Ce soir, c'était un soir de plus rempli d'ivresse pour l'Américain. Ces derniers temps ses soirées ne se résumaient plus à grand chose. Autrefois, il airait dans le bar tel un seigneur, il profitait de chaque instant pour conclure des accords et pour se faire bien voir, mais aujourd'hui, il était essoufflé, il tentait de sauver les meubles aussi bien qu'il le pouvait, mais il sentait que la confiance des siens s'éssouflait au fil des jours alors que la Ruche prenait du terrain dans les rues. Il avait fortement perdu en crédibilité au fil des ans et depuis le départ de Raelyn ça ne s'était pas amélioré. Son propre frère lui avait aussi tourné le dos, un événement qu'il avait très mal digéré et qu'il avait du mal à oublier. Son frère occupait une place très importante dans sa vie, et ce, depuis toujours. Ils avaient été comme les deux doigts d'une main et avaient toujours pu compter l'un sur l'autre sans se poser de questions, mais cette époque était révolu. Alec ne lui portait plus aucune confiance et Mitchell s'était braqué le faisant croire en avoir rien à faire. C'était sa spécialité à l'Américain, refouler ses sentiments pour montrer son pire côté au lieu d'améliorer les choses. Il se comportait tel, on l'imaginait et confirmait les spéculations à son propos. Avait-il baissé les bras à ce point ? Il se le demandait chaque matin. Il se demandait si le fameux truand Mitchell Strange était toujours présent ou s'il avait fait place à Alexander Strange le civil rêvant de grandeur. Il était certain en tout cas de ne plus être à la hauteur de ses ambitions et tentait d'y remédier en commettant des horreurs les unes sur les autres. Du sang, encore du sang, il était sans pitié et c'était le reflet de ce qu'il ressentait actuellement.
Il était assis sur l'une des banquettes présente au sein du bar clandestin depuis maintenant une heure, buvant un verre, puis deux, puis trois. Il était assis seul. Un mot qui définissait plutôt bien la situation qu'il vivait en ce moment. Il était seul, se sentait seul et pas même une belle blonde qu'il aurait payé gracieusement comblait ce vide présent en lui. Il observait ce qu'il se passait tout autour de lui, saluant de la tête quelques audacieux le saluant au passage avant de rejoindre le comptoir pour avoir un autre verre. Stacey venait de commencer son service et c'est avec un sourire qu'il l'aborda. « Comment ça va ce soir ?» Lui demandait-il en faisant glisser son verre vers elle pour qu'elle le remplisse. Stacey avait la particularité d'être dans ses petits papiers, mais contrairement à la plupart des femmes travaillant ici, elle n'était pas de celle qui pouvait finir dans le lit du boss. Non. Il la considérait plutôt comme une petite sœur qu'il aurait perdu de vu. Il voulait l'aider simplement. Il la regardait remplir le verre avec silence, en profitant pour s'allumer une cigarette.
Cela faisait trois ans que je travaillais pour le Club, dans le bar clandestin où j’étais serveuse. Ce soir était un soir parmi tant d’autres, un soir comme un autre. Les fidèles clients sont toujours présents, ils ont leurs petites habitudes desquelles on ne pouvait les détacher. Pour certains, cela se cantonne seulement à leur alcool fétiche, resservi un certain nombre de fois. Pour d’autres, à leur tranquillité afin de pouvoir discuter affaire et autres détails que je préférais parfois ignorer. Pourtant, mon oreille a souvent traînée et entendue pas mal de choses, plus par inadvertance que par volonté. Des affaires desquelles je préférais rester éloignées et donc me contenter de faire mon boulot de serveuse tout en promettant de ne jamais parler de celui-ci à quiconque autour de moi. Que ce soit à mon frère, Lawrence ou ma petite sœur Mila, comme à mes amis proches. Parce qu’il était hors de question que je les mêle à ça, parce que je travaillais pour ce gang qui n’était pas composé que de simples petits voyous qui ne faisaient rien de bien méchant. Non, j’étais complétement lucide à ce sujet, en trois ans, bientôt quatre, j’ai bien compris de quoi il en retournait. Des choses avec lesquelles je n’étais pas toujours d’accord, que je ne parvenais pas toujours à comprendre. Mais finalement, ma place n’était pas de donner mon avis à ce propos. Et si je l’ai accepté, si j’ai accepté de travailler pour eux, c’est dans l’unique but de me faire un peu plus d’argent, afin d’éponger les dettes de ce père incapable et de cette petite sœur à qui j’ai promis de tout faire pour nous en sortir.
Alors ce soir, quand je viens juste d’arriver pour prendre mon service, je le vois dans un coin. Mitchell Strange, celui qui est à la tête de cette organisation, celui que j’ai connu pendant ses heures de gloire. Et lorsque je l’observe au loin, je me rends compte que c’est un homme abattu, un homme dont la splendeur n’est plus celle qu’elle était. Et cela me rend triste, mes sourcils se fronçant en le voyant ainsi. Parce qu’il est plus que le boss pour moi, il est celui qui, tout comme son frère, m’a pris sous son aile peu de temps après mon arrivée. Et que je sais très bien ce qui se passe en ce moment pour lui, tout comme je sais aussi que l’organisation n’est pas au meilleur de sa forme et que même sa relation pourtant si fusionnelle avec son frère est désormais réduite à néant. Il finit par s’approcher du bar et alors que je suis occupée à ranger les quelques verres qui traînent par ci par là, il m’adresse la parole « Comment ça va ce soir ? ». Je lui rends son sourire, attrapant le verre qu’il fait glisser jusqu’à moi pour le lui remplir « Un soir comme un autre » je lance alors accompagné d’un haussement d’épaules. Car enchaîner autant ma journée de boulot à l’hôpital que la soirée ici était un rythme que j’avais pris l’habitude d’avoir, même si je n’avouerai jamais que c’était un rythme qui pouvait m’épuiser à certain moment. Je lui donne à nouveau son verre rempli de son breuvage favori et ma mine inquiète reprend alors le dessus quand je pose mon regard sur lui « Comment tu vas, toi ? ». J’insiste sur ce dernier mot car je sens bien qu’il est comme au bord d’un précipice dans lequel il est à deux doigts de tomber.
L’Américain n’était pas du genre à se confesser, moins il en disait sur lui et sur ce qui se passait de sa vie, moins il avait de risque que ça lui retombe dessus. Cependant, il avait une certaine facilité à parler lorsque l’alcool était bien présent dans ses veines, c’était arrivé de nombreuse fois. Il s’était confié à l’époque à Raelyn sur ses histoires avec les femmes et il avait beaucoup parlé de sa vie à Lou Aberline. Grossière erreur. Elle en savait beaucoup trop sur lui, bien plus que la plupart partageant la sphère privée de l’Américain. Elle connaissait une partie de son passé et ne manquait pas d’en jouer lors de leurs rencontres. Puis il y avait Alec, à qui il pouvait parler des heures sans même avoir bu une goutte d’alcool. Il était son principal allié, son bras droit, celui en qui il portait une confiance aveugle et pourtant depuis sa sortie de prison, Mitchell ne se confiait plus autant à son frère. Il ne lui avait pas fait part de ses horribles manigances et s’était renfermé sur lui-même, devenant paranoïaque à souhait. Mitchell ne pouvait plus faire confiance, il se méfiait de tout le monde et s’était juré de ne plus commettre les mêmes erreurs et pourtant lorsque Stacey avait débarqué trois ans plus tôt, il l’avait accueilli sans grand mal. Cette jeune femme, qui n’avait aucune once de méchanceté, prenait part à une vie qui pouvait chambouler la sienne du jour au lendemain et tout ça pour aider sa famille. Ça l'avait touché l’Américain, ça lui rappelait à quel point les liens familiaux pouvaient être important et même si à l’heure actuelle Alec et lui étaient en froid, il respectait toujours cette volonté qu’avait Stacey et lui faisait suffisamment confiance pour qu’elle n’aille pas balancer ce qui se passe ici, elle avait bien trop besoin de ce travail, puis en trois ans elle avait gagné une place dans le cercle des frères, considéré comme une petite sœur à protéger à tout prix. Il se laissait même penser qu’elle devait sûrement voir le meilleur en eux, un côté qu’ils avaient sûrement oublié avec le temps, surtout Mitchell qui n’avait cessé les atrocités.
Elle lui demandait comment il allait, une question qui avait une réponse assez simple, puisqu’il s’agissait d’observer Mitchell pour l’avoir. Bien sûr, comme à son habitude le brun souhaitait faire bonne figure et pour lui, il n’était pas question de se rabaisser au milieu de tout ce monde qui pouvait facilement tendre l’oreille pour entendre le boss se plaindre. Il affichait un sourire fier sur ses lèvres, regardant Stacey qui affichait une mine inquiète. « Tout vas bien, les affaires roulent plutôt bien, il y a du monde, je n’ai pas à me plaindre.» Qu’il disait en regardant tout autour de lui. Certes, le bar était très fréquenté, comme toujours, il n’avait pas vraiment à se plaindre à ce niveau, c’était plutôt du côté de la rue que ça se corsait, les ventes en drogue étaient en forte baisse depuis que la Ruche s’était installé dans le coin, puis surtout depuis que Raelyn avait quitté le navire, sans ajouter le fait qu’il avait perdu la confiance de pas mal de personne et que c’était qu’une question de temps avant que tout s’effondre. Son mot d’ordre qu’était la loyauté, allait bientôt devenir un lointain souvenir. Il buvait son verre d’une traite et tendait à nouveau son verre à la blonde. Il avait hâte de voir le bar vide et gardait un œil sur l’heure qui avançait plutôt vite. L’alcool aidait à voir le temps passer aussi vite. «Tu as des nouvelles d’Alec ? Il n'est pas descendu ce soir.» Son frère se concentrait sur la cuisine comme toujours, mais se montrait plutôt discret au niveau du bar, sûrement pour éviter son grand-frère.
Il y a eu de l’hésitation lorsque Alec m’a proposé de travailler pour le bar clandestin. Parce qu’il s’est rendu compte que mes problèmes d’argent étaient bien plus importants que ce que je pouvais en dire. Je ne me plaignais jamais. Je n’ai jamais rien voulu laisser transparaitre parce que je veux toujours montrer cette image d’une jeune femme forte qui assume et assumera jusqu’au bout, et quoi qu’il en coûte, la lourde responsabilité que j’ai accepté de prendre sur mes épaules. Pour ma petite sœur. Cette petite sœur à qui il reste un an au lycée avant de pouvoir suivre des études supérieures. Et elle a de l’ambition Mila. Une école de stylisme, dont les frais de scolarisation à l’année sont élevés. Et il est hors de question que je la prive de ce rêve, de cette passion qui l’habite depuis son enfance. Ce rêve de devenir un jour styliste, reconnue pour son talent. Parce que je ne veux pas qu’elle subisse le même sort que le mien, celui où je n’ai eu d’autres choix que de stopper mes études. Ou j’ai dû laisser de côté cette ambition qui était mienne de devenir médecin en cardiologie. Alors, lorsqu’il m’a présenté le bar clandestin, m’a présenté l’envers du décor, celui qui devait rester secret aux yeux de tous, l’hésitation a duré quelques jours. Une réflexion menée seule. Mais, en observant tous les soirs cette petite sœur devant sa machine à coudre, cette petite sœur qui était fière et dont l’innocence transcendait dans la noirceur de cette vie que nous menions désormais, j’ai accepté. Il a fallu du temps pour que je fasse mes marques. Mais Alec ne m’a pas laissé tomber, tout comme Mitch peut de temps après. J’ai finalement pris mes marques dans l’organisation, oubliant parfois ce que cela signifiait de faire partie de ce gang.
Parce qu’il y a une sorte d’esprit de famille quand vous faites partie du Club. Et Alec et Mitchell ont tout fait pour me le faire ressentir en veillant sur moi. En faisant en sorte que je ne sois pas trop impliquée, en me préservant de certains détails sordides. En éloignant ces clients trop insistants. Alors oui, je vois en eux deux grands frères bienveillants. Je vois autre chose que l’image qu’ils veulent donner d’eux ou que les autres peuvent avoir des frères Strange. Parce qu’ils m’ont prouvé que je pouvais leur faire confiance. Qu’il y a de la bonté derrière ces carapaces qu’ils se sont forgés du fait de leur histoire. « Tout va bien, les affaires roulent plutôt bien, il y a du monde, je n’ai pas à me plaindre ». Et je sais qu’il ment à ce moment-là. Parce que le nombre de paires d’oreilles qui traînent autour de nous est important et qu’il ne peut pas être franc. Alors je me contente d’acquiescer doucement de la tête et d’afficher ce mince sourire un peu forcé, pour entrer en quelque sorte dans son jeu. Et dissimuler ainsi cette inquiétude que je peux ressentir à son égard. Il boit cul sec le contenu de son verre et me le tend aussitôt pour que je le resserve. Il peut voir une certaine hésitation, n’attrapant pas cette bouteille tout de suite pour le resservir. « Tu as des nouvelles d’Alec ? Il n’est pas descendu ce soir ». Je finis par remplir son verre et lui repose devant lui « Je suis passée le voir avant de commencer. Il va bien ». Même si ce n’est pas ce qu’il me demande, je sais que c’est au fond ce qu’il veut savoir « enfin, c’est ce qu’il dit » je rajoute après avoir servi un verre à un client venu commander directement au comptoir. « Je suppose que si vous me posez tous les deux la même question, c’est que ça ne s’est pas arrangé ? ». Je demande alors doucement, il n’y aucun reproche dans ma phrase, juste, encore une fois, de l’inquiétude.
L’Américain levait les yeux au ciel. Le sujet de son frère le touchait profondément et il s’en rendait compte lorsqu’il questionnait Stacey à son sujet. Depuis leur échange houleux dans la cuisine du restaurant, les deux frères avaient vécu chacun de leur côté, échangeant seulement quelques mots et quelques regards, se contentant de sauver les apparences devant les autres pour donner l’impression que tout était sous contrôle. Ça le bouffait de l’intérieur Mitchell, et même s’il donnait l’impression que tout allait bien, Stacey n’avait pas l’impression d’y croire et avait mené la conversation dans ce sens-là. Elle lui donnait des nouvelles d’Alec qui apparemment allait bien. Il était surpris d’entendre qu’il avait demandé des nouvelles à son sujet. Ça lui faisait plaisir à l’ainé d’entre cela, mais ça n’arrangeait pas les choses pour autant. La blessure entre les deux frères était bien trop profonde et seulement le temps allait pouvoir réparer leur relation, si toutefois, ils y mettaient du leurs. Il prenait une petite gorgée de son verre sans quitter du regard Stacey. « Malheureusement, nous sommes dans une impasse.» Il n’avait pas fait le nécessaire pour arranger les choses. Lorsque son frère lui avait fait part de ses reproches, il avait baissé les bras facilement et lui avait tourné le dos sans même vouloir tenter de préserver leur relation fraternelle. Une image qui n’avait pas plu à Alec. « L’important, c’est qu’il aille bien non ? » Qu’il disait presque ironiquement avant de finalement terminer à nouveau son verre, le tendant une fois de plus à la blonde. Il saluait un client qui était venu à sa rencontre, lui offrant un sourire digne des plus grands acteurs hollywoodien. Sauver les apparences, c’est tout ce qu’il savait faire en ce moment. Il s’allumait une seconde cigarette en évitant le regard de Stacey qui avait sûrement beaucoup de chose à dire au sujet des deux frères. Avait-il peur d’entendre la vérité de la part de la jeune femme ? Pouvait-elle toucher un point sensible ? Il ne voulait pas avoir cette conversation qu’elle semblait vouloir avoir avec le boss et encore moins au milieu de tout ce monde qui pouvait tendre trop facilement l’oreille. Il poussait un profond soupir et buvait son verre servi par la barmaid. Trois heures passèrent et le bar était enfin vide. Seul le personnel était encore présent. Mitchell se levait de son tabouret qu’il avait occupé toute la nuit et leur demandait de rentrer chez eux. « Demain, c’est une grosse soirée, allez vous reposer ! » Lui-même avait besoin de repos après les verres qu’il venait de boire, mais à défaut il s’appuyait contre le bar en regardant Stacey qui clôturait le bar. « Tu fais du bon boulot depuis que t’es ici.» Il avait envie de discuter, de parler d’autre chose que de ses problèmes. « Tu n’a pas de mal à supporter ce monde ? » Qu’il lui demandait finalement, pensant à ce que son petit frère lui avait dit, lui qui détestait tant tout ça, mais qui pourtant y était resté durant toute ces années.
« Malheureusement nous sommes dans une impasse ». Même si je le sais déjà, il ne fait que confirmer que rien ne s’est arrangé avec son cadet. La dispute qu’ils ont pu avoir il y a quelques semaines de ça n’a pas été qu’une simple querelle. Autant l’un que l’autre est resté évasif sur les détails de la dispute mais il n’y avait aucun doute que l’échange avait été violent, de vieilles rancœurs ayant été exprimées des deux côtés, quand leur vie, qui semblait si majestueuse aux yeux de beaucoup, renfermait des blessures bien plus profondes. Je me souviens de ce soir-là, où Mitchell était venu au bar, à la même place qu’il occupe actuellement. Il avait cette rage qui se lisait dans les yeux, mais qui trahissait aussi une tristesse qu’il tentait tant bien que mal de dissimuler. Je n’ai pas obtenu grande explication de sa part tout comme de la part du cadet le lendemain qui s’était montré même un peu sec à mon égard. Je grimace alors à son affirmation, l’air triste accompagnant celle-ci, espérant qu’ils finiront par trouver un terrain d’entente. « L’important, c’est qu’il aille bien non ? » A ça, mes épaules se haussent, peu convaincue « Tu sais très bien que ce n’est pas le cas. Il prétend aller bien, mais il ne va pas bien. Tout comme toi ». Tout comme moi, quand je sais très bien dissimuler mon inquiétude, dissimuler tout ce que je peux ressentir à l’égard de cette situation dans laquelle je suis, m’obligeant à mentir à mes proches. Je n’étais pas si différente que les frères à ce niveau-là. Il me tend encore son verre, je viens trouver son regard, lui montrant que je n’étais pas convaincue que cela était une bonne idée mais discuter avec Mitch à ce sujet était une bataille que je savais perdue d’avance. Je lui en ressers un, décidant finalement de lui laisser la bouteille devant lui. Je suis appelée à une table pour assurer le service, je m’absente alors, laissant Mitch dans ses pensées…
***
« Demain c’est une grosse soirée, allez-vous reposer ». Je regarde ma montre, exténuée par le service assez animé que je viens de passer. L’agitation dans le bar commence à redescendre, la voix du boss retentissant entre les murs, invitant tout le monde à rentrer chez eux. Je termine de ranger les derniers verres et clôturer la caisse alors que Mitch prend appui contre le comptoir « Tu fais du bon boulot depuis que t’es ici ». Un sourire vient étirer mes lèvres, en replaçant une mèche de cheveux qui me vient dans les yeux alors que je tiens une liasse de billets dans la main « Merci boss ». Cela faisait trois ans que je travaillais pour le Club et surtout pour le bar, ayant travaillé avant ça pendant un an pour le restaurant d’Alec en tant que serveuse. J’ai toujours été minutieuse dans ce que j’entreprenais, le genre bon élève, comme je pouvais l’être à l’école, me valant même parfois l’étiquette d’intello. Si désormais, les études étaient loin derrière moi, que ce soit pour le bar ou à l’hôpital, je faisais toujours en sorte de ne pas décevoir. « Tu n’as pas de mal à supporter ce monde ? ». Je note la recette du jour dans un carnet que je referme doucement, avant de le reposer à sa place. Je me retourne pour faire face à Mitchell « Je n’aurai jamais imaginer en faire partie un jour. Mais je le tolère… » A défaut de pouvoir faire autrement, plus par dépit que par envie « Je préfèrerai ne pas avoir à fréquenter ce monde, ne pas avoir à mentir à mes proches, à mon frère, à ma petite sœur. Mais, est-ce que j’ai le choix Mitch’ ? ». Je soupire « Mon déchet de père ne m’en laisse pas le choix. Je me dois de faire ça. Et toi et Alec m’aidaient à tenir le coup, à ne pas fuir dès qu’un pauvre type commence à se montrer un peu trop insistant ou que les histoires que je peux entendre m’effraie ». Parce que le Club n’était pas qu’une histoire d’un bar clandestin, que de trafic de drogues. Il y avait des histoires plus sordides, des choses que je me passerai de savoir, quand notamment je pouvais voir des escortes se pavanaient avec des types deux fois plus âgés qu’elle, profitant de ce besoin d’argent dont elles avaient besoin pour assouvir leurs envies… Des règlements de compte qui finissaient mal. Bref, tout était loin d’être rose, mais cette vie-là s’était imposée à moi malgré tout.
La famille. Mitchell n’avait rien de plus important dans la vie et pourtant il avait repoussé chaque fragment de bonheur possible au fil des ans. Ça avait commencé avec Meryl, avec qui il avait complètement coupé les ponts depuis quelques années, elle était peut-être sa demi-sœur, mais la distance avait eu raison d’eux. Gabrielle, qui avait su avoir une vie digne, bien ranger sans avoir à pencher du côté obscur. Ils s’appelaient de temps en temps, mais l’Américain tenait à tout prix de l’éloigner de la vie qu’il menait avec son petit frère. Elle ne méritait pas d’y mettre un pied, il s’en voudrait toute sa vie si elle se retrouvait en danger à cause de lui. Puis il y avait Alec, qui après des années de loyauté lui avait tourné le dos. La famille, rien de plus compliqué. Mitchell se concentrait sur sa vie de criminel et balayait toutes pensée envers la tristesse que ça lui procurait. Il y avait aussi un peu de fierté dans tout ça, ne voulant pas montrer le moindre signe de faiblesse pour ne pas être une proie facile pour ses ennemies. Stacey était pourtant bien placé pour le comprendre s’il tenait à se confier à elle à ce sujet, elle vivait également des tourments avec sa famille et se retrouvait au milieu de malfrat pour aider sa sœur. Elle avait pris les responsabilités que son père avait rejeté et portait un poids bien trop lourd sur ses épaules. Alec et Mitchell tentait de l’aider au maximum. Ils lui avaient proposer ce boulot pour lui permettre de gagner bien sa vie. Bien sûr, il y avait des moyens de gagner encore plus d’argents, mais la pousser dans ce milieu qu’est la prostitution n’était pas correct et ce même en s’appelant Mitchell Strange. Elle était comme une petite sœur, une jeune femme à protégé, à soutenir. L’Américain avait tout au long de sa carrière de criminel soutenu des âmes perdu, il avait tendu sa main à de nombreuses personnes. Certains s’en étaient en allé, d’autres l’avaient trahi et quelques uns étaient toujours présent à ses côtés. Le club c’était avant tout une famille dissimulé sous le business que ça représentait. Il avait fui ses responsabilités depuis son séjour en prison, il avait sombré après la mort de Mavis, mais il tenait plus que tout à ce que chacun s’en sorte, bien que les conspirations allaient bon train depuis quelques temps. Il observait Stacey un petit instant lorsqu’elle affirma qu’Alec n’allait pas bien et que lui non plus. Elle avait raison, mais il ne comptait pas l’avouer. Son attitude le montrait déjà assez.
Il congédiait chaque personne présente dans le bar avant de s’appuyer contre le bar pour discuter à nouveau avec Stacey qui clôturait le bar. Il en profita pour lui faire un compliment sur le travail effectué. « Pas de ça entre nous. Appel moi Mitchell ou Mitch ou Chell, mais oublie le boss ! » Qu’il disait en plaisantant avant de s’intéresser à son ressenti sur le Club. Elle confiait ne pas avoir le choix, elle aurait préféré faire autre chose pour s’en sortir. Il aurait aimé lui proposer autre chose pour lui éviter de se retrouver dans un tel monde, mais c’est tout ce qu’il avait à lui offrir sans la dénigrer ou la pousser à risquer sa vie. « On est là pour ça, dans ce monde il y a de vrais ordures et leur limite est inexistante.» Il marquait une pause. « Si j’ai l’occasion de t’offrir autre chose à faire je le ferai sans hésiter et si tu as besoin de quoi que ce soi il suffit de demander. » Qu’il disait d’un ton calme. « Rien de plus important que la famille n’est-ce pas ? Pourtant je suis obligé de te dire que tu ne pourras pas faire ça toute ta vie, tu dois penser à toi Stacey et crois-moi, je sais de quoi je parle. » Il pensait à Alec qui était resté auprès de son frère toutes ses années et qui le lui reprochait à présent. Un reproche amer pour l’ainé des Strange qui avait toujours pensé œuvré pour sa famille.
« Pas de ça entre nous. Appel moi Mitchell ou Mitch ou Chell, mais oublie le boss ! ». A ça, je pouffe un peu de rire, acquiesçant alors que je finis le décompte de mes billets « Merci Mitch’ », je réitère alors avec un sourire amusé au bout des lèvres. Cela faisait quatre ans que je le côtoyais et je le considérais avant tout comme mon patron, quoi qu’il en dise. Mais nos rapports allaient aussi au-delà de ça, il était comme un grand frère qui prenait soin de moi, au même titre qu’Alec. Les deux se sont toujours montrés très protecteurs à mon égard. Malgré la dureté de la réalité, la réalité de ces problèmes financiers auxquels je devais faire face mais aussi la réalité de la difficulté de travailler dans un tel milieu, les deux frères sont les piliers auxquels je me raccroche dans ce milieu. Sans eux, je ne suis pas certainement que j’aurai pu tenir dans ce milieu-là. D’ailleurs Mitchell me demande si je n’ai pas de mal à supporter celui-ci. Je lui fais part de mon ressenti, avouant qu’en effet, ce n’est pas tous les jours facile mais que grâce à lui et son frère, c’est ce qui m’aide à tenir, notamment face à des hommes qui peuvent se montrer lourdement insistant « On est là pour ça, dans ce monde il y a de vraies ordures et leur limite est inexistante ». Et je l’ai bien vu un bon nombre de fois. Ils pensent qu’avec leur argent tout leur est accessible, tout leur est permis. Parce qu’ils savent que, la plupart du temps, ceux qui évoluent dans un monde pareil, et notamment les jeunes femmes comme moi, c’est uniquement pour l’argent. Mais je n’ai jamais voulu céder à cet argent bien trop facile, parce que cela allait à l’encontre de mes valeurs. Ce poste de serveuse que j’occupe me suffit amplement. Je me sens à l’aise avec celui-ci quand je serais incapable de l’être si j’étais une escorte, comme mon amie Sasha. Cette amie qui me fait bien souvent part de son expérience en tant que tel, qui a parfois besoin de mon soutien, tout comme moi j’ai besoin du sien. Une amie cependant que je vois de moins en moins ces derniers temps, et lorsque je pense à elle à cet instant, ma mine se renferme un peu plus « Si j’ai l’occasion de t’offrir autre chose à faire je le ferai sans hésiter et si tu as besoin de quoi que ce soit il suffit de demander ». Mon regard se pose alors dans celui du chef de gang, reconnaissante de ces mots qu’il a pour moi, montrant encore une fois sa générosité à mon égard et sa bienveillance. « Rien de plus important que la famille n’est-ce pas ? Pourtant je suis obligé de te dire que tu ne pourras pas faire ça toute ta vie, tu dois penser à toi Stacey et crois-moi, je sais de quoi je parle ». Je viens à attraper un verre alors que je l’écoute parler, me servant à mon tour ce petit remontant que je prenais normalement à la fin du service avec Sasha. « Merci Mitch… Je sais que je peux compter sur toi mais sache que déjà, Alec et toi m’offraient beaucoup rien qu’en m’ayant accepté parmi cette famille ». Parce que c’est ce que représentait le Club malgré tout ce qui s’y tramait « Tu as raison, je ne pourrais pas faire ça toute ma vie… Mais tu sais aussi que je fais ça pour elle. Je ne peux pas penser à moi tant que je ne serai pas certaine que Mila puisse poursuivre ses rêves. Elle veut entrer dans cette école de stylisme à la rentrée prochaine et je ferai tout pour lui offrir cette opportunité. Mon bonheur n’est que secondaire à côté ». Parce que le sien sera déjà énorme et que si elle est heureuse, je le serai aussi. J’amène ce verre de whisky à mes lèvres pour en prendre une gorgée et repose le verre délicatement sur le comptoir « Tu as des regrets ? ». Je rebondis sur la fin de sa phrase, celle où il me dit savoir de quoi il parlait.
Aider Stacey à s’en sortir était devenu une mission et pourtant Mitchell avait conscience qu’il ne pouvait pas lui offrir plus, pas sans qu’elle y perde quelques plumes. Certes, il pouvait lui donner tout l’argent dont elle avait besoin sans même la contraindre à faire quoi que ce soi pour lui, mais cela ne faisait pas partie de ses valeurs. Chaque récompense devait être mérité via un travail effectué et si les frères avaient voulu l’éloigner des rues sombres et des mains baladeuses, le poste de serveuse n’était pas le mieux payer. L’Américain n’hésitait pas à lui laisser des pourboires généreux à chacun de ses passages au bar, il faisait son possible pour être discret au maximum, mais espérait que ce genre de bonus pouvait l’aider d’avantage. Elle le remerciait, elle lui faisait savoir qu’elle savait qu’elle pouvait compter sur lui et ses mots ne manquèrent pas de le faire sourire, puis elle lui posa une question qui le laissa sans voix durent plusieurs secondes. Avait-il des regrets ? « J’en ai tous les jours. » Répondait-il finalement en prenant une nouvelle gorgée de son verre. Stacey touchait un point sensible et si en temps normal il ne se serait pas lancé sur le chemin de la confession, il eut cette envie de le faire et ne tarda pas à reprendre la parole sans la quitter du regard. « Tu ne le sais peut-être pas, mais quand j’étais jeune j’étais destiné à devenir un champion de moto cross, c’était innée chez moi, ça rythmait ma vie et je voulais y arriver à tout prix. Tout se passait parfaitement bien, puis un jour j’ai chuté, je me suis salement blessé et j’ai dû dire adieu à ma carrière qui m’aurait offerte une tout autre vie que celle que je mène actuellement. » La nostalgie ne manquait pas de s’emparer de lui, il repensait à ces années passées à faire des courses de moto, une époque ou aucune once de méchanceté ce manifestait chez lui. « Ça a été le début, j’ai eu l’opportunité de gagner de l’argent facilement, bien plus facilement que de faire simplement de la moto et c’est sûrement le plus mauvais choix que j’ai fais de ma vie. » avouait-il. « Je regrette d’avoir fait ce choix, mais ce que je regrette le plus c’est d’apprécier cette vie. » Oh oui, il avait beau regretté d’avoir choisi l’argent facile, d’avoir succombé à la proposition de Mavis qui lui promettait une plus belle vie. Il avait réussi à obtenir ce qu’il voulait, il avait l’argent, le pouvoir, mais il se sentait plus seul que jamais et devait s’habituer à vivre avec les conséquences de ses actes. Puis il pensa à sa petite sœur Gabrielle, qui avait pu financer ses études en droit grâce à cette argent gagner salement, un fait que les frères ne tenaient jamais à lui faire savoir. Comment ce sentirait-elle si elle l’apprenait ? Devenir avocate grâce à de l’argent venant du crime, c’était peu glorifiant. Ça le forçait à penser que Mila pourrait ne pas apprécier ce que ça sœur fait pour elle, malgré le fait que ça lui permet d’accéder à ses rêves. « Fais ce qu’il faut pour aider ta famille, mais ne met pas de côté les conséquences que ça pourrait avoir. » Il se voulait bienveillant envers Stacey et même s’il était mal placé pour lui donner ce genre de conseil, puisque c’était lui finalement qui lui offrait ce travail qui n’aurait rien d’illégal s’il se passait dans un bar de nuit légal.
Stacey veut savoir si Mitchell a des regrets. Des regrets liés à cette vie qu’il a choisie, celle de chef de gang. Elle se rend compte d’ailleurs que sa question laisse s’installer un court silence, comme si sa question l’avait surpris « J’en ai tous les jours ». Son regard vient alors à se planter dans celui de Mitchell, cherchant peut-être à en savoir plus sans oser lui demander « Tu ne le sais peut-être pas, mais quand j’étais jeune j’étais destiné à devenir un champion de moto cross, c’était innée chez moi, ça rythmait ma vie et je voulais y arriver à tout prix. Tout se passait parfaitement bien, puis un jour j’ai chuté, je me suis salement blessé et j’ai dû dire adieu à ma carrière qui m’aurait offerte une tout autre vie que celle que je mène actuellement ». Elle ignorait ce passé qui lui livre et découvre une autre facette de lui. Celle d’un jeune homme qui lui aussi avait ses rêves mais qui ont été brisé du jour au lendemain. Ce n’est pas sans rappeler évidemment ses propres rêves qu’elle a laissé de côté, non pas par choix mais par obligation. Et elle se rend compte finalement, que, sur ce point, même si les raisons qui les ont poussé chacun à abandonner leur carrière de prédilection sont différentes, ils se rapprochent. « Ca a été le début, j’ai eu l’opportunité de gagner de l’argent facilement, bien plus facilement que de faire simplement de la moto et c’est sûrement le plus mauvais choix que j’ai fais de ma vie ». Les regrets sont exprimés une deuxième fois et Stacey comprend alors qu’il aurait voulu une tout autre vie. Mais qu’une fois les pieds dans l’illégalité, on ne s’en sort plus… ou du moins, on y prend bien trop goût « Je regrette d’avoir fait ce choix, mais ce que je regrette le plus c’est d’apprécier cette vie ». Là encore, elle fait le parallèle avec ce choix qu’elle a fait aussi, même si son rôle est bien moindre au sein de l’organisation. Mais peut-être sera-t-elle amenée à s’investir davantage tôt ou tard si elle veut parvenir à gagner plus d’argent ? Et si finalement, elle aussi ne s’en sortait jamais ? Elle sait qu’elle ne sera jamais retenue par Mitchell, parce qu’il cherche à la protéger de tout ça, mais si elle-même y prenait goût ? Si finalement, cette vie illégale lui plaisait bien plus, du fait de la facilité à gagner plus d’argent ? Mitchell peut voir de l’inquiétude dans ceux-ci, une inquiétude qui traduit une certaine peur, celle de devoir se cantonner désormais à cette vie qu’elle n’a choisi qu’à moitié. « Fais ce qu’il faut pour aider ta famille, mais ne met pas de côté les conséquences que ça pourrait avoir ». Son verre reste statique dans sa main alors qu’elle n’a pas quitté une seule seconde le regard de Mitchell. Elle laisse s’installer un silence pendant lequel elle réfléchit à tout ce qu’il vient de lui dire et tente de reprendre contenance « Tu penses qu’on ne peut plus échapper à cette vie une fois qu’on y est dedans ? » parce que c’est ce qui laisse entendre malgré tout « Je ne pourrais jamais être transparente avec mon frère et ma petite sœur sur ce second job et je le sais… mais je sais aussi que si un jour, ils venaient à l’apprendre, autant l’un que l’autre pourrait ne pas me le pardonner… Et ce n’est pas ce que je veux. Je ne pourrais pas supporter de les perdre tous les deux… ». Ils pourraient décider de s’éloigner d’elle, ce qu’elle comprendrait surtout qu’en fréquentant un tel monde, elle pouvait les mettre en danger à tout instant… Son père le faisait déjà, et voilà qu’elle, finalement, qui savait lui reprocher, ne faisait pas mieux. Elle soupire, saisissant son verre comme pour le porter à ses lèvres mais elle se stoppe dans son geste « Je ne cherche pas à les mêler à tout ça, mais tôt ou tard, c’est ce qui risque d’arriver… ». Peut-être était-il temps pour elle de trouver une autre solution mais elle n’en voyait aucune. Son regard s’est perdu depuis quelques minutes déjà, fixant le vide avant de revenir sur Mitchell « Si tu regrettes autant, pourquoi tu n’arrêtes pas Mitch ? ». Elle ne voulait pas qu’il prenne cela personnellement, surtout avec les discours qu’on pouvait entendre ces derniers temps à droite et à gauche « Tu peux mener la vie que tu as envie désormais, qu’est-ce qui te retient ? ».
Elle posait une question à la fois intéressante et à la fois troublante. Une question qui ne manqua pas de faire réfléchir l’Américain. Etait-il possible d’échapper à cette vie une fois un pied dedans ? Il n’était pas le mieux placer pour répondre à cette question en réalité puisqu’il n’avait jamais réussi à s’en sortir malgré les opportunités. Il avait cependant aider quelques personnes tout au long de sa carrière dans le crime à s’en sortir et c’était encourageant pour se dire que oui, c’était possible. « Je pense que c’est une question de volonté. Si tu veux en sortir t’en sors, mais le plus difficile ce n’est pas de tourner le dos à cette vie, oh non, c’est d’éviter le retour de bâton derrière, car les gens qui auront croisé ta route n’auront peut-être pas eu cette chance et c’est eux qui pourraient te retenir ou te faire à nouveau tomber là-dedans. » Il pensait à Mavis sa défunte épouse, celle qui l’avait entrainé dans ce monde alors qu’il se remettait à peine de sa défaite en moto cross. Bien des fois il avait tenté de tourner la page et bien trop de fois elle l’avait tiré vers le bas. « Que tu le veuilles ou non, ça te collera toujours à la peau, mais le plus important c’est de rester celle que tu es et de ne pas chavirer de l’autre côté. » Du mauvais côté, le côté qui l’avait attiré bien trop facilement au fil de toutes ces années et qui avait également attiré bien trop de monde, malgré eux. Stacey n’avait rien à faire dans cet univers et pourtant pour aider sa famille elle faisait le sacrifice d’être là, à prendre des risques. Alors oui, si ça venait à s’apprendre, ils lui en voudront, ils lui tourneront peut-être même le dos, c’était quasi certain. Mitchell avait depuis longtemps mis une croix sur ce risque. Voulant garder à tout prix ses deux sœurs éloigné de tout ça, à défaut d’avoir entrainé son petit frère avec lui. Il ne s’autorisait plus à s’attacher à quiconque, bien que sa faiblesse pour les femmes lui jouait souvent des tours. Il avait une pensée pour River qui l’avait approché peu de temps après la mort de Mavis, elle avait réussi à l’atteindre et avait tout pour le faire tomber, toute les preuves sur sa double vie. Heureusement, sa volonté de fuir son mariage sauva l’Américain qui récupéra chacune des preuves avant de finalement de partir pour l’Europe en compagnie de la journaliste qui lui faisait tourné la tête. Il s’était refusé de franchir le pas avec elle et pourtant ce n’était pas l’envie qui manquait, mais faire une fois de plus une erreur n’était pas voulue, Lou l’avait suffisamment abimé. « Tu ne pourras pas les garder en-dehors de tout ça indéfiniment, tout se sait un jour ou l’autre. » et il était bien placé pour dire cela. « Tout est une question de choix, il faut faire les bons choix et surtout ne pas les regretter. » En parlant de regrets, il avouait à Stacey le fait de regretter quelques fois cette vie et sans surprise, elle lui posa la question qui n’avait jamais eu de réponse jusque-là. Pourquoi continuait-il ? Il ne pu s’empêcher de grimacer face à cette question plongeant son regard dans celui de Stacey. Pouvait-il se contenter de lui répondre qu’il n’en savait rien ? « Même si je le voulais je ne pourrais pas reprendre une vie normale. » Qu’il disait sas la quitter du regard. Il avait bien trop d’ennemis pour vivre paisiblement. « Ce monde fait partie de moi et … » Il soupirait tout en se demandant s’il devait vraiment poursuivre. « laisse tombé. J’en sais rien en réalité. » Il ne voulait pas lui faire part des nombreux ennemies qui voulaient sa peau, il ne voulait pas lui faire savoir qu’il était un monstre, un monstre dans son élément.
« Je pense que c’est une question de volonté. Si tu veux en sortir t’en sors, mais le plus difficile ce n’est pas de tourner le dos à cette vie, oh non, c’est d’éviter le retour de bâton derrière, car les gens qui auront croisé ta route n’auront peut-être pas eu cette chance et c’est eux qui pourraient te retenir ou te faire à nouveau tomber là-dedans ». Ses mots lui font craindre qu’elle ne puisse réellement en échapper. Que si elle souhaite vraiment sortir de ce monde qu’elle côtoie désormais, il faudra peut-être qu’elle vienne à fuir la ville. Pourtant elle n’a qu’un simple rôle de serveuse. Mais peut-être que ceux du Club estimeront qu’elle sait bien trop de choses pour la laisser s’échapper aussi simplement. Surtout quand elle a les oreilles qui trainent malgré tout, qu’elle entend les vives discussions entre clients ou dealeurs, qu’elle a entendu des pactes affreux se sceller sous son nez. Elle ne répond rien mais Mitchell pourra voir la détresse dans ses yeux. « Que tu le veuilles ou non, ça te collera toujours à la peau, mais le plus important c’est de rester celle que tu es et de ne pas chavirer de l’autre côté ». Il y a une certitude en elle à ce sujet, c’est qu’elle ne changera pas parce qu’elle travaille pour le Club. Une autre chose est sûre, c’est qu’elle ne veut pas être mené à l’illégalité, qu’elle ne cherche pas à s’investir plus quand pourtant, l’idée lui a effleuré l’esprit pendant un petit temps de faire de l’escorting. Mais sur les conseils de Sasha, elle a fini par abandonner l’idée et pour ça, elle ne la remerciera jamais assez. « Je suppose que ça, j’en suis capable » finit-elle par répondre doucement. Elle évoque ensuite sa famille, Lawrence et Mila qui ignore totalement pour qui elle travaille. Elle a toujours prétendu et continue encore de prétendre qu’elle travaille pour le restaurant. Stacey sait pertinemment que sa petite sœur et son frère ainé n’accepteront jamais qu’elle soit mêlée à un gang. « Tu ne pourras pas les garder en-dehors de tout ça indéfiniment, tout se sait un jour ou l’autre. Tout est une question de choix, il faut faire les bons choix et surtout ne pas les regretter ». Il est honnête et transparent avec elle, ne cherchant pas à lui faire croire qu’elle parviendra à rester secrète à l’égard de Mila et Lawrence. Elle le sait au fond mais l’entendre à voix haute l’effraie. Lawrence lui en voudra, elle redoute déjà par avance sa réaction quand elle connait que trop bien son caractère. Et elle ne peut imaginer la déception immense que sa petite sœur ressentira. Elle laisse échapper un soupir, préfère ne pas y penser pour le moment et espère qu’elle n’aura pas à devoir les confronter de sitôt à ce sujet. Peut-être même espère-t-elle qu’elle sortira du Club avant qu’ils ne soient au courant.
Il y a des regrets exprimés de la part de Mitchell, que ce soit dans ses paroles mais aussi dans sa voix. Alors, naturellement, Stacey cherche à comprendre pourquoi il n’arrête pas et surtout qu’est-ce qui le retient à poursuivre cette vie dans l’illégalité « Même si je le voulais je ne pourrais pas reprendre une vie normale ». Elle maintient son regard et si elle ne pose pas la question du pourquoi, il peut le voir implicitement dans son regard « Ce monde fait partie de moi et… laisse tombé. J’en sais rien en réalité ». Ça l’attriste et ses sourcils se froncent en le regardant. Elle sait qu’il a de nombreux ennemis, et que ce qu’il a pu lui dire plus tôt, concernant ce fameux retour de bâton, s’appliquera évidemment pour lui aussi. Surtout quand le vent semble tourner en sa défaveur ces derniers temps. Elle est désolée pour lui, quand elle voit qu’il ne semble pas voir d’issues possibles pour lui et quand, pourtant, il aimerait quelque part au fond de lui en sortir « On a tous droit à une seconde chance, Mitch… Si tu le veux vraiment, je suis persuadé que toi aussi, tu peux quitter ce monde et vivre la vie que tu souhaites. Tu pourrais partir où bon te semble, parcourir le monde, rencontrer quelqu’un et commencer à construire ta propre famille si c’est ce que tu veux ». Sa vision est naïve, mais comment peut-elle être autrement quand elle ne voit pas qui il est vraiment ? Quand elle ignore bien trop de choses sur lui ? Bien sûr qu’elle ne peut pas savoir, peut-être que sa vision serait différente si elle était au courant de tout. Stacey a toujours ce regard désolé à l’égard de Mitch puis vient à saisir son verre pour le finir d’une traite. Son téléphone vient alors à vibrer, un message de Mila qui semble s’inquiéter qu’elle ne soit toujours pas rentrée. Elle lui répond rapidement avant de remettre son portable dans la poche arrière de son jean. « Mila s’inquiète… Je vais devoir rentrer ». Elle fait le tour du bar, vient à passer à côté de Mitch, posant une main sur son épaule « Merci pour tout Mitch… ». Elle le remercie pour l’aide qu’il lui apporte mais aussi pour cette oreille attentive qu’il est toujours pour elle, mais aussi pour cette façon qu’il a de vouloir la préserver des noirceurs du gang. Elle resserre un peu plus son étreinte avec sa main et finit par quitter le bar, rejoignant la porte arrière pour rejoindre sa voiture et rentrer en direction de Logan City.