| | | (#)Jeu 28 Jan 2021 - 6:49 | |
| C’est d’un pas irrégulier, autant à cause de la boiterie causée par la cheville que je me suis tordue en tombant juste avant, que par le trop plein d’alcool que j’ai ingurgité ce soir. Je ne sais pas ce qui m’a prit d’exagérer de la sorte. J’avais ressenti ce besoin presque irrépressible de sortir sans forcément dans l’optique de me bourrer la gueule. Et pourtant c’est ce que j’ai fait. Lorsqu’en plus Paul a sorti un joint, je n’ai pas hésité longtemps. Mais, alors que la drogue et l’alcool se mélangeait en moi, me mettant dans un état second et euphorique, j'ai eu l’image de Grace en tête. Sans que je ne sache pourquoi, c’est la jeune Salman qui ne cessait de me revenir. J’avais beau essayé de la faire partir et j’ai réussi l’espace de quelques temps mais lorsqu’au petit matin à 3h je me retrouve à marcher dans la rue, avec un taux l’alcoolémie toujours assez élevé et redescendant tout doucement de l’euphorie du cannabis, je me dirige presque automatique vers l’appartement que Grace partage avec Jordan.
Et lorsque je me retrouve devant le bâtiment, j’observe quelques instants la porte comme si celle-ci allait s’ouvrir toute seule. Ce n’est que le cycliste qui passe à côté de moi en me frôlant qui me fait revenir à la réalité et, d’un pas décidé de me dirige vers la porte qui s’ouvre facilement. Je me retrouve ensuite devant des escaliers et hésite à les monter car j’ai l’impression que les marches bougent mais prend mon courage à deux mains et monte lentement jusqu’à ce que je me retrouve devant l’appartement de la musicienne.
« SALMAN ! EH SALMAN ! OUVRE MOI» criais-je en martelant la porte de mes poings, ignorant totalement que ce n’est pas le seul appartement du bâtiment et que, surtout, elle n’habite pas seule « GRACE! laisse moi pas dehors, faut que tu -» mon poing se stop d’un coup lorsque la porte s’ouvre brusquement. Mon regard se pose sur Grace qui me fixe avec son air des mauvais jours. Nous nous observons quelques instants en silence avant que je ne décide d’abaisser mon poing «T’es tellement belle putain … » soufflais-je en m’approchant d’elle. Sans crier gare, je prend son visage en coupe et dépose mes lèvres sur les sienne, les scellant en un baiser quelques peu fougueux mais dans lequel j’insuffle une certaine douceur et une envie bien réelle de conclure avec elle ce soir. @Grace Salman |
| | | | (#)Jeu 28 Jan 2021 - 10:19 | |
| Les coups sur la porte la réveillent avant même que les cris ne lui parviennent et Grace, encore enfoncée entre les vapeurs du sommeil, des joints et du film non terminé qui tourne toujours sur son écran d'ordinateur, met quelques minutes avant de complètement émerger. Son cœur, lui, par contre, il bat déjà à tout rompre. Elle descend les marches sur la pointe des pieds, comme par peur de se faire réprimander par Jordan, et file jusqu'à la porte d'entrée. Demi-seconde de pause, devant celle-ci. Est-elle sur le point d'ouvrir ? Pour dire quoi, au juste ? L'accueillir à bras ouverts, ne pas poser de questions avant le lendemain, comme l'autre fois ? L'envoyer paître, lui appeler un taxi jusqu'à ce qu'elle dessaoule ? Est-ce qu'elle aura la force de la repousser – et l'a-t-elle eue un jour ? La main gauche tremblante déverrouille la serrure puis baisse la poignée dans une action aussi mécanique qu'hesitante. Il n'est pas trop tard pour dire non, pour prétendre n'avoir rien entendu, pour oublier que Louisa est même venue frapper à sa porte et qu'elle habite toujours 70% de ses pensées. Et la porte s'entrouvre et Louisa est clairement ivre et tellement belle, aussi belle que la dernière fois, peut-être même plus que la première, et comment dire non à ça ? Elle s'était jurée de ne plus jamais y retourner, et pourtant elle a déjà faibli plus d'une fois. Et les lèvres qui se posent contre les siennes font tomber une nouvelle fois toutes ses barrières, chacune leur tour, jusqu'à ce qu'elle soit entièrement sans défense, le cœur battant à tout rompre et tout l'amour qu'elle avait pu lui porter sur le bord de ses lèvres. Grace lui rend son baiser, aussi passionnée qu'elle, sûrement plus emportée par le manque qu'elle a pu ressentir. Un gémissement lui échappe, discret mais trop entêtant pour qu'aucune ne l'ignore. Une main agrippe sa hanche et s'y attache, fort, consciente que si elle s'en retire ce sera peut-être pour la dernière fois. Or jusqu'à présent, ça ne l'a jamais été. “Non, Lou”, qu'elle souffle finalement, la repoussant à contrecœur d'une main plate contre son ventre : “T'es défoncée.” L'envie lui prend d'ajouter comme la dernière fois, et voilà, fatalement, ce que ça lui rappelle : plus d'un an après leur rupture, Louisa ne vient encore la contacter que lorsqu'elle est trop ivre pour se rendre compte de ses actes et qu'elle n'est pas capable de les regretter. La colère monte, malgré elle, malgré la main qui est toujours posée contre son ventre et qui froisse son haut dans une poigne frustrée. “Qu'est-ce que tu fous là ?” qu'elle demande finalement, glaciale alors que ses yeux harponnent ceux de son ex. Elle ne peut pas rechuter. Pas ce soir, pas avec Louisa.
@Louisa Fleming |
| | | | (#)Ven 29 Jan 2021 - 7:15 | |
| Lorsque mes lèvres touchent celles de Grace, c'est une onde de joie et de bonheur qui me prends aux tripes et qui se propage en moi avec force et vigueur. Un tsunami de sentiments les uns plus incroyables que les autres tandis que mon cœur accélère la cadence, pompant un cocktail de magnifiques hormones dans mes veines. Ma respiration, elle, se bloque alors que la main la merveille vient agripper le t-shirt dans mon dos. Je ferme les yeux, laisse mes doigts jouer avec le vêtement de la jeune femme et je profite, pleinement décidé que, ce soir encore, ce sera elle et moi.
Car non, ce n'est pas la première fois que je retourne dans les bras de mon ex copine. La première fois c'était la semaine dernière et mon dieu que c'était magique. C'était doux, c'était fabuleux, c'était sucré, c'était incroyablement bon. Nous avons fait l'amour jusqu'à nous essouffler, nous sommes endormies l'une dans les bras de l'autre et j'étais heureuse de retrouver ces sensations que je n'ai eu avec personne d'autre qu'elle. Le lendemain, pourtant, j'ai résisté à ne pas partir comme une voleuse. J'ai même attendue que Grace ne se réveil pour lui dire que le travail m'attendais et je lui ai promis de la recontacter. J'ai menti sur le travail, mais j'ai réussi à tenir ma promesses. Mon message était maladroit, mes paroles au téléphones étaient bancales. Et pourtant c'est ici que je me retrouve à nouveau, dans les bras de cette jeune femme que j'ai tant aimé et que je n'ai sans doute jamais cessé à aimer. Car les deux inconnues qui ont assouvies mes désirs et mes pulsions cette semaine passé n'ont jamais atteint la cheville de Grace. Avec elle, tout est différent, tout est plus intense.
Malheureusement, Salman semble reprendre conscience de ce qui est entrain de se passer et, reculant, elle stoppe brusquement le baiser. Frustrée, je laisse échapper un petit grognement avant que le regard furibond de mon ex ne se plante dans le mien. Je fronce les sourcils, l'interrogeant silencieusement du regard avant qu'un de mes sourcils ne s'arque lorsqu'elle me demande, cinglante, ce que je fous là.
J'ouvre la bouche pour répondre, ma referme aussitôt. C'est vrai ça, qu'est-ce que je fou là ? Ais-je raison de venir ici ? Que suis-je donc venue chercher ici ? Du réconfort ? Oublier un instant combien ma vie est devenue horrible et incontrôlable ? Essayer, pendant quelques heures, de m'enfermer dans une bulle de bonheur, un havre de paix et de douceur ? Tourner le dos à mes problèmes qui ne prendront que bien plus d'importance lorsque je reviendrais à la réalité ?
Tout à coup je blêmi, plaque une main tremblante devant ma bouche et me recule d'un pas. «Je ...je ….sais..pas» balbutiais-je, incapable d'aligner correctement deux mots et perdant toute mon assurance. Et qu'est-ce que je fais quand je perds mon assurance ? Je change du tout au tout, me cache derrière mon caractère caustique et impulsif et décide de brûler tous espoir qui aurait pu naître sur mon passage «ça t'as pas déranger pourtant, la dernière fois hein ? » mon regard s'assombrit, ma main se baisse et ma voix est ferme et froide, à l'instar de celle de mon ex copine «ça t'as bien plut la semaine dernière, tu peux pas me dire le contraire.» je croise les bras sans dévier le regard « C'est quoi ton problème ?» moi, blessée dans mon orgueil ? Moi, trop fière pour admettre ses torts et avoir une explications calme, posée et logique ? Absolument. @Grace Salman |
| | | | (#)Ven 29 Jan 2021 - 8:29 | |
| Leurs lèvres se détachent et le nœud qui s'est noué dans son bas-ventre commence à fondre alors que la colère reprend sa place, sourde, battante. Qu'est-ce qu'elle vient foutre là ? Pourquoi ne peut-elle pas rester loin de Grace, elle qui avait enfin réussi à amorcer le changement de page, qui cherchait encore à ramasser les morceaux et à s'ouvrir à autre chose ? D'un coup Louisa, aux traits si doux qu'elle aimait tant tracer, à la personnalité si mordante mais toujours tendre à son égard, lui semble d'une cruauté sans égal. Et pourtant elle a raison : elle a aimé, la dernière fois. Parce que malgré le temps, leur dynamique était restée intacte ; elles se complétaient toujours, et Louisa savait toujours ce qu'elle voulait avant même qu'elle ne le sache. C'était doux et passionné, suffisamment pour lui rappeler le meilleur de leur relation et le pire à la fois : le pire, c'était qu'elle l'avait quittée. Sans daigner lui dire pourquoi. Et la Cachemirie n'arrivait pas à penser à autre chose qu'à son incompréhension de l'époque, à la douleur que son départ avait provoqué, à la sensation de tout ça pour ça d'une gamine un peu naïve qui s'était jetée à corps perdu dans une relation malgré ses peurs et qui en avait payé le prix fort. Alors non, Louisa n'a pas tort. Mais elle n'a rien à lui apprendre sur ça. “Mon problème, Lou ? T'es sûre ?” Sa mâchoire se crispe alors qu'elle carre les épaules pour se grandir – son mètre soixante-treize ne suffit pas à estomper un tant soit peu l'impression d'être minuscule. Mais elle continue, parce que Louisa est bourrée, qu'elle ne lui en tiendra pas rigueur le lendemain, et parce que la présence lointaine de Jordan la réconforte : “Mon problème, c'est que tu m'as larguée il y a un an sans daigner me donner de raisons et que tu reviens comme une fleur, là, pour tirer ton coup.” Elle la défie du regard, Salman, elle se veut piquante mais le ton est bien plus blessé qu'elle ne veut bien le laisser paraître. Elle croise ses bras sur sa poitrine, levant le droit avec difficulté et elle prend conscience de son ridicule, là, dans son t-shirt trop grand et un caleçon emprunté à son colocataire, les cheveux attachés en un chignon bien en vrac et le regard courroucé d'un moineau zélé. “C'est quoi, le principe ? Venir dès que t'es en manque, me promettre de me rappeler à chaque fois et disparaître à nouveau jusqu'à ce que t'aies encore envie de baiser ? Si c'était un plan cul que tu voulais, t'aurais pu le dire, tu sais. J'aurais pu m'adapter à ça.” Et ça l'aurait blessée, fondamentalement, voilà ce dont elle est sûre – mais au moins elle aurait su à quoi s'attendre. Elle se serait contentée à défaut de pouvoir réclamer plus. Elle aurait souffert mais de son propre chef. Grace baisse les yeux, éminemment consciente de sa position de faiblesse, de sa propre indécision, des contradictions auxquelles elle doit maintenant faire face. Comme quoi, partir six mois en Inde, ça n'arrange pas miraculeusement tout. “Je te comprends pas, Louisa. Pourquoi tu réapparais comme ça, après plus d'un an, et pour te barrer immédiatement après ?”
@Louisa Fleming |
| | | | (#)Lun 1 Fév 2021 - 3:24 | |
| Je soutiens le regard de Grace sans vriller. J'affiche à nouveau le masque glacial de la protection qui me permet de faire face aux remontrances de mon ex copine, celle que j'ai largué il y a un peu plus d'un an sans lui fournir d'explications. D'ailleurs, pourquoi l'ais-je fais, réellement ? Parce que j'avais peur pour elle ? Peur que si elle restait avec moi elle aurait risquer le même sort que moi ? Peur qu'elle ne se retrouve, comme moi, à l'hôpital pendant quelques jours juste parce que des connards sans cervelles trouvent que l'amour n'a qu'un seul sens? Et si je l'avais laissé décidé, elle ? Si j'avais eu le courage de lui parler et lui expliquer les raisons pour lesquelles je souhaitais mettre fin à notre relation ? Peut-être aurons-nous trouvé un terrain d'entente ? Peut-être aurait-elle insisté pour rester ? Peut-être qu'avec elle a mes côtés tout aurait été bien plus agréable et bien plus gérable ?
Je pince les lèvres et sers les dents mais garde mon regard rivé sur les pupilles brunes de le jeune femme. Ces mêmes yeux de biches qui m'ont fait craquer lors de notre première rencontre. Et sa voix.... lorsque Grace s'exclame ne pas me comprendre, moi et mon principe de réapparaître comme une fleur après un an de silence, tirer mon coup et repartir comme si de rien n'étais puis refaire la même chose une semaine après, je suis à nouveau hypnotisé par sa voix. Un peu cassée, un peu grave en temps normal mais qui a cette adorable tendance de monter dans les aiguës lorsqu'elle s'énerve ou quand elle stress.
Et je suis instantanément à nouveau transporté dans ces moments où tout allait bien. Où nous étions heureuse toutes les deux et surtout sincèrement amoureuse l'une de l'autre. Ces moments d'insouciance où nous parlions de tout et de rien, où nous pouvions refaire le monde pendant des heures entière et où nous n'avions aucun secret l'une pour l'autre. Cette histoire n'aurait jamais du finir, elle aurait du continuer encore et encore, éternellement. N'est-ce pas écrit dans un livre là-haut que nous devions vieillir l'une à côté de l'autre, se moquer des passants en étant assise dans une chaise à bascule sur le porche de notre future maison puis mourir de vieillesse l'une des les bras de l'autre après avoir passe une vie incroyable, belle et magnifiquement remplie ? Qu'est-il donc arrivé à ce livre du destin ?
Perdue dans mes pensées, je met un certain moment avant de revenir sur terre lorsque la voix de Grace se stoppe après qu'elle m'ait demandé pourquoi je réapparais comme ça, d'un coup après un an de silence. « Je ne me comprends pas moi-même» avouais-je finalement dans un souffle en baissant le regard «Je me rappelle de la dernière fois » reprenais-je doucement «Je me rappelle de tout ce que nous avons fait et combien c'était magique » je prends une profonde inspiration et m'avance d'un pas vers la jeune femme «Je ne viens pas ici parce que j'ai envie de baiser, mais parce que j'ai envie d'être avec toi » j'en ai besoin « tu me manque Grace, cruellement.» te quitter était la pire des erreurs, j'aurais jamais du mettre un terme à notre relation, je t'ai aimé et je t'aime toujours, il n'y a personne qui t'arrive à la cheville Voilà tout ce que j'aimerais encore ajouté, mais je ne le fais pas pour la simple et bonne raison que je ne veux pas l'obligé à revenir en arrière, dans un passé dans lequel elle a bien trop souffert. @Grace Salman |
| | | | (#)Lun 1 Fév 2021 - 5:58 | |
| Louisa ne l'écoute pas : elle peut le lire dans ses yeux, qui se sont déjà égarés loin de sa colère et de son indignement, tout à leur ivresse temporaire, à leur contemplation d'un je-ne-sais-quoi dont elle se fout éperdument sur le coup. Elle l'engueulerait presque, déjà à bout de nerfs d'avoir été tirée de son sommeil trop peu réparateur, pour qu'elle daigne lui prêter attention, mais enfin la jeune femme répond – et elle non plus, ne se comprend pas. “C'est bien, on en est au même point”, qu'elle rétorque, le ton toujours acerbe et tendu, et pourtant elle a perdu de sa verve dans sa propre confusion. Pourquoi Louisa a-t-elle décidé de revenir ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi elle d'entre toutes les possibilités ? Elle appréhende la réponse comme une porte derrière laquelle se cacherait un pan complètement différent de leur relation. Un et si qu'elle avait pris soin d'ignorer, de ranger sagement dans un coin de sa tête avant de le verrouiller pour de bon afin d'éviter qu'il ne la ravage trop. Mais cruellement, toujours avec cette tendresse infinie qui est encore de trop, Louisa la libère d'une poignée de mots qui devraient être insignifiants. Ils sont tout sauf ça, insignifiants. Parce qu'ils changeront tout si Grace leur donne ce pouvoir. “Donc”, qu'elle résume en tenant au mieux sa position, trop inquiète que sa vis-à-vis puisse détecter le tremblement dans sa voix, “la semaine dernière t'a rappelé qu'on baisait bien et que ça te manquait. J'ai tout bon ?” Elle simplifie volontairement dans l'optique d'éviter l'autre sous-entendu : Louisa regrettait la rupture et venait ici pour le lui signifier avec l'alcool comme témoin et appui. Où est-ce que ça la laissait, elle, tout ça ? “Qu'est-ce qui a changé, depuis que tu m'as larguée ?” Le ton est plus doux, cette fois, parce qu'il fait place au doute, sinon à la vulnérabilité. Grace déteste évoquer ses échecs, sentimentaux encore moins. Elle n'a pas été amoureuse, depuis Louisa. Elle aurait pu, elle aurait peut-être même du, mais elle s'était irrévocablement verrouillée suite à leur séparation. Et rien qu'à y penser, à la façon dont elle avait eu du mal à se hisser du trou, avec sa main toute recroquevillée et sa fatigue permanente, elle avait envie de pleurer à nouveau. “Tu sais quoi ? Je m'en fous.” Elle déclare ça avec la mâchoire serrée pour ne pas avoir à sentir les larmes montées. Brutalement, elle se retourne, attrape une veste fine et la jette sur son dos à l'envers. “T'es partie, je pars aussi. Chacune son tour.” Elle referme la porte sans prendre peine de la verrouiller et part d'un pas décidé jusqu'à la rue. “Tu viens ? Faut que je marche. Et que je fume.” Son idée de la planter là tombe bêtement à l'eau alors qu'elle se retourne et rencontre ses yeux, ses grands yeux bruns de chiot battu. Elle y a jamais résisté. “J'te propose pas de joint”, s'aventure-t-elle à deviner, en tirant un de sa poche de veste. Elle tend la main pour réclamer un briquet, refusant toujours de la regarder dans les yeux. Une taffe, deux, trois. Un profond soupir, comme un consentement. “Tu veux bien m'expliquer maintenant ?” Elle s'enquiert, sourcils froncés. “Il s'est passé un truc, tu t'es renfermée et...du jour au lendemain, paf, plus rien.” Le paf s'accompagne de paumes levées vers le ciel en ultime signe d'incompréhension. Elle a essayé pourtant, Grace. Mais ça la hante. “Alors que moi, je pensais qu'on était bien, ensemble, je pensais qu'on tenait vraiment quelque chose...” Et c'est la première fois qu'elle le formule ainsi, à haute voix, en avouant son impuissance plutôt qu'en crachant sa haine. Elle ignore si c'est un progrès en soi ou si ça tient davantage de la lassitude. “Et peut-être pas toi, peut-être pas long-terme. Mais je pensais qu'on était à un stade où j'aurais au moins le droit à une raison si tu venais à me jeter.”
@Louisa Fleming |
| | | | (#)Lun 1 Fév 2021 - 6:47 | |
| Le ton de Grace est sec, dur, intransigeant. Mon cœur se serre lorsqu'elle simplifie cruellement la chose pour n'entendre que ce qu'elle veut écouter. «Grace ... » ma voix est faible, mon ton est presque suppliant. J'ai tant envie de la retenir, tant envie de tout lui avouer, mais est-ce que ça changerait réellement quelque chose ? Et puis comment pourrais-je lui expliquer tout cela sans me victimiser ? J'ai mis de nombreux mois à me reconstruire, je n'ai pas honte de ce qui est arrivé et l'affaire avance bien malgré le retard monstre que l'enquête à prise, mais comment faire comprendre cela à Grace ? Sera-t-elle prête à m'écouter sans jugement ? Je n'en suis pas si sûre que ça.
Je me redresse lorsqu'elle se détourne brusquement après avoir dit qu'elle s'en foutait et allais amorcer un pas en avant comme pour la rattraper, mais déjà la jeune femme ressort de l'appartement avec sa veste et referme la porte derrière elle. Se dirigeant vers la sortie du bâtiment, elle m'ordonne presque de la suivre car elle à besoin de fumer et marcher. Docilement, les mains dans les poches, je me met en route derrière elle, la rejoignant dans la rue qui baigne encore dans la lumière chaude des lampadaires. Je ne répond pas lorsqu'elle s'exclame qu'elle ne me propose pas un joint -j'aurais, de toute manière, sans doute refuser- et lui tend simplement mon briquet. Je le garde ensuite en main et joue un peu avec en le faisant tourner entre mes doigts, attendant sagement que Grace reprenne la parole.
Et lorsqu'elle le fait c'est pour me demander des explications. Sa vulgarisation et simplification de la chose est tellement juste que ça pourrait presque être marrant. La suite, elle, me retourne douloureusement les tripes et mes doigts se referment sur eux-même dans mes poches en deux poings serrer. Je sens mes ongles qui se plantent dans mes paumes, laissant cette douleur là s'emparer de moi et prendre le dessus sur la peine psychologiquement que je m'apprête à m'infliger. «On aurait pu aller loin, oui. » on le peut toujours, non? «S'il n'y avait pas cette chose répandue dans le monde qu'on appelle Homophobie » mon ton est doux et calme «Je m'assume totalement, tout comme toi. Je suis du genre à faire des gros fuck à l'humanité entière. Si ça ne leur plaît pas, tant pis, ça ne changera absolument pas le fait que j'aime les filles » je prends une profonde inspiration « mais parfois ça va trop loin » et je fini pas enfin relever mon regard sur Grace
« En octobre 2019 je rentrais de soirée avec Thalia, tu sais, ma collègue de la Navy. On était chahutais comme les deux amies que nous sommes, peut-être un peu trop fortement, j'en sais rien, en tout cas on a fini par attiré l'attention d'un groupe composé de trois hommes et une femme sur nous. Ce qui a commencé par des remarques sexiste des mec, s'est rapidement transformé en remarques homophobe de la part de tout le groupe. » je pince les lèvres et m'avance pour m'appuyer contre le muret «et puis ça a dégénéré. On avait beau se défendre Thalia et moi, nous avons très vite compris que nous n'avions aucune chance contre des hommes et cette femme» je me passe une main sur la nuque « On s'en est très bien sorti malgré tout, à part quelques hématomes et contusions diverse y avait rien de grave. Mais ...» je pose à nouveau mon regard Grace «Alors que j'étais à l'hôpital en observation, je me suis dit 'et si Grace avait été avec moi ?' » je déglutis «Je sais que je n'aurais jamais pu me le pardonner si un jour ça m'arrivait à nouveau et que ce soit toi qui à la place de Thalia. C'est pour ça que je me suis dit que le mieux serait qu'on se sépare » je me passe une main sur le visage et me frotte le front «C'est idiot d'avoir décidé pour toi, t'es grande, t'es majeure, tu aurais clairement été capable de prendre une décision correcte toute seule. Mais sur le coup je n'ai pas réfléchis et quand je me suis rendue compte de mon erreur c'était déjà trop tard ... » j'hausse les épaules, soupire doucement et me tait finalement, la crainte s’emparant maintenant de moi, n'osant pas imaginer la réaction et la réponse de Grace. @Grace Salman |
| | | | (#)Mar 2 Fév 2021 - 2:44 | |
| Elles doivent être drôles, toutes les deux, à marcher à deux mètres de distance l'une de l'autre comme si elles ne se connaissaient pas, avec le même rythme de marche bancale, l'une à cause de l'alcool et l'autre d'un handicap et de la fatigue. Loin est l'époque où elles se couvraient de petites attentions lorsqu'elles marchaient côte à côte, d'une main dans le bas du dos ou glissée dans l'autre. Qu'est-ce qui a mis fin à tout ça au juste ? Quand elle y repense, Grace ne voit que des larmes, de l'incompréhension, un flou artistique qu'elle ne définit maintenant que par les émotions qui l'ont marquée à l'époque. Elle n'est même plus capable de s'en rappeler de manière rationnelle ; seul subsiste le pire sans réflexion préemptive. Alors elle s'autorise à ouvrir les vannes, lâcher ses questions et sa colère tout à la fois, parce que, merde, Grace s'est retenue pendant plus d'un an et s'est heurtée à un mur tout aussi longuement. «On aurait pu aller loin, oui. » Heureusement qu'elle ne la regarde pas dans les yeux, parce que le cœur de Grace se serre davantage encore et qu'elle est presque sûre que la détresse est plaquée sur son visage comme un masque d'Halloween. Et rien de ce qui suit, non plus, n'a de sens : quoi, a-t-elle envie de lui retourner, t'as rompu parce que t'es homophobe ? La pensée la fait sourire, bêtement, de manière sûrement déplacée, et ca tient davantage du réflexe de défense qu'autre chose. “Quoi, ta famille ?” qu'elle demande alors machinalement, parce que c'est peut-être le plus évident. Ça, ça ne l'est pas. Ce n'est ni logique ni compréhensible, et elle se demande un instant si c'est la raison pour laquelle les explications sont si tardives. Il lui faut du temps, à Grace aussi, pour retrouver ses mots, alors que Louisa reste appuyée contre le muret sans oser relever la tête. “C'est idiot, oui, c'est même complètement con.” C'est cinglant, mais elle ignore comment faire passer une année de frustration et de doute face à un aveu si penaud et innocent. Elle ne sait pas faire, tout ça, Grace, et quand elle ne sait pas faire, elle retourne sur ce qu'elle connaît de mieux : la confrontation. “Putain, à quel moment tu t'es dit que j'allais pas te soutenir, t'accompagner dans les démarches, t'aider à te reconstruire si t'en avais besoin ?” Les mots, pourtant, à n'en pas douter, sont plus doux cette fois-ci. “Et surtout, à quel moment tu t'es dit que c'était une bonne idée de me larguer pour ça ? Tu sais, ils t'ont pas attaquée parce que tu es toi, Lou. Ils t'ont attaquée parce qu'ils aiment pas les homos. Et jusqu'à preuve du contraire, j'en suis une, aussi.” C'est horrible, franchement déraisonnable mais elle ne peut s'empêcher d'en vouloir à Louisa. Pour qui la prenait elle, une grande gamine à protéger ? Une couarde qui partirait au moindre signe de turbulences ? De sa main droite, elle désigne son faciès d'un geste allant de haut en bas. “Et Pakpak, en plus. Double peine.” Elle s'humecte les lèvres, sa main triture son joint nerveusement et elle non plus, n'ose plus regarder Louisa en face. “Tu pensais me protéger de qui ? J'ai un gyrophare sur la gueule, on est deux dans ce cas-là. On aurait pas été à l'abri même l'une sans l'autre. La preuve.” Et quoi qu'il en soit, Salman était toujours la première à se jeter dans la gueule du danger sans une seconde de réflexion préalable. Si elle ne se faisait pas tordre la jambe par des abrutis, elle trouverait le moyen de se briser la nuque sur une plage. “Pourquoi tu m'en as pas parlé, Lou ?” C'est la déception qui prend la place, cette fois. L'arrière-goût amer d'un tout ça pour ça. Et elle ne peut même pas se déchaîner, ni renchérir : Louisa a tout dit. Elle regrette déjà. Elle sait déjà qu'elle aurait du faire autrement. Qu'est-ce qu'on ajoute à ça ? “J'sais même pas quoi te dire, Lou, c'est...” C'est horrible, impensable, ça se passe de commentaires ; peut-être qu'il faudrait la réconforter, s'excuser qu'elle ait eu à traverser ça, et qu'elle ait senti qu'elle devrait le faire seule – mais rien de tout ça ne sort tant le reste l'occulte : “Pourquoi revenir maintenant ?” qu'elle questionne, daignant enfin relever le menton. “Quelqu'un t'a dit que j'étais partie et t'as attendu mon retour ? Ou c'est purement fortuit ?”
@Louisa Fleming |
| | | | (#)Mar 2 Fév 2021 - 5:44 | |
| Je secoue machinalement la tête lorsque Grace me demande si ma famille est homophobe. Non, elle ne l'a jamais été. Et elle ne le sera jamais. Et quand bien même l'aurait-ils été un jour, mes parents savaient parfaitement que leur avis m'importait peu. Ma mère, avec ses 4 gamins de trois pères différents n'est pas en mesure de juger qui j'aime et avec qui j'ai envie de passer ma vie. Mon père, lui, il est à l'autre bout du monde, donc il n'a de toute manière pas son mot à dire. Toutefois, ils ont tellement facilement accepté mon coming-out que ç'en était presque destabilisant. Dana a haussé les épaules avec un « ok » avant de reporter son attention sur le journal, Richard, son mari actuel, s'est un peu plus intéressé à mon ressentit et Owen mon père était tout bonnement heureux que je sois heureuse. C'était simple, rapide et c'est passé comme une lettre à la poste. Et c'est sans doute ce qui m'a conforté dans l'idée que l'amour ne connaît de genre et qu'on aime l'âme qu'on aime sans devoir se poser des questions.
Malheureusement, j'ai un peu trop rapidement compris que j'ai juste eu beaucoup de chance et que ça ne passe pas aussi facilement chez tout le monde. De nombreux amis se sont vu viré de la maison, se retrouvant à la rue du jour au lendemain, d'autant ont été forcé de suivre un traitement barbare qui devrait être interdit et d'autre encore ont tout simplement été obligé de coupé les ponts avec leur famille pour se protégé physiquement. L'homophobie est une chose horrible, cruelle et incompréhensible. Je n'ai jamais compris pourquoi l'amour de deux personnes du même sexe pouvait répudier à ce point les gens et surtout pourquoi deviennent-ils violent à ce point ? J'ai déjà essayé d'engager le dialogue avec des homophobes, ceux qui croient dur comme fer que l'homosexualité est une maladie qui devraient être puni par la loi, mais j'ai très vite abandonner, tant les arguments étaient incompréhensible.
Et me voilà là, aujourd'hui, à expliquer à Grace le pourquoi du comment j'ai décidé si brusquement de mettre fin à notre idylle en octobre 2019. C'était con, c'était idiot, c'était absolument pas réfléchit. Mais alors, pourquoi l'avoir fait ? Pourquoi avoir cassée cette histoire ? Pour protéger celle qui a été mon premier amour et qui l'est toujours ? Elle le dit si bien, elle est dans le même cas que moi, avec la double peine d'avoir un handicap aussi. Lorsqu'elle me demande pourquoi je ne lui en ai pas parler, j'hausse les épaules et secoue la tête « Parce que le mal était déjà fait» soufflais-je en enfonçant mes mains dans les poches de mon gilet «Lorsque je me suis rendu compte que j'étais vraiment conne d'avoir mis fin à notre histoire, je me suis dit qu'il était déjà trop tard pour faire marche arrière et que t'étais sûrement déjà passé à autre chose » je soupire doucement «Moi qui prône toujours le fait que la communication est la base d'une relation seine, j'ai vraiment faillis à mes propres principes » un petit rire jaune s'échappe de mes lèvres, alors que je lance un coup d'oeil vers Grace
« Et je savais même pas que tu étais partie» avouais-je finalement « Si j'ai débarquée la semaine dernière ce ...C'était vraiment du pur hasard» assurais-je «J'aurais très bien pu écourter la nuit d'une personne inconnue qui m'aurait viré à gros coup de pied dans le derche » j'hausse les épaules « Le hasard à fait que c'était toi qui a ouvert la porte. J'avais une chance sur je ne sais combien de milliard, et c'est sur toi que c'est tombé» Coïncidence ? Hasard ? Ou carrément destin ? Est-ce un signe ? Si oui, que signifie-t-il ? « J'ai regardé tous les épisodes de ROA» dis-je finalement, changeant ainsi brusquement de sujet. De toute manière, qu'y a-t-il de plus à ajouter au dernier ? Je pense avoir dit tout ce que j'avais sur le cœur, à Grace maintenant d'en faire ce qu'elle veut. @Grace Salman |
| | | | (#)Mer 3 Fév 2021 - 6:35 | |
| Une agression. Voilà. Leur relation s'est achevée à cause d'une agression et c'est le seul constat que Grace peut en tirer après un an de questionnements : Louisa a été agressée pour sa sexualité et elle a voulu la préserver du risque, d'elle-même, de la potentialité d'un déchirement plus violent encore. Elle pourrait le comprendre, imagine-t-elle : après tout, n'a-t-elle pas subi les mêmes questionnements, la même peur de s'imposer à autrui ? Au lendemain de son AVC, elle avait eu peur, pour elle et pour les autres. Pour son autonomie que d'autres auraient à combler. Pour Claire qui avait dû prendre la place d'un parent ou d'une infirmière au lieu de celle de la petite-amie. Elle s'était sentie humiliée, diminuée en tant que personne et craignait que par extension Claire commence à l'envisager ainsi. Ça avait peut-être été le cas, d'ailleurs. C'était peut-être pour ça que ça s'était terminé. Est-ce que ça lui suffit ? Elle est incapable d'en tirer un enseignement, en tout cas. C'est trop tôt, trop frais, trop brûlant encore pour réussir à faire la part des choses. Qu'est ce que tout cela signifie, pour elles ? Une trêve dans la guerre qu'elle mène mentalement à Louisa depuis la rupture ? Le début d'une cicatrisation qui a trop tardé ? Un renouveau pour elles ? Elle n'ose pas l'envisager, ni même s'autoriser à effleurer la possibilité. Elle a passé la semaine à s'en convaincre : sa dernière nuit avec Louisa ne signifie rien de concret. Un besoin physique et la facilité de leurs échanges au mieux. De la nostalgie au pire. Alors quand Louisa évoque le fait qu'elle n'est pas revenue vers elle en pensant qu'elle est passée à autre chose, Grace opine du chef sans conviction. C'est bien plus aisé que d'admettre qu'elle est toujours bloquée sur cette rupture et que les quelques relations qui ont suivi se sont soldées sur de cuisants échecs. “Je vois ça”, qu'elle lâche, sardonique mais plus douce, moins revêche que les minutes d'avant. Louisa lui avoue avoir subi un traumatisme, elle estime que la moindre des choses serait de lui montrer de la bienveillance et laisser sa rancœur de côté. ”Je venais juste de rentrer, tu sais”, lâche-t-elle alors que son regard se tourne vers celui de Louisa quand celle-ci avoue être venue par le plus complet des hasards. “Quand t'es venue. J'étais rentrée le matin même.” Ce n'est pas Grace qui parlera de destin, elle s'est vaccinée contre les faux-espoirs ; mais ça lui paraît suffisamment drôle comme coïncidence pour être mentionné. “C'est pour ça, j'me suis demandée...” Elle ne finit pas. Si t'étais au courant. Si t'es venue exprès. Si je t'avais manqué. Ça reste en elle. Et, de toute façon, Louisa change de sujet en la voyant s'interrompre. “Ah ouais, t'as regardé ?” C'est un vrai sourire qui se dessine sur ses lèvres cette fois. Un sourire flatté, secrètement heureux, à l'idée que son ex ait pu suivre ses aventures, en partie pour elle. Elle ne demande pas, préfère se maintenir dans l'illusion. “Jusqu'au bout ? T'as aimé ?” Ça lui paraît presque une autre vie. Isaac, leur complicité développée malgré les caméras, la satisfaction incroyable d'avoir pu s'arracher à ses peurs pour partir et arriver si loin dans le trajet... “Tu vois, Lou, si tu m'avais pas larguée, tu serais riche et célèbre toi aussi.” Un rictus ironique se dessine sur ses lippes alors qu'elle hausse les sourcils d'un air tentateur, taquine. Elle force le trait, évidemment : depuis son retour, on a dû la reconnaître une fois, et c'était surtout parce que ses altercations avec son beau-père, les flics, le go-fast boutonneux et un plan cul qui les hébergeait avaient marqué les esprits. “J'ai gagné autour de 300 balles. Juste de quoi payer mon aller pour Cochin.” Elle se sent obligée de le préciser, parce que Louisa aimerait le savoir, imagine-t-elle. Elle savait combien le pays de sa mère était important à ses yeux et combien elle avait trépigné de pouvoir partir en Inde et au Cachemire. “Je voulais te dire que je partais, à l'époque, mais j'étais sûre que tu voulais plus entendre parler de moi.” D'un geste bref elle écrase le mégot de joint sur le muret et se remet à marcher sans un mot, son pas plus assuré et plus léger, comme marchant sur un fil imaginaire et un peu tordu. “T'habites toujours à Toowong ?” demande-t-elle, le nez vers les étoiles, et tant pis si c'est étrange, tant pis si elle devrait faire demi-tour pour ne pas se retourner, tant pis si Toowong est à des kilomètres et qu'elle est toujours en pyjama. On verra demain. Avec Louisa, il n'y avait toujours que l'instant T.
@Louisa Fleming |
| | | | (#)Mer 3 Fév 2021 - 7:32 | |
| On dit toujours que lorsqu'enfin on avoue ce qui pèse sur notre conscience depuis trop longtemps, on se sent alors bien plus léger. Est-ce le cas pour moi aussi ? J'avoue que je n'en sais trop rien. D'un côté j'ai envie de dire que oui, j'ai réellement l'impression que ce poids a enfin quitté mes épaules. Mais d'un autre côté j'ai vécu avec celui-ci depuis tellement longtemps que je me sens tout à coup mise à nue et tellement fragile face à la jeune femme, comme si une c'était une partie de moi-même qui s'était volatilisée, une partie qui me protégeait inconsciemment et qui m'aidait à tenir la face. Je pense qu'il va me falloir un certain temps pour m'habituer à cette situation et surtout à accepter le fait que la vérité soit sortie maintenant.
En attendant, j'explique à Grace que ma visite la semaine dernière était vraiment un hasard des plus pur du monde, que je ne m'attendais pas vraiment à la voir là, sur le pas de la porte. Et c'est ainsi que j'apprends qu'à quelques heures près, je n'aurais sans doute pas eu cette chance car elle était rentrée le matin même. C'était peut-être pour ça, parce qu'elle était en plein jet lag qu'elle n'a pas forcément opposée une grande résistance lorsque je lui ai sauté dessus ? Dans le fond, j'espère que la raison est tout autre, mais soit.
Je décide de changer de sujet et lui parle du fait que j'ai regardé ses performances dans ROA. C'est, avec un sourire bien plus sincère, que Grace rebondit, heureuse, sur cette information, me demande si j'ai vraiment regardé jusqu'au bout «Ouais, du début à la fin ! » hochais-je la tête «J'ai tellement rigolé en voyant comme ton binôme s'est fait coursé par un chien et j'ai vraiment eu de la peine pour votre groupe à la fin. » je souris doucement « La course de chameau aussi elle était pas mal épique je dois avouer» j'hausse les épaules «Si un jour je te propose de faite du rafting, tu le ferais où t'es trop traumatisé ? » la taquinais-je, sourire amusé sur les lèvres, bien heureuse que le ton de la conversation soit devenue bien plus doux et léger.
J'apprends alors que Grace a gagné 300 dollars, ce qui était juste assez pour prendre un billet et partir à Cochin. Hochant doucement la tête, je lui souris pour lui montrer que je me rappelle parfaitement à quel point l'Inde et la Cachemire étaient important pour elle et combien ces deux pays étaient significatifs à ses yeux. Lorsque, pourtant, elle me dit qu'elle avait voulut me prévenir de son départ, je balaie ses paroles d'un geste de la main «Non mais t'avais pas vraiment de raison à venir me l'annoncer. Ça faisait des mois qu'on ne s'étaient plus vues donc bon ... » j'hausse les épaules et me pousse du muret pour lui emboîter le pas lorsqu'elle se met en route.
«Non j'ai déménagé à Spring Hill » dis-je finalement en enfonçant mes mains dans les poches de mon gilet «Je suis en colocation maintenant, avec deux fille. Une est sympa, tranquille, fêtarde et toujours joyeuse, l'autre elle … » je pince les lèvres, réfléchissant rapidement sur comment je peux décrire Anastasia «Elle a un jour volé mon sac à dos, je l'ai coursé dans une bonne partie du quartier à côté de la base militaire puis je l'ai rattrapé, j'ai récupéré mon sac et je lui cassé le nez pour bien lui faire comprendre son erreur» avouais-je comme si c'était la chose la plus naturelle et normale à faire «Et maintenant on est coloc et ...ça se passe plus ou moins bien » je lance un coup d'oeil vers Grace « C'est la sœur de Auden Williams. Tu le connais, non ? Tu vois le personnage que c'est ? Ben elle est pareil. A croire qu'ils sont tous dérangés dans cette famille...» je secoue la tête et reporte mon attention sur le trottoir, marchant au rythme de la jeune femme, curieuse, quelque part, de savoir où nos pas nous mèneront. « J'ai un chien aussi» reprenais-je « Un berger australien que j'ai adopté en janvier 2020» @Grace Salman |
| | | | (#)Sam 6 Fév 2021 - 2:09 | |
| “T'aurais adoré, tu sais. C'était dingue, comme expérience. Et j'en avais besoin, je crois, de m'éloigner de tout, de me retrouver à dormir trois heures par nuit dans des vans d'inconnus et...” Et trop de détails, et le fait qu'elle regrette que Louisa n'ait pas pu faire partie de l'aventure est trop prégnant, et l'enthousiasme avec lequel elle parle de ses envies d'évasion la ramène aux pires moments. Car c'est en partie la rupture qui l'a conduite à tout plaquer. “Bon. T'as compris”, qu'elle conclut avec un sourire un peu piteux. Elle n'a pas envie de s'étaler sur ça, pour l'instant, et elle le réalise trop tard. Ça a toujours été si simple de s'enthousiasmer face à Louisa que l'habitude revient presque d'elle-même. “Tu déconnes ? Bien sûr que j'y retournerais. Quitte à reprendre les mêmes accidents.” Typique de Grace Salman : s'en prendre plein la tronche mais y retourner pour les cinquante futiles secondes de fun qui avaient précédé. Et sans même s'en rendre compte la voilà qui mentionne le Cachemire, Srinagar, le Kerala, le Pakistan. Ses yeux brillent et ses joues s'empourprent de bonheur et enfin, les dernières barrières ont cédé, toute fatigue a déserté son visage et sa colère est repartie comme elle était venue : sans même qu'elle n'en prenne conscience. Et, cette fois, c'est à elle de devenir curieuse. Elle veut savoir ce qu'est devenue Louisa depuis leur dernière entrevue, ce qu'il advient de ses projets, à elle. Comment vont ses parents, autour de quoi son quotidien tourne aujourd'hui, qui est-elle en tant que personne ? Quelqu'un de suffisamment changé, déjà : elle habite à Spring Hill, maintenant. “Spring Hill, hein ? T'avais même pas besoin de moi pour devenir riche et célèbre, on dirait.” Le haussement de sourcils amusé parait disproportionné mais son étonnement est réel, à elle qui revient sans le sou et est condamnée à crécher chez son meilleur ami faute de revenus concrets... “Ouais, je le connais. Enfin, de visu surtout. C'était un...ami... collègue...mentor d'une ex. Quand je l'ai rencontré, il s'est engueulé avec sa femme et sa sœur.” Le résumé semble légitime. Elle fait une légère moue, poursuit pour nuancer : “Un bon artiste quand même. On a collaboré plusieurs fois. C'est un mec brillant.” Le côté imbuvable, suppose-t-elle, est aussi là pour ajouter du charme, une plus-value sans prix dans leur domaine. Un peu à la Sinatra, ou à la Gauguin si on allait vraiment au plus glauque. “Ok. Wow. Ça fait du monde.” Elle qui s'était toujours envisagée plus solaire et sociable que Louisa, besoin d'approbation extérieure oblige, s'est prise à apprécier le calme de la solitude depuis son retour, après des mois à le craindre. Il s'avère que rester seule n'est plus aussi cauchemardesque que ça l'a été. Et ce soir, pourtant, elle ne se voit pas rentrer chez Jordan. Quitte à dormir dans son lit. “Ok, donc j'imagine que ça ferait mauvais genre si je te demandais qu'on aille chez toi”, qu'elle reprend avec une moue taquine, tentation à la commissure des lèvres. “Pour rencontrer Byron, forcément.” Qu'elle ne s'y méprenne pas : ce n'était absolument pas pour remettre le couvert de la semaine passée.
@Louisa Fleming |
| | | | (#)Dim 7 Fév 2021 - 22:16 | |
| Plus Grace me parle de son expérience pendant la course infernale, plus je regrette que ma candidature n'ai pas été retenue. Sans doute m'y suis-je prise un peu trop tard. En vrai, je pense que si je n'avais pas autant hésité, j'aurais facilement pu être de la partie. Mais au final, ça ne m'a pas tant déranger que ça, car j'ai pu voir Grace en action et franchement, ça en valait la peine. Elle était incroyable et l'est toujours autant. J'ai toujours admiré sa force de caractère et son besoin constant d'action. Lorsqu'elle s'exclame qu'elle n'hésiterait pas à remonter dans un rafting, je laisse échapper un petit rire « Je te reconnais bien là, Grace Salman» soufflais-je, amusée «Tu n'as absolument pas changé, t'as toujours autant peu froid aux yeux et tu seras toujours du genre à agir avant de réfléchir » c'est ce que j'aime chez toi, c'est ce qui m'a fait craquer lorsqu'on s'est rencontré la première fois.
Lorsque nous nous mettons en route, notre discussion houleuse semble définitivement derrière nous même si je sais qu'elle sera encore dans un coin de nos tête pendant quelques temps. Dans tous les cas, j'explique à Grace que j'ai déménagé et hausse les épaules lorsqu'elle raye que j'ai pas eu besoin d'elle pour devenir riche et célèbre. «Je suis passé lieutenant avec le salaire qui va avec, tu sais » haussais-je les épaule l'air de rien, avec toutefois un pincement au cœur en me rappelant que je ne suis pas prête à reprendre ma place derrière le volant de Bernard. J'avoue que j'attends le 15 février et donc mon entretien avec Manchester avec une grande impatience car il est celui qui décidera si oui ou non il me laissera voler à nouveau.
Lorsque je lui parle de Auden, le propriétaire de l'appartement dans lequel je loue ma chambre de colocataire, Grace m'apprend que le peintre était un homme important dans la vie d'une de ses ex et qu'elle a elle-même déjà collaboré avec lui. Je ne peux, pourtant, pas m'empêcher de souffler avec dédain lorsqu'elle ajoute qu'il est quelqu'un de brillant. «Brillant de ses mains, mais pas par son esprit » grognais-je, faisant référence à la seule fois où je l'ai vu et où m'a traité de bonniche. Un vrai connard. «ça va, je le vois pas souvent, donc ça m'arrange bien »
Nous en venons à parler du fait que j'habite avec deux autres filles et mon chien, ce qui étonne Grace qui me demande, malicieuse, si ça ferait pas mauvais genre qu'elle vienne chez moi. Mon cœur accélère subitement ses battements et c'est un sourire presque niais qui s'affiche sur mon visage lorsqu'elle ajoute que ce n'est que pour rencontrer mon chien. « Oui, évidemment, pour voir Byron, bien sur» hochais-je la tête avec une certaine ironie dans la voix «Tu sais, on est samedi soir, mes coloc doivent être de sortie entrain de faire la fête. Et quand bien même seraient-elles à l'appartement, elles n'auront pas leur mot à dire » j'hausse les épaules d'un air naturel entendu avant de bifurquer sur la gauche pour prendre une rue qui longe un parc «Donc si tu veux venir chez moi, je t’accueille avec plaisir » @Grace Salman |
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