Ils n’ont rien trouvé de mieux qu’un champ de météorites sur lequel s’affronter. Foutus pirates. Le face à face de Gator et Crocodillo, les deux pirates les plus égocentriques de l’univers qui n’ont rien trouvé de mieux que de stupides surnoms trop semblables. Peut-être qu’on le lui a donné avant qu’il ne se le trouve lui-même, Gator a oublié ce qu’il en était. Il aime à dire qu’il sait tuer des alligators à mains nues, donc, mais la vérité c’est qu’il n’en a jamais vu de toute sa vie. Qui ira vérifier ?

Les canons se font entendre, les boulets croisent bien plus les amas de poussières et toutes les autres merdes rencontrées en chemin plutôt que la carcasse du bateau adverse. Il se porte bien, lui, ce putain de bateau adverse. Les hommes de Gator ont peur, ils pensent que ce sont les yeux peints sur la coque de l’ennemi qui arrivent à dévier les armes et même rendre fou ceux qui s’y plongent trop longtemps. Ils sont stupides, ce n’est que de la poudre aux yeux, comme tout le reste du navire de Crocodillo. Il joue avec son surnom jusqu’au bout et si le reste de l’univers l’admire pour ça, Gator trouve surtout qu’il ne fait qu’apparaître un peu plus encore comme un gamin stupide et trop gâté.

Son bateau n’a rien d’un animal, il ne s’abaissera pas à ça, lui. Entièrement peint de noir, luisant dans la nuit, il est de toute dernière génération. Les trésors du bout du monde ont bien servi à quelque chose d’utile, vous voyez. Aujourd’hui, ils mettent à mal la coque de son adversaire quand, enfin, une large masse noire transperce une partie de la structure. Ils ont servi à acheter des larmes de dernière génération à la technologie de pointe, bien loin de tout ce que les pirates de pacotilles pouvaient avoir dans le temps, eux qui avaient bien plus l'air de faire de l'escrime plutôt que de se battre comme des hommes, des vrais. Les nouvelles lame tranchent l'acier aussi bien que la chair et Gator ne rêve que d'essayer la sienne avec son meilleur ennemi. L’espace est bien différent de l’océan mais n’allez pas croire pour autant qu’un bateau ne peut pas couler : l’inverse sera prouvé ce soir, sous la tyrannie des deux corsaires à la recherche d’un seul et même trésor. “Abandonne, l’ami. Tu ne trouveras que la mort!” Qu’il se contente de courses au trésor de bas étage, cela lui conviendrait bien mieux. Le trésor du roi des pirates sera pour Gator.

« Incendiez ce tas de ferraille. » Il n'y prête pas attention, le Crocodile. Il n'a jamais prêté attention aux types qui viennent se frotter à lui, mais Gator a aujourd'hui toute son attention. Des lustres qu'ils se cognent dessus, mais le Croco voyage entre les étoiles depuis plus longtemps. Le petit lascar qui s'est mis sur la piste du plus grand trésor de l'humanité n'arrivera pas avant lui devant l'arme secrète que le trésor renferme à coup sûr, Croco ne le permettra pas. « Et amenez-moi la tête de Gator. » Mais il ne se laissera pas faire, le petit prédateur des marécages. Il n'a jamais été du genre à laisser son ennemi tranquille et Croco commence à penser qu'au final, c'est ça qu'il cherche. Ca, son vrai trésor.

L'instant d'après, un grand choc fait se dresser le Crocodile qui, las, écoute d'une oreille les mots de son bras droit. La coque est transpercée. Quelques hommes sont morts. Crocodile le sait, si les deux navires s'immobilisent trop longtemps ils rejoindront les tréfonds de la planète Iota, jolie boule jaune aux tempêtes de sable meurtrières. Les deux vaisseaux sont accrochées à son orbite depuis trop longtemps déjà, et Croco aurait dû savoir que Gator en ferait sa cible. C'est sur Iota que se trouve probablement le trésor tant convoité par tous ceux qui prétendent au titre de roi des pirates. Mais Gator aurait dû se contenter de la contrebande. Croco, lui, a l'habitude des butins pour lesquels il se salit les mains. « Laissez les venir. »

Ils sont déjà là. Dans le couloir, Gator a déjà zigouillé quelques membres de l'équipage de son ennemi. « Abandonne, l’ami. Tu ne trouveras que la mort! » « Je ne suis pas ton ami. » C'est le sourire aux lèvres que le Crocodile s'avance, armé de ses rapières. Ce n'est pas parce que l'un de ses yeux ne voit plus qu'il a perdu son habileté au combat. C'est d'ailleurs en partie de là que lui vient son surnom. Celui qui voit à travers l'eau, celui qui porte à l'œil le voile blanc que les crocodiles utilisent pour voir sous la surface. C'est un sourire grotesque qui s'étale sur le visage du crocodile quand il passe à l'attaque.

Ils se pensent déjà roi du monde parce qu’ils ont réussi à toucher quelque chose avec leur épée une fois, une seule. C’est pathétique. Ils sont pathétiques. Lui, tout particulièrement, bien sûr. Les canons grondent de part et d’autres et je doutes que nos hommes savent réellement viser si personne n’est là pour les guides. On risque de se faire avoir par notre propre artillerie à tout instant, c’est une éventualité qui serait bien plus capable de me la faire craindre bien avant toute menace venant de lui. « Je ne suis pas ton ami. » Il échappe un rire, l’Alligator. Les quelques corps au sol ne laissaient effectivement aucune place au doute ; ce n’est pas comme s’il n’y en avait même jamais eu un. Ils sont les pires ennemis de l’Univers et se battront jusqu’à la mort, c’est bien plus évident que n’importe quelle règle générale en ce monde.

Gator initie et, rapidement, Gator est mené en déroute. Il se vante de son oeil éternellement fermé mais quiconque sait que c’est un véritable désavantagea pour un pirate de sa trempe. Son cou était mal visé, mal dosé. L’épée ne fend que l’air, on l’entend à peine. Gator a un rire gras ; il se place en position de défense bien plus que d’attaque. Il est trop empressé, le Crocodile. “Bientôt tu ne seras plus rien.” Ni un homme, ni un pirate, ni même humain. Surtout pas vivant. Un cadavre de plus flottant dans l’infinité de l’espace, à tout jamais. Voilà ce qu’il mérite. Si Gator continue de sourire, il n’en pense pas moins ses mots et pèse ses menaces tout autant. Ils ne peuvent pas continuer cette course effrénée tous les deux ; l’un doit céder place, et ce doit bien sûr être Crocodile. Il n’a pas l’étoffe d’un pirate. Il n’en a même pas le chapeau, c’est pour dire. “Donne moi la boussole et peut-être que j’épargnerai ta vie.” La boussole qui n’indique que ce qu’o désire le plus en ce monde. La lame du premier menace la gorge du second contre laquelle il gratte, sans pour autant en faire couler le sang. Pour le moment.

Il est vrai que le Crocodile se fait vieux. Longtemps, le capitaine corsaire a été le chef de ces océans étoilés, cherchant sans relâche le plus grand trésor de la galaxie. Rares sont ceux qui se font de vieux os, dans ce métier. Le jeune Gator n'est qu'un jeune prétendant au titre, pourtant il est l'adversaire que Crocodile prend le plus au sérieux. « Bientôt tu ne seras plus rien. » Parce qu'il a été tout, mais Gator n'atteindra pas ce titre tout de suite. D'abord, le capitaine adversaire lui réserve quelques tours. Ce n'est certes pas avec ses coups que le pirate mettra Gator en déroute, mais c'est avec une astuce bien plus pernicieuse que Crocodile compte défaire son adversaire. Malheureusement, le combat est inégal et la jeunesse de Gator lui permet d'atteindre rapidement son adversaire à l'œil fermé. Bientôt, ce dernier se retrouve en position de faiblesse.

Couteau sous la gorge, Crocodile ne se départit pour autant pas de l'affreux sourire qui lui barre le visage comme le ferait une balafre. « Donne moi la boussole et peut-être que j’épargnerai ta vie. » « Celui qui t'a appris à te battre a fait du bon travail. » Ces idiots de jeunes pirates n'apprennent plus l'art du combat rapproché parce qu'ils pensent que les rayons laser et les canons font tout. Lentement, le capitaine aîné lâche ses armes au sol. Son unique œil ouvert ne cesse de fixer l'adversaire. « Il y a un détail que tu as oublié, cependant. » Un grand fracas se fait entendre, alors que toutes les sirènes se mettent à sonner dans la salle des commandes où ils se trouvent. Soudain, les portes se verrouillent et on peut entendre l'équipage qui cède à la panique, dans le couloir. « Nous allons nous écraser sur Iota, à moins que j'éjecte le reste du vaisseau et le tien avec, que tu as eu la bonne idée d'encastrer dans le mien. » Son unique œil devient plus brillant à mesure que s'élargit le sourire qu'il garde sur les lèvres. « Que va faire le grand capitaine Gator contre la gravité ? » Coincé(s).

La boussole, c’est tout ce que Gator désire. Un peu de sang au passage n’a jamais tué personne (ou si, justement, et c’est bien là que tout est amusant) mais il sait que cet élément n’est pas essentiel à son bonheur. La boussole pour pouvoir accepter au Trésor, c’est bien plus important que tout le reste et que n’importe quelle vie avec. « Celui qui t'a appris à te battre a fait du bon travail. » Il a appris des meilleurs, il s’est longtemps entraîné. C’est une évidence qu’il sache aujourd’hui se battre avec tant de finesse, même si cela a beaucoup à voir avec son caractère de feu, incapable d’abandonner sa proie une fois qu’il l’a en ligne de mire. Il le pistera au travers des mers et océans sans relâche jusqu’à obtenir ce qu’il désire et s’il faut se servir sur sa carcasse alors soit, c’est ce que Gator fera face au Crocodillo. Sa vie n’est pas plus importante qu’aucune autre.

Les armes de l’ennemi se retrouvent à terre mais Gator ne relâche pas encore son attention. Tout se passe soudainement trop vite et trop facilement, ce n’est pas à l’image de la traque difficile qu’il mène depuis de longs mois - et sans doute a-t-il aussi perdu la notion du temps avec. Il se rend mieux compte des distances parcourues, c’est tout ce qui importe désormais. « Il y a un détail que tu as oublié, cependant. » Le voilà, le piège. Il relève un sourcil intrigué, lui qui boit les paroles de son ennemi de toujours. Les alarmes se mêlent au cri des moussaillons et Gator ne sait pas si c’est parce qu’ils sont eux aussi dans l’expectative ou parce qu’ils savent une chose qu’il ignore. L’un dans l’autre, cela ne lui dit rien qui vaille, surtout pas alors que le borgne a un sourire fier et assuré. Qu’a-t-il encore prévu? « Nous allons nous écraser sur Iota, à moins que j'éjecte le reste du vaisseau et le tien avec, que tu as eu la bonne idée d'encastrer dans le mien. » L’enfoiré. Le putain, putain d’enfoiré. « Que va faire le grand capitaine Gator contre la gravité ? » “Tu sacrifierais ton équipage pour garder une boussole dont tu n’arrives toujours pas à te servir correctement?” S’il est encore en mer aujourd’hui c’est bien parce qu’elle peine à lui indiquer l’emplacement de la chose qu’il désire le plus en ce monde, n’est-ce pas? Gator aurait-il d’autres desseins? Une lass qui l’attendrait au port? “Ne sois pas stupide Crocodillo, tu n’as qu’à me la rendre et je m’en irai. Vous aurez la vie sauve.” Il parle et agit comme s’il pouvait encore avoir le contrôle de quoi que ce soit, le Gator. “La mort ne me fait pas peur.” Son équipage, lui, ne serait cependant pas de cet avis et il ne tardera pas à le faire savoir.

S'il y a bien une chose que le Crocodile ne fait pas, c'est renoncer. Quelque chose a changé, dans le regard de son ennemi. Il a compris. « Tu sacrifierais ton équipage pour garder une boussole dont tu n’arrives toujours pas à te servir correctement? » L'édenté découvre un sourire carnassier. La gueule du prédateur s'est refermée sur la jambe de sa proie sans même qu'il ne s'en rende compte. Les doigts sur les commandes, le Crocodile se redresse. Le combat au corps à corps contre Gator est perdu d'avance. L'animal est trop agile, son aîné est trop vieux pour ces bêtises. Il y a longtemps qu'il n'a plus eu à sa battre. Personne n'arrive jamais à grimper sur son vaisseau, d'habitude. Son équipage est trop rodé à la protection et au meurtre spatial. « Ne sois pas stupide Crocodillo, tu n’as qu’à me la rendre et je m’en irai. Vous aurez la vie sauve. » Un rire gras franchit la gueule du pirate, qui ne panique pas quand toutes les alarmes se mettent en marche dans la cabine de pilotage. Il ne panique pas non plus lorsque d'un seul cri, tout son équipage se résout à mourir. Ils ont toujours su que leur capitaine offrirait leur vie plutôt que de se rendre. « Ils t'ont bien entraîné, tes amis, mais ils ont oublié de te dire qui était ton ennemi, le vrai. » L'obstination du Crocodile est inégalée. Et même face à la mort, il ne saurait se résigner.

Le vaisseau commence à plonger, irrémédiablement attiré par la planète Iota. « La mort ne me fait pas peur. » « Nous avons cela en commun, petit. » Et les doigts du capitaine pressent un énième bouton, qui éjecte la capsule dans laquelle se trouve aussi son adversaire. Derrière eux, les vaisseaux explosent dans le silence habituel de l'espace. Face à eux, le ciel de Iota se rapproche inexorablement. Toutes les alarmes sonnent alors que l'avant de la cabine prend feu. Maladroitement, le capitaine tente de se raccrocher à quelque chose pour éviter de voler à travers la cabine du vaisseau. Et alors que le sol finit enfin par se rapprocher et que le Crocodile s'apprête à perdre connaissance, les immenses parachutes s'activent.

Un p'tit dé pour les pirates :

Win : L'atterrissage se fait sans trop de dommages. Les deux capitaines sont vivants et reprennent rapidement connaissance.
Bof : Pas top de dommages, mais les deux capitaines sont blessés.
Meh : Les deux capitaines sont blessés et ils ne sont pas seuls. Ils se réveillent ligotés dans une grotte. Il y a visiblement de la vie sur Iota.