Février. 28 jours. Le mois le plus court de l’année. Et pourtant. Pourtant, il me parait être une éternité quand tout semble s’enchainer sans que je ne puisse y faire grand-chose. Quand j’ai l’impression qu’à nouveau, tout m’échappe et que j’assiste impuissante à tout ça. Je ne peux rien y faire car il ne s’agit pas de ma propre vie. Non, c’est celle de mes proches qui est touchée. Pete d’abord, tombé dans un coma éthylique, a deux doigts de perdre la vie si Molly ne l’aurait pas retrouvé à temps… Knox ensuite, qui accepte enfin de soigner sa leucémie, cette fichue maladie qui lui retombe dessus vingt ans après. Un soulagement en voyant qu’il a retrouvé raison. Mais le voir dans ce lit d’hôpital me rend toujours aussi malade... Parce que je ne sais jamais comment je vais le retrouver, si le traitement qu’il prend va l’aider ou au contraire, l’enfoncer davantage. Adam. Il n’a eu d’autres choix que de partir pour Sydney, pour Noah, pour cette famille qui l’a menacé de l’attaquer en justice s’il ne leur laissait pas la possibilité de voir l’enfant. Je le soutiens totalement, et il le sait. Rien ne changera dans notre amitié, on se l’est promis. Mais ce départ me touche et les au revoir ont été difficile. Zoey. Cette cousine revenue depuis peu sur Brisbane, avec sa fille Lou, ma filleule. Un terrible accident a eu lieu samedi, la petite fille s’étant faite renverser par un chauffard fou. Je n’ai été mis au courant qu’aujourd’hui et c’est donc à l’hôpital que j’ai accouru au chevet de Lou. Cette dernière a subi une intervention, semble être stable mais doit rester à l’hôpital pendant quelques jours encore…
Je rentre ce soir, exténuée encore. Epuisée, par cette journée passée à l’hôpital, à voir Lou reliée à ces machines, à voir Knox dans le même état… Mes traits sont marqués, encore, marqués par la fatigue, l’inquiétude et la tristesse. Je me laisse tomber sur mon canapé, mon regard dans le vide alors que la ville est déjà plongée dans l’obscurité. Mon cerveau semble déconnecté, je n’ai plus envie de bouger, je n’ai plus envie de penser. J’allume machinalement la télévision, comme pour rompre ce silence pesant, devenu trop récurrent ces derniers mois. Comme si, les commentaires de ces journalistes allaient m’aider à oublier et à faire fuir ce sentiment de vide et de solitude. Mais, même la chaine info n’a pas cette force quand elle relate encore cette perquisition au Club, que ce portrait de Mitchell Strange passe en boucle. Mon regard se pose alors sur l’écran avec plus d’intérêt… Tu vas bien ? J’ai vu les news… Ce sont les quelques mots que je lui ai envoyés lorsque j’ai vu ces mêmes images quelques jours plus tôt. Parce qu’il est relié à tout ça. Et j’ai eu peur pour lui. Peur qu’il soit recherché comme son frère, peur qu’il ait pu être attrapé, peur qu’il ait dû fuir… peur de ne plus le revoir. Parce que même si nous nous interdisons d’être ensemble, il compte. Il compte bien plus que je ne le voudrais. Ne t'inquiètes pas pour moi. Ca va. Sa réponse, immédiate, me rassure. L’hésitation de lui répondre, de lui demander si nous nous reverrons. L’envie aussi de lui dire que j’ai besoin de le voir pour m’en assurer, qu’on se retrouve quelque part, même s’il était tard. Juste pour le voir. Même si cela devait être la dernière fois. Parce que chaque au revoir est difficile, et si un définitif devait avoir lieu, je ne suis pas sûre de pouvoir le supporter… Je finis par éteindre la télé, à balancer la télécommande sur la table basse, qui manque de tomber alors que j’entends quelqu’un tambouriner à la porte. Je n’attends personne, je me demande évidemment qui peut venir à cette heure-là.
Je me dirige vers cette porte, et je ne pensais pas que ce serait lui derrière celle-ci. Mon cœur manque un battement quand Alec se tient face à moi, qu’il semble essoufflé, fatigué et triste. Et pourtant, c’est une sorte de soulagement que je peux apercevoir quand il pose son regard dans le mien. Sa présence m’apaise immédiatement, me rassure, moi qui pensais ne plus jamais le voir. Il y a un silence qui s’installe, un silence durant lequel nous nous regardons sans rien dire. J’entrouvre la bouche, prête à parler, à le saluer, à lui demander pourquoi il est là. Mais il me devance quand il sépare cette mince distance entre nous, qu’il s’empare de mes joues pour venir m’embrasser. Ses lèvres se pressent fortement contre les miennes. Je suis prise au dépourvu et l’est encore plus lorsqu’il prononce ces quelques mots « Je t’aime ». Il y a un mouvement de recul de ma part, comme si je ressens le besoin de reprendre mon souffle, comme si j’ai besoin de ce laps de temps pour réaliser. Il ne m’en laisse pas vraiment le temps, venant retrouver mes lèvres avant de venir coller son front contre le mien « Je t’aime ». Une deuxième fois. Et à cet instant, je réalise… Je réalise les mots qu’il vient de prononcer, je réalise qu’ils me sont adressés. Et je réalise surtout qu’ils sont sincères, qu’il semble soulagé enfin de pouvoir les prononcer. Alors, enfin, mes bras viennent se nouer autour de sa nuque. Enfin, mon regard vient trouver le sien, alors que je frotte doucement et tendrement mon nez contre le sien, refermant les yeux une fraction de secondes. Et lorsque je les réouvre, il peut y lire sans difficulté tout ce que je ressens pour lui, que je n’ai jamais osé exprimer… pour me protéger « Je t’aime aussi Alec » je murmure alors, mes mains caressant doucement ses cheveux. Je me mets un peu plus sur la pointe des pieds, pour être cette fois celle qui vient sceller nos lèvres, pour échanger un baiser tendre et passionnel à la fois. « Tu m’as manqué… j’ai eu peur… » je souffle alors doucement sans quitter ses bras « j’ai eu peur de ne plus jamais te revoir Alec ». Mon regard est incapable de se détacher du sien, comme si je craignais qu’en un battement de cil, il puisse disparaitre. Et puis, mes bras finissent par se détacher doucement, une main venant se glisser dans la sienne pour l’entraîner à l’intérieur de l’appartement.
Je t’aime… Ces trois petits mots alignés ensemble ont une saveur dont j’en avais oublié le goût. Entre ses lèvres, ils ont un effet immédiat. Mon cœur s’accélère, un frisson parcourt l’entièreté de mon corps alors que je sens son emprise sur moi. Cette emprise physique quand il semble ne plus vouloir me lâcher, de peur que je lui échappe, m’embrassant encore et encore, me répétant qu’il m’aime. Cette emprise bien plus profonde qu’il a sur mon esprit, sur mon cœur. Parce qu’Alec Strange a laissé son empreinte, et, bien que j’aie essayé à maintes reprises de m’en défaire, parce qu’il n’y aurait rien eu de bon dans cette relation, du fait de ses mensonges bien trop nombreux et de sa véritable identité, cette emprise est bien trop forte. Je ne peux plus la refouler, je ne peux plus l’ignorer, je ne peux plus prétendre qu’elle n’existe pas. Surtout, je ne peux plus prétendre que je ne suis pas tomber amoureuse de cet homme. Cet homme qui prononce ces trois petits mots… Je t’aime.
Evidemment, je ne me retiens plus, et lui prononce ces mêmes mots. Le soulagement pour lui dans son sourire, dans ce regard qui se met à briller. Le soulagement pour moi de me sentir enfin libéré de ce sentiment bien trop longtemps refoulé, quand il y a eu bien des instants où j’aurai aimé lui crier, lui dire, lui susurrer. Comme cette nuit où nous avons autorisé nos deux corps à se retrouver. Où, associé au plaisir, j’aurai aimé lui dire que je l’aimais, subtilement, dans le creux de son oreille. Lui dire qu’il me manquait, que je ne pouvais plus me passer de lui. Lui dire qu’il était celui dont j’avais besoin dans ma vie, qu’importe toutes ces raisons qui me poussait à fuir…
Les récents événements m’ont effrayé. Deux jours plus tôt quand le nom de son frère passait en boucle à la télévision, que dans les locaux du Brisbane Times, je n’entendais parler que de cette affaire, j’ai eu peur pour lui. Parce que son nom aussi a été prononcé de nombreuses fois. Et si, finalement, j’ai laissé passer ma chance d’être à ses côtés ? Et si, je n’étais pas partie ce matin-là ? Et si… Ils n’ont plus d’importance quand il est trop tard. Les regrets n’ont plus leur place. Mais il semblerait que le destin nous offre une seconde chance parce qu’il est là, devant moi, ce soir. Et que je peux lui dire que je me suis inquiétée… que j’ai eu peur « Je sais je suis désolé…Je voulais pas t’inquiéter. Tu m’as manquée aussi ». « Tu es là maintenant » je souffle alors que je ne suis qu’à quelques millimètres de ses lèvres, que mon regard ne quitte plus le sien pour m’en assurer. M’assurer qu’il n’est pas en danger, qu’il ne partira pas… qu’il va bien malgré tout…
Je l’invite à me suivre dans l’appartement, la porte se referment derrière nous, nous dirigeant jusqu’au salon, nos mains ne se quittant plus, son emprise se resserrant sur les miennes « J’en ai marre de prétendre Mia. J’en ai marre de prétendre que je vais être capable de t’oublier et de passer à autre chose. Je… » mon regard plonge dans le sien, l’incitant à poursuivre « Je sais pas ce que je fais. J’ai l’impression que ma vie est en train de s’écrouler… Tout ce que je sais c’est que la seule personne que j’ai envie de voir c’est toi ». Sa main vient trouver ma joue, la caresse doucement et, de nouveau, cette même sensation vient parcourir mon corps : le frisson d’abord, les palpitations ensuite. Et cette fois, c’est l’émotion qui me gagne aussi, mes yeux s’embuant. Parce que j’ai attendu ce moment depuis trop longtemps… « Je sais que tu ne peux pas l’accepter cette vie là Mia ». Et je sens que ces mots là sont difficile à dire pour lui, parce qu’il exprime une possibilité. Celle que je refuse d’être à ses côtés, malgré les sentiments, malgré les je t’aime. Bien qu’il m’ouvre son cœur, il n’a pas la garantie que j’accepte… Et, du fait de cette peur qui semble l’habiter, la peur de me perdre malgré tout, il poursuit « Mais… Tu me hantes. Je ne peux pas ne pas penser à toi, je ne peux pas ne plus jamais te voir. J’ai besoin de toi ». J’ai l’impression que c’est un appel au secours qu’il me lance, une détresse clairement exprimée, lui qui a toujours été si secret sur ses sentiments. Moi qui lui ai toujours reproché. Il ouvre son cœur, il m’ouvre son cœur. Je me retrouve avec la lourde tâche de choisir, la lourde tâche d’avoir avec son cœur entre mes mains et de décider de son sort. Les larmes perlent sur mes joues, parce que tout ce qu’il prononce me touche au plus profond. J’entends enfin ces mots que j’ai tant attendu, espéré, au fond de moi. Mais qui peut-être m’effraie aussi quand il me rappelle tout ce qui me pousse à ne pas être avec lui, à cause de cette vie là que je lui ai toujours dit être incapable d’accepter. « Je t’aime », sera son dernier argument dans ce monologue, lui qui n’a jamais autant parlé. Je penche ma tête pour profiter davantage de cette caresse sur ma joue, fermant les yeux quelques secondes. Un sourire finit par étirer mes lèvres même si d’autres larmes ont pris la fuite. J’attrape cette main si délicate, l’incitant à quitter ma joue, l’amenant doucement le long de son corps. Je m’en détache, mon autre main aussi. Et il y a ce petit moment de latence, ce mince instant de silence nécessaire…
Et puis, mes bras viennent se nouer à nouveau derrière sa nuque, et mes lèvres viennent retrouver les siennes. Ce baiser est tendre et fougueux à la fois. Il ne dure que quelques secondes… Lui donnant un aperçu de ma réponse « Je ne veux plus que tu prétendes Alec… Je ne veux plus que tu t’en empêches » de m’aimer… « Cette vie que tu mène m’effraie… Mais être loin de toi, m’effraie encore plus ». Je marque une pause, mes doigts caressant doucement ses cheveux. « Ces derniers jours en ont été la preuve. J’aurai tout fait pour venir te retrouver, quoi qu’il en coûte, quel qu’en soit le risque… S’il avait fallu que je fuis avec toi, Alec, je l’aurai fait… ». Je finis ma phrase dans un murmure alors qu’il peut voir dans mon regard que tout ce que je dis est sincère, que tout est pensé, que rien n’est exagéré. Parce que j’ai toujours cru, au fond, que lui et moi pouvions faire un bout de chemin ensemble… Et qui sait peut-être même plus « Je l’accepte… » je souffle alors, un laps de temps de silence s’immisçant encore quelques secondes « J’accepte cette vie que tu mènes parce que je t’aime. Parce que j’ai besoin de toi, parce que je veux être avec toi depuis bien trop longtemps ». Mes lèvres retrouvent alors délicatement les siennes, quelques secondes « Et si je peux être cette stabilité dont tu as besoin, je la serai. Si je dois être celle qui doit te convaincre que tu as droit à cette vie dont tu rêves en secret, je la serai. Je serai cette personne Alec ». Parce que j’ai cette impression que si, nous concernant, il est sûr de lui, il n’a plus aucun doute, je sens, en revanche, que tout semble s’effondrer autour de lui. Il me parait perdu et je semble être la seule personne à qui il peut se rattacher encore… Lui garantir une certaine stabilité quand tout semble s’être écroulé autour de lui deux jours plus tôt. Je viens presser mon corps contre le sien pour renouer à nouveau nos lèvres, lui prouver que je ne partirai pas, lui prouver que, désormais, je lui appartiens.
Le doute est dissipé pour lui quand enfin je lui dis que je suis prête à accepter cette vie qu’il mène. Cette vie qui, malgré ces informations qui tournent en boucle depuis des jours à la télévision ou dans les journaux, est toujours la sienne. J’ignore s’il décidera de la quitter, si peut-être cette vie touche à sa fin quand les médias peuvent laisser penser que c’est le cas, entre la perquisition du restaurant mais aussi la recherche de Mitchell, le frère d’Alec, qui n’est autre que celui qui est à la tête du Club. Je l’ignore, et pour l’instant, je préfère laisser cette question en suspens, l’oublier pour m’oublier dans ses bras. Pour me laisser porter par cette tendresse et cette fougue qui nous anime. Celles de nos retrouvailles, celles que nous avons repoussé, rejeté et refoulé le plus possible. En vain. Car ce soir, je suis incapable, tout comme lui, de poursuivre sur cette voie quand les sentiments sont bien trop forts pour être oubliés. Mes lèvres retrouvent alors les siennes, nos corps se pressent l’un contre l’autre parce qu’il y a eu trop de retenue, trop d’interdit ces derniers mois. Parce que notre dernière rencontre sonnait comme un adieu, quand il me réaffirmait qu’il ne pourrait jamais être celui que j’attendais… parce que cette vie, celle d’être à mes côtés, ne serait jamais sienne. Pourtant, ce soir, ces mots, qui nous ont fait souffrir autant l’un que l’autre, sont laissés derrière nous pour nous permettre de nous retrouver. Et cette fois, ce ne sera pas le temps d’un instant, le temps d’un moment. Parce que ce soir, quand je me perds dans ses bras, que nous nous dirigeons vers ce canapé pour permettre à nos deux corps de se retrouver une nouvelle fois, cela signe le début d’une relation que nous nous autorisons enfin. Une chance de construire quelque chose à deux, une chance d’être ensemble malgré tout. Je m’abandonne totalement à lui, laissant ses mains parcourir ma peau, sentant son souffle chaud dans mon cou alors que le désir ressenti des deux côtés ne demande qu’à être exprimer, que plus rien ne nous empêchera de nous retrouver désormais…
***
Mes doigts effleurent la peau de son torse, doucement, alors que nous tentons de retrouver une respiration normale, dans le silence. Je savoure l’instant, celui d’être dans ses bras, d’être dans cette bulle avec lui. Une bulle que je ne veux plus jamais quitter, surtout lorsqu’il ressert son étreinte sur moi, me dépose ce baiser sur le haut de la tête qui me fait sourire. Je me sens apaiser, pour la première fois depuis des mois. Ce silence qui dure quelques minutes, vient à être interrompu par Alec qui décide de m’expliquer ce qui s’est passé pour le Club… « Ce que tu as vu à la télé. C’est pas une histoire avec la police. Enfin je veux dire, c’est un conflit interne où la police a été utilisée ». Je ne suis pas habituée à ce qu’il me parle ouvertement de cette vie jusque-là tenue secrète et pourtant, c’est ce que notre relation va impliquer désormais. Parce que, si j’accepte cette vie qu’il mène, je veux qu’il puisse m’en parler, qu’il n’y ait aucun secret entre nous. Même si certaines choses m’effraieront certainement, je ne veux plus rester dans l’ignorance… Surtout quand je n’oublie pas qu’à tout moment, les choses peuvent mal tourner. Il me l’a dit, ses seules échappatoires à cette vie qu’il a choisie sont la case prison ou la mort… « Tu veux dire que, tout ça était un coup monté ? ». Je demande alors que je reste encore tout contre lui, intriguée cependant parce qu’il m’avoue. « J’ai trahi mon frère. Pour quelqu’un qui méritait sa place, pour quelqu’un qui n’allait pas faire courir le gang à sa perte. J’ai fait un choix ». Dire que cela ne me surprend pas serait un mensonge. Je me redresse alors, pour quitter ses bras, afin de nous permettre de nous relever tous les deux, m’asseyant en attrapant un des plaids pour m’envelopper dedans. Je l’observe et je vois que cette décision semble le tirailler. Je ne l’interromps pas, le laissant terminer ses explications « C’est une prise de pouvoir. A laquelle j’ai participé. J’ai passé ma vie à être loyal aveuglement à Mitchell. Jusqu’à aujourd’hui ». Mon regard se tourne sur l’écran de télévision qui est éteint mais où je sais que les images passent encore en boucle, notamment celle du portrait de son frère, toujours recherché par la police. Il revient trouver le regard d’Alec ensuite, mes sourcils se fronçant car je sens une certaine hésitation dans ce choix qu’il a pu faire. « Il y a certainement d’autres raisons qui t’ont poussé à en arriver à faire ce choix… Tu regrettes ? De lui avoir été loyal aussi longtemps ? ». Je cherche sûrement à lui rassurer pour qu’il comprenne lui-même que ce choix qu’il a fait entre son frère et l’organisation n’est pas anodin… Qu’il va bien au-delà de l’état de santé du Club. Peut-être que j’essaye aussi de me rassurer moi-même en lui posant cette question, pour comprendre un peu plus sa décision, quand évidemment ses aveux me surprennent aussi « Tu as peur pour lui ? ».
« Disons que Mitchell a été vendu, je devine par celle qui dirige aujourd’hui le Club ». Le flambeau semble être passé dans d’autres mains quand, à la télévision, il y a cette impression qui est donné que l’organisation est en train de tomber en miettes. Il n’en est rien, il y a juste une personne qui est tombée finalement et il s’agit du frère d’Alec. Blottie dans ses bras, ce dernier se confie, s’ouvre un peu plus, m’avouant l’envers du décor de ce gang auquel il appartient… Me montrant aussi le pouvoir, le poids que le Club peut avoir. Un poids que je sous estimais peut-être quand j’ai eu peur pour lui quelques jours plus tôt et que je pensais que toute cette histoire de gang était peut-être entrain de disparaitre. Il y a cette question cependant qui me brûle les lèvres, celle de son rôle dans tout ça mais je préfère ne pas lui poser. Il y répondra finalement par lui-même…
Je quitte ses bras, les propos devenant plus sérieux, me poussant inconsciemment peut-être à m’éloigner pour avoir cette discussion. Je m’enroule dans ce plaid alors qu’il se relève et que mon regard le suit dans ses mouvements, l’observant se diriger vers la fenêtre s’allumant cette cigarette dont il semble avoir besoin, peut-être du fait de la conversation que nous entamons. La trahison envers son frère qui, même si elle doit être justifiée, n’a sûrement pas été évidente à faire pour lui. Cette fois, je ne retiens pas mes questions et il n’y a aucune hésitation dans les réponses qu’il peut me donner. Il n’y a plus que franchise et sincérité désormais entre nous… « Oui. J’ai accepté beaucoup de choses de Mitchell au nom de cette loyauté. Des gens sont morts à cause de sa paranoïa et de ses ambitions Mia. Je croyais qu’il m’écouterait toujours, que j’arriverais à empêcher le pire d’une façon ou d’une autre ». Je remarque que son rire sonne faux, ce qui me fait froncer légèrement les sourcils alors que je quitte le canapé pour aller retrouver mes sous-vêtements et enfiler sa chemise abandonnée au sol quelques minutes plus tôt « J’avais tort. Ca fait des mois, voir des années qu’il me laisse hors de ses choix ». J’approche doucement de lui pour le rejoindre près de la fenêtre alors que j’attache un bouton. Je sens le poids qu’il a de cette décision mais aussi le poids des années, de cette loyauté qu’il a pu avoir envers son frère. Cette impression peut-être d’en être libéré… en partie, après cette trahison. Parce que je ressens aussi une part de regrets dans sa voix, de tristesse, et je me permets alors de lui demander s’il a peur pour Mitchell. Il ne parle pas tout de suite mais le regard qu’il m’adresse le fait pour lui. Ma main vient se glisser dans son dos alors, une sorte de marque de réconfort même si cela ne l’apaisera sûrement pas ou très peu « S’il n’est pas en prison… c’est parce que je l’ai prévenu que la perquisition serait chez lui. Il mériterait sûrement d’être arrêté pour tout ce qu’il a fait… mais… j’ai pas pu ». Il marque une pause et cette main toujours dans son dos vient le caresser doucement « C’est mon frère. Jusqu’à peu j’aurais été prêt à tout sacrifier pour lui… ». « Et ton choix est compréhensible. Il reste ta famille, malgré tout… ». Malgré les trahisons, les déceptions, les erreurs qui ont pu être commisses. Nos regards se croisent alors, sa main vient caresser mon visage alors que la mienne retombe le long de mon corps « Il y a des choses que je suis plus prêt à sacrifier ». Et je comprends alors que je faisais partie de ce sacrifice quand, pendant des mois, il s’est refusé d’être avec moi. Mes bras viennent se glisser autour de sa taille, me réfugiant dans les siens, posant ma tête sur son torse, comme si j’avais besoin de cette étreinte pour m’assurer que je n’étais pas entrain de rêver. Comme si j’avais besoin de m’assurer qu’il était bien présent physiquement, qu’il ne partirait plus cette fois et que les au revoir ne serait pas difficile, quand je suis certaine désormais de le retrouver le lendemain.