Ce matin là en descendant au travail, je n'aurais pas imaginé que mon cher patron m'aurait laissé le soin des livraisons. Je prenais connaissance des différentes commande et lieu de livraison sur l'agenda avant de remarquer que l'une d'elle était situé au St Vincent's Hospital. Je ne pouvais m'empêcher de faire le rapprochement avec Isy. On ne s'était pas vu depuis mon départ et je n'avais pas osé prendre des nouvelles, il fallait dire qu'il n'en avait pas prise non plus. Je soupirais légèrement avant de me mettre au travail. Je préparais les commandes avant de les glisser dans ma voiture et de me rendre aux différentes adresses.

Après quelques heures, il ne me restait plus que le bouquet pour l'hôpital. Je stoppais ma voiture sur le parking avant de regarder le bâtiment face à moi. Les battements de mon coeur commencèrent à s'accélérer. C'était grand et il avait surement peu de chance de tomber sur lui, pourtant une partie de moi en avait cruellement envie. Est-ce que je devais faire un détour par les urgences pour le voir ? Je secouais la tête à cette idée et j'attrapais le bouquet avant de me rendre dans l'hôpital.

Je m'arrêtais devant l'accueil et je reprenais mon papier, "Bonjour, j'ai une livraison pour mademoiselle Beazley." La jeune femme tapota sur son ordinateur avant de me donner le numéro de chambre. Elle m'expliqua également que la jeune femme venait d'accoucher. Je souriais doucement tout en hochant la tête pour remercier la secrétaire. La jeune maman était situé au troisième étage dans la chambre 311, j'empruntais donc naturellement l'ascenseur pour que se soit plus rapide et j'avais surement peu de chance de croiser Isaac.

Pourquoi j'avais la désagréable sensation d'être celle en tort. Est-ce que ce n'était pas le mieux qu'il puisse nous arriver ? N'avais-je pas abusé de sa gentillesse ? Je l'avais mis dans l'embarras. Il était certains que j'aurais sans doute pu partir différemment, mais sur l'instant j'avais trouvé être la solution parfaite. Alors pourquoi à présent que j'étais ici, j'avais le sentiment que je devais le trouver pour m'excuser ? Je secouais une nouvelle fois la tête tandis que les portes de l'engin s'ouvraient sur le troisième étage.

Je me faufilais jusqu'à la chambre et je donnais le bouquet à la jeune maman qui semblait totalement aux anges et bien entourée par sa famille. Je m'éclipsais aussi vite que j'étais arrivé, ayant toujours ce sentiment sur les épaules. Je regardais un instant ma montre avant de réaliser que j'avais pris beaucoup plus de temps que prévu. J'accélérais le pas et sans faire attention, j'entrais dans l'ascenseur...

L'activité du service était relativement calme depuis quelques minutes. Les patients qui avaient occupé la salle d'attente était désormais pris en charge et je profitais de cette accalmie pour travailler sur un nouveau protocole de soins avec une collègue avant que la cadre ne me prie d'aller récupérer des résultats et du matériel au laboratoire, le technicien ne pouvant se déplacer. Laissant la tâche de la continuité de la rédaction à ma collaboratrice, je quittais le poste informatique pour m'orienter vers les étages supérieurs où était situé le laboratoire, identité du patient en main. J'optais pour prendre l'ascenseur et m'assurais que j'avais bien l'un des bipeurs du secteur dans ma poche si jamais j'avais besoin de revenir sur mes pas illico presto.

Machinalement, je réduisais la distance entre ma localisation et celle des résultats à récupérer. Je profitais de la présence d'une machine à café pour y glisser mes quelques pièces de monnaie et en faire couler un breuvage chaud et noir qui me servirait de distraction pendant l'attente au guichet du laboratoire. Une décision que je ne regrettais absolument pas lorsque je constatais les quelques personnes patientant devant le service apparemment surchargé et survolté. Je me postais calmement dans la file et sirotais ma boisson, certes abjecte mais au moins bien dosée en caféine.

Une dizaine de minutes plus tard, je reprenais le chemin des urgences. J'appelais l'ascenseur et jetais mon gobelet dans une poubelle à proximité. La tête dans mes pensées, j'intégrais la cabine lorsque les portes s'ouvrirent et ce ne fut seulement en sentant un regard s'attarder sur ma personne que je pris connaissance de l'identité de l'individu qui m'accompagnait dans ce court trajet : Love.

Je sentais mon cœur se serrer doucement à sa vision. La Bryce m'apparaissait en forme, ce qui composait en soi une réjouissance. Cela faisait des semaines maintenant que nous ne nous étions pas adressés la parole. Depuis que la fleuriste avait récupéré ses dernières affaires à mon domicile, un silence radio s'était irrémédiablement imposé, aucun de nous deux ne cherchant spécialement à s'enquérir sur le quotidien de l'autre. "Salut," j'articulais toutefois à son égard, incertain sur l'attitude à adopter avec elle. Je conservais un douloureux souvenir de notre dernier échange houleux, même si je pouvais difficilement éprouver quelconque rancune ou rancœur à l'attention de la vingtenaire. J'assumais entièrement ma grande part de responsabilité et de faute au sein de notre relation.

J'avais pénétré dans l'ascenseur sans prendre connaissance des gens présent dans ce petit espace. C'est seulement en sentant un parfum familier que j'avais relevé la tête et que j'avais réalisé être aux côtés d'Isaac. Il avait maintenant plusieurs semaines que nous, nous étions pas vu, ni même adressé la parole. Je me sentais un peu mal d'avoir ainsi agit et de ne pas avoir pris le temps de lui faire un message, au moins pour prendre un peu de ses nouvelles. "Salut," Je souriais légèrement, "Salut !" C'était vraiment étrange comme situation et je ne savais pas très bien ce qu'on devait faire à présent. Est-ce qu'on était censé faire comme-ci rien ne s'était passé ? Ou au contraire on devait en parler ?

"Tu vas bien ?" Finalement, j'optais pour faire comme-ci de rien et je lui laissais libre choix d'instaurer la conversation sur ce sujet ou non. D'ailleurs, il était libre aussi de continuer la discussion ou d'y mettre un terme. On ne pouvait pas dire qu'un trajet en ascenseur offrait la possibilité de discuter longuement à moins que celui-ci se coince soudainement, mais connaissant l'hôpital, il avait peu de chance que ça arrive. Est-ce que je devais justifier ma présence ici ? Peut-être qu'il pouvait se poser des questions ? Et en même temps, peut-être qu'il n'en avait rien à faire ?

Pourquoi fallait-il que notre relation ait pris un tournant si compliqué ? J'avais la sensation de marcher sur des œufs et de ne pas savoir comment agir face à nos retrouvailles. Il pouvait m'en vouloir, c'était parfaitement légitime et je ne lui en tiendrais pas rigueur, mais si c'était le cas, est-ce qu'il aurait prit le temps de me saluer ? A moins que ce soit un simple salut polit ? Et voilà que j'étais à nouveau partie dans une multitude de questions sans avoir la moindre réponses.

Je réalisais soudainement qu'il me manquait terriblement et j'avais envie que ça s'arrange entre nous et qu'on puisse à nouveau prendre du temps ensemble, sans se prendre la tête et sans se poser une tonne de question. J'avais envie de le reprendre dans mes bras, juste comme ça sans raison. On avait passer d'innombrable moment agréable ensemble, on avait rit ensemble, pleuré aussi parfois, finalement cette situation était bien pire qu'une rupture et faisait bien plus mal, du moins de mon côté car je ne savais pas comment Isaac vivait les choses, et je n'allais surement pas lui poser la question à présent.

Les résultats biologiques d'un patient en main, je pressais le bouton appelant l'un des ascenseurs et exploitais mon attente en laissant mes pensées voguer ici et là. Lorsque les portes métalliques s'ouvrirent, je pénétrais machinalement l'espace, mes mouvements connaissant toutefois un heurts lorsque je remarquais la présence de Love à quelques dizaines de centimètres. Quelles étaient les probabilités que nous tombions l'un sur l'autre de la sorte ? Le monde prouvait une nouvelle fois à quel point il était petit. Je la saluais poliment, précautionneusement, avant d'appuyer robotiquement sur le bouton de l'étage menant aux urgences. "Salut !" Je l'entendais me répliquer avec davantage d'enthousiasme, insufflant un discret sourire sur mes lippes. Je m'adossais à la rambarde handicapée de l'ascenseur et conservais le silence, considérant comment aborder cette rencontre fortuite.

"Tu vas bien ?" Me demanda-t-elle alors que je glissais les résultats d'analyses dans l'une des poches de ma blouse d'infirmier. J'acquiesçais subtilement, retournant l'interrogation : "Et toi ?" Je reconnaissais que c'était sympathique de sa part de s'enquérir sur mon état, mais une partie de mon être ne pouvait s'empêcher de considérer que de nous deux, la Bryce en avait le plus bavé ces derniers temps. Lors de nos derniers échanges houleux, elle m'avait glacé le sang en se présentant telle une personne qui profiterait aux autres en disparaissant, argumentant que sa présence "n'apportait rien de bon". Les paroles qu'elle m'avait adressées retentissaient encore ponctuellement dans ma boîte crânienne, cauchemardesques, et muni d'une gauche rancune, je lui en voulais d'avoir quitté mon domicile en dépit de ma sincère prière qu'elle ne sorte pas vu l'état tourmenté dans lequel elle s'était trouvé suite à cette conversation. De toute évidence, je n'étais personne pour la retenir, puis l'idée que nous ne sachions pas comment nous appréhender sans nous blesser croissait en moi telle une mauvaise graine.

"Tu es venue rendre visite à quelqu'un ?" Je questionnais dans le but d'entamer une conversation. J'espérais sincèrement qu'aucun de ses proches ne soit souffrant. D'autre part, je n'étais pas spécialement friand de revenir sur notre précédente dispute qui avait conduit au déménagement de la vingtenaire. Non seulement il me semblait que nous ne nous trouvions pas au sein du lieu optimal pour ce faire, mais de plus, je n'étais pas convaincu qu'une telle conversation puisse nous être bénéfique. Après tout, il me semblait que nous étions plutôt bornés - ou paumés - sur ce sujet. Nous avions certes évolué au cours de ces dernières semaines, mais je ne me sentais pas spécialement armé pour une telle entreprise, bien que l'amitié, l'écoute et le soutien de Love me manquaient cruellement.

En entrant dans l'ascenseur, je n'avais pas imaginé tomber sur Isy. Il fallait croire que la vie avait décidé qu'on ne pouvait pas faire l'un sans l'autre et que indéniablement on devrait continuer de se voir. Je ne savais pas exactement comment réagir, est-ce qu'on devait parler de notre dernière "dispute" ou pas ? Je fus surprise de l'entendre me saluer et en même temps très heureuse, est-ce que cela signifié qu'il ne m'en voulait pas ? Je lui répondais, peut-être un peu trop enthousiasment avant de lui demander comment il allait. Je regardais hocher la tête avant de l'entendre me dire, "Et toi ?" Je souriais légèrement, "Et bien, ça va aussi !" Est-ce que j'avais le droit de lui dire que j'avais penser à lui ? Que j'avais eu envie à plusieurs reprise de lui envoyer un message sans jamais oser le faire ?

Après tout, j'étais la fautive dans cette histoire, c'était moi qui m'était emporté. C'était moi qui avait quitté la maison alors qu'il m'avait demandé de le faire et c'était à nouveau moi qui été revenu comme-ci de rien n'était. J'avais surement très bien fait de quitter définitivement sa maison pour ne plus lui faire subir ma présence et surtout mes tracas. Je l'aimais toujours, mais j'avais conscience qu'on se détruisait mutuellement et je commençais à penser qu'on ne pourrait jamais vivre une véritable histoire d'amour ensemble. Il était surement temps que j'accepte les faits et que je le laisse tranquille.

"Tu es venue rendre visite à quelqu'un ?" Je sortais de mes pensées rapidement pour me ramener dans le présent. "Oh, non ! J'avais une livraison de bouquet de fleurs à la maternité. Elle semblait d'ailleurs très heureuse de ce cadeau." Je souriais une nouvelle fois, ayant tout de même eu une petite pointe au coeur quand mes yeux s'était posé sur le nouveau né. Mais il était temps d'avancer aussi de ce côté là et que j'arrête de regarder derrière moi. "D'ailleurs en parlant de fleurs, comment va le jardin nocturne ? Elles offrent toujours leur parfum délicat ?" Depuis que j'étais partie, je n'avais pas pu repasser dans le jardin et j'étais curieuse de savoir si tout allait bien, c'était aussi surement un prétexte pour proposer à Isy de passer un peu à la maison. Du moins, si il était d'accord et qu'il en avait envie. "Hésite pas si tu as besoin que je passe pour m'en occuper." Je souriais une nouvelle fois espérant ne pas me faire rembarrer.

Je souriais doucement lorsque Love me répondit, avec entrain et sincérité, qu'elle se portait bien. Manifestement, elle avait dû poser le bon geste en décidant de quitter ma demeure, et ça me réjouissait comme me soulageait de la voir en forme. J'espérais simplement que je n'ai pas nuit dans de grandes mesures à la fleuriste, bien qu'en ressassant notre histoire, je ne pouvais songer qu'aux multiples torts dont j'étais à l'origine au sein de notre relation. Elle avait attenté à ses jours tandis que j'étais encore en lisse à Race of Australia, elle avait perdu l'enfant qu'elle portait pour moi sans que j'en connaisse l'existence suite à un viol - que je n'avais pas commis, dieu merci -, à quel niveau un être peut-il détruire un autre sans même le souhaiter ?

Je chassais mes sombres réflexions et questionnais la vingtenaire sur les motifs de sa présence ici, redoutant qu'un de ses proches soit hospitalisé. La Bryce me rassura derechef : "Oh, non ! J'avais une livraison de bouquet de fleurs à la maternité. Elle semblait d'ailleurs très heureuse de ce cadeau." Je lui offrais un nouveau sourire, rassuré et peu surpris. "Ca ne m'étonne pas. Tu as toujours fait de très jolis bouquets." Je n'étais pas expert en la matière mais l'allure seule des choix d'union de fleurs présentait, sans exception, un sublime ensemble. J'étais également satisfait de l'entendre parler de son travail, j'avais toujours considéré que c'était un bon signe de santé mental d'être actif professionnellement. "D'ailleurs en parlant de fleurs, comment va le jardin nocturne ? Elles offrent toujours leur parfum délicat ?" Mes yeux se voulurent discrètement fuyants, se posant sur le tableau de l'ascenseur au sein duquel les étages défilaient lentement. La vérité était que j'avais aucunement la main verte et donc les fleurs qu'avaient plantées Love s'étaient malheureusement retrouvées plutôt livrées à elles-mêmes. "Ca a l'air d'aller," je formulais de manière évasive, ne voulant pas non plus vexer la Bryce et restant respectueux de son travail. Seulement, clairement, il valait mieux que je me tienne loin des fleurs car me connaissant, je leur ferai plus de bien que de mal tant je n'y connaissais rien. Autant j'étais très capable de soigner les gens, autant en ce qui concernait les végétaux, j'étais plutôt de mauvaise augure. "Hésite pas si tu as besoin que je passe pour m'en occuper." Un nouveau rictus en coin apparut sur mon portrait et j'opinais. "C'est gentil."

Je m'adossais à la cage d'escalier, mes mains derrière mon dos. Les portes s'ouvrirent de nouveau et j'échangeais un regard vers la Bryce, curieux de déterminer s'il s'agissait du pallier qu'elle emprunterait. Lorsque Love s'orienta vers la sortie de l'ascenseur, je lui adressais sincèrement : "Ca m'a fait plaisir de te voir et de te reparler." Je lui souriais amicalement, puis la suivis du regard disparaître de mon champs de vision, les parois métalliques voilant petit à petit sa silhouette longiligne.