Malgré mon manque de préparation des dernières semaines, je réussis à prendre le dessus lors du premier round du combat. La chance tourne lors du deuxième round, cependant, et je me retrouve rapidement au sol en désavantage. Je ne m’avoue pas vaincu aussi facilement alors je mène une lutte acharnée pour me défaire de l’emprise de mon adversaire, mais chaque fois que je réussis à poser mes pieds sur ses hanches, il les repousse avant que j’aie le temps de le pousser plus loin. Plus je me débats, plus je m’épuise et il réussit encore plus à prendre le dessus, me martelant les côtes de coups de poing. Il profite d’une ouverture de ma part pour me donner un coup de coude bien placé qui me coupe le haut de la joue. Lorsque la cloche annonçant les dix dernières secondes du round retentit, j’ai une lueur d’espoir et j’arrête d’essayer de sortir de son emprise, tentant plutôt de me protéger pour limiter les dégâts. La deuxième cloche retentit et je peux enfin me relever, allant m’asseoir sur le tabouret dans le coin à bout de souffle. Je bois un peu d’eau pendant qu’on m’essuie le visage et que Seamus me donne des conseils pour la suite. La minute de pause passe trop vite et c’est déjà le temps d’y retourner. Complètement vidé, je remets mon protège-dents et je me relève en essayant de ne pas montrer ma fatigue mais c’est plus facile à dire qu’à faire. Le round est à peine commencé que je mange une volée. Je tente de me défendre comme je peux mais il m’assène trois coups puissants en pleine gueule et son dernier crochet m’achève. C’est le trou noir.
Je reprends conscience quinze minutes plus tard dans l’ambulance et sur le moment je suis confus. Je regarde autour de moi sans comprendre, jusqu’à ce mon regard croise celui de Seamus à mes côtés et que les souvenirs me reviennent. J’ai tellement mal à tête que j’ai du mal à me concentrer sur ce qu’il me dit, en plus du bruit des sirènes qui m’agresse et les mouvements de l’ambulance qui me donnent mal au cœur. Heureusement nous arrivons rapidement à l’hôpital et on m’amène directement passer un scan. Le diagnostic est rapidement confirmé : commotion cérébrale. Ce qui veut dire pas de combats pour plusieurs mois en plus d’être en arrêt de travail pour au moins un mois à cause des risques de coups à mon travail. Je n’ai pas le droit de conduire avant d’avoir l’autorisation du médecin et je n’ai pas non plus le droit de regarder le moindre écran. Les prochaines semaines risquent d’être longues. Considérant mes symptômes, le personnel médical décide de me garder sous observation pour la nuit, ce qui ne fait pas du tout mon affaire. Je grogne et je tente de les convaincre de me laisser partir mais ils refusent. Je tente même de sortir du lit dès qu’ils ont le dos tourné, mais je sens étourdi alors je me rends à l’évidence que je ne me rendrai pas bien loin. Maintenant seul, je tente de me reposer en posant un bras sur mon visage pour cacher mes yeux dans le pli de mon coude.
Peu de temps après, j’entends quelqu’un toquer à la porte de ma chambre. Je retire mon bras de sur mon visage et je plisse les yeux pour voir qui est là. Lorsque j’aperçois Danika, un petit sourire naît au coin de mes lèvres. « Dan… » Elle s’approche lentement du lit et ne peut évidemment s’empêcher de passer un petit commentaire ironique. « On t’a pas loupé. » No shit. Je secoue négativement la tête en grimaçant, ce simple mouvement accentuant mon mal de tête lancinant. « J’étais pas prêt. » Je soupire de frustration en repensant aux derniers mois, conscient que ma préparation a été insuffisante et que j’en paie aujourd’hui le prix. « Tu m’as fait peur. » Je relève mes yeux vers son visage où je peux apercevoir toute son inquiétude. Touché, je lui souris et je serre sa main dans la mienne. « Ça va aller, je vais m’en remettre. Je pensais que tu travaillais ce soir? » Je ne m’attendais pas du tout à la voir ici, même si je n’allais certainement pas m’en plaindre. Danika avait semblé peu intéressée à mon combat, me répondant plus sèchement chaque fois que je mentionnais l’évènement. J’avais fini par comprendre que c’était sans doute trop difficile pour elle d’en parler, surtout après avoir vu que tous ses trophées et ses médailles étaient cachés dans le placard de sa chambre. « Comment tu te sens ? » Je lui souris en haussant une épaule, tentant de ne pas montrer à quel point je ne me sens pas particulièrement bien en ce moment. « Ça va c’est rien, j’ai juste été un petit peu sonné. » Et comme un idiot, je tente de m’asseoir sur mon lit pour lui prouver que je n’ai rien, que je suis top shape, mais tout se met à tourner autour de moi. Les yeux fermés, je pose ma main libre contre mon visage en soupirant et je me recouche. Au diable la fierté. « Ok… J’ai l’impression de m’être fait fracasser le crâne à coups de brique, que ma tête va exploser. » répondis-je cette fois honnêtement, le visage crispé de douleur.
« Tu le seras la prochaine fois. » Si on ne me sort pas un autre enfant caché ou que ma meilleure amie ne fait par un arrêt cardiaque devant moi, peut-être. « La prochaine fois sera dans longtemps. » dis-je en poussant un soupir et en détournant le regard, frustré rien qu’à penser que je ne pourrai pas combattre avant plusieurs mois. Mais malgré ma frustration, je suis conscient de l’importance de guérir avant de m’y remettre et des risques plus grands après chaque commotion cérébrale. Seamus est peut-être prêt à jouer avec sa vie, mais pas moi. Ce n’est pas un risque que je suis prêt à prendre maintenant que Maddox est dans ma vie, je connais que trop bien les effets de l’absence d’un père. Les inquiétudes de Danika me surprennent et me touchent alors qu’elle a si souvent exprimé son désir que je m’éloigne d’elle depuis que nous nous connaissons. Elle pose sa main sur la mienne et je tente de la rassurer en caressant doucement sa main avec mon pouce. « Seamus m’a appelée. Je suis partie plus tôt. » Je fronce les sourcils en hochant lentement la tête, tentant de me rappeler de ce qui s’est passé dans l’ambulance. Seamus avait dû l’appeler alors que j’étais toujours dans les pommes. « T’étais pas obligée de venir. » dis-je sans trop réfléchir sur le moment, réalisant ensuite qu’elle risquait de mal interpréter mes mots. Et juste au cas, je serre l’étreinte de ma main sur la sienne pour qu’elle ne puisse pas partir avant que je me reprenne. « Dans le sens que t’étais pas obligée de venir, mais que tu l’as fait… Bref, merci. » Elle aurait pu se foutre de ma condition et ne pas venir, terminer son quart de travail et rentrer chez elle pour s’occuper de notre fils. Mais elle est là devant moi et je me raccroche à l’idée que, peut-être, qu’elle tient à moi. Un peu.
Elle me demande comment et je me sens et, sans aucune surprise, je tente de camoufler mes faiblesses en faisant comme si de rien était. « Ah bah oui sans aucun doute t’as l’air de péter la forme. » Et elle ne croit pas un mot de ma mascarade, elle me connait trop bien. Je tente quand même de m’asseoir dans mon lit pour lui prouver à elle, ou à moi, que ça va mais, malheureusement pour moi, mon corps ne me suit pas dans mon mensonge et je n’ai d’autre choix que d’être honnête avec elle. « Ouais ça me semble déjà être une image plus fidèle à la réalité. » La main toujours posée sur mes yeux, je souris faiblement. « C’est si pire que ça? » Ce n’était ni la première ni la dernière fois que je finissais un match avec des lacérations et des ecchymoses au visage. Heureusement, cependant, je collectionnais beaucoup moins les commotions cérébrales. Je retire la main de sur mon visage et Danika lâche ma main et me tend le verre d’eau qui était posé sur la table tout près. Je lève légèrement la tête pour boire, lui rendant le verre seulement après l’avoir vidé. Ça me fait drôle de la voir aux petits oignons avec moi, mais c’est loin d’être déplaisant. « Les médecins ont dit quoi ? » Je laisse retomber ma tête sur l’oreiller, les yeux à moitié fermés. « Commotion cérébrale. » Mes lèvres s’étirent en un sourire faux alors que je pense à toutes les restrictions que ça implique. « Ils veulent me garder pour la nuit. Je ne sais pas comment je vais faire pour dormir ici avec le bruit et la lumière. » dis-je en croisant mes bras contre mon torse, poussant un grognement de frustration. Je me frotte les yeux d’une main, levant ensuite mon regard fatigué vers le sien. « Je suis en arrêt de travail pour au moins un mois, de combats pour plusieurs. Pas le droit de faire du sport, de conduire, de fixer des écrans… idéalement pas d’alcool. Pas le droit d’avoir une vie finalement. » Je suis incapable de rester immobile trop longtemps, les prochaines semaines s’annoncent pénibles. D’autant plus que je ne peux même pas m’occuper en écoutant la télévision, aucune idée de ce que j’allais bien pouvoir faire des mes journées. « Peux-tu fermer la lumière? » Je finis par lui demander, peinant à garder les yeux ouverts avec cette lumière qui m’agresse.
« Tu te souviens du combat, tu veux me raconter ? Tu sais quelles erreurs tu as faites ? » Alors que je tente de me rappeler tous les détails du combat, je fixe le plafond les sourcils froncés. J’ai du mal à réfléchir avec mon mal de tête, la fatigue n’aidant pas non plus. « C’est un peu flou. » Certains détails étaient clairs, d’autres moins. Je frotte ma barbe d’une main en repensant au combat, incapable de me rappeler exactement comment je me suis ramassé au sol dans le deuxième round. « Je me souviens d’avoir été coincé au sol. J’arrivais pas à me relever… » J’esquisse un petit sourire moqueur alors que je lance un regard complice dans sa direction. « Je me suis fait avoir comme toi au dojo il y a quatre ans… sauf que la finale a été pas mal moins agréable. » Je ris légèrement mais mon rire est rapidement remplacé par un rictus douloureux. Parce que contrairement à moi avec elle, mon adversaire n’a pas restreint sa force en martelant mes côtes de coups de poing. Mon visage devient plus sérieux alors que je soupire longuement, les yeux fermés. « J’essayais de me relever mais j’étais trop fatigué à force de me débattre… J’étais essoufflé. Et après je me suis réveillé dans l’ambulance. » Mes souvenirs du combat se limitaient à ça et je ne pouvais pas regarder la vidéo du match pour comprendre mes erreurs, ça devrait attendre que je me sois rétablie ou que Danika me fasse part de ses observations mais je doute que ça l’intéresse.
Je ne me souviens pas de m’être déjà effondré devant quelqu’un comme je l’ai fait le mois dernier devant elle et, pourtant, je ne peux pas m’empêcher de vouloir minimiser la gravité de mon état pour ne pas me montrer vulnérable face à elle encore une fois. Parce que même si nous nous sommes tous les deux ouverts l’un à l’autre ce soir-là, ni l’un ni l’autre n’y avons fait référence depuis. C’est beaucoup plus facile de faire comme si rien de tout ça ne s’était jamais produit, tout comme le malaise du lendemain matin. Tout comme la première fois que nous avions couché ensemble après quoi elle s’était empressée de me faire comprendre que rien ne s’était passé et que ça ne voulait rien dire. Depuis le temps, je connais la chanson. « Si ça peut te rassurer t’es presque un peu moins moche qu’avant ? » Je ris silencieusement, déjà prêt à répliquer. « Ça t’arrive souvent de coucher avec des gens que tu trouves moches? T’es si désespérée que ça? » Évidemment que je suis incapable de renchérir à mon tour, souhaitant avoir le dernier mot comme d’habitude.
Je prends le temps de lui expliquer mon diagnostic ainsi que toutes les indications que le médecin m’a fournies. Je suis découragé rien qu’à penser aux prochaines semaines pendant lesquelles je ne sais vraiment pas ce que je ferai pour passer le temps. J’imagine que je n’aurai pas vraiment le choix de me reposer alors que je n’arrête jamais deux secondes habituellement. « C’est mieux ? » me demande-t-elle après avoir fermé la lumière de la chambre suite à quoi je soupire de soulagement en hochant lentement la tête. « Oui merci. » Mon mal de tête s’atténue légèrement et je n’ai plus à plisser les yeux pour pouvoir la regarder. « Je sais que c’est pas idéal. Et puis te connaissant tu vas finir par avoir envie de te taper contre les murs. T’as plus qu’à te mettre au…coloriage sinon ? Maddox pourra te donner des conseils si tu veux. » Ses paroles font naître un sourire sur mes lèvres. Je replis un de mes bras au-dessus de ma tête tout en la fixant d’un air amusé. « Une belle façon d’empirer mon cas en me cognant un peu plus la tête, je vais devenir débile. Ça te donnera peut-être enfin raison de me dire que j’ai tous dans les muscles et rien dans la tête. » N’empêche qu’elle a raison, je vais devoir faire preuve de beaucoup d’imagination pour m’occuper l’esprit pour ne pas avoir envie de tout casser sur mon passage. « Je ne me souviens même pas de la dernière fois que j’ai dessiné. Maddox sera probablement meilleur que moi. Tu vas faire la juge et voter pour le plus beau dessin? » demandais-je en lui faisant un clin d’œil. Même si tout ça semblait amusant dit comme ça, ça allait vite me lasser. D’autant plus que je n’ai jamais eu la fibre artistique, du moins pas pour les arts plastiques.
J’essaie de me souvenir du combat pour comprendre quelle erreur j’ai commise mais mes souvenirs sont flous et j’ai l’impression de me fatiguer plus que d’autre chose en réfléchissant. Je lui fais tout de même part de ce dont je me rappelle et je ne peux m’empêcher d’énoncer les similitudes entre le deuxième round et le combat amical qui nous a rapprochés quatre ans plus tôt. « Ouais je considère toujours que j’ai gagné quand même ! » Je ris légèrement mais mon rire s’éteint rapidement à cause de la douleur qu’il me provoque. Je pose une main sur mes côtes endolories que je caresse du bout des doigts à travers mon chandail. « Si ça peut te faire plaisir, je ne suis pas trop en état d’argumenter. On laisse tomber le tutu par contre? » Je la supplie du regard même si je me doute qu’elle ne démordra pas parce que ça lui ferait bien trop plaisir de me voir dans cette tenue loufoque. « Je pourrais regarder la vidéo si tu veux. Et te dire.. » propose Danika d’une voix hésitante. Je n’ai pas besoin de réfléchir bien longtemps à ma réponse, elle a toujours été de bon conseil. En ce qui concerne les arts martiaux, du moins. « Je veux bien. Juste si tu en as vraiment envie. » Parce que après avoir vu ses trophées et ses médailles dans son placard, je sais que ce n’est pas un sujet dont elle parle avec facilité aujourd’hui.
« Tu pourrais venir chez moi. » Je retire mon bras de derrière ma tête et je pose ma main sur mon ventre en la fixant d’un air dubitatif. Attendez, quoi? J’ai vraiment bien compris là? Je n’ose rien dire tellement sa proposition me semble venue de nulle part. « Je veux dire, ça serait mieux que tu sois pas seul non ? au cas où il y a un problème ? Et puis ça permettrait à Maddy de te voir tous les jours pendant quelques temps… » Je me frotte le menton d’une main en hochant lentement la tête. « C’est pas fou. » Voir Maddox plus régulièrement aiderait forcément à ce qu’on développe un lien plus fort. « Enfin t’es pas obligé..je comprendrais si t’en as pas envie, si tu préfères….aller ailleurs, ou rester chez toi.. » Hésitant, je la fixe en silence pendant un long moment, caressant toujours mon menton du bout des doigts. Lorsqu’elle a décidé de me laisser prendre ma place auprès de notre fils, jamais je n’aurais cru que les choses se passeraient aussi bien qu’en ce moment mais je sais aussi que tout pourrait basculer de l’autre côté en un claquement de doigts. Lorsque nous étions en couple quatre ans plus tôt, nous n’avions pas eu besoin de déménager ensemble pour nous déchirer. Alors même si la cohabitation ne sera que temporaire, je ne peux m’empêcher de penser que ce n’est peut-être pas une très bonne idée. Mais en même temps, c’est vrai que ce serait plus simple comme je ne pourrai pas conduire et il n’est pas question que je m’impose à Stacey et Mila, d’autant plus que ça risquait d’être difficile de rester au repos avec Kurt dans mes jambes. « T’auras pas envie de m’étrangler dans mon sommeil? » demandais-je finalement en riant pour briser le silence. Reprenant un air sérieux, je plonge mon regard dans le sien en haussant les épaules. « Plus sérieusement, je pense que ce ne serait pas une mauvaise idée. Pour le petit. Si c’est vraiment ce que tu veux bien sûr. » Même si je sais qu’elle a raison, je tente d’étouffer la petite voix qui me dit que c’est une mauvaise idée, que ça me donnera seulement envie d’avoir plus. Parce que je me dis que ce sera bien l’occasion de voir si on pourrait arriver à cohabiter si jamais on voudrait se redonner une chance. Parce que Danika ne serait pas là en ce moment si elle était indifférente, non? J’essaie de m’en convaincre. « Pourquoi tu fais tout ça? Y’a trois mois tu ne voulais rien savoir. » Malgré le malaise que ma question suscite, je me force à ne pas détourner le regard, souhaitant savoir ce qui a bien pu changer en si peu de temps.
« J’osais pas te le dire, mais c’est surtout que t’as pris un sacré coup de vieux en trois ans ! » Ses paroles font naître un énième sourire sur mon visage et je compte bien renchérir malgré la fatigue qui se fait sentir de plus en plus. « Je fais partie de ceux qui vieillissent mal, c’est ça? Franchir le cap de la trentaine a tout gâché. » Je prends une pause, relevant mon regard moqueur vers le sien. « Fais attention, c’est ton tour cette année et les cheveux gris risquent de moins passer inaperçus avec tes cheveux foncés. » dis-je en lui faisant un clin d’œil même si je sais que changer de dizaine ne brisera pas son charme.
Ma convalescence risque au moins de stimuler mon imagination puisque je devrai trouver de nouveaux passe-temps pour m’occuper. Ça me semble être le moment parfait pour consolider ma relation avec Maddox, en espérant qu’on se rapprocherait un peu plus du moment où j’allais pouvoir passer un peu de temps seul avec lui. J’apprécie présentement tous ces moments passés à trois mais ça me semble un peu étrange de présenter le petit à mes parents avec mon ex dans le portrait. « Si je suis juge, tu ne gagneras jamais. » répond-elle lorsque je lui demande si elle votera pour le plus beau dessin advenant le cas où Maddox et moi dessinerions. Aucunement surpris par sa réponse, je hausse les épaules en lui souriant légèrement. « Les choses ne changeront jamais hein. Et puis ce n’est pas comme si tu pouvais être objective maintenant avec Maddox en plus. Je n’ai vraiment aucune chance. » Elle n’avait jamais voulu me laisser gagner peu importe les circonstances, par fierté auparavant, mais il était tout naturel qu’elle prenne en plus le côté de notre fils maintenant.
Si ça peut lui faire plaisir de s’imaginer qu’elle a gagné il y a quatre ans, même si je sais très bien que c’est moi qui l’ai fait tomber au sol et pas l’inverse, pourquoi pas? Mais pas question de porter le fameux tutu dont il était question à l’époque et je tente de la convaincre même si nous savons très bien que ces négociations n’aboutiront jamais sur une décision unanime. « Jamais ! » Je soupire bruyamment en roulant les yeux. « Même dans mon état, t’es pas prête à lâcher le morceau. Quelle sans cœur. » Mais elle se rattrape au moins en me proposant de regarder la vidéo du combat pour pouvoir me faire ensuite part de ses commentaires.
Elle me surprend ensuite en formulant une proposition un peu folle que je prends tout de même le temps d’étudier un moment. Je pense aux avantages et aux inconvénients et je finis par accepter après un court instant de réflexion. J’essaie de m’accrocher aux bons côtés, à ce que je pourrais gagner en habitant temporairement chez elle plutôt que de trop penser à tout ce qui pourrait mal se passer. La poussière est retombée après quatre ans et nous avons bien réussi à s’ouvrir l’un à l’autre le mois dernier, pourquoi ne serions-nous pas capables de communiquer encore une fois? « Oh si sûrement, mais qui te dit que ce n’est pas l’objectif ? » Je tourne la tête vers la porte de la chambre comme pour vérifier qu’il n’y a personne qui pourrait nous voir puis je rapport mon attention sur Danika. « T’es aussi bien de m’étrangler là, tout de suite, avant que le petit s’attache trop. » dis-je en baissant le ton, une lueur espiègle dans le regard. « Oui, je pense que ça serait bien pour Maddox. » Je hoche lentement la tête en lui souriant, réfléchissant déjà à tout ce que j’aurais besoin d’apporter chez elle pour me sentir un peu chez moi. « Il va falloir que j’arrête chez moi ramasser mes choses. Tu peux venir me chercher demain ou tu préfères que je demande à quelqu’un d’autre? » Je devrais pouvoir trouver une âme charitable pour faire mon taxi si elle préférait préparer son appartement pendant que je passais à mon appartement.
Curieux sur les motivations de Danika à vouloir être aux petits oignons avec moi, je lui demande directement pourquoi elle fait tout ça pour moi considérant la relation conflictuelle que nous entretenons depuis toutes ces années. « J’ai fait une erreur. J’essaye de la réparer. » Même si le regard de Dan fuit le mien, je lui souris en guise de réponse sans rien ajouter de plus. Je tente de lutter un peu plus longtemps contre la fatigue, mes paupières se fermant de plus en plus. Tranquillement, la voix de Danika se fait de moins en moins distincte jusqu’à devenir un brouhaha lointain dont je ne comprends plus les mots. Je m’endors au son de sa voix et lorsque je me réveille quelques heures plus tard, il n’y a plus aucune trace de sa présence.