Il s’en était fallu de peu, c’était ce qu’on m’avait dit au petit matin. Si Molly n’était pas intervenue rapidement, si elle n’avait pas eu les bons gestes, si les secours n’étaient pas vite arrivés, je ne me serais pas réveillé. L’alcool ingéré en aussi grande quantité et bien trop rapidement avait entraîné le coma. Molly m’avait trouvé étouffé dans mon vomi, l’arrêt respiratoire ayant entraîné un arrêt cardiaque en quelques minutes. Depuis ce matin, pourtant les paroles des médecins peinaient à traverser le brouillard de mon esprit, j’étais encore choqué par les évènements, incapable de réaliser à quel point je venais de frôler la mort. Plus que tout j’avais honte. Honte d’être tombé aussi bas, honte d’avoir fait subir cela à Molly et à mes proches. J’avais passé ma journée à dormir, me réveillant de temps en temps, bourré de médicaments pour que mon corps supporte le choc de l’arrêt d’alcool. Molly était partie il y a plusieurs heures, devant travailler, la visite de mes parents avait été courte, j’avais fui la conversation en prétendant ne pas être bien, bien trop fatigué encore. Cela m’avait permis d’échapper à leur regard aussi terrifié à l’idée d’avoir failli perdre leur fils, que déçu par cette chute accélérée qu’ils n’avaient pas su voir.
Je me suis réveillé avec la gorge sèche, l’esprit encore dans le brouillard, en ayant toujours un peu l’impression qu’une voiture m’était passée dessus. J’ouvre les yeux, la lumière toujours un peu trop vive à mon goût, regardant autour de moi en cherchant à m’orienter, me rappelant inévitablement ce qui s’est passé la veille, la peur et la honte bien trop présente dans mon esprit. Mes poings se ferment instinctivement sur le lit d’hôpital, agrippant les draps. Je n’arrive pas à croire ce qui s’est passé et l’envie d’une cigarette pour apaiser mes nerfs est bien trop forte. Pire que tout je commence à avoir envie d’un verre, même malgré tout ce qui s’est passé.
C’est la sensation d’être observé qui me fait tourner la tête vers la porte. Cela aurait pu être n’importe qui. Ma sœur ou mon frère, mes parents, Molly ou même un simple médecin venant s’assurer que je suis stable. Mais non, il fallait que ce soit elle.
Hannah fucking Whitemore. Une grimace apparaît immédiatement sur mon visage dès l’instant où je la vois sur le pas de la porte. « Qu’est ce que tu fais là ? » Ma voix est rauque, alors que je refuse de croiser son regard. Je n’ai pas envie qu’elle me voit comme ça, pas envie d’entendre un énième sermon, parce qu’il est évident que la Whitemore n’est pas là pour me souhaiter un bon rétablissement avec toute l’affection du monde. Alors qu’on en finisse.
Lorsque Molly l’avait appelée en pleurs, Hannah avait mis du temps à comprendre la gravité de la situation. Pourtant, Peter avait bel et bien été amené en urgence au St Vincent en arrêt après avoir ingéré une quantité d’alcool telle qu’il avait fait un coma éthylique. Son visage s’était fermé à l’instant même où son amie avait prononcé le prénom du jeune homme, signe qu’elle s’était retrouvée au même endroit que lui et que par conséquent, elle était encore très loin de se défaire de cette relation toxique qui lui pourrissait la vie. La petite brune l’avait suppliée de lui rendre visite afin de vérifier que tout allait bien et qu’on prenait soin de lui, mais Hannah s’était refusée à lui promettre quoique ce soit. A ses yeux, Peter n’était qu’un nuisible et rien en lui ne méritait qu’elle fasse un pas dans sa direction. A part passer son temps à se détruire et à détruire le peu de personnes faisant partie de son entourage, le jeune homme ne faisait pas grand-chose de conséquent de sa vie. Alors pourquoi Molly s’obstinait-elle à vouloir le sauver, à espérer qu’il change ? C’était sur cette pensée que le médecin avait pris la direction de l’hôpital, non pas dans l’idée de rendre visite à Peter mais bien pour prendre son service et s’occuper de ceux qui avaient réellement envie qu’on les aide. Et ce fût ce à quoi elle passa le plus clair de son temps, jusqu’à ce qu’un message de la jeune Oakheart agisse comme un rappel à l’ordre en lui demandant si elle avait eu l’occasion de rendre visite au brun. Hannah eût envie de lui répondre qu’il valait mieux pour lui qu’elle se tienne loin de sa chambre, mais à la place, elle lui assura qu’elle ferait le détour par le service où il se trouvait. Molly était suffisamment heurtée par les évènements sans qu’elle n’ait besoin d’en rajouter une couche et par conséquent, la jeune femme décida de prendre sur elle et d’aller voir si le Mulligan était traité correctement. Une fois face à lui, la brune croisa les bras et se laissa aller contre l’embrasure de la porte, observant la débâcle dont il était le seul coupable. « Qu’est ce que tu fais là ? » Il n’eût même pas le courage de la regarder en face, préférant grimacer et marmonner tel l’enfant qu’il était réellement au fond de lui. « Je viens vérifier que t’es toujours en vie. » Lâcha-t-elle en s’approchant finalement, attrapant son dossier pour vérifier ses constantes avant de le reposer d’un geste sec. « C’est une seconde nature chez toi de te foutre en l’air ? T’aurais pu avoir la décence d’épargner ça à Molly. C’est pas comme si elle en avait pas déjà assez bavé par ta faute. » Son amie lui avait-elle aussi précisé d’être gentille ? Elle n’avait aucun souvenir à ce sujet.
Elle n’a rien à faire là. Elle n’est pas mon amie, m’a toujours peu apprécié pour ne pas dire détester. Elle n’est pas mon médecin, il n’y a donc aucune raison de la trouver dans cette chambre. « Je viens vérifier que t’es toujours en vie. » Je roule des yeux, refusant toujours de croiser son regard alors qu’elle s’approche pour vérifier mon dossier. « Du coup c’est bon, t’es déçue, tu peux repartir maintenant ? » Mon ton est sarcastique mais il n’a pas le même entrain que d’habitude. Je suis fatigué et je n’ai aucune envie de me battre avec elle. « C’est une seconde nature chez toi de te foutre en l’air ? T’aurais pu avoir la décence d’épargner ça à Molly. C’est pas comme si elle en avait pas déjà assez bavé par ta faute. »
C’était exactement ce que je n’avais pas envie d’entendre. Je déglutis, une légère grimace déformant mes traits. Elle a raison, Molly n’aurait jamais dû être celle à me trouver, encore moins dans cet état. Elle m’avait sauvé la vie ce soir-là. Comme toujours pourtant, mes actes ne lui avaient causé que de la douleur et de la tristesse et je m’en voulais d’avoir encore été égoïste avec elle.
Les battements de mon cœur s’accélèrent et la honte me donne envie de m’enfoncer dans ce matelas et de disparaître. Je pose un instant mon regard sur Hannah. « J’voulais pas la faire souffrir. » Pas cette fois ci en tous cas. Je ne voulais plus la faire souffrir. Je n’avais même pas le souvenir de l’avoir appelée. J’aurais pu ajouter que je n’avais pas eu envie qu’elle me trouve et pour ça il aurait fallu admettre les pensées qui m’avaient taraudé l’esprit, le sentiment d’être un moins que rien, de tout détruire autour de moi. Ce n’était pas à elle que j’allais admettre à quel point tout allait mal. « Qu’est ce que tu veux Whitemore ? T’as pas d’autres patients à aller emmerder ? » Manquerait plus que ça tient, que je sois un de ses patients. L’idée de rencontrer tout psychiatre ou psychologue m’avait toujours horripilé, mais l’idée que ce soit elle, était probablement mon pire cauchemar. Heureusement je savais qu’il n’y avait pas de raison ici que ce soit la raison de sa présence. Mon regard se détourne de nouveau et je soupire cette fois, le regard lourd de tristesse. « J’ai pas besoin de toi pour me dire que j’ai merdé. »
Le regard froid, Hannah fixait le visage de Peter qui en disait long sur ce qu’il venait de vivre. Son teint était pâle et ses traits tirés, signe évident qu’il n’était pas parvenu à trouver le sommeil. Était-il un tant soi peu rongé par la culpabilité ou seulement tiraillé par la douleur ? Le jeune homme était tellement égoïste que la brune n’aurait pas été étonnée d’apprendre qu’il se souciait uniquement de lui et non de la peine qu’il avait forcément infligée à son entourage en se comportant de la sorte. « Du coup c’est bon, t’es déçue, tu peux repartir maintenant ? » Le dossier de Peter en main, le médecin feuilletait les pages en l’ignorant royalement, se tenant simplement aux faits comme elle l’avait promis à Molly. Pas d’erreur médicale en vue, il allait s’en sortir et quitter l’hôpital aussi frais que possible – compte tenu des circonstances. Le ton employé par le brun ne fit pas broncher Hannah qui se contenta de relever les yeux vers lui avant de déposer le dossier sans laisser la moindre émotion transparaître sur son visage. « J’ai promis à Molly de garder un œil sur toi, il ne s'agit pas d'une visite de courtoisie. » Et elle aurait pu s’en tenir à ça, quitter sa chambre et rassurer son amie sans plus de cérémonie. Mais les occasions de le tenir ainsi entre quatre yeux étaient rares, pour ne pas dire inexistantes, et la brune décida de ne pas passer à côté. Il était temps qu’elle lui dise sa façon de penser et qu’il comprenne à quel point son comportement était nocif, et pas seulement pour lui. Ses paroles eurent l’effet escompté et en son for intérieur, Hannah fut rassurée de voir que le fait d’évoquer Molly ne le laissait pas de marbre. « J’voulais pas la faire souffrir. » « Et pourtant, tu t’y prends plutôt bien pour quelqu’un qui ne voulais pas la faire souffrir. » Qu’est-ce que ça aurait été s’il en avait réellement eu l’intention ? « T’aurais pas pu appeler les urgences directement ? Lui éviter le spectacle ? » Nul doute que les images continueraient de hanter la petite brune pendant encore longtemps. « Qu’est ce que tu veux Whitemore ? T’as pas d’autres patients à aller emmerder ? » Un sourire sans joie étira les lèvres du médecin qui secoua la tête, tentée de lui faire croire qu’elle allait être en charge de son cas. « Je suis en pause et je venais voir qui allait hériter de ton cas, justement. » Il aurait pu plus mal tomber, mais son collègue allait avoir du mal à savoir à quoi il avait affaire avec Peter. « J’ai pas besoin de toi pour me dire que j’ai merdé. » Le brun détourna le regard et Hannah fronça les sourcils ; était-ce le moment où elle baissait sa garde face à son air de chien battu ? Pas de chance pour lui, il n’avait pas la bonne sœur Whitemore face à lui pour ça. « C’est bien de reconnaître que tu as merdé, mais la question est surtout de savoir si tu as prévu de rattraper le coup ? » Elle pencha la tête sur le côté et désigna le dossier du brun. « A cette vitesse, tu reviendras nous voir pour une défaillance due à tes excès, et peut-être qu’on ne pourra plus rien faire pour t’empêcher de sortir d’ici les deux pieds devant. » Hannah noircissait volontairement le tableau, espérant ainsi provoquer un électrochoc chez le brun qui semblait se complaire dans son rôle de victime alors qu’il était le seul responsable de son état. « C’est ça l’histoire, tu veux vraiment en finir ? » Elle s’avança légèrement vers lui pour l’obliger à la regarder dans les yeux. « Parce qu’il y a des moyens plus rapides d’y parvenir tu sais. » Cette fois, l’ironie de ses paroles était palpable. Le but était de le provoquer, d’obtenir une réaction et de le sortir de son état apathique. Dans le fond, la jeune femme n’espérait qu’une chose ; comprendre ce qu’il se passait dans l’esprit de cet homme que Molly aimait tant, en dépit de tout bon sens.
« J’ai promis à Molly de garder un œil sur toi, il ne s'agit pas d'une visite de courtoisie. » A quoi Molly a bien pu penser pour proposer à sa meilleure amie qui me déteste de venir garder un œil sur moi ? Elle aurait bien été capable de m’empoisonner ou pire de me faire interner et elle l’aurait sûrement eu un sourire satisfait. Cela dit je n’étais peut-être pas objectif. « Molly s’inquiète pour rien, j’ai pas besoin d’une babysitter et encore moins que ce soit toi. » Je n’espère qu’une seule chose, qu’elle parte et vite. Mais bien sûre qu’Hannah reste et appuie sur tout ce qui fait mal, n’ayant même pas à réveiller la culpabilité que je ressens, elle est présente dans chacune de mes pensées. « Et pourtant, tu t’y prends plutôt bien pour quelqu’un qui ne voulais pas la faire souffrir. » Je grince des dents, refusant d’affronter son regard. Je n’ai pas envie de lui montrer que les mots me blessent plus que je ne voudrais l’admettre. Je m’étais promis de ne plus la blesser et j’avais encore une fois échoué lamentablement. « T’aurais pas pu appeler les urgences directement ? Lui éviter le spectacle ? » Mes poings se serrent dans les draps et cette fois je relève mon regard vers le sien, mon ton venimeux alors que je réplique : « Et toi t’es sûre que t’as fait médecine ? Parce qu’aux dernières nouvelles quand quelqu’un est inconscient il peut pas appeler les urgences. » Je n’avais même pas le souvenir d’avoir dépassé le verre de trop, d’avoir fini inconscient sur le sol de cette chambre d’hôtel. Je murmure plus doucement, la honte s’insinuant dans mes parolesf : « Je voulais pas qu’elle vienne. Je voulais pas qu’elle me trouve comme ça. » Mais Molly avait été plus intelligente que ça. Après avoir débarqué chez moi elle avait utilisé les applications sur son téléphone pour déterminer ma position. Elle avait insisté pour me trouver dans cet hôtel à l’accueil. Elle avait été chanceuse. Ou plutôt j’avais été chanceux qu’elle me trouve vivant, que ça n’ait pas été trop tard.
« Je suis en pause et je venais voir qui allait hériter de ton cas, justement. » Roulement de yeux de nouveau, l’idée de voir un psychiatre me débecte particulièrement. Pourtant là aussi je sais que je n’y échapperais sûrement pas.
« C’est bien de reconnaître que tu as merdé, mais la question est surtout de savoir si tu as prévu de rattraper le coup ? » Mon regard s’échappe de nouveau alors que je reste silencieux. « A cette vitesse, tu reviendras nous voir pour une défaillance due à tes excès, et peut-être qu’on ne pourra plus rien faire pour t’empêcher de sortir d’ici les deux pieds devant. » Une grimace déforme mes traits. « Ta gueule Whitemore. » je crache pour qu’elle se taise. Je ne veux pas recevoir de leçons de sa part, je ne veux pas parler de cette issue qui me semble parfois être la seule, pourtant…ce n’est pas celle que je veux. « C’est ça l’histoire, tu veux vraiment en finir ? Parce qu’il y a des moyens plus rapides d’y parvenir tu sais. » Je la regarde un instant, un court instant en silence, hésitant. Je sais que ce silence veut trop dire, qu’il aura duré trop longtemps pour ne pas révéler que j’y avais pensé. Ce soir-là je m’étais demandé si mes proches ne seraient pas mieux sans moi. Ce soir-là j’avais voulu m’effacer complètement, ne plus rien ressentir et oublier ma vie entière. Ce n’est pas à elle que je souhaite montrer ça, pas à elle que je souhaite dévoiler l’abysse dans laquelle je me suis plongé. Mais je sais une chose, que je me suis réveillé soulagé d’être en vie en serrant la main de Molly dans la mienne. « Je veux pas mourir. » Je finis par affirmer, après un moment d’hésitation bien trop long. Non je suis fatigué de foirer, fatigué de blesser. Mais je ne veux pas mourir. Je soupire, en passant une main sur mon visage, rêvant d’une clope et d’un verre ou de dix, même après tout ça. « Je sais que j’ai un problème Hannah. » Je dis ça comme si le savais depuis mois quand en réalité je commence seulement à peine à le réaliser vraiment. « Mais j’arrive pas à…arrêter de boire. » J’admets finalement, presque à contrecœur, mes mains serrant les draps.
Hannah pris soin de préciser qu’elle n’était pas là de son plein gré, car elle n’aurait jamais été lui rendre visite d’elle-même si Molly ne le lui avait pas demandé. Ils ne s’étaient jamais appréciés et plus le temps passait, moins leurs rapports se montraient cordiaux. La seule chose qui les empêchait de s’étriper était leur affection respective pour la petite brune, preuve en était par cet échange qui n’avait lieu que parce que la jeune Oakheart s’en était mêlé, une fois encore. « Molly s’inquiète pour rien, j’ai pas besoin d’une babysitter et encore moins que ce soit toi. » Le médecin porta une main à sa poitrine, prétendant être offusquée par sa réaction, mais pourtant bien décidée à camper dans sa chambre durant toute la durée de sa pause, comme elle l’avait promis à sa meilleure amie. « C’est vrai que c’est plutôt anodin de frôler la mort, elle devrait vraiment revoir ses priorités. » Ironisa-t-elle en tirant une chaise et en s’asseyant face à lui mais à distance raisonnable avant de s’emparer de son café et de le porter à ses lèvres, sans le quitter des yeux. L’opportunité de lui ouvrir les yeux sur ses conneries était trop belle et Hannah décida de ne pas mâcher ses mots, surtout pas après ce qui venait de passer. Molly était dévastée, une fois de plus, par sa faute. Quand allait-il se rendre compte qu’il y avait encore certains de ses proches qui tenaient à lui et qui souffraient de cette situation, peut-être davantage que le principal concerné ? Peter fuyait son regard, mais elle s’en fichait ; ça n’allait pas l’empêcher de lui dire ce qu’elle avait à dire. « Et toi t’es sûre que t’as fait médecine ? Parce qu’aux dernières nouvelles quand quelqu’un est inconscient il peut pas appeler les urgences. » La jeune femme n’avait pas eu tous les détails de l’histoire et avait supposé que Molly l’avait retrouvé après qu’il l’ait appelé, mais apparemment, ça s’était passé légèrement différemment. Peu importait finalement, le résultat était le même : la brune avait été la première sur les lieux et avait assisté à une scène effrayante, la plongeant dans une détresse de laquelle elle n’était pas encore vraiment sortie. « J’étais pas là moi contrairement à elle, excuse moi de ne pas avoir demandé tous les détails sordides. » Lança-t-elle sur le même ton, peu désireuse de subir des attaques alors qu’il était le seul responsable de l’état dans lequel il se trouvait actuellement. « Je voulais pas qu’elle vienne. Je voulais pas qu’elle me trouve comme ça. » Et pourtant. « Est-ce que tu voulais que qui que ce soit te trouve ? » Le sous-entendu était clair, mais elle s’abstint de formuler plus clairement ce qu’elle avait en tête. La brunette n’était pas là pour faire son suivi psychologique, quelqu’un d’autre s’en chargerait, mais les habitudes avaient la vie dure et puisque le jeune homme semblait persister à rester dans la vie de Molly, autant qu’elle comprenne comment il fonctionnait. C’était peut-être leur seule chance d’avoir une vraie conversation, lui étant cloué au lit et elle ayant promis de veiller sur lui à son amie. « Ta gueule Whitemore. » Son discours n’avait pas l’air de lui plaire, ce qui était le but de toute façon. Il avait eu de la chance et rien n’indiquait que la prochaine fois se passe aussi bien pour lui. L’abus d’alcool risquait de lui créer des problèmes à plus long terme aussi, ce qui ne manquerait pas de lui faire regretter son comportement stupide lorsqu’il serait trop tard pour lui. « Tu pencherais pour quoi, l’hépatite ou la cirrhose du foie ? Oh et il y a le cancer aussi, tu as l’embarras du choix. » Parce que s’il ne se foutait pas en l’air à court terme, ces maladies ne manqueraient pas de le faire pour lui – de manière plus lente et douloureuse. Hannah voyait bien que ses paroles le touchaient, raison pour laquelle elle exagérait volontairement, histoire de lui donner un électrochoc dont il avait cruellement besoin, à son sens. Le médecin donna le coup de grâce en lui demandant s’il avait voulu en finir, sans quoi elle connaissait des façons plus radicales d’y arriver, et le silence qui suivit lui fit hausser un sourcil. Elle qui s’était attendue à un énième ta gueule fit face à une hésitation qui la radoucit immédiatement, sans qu’elle ne puisse expliquer pourquoi. « Je veux pas mourir. » Il avait l’air sûr de lui, c’était déjà un point positif. « Je sais que j’ai un problème Hannah. » La brune recouvra son sérieux et pencha la tête sur le côté, légèrement plus encline à se montrer affable à son égard maintenant qu’il laissait tomber peu à peu son masque de petit con avec elle. « Mais j’arrive pas à…arrêter de boire. » Un soupir s’échappa des lèvres du médecin qui fit une légère moue avant de hocher la tête, compréhensive. Le problème de Peter, elle le connaissait par cœur. Elle avait vu pire, elle avait vu mieux, mais elle était en mesure de l’aider. S’il l’acceptait. « Tu es sur la bonne voie si tu reconnais que tu as un problème, beaucoup n’arrivent pas à l’admettre. » Commença-t-elle en s’adressant à lui avec beaucoup plus de douceur qu’à l’ordinaire, en dépit du ressentiment qu’elle avait toujours à son égard. Sa rancune avait toujours été tenace, d’autant plus lorsqu’elle devait l’être pour deux ; Molly était bien trop gentille. « Si tu veux vraiment de l’aide, je peux t’en fournir. » Elle releva le nez vers lui, plantant son regard dans le sien. « Ou te donner des recommandations, des centres… Ce que tu préfèreras. Tu n’es pas obligé de le faire avec moi. » Il la détestait, ce n’était pas nouveau, et peut-être qu’il valait mieux qu’il se fasse aider par une personne extérieure. « Mais tu devrais commencer par aller à des réunions. Te trouver un parrain. » Quelqu’un qui serait là pour lui quand il aurait envie de boire, de replonger. Quelqu’un qui ne s’appelle pas Molly.
« C’est vrai que c’est plutôt anodin de frôler la mort, elle devrait vraiment revoir ses priorités. » Entend-elle mes dents grincer ? Je suis persuadé que l’infirmière à l’autre bout de l’hôpital doit les entendre tant je n’ai pas envie qu’elle soit là, qu’elle s’asseye sur cette chaise et qu’elle ouvre la bouche. Je n’en veux pas à Molly, je sais pertinemment que cela partait d’une bonne attention, mais j’en veux déjà à la Whitemore en face de moi qui s’est toujours crue meilleure que tout le monde.
« J’étais pas là moi contrairement à elle, excuse-moi de ne pas avoir demandé tous les détails sordides. » « Alors parle pas comme si tu savais. » je crache, agressif, angoissé, l’envie de boire un peu plus forte, l’envie de fumer aussi. Sa présence et ses mots ne font que me rappeler mes erreurs, qu’elle parte.
« Est-ce que tu voulais que qui que ce soit te trouve ? » J’observe la ville par la fenêtre plutôt que de me concentrer sur elle. Mon silence parle pour moi. Non je ne voulais pas que quelqu’un me trouve. Je n’aurais accepté que personne ne me trouve dans cet état. La honte, même après coup est bien trop présente, m’a poussé à repousser ma sœur un peu plus tôt, m’a poussé à repousser quiconque qui essayait de m’aider.
« Tu pencherais pour quoi, l’hépatite ou la cirrhose du foie ? Oh et il y a le cancer aussi, tu as l’embarras du choix. » « Ta gueule. » que je prononce une deuxième fois en serrant les dents, alors qu’elle me pousse dans mes retranchements, alors qu’elle est plus honnête que personne ne l’aura été avec moi ces derniers temps. Car les paroles sont logiques, elles ne sont pas là pour me blesser, elles sont simplement des faits, et ces faits dans la voix d’Hannah dont je ne suis pas proche, ont plus d’impact que je ne l’aurais pensé. Et lorsqu’elle me demande si j’ai souhaité en finir, le masque s’efface, se brise tout simplement parce que je n’ai plus le courage de le garder affiché, trop fatigué pour me battre avec elle. J’ai eu peur bien plus que je ne veux l’admettre. Car dans la nuit de samedi soir je sais pertinemment quelles ont été mes pensées. Si mes souvenirs sont flous, si je me souviens à peine de ce que j’ai dit à Molly au téléphone, les sentiments que j’ai ressenti, les voix présentes dans mon esprit ce soir-là, me répétant que je ne serais bon qu’à foirer, que mes proches seraient mieux sans moi, n’avaient pas disparues.
« Tu es sur la bonne voie si tu reconnais que tu as un problème, beaucoup n’arrivent pas à l’admettre. » Le son de sa voix est plus doux cette fois, m’insiste à relever la tête vers elle pour l’écouter. « Si tu veux vraiment de l’aide, je peux t’en fournir. » Ma grimace parle pour moi. Jamais je ne me confierais à elle. J’étais déjà incapable de me confier à mes proches, de m’ouvrir, cachant chaque émotion derrière un sourire moqueur, ce n’était certainement pas à elle que je parlerais. « Ou te donner des recommandations, des centres… Ce que tu préfèreras. Tu n’es pas obligé de le faire avec moi. Mais tu devrais commencer par aller à des réunions. Te trouver un parrain. » Cela me semble être déjà être une meilleure option. Parrain, centre, réunions…Tous ces mots me font peur, confirment que ce problème ne partira pas, ou du moins jamais complètement. Je ferme les yeux, tentant de calmer l’angoisse. Je me sens trahi par la machine à côté de moi qui indique mon rythme cardiaque, qui s’envole soudainement sans que je ne puisse y faire quoique ce soit. Je grimace, me forçant à respirer plus calmement pour retrouver une certaine contenance. « Je bois depuis que j’ai quatorze ans Hannah. Et pas un peu. » Les doutes sont là, ceux de ne jamais arriver à m’en sortir. Et la petite voix qui répète A quoi bon ? « Tes centres, tes recommandations, je,…ça marche ? » Je me sens terriblement idiot de poser la question, tellement vulnérable aussi de lui montrer l’envers du décor, je n’ose pas réellement croiser son regard, toute assurance envolée.
Hannah savait que son ton était dur, mais son cinéma avec Molly durait depuis des années, depuis bien trop longtemps pour qu’elle reste muette face à cette énième erreur, du genre à marquer les esprits à jamais. Elle avait vécu la mort d’un proche et ne s’en était jamais remise, elle refusait que ça arrive à sa meilleure amie et encore moins à cause de l’instinct autodestructeur de Peter. La petite brune en avait vu de toutes les couleurs avec lui et le médecin avait été le témoin silencieux de bien des crises de larmes, sans jamais pouvoir dire quoique ce soit à ce sujet. Mais cette fois était différente, parce qu’elle avait enfin l’opportunité de le voir en tête à tête et ce sans qu’il soit en position de s’éloigner d’elle en lui balançant son majeur pour la forme. « Alors parle pas comme si tu savais. » Pete était sur la défensive – rien d’étonnant après tout – et elle se contenta de hocher la tête, consciente que chaque mot visait un point sensible. Au moins, il n’arrivait plus à cacher ce qu’il ressentait et c’était déjà un bon début ; de la nonchalance aurait été encore pire à ce stade. « Désolée. » Elle ne l’était pas vraiment, mais elle ne pouvait pas non plus prétendre savoir tout ce qu’il se passait dans sa tête. Ses actes en disaient long, mais ça n’était pas suffisant pour qu’elle puisse tirer de véritables conclusions car après tout, ils ne se connaissaient pas. Pas vraiment. Leurs existences étaient croisées par le biais de Molly depuis longtemps, mais ils s’étaient à peine adressé la parole et lorsque ça avait été le cas, ça n’avait jamais été dans le but de se jeter des fleurs, au contraire. Le silence qui suivit sa question répondit pour lui et Hannah plissa les lèvres en s’abstenant du moindre commentaire. Des types comme lui, elle en avait déjà vu plein. Dire que ça n’arriverait plus était un mensonge et le constat était sans appel : il avait besoin d’aide s’il voulait s’en sortir, sans quoi il n’aurait peut-être pas autant de chance les fois suivantes. « Ta gueule. » Loin d’être désarçonnée par son agressivité, la brune se pencha un peu plus vers lui, un sourcil haussé pour la peine. « Qu’est-ce qu’il y a, tes perspectives d’avenir ne sont pas à ton goût ? » Lança-t-elle en se laissant finalement aller contre le dossier de sa chaise, sans cesser de le fixer. On avait connu mieux comme façon d’ouvrir les yeux à quelqu’un, mais Hannah ne prévoyait pas de lui rendre visite prochainement, alors autant que cette discussion fasse office d’électrochoc si cela était possible. Sa dernière question fût plus directe et à cet instant, elle sentit que quelque chose changeait dans l’attitude du brun. Ses traits se firent encore plus fatigués, son regard moins noir, et elle réalisa qu’il y avait peut-être moyen de faire quelque chose, après tout. Elle était loin de partager l’espoir de Molly à son égard, mais elle ne pouvait ignorer sa détresse. « Je bois depuis que j’ai quatorze ans Hannah. Et pas un peu. » « Tu penses que tu es le seul dans ce cas ? J’en ai connu bien d’autres qui étaient plus enfoncés que toi et qui ont su s’en sortir. » Impitoyable, Hannah ne lui laissait pas le moindre espace pour se trouver des excuses, pour étayer ses doutes. « Tes centres, tes recommandations, je,…ça marche ? » La jeune femme fit la moue, sans cesser de l’observer, rassurée d’avoir enfin obtenu son attention. « Seulement si tu veux toi que ça marche. » C’était la première étape, celle d’une longue série qui risquait d’être difficile et éprouvante. « Il ne s’agit pas d’une solution miracle, la seule personne qui peut t’aider finalement, c’est toi-même. » S’il voulait réellement guérir, s’il s’en donnait les moyens, alors il y arriverait. Par contre, s’il espérait que ces aides suffiraient à elles seules, il se mettait le doigt dans l’œil.
« Désolée. » Je n’aurais pas pensé entendre un jour des excuses de la bouche d’Hannah, mais je suis persuadé qu’elle n’en pense pas un mot. L’instant d’après elle enfonce le clou, me soulignant mes erreurs mais surtout les conséquences de mes actes. « Qu’est-ce qu’il y a, tes perspectives d’avenir ne sont pas à ton goût ? » Je fuis son regard, conscient qu’elle essaye de provoquer une réaction. Je hais le fait que cela marche, qu’elle me fasse me sentir un peu plus bas que terre. Elle est plus détachée et donc plus objective et je réalise un peu que si je continue sur cette voix il n’y aura pas d’avenir ou bien qu’il ne sera pas glorieux.
S’il y a une chose dont je me suis rendu compte ce weekend pourtant, c’est que je n’ai pas envie de mourir. Je veux vivre, je veux arrêter de broyer du noir, de ressentir cette solitude qui rend chaque instant plus maussade, d’arrive peut être à changer enfin, de grandir aussi un peu. Mais le changement me terrifie tout autant que la perspective d’un possible échec.
« Tu penses que tu es le seul dans ce cas ? J’en ai connu bien d’autres qui étaient plus enfoncés que toi et qui ont su s’en sortir. » Je grimace, elle n’a pas tort même si je préfèrerais crever que de l’admettre. Bien sûr qu’il y avait pire, il y aurait toujours pire. Pourtant aujourd’hui arrêter de boire me semblait être une épreuve insurmontable quand le simple fait de passer une journée sans boire quoique ce soit me laisse dans un état lamentable. La situation me touche moi, alors je n’en ai que faire des autres, je ne sais pas comment moi, je vais pouvoir m’en sortir. Alors je pose la question, demandant si réellement ces centres peuvent aider, envisageant pour la première fois de vraiment y aller. « Seulement si tu veux toi que ça marche. » Il est là le hic, ce en quoi je doute, ce qui élargit la grimace de mon visage. Parce que je n’ai aucune confiance en ma capacité à vouloir que ça marche quand il est clair que j’ai choisi la solution de facilité toute ma vie. Fuir dans l’alcool, fuir Molly, fuir quoique ce soit de sérieux. La seule chose où je n’ai pas fui finalement c’est mon boulot. Mais parce que là aussi ça a toujours été simple, la passion pour l’architecture aidant, mes facilités aussi. « Il ne s’agit pas d’une solution miracle, la seule personne qui peut t’aider finalement, c’est toi-même. » « Je suis mal barré alors. » je ricane, un trait d’humour rempli d’amertume et de fatigue. On est arrivé au point où je me fatigue moi-même, où je suis fatigué d’être ainsi, fatigué de préférer l’alcool à tout le reste. Je passe une main sur mon visage. « Tu pourrais me donner des endroits ? » je finis par demander sans oser la regarder, détestant l’idée de lui demander de l’aide, détestant l’idée de lui avoir montré ma vulnérabilité aujourd’hui. C’est peut-être pour ça que mes pensées retournent vers le sujet qui fâche, vers ce qui nous séparera et qui nous obligera aussi à nous revoir. « Comment elle allait Molly ? » Question stupide, je ne devrais pas la poser, elle ne doit pas aller bien et comme toujours ne souhaiter inquiéter personne. La culpabilité s’insinue derrière chacune des syllabes, je m’inquiète pour elle, regrettant de l’avoir encore fait souffrir.
Si Hannah devait être totalement objective avec elle-même, elle se devait d’avouer qu’elle n’aurait pas cru un seul instant trouver Peter dans cet état-là en s’immisçant dans sa chambre durant sa pause. Elle s’était attendue à son habituel air narquois, à quelques insultes, mais certainement pas à la culpabilité et les remords dont il semblait être désormais pourvu. Était-ce un jeu pour lui ? Un masque qu’il portait lorsque les évènements s’échappaient de son contrôle et qu’il estimait qu’il était temps d’attendrir les foules ? Y avait-il une once de sincérité dans sa voix, dans le discours qu’il maintenait en détournant le regard alors que le sien restait fixé sur lui ? Difficile à dire. Hannah n’était jamais réellement parvenue à le cerner et après toutes ces années, elle avait cessé d’essayer de fournir le moindre effort pour le comprendre. Tout ce qu’elle savait, c’était qu’il rendait Molly malheureuse et qu’une fois encore, il était parvenu à la mettre dans tous ses états. Peut-être qu’il lui avait fallu cet électrochoc pour se reprendre en main, une fois pour toute. C’était l’impression que la brune avait alors qu’il se mettait à lui poser des questions sur les aides qui existaient pour les personnes comme lui, celles qui souffraient d’addictions et qui ne parvenaient pas à s’en sortir seules. Le fait qu’il l’interroge fût suffisant à ce qu’elle s’adoucisse un peu à son égard, même si un bref effort durant une discussion ne suffirait jamais à effacer l’ardoise qu’il traînait depuis tout ce temps. « Je suis mal barré alors. » Lança-t-il dans un rire sans joie alors qu’elle appuyait le fait qu’il soit la seule personne à réellement être en mesure de l’aider, même si certains outils pourraient vraiment être un bonus non-négligeable pour qu’il puisse s’en sortir. « Tu devrais déjà essayer d’y croire un peu, si c’est vraiment ce que tu veux. » Rappela-t-elle avec fermeté, incapable de sortir de son rôle maintenant qu’il avait accepté de nouer un dialogue dépourvu d’insultes en tout genre avec elle. « Tu pourrais me donner des endroits ? » Une fois encore, il s’appliqua à fuir son regard et elle plissa les lèvres avant de hocher la tête, par habitude. « Je vais t’envoyer quelqu’un qui t’expliquera les différentes possibilités qui s’offrent à toi. Tu pourras discuter avec lui et trouver la solution qui s’adaptera le mieux à toi et à ce que tu recherches. » Lança-t-elle en se laissant aller contre le dossier de sa chaise, concrétisant ainsi entre eux la distance qu’il attendait d’elle. Il ne voulait pas qu’elle le prenne sous son aile, ils n’étaient pas amis, elle n’était que l’ange gardien de Molly qui étendait son bon vouloir à son cas à lui. Parce que si Peter allait mieux, alors la jeune Oakheart irait forcément mieux elle aussi. « Comment elle allait Molly ? » Hannah serra les dents avant de passer une main fatiguée sur son visage, réalisant qu’elle occupait ses pensées autant que lui occupait les siennes. « A ton avis ? » Le reproche était clair, même si elle soupira en réalisant qu’il avait probablement assez entendu d’accusations ces dernières heures. « Elle était inquiète et elle pleurait beaucoup. J’ose même pas imaginer dans quel état elle aurait été s’il t’était arrivé quelque chose. » Et ça aurait pu, voilà ce que ses paroles voulaient dire.
Je déteste l’image que je renvoie en cet instant face à Hannah Whitemore. Battu à plate couture, faible, peut être triste en réalité. Elle me juge depuis tellement d’année que je suis entré dans le jeu. Hannah de ne devrait avoir que mes provocations, que mes sourires je m’en foutiste et mes airs de petit con. Parce que c’est ce que j’ai décidé d’être face à elle, la miss parfaite qui ne fait appariement pas un faux pas. Peut être aussi pour lui donner raison. Mais aujourd’hui le masque des apparences est loin, effacé, oublié, je suis en réalité bien trop fatigué pour le maintenir en place. Peut être aussi pour la première, j’ai réellement envie de devenir quelqu’un de différent.
« Tu devrais déjà essayer d’y croire un peu, si c’est vraiment ce que tu veux. » Je grimace face à son ton ferme et intransigeant, je grimace parce que je sais qu’elle a raison mais le travail me semble énorme quand j’ai passé la moitié de ma vie à boire, quand je ne sais même pas qui je suis finalement, sans alcool.
Je n’arrive pas à croire que je lui demande de l’aide, que je lui demande des conseils et j’ai presque l’impression que c’est le monde à l’envers. « Je vais t’envoyer quelqu’un qui t’expliquera les différentes possibilités qui s’offrent à toi. Tu pourras discuter avec lui et trouver la solution qui s’adaptera le mieux à toi et à ce que tu recherches. » Mon regard se pose de nouveau sur elle. Ca me semble être une bonne option. Ca ne sera pas à elle à qui je serais bien incapable de me confier, de me dévoiler. Mais elle est médecin et j’ai beau avoir une opinion peu positive de la Whitemore j’ai assez de respect pour elle pour croire qu’elle me recommandera quelqu’un de bien, quelqu’un qui pourra m’aider. Et si elle ne le fait pas pour moi je me dis qu’elle le fera pour Molly.
Le visage de Molly apparaît dans mon esprit, l’inquiétude me tordant l’estomac alors que j’observe le visage d’Hannah qui serre les dents à ma question. « A ton avis ? » Je ne réponds rien, honteux. Je n’ai jamais voulu qu’elle me voit dans cet état, jamais voulu que ça en arrive là. « « Elle était inquiète et elle pleurait beaucoup. J’ose même pas imaginer dans quel état elle aurait été s’il t’était arrivé quelque chose. » Je baisse les yeux sur mes mains et sur la perfusion. J’aimerais pouvoir prononcer les mots suivants à voix haute : Je veux plus la blesser Hannah. Je sais que j’ai agi comme un con avec elle. Je veux plus que ça arrive. Mais quelles raisons a-t-elle de me croire quand je l’ai fait souffrir tant de fois ? « Je sais. » je murmure sans la regarder, conscient qu’il est temps de grandir, d’arrêter mes conneries. Nos relations à Hannah et moi ne s’amélioreront pas aujourd’hui. Je ne sais pas si elles s’amélioreront un jour. Mais peut être pour la première je cesse de lui montrer l’image que j’ai toujours cherché à lui renvoyer. « Je vais me soigner. » Il est temps.
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