| solou #2 + keep the pulse alive in you |
| | (#)Mer 24 Fév 2021 - 18:35 | |
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Elle avait échoué. Elle l’avait laissé partir. Lou Aberline s’était levée tous les matins avec pour unique but de se venger et de tuer Mitchell Strange, son moteur interne alimenté à la rage et à la détermination. Et lorsque le moment vint, elle en fut incapable. Alors pourquoi se lever à nouveau, hein ? Pourquoi se leurrer avec des objectifs de vie qu’elle n’était pas fichus d’accomplir ? Elle ne faisait plus illusion. Elle n’en avait jamais été capable. Strange était là, au bout du canon de son pistolet. Il s’était tenu devant elle, à sa portée, à sa merci. Pourquoi, comment, tout cela la dépassait ; elle ne se souvenait que d’une tempête d’émotions qui avait entièrement voilé son regard et son jugement. Le reste était noir. Désormais il était de retour dans la nature, et elle, aux prises avec des démons aux crocs plus acérés que jamais, plantés dans sa peau, déchirant sa chair. La jeune femme s’était laissée tomber dans son lit, ce jour-là. Léthargique, vidée, elle avait fixé le plafond des heures durant, pleuré autant de temps, jusqu’à ce que le mélange de larmes et de vertige la plonge dans un sommeil sans rêves, sombre, sourd.
En ce qui lui sembla n’être qu’un clignement de paupières, trois jours passèrent. Trois jours, et Lou n’avait pas quitté ce lit, cette chambre, cet appartement. Le chien tournait en rond, frustré, n’ayant pas vu l’extérieur depuis autant de temps autrement qu’à travers la baie vitrée du duplex, la terrasse la narguant de l’autre côté. Depuis l’étage, la jeune femme ne sentait pas les déjections que Tiny avait été bien forcée de semer ici et là -dans lesquelles elle la laissait vivre alors qu’elle avait promis d’être sa famille, d’en prendre soin. Oui, le salon n’était qu’un champ de bataille couvert de plumes des oreillers décoratifs sur lesquels le canidé avait défoulé ses nerfs, de câbles dévorés furieusement, de morceaux de télévision détruite après son impec sur le sol, de croquettes dont le sac avait été éventré dans la cuisine après des heures à subir la faim ; le tout sur fond de pisse et d’excréments. Et elle n’en avait strictement rien à faire, Lou. Rien de tout ceci n’avait la moindre importance. Parce qu’elle n’était pas vraiment là -ou plus pour longtemps.
Lorsqu’elle se sentait émerger, l’australienne se contentait de préparer la prochaine dose. Chaque geste était devenu si machinal qu’elle aurait pu les effectuer les yeux fermés ; la poudre, la cuillère, la flamme, la seringue. L’aiguille se faufilait entre ses doigts de pieds comme elle l’avait déjà fait des centaines de fois auparavant, et si la sensation était loin d’être agréable, elle était aussi vite oubliée lorsque l’opiacé courait dans ses veines. Alors Lou se laissait retomber dans son lit dans un soupir de soulagement -celui de maintenir ses noires pensées à distance encore un moment. Somnolente, sédatée, tantôt il lui semblait fusionner avec son matelas pour son plus grand bonheur, tantôt elle croyait flotter au-dessus du sol. Elle ne voulait rien sentir, rien entendre, rien penser. Le silence et l’absence habituellement si terrifiantes étaient un salut inespéré. Tout valait mieux que toutes les voix dans sa tête qui lui répétaient qu’elle avait échoué, qu’elle était une ratée, un imposteur, qu’elle n’avait jamais eu les épaules pour tout ceci. Les hurlements moralisateurs de tous ceux qu’elle avait déçus, abandonnés, trahis en route jusqu’à ce fameux jour où elle s’était dégonflée. Leur brouhaha lui donnait l’impression que son crâne allait exploser. Son père, Blanche, Finnley, Lene, Anwar, Aisling, Raelyn, Jeremiah, Ichabod, Joseph et tant d’autres. Absolument tout ce qu’elle avait entrepris n’avait servi à rien. Et ce qu’elle s’infligeait alors, elle le méritait. Elle ne méritait que cela. Piquer et piquer encore jusqu’à ce que son corps lâche. Ou jusqu’à ce qu’elle trouve une nouvelle raison de se lever le matin. S’il était le matin. Si cela avait une importance. Si cela avait un sens.
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| | | | (#)Mar 9 Mar 2021 - 3:00 | |
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| keep the pulse alive in you A glimpse of a light in this void of existence C'est très désespéré d'avoir Solas pour protecteur. Son ex fiancée pourrait le certifier que c'est moins par certitude que par intuition donc par nature, qui dépasse la raison. L'instinct de survie ? L'espoir et peut être même carrément le dernier qu'une main puisse encore se tendre au fin fond du trou. Quelle genre de main pour une tâche si héroïque ? Celle qu'il avait donné à son ex, celle que Lou tient pour main droite pour la même raison, la survie. C'est un poids lourd c'est pour ça qu'il lui revient, à lui qui à les épaules d'Atlas. S'il pouvait la retrouver et la sermonner pendant des heures et des heures. C'est son espoir à lui d'avoir encore une chance de lui sortir une tirade insensée sur une lumière si forte qu'elle va la réveiller elle aussi peut importe où elle se trouve. Il en à tué du temps en travaillant au musée à réfléchir dans l'espoir de trouver un sens à sa situation en attendant sa destinée quelle quelle soit, même montée de toutes pièces par son imagination pendant de longues heures d'ennui juste, croire en quelque chose mais plus fort que tout, sans exception. Expliquer la lumière c'est comme expliquer le temps, vous imaginez venant de lui ? Mais il essayera tout pour la ramener, il dirait tout et n'importe quoi pour la faire croire encore elle aussi. La lumière ne disparait jamais elle est si constante que tout en est fait même nous, c'est une des rares vérités universelles. Elle n'est jamais qu'éclipsée temporairement, par un objet qui s'interpose nous fait de l'ombre et qu'il nous appartient de casser. Comment porter la lumière là où elle à disparue ? Avant de porter quoi que ce soit de tel l'ambitieux, il doit faire ses preuves en étant désemparé, en étant dans une forme de dénuement poétique diront nous. Il est devant la porte d'entrée de chez Lou et ce qu'il veut faire c'est entrer chez elle "sans y avoir été invité" pour la trouver et en espérant l'y trouver, en vie. Peu importe la raison pour laquelle il doit en venir là pour apprendre qu'elle n'est pas morte. Quand à son invitation elle est tacite, il à reçu un double des clés de la part de Lou dans son élan de survie. C'est difficile de pas mentionner au jury la patience exemplaire de Sol qui souffre pourtant d'une carence chronique de cette vertu. Alors que ça fait trois jours que Lou est partie achever sa vendetta le laissant se demander plein de choses, mais en gros à quoi ressemble sa destinée à lui quand il ne fait pas partie de celle de Lou ? Quand il s'est tourné seul vers le BB-8 il s'est senti comme John Snow: he doesn't want it. Sa destinée si Lou n'est pas là et tant qu'elle n'est pas morte, c'est de suivre sa vocation et de la retrouver. Trois jours c'est quand même le temps que ça à prit pour que Solas la laisse écrire sa légende personnelle et revenir, ensuite donner signe de vie si c'est encore le cas. Et finalement pour qu'il sorte de ses méditations pour penser au moyen de faire en sorte qu'une partie du rêve de Lou ne s'écroule pas en son absence à un moment des plus tendus. C'est beaucoup moins sa vocation de superviser le BB-8 hein, mais comme c'est à elle, il remue littéralement ciel et terre pour que son rêve ne se soit pas effondré en même temps qu'elle à son retour de RTT wherever the fuck that is, et ça à intérêt à être chez elle. Il va essayer d'entrer. On aime pas le verbe essayer normalement mais la vérité c'est que par précaution il est armé, rien que pour ça on peut pas dire que le déplacement respire la sérénité. Et quand il à contrôlé machinalement cette arme aussi surréaliste que la voiture avec laquelle il s'est déplacé, il sonne par stratégie et comprend immédiatement que Lou n'est pas là et qu'il va essayer d'enter oui, et qu'il va peut être même pas y survivre. La sonnerie à réveillé Tiny de la stupeur silencieuse dans laquelle elle devait être mais qui à accourut pour se jeter sur la porte avec une violence qui la fait trembler et ses aboiements sont déments, sachant que de base elle est pas forcément cordiale. Entre la perspective de se faire défoncer par un animal féroce et celle de retrouver Lou morte ici depuis trois jours, si on à besoin de Jesus c'est maintenant. Sol à une croix noire énorme patchée dans le dos de sa veste, c'est pas assez fort comme appel ? Il entre, et c'est difficile d'être impartial et méthodique. Déjà parce qu'il intervient chez Lou, cauchemar psychologique visuel et olfactif, tout en étant littéralement en train de se faire attaquer par une bête. "Tiny" ouai, elle ne s'est pas jetée sur Sol pour se faire réconforter dans ses bras en sachant qu'il venait les aider elle et Lou mais pour le manger, très clairement. Elle est comme lui quelque-part: bien noire, d'origines plus qu'incertaines mais un croisement qui favorise pas la stabilité en tout cas, et sa vocation c'est de défendre Lou et c'est la seule chose qui la retient. Tiny dans cet état c'est un peu comme si l'ambiance c'était dégradée un peu plus, pour le coté épique. Tu veux passer la porte des enfers pour aller chercher Dulcinée champion ? Ecoutes, fais toi d'abord lacérer comme tout le monde... Sol observe autour de lui à la recherche de Lou mais il s'occupe de Tiny en même temps pour essayer de lui trouver à manger sans succès, donc pour remplir le plus grand récipient qu'il ai pu trouvé d'eau dans le but qu'elle se concentre dessus ne serait-ce que quelques minutes, le temps qu'il en sache plus sur ce qu'il s'est passé ou ce qu'il se passe ici. Il pense aussi vite qu'il monte à l'étage. La télé éclatée, difficile à dire si il y a eu une altercation ici ou si c'est l'oeuvre de Tiny livrée à elle même. La lumière allumée le rend nerveux. Au moins, personne ne s'est occupé de Tiny depuis plusieurs jours mais entre l'odeur des déjections canines et de la déchéance générale il ne reconnaît pas l'odeur de cadavre abandonné. Si Lou avait été tuée et laissée ici il le saurait déjà. A moins que Cerberus en bas ai été capable de la manger pas impossible, mais elle ne se serait pas montrée si affamée. D'ailleurs dès qu'elle n'aura plus soif elle vas revenir vitesse grand V. Il aurait ouvert la baie vitrée dans l'espoir qu'elle aille y tourner en rond au lieu de le chercher lui mais si elle n'a alertée personne jusque là parce qu'elle était confinée à l'intérieur, il est malheureusement préférable d'avoir moins de temps mais qu'elle n'alerte personne aux alentours, tant pis pour lui. Quand il pousse la porte de la chambre de Lou, la découvrir vraiment ici mais dans son état apparent, c'est comme si cette même porte s'était refermée sur lui avec assez de violence pour souffler la flamme de Solas qui vacille pour la première fois depuis longtemps elle s'éteint même, temporairement. Lou est morte. Il est conscient qu'il ne sait pas encore si elle est vraiment morte mais c'est quand même difficile de le contredire dans l'immédiat elle est morte. Il s'éclipse sur la courte distance qui la sépare de lui pour prendre son pouls sur son poignet tiède qu'il laisse retomber lourdement un peu soulagé. Sa respiration sur l'écran de l'iPhone qu'il vient de dégainé et qu'il retourne de la même main pour coller le flash dans l'oeil qu'il tient ouvert. Bilan et constat déplorable: état de conscience bien plus qu'approximatif mais au moins tout n'est pas perdu. Il ne peut rien faire d'autre dans l'immédiat que de se laisser retomber lourdement sur le matelas à ses cotés, pour observer le plafond et accuser réception de l'image de Lou morte à coté de lui qui reviendra surement le hanter. Il tourne la tête vers elle, elle à quand même l'air bien morte non ? En argot déjà parce qu'elle est défoncée beyond belief, et morte parce qu'elle ne donne plus signe de vie dans cet état qu'elle s'inflige elle même en espérant l'overdose. Il aurait voulu s'autoriser à baisser les bras lui aussi, temporairement comme la lumière. Juste à coté d'elle dans ce cauchemar pour s'y endormir de fatigue d'un sommeil dont il est dépourvu depuis trois jours. Jusqu'à ce qu'elle se réveille et le trouve là ou jusqu'à ce qu'il se réveille, et qu'il avise à ce moment là. Mais il n'a pas le temps. En redescendant Solas à rasé les murs en essayant de se faire tout petit, ridicule. Que fait Tiny il n'en sait rien mais tant qu'il n'est pas nez à nez avec elle il s'empresse de rejoindre l'entrée le plus discrètement possible en enjambant la merde et les détritus. Il vas tenter de vaincre et de sortir la chienne, aller la faire manger, rapporter de quoi manger, aller à la pharmacie pour Lou et pour lui aussi qui à déjà été mordu une fois en entrant. Quand Lou se réveillera, son appartement et autant que possible sa chienne auront retrouvés leur état normal. Et si elle se réveille avant qu'il rentre, il a pris un sac pour s'en servir de poubelle qu'il va sortir et y jeter seringues cuillères et tout ce qu'il à trouvé partout que Lou utilise pour se tuer. La drogue elle même il l'emporte avec lui. Il prendra ses clés là où il récupère le harnais de Tiny et il l'enfermera chez elle. Sol dépose son 9mm le temps de contrôler Tiny, projet épique. Il hésite un instant à retirer sa veste mais c'est qu'une veste en jean coupée aux manches comme ça s'appelle une battle jacket, si c'est pas le moment idéal pour la porter quitte à ce qu'elle termine en lambeaux pour de valeureuses raisons. Tiny le remarque enfin et va charger Solas qui fait à claquer la laisse enroulée avec force sur ses avants bras pour l'attirer. Ensuite, ce sera le tour de Lou l'Indomptable. Qui sera peut être réveillée par le fracas qui vas suivre: "Shall we begin ?"
Dernière édition par Solas Forthys le Dim 9 Mai 2021 - 0:06, édité 1 fois |
| | | | (#)Mer 31 Mar 2021 - 1:45 | |
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Ni la lumière droit dans la rétine, ni la présence de Solas allongé à côté d'elle, ne parvenaient à l'extraire à sa léthargie. Lou n'était pas inconsciente, encore moins éveillée ; elle se situait à la frontière, flottait, coulait, remontait à la surface inlassablement de ce grand rien qui ressemblait à la mort et ne l'était jamais tout à fait. Le voulait-elle seulement, mourir ? Lorsqu'elle avait introduit la seringue une première fois entre ses orteils, elle en était certaine ; la seule issue à tout ceci, son unique échappatoire était de se laisser dépérir jusqu'à ce qu'on retrouve un cadavre sur ce matelas. Elle n'aurait pas à faire face à son échec, n'aurait aucun compte à rendre, aucune honte à essuyer, aucun égo à reconstituer. Elle n'aurait plus à fuir, à se battre, à choisir ; elle pouvait renoncer. Elle pouvait s'avouer vaincue, terrassée. Et tant pis si choisir la mort laisserait une image faible et lâche d'elle ; une fois de l'autre côté, cela ne serait plus son problème. Oui, trois jours plus tôt, cela semblait être la seule solution. Puis Lou se demandait ; si elle souhaitait véritablement mourir, n'y avait-il pas plus rapide et efficace que cette méthode ? N'était-ce pas la preuve qu'elle en avait peur, ou qu'elle était encore attachée à la vie ? Combative malgré elle, la jeune femme n'avait jamais su lâcher prise. Malgré les désespoirs qu'elle avait connus, elle s'était relevée, s'était battue pour elle-même. Comme les cafards, elle survivait aux bombes atomiques. Et c'était, à peu de choses près, ce qui s'était abattu sur son plan et l'intégralité du monde de l'illégalité de Brisbane. Une bombe. Une onde de choc qui secouait toutes les certitudes et tout ce qui était jusqu'à présent établi. Mais le roi n'était pas mort. Non, le roi s'en était sorti par sa faute. Uniquement sa faute. Et cela méritait bien encore un peu plus d'agonie.
La jeune femme se sentit émerger doucement. Elle devina des sons sans saisir leur provenance ; la cuisine ou son imagination, quelle différence. Sa bouche était sèche, sa gorge abritait un désert. Les tripes tordues par la faim, Lou faisait la sourde oreille aux supplications de son estomac. Muscles engourdis, os de verre, le tout sans volonté ; elle peinait à se mouvoir désormais, réunissait difficilement la force d'ouvrir les yeux. Le point de rupture était si proche, si elle tendait les doigts pour l'atteindre. Le moment où son corps flancherait et la libérerait de ses fardeaux, où elle aurait plus d'héroïne dans le sang que de globules blancs ; si ses doigts lui accordaient ce dernier effort, elle pourrait se sédater de nouveau pour un dernier voyage. Si seulement la seringue était encore là. “Non…” souffla-t-elle à travers ses tuyaux vocaux poussiéreux. La quinte de toux qui suivit tordit son corps en convulsions douloureuses, ses membres alités soudainement crispés par la recherche d'air. Tout avait disparu. La drogue, la cuillère, même le briquet. On lui avait volé sa couronne, voilà qu'on lui subtilisait sa mort. Recroquevillée comme une enfant pendant ce qui lui parût être des heures, Lou subissait désormais le juste retour de l'enfer qu'elle avait fait subir à son corps. Désormais la soif lui embrouillait autant ses pensées que ses sens ; le monde ne se résumait qu'à des formes indistinctes, des bruits lointains. La faim rouait son ventre de coups de couteau, lui donnait froid, puis chaud et froid à nouveau. Elle était vivante, définitivement trop vivante. Et cette conclusion fut accompagnée d'une ultime remontée acide qui éclaboussa le sol de bile.
Quelle heure était-il, lorsqu'elle se réveilla de nouveau ? Avait-elle perdu conscience deux minutes ou une heure ? L'australienne avait l'esprit plus clair, la tête plus lourde qu'après ses pires cuites et l'estomac définitivement vide. À la force de ses articulations, elle se redressa enfin. Un vertige la frôla, un larsen se glissa entre ses oreilles. Elle se mit en tête de se lever et quand bien même cela donnait comme une fausse bonne idée, à l'aide de tous les meubles qui lui passaient sous la main et d'une bonne dose de ténacité, elle y parvint. Les brindilles qui servaient de jambes à Lou semblaient plus que jamais fragiles et sur le point de s'écrouler. Sous son haut court, à la lumière du plafonnier, ses côtes saillantes traduisaient toute la volonté qu'elle avait eu de disparaître à de nombreuses reprises au cours de sa courte vie. Soutenue par les murs plus que par ses pieds, elle traînait sa carcasse dans le couloir jusqu'à la salle de bains. La lumière était douloureuse, respirer était pénible. Mais elle parvint à sa destination et s'abandonna dans la cabine de douche, son dos glissant tout le long du mur jusqu'à ce qu'elle rencontre le sol. À tâtons, elle trouva le mitigeur et déclencha le jet d'eau. Sa peau prit de longues secondes avant de déterminer si celui-ci était chaud ou froid, mais ses muscles, eux, subissaient bien le choc thermique. Froid, la réponse était froid. Les dents de Lou se serrèrent tandis qu'elle passait ses bras autour de ses genoux. À travers l'eau qui ruisselait sur son visage, son regard redécouvrait les contours du monde. Il ne fallut pas longtemps avant qu'elle discerne une silhouette avec elle dans la pièce. “Qu’est-ce tu fais ici, Sol?” demandait-elle tout bas entre ses molaires tremblotantes. Levant les yeux jusqu'à trouver son visage, la jeune femme se surprit à ressentir une forme de soulagement. Si quelqu'un devait être le témoin de son état, c'était lui. Si quelqu'un devait la sauver d'elle-même, c'était lui aussi. Et il était là. Il était là et bien qu'elle n'en montrait rien, elle en était reconnaissante. Non, elle ne voulait pas mourir. Elle n'en avait pas le courage. “Ici, chez moi. Pas la salle de bain.” qu'elle ressentit le besoin de préciser, parvenant à esquisser un sourire. L'absence de pudeur de l'australienne l'empêchait de se formaliser d'un regard extérieur sur sa silhouette détrempée. Qu'il s'invite dans son appartement ne la dérangeait pas plus, mais elle aimait faire mine du contraire. “C’est toi qui a pris la came ?” elle demanda finalement, se doutant de la réponse. Qui d'autre pouvait bien se soucier assez d'elle au point de s'inquiéter de son absence ? Elle n'était pas en colère, elle ne lui en voulait pas. "Je meurs de faim." Littéralement, ou pas loin..
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| | | | (#)Lun 19 Avr 2021 - 1:58 | |
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Pathétique. Solas pensait avoir gardé sur son téléphone la recette des lasagnes que la fiancée du patron avait laissé aux trois agents de sécu dans l’espoir qu’ils se mettent à cuisiner chez eux au lieu d’avoir à engager un chef pour s’assurer qu’ils se nourrissent comme des athlètes.
Comme il ne l’a pas trouvée, il a improvisé en faisant les courses et terrorisé une cliente réticente à l’aider à se souvenir des ingrédients dont il a besoin en raison de l’allure de Solas: D’un côté il a un bandage de fortune imbibé de sang que la pharmacienne lui à fait à l'avant bras en essayant de le convaincre d’aller aux urgences. De l’autre il tient en laisse et muselée une chienne qui reste agressive parce que Solas n’est pas son maître et qu’elle le lui rappelle à chaque instant, potentiellement responsable de ce que cache le bandage d’ailleurs. Quelques traces de sang sur sa veste en jean aussi, dont la croix dans le dos a été lacérée d’un coup de griffes dont il se souviendra longtemps et qu’il est bien content de ne pas avoir reçu au visage.
Il a improvisé encore, de retour chez Lou et dans sa cuisine essayant de créer des couches de nourriture pertinentes au fond d’un plat en verre à priori borosilicate avec l’espoir que ça se transforme miraculeusement en lasagnes savoureuses à la sortie de ce four dont la seule fonction qu’il semble connaître instinctivement, c’est l'ouverture de la porte.
Il est interrompu par Tiny qui se lève d’un bond en aboyant en direction de l’étage, avertissant Solas du réveil probable de Lou. Il demande à la chienne de se taire pour mieux écouter ce qu’elle a déjà perçu. Il ne lui fait toujours pas confiance pour ne pas l’attaquer un jour par vengeance ou juste parce qu’elle a autant de mal que lui à gérer ses émotions mais pour le moment, leur baston de tout à l’heure pour la contenir est assez fraîche dans sa mémoire pour qu’elle se rallonge en couinant, le regard résolument tourné dans la direction approximative de Lou. Il n’entend rien au début et commence à quitter la cuisine pour monter, mais il revient sur ses pas en l’entendant finalement, vomir. Welp, welcome back ?
Il ne monte pas pour autant la voir tout de suite. C’est avec une indifférence feinte pour son réveil qui doit être brutal et en entendant Tiny grogner contre lui comme si elle lui en voulait de ne pas courir pour la rejoindre qu’il retourne aux fourneaux pour trouver le thermostat et faire préchauffer d’accord, mais à quelle température et ensuite combien de temps doivent cuire les lasagnes ? Heureusement qu’il a plus de conviction envers Lou qu’il lui reste d’espoir de sauver ce plat.
Quelques heures plus tard, en entendant l’eau couler dans la douche il se décide enfin à aller la voir. L’écran de son téléphone affiche minuit passé et c’est encore Tiny qui l’a réveillé en aboyant. Il s’était endormi sur le canapé, fatigué du stress des derniers jours et du rangement qu’il à fait chez Lou en attendant qu’elle émerge de sa défonce épique. Et s’il révèle à Lou sa présence chez elle en entrant dans la salle de bain alors qu’elle s’y trouve sous la douche, c’est qu’il se doute qu’elle n'y est pas en train de s'astiquer en fredonnant ses chansons du moment, non. Elle est prostrée, dans un état proche du décès évité de justesse, telle qu’il s’attendait à la trouver.
“Qu’est-ce tu fais ici, Sol?”
Oh shit, she’s definitely back. Elle est tout juste lucide mais les premiers mots que Lou adresse à Solas depuis qu’il l’a vue s’évaporer sans garantie de la revoir un jour sont on ne peut plus fidèles à ce à quoi elle l’a habitué: il a la tête qui tourne. L’adrénaline qui équilibrait le stress et le soutenait avant qu’il la retrouve vivante à déserté son organisme, laissant place à la joie de la retrouver, contrariée immédiatement par sa question. Ce qu’il fait chez elle, elle n’en a vraiment pas la moindre idée ?
Je suis là où le devoir m'appelle, c'est ma fonction principale ? Mon travail ? Ce pour quoi tu es venue me chercher ? Ce pour quoi tu me paie ? Je suis venu te chercher en retour ? Je suis venu te sauver ? Je...
Ouai non on s’arrête là, ça elle ne le sait pas et ce n'est pas le moment de lui dire. Sol ne sachant que répondre entre les variations d’une même vérité, laisse le temps à Lou de plaisanter en forçant un sourire à travers toute la douleur qu’elle ressent. Lui essaye un instant de garder sa contenance mais lâche l’affaire très vite. Ce sera sans succès face à la vague scélérate qui arrive sur lui, un mur d’émotions qui le percute de plein fouet au moment où il s'approche de la douche pour toucher l’eau beaucoup trop froide. Avec tout ce qui lui est passé par la tête pour répondre à la question de ce qu’il fait chez elle et dans la salle de bain justement au lieu d’attendre qu’elle en sorte, la réponse c’est s’assurer qu’elle ne soit plus en danger de mort, que ce soit par overdose en faisant disparaître la drogue de sa portée, ou par hypothermie en ajustant la température de l’eau.
Il s'accroupit, ce qui place son regard à hauteur de celui de Lou. Le sauveur perd ses moyens dis donc et il vacille, plié en deux pour mieux encaisser l'effet rétroactif des trois derniers jours. Elle est si vulnérable devant lui qu’il s’autorise à faire de même peut-être pour la première fois depuis qu’ils se connaissent. Voit elle seulement ce qu’il se passe dans le regard de Solas quand il la regarde comme s'il retrouvait ce qu'il a de plus précieux et qu'il a faillit perdre ? Avec un peu de chance non, entre l’eau qui ruisselle sur son visage et la brume dans laquelle sa conscience se trouve encore.
Cassant son air grave du même sourire que celui qu’elle a réussi à lui faire et d’un geste surprise, il l’éclabousse avec l’eau qui coule. Un peu parce que l'eau n'était pas assez chaude pour lui faire plus de bien que de mal, beaucoup parce qu'elle a plaisanté la première, passionnément parce qu’elle a posé cette question qui le rend tellement fou que si elle n’était pas si affaiblie, il exploserait dans cette salle de bain.
“J'ai toujours été là.”
Comment ça qu’est-ce qu’il fait là ? C’est elle sa mission, il ne peut la perdre que si elle se perd toute seule et en perdition totale c’est bien comme ça qu’il l’a retrouvée après qu’elle soit parti sans lui et qu’elle soit rentrée chez elle sans rien lui dire non plus pour mieux sombrer le plus loin possible, là où même lui n’aurait rien pu tenter d’autre que la nécromancie pour la ramener.
Il s'en tient à cette réponse, parce qu'elle n'est pas encore en état de l'écouter partir en monologue et encore moins d’essuyer sa colère à l’idée qu’elle puisse se foutre en l’air. Qu’elle - Qu'ils se fassent buter par le Club c’est plus ou moins ce à quoi on s’attend, mais qu’elle baisse les bras au point de se laisser mourir est inenvisageable. Dans l'immédiat la priorité de Solas est de prendre soin d’elle, jusqu’à ce qu’elle soit de nouveau en état de le supporter, lui et tout ce qu’il a à dire sur la destinée.
“J'ai fait à manger.”
Et des courses, si elle préfère manger quelque chose de plus avenant que ce que lui a tenté de préparer. Ce serait dommage d'avoir survécu pour mourir d’overdose, d’hypothermie ou d’intoxication alimentaire. Il se relève, prêt à quitter la salle de bain jusqu’à ce que Lou se sente la force d’en sortir pour descendre manger si elle y arrive sans son aide, mais il s’arrête avant de passer la porte.
“Et oui c'est moi qui ai la drogue.”
Ça sonne comme un aveux alors que c’est sans le moindre scrupule qu’il l’en a privée. Il aurait même pu ne pas répondre, personne d’autre que lui n’est venu ici depuis qu’elle est rentrée chez elle. L’intention première c’était de l’empêcher de se shooter pendant qu’il était sorti. Mais il a la drogue, il ne l’a pas jetée pour autant elle est sur lui c’est ça l’info utile bien qu’elle ait zéro chance de la récupérer de force. Ce qu’il n’a pas, c’est la moindre intention de partir d'ici avant de lui avoir fait un discours dantesque. Lou à 99 problèmes, et son problème immédiat contre toutes attentes c’est Solas.
Il y a en fait deux choses qu’il doit vérifier chez elle. La première, chez elle où elle habite, c’est chose faite: Lou s’y trouve et elle est encore en vie. La deuxième, chez elle en son fort intérieur, c’est qu’elle n’a pas envie de mourir. Elle a échappé à l’overdose par chance, si elle avait vraiment eu envie de se suicider de cette manière elle était tout à fait capable de s’injecter l’unique dose qui aurait fait le travail.
C’est comme si elle devait être sauvée deux fois: son corps et son âme. Sauve elle l’est, saine on verra. Dans pas longtemps, quand la faim ne sera plus la priorité de Lou par instinct de survie, le manque se fera sentir. Sauf qu'il à besoin d'elle en état d'écouter ce qu'il veut lui dire. La guerre est loin d’être finie celle qui se joue entre le Club et la Ruche certes, mais la Guerre Sainte - l'esprit contre l'ego - encore moins. S'il doit l'aider à se ressaisir il est prêt à donner tout son sens à l'expression "qui aime bien châtie bien", sévèrement même. Il n'attend qu'elle.
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| | | | (#)Mer 5 Mai 2021 - 0:25 | |
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L’eau glacée l’avait d’abord secouée avant de la rendre léthargique de nouveau. Le choc thermique avait lancé son coeur dans un course folle, et le palpitant n’avait jamais si bien porté son nom. Pompant plus fort qu’il ne l’avait pu depuis des jours, il envoyait valser dans ses veines la chaleur résiduelle de son anatomie dans ses membres engourdis, redonné un peu de couleur à ses joues. Puis elle pâlissait de nouveau, lèvres bleues, doigts fripés, muscles tremblants ; roulée en boule sous le jet , les bras autour de ses jambes, Lou ne faisait rien pour empêcher les bienfaits de la douche se transformer en hypothermie. Ce n’était que du froid. Cela s’ajoutait à la longue liste de ce qui ne la tuerait pas. Sa vie, elle la devait probablement à Solas. Même si la jeune femme ne s’était pas donné les moyens d’une mort rapide et efficace, il n’y avait aucun doute qu’un fix ou deux auraient fini par faire le job. Sans nourriture, sans eau, elle avait conscience qu’elle jouait une fois encore les miraculées. C’était peut-être ce dont son égo avait besoin, de valses à répétition avec la faucheuse, juste au bord d’une tombe à son nom ; danser, jouer à tourner en rond, y mettre un orteil, un pied, et s’échapper quand minuit sonnait. Peut-être qu’elle avait besoin de se mélange de vulnérabilité et d'invincibilité qui ressortait de chacune de ces rencontres. Mais pour le moment, la seule ombre dans la pièce n’était pas la mort ; c’était Solas. Pas aussi taciturne que d’habitude, l’australienne lui arrachait un sourire et elle estimait que cela était une preuve suffisante qu’il ne lui en voulait pas d’avoir disparu des jours durant, d’avoir voulu fuir et jouer la carte de la facilité -car les cadavres n’avaient pas de comptes à rendre. Il était sûrement l’une des rares personnes que Lou verrait se réjouir de sa survie. Bien qu’elle n’avait pas l’intention que son élan autodestructeur se sache, d’autres ne seraient tout simplement pas aussi heureux qu’elle ait survécu à Mitchell encore une fois -et par-dessus le marché, qu’elle ne soit pas parvenue à le tuer. La pensée lui donnait un coup dans l’estomac. Quelle lâche, quelle abrutie elle avait été. Puis les gouttelettes heurtèrent son visage. “J'ai toujours été là.” assurait Sol. "C'est vrai." Elle esquissa un sourire. En tout cas, la brune était bien heureuse qu’il soit présent, que ce soit par loyauté, parce qu’il s’était véritablement inquiété pour elle, ou par volonté de sauver un excellent gagne-pain. Elle ne voulait pas le savoir, craignant bien trop la réponse qu’elle redoutait et le mètre supplémentaire dans le grand trou de solitude qu’elle s’était creusée elle-même, plus profond encore que la faim qui tordait son estomac. “J'ai fait à manger.” Un rire douloureux échappa à Lou tandis que l’espace d’une seconde l’image d’un Solas revêtant un tablier de cuisine et s’affairant derrière les fourneaux lui paraissait aussi ridicule que le Space Ranger de Pixar participant à une tea party. "Alors je risque de crever d'intoxication alimentaire au lieu d'overdose, c'est diabolique." Peut-être bien qu’il était remonté contre elle, finalement.
“Et oui c'est moi qui ai la drogue.” Elle le savait, elle s’en doutait. Avant que Solas ne quitte la salle de bain, elle acquiesça d’un signe de tête, bouche fermée. Lou n’avait pas le remerciement facile, et cette approbation tacite de la décision du brun était à cet instant au sommet de ce qu’elle avait à offrir comme gratitude. Immédiatement après l’avoir observé disparaître dans le couloir, la jeune femme quitta la cabine de douche. Que le sol était bas. En se redressant, elle comprit que la douleur qu’elle avait ressenti plus tôt en traînant sa carcasse dans la salle de bains n’était pas qu’un appel à l’aide de son corps épuisé ; le pied ayant reçu toutes les injections de ce dernier jour avait enflé, une veine s’était rompue et les points d’entrée de l’aiguille, rougis, brûlaient entre ses orteils. "Bordel." Si ce n’était pas pathétique. Désormais consciente de la douleur, s’appuyer sur sa jambe gauche relevait de la torture, et oui, l’australienne avait bien trop de fierté pour demander de l’aide à Solas qui en avait déjà bien assez fait. Elle grimaçait à chaque pas, d’abord jusqu’à ce peignoir dans lequel elle s'emmitouflait volontiers, puis jusqu’aux escaliers du duplex, menant au salon. Pourquoi avoir pris un appartement avec de foutus escaliers, telle était la question. Descendre une marche après l'autre, appuyée de tout son poids contre la rambarde, lui sembla prendre une éternité. Au dernier palier, Tiny l’attendait sans patience aucune. Les murs tremblaient à chacun de ses aboiements puissants. Lou s’asseya en bas de l’escalier et réceptionna les immenses pattes de la chienne sur ses épaules, option grands coups de langue sur toute sa face. Impossible de se débattre. La brune se contentait de flatter de caresses le col de l’animal. "Hey, Tiny. J'parie que t'as réservé ton meilleur accueil à Sol ?" fit-elle avec une ironie non dissimulée. Son regard se porta sur celui-ci, du coin de ses yeux malicieux. La chienne n’aimait pas des visiteurs, et après avoir passé des journées entières livrée à elle-même, nul doute que toute présence humaine rimait de nouveau avec menace pour elle. Lou avait le sentiment d’avoir trahi sa compagne à quatre pattes, elle qui souffrait déjà d’un passé difficile pour une bête si pleine d’affection pour quiconque remplissait la gamelle et lui donnait un toit. En l’adoptant, elle avait fait le serment d’être sa famille et qu’elle ne ressentirait plus jamais la solitude, de la même manière que sa présence permettait à la jeune femme d’être moins esseulée. Elles étaient supposées se sauver l’une l’autre. Et elle l’avait laissée tomber. "Je suis désolée." glissa Lou à Tiny dans un murmure étranglé, le visage fourré dans son poil noir, les bras autour de son imposant garrot.
Un grand coup de langue sécha ses larmes naissantes, les remplaça par un éclat de rire. La jeune femme se releva de nouveau, et de son boitement malhabile, sautilla jusqu’à la cuisine. "T'as préparé quoi, chef ?" demanda-t-elle à Solas en prenant place sur l’une des chaises hautes autour du comptoir qui bordait l’espace ouvert. A l’odeur, elle savait déjà qu’elle avait été mauvaise langue ; cela n’était pas la senteur d’un plat immangeable. Son estomac, en revanche, ne tolérerait certainement pas plus de quelques bouchées de n’importe quelle nourriture, largement espacées de quelques minutes. “Comment… Est-ce qu’il s’est passé quelque chose à la Ruche, en mon absence ?” Elle se pinça ses lèvres, assurément coupable. Coupable d’avoir failli à sa parole, de ne pas avoir tenu ses promesses. Coupable d’égoïsme et d'orgueil. Coupable de ne pas avoir été à la hauteur et, plutôt que de faire face, se cacher pour mourir.
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| | | | (#)Lun 10 Mai 2021 - 2:00 | |
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Il ne s’attendait pas à ce que Lou redescende de la salle de bain aussi “vite”. La première chose que Solas a faite en descendant a été de plonger le nez sur son téléphone et la tête la première sur ce canapé où il prend ses aises comme s’il avait un double des clés et il s’est installé pour écouter de la musique. Il y a toujours de quoi écouter de la musique dans son sac qui fait penser à un départ en weekend alors que le contenu ne passerait jamais aucunes frontières : Wild men against each other, ça chasse au Combat Master STI 201 qui pue l’entraînement tactique comme des stups au nez d’un K9 dans un terminal d'aéroport. Heureusement que l’ambiance est presque détendue maintenant qu’il a trouvé Lou et qu’il est allé fouiller dans son sac pour chercher des airpods pour ne pas se rendormir en attendant qu’elle descende de la salle de bain, mais elle arrive déjà à la dernière marche des escaliers.
Alors, Solas se lève, abandonne la musique pour aller préparer une portion de lasagnes tout en assistant aux retrouvailles entre Lou et Tiny. Il fléchit le bras pour gonfler le biceps avec fierté de son bras pourtant blessé quand Lou évoque l’accueil chaleureux qu’il a reçu en entrant ici, parce qu’il s’en est sorti vivant. Et s’il a remarqué le regard amusé de Lou dans sa direction en parlant de ça, lui regarde Tiny et la défie du regard en signe de rivalité, d’avertissement... et de jalousie.
“T’as préparé quoi, chef ?” Il ne sait pas vraiment et il pourrait se contenter de répondre “des lasagnes” même sans grande conviction, mais il attend que son intuition lui souffle une réponse de l’espace. En attendant, la réponse est une grimace à Lou en repensant à ses lasagnes, en la regardant s'asseoir et en entendant “chef”. “Comment… Est-ce qu’il s’est passé quelque chose à la Ruche, en mon absence ?”
Au lieu de la servir, Solas change finalement de côté du comptoir et va s'asseoir solennellement en face d’elle. Elle demande des nouvelles de la Ruche, lui aurait pensé que ça attendrait qu’elle reprenne des forces pour parler des affaires. Il n’a envie que de parler d’elle, il veut s'assurer de son mental et c’est l’immense culpabilité qu’il a ressenti quand elle a demandé des nouvelles qui a fait venir Sol près d’elle pour la rassurer. Elle racontera ce qu’il y a à savoir sur ce qu’il s’est passé ces derniers jours à son rythme, ce qu’il constate c’est que la particularité de cette blessure de guerre c’est qu’elle se l’est infligée à elle-même. Une vulnérabilité qu’une souveraine ne peut se permettre autrement qu’en privé avec un nombre incroyablement restreint de membres de son entourage. Les affaires de la Ruche et ce qu’elle a vécu ces derniers jours attendront plus tard, au moins qu’elle ait mangé, après qu’il ai fini sa crise.
“Le plus difficile ça a été combien…” combien tu m’as manqué. “...je me suis inquiété. Pour toi.” Il essaye de se comporter comme si ses sentiments n’avaient pas la moindre importance, il s’efforce d’aller au bout de sa pensée que pour elle et déclarer dans la moins charmante des situations justement, qu’il en a vraiment quelque chose à foutre d’elle. Comme si ça ne suffisait pas, ça ne suffira pas: “Et tout le monde pense que je suis ton chien.” On dirait les doléances à la Reine d’autant plus qu’il est hyper vexé, mais pas à cause de ça, évidemment. “Sauf toi visiblement.” Donc il va se lever mais avant s’il n’a pas trouvé le courage de la prendre dans ses bras Super Soldat, ça lui pose par contre aucun problème de pousser la tête de Lou avec la sienne en collant son front au sien et de lui donner un coup de langue de la mâchoire à la tempe. “Alors que je me montre si bien à la hauteur des attentes.”
Maintenant qu’il est de retour derrière le comptoir, il lève une bière qu’il vient de prendre et de décapsuler à la main alors que non, et il la lève à la santé de sa connerie toujours intacte et à celle de Lou semi-intacte parce que c’est bien à ses attentes à elle qu’il a fait allusion. Bien sûr qu’il n’en a rien à faire de ce qu’il se dit de lui ce n’est qu’un prétexte pour exprimer sa contrariété: Que Lou perde la foi, qu’elle ne croit ni en elle ni en lui et trahisse l’incertitude qu’elle a envers sa loyauté simplement en demandant ce qu’il fait là.
Comme il y a peu de risques pour que ce soit plus dégoûtant que ce qu’il vient de faire, il sort les lasagnes du micro-onde: “Tiens.” Il n'a même plus honte de son assiette qu’il pousse devant Lou, satisfait de sa réponse en revanche: “Le sommet de ce que j’ai à offrir en cuisine.”
- Spoiler:
tout ce qui vous écrirez pourra être retenu contre vous @Lou Aberline
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| | | | (#)Mer 19 Mai 2021 - 1:33 | |
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C’était presque trop facile. Disparaître quelques jours, frôler le caveau, se faire arracher à sa propre morbidité et simplement prendre une douche ; ni Tiny, ni Solas ne paraissaient lui tenir rigueur de ce qu’elle leur avait imposé, et Lou, elle, commençait presque à croire qu’elle n’avait bel et bien aucune raison de se mortifier. Presque, si seulement les éclairs de souvenirs de son tête à tête avec Strange ne l’éblouissaient pas au moindre battement de paupières, criant une vérité qu’elle ne digérait pas, alourdissant sa tête et ses jambes d’un profond sentiment d’échec, d’une déception que la queue balayant l’air avec enthousiasme de son chien ne pouvait suffire à faire disparaître. Non, Lou se revoyait perdre les pédales devant Mitchell et toute notion de sang froid, des années de traque et toutes les émotions allant de paire prenant le dessus sur n’importe quelle trace de bon sens. Elle pouvait entendre, comme une cassette dans un vieux magnétophone, ses paroles sans cohérence ni contenance vibrer dans sa gorge ce jour-là, murmures, cris, sanglots et rires tout à la fois. Sa grande vengeance, elle l’avait tourné en ridicule. Elle avait confirmé ce que tout le monde savait déjà ; qu’elle ne serait pas capable. Oh, comme elle rêvait d’un rail, d’un shoot, d’une taffe pour fuir à nouveau le dégoût d’elle-même qui l’envahissait, endormir ses pensées, oublier la défaite. Dans le poil de Tiny, elle sentit ses doigts trembler sous la force de l’envie, crispés, nerveux, frustrés. Et elle serra les dents, se redressa, la douleur dans son pied pour lui rappeler que le simple fait de se lever était un miracle. Le regard se posant sur Solas dans la cuisine, la brune sentit sa poitrine se gonfler d’une gratitude qu’elle était incapable d’exprimer. Peut-être qu’elle mangerait plus de deux bouchées pour lui faire plaisir et le rassurer. Mais avant cela, Lou devait savoir s’il restait quoi que ce soit sur lequel régner une fois remise de ces événements, si les abeilles s’étaient dispersées ou étaient demeurées loyales, si le mot s’était répandu à propos de la fuite de l’ancien boss du Club ; si elle était la risée de tous, en somme, et qu’elle aurait des raisons de regretter de ne pas s’être administré une unique dose finale pour s’épargner la disgrâce. La manière dont Sol prit place face à elle sentait les mauvaises nouvelles et l’estomac de la jeune femme se serra. Il ne répondit à aucune de ses interrogations tacites, ces craintes qui la faisaient trembler de l’intérieur. Et elle savait pourquoi il ignorait le fond de la question, elle serait presque parvenue à le mépriser de décider à sa place quel serait le bon moment d’en parler, s’il n’avait pas confié ; “Le plus difficile ça a été combien… je me suis inquiété. Pour toi.” Lou se figea une seconde, les iris noisette plantés dans ceux de Solas, touchée plus que de mesure, secouée et perturbée plus qu’elle ne voulait l’admettre. Même au plus intime de leur relation passée n’avait-elle eu l’impression de compter de la manière dont il le faisait comprendre cette fois. Mais de son plus bel air imperturbable, dissimulant l’effet de ces mots sur son rythme cardiaque, la jeune femme s’arma de sarcasme ; “Tu vas me faire pleurer.” Rictus mutin en prime, le masque était parfait.
“Et tout le monde pense que je suis ton chien. Sauf toi visiblement.” Lou leva les yeux au ciel. D’une part, l’information n’était pas neuve, l’écho des pensées des membres du gang vis-à-vis de Solas résonnait hors des limites de leurs crânes -mais pas de leurs bouches, qui en avait le courage ? Elle en avait conscience et se fichait de tout ceci autant que le principal concerné, elle n’en doutait pas. Son travail n’avait jamais été de se faire aimer de tous, de toute manière, pas même d’elle en réalité. Mais, d’autre part, elle tenait bien trop à lui, se reposait sur lui, comptait sur lui, pour le considérer comme un banal subalterne. Ce pourquoi l’idée qu’il ne soit loyal qu’à l’odeur de la paie hebdomadaire lui serrait les entrailles. Elle manquait d’amis, Aberline, après les avoir tous rejetés ou trahis un à un. Alors son réconfort, elle le puisait dans les mots du brun qui n’étaient pas ceux d’un homme inquiet pour le cash qui arrondissait les fins de mois. Il était inquiet pour elle. Personne n’avait été inquiet pour elle depuis longtemps. Surprise, le contact gluant de la langue de Solas le long de sa joue lui fit pousser un cri. Immédiatement, Lou le repoussa de ses deux mains. “Bordel, Sol !” beuglait-elle sur le moment avant de lâcher un rire. Du revers de la main, elle essuya son visage en exagérant son dégoût et sa rancœur. A dire vrai, cela faisait autant de bien que de mal de rire ; meilleur pour le moral que pour ses muscles endoloris des pieds aux joues. “Suffisait de me le dire que c’est ton kink d’être promené en laisse.” Le payer en croquettes lui reviendrait drastiquement moins cher qu’en dollars, pour sûr.
Le micro-ondes sonna la fin de son programme et ce fut une portion de lasagnes qui apparut devant l’australienne dubitative. Elle saisissait la fourchette et fit tourner celle-ci entre ses doigts. Son estomac vide depuis des jours hurlait d’anticipation ; la faim avait laissé place à la douleur d’une sorte d’autodigestion. La moindre bouchée sonnait comme un défi, cependant il était raisonnable et inévitable de commencer par le commencement. Respirer, marcher, maintenant manger. Baby steps. “Ca… sent bon ?” L’hésitation relevait plus d’un doute autour du qualificatif à employer que de la véracité de la chose ; les lasagnes sentaient bon par défaut, mais peut-être aurait-elle dû flatter un peu plus le brun en trouvant mieux qu’un terme aussi banal. Mais trêve de sémantique, Lou coupa un bout du côté de la fourchette et le déposa sur sa langue. La mastication réveilla ses papilles avec un mélange étrange de ravissement et de dégoût, retrouvailles inespérées avec un aliment solide. Cela avait le goût de l’odeur, et finalement le mot “bon” se révélait approprié ; de toute manière, c’était forcément meilleur que n’importe quel plat qu’elle aurait cuisiné sans mettre le feu à l’appartement. Elle déglutit et déjà son estomac en eut assez. Lou déposa la fourchette sur le bord de l’assiette, puis joignit ses mains sur ses cuisses, la tête basse. “Je l’ai laissé partir, Sol.” Mitchell. Il ne s’était pas simplement enfui, c’était elle qui lui avait dit de partir. Un animal blessé qui avait toutes les chances de mourir dans un coin de rue, mais trop tenace pour ça. “J’étais à deux doigts, et j’ai pas pu aller jusqu’au bout.” Elle avait trahi sa parole, ses desseins, et elle-même par-dessus tout. Et si elle n’était plus celle qui le traquait ni celle qui le tuait, qu’était-elle désormais ? Qu’était-elle maintenant qu’on lui imposait de vivre ? “Je suis pathétique.”
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| | | | (#)Sam 5 Juin 2021 - 0:57 | |
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Ça doit être gênant pour Lou d’être observée attentivement alors qu’elle essaye de manger, c’est parce qu’il a l’air inquiet qu’elle pense à dire quelque chose de positif sur ce qu’il a préparé ? Ou parce que justement c’est pas trop son genre d’essayer de fabriquer à manger, c'est flagrant qu'il y a mis un surplus de bonne volonté ? Il n’essaye pas vraiment de lui redonner goût à la vie en lui rappelant la saveur exquise d’aliments combinés entre eux avec brio, il faudrait Alec pour ça. L’approche de Sol est basique comme une ration de survie lyophilisée dont la seule fonction est de maintenir en vie durant d’une traversée désertique. La survie de Lou est sa seule ambition - si seulement elle s’en rendait compte - que ce soit en venant la trouver ici, en lui faisant à manger, ou en montant la garde de la Ruche en son absence sans presque rien attendre en retour. Qu’elle ait confiance même qu'elle ai foi en lui, rien que ça pour flatter son complexe du Messie.
L’origine de la déception c’est pas que Lou ne soit pas venue lui caresser le dos comme le bon chien qu’il a été lui aussi en attendant qu’elle revienne, pour le remercier d’avoir eu la noblesse de ne pas profiter de la position qu’elle lui a donné pour prendre la main sur son business quand elle a tout laissé, quand elle a tout abandonné même clairement. Avant qu’elle puisse le reconnaître il faudrait déjà qu’elle y croit - contrairement à Raelyn ou Mitchell - qu’il est véritablement loyal.
Quand on parle du Loup: “Je l’ai laissé partir, Sol.” Bordel c’est déjà l’heure du Conseil et vu comme ça commence heureusement qu’il est en train de basculer ce qu’il reste de sa bière quand elle avoue ça, ça lui donne le temps de se demander comment il est censé réagir à l'annonce que Mitchell est donc probablement en vie. “J’étais à deux doigts, et j’ai pas pu aller jusqu’au bout. Je suis pathétique.” Oh, les violons sont autorisés.
Maintenant il a une explication à la question qui le travaille depuis qu’il a compris que c’est elle qui a décidé de ne pas revenir préférant s’enterrer ici pour mourir, pourquoi ? Parce que sa mission s’est soldée par un échec qu’elle perçoit comme insurmontable alors elle essaye de se fuir elle-même et de fuir le regard des autres, par exemple les membres de la Ruche ou ses adversaires. Elle non plus ne va pas mourir tout de suite et heureusement que c’est lui qui la regarde. Contrairement à ce que son air consterné laisse penser, il ne la juge pas très sévèrement même pas du tout.
Il ne lui en veut pas qu’elle traverse une crise existentielle, ni qu’elle soit partie sans se retourner pour aller tuer Mitchell. Il n’est pas non plus déçu qu’elle ne l’ai pas fait, mais il comprend qu’elle ne croit plus en elle-même. Il lui pardonne d’avoir abandonné au point d’avoir eu envie d’en finir. Il lui pardonne tout, il a juste du mal avec le fait qu’elle puisse douter de lui c’est normal pourtant et toujours mieux que d’être entièrement renié.
Il ne retourne pas s'asseoir près de Lou pour la consoler, il se met juste face à elle qui a perdu la quasi-totalité de sa confiance en elle alors que lui a retrouvé la quasi-totalité du sérieux dont il est capable. Pas sûr que la vision de Sol dans toute son austérité soit ce qu’il y ait de plus réconfortant, Lou est sur sa chaise haute, lui a posé les avant-bras sur le comptoir qui les sépare et de cette manière ils sont à la même hauteur. Puisqu’elle n’était pas certaine de la raison de sa présence ici, il fait donc comme si elle ne lui avait jamais rien demandé, comme s’il ne travaillait pas pour elle et comme si c’est lui qui proposait son aide alors.
“Tu es perdue.” Corrige-t-il. Ce qui est pathétique c’est ce désastre: Elle est en chute libre, incapable de retrouver seule assez de sens pour se ressaisir. “Besoin d’aide ?” Il “tombe” bien, sauf qu’il ne tombe pas vraiment de nulle part. Elle est déjà aller le chercher, elle lui a demandé d’être à son service et elle a peut-être même prié pour qu’il soit à la hauteur de ses attentes en prenant le risque de lui donner la responsabilité de sa vie et l’influence sur son royaume qui va avec. Sa parano est peut-être plus forte maintenant, elle l’a peut-être confondu elle aussi avec ce à quoi elle s’attend des autres plutôt qu’avec ce qu’elle espère de lui. Elle ne sait plus rien.
“Parce que je suis là, je suis venu te sauver.” Il n’imaginait pas qu’il le ferait en l’empêchant de se tuer ni que ça l’étonnerait qu’il intervienne c’est pour ça l’air blasé mais sinon, sa mission à lui ça se passe mieux que pour elle. “En vie, pas seule du tout, il te reste à retrouver le sens de l’orientation.” Ça aide de ne pas être qu’un vulgaire subalterne, il a le rang idéal pour l’aider. “Compte sur moi. Repose-toi sur moi, tiens à moi comme tu le fais depuis le début, la chose à ne pas faire c’est lâcher.”
Qu’il lui propose de prendre sa main en retournant la sienne avancée sur le comptoir c’est pour accord et deux fois symbolique. Il la rattrape dans sa chute déjà, et par vocation pas seulement parce qu’il est sous contrat parce que ça aussi s’est un peu perdu en même temps qu'elle, mais dès son retour il lui redonne.
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| | | | (#)Jeu 8 Juil 2021 - 19:19 | |
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Ce n’était pourtant pas bien compliqué, de tuer quelqu’un. Une balle quelque part entre les yeux et la poitrine, cela était supposé faire l’affaire. Armer un pistolet, retirer la sécurité, tirer, c’était mécanique et sans une once de mystère. Un bang, un peu de sang, et en une poignée de minutes un être vivant devenait un cadavre livide. C’était une promesse facile à tenir donc, de tuer quelqu’un. Si l’on avait les tripes et la détermination, c’était l’affaire d’une demi-seconde. Mais ce n’était pas l’assassinat, la partie la plus difficile de la vendetta qui opposait Mitchell à Lou depuis des années. C’était la haine. Et il était tellement plus compliqué de haïr quelqu’un. Etrangement, personne n’osait jamais demander pourquoi. Pourquoi, s’ils se haïssaient si bien, manquaient-ils à chaque fois leur cible ? Pourquoi ce cirque durait depuis aussi longtemps ? La mécanique d’un révolver était mille fois plus simple que celle de l’esprit humain. Il n’y avait jamais uniquement de la haine dans le cœur de quelqu’un à l’encontre d’une personne. Il y avait tout ce qui avait créé de sentiment, la genèse de la dégradation d’un lien, et ce chemin, ce passif, cette histoire-là était pleine de virages et de crevasses. Tout comme il était vrai de dire qu’une lumière apparaissait plus brillante dans l’obscurité la plus sombre, les émotions les plus négatives résultaient systématiquement d’espoirs déçus et de confiances rompues ; comme on soufflait une bougie, passant de la lumière à la nuit. Il y avait toujours le souvenir de temps plus doux, de connexions plus fortes. Les réminiscences, les regrets, le souhait que les choses soient différentes. Différentes en quoi ? Peut-être qu’ils s’étaient destinés à s’opposer le jour où ils avaient décidé qu’ils ne seraient pas ensemble. Peut-être que leur lien avait commencé à se dégrader dès Melbourne. Et ce premier domino était l’exacte raison pour laquelle tout ceci ne prenait jamais fin. Lou revivait cette période un peu plus fort à chaque fois. Les images passaient devant ses yeux et altéraient son jugement. Elle n’avait aucun mal à blesser Mitchell, physiquement et moralement. Mais le tuer ? Elle n’y parviendrait probablement jamais, et c’était cette vérité qui l’accablait. “Tu es perdue.” Le ton caverneux de Solas résonna dans le petit corps vide et figé de Lou jusqu’au bout de ses doigts. Elle nota l’eau sur le dos de ses mains, le sel au bord de ses lèvres, la chaleur autour de ses yeux ; alors mollement, elle essuya ces quelques larmes -de déception, de colère, de désarroi- d’un revers de bras. “Je devrais pas l’être. Ça devait être simple. Je le hais, je le tue. Tout ce que j’ai construit allait uniquement dans ce sens. C’était limpide.” Ce n’était jamais simple. Ce n’était jamais une route linéaire. Même la 66 n’allait pas toujours tout droit. “Besoin d’aide ? Parce que je suis là, je suis venu te sauver.” La sauver. Quelle blague.
Ce n’était pas la première fois qu’on voulait la sauver. Loin de là. A dire vrai, il y avait toujours quelqu’un pour endosser cette armure qu’elle le veuille ou non. Et cela ne l’aurait probablement pas autant dérangée si tous ces bons samaritains armés de bonnes intentions cherchaient véritablement à la sortir du pétrin, à l’arracher à ses propres démons, plutôt qu’à se donner une bonne image d’eux-mêmes. J’ai fait tout ce que j’ai pu, disaient-ils à chaque fois deux secondes après avoir baissé les bras lorsqu’elle se montrait un brin trop challengeante. Elle n’avait jamais eu besoin d’être sauvée, Lou, c’était tout le problème. Elle s’enfonçait dans ce que d’autres appelaient une mauvaise direction en opposition à leur vision du droit chemin, mais elle traçait simplement sa route comme elle le souhaitait et n’entendait pas emprunter toutes les déviations et passerelles qu’on voulait lui faire prendre. Pour la sauver. La sauver des mauvaises fréquentations, des influences néfastes, de la drogue, d’elle-même. La sauver de sa détresse, de sa colère, de son ambition, de sa chute. Ça demandait plus que de grandes épaules et un lasso pour la sauver. Ça demandait plus que de l’intention. “Me sauver de quoi ? fit-elle en relevant les yeux. Je suis juste de retour dans mon propre enfer. Et ça sera pire qu’avant.” Elle avait échoué et tout le monde allait le savoir. Qu’allait-elle faire désormais ? Qu’allait-elle dire lorsqu’elle serait pointée du doigt ? Comment espérer garder la main sur la Ruche alors qu’elle avait trahi sa raison d’exister ? Et surtout, comment expliquer la situation aux chinois qui apprendraient qu’elle n’avait pas été à la hauteur de leur investissement ? Pourtant on l’avait avertie, plusieurs fois, que son plan était stupide ou insensé, que son dessein était de la folie ou du suicide. Comme toujours, Lou n’écoutait pas. Sol ne la sauvait de rien du tout. Sol n’aurait jamais dû venir.
Elle observa la main du brun sur le comptoir, les doigts si grands et la paume si large qu’elle pourrait saisir la tête de la jeune femme toute entière comme une balle de baseball. “En vie, pas seule du tout, il te reste à retrouver le sens de l’orientation.” Une longue inspiration d’air, une longue expiration de larmes. Lou secoua la tête ; en mer sur ses propres émotions, aux prises avec la tempête, elle ne savait plus dans quelle direction aller. S’anesthésier jusqu’à disparaître était apparu comme une solution. Une solution définitive à un problème d’apparence insolvable. “Compte sur moi. Repose-toi sur moi, tiens-toi à moi comme tu le fais depuis le début, la chose à ne pas faire c’est lâcher.” Son regard était toujours planté sur cette main. Elle voulait le croire, elle le pouvait, mais se sentait toujours dénuée de but. Est-ce que cela avait un sens, d’avancer pour avancer ? A quoi bon mettre un pied devant l’autre sans destination ? Lou se sentait vide et à la fois en proie au trop plein d’émotions. Usée, fatiguée, le crâne martelé par les doutes et les pas d’une dizaine d’éléphants. Il y avait quelque chose dans la voix de Solas qui insufflait comme un courant électrique dans ses membres engourdis. Quelque chose dans ses yeux qui lui donnaient l’impression d’être plus ancrée dans la réalité. Un moteur, en somme, du vent dans les voiles. Quelque chose de différent que ces feux intérieurs qui avaient dirigé Lou pendant des années. “Pourquoi, Sol ? elle demanda, la voix éraillée. Pour quoi faire ? Pourquoi ça importe ?” Il avait une vie à laquelle retourner, lui. Quelque chose de simple et sans prétention. Il y avait pire que le musée après tout. Lou, depuis qu’elle avait la Ruche et qu’elle l’avait choisie au lieu de Finnley, faisait entièrement tourner son monde autour d’une vengeance qui n’aurait jamais lieu. Sans cela, ce n’était que des billets et de la poudre. Et ni l’un ni l’autre n’avaient vraiment d’importance. Alors pourquoi vouloir la sauver ? Pourquoi s’accrocher ? La porte était là. Sa vie à lui était de l’autre côté. Elle, elle était un cul de sac.
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| | | | (#)Lun 9 Aoû 2021 - 4:15 | |
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Qu’est-ce qu’il fait là et pour la sauver de quoi ? Si elle s’était contentée de demander ça, ça allait il restait gérable, énervé mais gérable. En temps normal il se serait enfermé dans un formidable mutisme mais il n’oserait pas ne rien dire maintenant alors que c’est la volonté de continuer de Lou qui est en jeu. Il répond d’un ton monocorde mais ouvertement exaspéré à ces deux questions ce qu’il pense faire là et pourquoi, une bonne fois pour toute car ça l'agace:
“C’est de la mort que je suis venu te sauver puisque tu m’as demandé de veiller à ce que tu restes en vie.”
Ni plus ni moins. C’est la nature de son contrat avec elle de l’empêcher de décéder. Dans sa dépression ça n’enchante pas Lou plus que ça qu’il fasse son travail, elle le regarde depuis qu’il l’a trouvée comme si elle avait sérieusement voulu mettre fin à ses jours et parce qu'elle n’a pas demandé ni espéré qu’on la sauve n’a que “wtf, why ?!” comme première réaction à la personne qui vient de la ramener à un état de conscience encore bien trop relatif à son goût, comment la tirer hors de cet état ?
En sachant très bien que ce n’est pas en parlant de ce qu’est censé être leur contrat qu’il va la convaincre que la vie vaut la peine, il se doute que s’il ose aussi s’en tenir à cette réponse il n’y a aucune chance pour qu’elle prenne sa main. Il est ici à la rattraper c’est parce que c’est son job c’est vrai et elle aussi le sait très bien, c’est pas ce qu’elle demande elle lui demande ce que ça peut lui foutre qu’elle soit en vie ou pas dans le fond, si on faisait abstraction du contrat de protection ?
“Pourquoi, Sol ? Pour quoi faire ? Pourquoi ça importe ?”
Il ne s’attendait pas à ce qu’elle lui pose cette question. Il s’attendait très bien à devoir donner une meilleure explication c’est sûr, depuis qu’il l’a trouvée dans cet état même il savait que la conversation qu’ils sont en train d’avoir serait sérieuse mais il est déstabilisé par cette question, la rapidité avec laquelle ce qu’il a l’intention de lui dire s’est imposé dans son esprit et d’avoir l’intention de lui dire c’est ce qui le surprend plus que tout, il ne sait pas encore comment. La main qu’elle n’a pas prise s’est refermée en un poing comme comme celui qu'il a prit intérieurement mais qui lui fait bien mal. Il va l’oser celle-là, au nom de la vérité c’est au moins ça. À part un silence abyssal et baigner dans une atmosphère de misère existentielle - merci de la sauver pour vivre ça c'est clair - il n’y a rien d’autre qu’il sache dire alors par où commencer, pire même qu’est-ce qu’elle voudrait entendre ? Elle-même ne doit pas le savoir, ne s’attend peut être même à rien honnêtement. Tant mieux, la preuve:
“Je suis pas certain de pourquoi ça importe.”
C'est très enthousiaste, il dit ça d’un air si franchement résolu c’est difficile d’imaginer qu’il a un surplus d’espérance à partager avec elle dans un moment où ce serait bienvenu.
Suivant sa ligne directrice il à dit ce qui est vrai, face à Lou qui pleure il est on ne peut plus sérieux et il est prêt à tout même à lui dire ce qu’il peut de la vérité. À ce qui n’est que la question existentielle par excellence il a commencé par choisir des mots justes et à l’échelle de l’existence entière c’est vrai que par nature il ne peut qu’être incertain de ce qui se passe à part le bordel, il ne saura surement jamais. Et le sacré n’est pas magique, il y a peu de chances pour que Sol révèle précisément à Lou le rôle qu’elle est censée tenir là-dedans si elle-même ne le sait pas.
Solas à quelque chose que Lou lui demande parce qu’elle en est entièrement dépourvue mais qu’il ne sait pas vraiment partager c’est la foi. Si quelque chose alimente une lumière quelconque chez lui c’est de ça qu’il s'agit. Et il est en fait plus proche de savoir répondre à la question qu’elle lui a posée que ce qu’il en dit. Mais comme la foi ne peut pas être formulée comme une vérité c'est pas le plus intéressant dans l'immédiat c’est trop peu concret pour qu’un discours pseudo mystique produise le moindre électrochoc chez Lou et “garde la foi” c’est certainement pas du tout dans la direction de quelque chose qui pourrait la sortir de la torpeur gosh, imagine. Il en serait capable le pire, en tout cas il est censé connaître les mots, pouvoir réciter des sourates en farsi tout ça, mais c’est pas la peine d’y penser plus longtemps.
La vérité, toutes tentatives d’en parler en pages et pages de sagesse dans toutes les langues ever s’accordent de toute façon sur un seul principe qui régit tout de manière universelle jusqu’à l'homme qui les écrit pour commencer. La raison pour laquelle Solas tente de la maintenir en vie alors, à défaut de la sauver, pourquoi il n’est pas en train de planifier l'ascension du K2 au lieu d’être au fond du trou avec elle à ne pas lui tenir la main ? Maintenant le challenge semble même plus grand ici.
“Je sais seulement pourquoi ça m’importe.” Ça promet on veut tout savoir. Elle va poser la question ce serait bien qu’il s’explique rapidement, il tente quand même de temporiser sur un quitte ou double et parce qu’on à dit qu’il le faisait toujours au pire moment, sur une allusion à un space opera: “T’as vu le cinquième élément ?” C'est moins chiant que d'évoquer un passage de la Bible, et à peu de choses près Leeloo y pose la même question à Korben que ce que Lou à demandé à Solas, qui n'a rien d'autre que la même réponse que lui et pas à peu de choses près, c'est d'être sur le point de le dire qu'il est presque “Ça dit que c'est l'amour le nom du cinquième élément c'est très abstrait, jusqu'à ce qu'on aime et qu'il n'y ai rien de plus concret.” Ça devient plus réel que ça l'a jamais été effectivement, il a le vertige à entendre ce qu'il raconte pas besoin d'aller au sommet de la montagne la plus violente du monde pour ressentir ce que les alpinistes décrivent comme la bataille insensé de la volonté propre d'atteindre le sommet contre l'instinct de préservation qui lui ne dit rien d'autre que sérieusement ?! non, demi-tour. Solas ne recule pas mais il n'avance plus non plus, ce regard mêlé de détermination et d'une panique viscérale qui voudrait mettre un terme immédiat à ce qu'il essaye de dire t'as très bien entendu, don't make me say it.
- Spoiler:
@Lou Aberline ce temps de réponse inadmissible:
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| | | | (#)Jeu 19 Aoû 2021 - 23:50 | |
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Pourquoi. Cela sonnait de manière si dramatique. Bien plus dramatique que Lou ne l’avait anticipé. Mais elle avait toujours été aisément happée par de grands questionnements sur la vie, le monde, le sens de tout ce qui était né du Big Bang ; elle se passionnait pour les explications scientifiques autant que les raisons métaphysiques propres à chacun tout en prétendant se foutre de tout. Elle cherchait un semblant d’ordre dans le chaos, en réalité, une lumière pour indiquer la direction. Tout le monde semblait avoir sa place dans le ballet de l’univers mais pas elle, non ; elle s’était sentie abandonnée sur le bas-côté de l’autoroute du sens de la vie depuis toujours. Son but, elle l’avait trouvé, ou fabriqué de toutes pièces, lorsqu’elle s’était mise en tête de se venger de Strange. Elle en avait fait sa place dans l’équation, une inconnue de moins qui conférait plus de clarté au tableau. Ordonnée de la colère, abscisse de la volonté, et cela formait une ligne droite ; voilà tout ce dont elle avait besoin. Alors “pourquoi” était une question légitime une fois au point mort. La passivité n’avait pourtant jamais gêné Lou auparavant, prendre cette posture de victime du destin se laissant porter sur le dos des autres, teigneuse et hargneuse bien planquée dans les jupons de ses protecteurs dont elle abhorrait paradoxalement le paternalisme. Elle avait toujours joué les parasites, vivant au détriment des autres et se moquant bien que le destin puisse être fait d’autre chose. Néanmoins, elle avait goûté l’indépendance, Lou, et la sensation délicieuse d’être maîtresse de la situation, des événements, de sa vie ; il n’y avait pas de retour en arrière après cela. Il lui fallait seulement trouver comment aller de l’avant. “Je suis pas certain de pourquoi ça importe, avouait Solas, probablement pris au dépourvu par la profondeur abyssale du doute et de l'immobilisme dans lequel l’échec avait jeté la jeune femme comme le poids plume qu’elle était. Je sais seulement pourquoi ça m’importe.” C’était mieux que rien. Peut-être un point de départ pour elle, une piste. Lou renifla une dernière fois, réarrangea ses tresses et releva le regard. Les épaules basses et l’échine courbée, elle avait encore tout du petit animal abandonné sous la pluie. Elle en avait même les cheveux mouillés. Et bien qu’elle détestait apparaître aussi vulnérable et perdue, encore une fois, elle se sentait assez en sécurité auprès du brun pour laisser voir jusqu’à cette peur paralysante de toute notion de lendemain qu’elle ressentait depuis qu’elle avait commencé à reprendre ses esprits sous la douche. Parce que demain était incertain et ça lui serrait les tripes. Demain il fallait se lever. Demain il fallait recommencer. Demain était dans quelques heures et elle n’avait aucun plan pour y survivre, pour sortir du lit, sortir de chez elle, regarder les gens dans les yeux et reprendre là où elle avait tout laissé.
“T’as vu le cinquième élément ?” Elle hocha la tête. Bien sûr qu’elle l’avait vu. Elle connaissait par coeur le monologue de Chris Tucker lors de sa première apparition, et si on lui demandait, elle dirait que cela était toujours plus utile que de calculer n’importe quelle racine carrée. Elle doutait cependant que Solas veuille la motiver en lui disant à quel point elle était green. “Ça dit que c'est l'amour le nom du cinquième élément c'est très abstrait, jusqu'à ce qu'on aime et qu'il n'y ai rien de plus concret.” Oh, Sol. Le cœur de Lou s’échappa et sauta par-dessus le balcon ; elle sentit le vide et la chute dans sa poitrine avant de poser sa main sur le comptoir comme pour s’y rattraper. Petite, elle voulait un prince charmant et de grandes déclarations. Aujourd’hui, elle s’était auto-couronnée, bataillait contre son propre dragon et avait son preux chevalier. Elle avait oublié tout ce dont les histoires du soir étaient faites. Drôle, que ce soient courage, noblesse et amour qui lui parurent relever le plus de la fiction que tout le reste. Les gens sont lâches de nature, déloyaux, égoïstes. Ils sont leur propre priorité, leur premier amour et le dernier. Pour ceux qui s’aiment eux-mêmes. Pour les autres cette notion abstraite, comme il disait, est une quête, un apprentissage. Certains le cherchent frénétiquement comme la pièce manquante du puzzle intérieur, d’autres le forgent de toutes pièces quitte à faire rentrer un carré dans un rond. Lou ne s’était jamais vraiment posé la question. Elle était entourée, tout simplement. Elle avait un compagnon de route de temps en temps. Certains la marquaient plus que d’autres, certains gagnaient son affection. Bien sûr qu’elle avait aimé mais elle préférait ne pas en être sûre. Elle ne reconnaîtrait pas avoir eu le coeur brisé, encore moins plus d’une fois. Elle ne prétendait même pas avoir eu la moindre importance dans la vie de ces gens-là. Après tout, si elle avait compté, ils seraient toujours là, n’est-ce pas ? “Je suis pas une personne qu’on aime, Sol.” C’était sa conclusion face au champ de mines qu’était sa vie sentimentale. Au choix elle était une distraction casse-couilles, une fille facile, un aimant à emmerdes, ou celle que l’on fuit quand la crasse remontait à la surface -ou une tâche de sang sur les chaussures. S’il y avait un choix à faire, ce n’était jamais vers elle que penchait la balance. C’était sûrement pour cette raison que si elle, elle devait faire un choix, elle se choisissait toujours elle-même. Ca a pas marché la première fois, ça marchera pas la deuxième, qu’elle voulait lui dire et cela sonnait comme une mauvaise excuse bidon façon c’est pas toi c’est moi. Ils avaient tous les deux changé depuis le Club et ils avaient largement pu le constater. Non, Solas était sincère et la jeune femme se devait de l’être aussi. “Je sais pas ce que tu veux de moi, mais je peux pas te le donner. Pas en ce moment.” souffla-t-elle en baissant la tête, le regard tombant sur les lasagnes froides, sur Tiny près du comptoir qui ne désespérait pas d’en avoir un morceau, sur son propre pied ruiné par les piqûres à répétition. Elle soupira. “Je suis désolée.” Pourtant il cochait toutes les cases, Sol, Lou en avait conscience. Il n’était pas comme tout le monde. Il était loyal. Il était là. Il lui prouvait littéralement qu’elle importait. Il la connaissait depuis des années, jusqu’aux recoins sombres de sa personne. Mais l’amour était un moteur inconnu pour la jeune femme. Elle était feu, à choisir, et uniquement cela. Incomplète sous tous les autres aspects, en total déséquilibre. Alors Sol, s’il savait voir, toucher, donner l’amour, avait tout de l'ultime pièce maîtresse, bien plus qu’elle. Pourtant, accepter tout cela était probablement trop demander à celle qui s’imaginait morte quelques heures plus tôt.
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| | | | (#)Ven 20 Aoû 2021 - 23:46 | |
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C'est ce qui s'appelle jeter un putain de pavé dans la mare. Il s'était dit qu'il fallait au moins ça ou 50 000 volts pour la secouer et elle a l'air secouée, ça le fait même sourire tendrement. Peu importe que ce soit à ses dépends pourvu qu’elle donne l’impression de s’animer. Elle a effectivement très bien entendu, mais sans explication elle a moins bien interprété cependant, alors il ne "rigole" pas longtemps juste encore un peu, parce qu'il se penche sur Tiny pour s’adresser à la chienne avant de répondre à Lou.
« T’entends ça ? Elle veut pas de moi ta maîtresse, ça doit te réjouir. »
Quand la notion d'amour a dépassé ses lèvres il savait très bien ce qu'il s'engageait à expliquer à Lou, un exercice d'une difficulté à la hauteur de ses difficultés intérieures à elle. Et en l'entendant s'excuser, il réalise qu'il était tellement préoccupé par la manière dont il allait pouvoir s’expliquer de façon intelligible qu'il n'a pas pensé que la toute première explication qu'il lui doit c'est que c’est pas exactement ce qu'elle imagine, bien plus complexe que ce qu’elle imagine. Métaphysique ? Si c'était pas clair il est far, far away du sol terrestre la tête dans les hauteurs d’où il est tombé.
« Tu es quelqu'un qu'on aime, je t'aime. »
O-k, donc en fait il s'arrête plus il est en train de faire des ricochets avec des parpaings lui, ce qui lui ressemble tellement. Ça lui ressemble tellement moins de dire "Je t'aime" et il faut croire que c’était pas si dur, comment est-ce qu'il à été capable de le dire sans sourciller finalement ?
« J'ai pas dit que j'étais amoureux. »
Cette nuance qui n'est claire pour personne sauf lui mais qu'il se doit de clarifier pour Lou du mieux qu'il peut, alors qu'il s'attaque à un sujet si compliqué et supposément secret par-dessus le marché, qu'il n'est même pas certain d'avoir les compétences pour le faire, une vie entière ne suffit pas pour maîtriser le sujet.
« La différence est qu’un amour véritable n’attend rien en retour, surtout pas ça, surtout pas maintenant. »
Maintenant tout de suite. C'est la raison pour laquelle ses yeux se sont écarquillés en écoutant Lou et en réalisant la direction que prend la conversation. Un semi-remorque rempli de ténèbres mais Dieu merci, il est assez sensible pour ne pas tenter d’extorquer quoi que ce soit à Lou dans son état actuel wtf, à part ne pas se suicider.
Elle se méprend encore parfois à son sujet comme la plupart des gens qui n’ont confiance en personne, c’est normal et ce qui importe c’est qu’il ai une chance d’essayer de se faire comprendre. Il n’est pas unique, ils sont au moins trois à Brisbane et une minorité certes, mais quand même une multitude à travers le monde mais, leur personnalité est un mystère incomparable à qui que ce soit d’autre.
Contrairement à ce que Lou a pensé, rien de ce qu’il est en train de dire est réellement à propos de lui, même pas "Je t'aime", il n’y a qu’elle qui importe maintenant. Il lui avoue qu’il l’aime pour qu’elle comprenne ce qui motive réellement Solas à la protéger coûte que coûte, que c’est d’elle et pas de gagner l’argent pour acheter sa prochaine voiture de beauf qu’il s’inquiète. Et dans le plus subtil, parce qu’elle lui à demandé pourquoi ça importe de rester en vie et que l’amour sera toujours la réponse universelle à ce désordre gigantesque. Mais un amour désintéressé, peu comparable avec ce qu’elle s’imagine qu’il est en train de lui dire.
« Ce que j'attends de toi c’est que tu ne te laisses pas mourir et qu’on continue d’être ensemble. Mais pas ensemble "ensemble" »
Il a un autre pavé en main mais même après avoir balancé “Je t’aime” il y en a qu’il n’est pas certain de vouloir envoyer, celui-là par exemple, qu’il lance quand même en haussant les épaules. Elle pense ne pas être quelqu’un qu’on aime ? Il pense ne pas être quelqu’un avec qui il est réellement possible d’être.
« Parce qu’on en a déjà parlé » d’allez savoir ce qu’elle a cru qu’il attendait d’elle « Et aussi: Chevalier. » Dit il en se pointant lui-même du doigt et c’est en abordant la chevalerie qu’il hausse les épaules, plus qu’incertain de réussir à expliquer l’intérêt d’un titre obscur qui intéresse qui, trois pelés et un tondu au fin fond du Norfolk ? Quoi qu’il en soit: « J’ai prêté serment que ça n’arriverait pas » Protéger Lou n’est pas le seul voeux qu’il ait prononcé. « On fait pas vraiment dans les relations dysfonctionnelles du commun des mortels certainement pas, regardes ce qui est arrivé à Anakin. »
Essayer de ne pas confondre amour courtois et passion. Pas que la passion ne s’applique pas à ce qu’il ressent aussi pour elle au contraire mais il est dans un tel déni qu’il est moins susceptible d’admettre que c’est pas simple qu’il a été capable de lui dire qu’il l’aime. D’ailleurs ce pavé là il ne le soulève même pas, il reste absolument où il se trouve à savoir off limits dans le recoin de son esprit étiqueté “Oh hell no”.
« Ce qui nous lie à ceux que nous choisissons de servir doit dépasser les émotions et les sentiments ordinaires. »
Un autre pavé caché dans le coin “I don’t believe this would end well at all”: Imaginez dire à Lou qu’il a sensiblement ressenti le même sens d’un devoir sans limite pour Mitchell quand c’est lui qu’il servait. D’où une première impression de soulagement quand Lou a avoué qu’elle n’était pas parvenue à le descendre. Tellement pas le bon moment non plus.
« Je pourrais tenter d’expliquer la place de la Dame de Chevalerie, mais je risque de parler sans interruption de choses insensées, autant s’en tenir à la conclusion. »
De choses comme le Soleil et la Lune, le soufre et le sel… Tout un putain de programme qui n’aura absolument pas lieu aujourd’hui. Encore un autre pavé qu’il garde pour lui, pour plus tard, ou pour toujours. Il ne devrait en fait même pas aborder ces secrets c’est presque interdit. La seule personne pour qui il a jamais tenter d’expliquer ce qu’il est en train d’essayer de faire de sa vie est son ex fiancée. Comme "Ex" l’indique ça s’est manifestement très bien passé. Il ne porte pas d’alliance, et désormais la seule chose à laquelle il s’engage est le travail. Pas son travail, le grand œuvre.
« Je t’aime. »
Maintenant plus que jamais, parce que c’est ce qu’elle a besoin d’entendre maintenant plus que jamais qu’elle n’est pas seule en enfer terrestre, même s’il se sent à quasi bout de souffle et que sa voix porte de moins en moins. Son cœur bat si fort qu’elle doit pouvoir le voir à l'œil nu sur ses tempes. Il entend taper dans sa boîte crânienne, même sa vision tremble à intervalle régulier. Pour une fois il n’en mène pas large mais peu importe, ce qui compte c’est que ça sonne vrai.
« Ne te laisse pas mourir, je peux te porter jusqu’à ce que tu puisses de nouveau avancer par toi-même. »
Est-ce qu’il va faire un malaise ? Son cœur vient de rater un battement version y a t’il un défibrillateur à proximité ? Ça va partir en tachycardie à cause de ce qu’il vient de dire là. Impossible de faire plus sincère, mais impossible de ne pas se souvenir de ce qu’il s’est passé la dernière fois qu’il a dit la même chose presque mots pour mots à quelqu’un qu’il devait porter au sens propre pour lui éviter la mort. Malgré sa promesse, sa volonté, sa constitution physique hors norme, il a rien pu faire contre plus fort que lui et le destin de cette personne, c’est seul qu'il est redescendu au camp de base.
Lou son danger de mort est écarté pour le moment, mais pour combien de temps ? Et si elle ne se fait pas de mal seule, il y a des volontaires si déterminés à le faire pour elle. Il est bon, tellement bon qu’il ne manque pas de confiance en lui la tête à claque il aurait mérité plus d’une tarte dans la gueule pour calmer ses envolées d’arrogance. Mais infaillible il ne l’est pas et entre l’idée d’échouer et de la perdre et le sentiment que l’occasion de réaffirmer à quel point il tient à elle ne se représentera pas, qui à risqué de même jamais se présenter, il joue un Ace avec ce qu’il lui reste de voix: un murmure quasi inaudible, elle devra lire sur ses lèvres.
« Je t’aime. »
OMG Sol, stop lyiiing, poses ton traité d’alchimie et vas regarder la tête que tu fais dans un miroir. Soit disant pas amoureux, mais ça se voit encore plus que tes oreilles.
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| | | | (#)Mar 5 Oct 2021 - 20:53 | |
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S’imaginer qu’elle venait de lui briser le coeur était sans surprise fort narcissique de sa part, mais l’idée la mortifiait. Moins pour lui que pour elle, bien que Lou ne se l’avouait pas ; elle ne voulait pas perdre un proche supplémentaire, un ami, un partenaire, un allié. Elle ne voulait pas le perdre, lui. Elle avait entendu trop de fois les portes claquer derrière une personne qu’elle ne revit plus jamais, elle ne les comptait plus. Et si Solas s’ajoutait à la liste, sa maigre volonté de tenir debout disparue la laisserait comme une brindille dans le vent. Fragile, vulnérable, prête à se briser. Cette panique qu’il l’abandonne pourrait lui mettre la puce à l’oreille si elle n’avait pas déjà su en son fort intérieur que le recaler était une énième stupidité. Cependant une chose était claire dans l’esprit de la jeune femme, et c’était la pensée la moins égoïste qu’elle ait eue depuis longtemps ; elle serait nocive pour lui. Comme des paquets de cigarettes qu’on enchaîne jusqu’à oublier le goût de l’air, comme des mètres de rails à en saigner du nez, comme des mains qui serrent le cou au lit mêlant trop curieusement douleur et plaisir. Elle serait son cancer, son overdose, sa ruine. Elle prendrait tout ce qu’il avait à donner et couperait les valves de son côté. Si elle avait appris une seule chose, c’était bien qu’elle fonctionnait comme ça. « T’entends ça ? Elle veut pas de moi ta maîtresse, ça doit te réjouir. » Nouveau coup au coeur, au ventre, au crâne. Solas en riait et Lou n’était pas en état de décrypter si son sourire était vrai ou non. “C’est pas…” ce que je voulais dire. Mais la phrase s'évapore dans un soupir. Qu’est-ce que tu voulais dire alors ? Elle redoutait qu’il enchaîne sur ce genre de question à laquelle elle ne saurait pas mieux répondre qu’aux sous-entendus qu’il avait émis plus tôt. Elle en avait assez dit, à son avis. Elle en avait assez fait.
« Tu es quelqu'un qu'on aime, je t'aime. » qu’il renchérissait, et la brune bataillait intérieurement contre l’envie de lui hurler de se taire. Cette voix qu’elle adorait tant était le sel et le citron sur une plaie qu’elle ne se savait pas avoir -qu’elle avait pris soin d'ignorer. Rejeter les gens avant qu’ils ne vous rejettent ne changeait rien à la sensation persistante de ne mériter que leur dos. Et personne ne s’était donné le mal de lui prouver le contraire. « J'ai pas dit que j'étais amoureux. » Les dents serrées, le coeur en travers de la gorge, Lou leva ses iris noisette droit dans les yeux de Solas. Elle n’était pas sotte au point de ne pas saisir ce qu’il voulait dire par là. En revanche, elle l’était au point de le croire sur parole. « La différence est qu’un amour véritable n’attend rien en retour, surtout pas ça, surtout pas maintenant. Ce que j'attends de toi c’est que tu ne te laisses pas mourir et qu’on continue d’être ensemble. Mais pas ensemble "ensemble". Parce qu’on en a déjà parlé. » Je serais toujours à tes côtés, quoi qu'il arrive, qu’il avait dit. Qu’il avait promis. Elle lui proposerait de sceller ça dans le sang qu’il accepterait probablement. En tout cas, s’en convaincre avait quelque chose de réconfortant.
Un mot après l’autre, la jeune femme sentait ses épaules libérées d’un poids. Qu’il ne la déteste pas, d’une. Qu’il la comprenne, de deux. De trois, qu’il l’illusionne, qu’ils se mentent tous deux ; c’était tellement plus simple. « Et aussi: Chevalier. J’ai prêté serment que ça n’arriverait pas. On fait pas vraiment dans les relations dysfonctionnelles du commun des mortels certainement pas, regarde ce qui est arrivé à Anakin. » Cette fois il la fit rire, d’un éclat de voix parfaitement inespéré qui fit grimacer son abdomen engourdi. Un rire discret, soufflé, pourtant aussi douloureux entre ses côtes qu’exaltant. “Putain de nerd.” murmura Lou affectueusement. Mais saisir la référence de Solas sans peine la classait sans doute dans la même catégorie. Encore une fois, c’était quelque chose qu’elle aimait chez lui. « Ce qui nous lie à ceux que nous choisissons de servir doit dépasser les émotions et les sentiments ordinaires. Je pourrais tenter d’expliquer la place de la Dame de Chevalerie, mais je risque de parler sans interruption de choses insensées, autant s’en tenir à la conclusion. - C’que tu dis fait déjà pas beaucoup sen-... - Je t’aime. » Son sourire fana doucement. C’était tellement plus difficile de tomber dans le panneau de ses beaux discours lorsqu’il prononçait ces mots de cette manière. Quelle manière, elle n’en savait rien. Juste ce ton, cette intonation, ce regard. L’énergie portée par chaque syllabe. Elle choisissait de le croire, de porter ces œillères, parce que la Raison derrière les commandements de Jedi que Solas s’imposait avait somme toute pour limite qu’elle ne l’encourage pas à les transgresser. Ce qui était à son avantage tant qu’elle n’était pas en mesure de placer son énergie dans autre chose que de survivre au jour suivant. Autre chose étant lui. Autre chose étant tout ce que ces je t’aime mais pas vraiment avaient soulevé en elle. « Ne te laisse pas mourir, je peux te porter jusqu’à ce que tu puisses de nouveau avancer par toi-même. » Cette fois, Lou alla chercher sa main. Elle la saisit entre ses dix doigts, si petits qu’ils la contenaient à peine. Elle déposa un baiser sur ses phalanges, et garda cette chaleur dans le creux de son cou. Tant pis si son pouls vibrait sous sa paume, au moins était-elle vivante et le sera-t-elle pour les temps à venir grâce à lui. « Je t’aime. - Je sais. »
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| | | | | | | | solou #2 + keep the pulse alive in you |
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