Elle avait frappé fort Charlie. Elle avait souligné ce qui n’allait pas, m’avait tiré en dehors de ma caverne pour me secouer comme une nièce ne devrait jamais avoir à le faire avec son oncle. Elle avait su peser ses mots pour taper juste, pour faire résonner un jugement bien plus sain dans un esprit bien trop tourmenter. Sans jamais utiliser la menace, elle avait remis les choses en ordre, donner de nouvelles perspectives au combat qu’elle n’avait cesser de mener de front pour nous deux. Elle avait été l’adulte de la situation et m’avait laissé avec une claque figurative que je n’étais pas près d’oublier. Me laisser abattre dans un coin ne sera jamais la meilleure des solutions. Ce ne serait que donner de multiples raisons à Eavan de garder la petite sans jamais me donner le droit de la voir à nouveau. Il était temps de remonter la pente, de garder la tête haute et surtout de trouver par n’importe quel moyen ce qui me permettra de revoir Ailis. J’étais déterminé après cette journée avec ma nièce. Il m’avait fallu quelques heures pour remettre mon appartement en état, un coup de fil pour prendre rendez-vous chez le coiffeur et s’occuper de ma tignasse. Je suis retourné au travail le lundi, j’ai redonné un rythme à ma vie et je me suis lancé dans les recherches à corps perdu.

« Elle est très bien avec moi, elle n’aura plus jamais besoin de toi. »

Jusqu’à ce message de mon ex compagne. Elle qui semblait vouloir ouvrir la communication, moi qui prenais toutes les précautions possibles pour lui répondre calmement sans jamais paraître menaçant. J’avais simplement demandé de voir la petite en sa compagnie, j’étais prêt à accepter toutes ses conditions. En réalité, elle n’en avait aucune, si ce n’est un drôle de sens des responsabilités désormais. Six mois sans nouvelles et du jour au lendemain elle, c’est réveiller en se pensant mère. Cela ne prend pas avec moi et les efforts fait jusque-là, se sont écrouler comme un château de cartes. Je ne voyais plus d’issue à la centième relecture de ce message. Perclus de désespoir et ne voulant infliger mes humeurs à ma nièce, je me retrouve à errer en ville avant de mettre le cap sur la Marina. Là-bas, il y a quelqu’un qui saura m’écouter, quelqu’un qui peut-être saura m’aiguiller.

C’est sans réfléchir bien plus longtemps que je me dirige vers le port. Je ne sais même pas s’il sera présent. Je m’arrête en route pour acheter quelques bières et des merdes à grignoter, histoire de ne pas débarquer avec mes bagages et rien pour me consoler. C’est presque un soupir de soulagement qui m’échappe lorsque je remarque sa voiture dans le parking. Il est là, Amos. Sur le ponton de son voilier en train de bricoler, je ne sais quoi. « Moussaillon. » Je voudrais sourire, mais le cœur n’y est qu’à moitié. « T’aurais du temps pour un vieux frère. » Pitié dis moi oui. Cette fois, c’est moi, qui est cruellement besoin de toi. « Je suis venu avec des munitions. » que je rajoute pour la forme, comme si venir les mains vides était prétexte à refus entre nous.

@amos taylor

« Matelot, c’est un plaisir. J’ai tout mon temps. » Le sourire qu’il m’adresse renvoi à une familiarité rassurante. Tout ce que j’étais venu chercher en tentant de l’attraper sur ce voilier. Le lieu est plongé dans un calme presque apaisant et savoir que l’on semble être seul au monde me donne envie de me poser dans un coin pour simplement profiter du bruit de l’eau qui tape contre la coque. Je tends le pack de bière à mon ami, afin de pouvoir grimper sur le pont pour le rejoindre. « Et, c’est sympa. C’était même une bonne idée… Même si j’ai toujours de quoi faire, tu t’en doutes. » Je ris un peu bien entendu au courant du fait que le frigo d’Amos n’est jamais réellement vide. « Je voulais pas me pointer sans présent. » Ce n’est clairement pas nécessaire entre nous, mais c’est une simple question de respect. Je m’invite déjà chez lui, il fallait bien que j’amène quelques victuailles pour rendre ma présence plus supportable.

Il semble tendu comme jamais Amos alors que je m’approche de lui. Il tenter de ranger ses outillages tout en exerçant des efforts incommensurables pour ne pas réellement croiser mon regard. Il a été témoin de la descente aux enfers par téléphone interposer, ce n’était que des messages qui laisse entrevoir ma colère et le désespoir que je pouvais ressentir sur l’instant. Ce n’était plus réellement le cas désormais. Tout du moins, les émotions se sont apaisé, pour tenter de donner une raison aux événements qui ne cesse de s’enchaîner par cascade dans ma vie. « Alors ? Qu’est-ce qui t’amène ? » Il tente malgré tout, n’ose pas vraiment se jeter dans le vide et un sourire se dessine sur mes lèvres. « Promis je vais pas tout casser autour de moi. » Parce qu’il sait Amos. Il connaît la colère qui m’a toujours habité, celle que je ne savais jamais réellement contrôler. Elle semble un peu plus lointaine désormais, même si toujours tapis dans l’ombre. Je tente de rester positif malgré son dernier message qui ne cesse de se répéter en boucle dans un coin de mon esprit. « Tu sais quoi faire ? » La réponse la plus honnête serait de dire non. Je pourrais tenter de trouver mille et unes esquivent, mais ce ne serait que reporter l’échéance d’une vérité toute trouvée. « Non… » que je murmure le regard perdu dans le vide. « Enfin, je pensais, parce qu’elle commençait enfin à répondre à mes messages. » que j’avoue doucement avant de prendre place sur une marche. « Puis aujourd’hui elle m’as dit qu’Ailis n’aurait plus jamais besoin de moi. » Et l’avouer à haute voix me balance une claque monumentale. De celle qui coupe le souffle et fait briller les yeux. « Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? » C’est tout ce que je me demande depuis le début de ce cauchemar sans fin.

@amos taylor

C’est tout ce qu’il y a de plus rassurant que de retrouver Amos. L’ami de toujours, sourire aux lèvres, prêt à recueillir toutes les galères du monde si cela signifie alléger ma peine. Je me demande encore pourquoi j’avais hésité à le rejoindre, alors que c’est tout ce que j’étais venu chercher. Un peu de soutien et surtout une paire de bras grand ouvert qui ne m’offrirais que du réconfort sans jamais y amener une quelconque once de jugement. « Tu te pointerais avec des dettes que tu serais toujours le bienvenu. » Un rire m’échappe alors que je le pointe du doigt en ajoutant un clin d’œil à la manœuvre. « C’est bon à retenir. » Non pas que je compte m’emmêler dans une situation rocambolesque qui me forcerait à revenir queue entre les jambes réclamer de l’argent à mon ami de toujours. On est bien loin de cela quand tout ce qu’il me reste à lui offrir, c’est un cœur brisé et une âme en peine. « Et, tu pourrais. Si ça peut te faire du bien… peut-être même que je t’aiderais. » Mais voilà qu’une fois encore, il me prouve son amitié sans faille, me proposant une fois encore une aide incommensurable. De la rage, j’en ai à revendre, toute diriger contre la même personne et alimenter par des disputes sans fin que je pensais terminer pour toujours. « Je vais me contenter d’une soirée avec mon ami pour le moment. » que je lui affirme, bien trop fatigué pour hurler à nouveau. J’ai besoin d’un break, d’un endroit safe où je pourrais vider mon sac sans me soucier du reste. Amos me l’offre de toutes les façons différentes.

Alors sans même réfléchir bien plus longtemps voilà que j’en viens à vider mes affaires sur son ponton. Je déverse sans réfléchir, balance les informations à la va-vite et dans un ordre qui amène une difficulté de compréhension. Je pose des questions en tout genre, je me perds dans ce que je veux dire, mais je parle, pour la première fois depuis un moment. « De toi à moi, ce n’est pas à elle à décider de ce dont la petite a besoin, mais ce serait trop beau si elle devenait raisonnable. » Je pouffe légèrement sentant mon cœur se serrer à l’idée que je ne sois pas le seul à penser ainsi. « Tu ne penses pas qu’il serait temps que tu ailles voir un avocat ? Au moins pour savoir ce que tu es en droit d’attendre ou non ? Je ne dis pas qu’il faut lancer une procédure, mais elle ne te ferait pas de cadeau, elle. » Non clairement Eavan à décider qu’elle ne me ferait plus aucun cadeau, comme si je devais payer la fin de notre relation alors qu’elle a été seule investigatrice de tout ce malheur. Elle a décidé de partir et je lui ai pardonné. Elle nous a abandonnées et j’étais encore prêt à lui pardonner. Jusqu’à ce coup de trop. « Charlie m’a conseillé, j’ai déjà porté plainte quand elle a pris la petite sans me prévenir. » Ce jour-là, j’ai eu la peur de ma vie, mais parce que je ne partage aucun lien du sang avec Ailis, personne dans le monde de la justice ne semblait vouloir le comprendre. « Et j’ai rendez-vous avec un avocat la semaine prochaine… » Je ne voulais pas en arriver là, mais il faut croire que mon ex compagne ne me laisse désormais plus du tout le choix. « Si je devais répondre franchement à ta question, c’est peut-être ça que tu as fait de mal...Tu as peut-être juste trop de foi en l’Homme... » Il ne mâche pas ses mots Amos, mais cela à le mérite de me faire relever le regard vers lui. Ce n’est un secret pour personne que mon ami – mes amis en réalité – n’a jamais apprécié la jeune femme. Il a su avant les autres qu’elle était de mauvaise augure. « Pas en l’Homme… » Je me méfie des autres, mais pas d’elle. « En elle… » Et c’est ce qui blesse au plus profond, d’avoir été sautant trahi par celle que j’ai tant aimé. « Je l’aimais tellement que j’aie pardonné. Je l’aimais encore assez pour le faire quand elle est partie en laissant Ailis. » Je soupire, me détestant d’avouer ce genre de choses désormais. « Et maintenant, elle me fait payer quoi ? Le fait de l’avoir tant aimé ? De tout lui avoir pardonné encore et encore ? » Je me rends même pas compte que mon ton est en train de monter. « Je suis vraiment trop con putain. » Et toute la colère est dirigée vers moi alors que je fulmine dans mon coin et qu’il me faudra quelques secondes pour redescendre en pression. « Pardon… » que je marmonne finalement avant de souffler à nouveau. « Fallais que ça sorte, je crois. » Et je tente un rire même si le cœur n’y est pas.

@amos taylor

« C’est une bonne chose. La plainte et l’avocat… mais, ne sois pas trop gentil, Cian. » Il s’inquiète Amos de tout ce que je pourrais lui céder à la jeune femme, tout ce que je pourrais pardonner les yeux fermés. Cela a trop souvent été le cas lorsque je lui ai concédé de m’avoir trompé, lorsque j’ai laissé mes sentiments m’aveugler au point d’en baisser toutes mes barrières de défenses. Je lui avais tout offert à Eavan. Par cent fois, j’ai essayé de m’améliorer pour correspondre à ses attentes. Pendant un temps, j’ai même envisagé démissionner pour que l’armée ne soit plus un problème entre nous. J’aurais pu lui offrir la lune et bien plus encore, mais voilà où nous en sommes aujourd’hui. À chaque minute, elle tente de me rappeler que je n’étais qu’un étranger dans la vie d’Ailis. Qu’importe si j’ai été le premier à l’accueillir dans ce monde, qu’importe si j’ai été celui qui a tout pris en charge lorsque sa mère a décidé de lever le camp. Elle n’avait aucune reconnaissance l’Irlandaise. Elle cherchait à me faire payer des erreurs que je ne saurais déceler. « Je sais ce que tu ressens. Je sais ce que c’est d’idéaliser l’autre, de deviner que c’est peut-être pas une bonne idée, mais d’être incapable de mettre la main devant. » Alors il me comprend mon ami, il entend que tout cela n’a rien d’évident, que parfois, je me perds dans mes sentiments. « Et, c’est beau… Juste beau. C’est ni con, ni bête, ni rien de tout ça. » Un rire m’échappe alors que je suis loin d’arriver au même constat que lui. « Il n’y a rien de beau dans ma crédulité. » J’ai été un idiot. Je me suis laissé berner. J’ai pensé que l’on pouvait tout surmonter, que l’on deviendrait une famille à notre façon. J’ai pensé qu’elle m’aimait assez pour rester, pour tout tenter. « Je me suis laissé berner. » Et c’est si douloureux de l’avouer.

Parce qu’il m’a ouvert les bras sans jugement, je me permets de laisser aller mes sentiments. C’est la colère qui l’emporte, celle que je m’efforce de mettre en sourdine depuis si longtemps, celle qui a toujours régit mes actions. Sans contrôle, je pourrais bien me laisser envahir par cette dernière. Je pourrais laisser la noirceur m’envahir et terrasser tout le reste, mais je réfrène. « Elle est normale ta colère. C’est injuste. Toute cette situation l’est. Mais, tu vas trouver une solution. J’ai encore envie de croire que la vie est parfois bien faite et qu’elle ne l’emportera pas au paradis. Et j’ai aussi envie de croire que, parfois, il faut la laisser faire et ne pas s’y substituer. » Ses mots rassurent et pansent les blessures. Je suis de son avis qu’un jour tout cela se retournera contre Eavan, mais j’ai si peur qu’Ailis n’en paie les pots cassés. « J’ai peur pour la petite. » Elle qui s’est vu arracher à moi alors que j’étais devenu son quotidien, son référent de base. On avait construit des habitudes tous les deux, une vie qui nous allait bien, un petit rythme adapter à son âge et ses besoins. « Elle dit toujours qu’elle veut bien me laisser la voir, mais au bout de dix minutes elle change d’avis, m’arrache Ailis des bras et s’en va. À chaque fois la petite pleure en m’appelant et je peux rien faire Amos à part rester là. » Et moi tout ce qui m’effraye, c’est qu’Ailis pense que je ne me bats pas pour elle. Certes, elle est encore petite. Probablement, qu’elle ne comprend pas tout ce qui se trame, mais ses larmes, la façon dont elle m’appelle à chaque fois, me hante un peu plus de jour en jour. « Je sais pas si elle prend bien soin d’elle, si elle lui a gardé son rythme de vie, si elle lui lit des histoires. » Je ne sais pas parce qu’elle ne m’en laisse plus l’accès. Elle avait juré que la vie de mère n’était pas faite pour elle et j’ai peur de ce qu’elle ferait simplement pour me retirer la garde. « Je me suis juré de pas m’emporter, tu sais, mais ça devient de plus en plus difficile. » Peut-être que c’est ce qu’elle attends dans le fond, que mon impulsivité prenne le dessus. Elle me connaît tellement, elle sait qu’une fois diriger par la colère, je ne maîtrise plus mes actions. Est-ce qu’elle veut m’amener à la faute ?

Tout se mélange dans un coin de mon esprit alors que désespérément, Amos tente de me faire comprendre que tout est encore possible. « Tu te souviens, la fille dont je te parlais quand je suis venu chez toi ? Celle que j’ai blessée pour Sofia... » Je hoche la tête attendant la suite de son explication. « Elle m’a pardonné parce qu’elle m’aime. J’ai fait pareil avec elle. Et je pense pas que ça fait de nous des cons, Cian. Eavan, elle est juste égoïste. Elle n’aime qu’elle et elle s’en mordra les doigts parce que toi, tu te relèveras...» Un léger sourire se dessine sur mes lèvres alors que je croise le regard de mon ami. « Je suis heureux pour toi, Amos. » Il a raison, dans le fond, lorsqu’il assure qu’Eavan est une pure égoïste. Cela a toujours été elle avant les autres. C’était son petit confort avant le mien, ses désirs avant notre couple. « Et si elle se lasse de la petite ? » Parce que ce rôle de mère, parfois, je doute qu’elle soit faite pour cela. « Je la connais, elle est toujours à traîner dans des bars. » Et j’acceptais, son train de vie, ses amis. Parfois, je me demande, ce que je lui trouvais. Parfois, je me questionne sur mes choix. « J’aurais dû rester loin, ne pas retourner auprès d’elle. » que je souffle comme un brin défait. « C’est même pas ma gamine. » Et pourtant… Je l’aime tout autant. « Je veux juste qu’elle aille bien, même si ce n’est pas avec moi. » C’est Ailis le plus important et j’ai ce foutu pressentiment que ce n’est pas auprès de sa mère qu’elle pourra grandir sereinement.

@amos taylor

« Ce qui n’est pas beau, c’est qu’elle t’ait berné, pas que tu aies cru en elle. C’est noble de pardonner. » C’est qu’il a le verbe haut le Taylor quand il s’agit de me rassurer. Il cherche tant à bien faire, à ne rien brusquer quand bien même je ne suis plus très sûr que mes actions aient quoi que ce soit de noble en réalité. J’ai été ce gars un peu trop paumé, celui que la colère avait trop abîmé et qui a voulu se réfugier dans les bras d’une femme au caractère enflammé. J’avais laissé tomber les barrières pour la faire entrer dans mon quotidien, pour tout lui amener et elle avait tellement su en jouer. Je m’étais laissé aveugler par des sentiments que j’étais bien incapable de maîtriser. « Si tu dois en vouloir à quelqu’un, ce n’est pas à toi. Sers-toi de tout ce que tu ressens pour obtenir ce que tu veux et laisse-là pour le prix qu’elle vaut. Ne lui fais pas le plaisir d’être malheureux à cause d’elle, elle s’en mordra les doigts bien assez tôt. » C’est peut-être bien là que réside le problème naissant. Les émotions, elles tourbillonnent à foison depuis le creux de cette histoire, mais c’est toujours la colère qui l’emporte, qui ressort gagnante. Cette rage assourdissante qui pourrait me coûter tant à la fin. Si je m’écoutais réellement, j’en serais déjà venu aux mains avec Eavan, qu’importe qu’elle soit une femme. J’aurais probablement fait un scandale si Charlie ne m’avait pas retenu dès les premiers instants. « Parfois, j’ai peur de me laisser guider par ce que je ressens. » Il saura Amos, il comprendra, j’en suis certain, que parfois la colère est bien trop intense pour que cela en devienne sain.

J’aurais aimé pouvoir me concentrer exclusivement sur ce que viens de m’annoncer Amos. Il semble avoir atteint un véritable tournant mon ami, quelque chose de différent. Pourtant, en rien, il ne tourne la conversation à son avantage, préférant rester sur la conversation que j’avais moi-même amener sur la table. Au creux de chacun de ses mots, résonne le désir de me venir en aide. « Elle te manipule pour t'affaiblir. Je ne suis même pas surpris. » Qui est encore surpris réellement si ce n’est moi-même ? Ils m’avaient tous un peu prévenu mes proches, mais une fois encore, j’avais décidé de n’en faire qu’à ma tête. C’est bel et bien moi qui aie voulu donner une seconde chance à la jeune femme, j’étais assez grand pour décider de m’impliquer dans la fin de sa grossesse. Il est probablement trop tard pour m’en vouloir désormais. « Mais, toi, faut pas que tu le fasses. Et tu dois être pragmatique. » Mes amis sont unanimes à ce sujet, je me dois de me montrer plus malin qu’elle. Surtout, je dois emprunter la voie légale pour ne pas me laisser faire. « J’essaye vraiment, tu sais. » Malgré les horreurs qu’elle peut me raconter, malgré les rencontres qu’elle ne cesse jamais d’écourter me laissant toujours plus avec une image d’Ailis triste de me voir partir. Cette petite qui n’avait rien demander et qui se trouve au milieu d’un conflit qui n’a pas lieu d’exister. Parfois, je me demande si je ne suis pas celui qui lui fait plus de mal au final, à m’acharner ainsi. « C’est la tienne parce que tu l’aimes comme tel. Tu sais, je pense que rien n’arrive par hasard. Si tu ne t’es pas protégé, c’est parce que tu avais un rôle à jouer dans la vie de la petite, en l'occurrence, la protéger de sa mère et de ses errances. » Je hausse les épaules, pas franchement convaincu par les paroles bienveillante de mon ami. « Des fois, je me dis que je suis juste responsable de son malheur, que je devrais arrêter de m’acharner autant. » Mais toujours, je me fais rattraper par les souvenirs de ces six mois passé seul avec Ailis. Je ne l’avais pas rêvé la complicité qui c’était nouée avec l’enfant. « Mais elle me manque tellement. » Je voudrais pouvoir rester dans sa vie, je voudrais pouvoir lui raconter que j’étais le seul à être resté quand ses parents l’ont abandonné. « Tu fais ce qu’il faut en prenant un avocat et si c’est pas suffisant, on trouvera des solutions. Je te laisserai pas tomber, Cian. » Un léger sourire se dessine sur mes lèvres alors que je sens sa détermination marteler chacun de ses mots. « Je sais pas où j’en serais sans vous tous. » que j’avoue lentement pensant au Taylor, mais également à Thomas, Milo ou bien même Charlie. « Vous me canaliser quand parfois j’ai juste envie de partir en trombe pour la récupérer sans demander l’avis de personne. » Jouer au jeu d’Eavan serait bien la pire des idées, j’en ai parfaitement conscience, mais cela ne veut pas dire que l’idée ne vient pas me démanger parfois. « J’essaye de trouver une solution légale, n’importe quoi qui m’aidera à prouver qu’Eavan serait encore bien capable de l’abandonner sans se retourner. » J’ai encore la force de me battre, mais je ne sais pas si cela pourra encore durer longtemps.

« Tu sais quoi ? On devrait se prévoir une virée en mer. Une journée. Le large. Le bateau. Toi et moi. Je ne connais rien de mieux pour y voir plus clair... » Le large. Avec toutes ces histoires, je n’ai pas pris le temps de naviguer le voilier depuis de très long mois. Je me concentre à peine au travail ce qui force Sullivan à me laisser sur la terre ferme avec interdiction de piloter en dehors de la zone d’exercice pour le moment. Je me laisse engloutir par mes émotions et j’en oublie bien des choses. « On peut partir quand ? » que je demande alors sans sourciller. « Je crois que j’ai bien besoin de m’évader. » Même si ce n’est que le temps d’une journée.

@amos taylor