait dû attendre un peu, oui, mais c'est trop tard. Eddie risque de passer pour l’opportuniste qu'il a déjà été dans le passé et qui tentait de tourner la moindre situation à son avantage, alors qu'ici la coupable est surtout une bonne dose de maladresse.

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