(Avril 2021) Retour à la réalité. Retour au travail. Dani revenait d’un séjour des plus surprenants à l’ile de Jeju. Une île coréenne qu’elle avait toujours eu comme projet de visiter en compagnie d’Eddie. Ironie du sort ou manigance de la part de Callie et Sun-Hi (la maman d’Eddie), les deux avaient réussi à organiser un week end surprise et découvertes aux deux meilleurs amis qui se boudaient récemment. Les deux femmes n’attendaient qu’une chose : savoir si leur plan avait marché et si les deux meilleurs amis d’enfance s’étaient réconciliés ou non ?

Mais cela n’était pas la préoccupation principale de Dani en ce moment. Elle avait d’autres chats à fouetter. Suite aux vendanges et aux saisonniers qui avaient quitté ses équipes, l’œnologue s’était lancée dans un nouveau recrutement d’un membre permanent de son domaine. Dans ses recherches, la coréenne ne cherchait pas quelqu’un de forcément qualifié, elle cherchait surtout quelqu’un d’investi et volontaire. Elle cherchait un peu cette « personne à tout faire ». Une personne qui serait là pour prêter main forte dans l’entretien des vignes. Une personne qui s’occuperait du maintien de l’inventaire et de l’organisation de l’entrepôt. Et qui sait, si cette personne était exceptionnelle, Dani envisageait sérieusement ces derniers temps de commencer à travailler sur les aspects oenotouristiques de son vignoble. Dani faisait déjà quelques visites ponctuelles, mais ces dernières se faisaient de plus en plus fréquentes. Elle avait besoin de quelqu’un pour la seconder. Fille ou garçon, amateur ou professionnel, elle s’en fichait, du moment que la personne était assez passionnée et convaincante dans son discours pour vendre le vin, cela lui irait. Pour être honnête, l’œnologue était restée assez ouverte dans ses critères de recrutement, mais d’un point de vue commercial, elle savait qu’elle allait recruter sur le physique. C’était horrible et dévalorisant, mais c’était la cruelle réalité du marché. Elle n’allait pas recruter un thon pour faire une possible promotion de son vin. Il fallait qu’il ait un minimum de tenu, de charisme et le bonus serait qu’il ait une éloquence parfaite. En notant tous ces petits critères, elle ne put s’empêcher de penser à Channing. Lui, bien évidement il remplissait tous les critères haut la main. Elle ne serait pas étonnée qu’ils collaborent dans le futur, mais pour l’instant les deux complices entretenaient un autre type de collaboration.

La patronne était assise derrière son bureau. Elle soupira jetant à la poubelle le CV de la dernière personne qu’elle venait de voir. Encore une déception et l’œnologue était en train de sérieusement revoir ses critères de sélection. Avait-elle mis des espoirs trop hauts ? Avait-elle été trop ouverte dans ses exigences ? Dani était agacée, perdue. Le recrutement, les ressources humaines, étaient un nouveau terrain pour elle. C’était la première fois qu’elle se lançait dans cette nouvelle mission. Le management elle maitrisait, mais le recrutement était une autre part de manches pour la coréenne. Dani s’accorda une pause et prit son smartphone, tapotant du bout des doigts un message à destination de @Channing Walker « Je crois que je vais avoir besoin de tes précieux conseils en matière de recrutement. Pourras-tu m’aider la prochaine fois que l’on se verra ? Je t’embrasse. Dani. » Elle appuya sur envoyé un petit sourire aux lèvres avant de se reconnecter à la réalité.

Mollement, elle se leva de sa chaise et alla ouvrir la porte de son bureau. Elle regarde à peine la dernière personne qui attendait. Elle nota juste qu’il s’agissait d’un homme. « Au suivant. Veuillez rentrer et prendre place. N’oubliez pas de fermer la porte derrière vous. Merci. » pas un regard, pas un mot, Dani resta de marbre face au dernier candidat. Elle retourna s’assoir à son bureau, empoignant l’ultime CV. « Alors.. Monsieur Mayers c’est ça ? » les yeux concentrés sur ledit CV, elle nota qu’il n’y avait pas de photo. Grave erreur. « Vous savez, ne pas mettre une photo sur votre CV est une erreur de communication. » continua-t-elle à critiquer sans raison. Elle essaya de rester un brin professionnel face à l’agacement de cette matinée remplie de déceptions. « Enfin bref. Soyez convaincant, pourquoi avez-vous postulé à cet emploi ? » Enfin, la coréenne leva ses prunelles et se pétrifia sur place face à sa découverte. « Maxence ? » son cœur fit un bond dans sa poitrine et elle manqua de s’étouffer. Que faisait-il ici ? C’était donc lui monsieur Mayers ? Génial.

(Avril 2021) L’incompréhension dans sa tête. La stupéfaction dans ses yeux. Le silence dans sa voix face au « Bonjour » de Maxence. Il était, là devant elle. Il était assis devant son bureau. Il était sur son territoire, sur son vignoble. Il avait mis un pied dans son monde, l’œnologique. La directrice des lieux cligna des yeux à plusieurs reprises comme pour s’assurer qu’elle n’était pas victime d’un coup monté. Tout devint plus limpide dans son esprit, elle comprenait soudainement la stratégie volontaire de Maxence de retirer le visuel de son cv. Dans le cas inverse, l’œnologue n’aurait pas pris une fraction de seconde de plus pour prendre le temps de lire son parcours professionnel. Elle aurait jeté son cv dans la poubelle comme tous les autres et prenant le soin de la mettre dans la case « coup d’un soir » et certainement pas « futur employé ». Pourtant, le brun était bien déterminé à se vendre dans cette situation des plus atypiques. Encore prise sous le choc de cette surprise, cela permet au Mayers (le fameux) de parler, expliquer plus en détail les motivations de sa venue. D’ailleurs dans sa tête, elle ne put s’empêcher de se questionner sur la chose suivante : le nom de famille d’Adriel était bien Mayers ? Elle ne rêvait pas non plus ? Enfin, quelle était la probabilité qu’il soit de la même famille. Il y avait plein de Mayers en Australie comme il avait une multitude de Hwang en Corée. L’œnologue chassa cette drôle de réflexion de sa tête, ce n’était pas le moment de parler vie privée.

Dani reposa le CV de Maxence, ajusta ses lunettes sur son nez et reprit son sérieux. Soyons professionnels. Dani était au boulot, elle avait cette mission de recruter des nouveaux talents pour embellir et consolider son équipe. Il était hors de question pour elle de perdre son sang-froid et de se disputer comme ils l’avaient fait lors de leur précédente rencontre. La seule et l’unique jusqu’à aujourd’hui. Si Maxence jouait le jeu, ils allaient réussir à s’entendre tout en restant cordiaux entre eux. Cela serait un premier test -inconscient- pour savoir s’ils étaient capables de collaborer entre eux professionnel parlant et non sous les draps. Cela Dani, connaissait parfaitement la réponse.

Il était prêt à répondre à toutes ses questions. Elle était prête à reprendre son rôle de recruteuse en apprenant à mieux le connaître, lui et son travail, lui et ses motivations, lui et ses projets professionnels. « Très bien Maxence. » qu’elle commença d’une voix plus calme et posée cette fois-ci. Elle avait dû racler sa gorge en prononçant ses mots afin de rendre cette dernière plus agréable. Son agacement ne l’avait pas rendu franchement sympathique quelques minutes plus tôt. « Ici, dans mon bureau et surtout durant cet entretien, le vouvoiement est de rigueur. » elle n’était pas une connaissance avec qui il buvait un verre au bar, mais elle était potentiellement sa future patronne. « Le tutoiement sera éventuellement autorisé si de un : l’entretien est réussi ; et de deux : s’il y a eu des preuves sur le travail fourni. » Sa voix était calme, posée et surtout claire et limpide. Elle lui déposait une à une les nouvelles règles de leur jeu. L’œnologue montrait également qu’elle ne faisait pas confiance à n’importe qui (que ça soit dans son travail ou sa vie personnelle), il fallait l’acquérir avec le temps et le travail. Alors elle commença à exposer les grandes lignes de son employé idéal « Le poste que je propose est un emploi en tant que commercial junior. Je cherche quelqu’un pour m’assister sur les aspects de déploiements commerciaux du vignoble. » elle marqua une pause avant de reprendre son speech « Le vignoble possède déjà une certaine notoriété sur le marché australien de part son ancienneté. Les nouvelles ambitions sont de forger des partenariats internationaux. » Dani quitta les yeux de Maxence un bref instant, sortant une bouteille de vin de l’un des tiroirs du bureau. « C’est un Shiraz 2017, une édition limitée de ce vin que le domaine produit depuis 20 ans avec ce cépage. Je suis une restauratrice française d’un bistro parisien. » Elle planta la situation, poussant la bouteille vers Maxence. « Vous avez trois minutes pour me convaincre de l’acheter pour mon restaurant. » Dans cet exercice il ne fallait pas forcément avoir des connaissances poussées et approfondies en œnologie. Il fallait avant tout s’adapter à son interlocuteur qui était un étranger et surtout un passionné de la cuisine qui cherchait les meilleurs accords mets et vins à faire découvrir à sa clientèle.

(Avril 2021) Dani avait vêtu son costume de recruteuse. Elle avait mis de côté, l’espace de quelques minutes -pas trop non plus- ses différends avec le Mayers. Il s’appelait donc comme ça monsieur maladroit. Il avait un nom, en plus d’être un adorable emmerdeur. Cependant, l’œnologue fit abstraction de leur précédente rencontre, du fait qu’ils avaient partagé les mêmes draps le temps d’une nuit et se concentrer sur Maxence. Juste Maxence, les raisons de sa venue, ses potentielles compétences et surtout s’il était autre chose que juste « maladroit ». Ce trait de caractère, elle pouvait le caser dans la colonne des défauts, cependant la coréenne resta impartiale à la recherche de quelconques qualités. Ne sait-on jamais, elle pouvait être surprise ?

La patronne avait exposé plus en détails son poste qu’elle avait laissé vague lors de la mise en ligne de l’annonce. Ce choix avait été stratégique de sa part, car elle ne voulait pas d’un technicien de son milieu, une tête scientifique qui était bien trop pensante et absolument pas synthétique lorsqu’il fallait présenter un produit. Dani cherchait quelqu’un qui n’était pas forcément issu de cette voix. Elle cherchait une personnalité et non un parcours avec une tonne d’expériences les plus impressionnantes les unes que les autres. Ce point-là avait cruellement manqué aux précédents entretiens, ce qui avait rendu de plus en plus défaitiste et de mauvais poil la dirigeante des lieux. Était-il trop demandé d’avoir une personne qui savait parler avec un minimum de conviction dans ses propos et qui était capable de vous vendre un produit sans nécessairement les avoir tout déguster ? Car oui, si on se lançait dans cette expérience, l’œnologue savait qu’il était difficile d’avoir les idées claires malgré une très haute tolérance à l’alcool.

Observatrice, Dani regarda Maxence s’emparer d’une main hésitante de la bouteille. A ses yeux, elle remarqua qu’il était un peu perdu face à la bouteille. Aucun son ne sortit d’entre les lèvres de la patronne qui était habituellement d’humeur plus tranchante lorsqu’il s’agissait d’enfoncer le Mayers. Cependant, elle lui laissa une chance, dans le bénéfice du doute. Pour voir si : de un, il avait quelque chose dans le ventre et surtout dans le tête et de deux, elle ne voulait pas avoir de regret dans son recrutement. Finalement, le jeune homme se lança et elle griffonna quelques notes à son speech. Etrangement, il eut le bon reflexe de présenter le produit, ses cépages, ses accords mets et vins, ses points forts, et proposer même une dégustation pour rebondir avec son interlocuteur. Il avait un minimum de connaissances en restauration et en techniques de vente. C’était un point positif pour l’œnologue. Pour un premier test, il s’en sortait plutôt bien et cela démontrait son tempérant. Il était motivé et déterminé, prêt à s’adapter à n’importe quelle situation, et ce qu’un commercial devait savoir-faire, même s’il n’avait pas toutes les cartes en même face à un client. « Ecoute, c’est pas trop mal. » qu’elle finit par lâcher d’une voix neutre, rompant les minutes de suspens. Elle rebondit à son tour « Parlons-en de la dégustation. En travaillant dans ce milieu, il faut connaître un minimum de notions. Je ne demande pas d’être un expert en œnologie, je demande juste à être investi dans votre travail. Pouvez-vous me citer les trois étapes d’une dégustation correctement effectuée ? » elle le regarda attendant une réponse de sa part avant d’ajouter avec un petit sourire en coin. « Point important. Interdiction de reverser un verre sur le client. » Une allusion qui ne se voulait pas méchante de sa part. Elle voulait juste le mettre en garde sur d’éventuels faux pas qui pourraient être rédhibitoire dans la réussite d’une vente.

(Avril 2021) D’une main de maître l’œnologue prenait au sérieux son rôle de recruteuse. Elle voulait trouver la perle rare qui permettrait de dynamiser encore plus les ventes de vin du domaine. Elle avait déjà une bonne équipe mais elle voulait l’embellir avec des nouveaux talents, alors elle avait laissé la porte ouverte à tous types de candidatures et de parcours. En laissant cette porte un peu trop entrouverte, la voilà nez à nez avec Maxence. Ils n’ont plus le rôle de deux parfaits idiots à se chamailler pour des futilités et terminant sous les mêmes draps. Loin de là. Aujourd’hui, ils essayaient un rôle plus professionnel. Cette fois-ci c’est la coréenne qui mène la danse et surtout l’entretient. Elle avait déjà sa liste de questions bien préparées dans un coin de sa tête. Frénétiquement, elle prenait des notes des réponses masculines. Il passa sans trop d’encombre le premier test, celui de le vendre une bouteille, le mettant dans les conditions. Par la suite, elle rebondit sur ses mots lui demandant s’il connaissait les étapes de la dégustation. Un incontournable à maitriser en œnologie. Et ce fut plus fort qu’elle, elle ne put s’empêcher de glisser une petite allusion à leur précédente altercation. Mais elle se l’autorisa, il était permis de déstabiliser gentiment le candidat lors d’un entretien. Calmement, il répondit à sa petite attaque et elle répliqua au tac au tac « Très bien, vous me passerez les contacts de vos précédents employeurs à la fin de notre entrevue. » puis elle continua à le regarder attendant la suite de ses réponses. Elle l’écouta, restant neutre et attendant la fin de ses propres. A la fin il eut le mérite de rester honnête, un point important dans la maladresse de ses propos. « Vous avez le mérite d’être transparent. J’apprécie cette qualité. » elle nota une petite inscription sur son cv avant de relever ses iris « Enfin, ce trait de personnalité je l’avais déjà cerné et vous semblez en faire bon usage selon les situations. » et elle finit par doucement sourire à la fin de ses mots. Qui aurait cru que Maxence ferait sourire Dani ? D’autant plus après une matinée peu concluante concernant le casting de son futur commercial junior. L’adaptabilité était un trait de caractère que Dani recherchait chez son futur employé. « La dégustation et son langage s’apprennent. Vous avez commis une inversion entre les perceptions visuelle et olfactive, ainsi que quelques erreurs de vocabulaire concernant cette pratique. » une fausse note mais pas irréparable. Finalement, cet entretien n’était pas si catastrophique qu’elle ne l’avait imaginé et pas pire que les précédents. Alors Dani décida de le continuer et posa la question suivante à Maxence « Pour le métier de commercial, il est indispensable de savoir parler des langues étrangères. Parlez-vous une autre langue que l’anglais ? » qu’elle demanda car cette partie là du cv était restée vide donc la patronne voulait se renseigner sur ce point.

(Avril 2021) L’entretien suivait son cours, une à une l’œnologue posa ses questions. À sa grande surprise, ils arrivèrent à rester professionnels et ne pas hausser le ton de leurs voix d’un décibel. On assistait là à un vrai échange, les phrases cinglantes étaient presque inexistantes et laissaient place à des paroles calmes et réfléchies. En effet, Dani voyait bien que Maxence ne baissait pas les bras, il se démenait pour donner le meilleur de lui-même, malgré ce post qui n’était pas initialement taillé pour lui. Cependant, il avait le mérite de se démarquer des précédents candidats avec sa franchise et sa détermination d’apprendre. D’ailleurs, la patronne devait éclaircir quelques points, notamment celui des langues étrangères, indispensables au métier de commercial. Elle écouta alors sa réponse et le verdict tomba : Maxence ne maitrisait que l’anglais. Dani restait de marbre, ne laissant paraître aucune émotion face à cette petite déception. C’était un point faible et déterminant dans son choix du parfait candidat. Pourtant le brun manifestait son envie d’apprendre une nouvelle langue et lui demanda si le français était option intéressante. Elle reposa le stylo qu’elle tenait entre les doigts et releva son regard vers le jeune homme. « Au risque de vous surprendre, avec l’état actuel du marché des vins et spiritueux et les potentiels clients que nous visons... le chinois serait à envisager. » aux derniers mots féminins le visage du Mayer se décomposa, elle pouvait comprendre sa surprise, mais à son tour, elle souhaitait rester transparente dans ce qu’elle recherchait chez son futur employé. Avec la situation géographique de l’Australi, les consommateurs directs des vins du O’Reilly Vineyards étaient clairement tous les pays asiatiques côtiers : Chine, Japon et Corée. Elle était consciente que cette nouvelle aurait l’effet d’une bombe et elle risquait d’effrayer son candidat. Alors elle donna plus d’informations à Maxence sur ses exigences « Je ne demande pas d’être bilingue, juste de connaître les clés d’une conversation professionnelle et les bons comportements adoptés devant le client, après il est toujours possible de switcher sur l’anglais dans un rendez-vous. » elle marqua une pause avant d’ajouter « Après je suis consciente que l’apprentissage de cette langue est complexe et il y a la possibilité d’apprendre une langue latine comme le français, l’espagnol ou l’italien, qui sont les trois pays leader dans ce secteur. Ils seront donc nos concurrents en tant que principaux producteurs et exportateurs de vin. » Comme on lui avait appris, il fallait sympathiser avec son ennemi pour mieux le connaître. Justement en parlant de connaître autrui, une question était restée sans réponse dans la tête de l’œnologue. Elle s’éclaircit la gorge avant de demander « Maxence j’aurais une question. » elle prit un ton moins formel mais tout aussi sérieux. Elle ne quitta pas le regard masculin, elle voulait guetter la moindre de ses réactions. Elle voulait qu’il soit sincère avec elle, sinon comment pourraient-ils construire une relation de confiance s’ils étaient amenés à collaborer dans le futur ensemble ? « Quel est votre rapport avec l’alcool ? » La dernière fois, elle n’avait pas cherché le pourquoi et de comment. Cependant elle avait bien remarqué que le jeune homme avait exclusivement tourné aux softs et elle voulait savoir les raisons, cela était primordial pour son futur recrutement.

(Avril 2021) Délier les langues pour connaître la vérité. C’était l’objectif de la recruteuse à ce moment-là. Maxence et Dani étaient loin d’être dans une ambiance dansante et enivrante de leur précédente soirée mais plutôt dans le cadre très silencieux et professionnel de la patronne des lieux. Chacun à leur façon, ils découvraient un nouveau visage de l’autre. Dani n’était plus l’horrible sorcière. Maxence n’était plus ce mec « juste » maladroit. L’œnologue était même agréablement surprise de découvrir une personne soucieuse d’apprendre et déterminée à trouver un nouveau job. Peut-être que la miss était-elle tombée sur la perle rare ? Mais pour cela elle voulait s’assurer de quelques petits détails supplémentaires. Pourquoi Maxence n’avait pas bu une goutte d’alcool à leur précédente rencontre ? Le voile fut rapidement levé, sans chichi, sans tourner autour du pot, ou sans faire renverser un verre au passage. Oups. Maxence raconta son histoire, une partie de son passé assez personnel. Il était un ancien alcoolique. A ses mots, Dani eut un pincement au cœur, se demandant quelles avaient été les raisons qui l’avait encouragé à sombrer dans tout cela. Mais elle s’abstint, elle était œnologue pas psychologue, alors elle continua à l’écouter silencieuse toujours un regard posé sur lui. Quatre ans qu’il n’avait plus touché une goutte de ce liquide qui pouvait être un poison pour certain. Elle en avait conscience pour baigner dans cet univers depuis toujours, se demandant comment elle-même, elle n’avait pas encore fini chez les alcooliques anonymes. Un miracle. Les deux gros points positifs malgré ce sombre épisode de son passé était qu’il avait pu tester sa résistance en travaillant dans les bars mais également il ne serait pas un voleur de bouteilles. Doucement il arracha même un rire à l’œnologue. « Je vois Maxence. Merci pour votre transparence une nouvelle fois. » elle pouvait concevoir que certaines choses pouvaient être compliquées à raconter. L’œnologue était la première concernée pour être une huitre professionnelle lorsqu’il s’agissait de parler d’elle un peu plus sérieusement. « Ce que je veux avant tout, c’est que mes employés, anciens comme nouveaux, soient dans un cadre de travail agréable pour eux. Je me devais de vous poser cette question. Si vous aviez été allergique à l’alcool, cela aurait été embêtant. Est-ce que vous vous sentirez prêt de travailler dans ce nouveau secteur ? Il est un peu différent de celui de la restauration, mais il comporte des similitudes.  » qu’elle lança à son tour afin de détendre l’atmosphère. Cependant si Maxence était pris, il n’aurait pas la mission de faire des dégustations, mais de vendre le vin. Un bon commerçant était capable de vendre tout et n’importe quoi en un simple sourire. « Bon très bien Maxence, j’aurais une dernière question. » qu’elle finit par dire car elle avait entendu l’essentiel de ce qu’elle voulait savoir. « Pourquoi je devrais vous choisir et pas un autre ? » C’était la question piège mais pourtant déterminante pour clôturer un entretien en beauté ou pas.

(Avril 2021) L’inattendu, voilà que Maxence et Dani avait vécu au cours de la dernière heure. Cet entretien fut la première conversation sans reproche entre les deux personnes. Personne n’aurait misé sur eux à leur première rencontre, eux les premiers. Pourtant les voilà en train de se découvrir des facettes inavouées. La recruteuse était plutôt agréablement surprise des échanges qu’elle avait eu avec Maxence, même si ce dernier n’était pas satisfait de sa prestation. Certes, il avait quelques -grosses- lacunes, notamment le fait qu’il ne parlait qu’une seule langue, qui plus est sa langue natale. C’était un pari risqué. Quant à son manque d’expérience dans le secteur des vins et spiritueux, cela n’était pas une faiblesse pour l’œnologue. Au contraire, elle était convaincue qu’elle pouvait transformer cette faiblesse en force, si les deux décidaient de s’allier et s’écouter. Tout le monde avait commencé en bas, Dani la première. Elle avait su être motivée, déterminée, soucieuse d’apprendre et de grandir. Le chemin n’avait pas été facile tous les jours, mais pas impossible. Et là voilà aujourd’hui, en train de se demander si oui ou non elle allait laisser une chance au Mayers.

La recruteuse lui posa l’ultime question de son entretien, qui allait potentiellement sceller une partie de son avenir. Dani posera ses affaires qu’elle tenait entre les mains et se calla confortement dans son fauteuil pour écouter la réponse masculine. Son esprit retint les mots suivants : « motivé », « besoin d’un travail » « déterminé » et enfin « donner une chance ». Ce dernier mot raisonna dans l’esprit de la coréenne. Là était tout le dilemme. Dani allait-elle oui ou non faire le pari risqué de miser sur l’australien ? Dani sourit doucement derrière ses lunettes avant de lui répondre posément « Très bien Maxence. J’ai entendu ce que je voulais savoir. » et cerner au mieux la personnalité du Mayers en dehors d’un bar. Elle se leva et l’invita à faire de même « Je vous remercie d’être venu. » et d’avoir postulé à l’aveugle à cette offre d’emploi des plus surprenantes. « Je vous contacterai sous deux semaines afin de vous donner la réponse définitive. » Un sourire poli se dessina sur ses traits et elle lui tendit une poignée de main. Leurs mains se scellèrent comme dans un accord silencieux et elle perçut bien dans les billes masculines sa surprise mêlée à l’incompréhension. Dani l’était aussi mais pour d’autres raisons. « Au revoir Maxence. » qu’elle lui dit finalement avant de refermer la porte de son bureau suite à son départ. Était-ce un au revoir ou un adieu ? Seul l’avenir nous le dira.

To be continued…