J’ai signé un nouveau contrat de danse ce matin, pour une nouvelle music video et je suis complètement excitée à l’idée que les choses bougent un peu. Je n’en suis pas encore au point de pouvoir vivre de la danse, pas vraiment, mais plus je trouve des contrats pour des clips, plus je peux faire entendre parler de moi et plus cela peut m’avancer pour un jour pouvoir faire de cela mon boulot plein temps. Je passe donc la matinée au studio de danse avec les réalisateurs pour apprendre la chorégraphie qu’ils ont montée pour le clip et pour m’entraîner. Comme toujours, je me donne à fond, je montre de quoi je suis capable et je m’investis à deux cents pourcents dans la journée. Il est tout juste dix-sept heures lorsque les responsables nous annoncent que la journée est finie. J’ai bien évidemment tellement donné de moi que je suis épuisée et que pourrais sûrement m’endormir bien rapidement ce soir.

Lorsque je sors du studio climatisé, la chaleur de Brisbane est encore bien présente et m’étouffe un peu. Je rentre rapidement chez moi pour me glisser sous une douche avant d’enfiler un legging de sport, le premier t-shirt que je trouve et d’enfoncer une casquette sur la tête. Nous sommes vendredi, et le vendredi soir j’ai toujours rendez-vous avec Cian pour passer la soirée avec lui et même si je suis claquée il est hors de question que je ne loupe notre rendez-vous. Ce soir, nous avons prévu de passer la soirée chez lui. Nous varions souvent les activités, entre chez lui, chez moi lorsque Nick est absent ou même le cinéma pour voir les films que nous avons envie de voir tous les deux. Je fais des efforts pour ne pas trop m’inquiéter pour lui, et en échange il n’essaye plus de me mettre à la porte. Nous avons retrouvé une routine avec Cian, ou du moins nous avons repris l’habitude de nous revoir souvent. Les choses se sont un peu arrangés pour lui, même si il n’a pas récupéré la garde de sa fille, il peut la voir de temps en temps, toujours en compagnie d’Eavan bien sûr. Cela me fait toujours mal au cœur de voir qu’elle est revenue comme un cheveu sur la soupe et qu’elle impose toutes ses règles à l’irlandais qui s’est pourtant occupé de la petite pendant des mois. Pour ma part, je demande souvent des nouvelles de sa fille, parce que je dois bien l’avouer, Ailis me manque. Je m’étais habitué à avoir cette petite bouille dans ma vie, à la voir lorsque je voyais Cian. Son petit rire de bébé, ses joues rondes et ses grands sourires me manquent, mais je préfère ne pas en parler, parce que je ne veux pas enfoncer le couteau dans la plaie alors que la situation est loin d’être idéal pour le châtain. Une partie de moi est quand même soulagée qu’il puisse la voir de temps en temps. J’en dors un peu mieux.

Une fois installée au volant de ma voiture, je prends donc le chemin de son appartement que je connais à présent par cœur et m’arrête seulement pour acheter un gros pot de glace avec des bouts de cookies. C’est donc une grosse demi-heure plus tard que je monte les marches et que je frappe à la porte de son appartement. Il ne tarde pas à apparaître. « Hello ! » Je lui dis avant de venir rapidement déposer un baiser sur sa joue, un peu par habitude. « Comme promis, je n’ai rien amené pour ce soir. Enfin… Sauf un pot de glace, j’avais envie de glace. » Je lui dis alors que je lui avais promis de ne pas passer des heures dans la cuisine cette fois-ci.

@Cían Atwood

« Papaaaaaa. » Mon sourire s’illumine dès la seconde où Ailis arrive en hurlant dans ma direction. Du coin de l’œil, la réaction d’Eavan ne m’échappe en rien. Elle est loin d’être ravie que la petite m’appelle ainsi et qu’elle se mette à courir dans ma direction dès l’instant où ses yeux m’ont remarqué sur la plage. Je me fiche bien de ses états d’âme et me concentre sur la petite tête blonde qui tombe sur ses genoux avant de se relever pour reprendre sa course en galopant dans ma direction. « Mon bébé ! » Je la prends dans mes bras, la faisant tourner dans les airs, m’emplissant de son rire de petite fille. Comme à chaque fois, j’ai le droit au plus gros des câlins alors que je couvre ses petites joues potelées de baiser bruyant. « Ça va ma puce ? » Elle hoche la tête et commence à me parler dans son langage de bébé où je décèle quelques mots bien mieux prononcer que lors de notre dernière rencontre. Elle grandit loin de moi et l’idée me serre le cœur avec force. Par politesse, j’échange un regard avec sa mère avant de me concentrer sur Ailis qui veut aller voir les vagues de plus près. Elle me parle de tout Ailis, elle prononce autant de papa que possible et sa mère nous colle comme si j’allais soudainement m’enfuir avec sa fille sous le bras. Elle ne lâche en rien Eavan, elle a soi-disant décidé de rester, d’être une mère quand je sais qu’elle confie déjà trop souvent la petite à une baby-sitter. Malgré tout, je profite de l’instant, m’enivre du parfum de bébé d’Ailis, écoute chacun de ses rires, reçoit chacun de ses bisous baveux. « On va rentrer Ailis. » Vingt minutes. C’est tout ce qu’elle m’accorde aujourd’hui semblerait-il. « No. » Elle ne veut pas la petite blonde, elle secoue la tête et s’accroche à ma jambe avec force. « Eavan vous venez d’arriver. » que je souffle doucement. « Et j’ai autre chose à faire Cian. » Elle aboie plus qu’elle ne parle et Ailis se cache encore plus dans mon jean. « Alors laisse là moi, je te la ramène ce soir. » Elle pouffe, lève les yeux au ciel et se baisse pour prendre la petite dans ses bras. « Va falloir que ça cesse tout ça Cian. » « Papa… » Elle commence à pleurer Ailis et je me sens désemparé a la regarder tendre les bras vers moi. « Veux papa. » Le regard noir que me lance mon ex compagne me fait bien comprendre que je ne dois pas dépasser les limites qu’elle dresse depuis son retour. Je dois m’écraser si je ne veux pas perdre ce qu’elle veut encore bien me donner. « On se revoit bientôt, promis. » Elle ne comprend pas cela Ailis, alors elle pleurs de plus belle. Et comme un con, je reste planter sur le sable, regardant Eavan s’éloigner avec une petite fille qui pleures beaucoup trop fort pour que j’en reste de marbre.

Il aura fallu une séance de boxe et un footing de plus d’une heure pour que je retrouve mon calme et que l’envie de tout casser autour de moi s’atténuer. L’image d’Ailis pleurant pour moi ne s’éloigne pas de mon esprit me faisant bouillir de l’intérieur, mais j’ai retenu mes leçons et ne réagis pas comme j’aurais pu le faire, il y a encore quelques mois de cela. J’ai envoyé un message à Charlie pour lui expliquer ce qui s’était passer et un autre à Thomas pour des conseils. Je n’ai pas annulé la venue d’Oakley comme c’est devenu notre rituel, je suis simplement allé me doucher pour l’accueillir dans un état décent. J’ai reconstruit les barrières et prétends que tout va bien en réalité dès l’instant où elle passe la porte de mon appartement. « Hello ! » Je la salue dans un sourire, m’écartant pour la laisser entrer. « Comme promis, je n’ai rien amené pour ce soir. Enfin… Sauf un pot de glace, j’avais envie de glace. » Un léger rire m’échappe alors que je lève les yeux au ciel. « Donc t’as amené quelque chose quoi… » Je crois qu’elle ne pourra jamais venir les mains dans les poches, ce serait probablement la pire des insultes selon elle où je ne sais quoi. « Je vais plus avoir envie d’une bière pour le moment. » Je fais toujours attention en sa présence, mais ce soir, je vais avoir besoin de boire, je le sais. Juste un peu, pour anesthésier tout ça. « Alors cette audition ?! » Qu’elle me parle d’elle, de la pluie et du beau de temps, de tout sauf d’Ailis en réalité.

Ca fait du bien que les choses soient simples en ce moment, que tout se passe bien dans ma vie. J’ai l’impression que cela fait des années que les choses n’ont pas été aussi relax. Ma relation avec ma famille et mes amis les plus proches se passent bien, mon boulot aussi, surtout que je viens de signer un nouveau contrat pour danser pour un artiste sur un clip vidéo et que l’idée me ravit. Je dors un peu mieux depuis que les choses avec Cian se sont arrangés et surtout que j’ai appris qu’il peut revoir Ailis, même si cela n’est que quelques heures par-ci par-là. Je sais que tout ne sait pas arranger pour lui, mais j’ai envie de croire qu’il va pouvoir vraiment retrouver sa fille bientôt. Je suis optimiste. L’idée de passer la soirée avec lui me fait d’ailleurs sourire et même si je suis épuisée de ma journée de danse, je sais que de passer du temps avec l’irlandais est toujours quelque chose que j’apprécie. Une douche rapide, un arrêt au supermarché pour acheter de la glace et c’est une bonne grosse demi-heure plus tard que je me gare devant son immeuble. Je suis un peu en retard mais je sais bien que le châtain ne m’en tiendra absolument pas compte. Il vient rapidement m’ouvrir et je déposer un baiser sur sa joue avant de pénétrer dans l’appartement. Je retire mes chaussures et lui montre le pot de glace que j’ai ramené, ma préférée. « Donc t’as amené quelque chose quoi… » Je me tourne vers lui. « Ouais, mais c’est pas pour toi. » Je lui réponds avec un grand sourire avant de lui tirer la langue comme une gamine et de rire. Mais de toute façon, je ne pourrais jamais débarquer chez lui les mains vides, je me connais.

« Je vais plus avoir envie d’une bière pour le moment. » Je me laisse tomber dans le canapé et hoche la tête. Je vois bien qu’il n’est pas au top de sa forme, mais je ne fais pas de commentaire, et je ne pose pas de question. J’ai compris que si il a besoin de parler, il sait que je suis là et qu’il ne sert à rien de le forcer. Je me doute que cela a à voir avec Ailis, parce qu’il devait la voir aujourd’hui, mais je préfère ne pas demander. Il va se chercher une bière, me ramenant une cuillère au passage et se laisse tomber à côté de moi. « Alors cette audition ?! » Je lui adresse un sourire. « Ca c’est super bien passé. J’ai même signé le contrat ce matin et j’ai commencé à bosser la choré aujourd’hui. » J’étouffe doucement un bâillement comme si mon corps a besoin de prouver mes propos. « Désolée. » Je ris un peu. « Du coup, j’ai passé la journée à danser, c’était super cool. Et les autres danseurs avec qui je suis sont géniaux. On a des styles un peu différents et je trouve ca génial parce que c’est souvent comme ca qu’on peut progresser. » Je relève la tête vers Cian. Je sais que je m’étale un peu, mais je crois qu’il commence à avoir l’habitude des qu’il me pose une question sur quelque chose qui me passionne.

« Et toi ? Ca a été ta semaine ? » Je lui demande en venant prendre une bouchée de glace tout en le regardant.

Au fur et à mesure des soirées improvisés à mon appartement, j’ai pu remarquer qu’Oakley prenait toujours la peine de frapper pour s’annoncer. Elle sait parfaitement que la porte n’est jamais verrouillée et la plupart du temps, je me contente de crier pour lui dire d’entrer, mais c’est comme si elle savait que parfois, j’ai besoin d’une minute à moi avant de pouvoir lui ouvrir. Ce soir, j’en ai définitivement besoin. Rien de bien long, juste assez pour me défaire de mon air probablement triste et enfiler le masque chaleureux qui fonctionne en toute circonstance. Non pas que je cherche à me cacher d’elle, mais elle n’est pas venue ici pour réaliser une fois encore que je n’aie pas le moral. C’est devenu une habitude que je déteste chez moi, de me laisser mettre à terre par tout ce qui se passe en ce moment. C’est montrer des faiblesses quand j’ai passé ma vie entière à vouloir les cacher au plus profond de moi. Dernièrement, c’est un peu comme s’il n’y avait plus vraiment de placer pour dissimuler quoique ce soit que tout se devait de transparaître. Pourtant, je fais encore l’effort de souffler un coup et d’afficher un sourire bienveillant. Encore plus lorsque je réalise qu’une fois encore elle est venue avec les mains pleines. « Ouais, mais c’est pas pour toi. » Elle essaye de se rattraper et je retiens un rire face à la façon dont elle me tire la langue. « Si tu le dis. » que je la taquine alors que je réalise à quel point j’ai bien fait de ne pas annuler. Oakley, c’est comme un vent de fraîcheur qui vient souffler sur l’ambiance morose qui règne depuis des semaines dans mon appartement. Elle apporte une légèreté que je ne sais plus trouver seul et c’est terriblement vivifiant. J’en avais cruellement besoin…

C’est le même rituel qui se met en place, je lui propose de boire quelque chose, me prends une bière alors qu’elle se contente de limonade et ce soir de sa glace en plus. Et comme toujours la conversation se lance de la manière la plus aisée qui soit, essentiellement diriger vers elle, pour ne pas réellement se soucier de moi. « Ça s’est super bien passé. J’ai même signé le contrat ce matin et j’ai commencé à bosser la choré aujourd’hui. » Un sourire se dessine sur mes lèvres alors qu’elle déballe les informations à toute vitesse avant de pouvoir me laisser en placer une alors qu’elle baille. « Je suis vraiment content pour toi, tu le mérites ! » Je l’ai vu bosser comme une acharnée pour réussir ce casting et obtenir la place. Elle est en train de réellement s’épanouir dans ce qu’elle aime et je dois avouer que c’est plaisant à voir. Oakley est littéralement en train de prendre son envol et je serais fier un jour de pouvoir affirmer que j’ai été témoin de tout cela. « Du coup, j’ai passé la journée à danser, c’était super cool. Et les autres danseurs avec qui je suis sont géniaux. On a des styles un peu différents et je trouve ça génial parce que c’est souvent comme ça qu’on peut progresser. » Une nouvelle fois, je lui souris, heureux de la voir aussi excitée à l’idée de démarrer cette nouvelle aventure. « J’ai hâte de voir ce que ça va donner. » que je lui assure sans trop savoir comment continuer la conversation étant donné que je ne connais absolument rien à la danse. « Tu sais quand le clip va sortir ? »

« Et toi ? Ça a été ta semaine ? » Je hausse les épaules. « Une semaine normale. » Pas mal de boulot à la base, rien de bien excitant en soi. « Je vais probablement partir quelques jours bientôt. » J’aurais voulu accepter bien plus longtemps, mais Sullivan m’a rappelé que je me battais pour ma fille et que je pouvais pas faire le con. Faire mon travail ne me semblait pas sonner comme faire le con, mais il avait raison, je peux pas m’éloigner trop longtemps, ce serait bien trop un plaisir pour Eavan. « Aller en mer faire des exercices de vol de combat ça fera pas de mal. » La phrase paraît surréaliste pour quelqu’un en dehors de l’armée, pour moi, c’est juste un quotidien. On avait tout prévu avec Milo pour entraîner les recrues et pour se décrasser un peu. Ce sera l’occasion de changer d’horizon et de ne plus penser à ce qui a bien pu se passer cette après-midi. J’hésite à lui en parler, je vois bien son regard qui ne cesse de revenir vers moi, mais je continue à lui sourire quand même un peu. « Ca c’est pas forcément bien passer cet aprem, mais t’inquiète pas. » Je pourrais pas en dire plus alors que ma voix est déjà en train de vriller à cause de la boule qui se forme dans le fond de ma gorge.

Je lui tire la langue, telle une gamine de six ans, mais fière de moi et il rit. Bien sur que je partagerais si jamais il veut de la glace, mais je sais aussi qu’il ne me dit toujours que j’ai le droit de venir les mains vides, choses que je n’arrive toujours pas à faire. J’ai beau me sentir à l’aise chez Cian, avoir l’impression d’y trouver ma place quand il est là, je me sens encore obligé de toujours ramener quelque chose quand on passe du temps ici. Ce n’est jamais grand-chose, un pot de glace, un plat fait maison, une pizza, un paquet de bonbons, mais je n’arrive pas à me résoudre à venir les mains vides. « Si tu le dis. » J’hoche la tête et comme pour lui prouver, le serre le pot de glace contre moi. Je le suis au salon et me laisse alors tomber dans le canapé alors qu’il s’échapper vers la cuisine pour se prendre une bière et sortir une limonade pour moi. J’ai toujours un peu de mal avec l’alcool, surtout quand quelqu’un en abuse, mais pas avec Cian. Avec lui, il y a toujours quelque chose et je sais que même si il en a plusieurs j’aurais toujours confiance en lui. Loan me dirait sûrement de faire attention, de prendre soin de moi avant tout, mais j’ai confiance en l’irlandais. Je prends alors la cuillère qu’il me tend et prends une première bouchée de glace alors qu’il me demande comment c’est passé mon audition. Je suis toujours encore un peu surprise quand Cian s’intéresse à mon métier, à mes journées, mais cela me fait toujours plaisir. J’essaye cependant de ne pas trop partir dans des monologues, même si mon enthousiasme est clairement visiblement dans ma réponse. « Je suis vraiment content pour toi, tu le mérites ! » Je lui adresse un sourire, vraiment touchée à chaque fois que Cian se montre aussi supporteur de ce que je fais et ma réussite. Son avis compte beaucoup pour moi dans le fond. « J’ai hâte de voir ce que ça va donner. Tu sais quand le clip va sortir ? » « Pas encore exactement. Mais on a deux jours de tournages, et après le temps de le monter, donc je pense d’ici 3 semaines. Je t’enverrais le lien quand il sera sorti si tu veux. » Je lui réponds avec un sourire.

Je lui demande alors comment s’est passé sa semaine à lui avant de prendre une bouchée de glace. « Une semaine normale. Je vais probablement partir quelques jours bientôt. Aller en mer faire des exercices de vol de combat ça fera pas de mal. » Je l’écoute avec attention et hoche doucement la tête. Il va me manquer, je ne vais pas le nier. De ne pas le voir toutes les semaines va me faire bizarre, parce que nous avions pris l’habitude de nous voir souvent, mais je suis contente qu’il puisse se changer aussi un peu les idées. « Tu sais déjà ou tu vas aller ? » Je lui demande alors curieusement en me tournant un peu plus pour me mettre face à lui. Et puis à ma surprise, il mentionne rapidement qu’il a vu Ailis et que ca ne c’est pas bien passé. « Ca c’est pas forcément bien passer cet aprem, mais t’inquiète pas. » Je ne suis pas vraiment surprise que les choses ne se soient pas bien passé, mais cela me fait quand même de la peine pour lui. « Elle t’as encore pas laissé la voir longtemps, c’est ca ? » Je soupire un peu, mais n’ajoute rien. « J’suis désolée. » Je lui dis simplement avec un léger sourire. Bien sur que je m’inquiète un peu, ca ne changera sûrement pas de ci-tôt, mais je ne dirais rien. Je vois pourtant bien que Cian n’a pas envie de s’étaler sur le sujet alors que je dépose mon pot de glace sur la table basse. « On se fait un jeu pour te changer les idées ? »

C’est avec un véritable intérêt que j’écoute la jeune femme me conter ses aventures des derniers jours. Elle est pleine de vie Oakley, elle semble constamment vibrer sur une énergie positive et dans le fond c’est ce qui me plaît le plus chez elle. Quoiqu’il arrive, qu’importe la journée que j’aurais pu passer, elle réussira à m’arracher un sourire. C’est nouveau ces habitudes que l’on se crée, ce n’est pas quelque chose de pleinement planifier, mais plus des moments que l’on ne veut pas voir se terminer. Elle vient régulièrement et je ne me lasse jamais vraiment de sa présence. C’est simple d’être avec Oakley. C’est pouvoir discuter de tout et de rien, se confier sans jamais qu’elle n’insiste trop. Elle est devenue un véritable soutien et je crois que l’on réussi souvent à se soutenir tous les deux. C’est tout un tas de petits rien, mais lorsqu’elle me parle avec autant de joie de son audition, c’est un peu de baume au cœur. « Pas encore exactement. Mais on a deux jours de tournages, et après le temps de le monter, donc je pense d’ici 3 semaines. Je t’enverrais le lien quand il sera sorti si tu veux. » Je hoche à nouveau la tête en souriant. « Bien sûr ! Je veux voir tout ça ! » Je ne connais pas l’artiste, c’est probablement pas le genre de musique que j’écoute réellement, mais je regarderais le clip, elle peut en être certaine.

Et bien entendu, qu’elle s’enquière rapidement de ma journée. Quand j’évoque le fait de devoir partir pour le travail, j’ai presque l’impression de la sentir déçue et c’est quelque chose que je ne comprends pas réellement. « Tu sais déjà où tu vas aller ? » J’ai dû rêver, elle me demande simplement ce que je vais bien pouvoir faire. C’est normal après tout. Mais c’est avec une légère grimace que je lui réponds. « Je peux pas te dire. » Je sais bien qu’elle n’irait pas balancer ce genre d’informations à ceux qui nous préoccupe vraiment, mais c’est le métier qui veut cela. On part, mais nos familles ne savent jamais où nous sommes réellement. « Ce sera pas très loin. » Tout est relatif, mais je ne peux pas lui en dire plus. Alors, je change rapidement le sujet pour parler de mon après-midi. Il me suffit de fermer les yeux un instant pour revoir Ailis en train de m’appeler en pleurant et déjà, j’ai le cœur qui se serre. « Elle t’a encore pas laissé la voir longtemps, c’est ca ? » Je hausse des épaules, mordant ma lèvre pour ne rien laisser transparaître. « Elle veut me faire payer, je ne sais quoi. » Alors que j’ai été celui qui a pris soin de sa fille pendant son absence. « Je m’en fiche si elle veut me faire du mal, mais… Ailis arrêtait pas de pleurer et… » je souffle un coup. « Ca me rend juste dingue. » Dans le fond, je sais ce qu’elle cherche mon ex compagne. Elle veut me pousser à bout pour que j’agisse sur un coup de tête, pour que je fasse quelque chose de stupide qui serait à son avantage. Elle ne m’aura pas aussi facilement.

« On se fait un jeu pour te changer les idées ? » Je ris un peu alors qu’elle écrase un énième bâillement. « Pour me changer les idées ou pour te tenir éveiller ? » Je vois bien qu’elle est crever la jeune femme, mais je la connais ça ne sert à rien de lui proposer de rentrer chez elle, elle n’en fera qu’à sa tête. « Comme tu veux Oak. »

Je m’emballe un peu lorsque Cian me questionne sur mon audition et sur ma journée. J’ai beau être claquée et avoir envie de dormir et de manger un bon plat de pâtes avec du ketchup, jamais je n’aurais loupé cette soirée avec l’irlandais. Je crois que j’ai besoin de nos soirées, j’ai besoin de le voir souvent et je me sens toujours bien quand je suis avec lui. Il pourrait se foutre complètement de mon métier, de ce que je fais de mes journées, de comment avance ma carrière et mes projets, mais ce n’est pas le cas. Il me questionne toujours, me demande comment ca avance et moi à chaque fois je m’emballe parce que je vois bien que ca a l’air de vraiment l’intéressé. Il ne me demande pas cela juste pour la forme, il a l’air de vraiment ce soucier de ce que j’ai à lui raconter et cela me fait sourire et me réchauffe le cœur à chaque fois. Il ne me juge jamais lorsque je pars dans des explications ou dans des récits, bien au contraire, et c’est l’une des choses que j’aime… Enfin que j’apprécie chez lui. Cela me change beaucoup de lorsque j’étais avec David, qui ne s’intéressait pas et qui trouvait toujours que j’étais trop enthousiaste, trop expressive. Je ne suis pas avec Cian, bien sur, nous ne sommes qu’amis mais qu’il me supporte ainsi est quelque chose j’apprécie beaucoup, alors je lui propose de partager le lien du clip quand il sera sorti. « Bien sûr ! Je veux voir tout ça ! » J’hoche la tête, un immense sourire collée sur les lèvres. « Cool ! »

C’est ensuite à moi de prendre des nouvelles de Cian, de sa semaine et de son boulot. Je m’intéresse beaucoup à son travail, même si je ne comprends pas grand-chose, mais je ne me lasse pas non plus de l’entendre me parler de lui, de découvrir un peu plus chaque fois sur sa vie. Il m’annonce alors devoir partir en mission quelques semaines et, à ma plus grande surprise, je suis un peu triste d’apprendre qu’on ne pourra pas se voir pendant quelque temps. Cela n’a pas l’air d’échapper à Cian, mais il ne relève pas et je lui en suis reconnaissante. Je le questionne sur sa destination curieusement. « Je peux pas te dire. » « Ah oui, c’est vrai. Top secret. » Je ris un peu. « Ce sera pas très loin. » J’hoche la tête. « Tu auras le droit de me raconter en rentrant ou ca reste quand même top secret ? » Je lui demande, ayant quand même envie d’en savoir un peu plus, même si je dois attendre que sa mission soit terminée. Au vu de son métier, peut-être que c’est mieux que je ne sache pas tous les détails d’ailleurs, sinon je m’inquièterais surement trop.

J’enchaîne ensuite sur Ailis, me doutant bien rapidement que la visite ne c’est encore pas passée comme il l’aurait voulu. Eavan lui mène la vie dure et je trouve cela vraiment injuste après tout ce qu’il a fait pour Ailis. Techniquement elle n’est même pas sa fille et pourtant il s’en occupé comme telle à partir de la seconde ou Eavan a fui, la laissant toute seule. Elle ne devrait même avoir le droit de récupérer la petite comme cela, comme si rien ne c’était passé. Cela me met en colère et me rend vraiment triste. Elle me manque à moi aussi Ailis dans le fond, mais ce n’est pas le plus important. « Elle veut me faire payer, je ne sais quoi. Je m’en fiche si elle veut me faire du mal, mais… Ailis arrêtait pas de pleurer et… » Je viens doucement poser ma main sur la sienne, juste pour la serrer doucement. « Ca me rend juste dingue. » « Je comprends… » Je réponds simplement en lui adressant un léger sourire doucement. Je vois bien qu’il n’a pas envie de s’étendre sur le sujet, et commençant à bien le connaitre, c’est à mon tour de tenter de lui changer un peu les idées. Je retire ma main de la sienne et lui propose un jeu. « Pour me changer les idées ou pour te tenir éveiller ? » Je fais une petite moue. « Les deux ? Et puis pour une fois ca sera peut-être pas toi qui vas t’endormir devant le film. » Je lui réponds pour le taquiner un peu en riant doucement. « Comme tu veux Oak. » J’ouvre la bouche pour répondre, mais à ce moment là mon ventre se fait entendre et je viens placer mes mains dessus. « Je crois que déjà il va falloir que je mange un vrai repas, parce que la glace me suffit pas. » Je ris. « Je nous fais un truc ? » Je lui demande.

« Tu auras le droit de me raconter en rentrant ou ça reste quand même top secret ? » Mon regard se tourne vers la jeune femme. En silence, je l'observe. J'attends que la blague tombe, que le ricanement se manifeste ou que la remarque acerbe vienne clore la conversation. Elle semble bien sérieuse pourtant, la jeune blonde, alors que tout dans sa façon d'être me laisse à comprendre qu'elle s'y intéresse réellement. Jamais, auparavant, on ne m'avait demandé s'il était possible que j'évoque ce que j'avais bien pu faire durant une mission. Eavan était bien plus préoccupé à me reprocher mon absence, à critiquer mon métier. Déstabilisé par la question, il me faudra quelques instants avant de pouvoir bégayer quelque chose de cohérent. « Je... Enfin, c'est rien d'intéressant. » Je n'ai jamais eu à partager ce que je pouvais faire au travail. Elle s'en fichait constamment, mon ancienne compagne. Si l'uniforme semblait la faire rêver, les obligations que cela pouvait engendrer ne faisaient que lui déplaire. Alors, j'ai appris à compartimenter. Le travail d'un côté, la vie privée de l'autre sans jamais trop mixer les deux. « On m'avait jamais demandé de partager à ce sujet. » Parce que mes amis les plus proches travaillent avec moi et parce que j'ai toujours préféré protéger ma famille de ce genre d'informations. N'aimant que moyennement me retrouver pris au dépourvu, je préfère changer de sujet.

Au moins, on s'accorde sur le fait que j'ai grandement besoin de penser à autre chose. L'image d'Ailis en pleurs ne cesse de me revenir à l'esprit et qu'importe la douceur que cherche à m'apporter Oakley, je sens bien que cela va être compliqué. Néanmoins, je n'ai absolument aucune envie de me retrouver seul pour le moment. « Les deux ? Et puis pour une fois ça sera peut-être pas toi qui vas t’endormir devant le film. » Je ris un peu à sa remarque sachant pertinemment que le sommeil sera long à venir ce soir. Pas vraiment d'humeur à prendre une quelconque décision, je lui laisse le choix du programme qui sera bien rapidement dicté par son estomac. « Je crois que déjà, il va falloir que je mange un vrai repas, parce que la glace me suffit pas. Je nous fais un truc ? » Je hoche la tête sachant d'avance que même si je proposais que l'on se fasse livrer, elle insistera pour s'occuper de préparer quelque chose rapidement. « Tu connais la cuisine maintenant. » Je pourrais être mal à l'aise du fait qu'elle est soit toujours celle qui se dévoue pour préparer un repas, mais c'est aussi lui rendre un grand service que de ne pas essayer.

La soirée se déroule ainsi, entre un plat de pâtes et des rires. Un jeu de société qui se termine bien avant la fin officielle de la partie tant je refuse d'admettre qu'elle avait bien compris les règles et que j'aurais dû perdre à un moment précis. Tel le grand enfant que je suis, j'ai décidé de bouder dans mon coin alors qu'elle choisissait un film. Et pour une fois, la première, sûrement, c'est elle qui a fini par s'endormir à mes côtés. Lentement, j'ai déposé un plaid sur ses épaules avant de continuer à zapper bêtement.

Il est près de trois heures du matin lorsque je finis par éteindre l'écran de la télévision, décidé à aller me coucher. Un instant, j'hésite à réveiller Oakley, mais au cours de la soirée elle a finit par s'allonger à moitié sur le canapé et elle semble bien trop paisible pour la déranger. J'étais déjà dans le couloir menant à la chambre lorsque je l'entends s'agiter.

Cian semble plus que surpris lorsque je lui demande si il pourra me parler de sa mission une fois qu’il en sera rentré. Je n’y connais rien au métier du châtain, à vrai dire je ne connais que lui qui travaille dans ce domaine, mais je ne peux m’empêcher de vouloir en savoir un peu. Ca m’intéresse de savoir ce qu’il fait, même si je n’ai pas forcément besoin de savoir les détails si ceux-ci sont trop difficiles. Je ne demander pas à ce qu’il me raconte tout, juste un peu pour en savoir un peu plus sur ce que c’est son métier. Je sais bien que la plupart de ses amis font d’ailleurs le même métier que lui, c’est sûrement pour cela qu’il a l’air surpris de ma question. « Je... Enfin, c'est rien d'intéressant. » Je lui adresse un léger sourire. « Moi ca m’intéresse. » Je lui avoue. « On m'avait jamais demandé de partager à ce sujet. » Pour le coup, c’est moi qui suis un peu surprise. Il ne parle donc jamais de son boulot ou de ses missions avec sa famille ? Ou ses amis qui ne font pas partir de la navy ? « Jamais ? Après j’te force à rien hein. » Plus comme pour confirmer que pour lui poser vraiment une question. Eavan ne s’intéressait-elle pas au métier de l’irlandais lorsqu’ils étaient ensemble ? Ne voulait-elle pas savoir ce que son petit ami faisait de ses journées ? Si Cian était mon petit ami, il ne l’est pas bien sur, il n’est qu’un ami, mais si il l’était c’est le genre de chose que j’aimerais savoir, donc j’aimerais discuter. Je n’insiste pas plus sur le sujet et l’écoute ensuite me parler d’Ailis quelques minutes. Encore une fois, je n’insiste pas non plus parce que je vois bien qu’il n’a pas envie de s’étendre dans le sujet. Je lui propose alors un jeu avant de lui faire d’abord remarquer qu’il faut que l’on mange un bout. Mon estomac s’exprime assez bruyamment pour se faire remarquer. « Tu connais la cuisine maintenant. » J’hoche la tête et c’est assez naturellement que je vais nous faire à manger. Nous passons le reste de la soirée entre jeux et films et, pour une fois, je suis la première à sombrer dans le sommeil.

Il s’approche… Je vois parfaitement les traits de son visage. Je reconnais cet éclair de colère dans ses yeux. Je sais ce qu’il va se passer et c’est sans attendre que sa main saisit douloureusement mon poignet. « Tu… Tu me fais mal… » Une phrase inutile parce que son autre main vient rencontrer lourdement ma pommette… Puis le coin de mon œil… La douleur… Les joues parsemées de larmes… J’ai envie de hurler mais rien ne sort. J’étouffe. « Arrête… S’il te plait… » Je mumure difficilement. Je n’arrive plus à reprendre mon souffle. Son pied vient rejoindre douloureusement mes côtés déjà bleutés par ses violences précédentes…

Je me réveille en sursaut. Mes mains s’agrippent instinctivement à la couverture qui recouvre mon corps. Je n’arrive pas à respirer, le corps parsemé de tremblement et la sueur perlant dans mon dos. Je jette un regard autour de moi et la simple silhouette qui apparaît dans mon champ de vision me fait reculer de quelques centimètres. Je tends les bras en avant, comme pour me protéger des coups qui vont suivre et je me fonds en excuse. « Pardon… J’suis désolée… » Ce sont les seuls mots qui s’échappent de mes lèvres. Tout est flou. Il me faut de longues secondes pour me rendre compte que ce n’était qu’un cauchemar, un cauchemar parmi tant d’autres. Cela m’arrive encore de temps en temps. C’est Cian qui se tient devant moi, l’air perdu et je viens alors essuyer mes joues, remarquant seulement maintenant les larmes qui y coulent. J’ouvre la bouche, plusieurs fois, mais rien ne sort.

« Jamais ? Après j’te force à rien hein. » Je secoue la tête soulignant bel et bien que je n’ai pas pour habitude de parler des missions en dehors de la base. « Tu sais la plupart de mes amis proche de bosse avec moi. » Je n’ai pas besoin de raconter quoique ce soit à Thomas tant, il est toujours au courant des choses bien avant moi – la plupart du temps. Il en est de même pour Milo, Louis ou même encore Amos qui connaît tous les détails de ce genre de vie. Le reste du temps, je préfère ne pas inquiéter ma famille quand on tente parfois des trucs dangereux. Alors, non, je ne suis pas réellement habitué à ce que l’on me demande spontanément. « C’est juste… Enfin… » Et voilà que je bégaye comme un idiot sans trop savoir comment rebondir. « C’est vraiment pas intéressant. » que je souligne à nouveau en me précipitant pour tenter de changer de sujet. Ce sera bien mieux ainsi que l’on passe la soirée sans réellement se soucier de ce qui pourra bien se passer demain.

Et le reste de la soirée passe en un clin d’œil, jusqu’à ce qu’Oakley s’endorme sur le canapé.

J’allais partir me coucher à mon tour lorsque la jeune femme commence à s’agiter dans son sommeil. Je n’y prête pas réellement attention, me doutant qu’il doive lui arriver de parler dans ses songes. C’est le léger gémissement de peur qui s’échappe des bribes de ses paroles qui m’inquiète un peu plus. « Oakley ? » Elle ne m’entend pas la blonde lorsqu’elle supplie la personne qui semble être présente dans son rêve. « Arrête… S’il te plaît… » J’abandonne l’idée de continuer mon chemin dans le couloir, pour mieux m’approcher de mon amie. Elle s’agite, semble bien trop éprise dans la réalité de son songe. « Oakley, c’est rien. » Je n’ose pas la toucher de peur de l’effrayer plus que de raison. Je n’aurais pas le temps de faire quoique ce soit alors qu’elle se réveille en sursaut et complètement apeurée. En quelques secondes, seulement, elle se redresse pour mieux se rouler en boule dans un coin du canapé, les bras en l’air en faible geste de protection. « Oakley, c’est Cian. » Il ne faut pas être devin pour deviner de quoi – ou plutôt de qui – elle avait bien pu rêver. « Pardon… J’suis désolée… » Elle n’a pas encore repris contact avec la réalité, lorsque chacun de ses mots me supplie de ne plus la toucher. Par protection, je fais quelques pas en arrière, afin de ne pas m’imposer. « C’est rien, tu n’as rien fait. » que je murmure lentement. « C’était un cauchemar. » Reviens vers moi Oakley tout ira bien.

Je les connais ces mauvais rêves-là, ceux qui nous aspire tout entier au point que le réveil ne semble plus réellement réalité. Il lui faut quelques secondes pour retrouver un souffle un peu plus régulier et j’en profiter pour filer à la cuisine lui chercher un verre d’eau. Lorsque je reviens vers elle, elle est en larmes. « Je vais m’asseoir à côté de toi. » que j’annonce tout en prenant le temps de venir m’installer à ses côtés. Sans un mot de plus, je lui propose mes bras, lui laissant toujours le choix.

« Tu sais la plupart de mes amis proche de bosse avec moi. » J’hoche la tête, un léger sourire aux lèvres. Il est vrai que beaucoup des amis de Cian, du moins ceux dont j’entends parler de temps en temps ont le même genre de métier et qu’ils doivent donc sûrement déjà bien savoir ce que fait l’irlandais lors de ses missions. Pourtant, pour ma part, je n’y connais absolument rien, et la curiosité qui m’habite me donne souvent envie d’en savoir plus. « C’est juste… Enfin… » Il semble hésiter, chercher ses mots. « C’est vraiment pas intéressant. » Je fronce un peu les sourcils mais remarque bien qu’il n’a pas spécialement envie de s’étaler sur le sujet. Alors je n’insiste pas, j’hausse simplement un peu les épaules et je lui offre un sourire avant de repartir sur autre chose.

C’est à moitié allongée sur le canapé et contre mon ami que je finis par m’assoupir. Fatiguer de ma journée de danse, c’est moi qui trouve le sommeil alors que le film que nous avons lancer en est tout juste à un peu plus de la moitié. La présence de Cian a mes côtés m’apaise et ce n’est que lorsqu’il s’éloigne que je suis plongé dans de mauvais rêves. Ce n’est pas la première fois que je fais des cauchemars, que j’y revois David, que j’y revis ce qu’il me faisait, et je me demande si un jour cela s’arrêtera. Cela fait presque deux ans à présent qu’il n’est plus dans ma vie et même si les cauchemars se font de moins en moins présent, il m’arrive encore d’en faire. Je me réveille alors en sursaut. Je tente de reprendre contact avec la réalité, de calmer mon souffle, mais mon cœur bat bien trop fort dans ma poitrine. Je m’éloigne de la silhouette présente dans le salon, à quelques mètres de moi, tendant mes bras en avant comme pour me protéger. « Oakley, c’est Cian. » Je relève doucement la tête vers lui et je me fonds en excuse avant de me rendre compte que ce n’est pas David debout face à moi. Cian. Je suis chez Cian, sur son canapé. Tu es en sécurité, Oakley, je me répète doucement en tentant de calmer ma respiration saccadée. « C’est rien, tu n’as rien fait. » A ma grande surprise, au lieu de s’avancer, il recule de quelques pas, comme pour me prouver qu’il ne fera rien, et je lui en suis vraiment reconnaissante. « C’était un cauchemar. » J’hoche doucement la tête. « Oui… Juste un cauchemar… » Je murmure doucement pour me rassurer moi-même. Mes yeux ne lâchent pas le visage inquiet de mon ami face à moi.

Il me faut quelques minutes pour me calmer complètement, pour que mes muscles se détendent et que ma respiration retrouve un rythme normal. Je suis en sécurité, chez Cian. Je tente de calme les larmes qui coulent en silence sur mes joues. Je déteste ces cauchemars, je déteste que des fois mon cerveau me rappel ce que j’ai vécu alors que pourtant j’ai tant avancé depuis tout cela. « Je vais m’asseoir à côté de toi. » Cian est revenu, un verre d’eau dans les mains et il semble faire le moindre mouvement avec précaution. Il s’assoit à côté de moi et sans vraiment rien dire de plus il ouvre ses bras. Il ne me faut pas même pas une seconde pour venir doucement me blottir contre lui. Maintenant que je suis revenu à la réalité, je sais que rien ne m’arrivera, pas ce soir. Je ferme les yeux et reste blotti contre lui quelques minutes. Aucune de nous ne parle et doucement les larmes finissent par arrêter de couler. Je me sépare alors doucement de lui, restant cependant proche de lui. « Je… J’suis désolée… Ca m’arrive encore des fois… » Je lui avoue, parce qu’après tout il ne sert à rien de lui mentir. « Ca faisait quelques semaines que c’était pas arrivé… J’pensais que c’était fini… »

C’est une véritable panique qui semble se lire sur son visage, alors qu’elle lutte contre ses propres rêves. Incapable de l’approcher, je tente de lui parler, sans jamais vouloir l’effrayer. À cet instant précis, tout pourrait l’entraîner dans une crise d’angoisse incontrôlable, elle n’est pas chez elle, je suis un homme et clairement, je pourrais lui faire peur. Alors, je me contente d’utiliser ma voix de la manière la plus douce qui soit tandis que la jeune femme semble émerger de ses songes. Dès que son regard croise le mien, c’est comme si elle se mettait en mode de défense. En quelques secondes, son visage se tord de douleur avant de finir cacher par ses bras, ultime rempart entre nos deux corps. « C’est Cian. » En rien, je ne sais si cela va réellement la rassurer, mais je tente malgré tout. Jamais je n’ai levé la main sur elle, jamais je n’ai fait preuve de colère devant Oakley, j’ose espérer qu’elle me fera confiance. À chaque mot rassurant, voilà que je recule d’un pas, tentant d’établir un sentiment de sécurité pour elle. « Oui… Juste un cauchemar… » Je hoche la tête lentement, lui offrant un sourire fébrile ne sachant trop comment aborder la chose. « Tu es en sécurité. » Il ne lui arrivera rien dans cet appartement, je pourrais lui jurer sur ma vie.

Les minutes semblent s’étirer sans fin alors que son souffle erratique empli le salon encore plongé dans la pénombre. Je reste à bonne distance sans jamais imposer ma présence. Elle a besoin de temps et pas que je reste coller à elle. Dans son regard, c’est tout un film qui semble se dérouler. Une sorte de jeu de questions/réponses qu’elle entretient avec elle-même comme pour vérifier que tout cela est bien la réalité et que personne ne cherche à lui faire du mal. Je lui laisse le temps de souffler et décider d’aller lui chercher un verre d’eau. Cela ne pourra que lui faire du bien non ? Ce n’est jamais évident de trouver la bonne attitude à adopter dans ce genre de moment. J’ai la sensation de marcher sur des œufs, de devoir avancer sur la pointe des pieds comme pour approcher un animal sauvage.

Lorsque je finis par m’asseoir auprès de la jeune femme, c’est comme si toute la tension de la pièce s’envolait en un souffle. Oakley vient se blottir dans mes bras et je m’empresse de resserrer mon étreinte autour de ses épaules. « Je… J’suis désolée… Ça m’arrive encore des fois… » Je secoue la tête près à lui demander de ne pas se justifier, mais elle enchaîne à toute vitesse. « Ça faisait quelques semaines que c’était pas arrivé… J’pensais que c’était fini… » « Tu n’as pas à t’excuser. » que j’affirme alors que ma main vient lentement glisser sur son bras. Le silence semble nous englober alors que je lui laisse quelques minutes pour retrouver son souffle. C’est comme pour le retenir de s’écrouler que mes lèvres viennent se presser contre son front, promesse silencieuse que plus jamais quelqu’un s’en prendra à elle de cette façon.

Souffle court, vision trouble, flash de mon cauchemar, tout ce que je vois et ressens à ce moment-là me donne l’impression d’être en train de me noyer. C’est comme si soudain je me retrouvais sous des mètres et des mètres d’eaux, incapable de nager vers le haut et incapable de prendre une respiration. Chaque muscle de mon corps est tendu, réagissant au cauchemar que je viens de faire. Je ne sais pas où je suis et la silhouette qui se trouve près de moi semble incapable de bouger elle aussi. « C’est Cian. » Cian… Sa voix et la simple prononciation de son prénom ont l’effet d’une bouée de sauvetage. D’un coup, j’arrive à nouveau à prendre une respiration, j’arrive à voir à nouveau clair et mon regard terrifié se poser alors sur l’irlandais. Il a l’air surpris, perdu et je me rend alors compte que c’est la première fois qu’il doit voir réellement les conséquences de ce que j’ai vécu avec mon ex petit ami. Bien sûr il est au courant de ce que je vivais, il m’a vu détruite, il m’a vu à une époque de ma vie ou je n’étais que l’ombre de moi-même, ou presque chaque sourire étaient faux, mais jamais il ne m’a vu me réveiller d’un cauchemar, de ses souvenirs qui me hante encore de temps en temps. Je prends alors doucement la parole, dans un murmure en répétant que ce n’est qu’un cauchemar. « Tu es en sécurité. » J’hoche doucement la tête. Je sais que Cian ne me ferait jamais rien, et que David n’est pas là.

Il me faut cependant de longues minutes pour reprendre une respiration calme, pour sortir complétement de cet état second dans lequel je me suis réveillé. Il me faut quelques minutes pour venir passer mes mains sur mon visage essuyer les larmes qui y coulent en silence. Je déteste que mon ex puisse avoir encore ce pouvoir sur moi alors que pourtant il n’est plus dans ma vie depuis des mois, des années même. Je saisis alors, d’une main encore une peu tremblante, le verre d’eau que me tends Cian et vient prendre une longue gorgée avant de le déposer sur la table basse devant nous. Je sais que je suis en sécurité, je le sais mais pourtant ce n’est que lorsque je me laisse me blottir dans les bras de mon ami que mon corps se détend doucement. Je ferme les yeux, profitant de ses quelques secondes de calme pour me calmer complètement. Il est là pour moi, et c’est quelque chose que je réalise encore plus à ce moment-là. Je me recule alors un peu et m’excuse. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais je le fais. « Tu n’as pas à t’excuser. » Sa main se dépose doucement sur mon bras et alors qu’inconsciemment, je m’attendais presque à ce que le contact soit dur, ce n’est pas du tout le cas. Mon esprit est encore à moitié dans le cauchemar, mais l’irlandais en face de moi rend le retour à la réalité plus rapide et plus simple. Mon regard se perd quelques secondes dans le sien et il vient alors déposer ses lèvres sur mon front. Mon cœur semble louper un battement, et inconsciemment, je sais que cette fois ci cela n’a rien a voir avec mon cauchemar. « Merci… D’être là… » Je murmure alors doucement et ma main vient serrer la sienne. Son contact est rassurant. « Tu rends tout tellement plus facile… » J’avoue alors à demi-mots avant de venir à nouveau passer ma main de libre sur mes joues. « Je déteste qu’il puisse encore me faire avoir des cauchemars… »

La douceur n'est pas un trait qui pourrait entrer facilement dans la description de ma personnalité quand la plupart du temps, j'agis de manière brusque, sans bien me méfier du langage employé et de mes gestes parfois un brin trop exagérer. À foncer dans le mur sans bien me soucier des autres, j'en oublie parfois que certaines personnes ont besoin de calme et de douceur pour naviguer dans ce monde. Lorsque mon regard croise celui complètement paniqué d'Oakley, j'en oublie mes manières bourrues et tente de lui apporter une certaine sérénité autour des mots que je ne cesse de répéter comme un mantra obsessionnel. Je ne sais pas gérer la douleur des autres, je ne sais pas gérer les situations délicates. C'est toujours bien trop maladroit, mais pour Oakley, je ne peux tout simplement pas fuir de l'autre côté. Je me dois d'être présent, de la rassurer quand son cauchemar semble l'avoir sérieusement ébranlé. Tout semble instinctif lorsque je décide de lui ouvrir mes bras comme ultime refuge face à ses pensées. Ce n'est presque rien, ce n'est probablement pas assez, mais c'est bien tout ce que je suis capable de lui apporter sans mettre les pieds dans le plat et commettre une erreur qui pourrait tout contrebalancer.

Je ne calcule pas l'aisance avec laquelle je cherche à la protéger, ce sentiment qui prend le dessus lorsque je la vois trembler. Mes lèvres trouvent son front, mes bras s'enroulent autour de ses épaules tandis que les mots commencent à me manquer. Vraiment, je ne suis pas le plus doué. « Merci… D’être là… » Je secoue la tête, laisse échapper un léger rire. « Tu n'as pas à me remercier. » Parce que c'est normal de ne pas la voir souffrir, parce qu'il était normal de la rassurer afin de lui amener un pied dans la réalité. Je préfère ne pas laisser mes pensées vagabonder à tout ce que David a bien pu lui faire subir pour qu'elle réagisse encore ainsi. Mes crises de colère m'ordonnent de ne pas imaginer, de ne pas chercher à développer l'idée. « Tu rends tout tellement plus facile… » D'un geste lent, ma main vient caresser son dos laissant le silence glisser de manière réconfortante. Les mots seraient bien insuffisants tandis que je hoche la tête bêtement. Je ne sais réellement vers quoi on se dirige, je préfère ne pas tant y réfléchir. Il est simple d'agir auprès d'Oakley, comme cela ne l'a pas été depuis bien trop longtemps. Je ne réfléchis pas, chaque geste semble inné. « Je déteste qu’il puisse encore me faire avoir des cauchemars… » Me voilà a secouer la tête de nouveau alors que je ramène le corps de la jeune femme contre mon torse. [color=#0C4857]« Cesse de penser à lui. »

Durant de longues minutes, je nous berce à moitié, dans un geste lent sans jamais défaire mon étreinte autour de ses frêles épaules. Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve, mais je sais qu'à cet instant précis, je suis bien. Comme je ne l'avais pas été depuis bien longtemps. C'est tout ce qui devrait compter. « Rendors-toi, je suis là. » Là pour te protéger.