Décembre 2017 Tu es à Brisbane depuis hier, ta vie est complètement retournée depuis plus d’un mois. Votre tournée Mondiale a été coupée court. Tu devais être aux USA aujourd’hui au lieu d’être dans le salon d’un parfait inconnu avec Birdie. T’as été chez tes parents la veille. Ils n’étaient pas là. T’as pris ça comme un signe qu’il vaut mieux pas les voir. T’étais déjà carrément nerveux à cette idée. T’es toujours bien mieux quand tu ne les vois pas. Penny n’était pas non plus dans le coin à ce moment là. Ca par contre ça t’a fait chier. T’as pas osé lui envoyer un message tout de suite. Tu restes en ville pour deux semaines. Tu repars à Melbourne chez toi juste avant Noël. Tu as le temps de contacter Penny et de la voir d’ici là. T’as même pas essayé Dan car il est toujours très occupé avec sa carrière. C’était pareil pour toi jusqu’à récemment. Tu ne sais pas du tout ce que tu vas faire de ta personne à présent. T’as plus ton groupe. Vous n’avez pas fait d’annonces officielle encore, mais tu le sais que ça pue et que c’est fini pour vous. Empire Of The Sun n’est plus et c’est le comportement de Trevor qui est à blâmer. On t’a retiré ta vie à cause de ses conneries. Tu te sens désemparer. Tu n’aurais jamais cru que ça vous arriverez à vous aussi. Car vous êtes loin d’être les premiers à avoir droit à ce triste sort depuis que le mouvement MeToo a pris de l’ampleur.
T’as été faire des courses au supermarché avant de venir rejoindre Birdie. Il faut à tout prix que tu puisses noyer toute ta tristesse dans de l’alcool. Tu pourrais même choper quelques trucs via un ancien dealer que tu connais dans le quartier mais il fut un temps tu t’étais promis de ne plus toucher à rien de cet ordre là. Y’a plus rien qui fait sens depuis quelques semaines, tu ne sais pas si ça sert à quelque chose de garder ce genre de bonnes résolutions quand rien ne va. De la bières, deux bouteilles de whisky, t’as sûrement eu les yeux plus gros que le ventre mais t’as juste besoin d’être sûr que vous n’allez pas manquer. Au moins une chose que tu peux contrôler. Ta consommation de boisson.
Il a suffit que de quelques messages pour que Birdie t’envoie cette adresse. Tu savais que tu pouvais compter sur elle et tu ne sais par contre pas où est-ce que tu vas crécher pour les jours prochains. Ce n’est pas un problème à ce moment précis. Tu vas rester ici ce soir puisque tu comptes boire jusqu’à peut être en crever si possible. Installé sur le canapé, t’as la bouteille sur tes cuisses. Juste savoir qu’elle est là à disposition te fait déjà du bien. Tu soupires alors que tu vas en boire une gorgée avant de tourner la tête vers Birdie. Tu l’as briefé sur ta situation. La fin du groupe qui était toute ta vie. L’incertitude de ton avenir. Y’a pas besoin de plus d’information pour qu’elle comprenne que tu es au bout du rouleau.
« Parce que lui tout seul il a pas pu se retenir de baiser ces meufs, j’ai plus le droit de faire ce que j’aime le plus au monde ? Je… » Tu soupires. C’est au moins la vingtième fois que tu répètes ça avec plus ou moins de synonymes. « Et je suis sensé juste accepter qu’il a ruiné tout le groupe ? » Tu ne poses même pas véritablement ces questions à Birdie, t’as juste besoin d’extérioriser. « Dix ans de ma vie qui s’envolent. Bye. » Tu fais un salue en regardant devant toi. T’as tellement les nerfs. T’es si triste d’être complément impuissant face à tout ça. Tu te retiens de jeter la bouteille au travers de la pièce. « Tu le connais bien le mec ou on peut casser des trucs ? » Question tout à fait légitime à ton avis. Tu te trouves déjà super prévenant de ne pas juste casser des trucs sans préavis.
« Parce que lui tout seul il a pas pu se retenir de baiser ces meufs, j’ai plus le droit de faire ce que j’aime le plus au monde ? Je… » Il a amené de l’alcool. Il a amené sa belle tronche et de l’alcool. Rien que pour ça, tu as décrété que tu peux bien lui offrir tes oreilles, tes deux épaules et le meilleur canapé du monde pour qu’il déverse de tout son soûl dans un nombre infini de fois et avec tous les adjectifs et synonymes que le dictionnaire possède ses soucis actuels. On n’évoquera pas l’envie de l’étouffer d’un hug bien placé à chaque fois, ni celle d’être un bouclier pour lui face au monde entier parce que ça te rendrait vraiment trop niaise. Alors tu te contentes de hocher la tête pour le moment, amenant le goulot à tes lèvres, mais ton esprit étant déjà en train de rajouter Trevor sur ta Death Note - tu ne connais pas son nom de famille, tu t’en renseigneras, mais la manière sera par des pieux dans chaque parcelle jusqu’à ce que le reste fasse son œuvre. Oh t’es morbide, Birdie. Tu t’en fiches parce qu’il a fait du mal à Asher, que ce dernier est une carcasse de répétition depuis qu’il est revenu à Brisbane et que c’est amplement suffisant à tes yeux pour planifier sa mort prochaine - pourquoi ça n’aurait pas pu être Trevor à la place de Victoria ? Non, ne vas pas sur ce chemin-là. La gorge qui se serre, ce n’est pas bon signe ; si t’es pas niaise, tu n’es pas non plus une pleureuse. Même dans des circonstances aussi dramatiques. « Et je suis censé juste accepter qu’il a ruiné tout le groupe ? » Asher est une bulle de paroles, à croire que les rôles s’inversent et tu pourrais presque comprendre ce que les gens ressentent quand ils t’entendent sans t’écouter babiller sans cesse. De tout ce qu’Asher peut dire, tu répliques silencieusement “he’s a dead man walking” ; tu connais assez bien Buckley junior pour ne pas évoquer un seul sujet morbide avec lui.
Alors arrête de penser à Victoria. « Dix ans de ma vie qui s’envolent. Bye. » La musique est sa vie, ton groupe est son bébé et t’as mal pour lui de le voir aussi abattu. Parce qu’un foutu type n’a pas su garder sa queue dans son slip, encore une fois. Non, pas ce terrain-là non plus, ne ravive pas des flammes qui risquent de créer l’incendie. T’es là pour Asher, il n’est pas là pour toi - il l’a déjà été pendant deux ans, c’est déjà beaucoup trop. « Tu le connais bien le mec ou on peut casser des trucs ? » Tu souris légèrement. “Si j’avais su, on aurait squatter chez Dan.” T’es plus en contact avec lui depuis quelques mois. Tu souris mais ça te fait mal de le penser. De ne pas savoir si Dan est chez lui en ce moment. S’il est à Brisbane ou ailleurs pour un énième tour de piste victorieux. Tu hausse les épaules. "Évite juste la télé et sa chaine hifi, il risquerait de péter un câble.” Damien est plutôt chill, il est surtout souvent défoncé mais tu n’es pas vraiment regardante. Il doit se trouver dans un des squats de la ville et tu sais qu’il ne va pas revenir de si tôt. Il se dit artiste qui cherche l’inspiration mais t’es persuadée que c’est juste une excuse pour planer toujours plus et se taper le plus de cul possibles - décidément, on en revient toujours. “Il est où, Trevor ? Et le reste de la bande ?” Tu demandes, l’air de rien, détachée au possible en finissant les dernières gouttes de ta première bière. “Tu comptes faire quoi ? Tu vas pas laisser sa bite gâcher tout ton travail.” La nuisance ultime depuis la nuit des temps. “T’as de la ressource, mon coquelicot, je suis sûre que tu vas réussir à te retourner.” Tu vas poser la carcasse vide en verre de ta bière pour picorer les chips. Boire le ventre vide n’a jamais été une solution concluante.
“Si j’avais su, on aurait squatter chez Dan.” Tu sais que c’est tendu entre eux. Tu sais aussi qu’elle doit souvent avoir le cul entre deux chaises de vous côtoyer tous les deux depuis tout ce temps. C’était drôle quand vous étiez jeune, maintenant c’est plus compliqué mais tant que vous n’êtes pas tous dans la même pièce en même temps, y’a pas de problème. "Évite juste la télé et sa chaine hifi, il risquerait de péter un câble.” Tu apprécies de voir que y’a moyen de te défouler autrement qu’avec ton monologue que tu sais être saoulant à force de te répéter. Même toi tu en as marre de toi. Peut être bien que c’est toi que tu vas frapper.
“Il est où, Trevor ? Et le reste de la bande ?” « Melbourne. »
Tu soupires. Le seul truc bien avec Birdie dans cet situation là, c’est qu’elle sait très bien qui sont les gars de qui tu parles. Personne de ta famille n’a jamais prêté attention à ton groupe de loin ou de près. Et c’est tant mieux. T’as pas envie qu’ils se mettent à tirer des conclusions des paroles que tu chantes. “Tu comptes faire quoi ? Tu vas pas laisser sa bite gâcher tout ton travail.” Tu hausses une épaule.« J’en sais rien. » Vous venez d’être cancel. C’est pas à toi que reviens le pouvoir de continuer le groupe ou non. Ca sera une décision collective, avec les avocats, le label et tout le toutim. Ca te fatigue tellement d’avance. Vous faites juste l’autruche pour l’instant, au cas où ça se calme, mais étant de nature pessimiste de base, et ayant vu ce genre de situation pour d’autres groupes, tu sais que c’est mort. Plus rien ne sera comme avant. Même si vous virez Trevor du groupe. “T’as de la ressource, mon coquelicot, je suis sûre que tu vas réussir à te retourner.” Tu soupires longuement avant d’ouvrir la bouteille de whisky pour en boire une très longue gorgée avant de te laisser crasher contre Birdie. Bizarrement t’as besoin de contact. T’as besoin de hugs, mais t’es pas de ce genre là encore moins avec les quelques filles avec qui tu as eu des aventures ces dernières années. T’es le meilleur joueur de cache cache du monde quand t’es avec quelqu’un. Toujours à l’esquiver somehow. Mais t’es en train de réaliser qu’il va falloir que tu changes pas mal de choses dans ta vie car de toute façon tout change que tu le veuilles ou non.
Ton visage contre le bras de Birdie. Tu fermes les yeux forts et t’as juste envie de rester comme ça sans plus bouger, ni parler. Ca sert à rien qu’à brasser de l’air. Tout ce qu’elle dit aussi pour te rassurer c’est que du vent. C’est des efforts à faire. C’est du temps qu’il va falloir patienter en bossant dur. Tu veux que tout s’arrange en un claquement de doigts. Tu te rapproches un peu plus d’elle, les yeux toujours fermés, tu réalises pas que tu as à présent ton visage carrément dans sa poitrine. Ton esprit n’est pas vif du tout. Tu ressens juste du confort dans cette nouvelle position et tu restes comme ça. « Parle moi de toi. » Pour te changer les idées. Tu sais combien Birdie aime parler et ça risque d’être un flot de parole infini qui va venir à tes oreilles. Tant que tu peux rester calé contre elle sans rien faire, t’es prêt à tout entendre pour tenter de te changer les idées. J’en ai marre.
« Melbourne. » Le fief qui a été un refuge qui est maintenant synonyme d’emmerdes. Asher y avait migré pour respirer, pour avoir une nouvelle vie, bâtir sa propre existence loin de cette famille avec laquelle il a toujours eu du mal. Tu l’avais suivi parce que t’étouffais à cette période, t’étais à un point de non retour et la brèche qu’il a ouverte s’est transformée en une véritable porte de secours vers laquelle tu t’es précipitée. Melbourne se conjugue avec les nouveaux eux, ou au moins ce qui fut censé être un nouveau point de départ. L’autre con a absolument tout gâché, comme d’habitude, et tu savais que t’avais bien fait de lui avoir foutu ta main sur la tronche quand il a cru que t’es disponible. Tu ne l’étais pour personne, pas même pour toi.
« J’en sais rien. » Il n’en sait rien vraiment ou il ne veut pas savoir ? Est-ce que t’es vraiment la mieux placée pour le lui reprocher de ne pas creuser ? Non, Birdie, vraiment, alors que tu refoules toi-même absolument tout. T’as conscience de ce qu’il doit se passer dans la tête d’Asher. Il a toujours eu les pensées en feu, toujours perdu dans son monde, absent et surtout, furieusement peu bavard. Le petit con d’adolescent qui t’avait demandé si Dan et tu couchiez ensemble se trouve toujours moins bavard quand on commence à parler de sa gueule d’amour et de ce qui se trame derrière. Retenir les choses est un train de famille, Dan étant similaire. Seulement, leur façon de se défouler est différente. Les chansons d’Asher t’ont toujours aidé à savoir ce qu’il avait. Comme il respectait ton silence, tu lui offrais le sien - en tout cas, pour ça - mais t’as bien fait en sorte de montrer qu’il avait ton soutien le plus absolu, quoiqu’il arrive.
Asher est si différent de toi, si différent de Dan aussi. Moins extraverti, plus renfermé et t’as décrété que t’inquiéter pour lui est plus facile que de s’occuper de toi-même. Alors tu l’observes passer au whisky, non sans une légère grimace parce que sérieusement, kid, don’t be dead drunk on me. Il vient se caler contre toi, contre ton bras et il est déjà en train de fermer les yeux. Est-ce qu’il va se laisse dépérir maintenant ? Il glisse, ou il en fait exprès, les options sont ouvertes, qu’il atterrit contre ta poitrine et ça te brise ton petit coeur un peu plus de le sentir au bout du rouleau à ce stade. « Parle moi de toi. » Oh Asher. Il te refile la patate chaude, maintenant qu’il a l’air d’avoir fini toutes les lamentations possibles ou non. Tu passes ton bras autour de ses épaules tout en posant ton menton sur le haut de son crâne, ta respiration jouant avec vous. “Je reste fidèle à moi-même.” Autrement dit, tu te shootes autant que tu peux, tu vas faire vibrer tes pieds dès que t’étouffes et t’envoie chier les trois quart de l’humanité. Same old me. “Je parle plus à ton frère.” Pourquoi est-ce que ça sort comme ça sans ton consentement ? Ceci dit, mieux vaut ça que l'autre chose. Peut-être que ça te ferait du bien. Il va entendre ton cœur qui s'accélère - il peut croire que c'est à cause de Dan. Ce qui ne serait pas surprenant. Tu soupires tout en baissant ta tête et ton nez se retrouve englouti par les mèches du Buckley. “Le cerveau humain consomme l’équivalent d’une ampoule électrique. 20 watts d’énergie en permanence.” Tu souris légèrement. “Tes ampoules doivent être grillées, nan?” A force de trop ruminer en silence - the joke is on you, Cadburry.
Tu sens son bras autour de toi et sa chaleur te fait autant de bien que celle que tu ressens encore dans ton gosier. Tu comptes pas bouger de cette position. Elle est parfaite. Ca fait longtemps que tu ne t’es pas senti confortable. T’es bizarrement en train de te dire que tant qu’elle a son bras autour de toi, tout ira bien. C’est qu’une stupide pensée pour te faire du bien temporairement. “Je reste fidèle à moi-même.” Et sûrement tout ce qu’elle va te raconter en plus va t’aider à te changer les idées. Tu espères qu’elle va te donner des bonnes nouvelles pour que ta misère serve à quelque chose. Si c’est si noir pour toi ça doit être lumineux pour quelqu’un d’autre non ? Ca marche comme ça l’équilibre tout ça tout ça. Tu sais même pas de quoi tu parles, t’as juste tes idées qui vont dans tous les sens pour essayer justement d’en trouver un. “Je parle plus à ton frère.” T’es exaspéré d’entendre ça. C’est vraiment des gosses encore ces deux là. Mais tu bouges pas pour autant de position parce que tu es réellement bien. En plus si tu te concentre tu pourrais même entendre son coeur. T’as presque oublié que ça se trouvait là cet organe vu comme t’es rarement collé à quelqu’un de cette façon là.
“Le cerveau humain consomme l’équivalent d’une ampoule électrique. 20 watts d’énergie en permanence.” T’es en train de faire le lien avec tes pensées vis à vis de la lumière qu’il doit y avoir quelque part grâce à la noirceur de ta vie. De ce qu’il se trame dans ton cerveau CQFD. “Tes ampoules doivent être grillées, nan?” Si tu n’étais pas autant au fond du trou tu aurais ri. Mais là ton enveloppe corporel n’est pas bonne à monter quelconque émotion que la colère. « Hmmm… » Si tu parlais plus Asher tu lui aurais dit qu’elle a tout à fait raison en ce qui concerne tes ampoules, mais ton hmmm fera l’affaire. La bouteille toujours dans ta main, tu vas caler ton bras autour de Birdie pour être encore mieux installé si possible. « Qu’est ce qu’il a fait cette fois ? » Tu reviens sur la première information qu’elle t’a donné. Que ce soit Dan le responsable ou non, t’es du côté de Birdie car c’est elle qui est là pour toi quand y’a besoin. Genre là. Y’a besoin. Plus que besoin même. Et puis Dan est vraiment très buté tout le temps. C’est jamais celui qui cherche à résoudre les problèmes relationnelles. Tu te trouves compliqué mais quand tu penses à lui tu te dis que t’es pas si mal finalement niveau relations humaines. En tout cas la tienne avec Birdie a toujours été simple. Vous êtes là l’un pour l’autre de manière inconditionnelle.
« Hmmm… » Il a l’air d’un gosse qui vient chercher le réconfort là où il peut. T’as du mal à croire que vous êtes de la même année tellement que tu le vois bien plus jeune qui ne l’est vraiment. T’en as rien à faire, la date de naissance n’est qu’un détail. Tu prends pleinement le rôle de grande soeur s’il le faut, même si c’est à seize jours près, tu t’en fous. T’as toujours vu Asher comme quelqu’un à protéger, sur lequel il faut garder un oeil dessus parce que t’as l’impression qu’il peut défaillir de l’autre côté si on ne faisait pas attention. Les années ont montré que les Buckley ne sont pas très vigilants de ce côté-là, tu ne leur fais pas confiance pour veiller sur Asher. Il parait que l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Ton voyage à Melbourne a forcément aidé à renforcer vos liens, c’est là que devenir une sorte de guardian angel pour Asher a été une distraction parfaite pour oublier tes propres soucis. Tu l’as vu libérer à Melbourne et surtout, t’as entendu ses chansons. Tu sais que c’est lui qui les écrit. Même si vous ne posez pas les questions qui peuvent fâcher, t’as appris que l’avoir contre toi vous suffisait largement pour faire comprendre que vous êtes là l’un pour l’autre. Asher ne t’a jamais embêté avec des conversations contrariantes, chose que tu lui rends largement avec plaisir. Tu n’aime pas les conversations profondes, de toute façon. “Je vais prendre ça pour un oui. Faut songer à les changer, mon bichon des îles.” Mmh. Tu lui embrasses le crâne mais t’es certaine que ça ne va pas suffire pour modifier ce qu’il se passe dans son crâne. Rien n’a jamais suffi pour faire remonter Asher. T’as juste à être là pour montrer que tu le lâcheras pas. T’es capable de ça, au moins.
Il passe son bras autour de toi, se compressant un peu plus contre toi et t’empêchant tout accès vers la nourriture et l’alcool. Enfin, non, parce qu’Asher tient toujours une bouteille dans sa main et donc tu vas naturellement la lui prendre pour en prendre deux gorgées. « Qu’est ce qu’il a fait cette fois ? » Ta tête retombe en arrière en soupirant. Tu savais qu’il allait sauter sur le sujet. Dan et toi aviez décidé de commencer un jeu absurde l’an dernier. Un stupide, idiot jeu où ils devaient prétendre d’être ensembles pour que la mère Buckley fiche la paix à son enfant prodige. Mais Dan et toi, ça a toujours été compliqué et ce jeu s’est retourné contre eux. “Fidèle à lui-même.” Asher le connait mieux que toi, il a vécu avec pendant des années. “On a fait les cons et évidemment, ça s’est mal fini.” Tu t’es beaucoup disputée avec Dan au fil des ans. T’as sûrement été jalouse bien trop de fois qu’il aurait fallu parce que Dan a toujours eu une place bizarre. Il est de ceux qu’on adore détester autant qu’on déteste aimer. Mais là, la goutte d’eau a été de trop et t’as du mal à assumer tes torts qui sont forcément partagés. “C’est vraiment fini cette fois. On en est venu au point où s’adorer a fini par nous faire nous détester encore plus.” S’aimer serait sûrement le mot le plus juste mais hey, hors de question de le sortir. Et encore moins l’assumer. “Heureusement que tu lui ressembles pas. Au moins toi, je peux t’adorer autant que je veux, je sais qu’on finira pas par sortir les fourches.” Que tu dis avec légèreté, passant tes doigts libres dans ses cheveux. Son Buckley, le seul que tu autoriseras à rester dans ta vie parce qu’au moins, il ne te fait pas souffrir. Pas comme Dan en tout cas.
“Je vais prendre ça pour un oui. Faut songer à les changer, mon bichon des îles. ” Tu aimerais bien les changer tes ampoules grillés. Si tu avais le mode d’emploi tu le lirais. Pas sûr que tu le suivrais, mais juste pour voir ce qu’il est possible de faire. T’as toujours été dans l’ombre au fond de toi, là t’es carrément dans le noir complet. La lumière c’est un concept. T’aimes juste ne pas être au fond du trou. Tu aimes quand tu n’es ni heureux, ni triste. C’est le mieux que tu sais faire. Tu veux retourner à cette limite. Une ampoule non grillées, mais en plein jour à côté d’une grande fenêtre. Une ampoule dont on a pas besoin. Là t’as juste besoin de la tendresse de Birdie et elle te le donne bien. Elle prend ta bouteille que tu lui laisses sans aucune résistance alors de demander à propos de ton frère. “Fidèle à lui-même. ” Ce qui est triste c’est que ça suffit comme explication pour que tu comprennes la situation. “On a fait les cons et évidemment, ça s’est mal fini. ” Elle rajoute quelques détails que tu pouvais très bien deviner de toi même. “C’est vraiment fini cette fois. On en est venu au point où s’adorer a fini par nous faire nous détester encore plus. ” Tu ne la crois pas cependant. C’est jamais vraiment fini entre eux, mais tu n’es pas là pour la faire chier et la contrer. Tu l’écoutes simplement. “Heureusement que tu lui ressembles pas. Au moins toi, je peux t’adorer autant que je veux, je sais qu’on finira pas par sortir les fourches. ” Tes yeux qui se ferment quand elle glisse ses doigts dans tes cheveux. Ca fait du bien. Tu as eu peur deux secondes qu’elle termine sa phrase par « sortir ensemble » mais nope. Tout va bien. Parce que tu aurais bien sûr commencé à questionner pourquoi c’était si évident à ses yeux. Shhhh Asher, arrête de réfléchir pour rien. Tu as ton visage sur sa poitrine et ni toi ni elle ne se pose aucune question d’ambiguïté. C’est juste comme ça. Vous deux. C’est juste simple. « J’ai plus envie de vivre à Melbourne. » Tu sors ça de nulle part. Le fond du trou qui te fait dire ça. Cette ville est trop proche de tout ce que tu as vécu de beau, de magnifique avec ton ampoule éteinte près d’une fenêtre et que tu n’as plus à cause de ce qu’il s’est passé hors de ton contrôle. T’as besoin d’un break de tous ces reminders constant à tous les coins de rues. Et ici, tu as Birdie. Tu as Naomi. Tu as Penny. Ca te semble comme la chose la plus logique à faire de revenir ici. Va falloir que tu trouves un job Asher. Un appart’. Repartir complètement à zéro. Laisser la musique de côté un moment car ça fait trop mal.
Dan et toi, c’est fini, pour de bon et t’as bien pris soin de te l’intégrer en tête. Parce qu’un an, ça a été le meilleur et le pire à la fois. C’était les caresses et les disputes, les baisers et les crises, c’était juste invivable. Dan a trop fait le paon, toi t’as trop ressenti intensément, t’as joué autant que lui, et en plus, tu ne pouvais pas non plus le suivre partout où il était. Y avait la distance qui était pourtant une vertue, le manque de lui qui se creusait, le manque de confiance qui perlait. T’as pas aimé vivre tout ça, t’as pas aimé l’aimer et surtout, vous n’avez jamais su le faire correctement. Preuve que ce n’est clairement pas fait pour toi, ces conneries, et que tu préfères être toute seule et être accompagnée ponctuellement de personnes que t’auras choisi sans attache sentimentale. C’est bien mieux comme ça.
T’es déjà assez attachée amicalement et ça te demande pas mal d’énergie. Asher qui larve contre toi de la plus adorable des manières alors que tu joues avec ses cheveux. Tu penses inévitablement à Victoria, ce qui fait serrer ton cœur dans ta poitrine un peu plus alors que ça fait neuf mois mais le temps n’a pas encore fait son œuvre. Peut-être qu’il ne réussira jamais à faire son œuvre et que tous les souvenirs tendres et bons sont pour toujours tâcher de cette douleur que tu ressens et qui te fait encore pleurer quand t’es toute seule. Tu détestes Caleb, tu le hais de tout ton être pour te mettre dans une telle position. « J’ai plus envie de vivre à Melbourne. » Asher te rappelle à lui et t’as un doux sourire en l’entendant. “Reviens à Brisbane.” Tu ne peux pas dire “à la maison” parce que Melbourne est sûrement plus chez lui qu’ici. Mais tu sais ce qu’il peut ressentir. L’envie de retrouver ses marques, ses repères après une cinglante claque dans la figure. Tu embrasses le haut de son crâne. “Tu peux venir squatter ici en attendant. Histoire de te rendre la pareille.” Il t’a hébergé pendant deux ans, tu peux bien faire pareil pour le double s’il le veut. “Damien dira rien. Il sera tellement high qu’il te prendra pour moi, j’en suis sûre.” Il est con, Damien. Il ne se rend pas compte de son niveau de ridicule. Mais t’es pas là pour juger, tu l’as jamais fait (ou presque). “J’ai plus envie que tu vives à Melbourne non plus.” C’est compliqué de garder un oeil sur lui à cette distance. Plus proche, plus sûr.
“ Reviens à Brisbane.” Tous les mots que tu voulais qu’elle dise. C’est pour ça que Birdie c’est la meilleure. Rien que d’avoir dit ce souhait à voix haute tu te sens un peu mieux. Tu sais que c’est le bon mouvement à faire. Elle te le confirme. Elle embrasse le haut de ta tête. “Tu peux venir squatter ici en attendant. Histoire de te rendre la pareille.” En plus elle t’offre un toit sur un plateau. Un soucis de moins à gérer tout de suite. Car oui, faudra quand même que tu trouves quelque chose de plus permanent. “ Damien dira rien. Il sera tellement high qu’il te prendra pour moi, j’en suis sûre.” Tu sais pas qui c’est son pote mais t’as bien envie de le rencontrer. Tu vas certainement avoir besoin de te défoncer pour penser à autre chose. Non. Ça reste quand même très tentant. Tu n’as plus rien touché de trop dur depuis que t’as faillit y passer. “ J’ai plus envie que tu vives à Melbourne non plus.” Encore des mots parfait qui font du bien à entendre.
« Ouais… Je vais revenir… Définitivement. » Parce que tu n’aimes pas faire les choses à moitié. Aussi t’es pas non plus riche alors payer deux loyers non merci. Tu te plaît à ne jamais demander de l’argent à tes parents. Tu en as assez abusé dans ta jeunesse. Maintenant tu as - avais - un groupe qui réussi. Tes caisses sont bien remplies. Rien de trop mais assez pour faire quelque chose de plus que correct. Une vie confortable. Ton avenir est à présent incertain et ça te brise le coeur. T’es déjà en train de penser à qu’est ce que tu vas faire comme boulot. Un 180 degrés avec quelque chose de nouveau ou tu restes dans les travers de l’alcool et la musique ? Nouveau. Tu veux pas penser à la musique. Pas déjà. « Je suis content de te voir. » Les mots sont qu’une image parce que tu ne la regardes pas du tout. Ton visage toujours bien sur sa poitrine. Sa présence te fait du bien. Ses mots. Tout. T’as bien fait de venir si rapidement dans le coin. Elle calme pas mal de tes questionnements avec ces réponses, ces possibilités. « Tu bosses demain ? » Ton bras qui se serre un peu plus autour d’elle. Tu soupires doucement. Peut être bien que tu vas t’endormir bientôt à ce rythme là.
« Ouais… Je vais revenir… Définitivement. » Bon, au moins, le scandale provoqué là-bas aura eu le mérite de le faire revenir ici. C’est bien, c’est positif et tu ne vois pas l’ombre d’une contrariété quelconque dans l’histoire. Pour un peu que tu serais prête à remercier Trevor - oui mais non parce que ça reste un enfoiré qui a foutu tous les efforts d’Asher dans la plus grande déchetterie du monde. Mais quand même, ça reste la meilleure nouvelle de l’année ; t’as perdu une amie mais t’en retrouves un autre. Le karma n’est pas si mal foutu que ça - c’est une étrange et dérangeante façon de penser, Birdie, t’en as conscience ? Tu ne remplaceras pas Victoria avec Asher. Victoria ne reviendra pas. Victoria a disparu, avec ses oreilles, ses yeux clairs et son sourire pétillant. Même avec toute l’affection que tu portes pour Asher, ils ne sont pas interchangeables. Victoria ne le sera jamais - stop. Arrête de penser à elle. Sois juste contente qu’Asher revient. Tu peux faire ça ? De toute façon, il ne te voit pas et heureusement parce qu’il aurait pu voir le voile de tristesse qui a envahi tes yeux. Que tu bats dans un rythme intense pour ôter l’humidité qui manquerait de venir troubler ta vue. Not now.
« Je suis content de te voir. » Voilà, lui aussi est content de te voir, donc sois heureuse. Ravales tes larmes et laisse la satisfaction d’avoir Buckley junior qui revient au bercail t’envahir. Alors ton bras autour de lui se serre un peu plus, le visage qui va sur son crâne, comme pour te retenir de craquer. “Je suis ravie aussi, Asher.” que tu murmures doucement. Tu le penses, vraiment. “Dis moi que tu vas venir squatter ici.” S’il te plait. Tu te rends compte que tu serais vraiment pas contre sa présence quotidienne. Que ce soit pour critiquer des conneries télévisuelles ou pour être une présence rassurante la nuit. Mais ça, il n’est pas obligé de le savoir. Tu ne vas pas lui mettre la pression. Il est libre de faire ce qu’il veut, après tout. « Tu bosses demain ? » Tu hoches la tête. En ce moment, t’écris pour un journal que personne ne lit. Tu as tes propres horaires mais n’empêche que pouvoir écrire, même des trucs comme l’horoscope le plus sordide du monde, t’apprécie. Alors, “yup, on m’attend à neuf heures demain. Mais j’ai l’autorisation d’arriver à dix heures.” Après tout, ta responsable a bien compris que toi et les horaires, vous n’étiez pas très amis. Tant que le travail est fait, tu ne vois pas trop où est le souci.
“Je suis ravie aussi, Asher.” T’as l’impression qu’elle est fatigué elle aussi vu son ton. Tu veux pas croire qu’elle est ému par ton retour, mais la vérité c’est que t’as pas l’esprit clair, donc tu es sûrement en train de t’imaginer tout ça. “Dis moi que tu vas venir squatter ici.” Tu hoches la tête. Savoir qu’elle sera là, que tu ne seras pas seul, ça te rassure et c’est exactement ce dont tu as besoin même si tu ne le savais pas avant maintenant. « Oui… Je compte pas aller chez mes parents. » La bonne blague. Elle sait aussi bien que toi que si tu étais parti à Melbourne c’était pour les fuir. Tu étais jeune mais une partie de toi s’est toujours dit que tu aurais dû partir encore plus tôt. Tu peux pas refaire le passé mais il est certain que tu ne passerais plus une seule nuit dans le palace de ta famille. Un repas c’est déjà un supplice alors plus que ça… Nope. Tu as toujours fantasmé avoir fait parti de la famille de Birdie. Tellement l’opposé de la tienne. Vous êtes tous blonds, ça passerait facile en plus. Tu te retiens bien d’émettre ce souhait à voix haute car elle saurait faire en sorte que tu deviennes réellement un des leurs. Tu n’as pas forcément envie de mettre tout ton mal être vis à vis de ta famille aussi violemment dans la tête de tes parents. Ca fait envie quand même quand t’y penses.
“yup, on m’attend à neuf heures demain. Mais j’ai l’autorisation d’arriver à dix heures.” Hmmm. Ca te fait un peu chier qu’elle bosse parce que t’es du genre possessif et t’as besoin d’elle là mais tu ne vas pas l’empêcher de vivre pour tes beaux yeux et tes problèmes. Elle en a sûrement tout un tas dont tu ignores tout car tu ne poses jamais de questions. Tu te contentes d’être là pour elle, sans réellement savoir si tu es d’une utilité ou non. Elle va avoir le loisir te profiter de ta présence, et vice versa lors de ton retour prochain en ville.« Je te suis quand tu vas te coucher… » T’as aucune idée de l’heure qu’il est en fait. Certainement que si tu te laisses aller tu vas t’endormir bientôt. Tu soupires doucement. T’aurais envie de lui dire de prendre un jour off mais ce serait un peu trop demandé à ton avis. Tu veux te faire petit tant que t’es dans ses pattes, même si tu penses pas qu’elle te considère comme une gêne. Merci B. C’est quand même assez drôle comme dans ta tête tu penses que tu vas dormir dans le même lit qu’elle. Genre tu te poses même pas la question si elle se tape le Damien - certainement - et si c’est pas plutôt le canapé que tu vas investir. Vous avez passé deux années à dormir dans le même lit, ton lit. C’est juste tellement naturel pour vous de dormir ensemble. Tu n’as pas l’impression que les choses vont être différentes cette fois. Une chose qui est bonne, c’est que tu as oublié de boire, bien que tu n’étais pas à plaindre à ce niveau là. Tu t’en es mis une sacré couche en pleine face et tu n’étais déjà pas sobre quand tu es arrivé. C’est une bonne chose que sa présence te fasse te calmer à ce niveau là. Ta consommation est bien trop importante Asher.
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