I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Cela faisait deux semaines que Joanne avait été informée que ses parents viendraient passer quelques jours à Brisbane, tout droit venus de Perth. Elle avait prévenu son compagnon, bien évidemment, quelques jours avant que Jamie n'apprenne la venue de son père. Beaucoup de choses s'étaient passés depuis. Des âmes tourmentées en train d'être soignées, l'un l'autre. Ils y parvenaient difficilement. La jeune femme était en proie à des cauchemars tétanisants, qui la réveillaient assez fréquemment depuis qu'Edward avait posé la main sur elle. Les parents de Joanne avait invité le couple chez eux, un dimanche midi. La nervosité de Jamie était particulièrement palpable, ce qui était compréhensible, vu qu'il allait faire la connaissance des éventuels futurs beaux-parents. Joanne avait toujours été particulièrement proche d'eux. Elle échangeait régulièrement avec eux par téléphone, ou par mail. Ils connaissaient leur cadette par coeur. Il suffisait qu'elle change d'un mot sa façon habituelle d'écrire, ou avoir un ton différent, pour savoir quand ça allait, ou quand ça n'allait pas. Elle ne pouvait rien leur cacher. Ce fut pourquoi elle avait été particulièrement honnête sur la manière dont elle avait rencontré Jamie, la précipitation à laquelle ils avaient décidé de vivre ensemble. Mais ils ne disaient rien. Bien qu'inquiets, il tenait à laisser une chance à ce gentleman particulièrement sanguin. Ils savaient pratiquement tout, même les raisons de sa séparation momentanée avec lui. Tout parent aurait protégé sa fille, l'aurait éloigné d'un tel être. Joanne les avait supplié de lui laisser une chance. Ils avaient été toujours ouverts d'esprit, dédiant leur vie à leurs enfants, répondant à leurs demandes quand il le fallait. Et sur le coup là, ils voulaient bien laisser à ce Jamie qu'ils n'avaient encore jamais vu. Martin et Jane Prescott s'étaient achetés une résidence secondaire à Brisbane lorsque leur deux filles décidèrent d'y vivre. Un bel appartement, se trouvant en retrait de la ville. Bien que le petit immeuble avait déjà de nombreuses années derrière lui, son état était intact. Le vieux couple vivait au dernier étage, désireux d'avoir une grande terrasse. Jane avait la main verte, et tenait à avoir quelques plantes à l'extérieur - et ils ne pouvaient pas se permettre de s'acheter une maison. Jamie et Joanne venait tout juste d'arriver au pied de l'immeuble. Il cachait d'autant qu'il pouvait sa nervosité. La belle blonde caressait tendrement sa cuisse, avec un sourire qui se voulait rassurant. Joanne avait acheté un bouquet de fleurs pour sa mère, elle qui adorait les fleurs sauvages. Ils prenaient l'ascenseur, et une fois arrivés sur le palier, la porte était déjà ouverte, prêts à être accueillis. Jane n'était pas bien grande, à peine plus haute que sa fille. Ses cheveux étaient teints en blonds, avec la couleur qui se rapprochait le plus de sa teinture naturelle. Elle n'aimait pas trop les excentricités. Les rides avaient commencé à marqué son visage depuis un bout de temps, mais ce n'était que des marques relatant du bonheur, de nombreux sourires et d'une multitude de rires. Ses yeux bruns étaient pétillants, joueurs. Jane ouvrit ses bras pour enlacer chaleureusement sa fille, comblée de la revoir enfin. Cela remontait à des mois. Joanne lui donna le bouquet, sa mère la remercia on ne peut plus chaleureusement. Ce fut elle qui avait décidé de ne pas inviter Reever et Mia. Leur personnalité forte et leur instinct de protection aurait été certainement excessif pour une première rencontre. Ce n'était que partie remise, mais le vieux couple tenait à se faire eux-même un avis sur le nouveau compagnon de leur cadette. Elle salua ensuite Jamie, puis les invita à rentrer. Martin venait tout juste de se relever de son canapé. C'était un homme grand, on devinait aisément qu'il était particulièrement athlétique à sa posture et son allure. Il avait des cheveux noirs grisonnant, des yeux bleus incroyablement clairs -on devinait aisément d'où venaient ceux de Joanne. Celle-ci adorait son père. C'était un homme profondément bon, tendre et affectueux. Très ouvert d'esprit aussi, sinon il n'aurait très certainement jamais toléré de voir Jamie. Martin n'était certainement pas aussi protecteur que ses deux premiers enfants, mais il parvenait à beaucoup anticiper ses réactions ou ce qu'elle pourrait dire. "Cela faisait bien trop longtemps." dit-il d'un sourire tendre en enlaçant sa fille, lui collant un baiser sur le front. Il avait un sourire tendre tracé sur ses lèvres. "Tu vas bien ?" demanda-t-il doucement. Joanne lui esquissa un large sourire, en acquiesçant d'un signe de tête. "Papa, je te présente Jamie." dit-elle, en invitant son compagnon à se rapprocher. Ils se serraient la main, avec quelques échanges de regard. "Joanne, tu veux bien m'aider, s'il te plaît ?" dit Jane, près de la cuisine. "Bien sûr." dit-elle d'un sourire. Elle vola un baiser à son compagnon, avant de rejoindre sa mère. Elles allèrent dans la cuisine, coupant des légumes frais à croquer pour l'apéritif -qui était déjà majoritairement préparé sur la terrasse. "Ce n'est pas évident de trouver des recettes végétariennes, tu sais. Surtout que ton père est dans sa période où il ne prie que pour la viande rouge." La cadette laissa un échapper un rire. "Alors j'ai parcouru quelque sites internet, mais il n'y avait rien qui me plaisait, ou qui faisait office de bons plats. J'aimerais beaucoup que tu me passes quelques bonnes adresse, tu sais, pour les prochaines fois." "Pour les prochaines fois ?" demanda-t-elle, presque surprise que sa mère prévoit déjà les prochains repas. "Evidemment. Là, je me suis essayée à des lasagnes, penses-tu qu'il va aimer ?" "C'est son plat préféré." "C'est vrai ?" demanda Jane, les yeux brillants de joie. "Tu crois que Papa va bien l'aimer ?" demanda-t-elle, tout de même soucieuse, en regardant les deux hommes discuter calmement ensemble. "Voyons, Joanne. Ca se comprend que nous nous faisons du soucis pour toi. Avec tes soucis de santé, surtout. Tu sais qu'il a le compas dans l'oeil, quand il voit quelqu'un. Il sait déjà largement à qui il a affaire. Laisse-lui juste le temps de faire connaissance, de le comprendre." Et Jane avait raison. Martin n'avait rien d'un monstre. Il cherchait toujours à comprendre le pourquoi du comment, et avait une facilité certaine pour cerner les gens. Il ne lésinerait pas sur les questions, mais les poserait sans se faire oppressant. Jane vit sa fille inquiète. "Tout va bien se passer, Joanne. Jamie a l'air d'être quelque de charmant, malgré tout. S'il n'inspirait pas confiance à ton père, il se serait comporté autrement, tu le sais bien."
« Je veux pas y aller... » je grogne, le visage complètement enfoui dans l'oreiller, comme cherchant à me laisser mourir asphyxié afin d'échapper à ce dîner. Dîné qui s'est transformé en véritable obsession de jour en jour, me dévorant complètement les tripes. Jusqu'à me transformer en cette chiffe molle, étalée, là, sur le lit. Dans la pièce d'à côté, Joanne sort de la douche. Je saute sur mes deux pieds aussi vite que possible, comme de rien n'était, avant qu'elle ne m'aperçoive ainsi. Une main passée sur le drap puis sur ma chemise efface les froissements du à mon passage. Lorsqu'elle m'adresse un regard à travers le miroir embué, je souris. Mais elle n'est pas dupe. Elle sait bien que cette rencontre est une immense source de stress pour moi. Ses parents. Mes futur beaux-parents -un jour, je l'espère. Un passage obligé que je n'ai jamais vraiment vécu. Venant d'un monde où la majorité des pères et mères de familles se connaissent entre eux, les enfants rencontrent souvent leur futur épouse des années avant de songer à se marier, dans les cercles d'amis entourant leur famille. Ainsi, les futurs beaux-parents, le moment venu, ont quasiment vu grandir leur futur gendre. Ou tout du moins, le connaissent déjà bien. Et encore, il ne s'agit que des cas où est laissé la possibilité de choisir celle qui deviendra sa femme – luxe que j'ai bien failli ne pas connaître. Lorsque le mariage des enfants ne sert qu'à resserrer les liens « d'amitié » entre les familles, l'intérêt pour la jeune personne promise est encore moindre. Le papier signé compte plus que le reste. Dans un cas comme dans l'autre, il n'y a pas de dîner en tête-à-tête, de passage à la casserole, d'interrogatoire façon services secrets. Enora avait fait partie de la première catégorie de femmes, même si je ne l'avais pas remarquée avant l'université. Les années passant, elle a glissé dans la seconde catégorie. Mais à ce moment là, nous vivions déjà ensemble, et l'avenir n'avait pas vraiment de secrets pour nous. Du coup, pas de dîner. Ainsi, cette situation est complètement inédite pour moi, et j'avoue avoir bien du mal à composer avec mes nerfs qui manquent de craquer à chaque fois que j'y songe. J'évite de le partager, mais la pression que j'applique sur mes épaules est immense. Je ne veux (et ne peut me permettre) de décevoir qui que ce soit. Déjà que mes rapports avec les aînés de Joanne ne sont vraiment pas au beau fixe, je me doute bien que le rejet de la part des parents me reléguerait immédiatement au placard. La jeune femme ne pourrait quand même pas se positionner à contre courant de l'avis unanime de sa famille entière. Et je dois dire que je n'ai aucune confiance en moi dans ce domaine ; je ne vois pas de quelle manière je ne pourrais pas être source de méfiance. Si Reever et Mia ont du mal avec moi, c'est qu'il y a une raison, et je ne crois pas que les fruits tombent bien loin de l'arbre. D'autant plus que Joanne leur a tout dit. Tout. Je n'ai jamais autant pâli que lorsqu'elle m'a avoué avoir tenu un récit détaillé de notre relation auprès des Prescott seniors. Le tumulte de notre rencontre, la précipitation de son premier emménagement avec moi, sa détresse respiratoire. Même la cause de notre rupture, il y a quelques mois. Honnêtement, cela rend leur volonté de me voir et de m'accueillir chez eux des plus incompréhensibles ; quels parents préfèrent inviter cet homme dangereux à dîner plutôt que de convaincre leur fille de le fuir comme la peste ? Je suppose que le reste du portrait dressé par la belle (et il doit être diablement flatteur pour contrebalancer une image aussi violente) les a assez inspirés pour m'accorder une chance. Raison de plus pour ne pas la gâcher. Je ne crois pas avoir droit à l'erreur. Je ne peux pas me rater auprès de Joanne non plus. La décevoir, lui faire honte. Il ne manquerait plus que ça à mon palmarès des erreurs impardonnables -ça, et un adultère. J'ai l'impression que le moindre mot de travers pourrait signer ma fin. Mon absence totale d'expérience en la matière me fait d'autant plus peur ; je n'ai aucune idée de la manière dont je dois me comporter, ce qu'il faut dire ou non, ce qui est accepté et ce qui est à bannir. La jeune femme me dirait certainement de me contenter d'être moi-même, et que tout se passera bien. Mais c'est bien l'idée d'être moi-même qui participe à mes craintes. Bon Dieu, j'affronte sans problème des galas bourrés de hordes d'aristocrates, mais pas les parents Prescott. Je vais foirer. Je vais forcément me foirer. C'est ce que je me répète en boucle depuis que nous avons quitté la maison. Mes mains serrent le volant comme jamais, rougissant légèrement. Ma mâchoire, on ne peut plus comprimée, en est presque douloureuse. Je prends régulièrement de très, très grandes inspirations que je souffle doucement entre mes dents. Tant et si bien que tout cet oxygène me collerait presque la migraine. En bas de l'immeuble, même si je masque -sans grand succès- ma nervosité, je refuse de déverrouiller les portières de la voiture avant une bonne minute. Le temps qu'il me faut pour me faire à l'idée que je suis là, et que je n'ai aucun moyen de me dégonfler. J'aurais aimé que Joanne soit en capacité de me rassurer, mais plus elle m'assure que tout se passera bien, plus mon coeur se serre et se dévore lui-même. Finalement, je daigne sortir de là et entrer dans l'immeuble. Je n'ose pas dire un mot dans l’ascenseur. Nous arrivons sur une porte ouverte donnant sur une petite femme. Je laisse Joanne prendre les devants, restant légèrement en retrait. Je me contente de saluer sa mère avec un sourire avant de la laisser me faire une bise. J'emboîte le pas de la belle alors que nous entrons dans l'appartement. C'est fou à quel point tout me semble petit à côté de notre maison -mais je me garde bien de faire le moindre commentaire, me contentant d'essayer de me familiariser avec les lieux en laissant mon regard glisser d'un meuble à l'autre, jusqu'à tomber sur l'homme qui vient d'apparaître devant nous. En le détaillant, et à voir la mère de Joanne, je peux constater que ma compagne est un bien savant mélange de ces deux silhouettes complètement opposables. D'ailleurs, aussi perturbant cela soit-il, je ne manque pas de nous reconnaître, la jeune femme et moi, dans ce détail. Elle ne manque pas de me présenter. Je crois que ma poignée de main n'a jamais été aussi fuyante qu'à cet instant – et rien que cela suffit à me faire honte. Je suppose -j'espère- que le père de Joanne ne m'en tiendra pas rigueur ; après tout, quoi de plus naturel que d'être nerveux lorsqu'on rencontre pour la première fois les parents de sa belle ? Mon regard, lui, est plus franc. J'essaye de deviner à quel type de personne j'ai affaire pour savoir un temps soit peu comment me comporter. J'ai encore la voix de Joanne dans ma tête qui me martèle d'être moi-même. La vraie Joanne, elle, m'abandonne seul à seul avec son père pour se rendre dans la cuisine. Je retiens un regard la suppliant de rester, mon attention étant tout de suite captée par l'homme face à moi. « Détendez-vous, allons. Je pense que Joanne nous a déjà fait part du pire de vous, vous ne pourrez que nous montrer vos bons côtés ce soir. » plaisante-t-il avec un sourire chaleureux. Un sourire qui se transmet à mes propres lèvres. Vu comme ça, il est vrai que je peux avoir moins de craintes. Je ne peux pas faire pire que tout ce qui a déjà pu se passer. Avec de la chance, je peux même redorer mon blason. Cela reste néanmoins inconfortable, ce sentiment de n'avoir aucune carte en main ; ces deux personnes savent quasiment tout de moi, et moi, je ne sais quasiment rien d'eux. « Jamie, c'est une déformation de James, c'est ça ? » J'acquiesce d'un signe de tête. Personne ne pose jamais cette question ; je me présente toujours comme Jamie, et personne ne doute que ce soit mon prénom. Moi même je n'en doutais pas avant la première fois qu'une maîtresse à fait l'appel, et que j'ai compris que c'était à moi de répondre au nom de James Keynes. « C'est ça. Mais ma propre mère ne sait plus pourquoi elle m'a appelé James. A la maison, pour tout le monde, ça a toujours été Jamie, depuis toujours. » j'explique en haussant les épaules. « Eh bien, Jamie, passons à la terrasse. Joanne m'a dit que vous ne buvez que très occasionnellement. En plus d'être végétarien, c'est un sacré régime que vous vous imposez là. » Je le suis sur la terrasse, où l'air me fait le plus grand bien. « J'espère que je n'ai pas donné trop de fil à retordre à votre femme. Je ne suis vraiment pas difficile. » dis-je en m’asseyant dans un fauteuil du petit salon d'extérieur. « Ne vous en faites pas pour ça. Qu'est-ce que je vous sers ? » Mon regard fait rapidement le tour de la table. Je ne me vois vraiment pas à l'eau. Mes nerfs ont besoin d'un coup de pouce. « Je suppose que c'est une occasion qui mérite un peu d'alcool. Un verre de vin fera l'affaire, n'importe lequel. » L'homme me sert un verre de blanc. « Ma fille vous aime beaucoup, vous savez. J'espère qu'elle a eu raison de vous donner une seconde chance. » Je l'espère aussi. Mais je n'ai pas le temps de répondre quoi que ce soit que Joanne revient, en compagnie de sa mère et d'un plateau de crudités. Pour ma part, je noie mon malaise dans une fine gorgée de vin.
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"Puis, je te mentirai si je te disais que ce n'était pas un bel homme. Un peu timide, peut-être ?" "Il n'a jamais vraiment rencontré les parents de sa compagne de cette manière." "Même pour son mariage précédent ?" "Je suppose que c'est bien différent dans l'aristocratie, je ne sais pas vraiment. Il n'aime pas beaucoup en parler." Jane sourit à sa fille, tendrement. "Tu es vraiment amoureuse de lui, n'est-ce pas ?" lui dit-elle à voix basse, scrutant la moindre expression de Joanne. "Ca se voit, de la manière dont tu le regardes." La jeune blonde sourit timidement, tête baissée, prétendant se concentrer sur les concombres qu'elle coupait. "Je n'ai pas encore discuté avec lui. Mais quand on sait que vous êtes toujours ensemble après ce que vous avez enduré, je peux déjà te dire que c'est l'amour de toute une vie." Emue, la cadette regardait sa mère, profondément touchée par ses paroles. "Tu sais, tout n'était pas si rose avec ton père avant que vous ne veniez tous au monde. Des disputes, de petites séparations. C'était un bien pour un mal et ça se poursuit plutôt bien, tu ne trouves pas ?" dit Jane d'un ton plaisantin. Les deux femmes quittèrent la cuisine munies des crudités fraîchement découpée. Martin et Jamie se trouvaient déjà sur la terrasse, verre en main. "Et quand on parle du loup..." s'exclama Martin en voyant sa fille. Il lui tendit un verre de muscat, elle le remercia, puis s'installa sur l'accoudoir du fauteuil sur lequel Jamie était assis. Elle le regarda tendrement, passant rapidement, mais tout en douceur, une main dans ses cheveux. "Joanne nous avait raconté que tu - excuse-moi, je commence déjà avec des familiarités, ça ne te gêne pas, j'espère.- Oui, je disais qu'elle nous avait dit que tu es donc rédacteur en chef à l'ABC radio. Un sacré poste tout de même. Et puis, avec des amies, nous avions réussi à écouter en podcast ton émission." Jane restait très jeune dans sa tête, ses yeux pétillaient constamment. Elle laissa échapper. "Je peux t'assurer qu'il y a un petit fanclub qui s'est créé à Perth, oulala." Elle riait toute seule de ce qu'elle racontait, c'était adorable. Le père Prescott s'installa lui aussi dans un des fauteuils après s'être servi une bière blonde. "Ca ne doit pas être évident, de jongler entre la rédaction et l'antenne, je suppose." se demanda Martin, curieux. "C'est vrai qu'il rentre plus tard le soir. Mais c'est ce qu'il aime faire, aussi. Et il arrive à se libérer les weekends." Après il arrivait que Joanne travaille le samedi, mais elle n'y trouvait aucune contrainte. "J'espère que vous vous trouvez le temps de vous occuper d'elle." dit Martin, avec un sourire serein. Il était sûr que c'était le cas, mais il voulait s'en assurer. Dans aucun de ses propos, il n'y avait une trace de jugement, de reproche ou de méfiance. Il voulait simplement connaître l'homme dont sa fille était éperdument amoureuse. "Joanne a toujours eu besoin d'énormément d'affection, et ce, depuis bébé. Elle n'a jamais osé en réclamer, mais une fois qu'on en lui donnait, on devinait aisément le manque ressenti. Le besoin d'être rassurée en permanence." ajouta-t-il calmement, ses yeux bleus se portant sur toute l'attention de sa fille, qui venait juste d'échanger de brefs mots avec sa mère. "Et si nous trinquions ?" s'exclama subitement cette dernière, n'ayant jusque là pas écouter grand chose. Les verres s'entrechoquèrent, Jane s'installa juste à côté de son époux. "Qu'êtes-vous prêt à faire pour elle ?" se questionna-t-il. "Voyons, Martin, ne commence pas avec ces questions là, tu vois bien qu'il est suffisamment nerveux comme ça." "Je pose exactement la même question que ton père m'avait posé lors d'un premier dîner ensemble." répliqua le père Prescott, rieur. "Maintenant, j'ai aussi le droit de le faire." ajouta-t-il, en riant. Il s'éclaircit la voix, retrouvant un peu de son sérieux. "Ne prenez rien pour vous, Jamie. Je suppose que c'est le genre de questions auxquelles l'éventuel futur beau-fils se doit de répondre." ajouta Martin. Joanne les regardait silencieusement. Jane se lever afin de faire placer un plateau de canapés qu'elle venait juste de sortir du four. "Joanne nous a aussi dit que tu adores peindre. Ca te dérangerait de nous montrer quelques uns de tes tableaux. Martin et moi adorons renouveler les décors de la maison." s'enthousiasma Jane. "Je leur ai dit que tu n'aimais pas trop montrer ce que tu fais. Ils ne diront rien, si tu ne veux pas. Mais je sais qu'ils aimeront beaucoup ton style." dit la jeune femme à voix basse à son compagnon, en passant une main au niveau de sa nuque. Elle avait un sourire léger, rassurant, contente de voir que pour le moment, toute se passait très bien.
J'avais assez bon espoir que les parents de Joanne ne me parlent pas de mon travail. Qu'ils ne sachent pas pour l'émission. D'ailleurs, jusqu'à présent, j'avais été surpris que cela ne soit pas, encore et toujours, la première chose qui me définisse. Mais j'ai conscience qu'il est quasiment impossible de ne pas passer par ce sujet là. Le poste de rédacteur en chef, l'émission, ont tendance à intéresser tous mes interlocuteurs. Je ne sais pas pourquoi je ne m'en réjouis jamais. Peut-être le fait que je parle très peu de moi. Ou le fait qu'on ne m'ait jamais vraiment encouragé à être fier de mes accomplissements. La mère de Joanne tient déjà à me tutoyer. Je souris, terriblement gêné, malgré moi. « Pas de problème, mais je ne garantis pas de réussir à vous tutoyer aussi vite. Même pour m'adresser à Joanne, ça m'a pris du temps. » Aujourd'hui, cela est resté sous forme de jeu entre nous. Mais je me souviens que le vouvoiement a été tenace et a demeuré de longues semaines. L'habitude, l'éducation, ce genre de choses. Sans oublier qu'à mes yeux, cela est vraiment une marque de respect, une manière de rester humble, et à sa bonne place. Jane m'avoue avoir écouté mon émission avec des amies -je crois que c'est ce détail qui me fait rougir. « Seigneur… » je murmure en riant nerveusement, passant une main sur mon visage. Parfois, j'oublie que les ondes ne se limitent pas à Brisbane, et qu'avec internet, je suis audible sur tout le globe. Je reprends une gorgée de vin avant de répondre ; « Hum, je ne sais pas quoi dire. Je suis content si ça vous a plu. » J'hausse les épaules, ne sachant plus trop où me mettre. C'est étrange à quel point de bons retours de manière générale sont agréables à voir, mais l'avis personnel d'individus particuliers peut encore me mettre mal à l'aise. « Je pourrais glisser un mot pour le fanclub de Perth lundi prochain peut-être. » j'ajoute avec un sourire complice à la mère de Joanne, ce qui semble lui plaire. Son mari renchérit sur la complexité d'allier mes deux postes. Suite aux paroles de la jeune femme, j'ajoute ; « A vrai dire, je m'attendais à bien pire, à me sentir vraiment débordé et à rentrer complètement épuisé le soir. Mais finalement, tout se goupille très bien et je me sens moins frustré qu'avant par rapport à mon travail. » La remarque suivante de Martin m'ôte un peu de l'aise que je commençais à avoir -je suppose que ce dîner ne sera qu'un immense ascenseur émotionnel pour moi, je ferais mieux de m'y faire tout de suite. Il explique que, depuis toujours, Joanne a besoin d'attention. D'énormément d'attention. Mon regard ne quitte pas le sien, les mêmes yeux bleus dont à hérité sa fille. « C'est toujours ma priorité de trouver du temps pour elle. » je réponds doucement. Un week-end, une heure de plus le soir, un déjeuner ensemble. C'est une préoccupation qui ne me quitte pas ; je ne veux pas qu'elle se sente délaissée à cause de mon travail. Satisfait par ma réponse, Martin propose se trinquer. A peine le tintement des verres résonne qu'il enchaîne avec une nouvelle question qui ne manque pas de me vraiment me surprendre. Je cesse de respirer quelques secondes, le temps de déterminer si la question est sérieuse ou non. Sur le moment, les doigts de Joanne passant doucement de ma nuque à mes cheveux m'aide à ne pas me sentir complètement oppressé. « Ce n'est rien, c'est que c'est… vaste, comme question. » dis-je. Je m'éclaircis la voix, cherchant mes mots. Mais la surprise m'empêche de réfléchir comme il faut. « Je pense que ça ferait vraiment cliché si je vous répondais simplement que je ferais tout pour elle. Mais c'est vrai. Elle sait déjà que je ne renoncerait jamais à elle, sauf si cela pouvait faire son bonheur. » je réponds finalement. Je pourrais ajouter que je n'ai toujours pas congédié le garde du corps qui la suit discrètement dans ses déplacements et reste posté devant le musée toute la journée, ou encore que j'aurais pu tuer à mains nues mon ex thérapeute et amante. Mais pas sûr que cela leur donne une image très positive de moi. Je poursuis ; « J'ai promis de prendre soin d'elle, qu'elle sera toujours en sécurité, qu'elle ne manquera jamais de quoi que ce soit. Et je suis du genre à donner une importance plutôt démesurée à mes promesses. » Je ris doucement sur la fin. De toute manière, je suis fâché avec toute forme de mesure, autant l'assumer. Et je pense toujours qu'avoir une parole fiable est une grande richesse. Mon regard passe du père à la mère de Joanne deux ou trois fois, cherchant une réaction, n'importe quoi qui puisse me faire comprendre que j'ai répondu juste ou non. Mais Jane se lève afin de faire un aller-retour en cuisine. Pour ma part, j'avale ma nervosité revenue à la charge sous forme de concombre avec un peu de sauce. Je me sens de plus en plus minuscule, entouré de géants pour qui je ne semble avoir aucun secret, lorsque la mère de Joanne évoque mes tableaux. Je lui adresse néanmoins un sourire et sort mon téléphone de la poche intérieur de ma veste. « Ils finiront bien par les voir le jour où ils viendront à la maison. » je réponds à Joanne. Je trouve l'album regroupant les clichés des toiles que j'aimais assez pour les photographier puis tends l'appareil à Jane. « Tenez. » Les laissant passer d'une œuvre à l'autre, j'en profite pour adresser un regard à Joanne, cherchant un peu de courage dans le sien, à avoir ne serais-ce que quelques secondes de bulle pour souffler. Elle semble bien plus sereine que moi. Je prends la main posée sur ma nuque et dépose un baiser sur ses doigts. « Vos parents ont de quoi être très fier de vous. » Je ne réponds pas. A vrai dire, je me demande ce que leur fille a pu leur dire à ce sujet. Si elle leur dit vraiment tout, si elle leur a parlé de l'incident avec mon père, si même ce sujet, que je garde toujours très secret, n'en est pas un pour eux. Mon coeur commence à battre de panique à l'idée qu'ils sachent pour lui, pour Oliver, pour tout mon passé à Londres. « Est-ce qu'ils ont déjà rencontré Joanne ? » « Oui, une fois. J'ai emmené Joanne à Londres pour semaine en vacances, et ça a été le passage obligé. » je réponds, monotone. Obligé est un mot faible, je crois. Mon cerveau fume jusqu'à trouver n'importe quel moyen de passer à un autre sujet avant qu'une autre question ne soit suivie d'une autre et que vienne ma fin de ma contenance. « J'avoue que Joanne m'a peu parlé de vous. J'évoque très peu ma famille alors forcément… Qu'est-ce que vous faites dans la vie, à Perth ? » Je reprends une gorgée de vin. « J'espère que nous viendrons vous visiter un jour. Je ne connais que Brisbane en Australie. » j'ajoute avec un sourire, toujours plus à l'aise pour poser les questions que pour y répondre.
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"Vous seriez prêt à renoncer à elle si c'est l'unique solution qui lui permettrait d'être heureuse ?" renchérit le père sur les propos de Jamie. Il était agréablement surpris par la réponse du gentleman, et c'était pourquoi il avait posé la question avec un sourire satisfait. "Ce n'est pas donné à tout le monde de songer de cette manière. L'on en arrive facilement à un point où l'égoïsme prend le dessus, alors que vous, c'est totalement l'inverse." Il but une gorgée de sa bière avant de manger un légume, écoutant avec attention le bel homme. Jane était aussi toute ouïe, souriante et sereine. "Joanne a aussi attaché une très grande valeur aux promesses. Elle n'en donne pas souvent, mais elle demandait toujours qu'on lui en fasse, ça la rassurait souvent." se remémora-t-elle en regardant son époux. Celui-ci hocha la tête, d'accord avec ses propos. "C'est merveilleux si tu tiens effectivement tes promesses comme tu le dis, Jamie. C'est ce dont elle a besoin, ce sentiment de sécurité qui tournoie autour de ces promesses." ajouta-t-elle doucement, regardant avec bienveillance sa fille. Ils la prenaient certainement pour la fillette qu'ils avaient élevé, mais il y avait des choses qui n'avaient changé. Joanne laissait parler ses parents sans dire mot, elle n'aurait pas du quoi ajouter de toute manière. Elle écoutait principalement la conversation, entourée de trois personnes qui la connaissaient par coeur. Martin semblait tout aussi satisfait de sa réponse, esquissant un sourire très discret. "Nous avons essayé de fonder notre famille sur certaines valeurs, qui sont devenues très chères auprès de tout le monde. Vous avez du certainement le remarquer avec Joanne. J'avoue avoir été sceptique en premier lieu quand elle m'a parlée de vous, mais j'avoue être particulièrement ravi de vous entendre dire tout ceci." lui dit-il avec un regard complice. L'Anglais sortait ensuite le portable de sa poche afin de montrer ses tableaux. Joanne lui souriait, ravie de voir qu'il acceptait. On devinait facilement l'engouement de Jane lorsqu'elle parcourait les photos. Martin s'était également penché vers sa femme pour y jeter un oeil. Jamie cherchait le regard de sa compagne, qui le contemplait d'un air tendre. Ses doigts caressèrent brièvement sa joue, puis l'embrassa. "Tout va bien se passer". lui chuchota-t-elle ensuite dans l'oreille. Elle était assez confiante, ça aurait été tout le contraire si Reever et Mia avaient été là. Jamie avait embrassé ses doigts, puis garda la main de la belle dans la sienne. Martin toucha un sujet particulièrement délicat. "Joanne n'a jamais accepté de parler des vôtres, elle tenait à avoir votre aval. Si cela vous semble trop inapproprié, nous comprendrions. Nous savons bien que nous faisons partie de ces chanceux qui n'ont pas tellement d'histoire que ça." remarqua Martin. "Cela reste votre choix, Jamie. Si, et seulement si, vous souhaitez en parler, n'hésitez pas à revenir vers nous." C'était un homme bienveillant et compréhensif, il entendait parler de beaucoup de choses autour de lui et se doutait que sa famille faisait partie de cette poignée de grands chanceux, en faisant abstraction des soucis de Joanne. Ce jour-là, sa fille allait parfaitement bien, aux yeux de ses parents, elle n'était pas malade. Jamie avoua ensuite que la belle blonde n'avait elle-même pas énormément parlé de sa propre famille. "Voyons, Joanne, tu aurais au moins pu parler de nous un minimum..." dit Jane, quelque peu attristée. "Désolée..." répondit Joanne en faisant la moue, sincèrement navrée. Martin posa sa main sur la cuisse de son épouse, avec un sourire. "Ce n'est pas grave, Jane. C'est aussi pourquoi nous les avons invité, n'est-ce pas ? Tu sais très bien qu'elle n'aime pas forcément parler d'elle, ou développer trop de choses la concernant." Il fit un clin d'oeil à sa fille, disant par là qu'il n'y avait rien de grave. "Je suis ingénieur en aéronautique et Jane et conseillère dans une banque." "Nous attendons impatiemment la retraite." rajouta-t-elle, enthousiaste à cette idée. "Plus que deux ans ? Trois ans ? Je ne sais plus." Jane mangea une mini pizza avant de dire. "Mais vous êtes la bienvenue quand vous le voulez. Nous pourrions aller voir ta grand-mère, Joanne, tiens, ça lui ferait sacrément plaisir. Elle a une maison qui se trouve à quelques minutes de marche de la plage. Les enfants passaient la majorité de leurs vacances là-bas. Puis on ne peut pas dire que la maison est particulièrement petite." Le bip du four retenti soudainement et Jane sauta de sa chaise pour aller à la cuisine. "Joanne a eu tout le plaisir de nous dire ce qui lui plaisait chez vous. Mais vous, qu'est-ce qui vous a fait tomber amoureux d'elle, avec cette envie farouche de la garder ?" "Papa !" s'exclama Joanne, qui ne souhaitait clairement pas entendre ce genre. "Quoi ? J'ai bien le droit de savoir les atouts qu'il trouve à ma plus jeune fille, même si j'en connais déjà certains." dit-il en riant. Il y avait là une part de curiosité et une part d'air taquin, sachant pertinemment que Joanne allait réagir de cette manière. "Tu n'es pas obligé de répondre, Jamie." dit-elle. "Laisse-le donc parler, tu vois très bien qu'il n'attend que ça." Jane surgit soudainement au niveau de la baie vitrée. "Joanne, tu veux bien venir un instant ? J'ai besoin de ton avis pour la cuisson. Mais je pense que nous allons pouvoir passer à table." dit Jane avant d'embarquer sa fille avec elle dans la cuisine, à nouveau.
Je ne pensais pas gagner autant de points en disant que je serais capable de renoncer à elle pour faire son bonheur. Je reste un instant cloué au fond de mon siège, écoutant une pluie de compliments s'abattre sur moi. Sur le moment, je me dis que Joanne a peut-être raison. Je peux être simplement moi-même, et faire preuve de toute l'honnêteté que je veux plutôt que de chercher les phrases qui pourront leur plaire. Quelque chose me dit que j'ai affaire à deux personnes parfaitement capables de sentir la moindre fausseté dans mes paroles. Que, à vrai dire, je n'ai vraiment pas intérêt à sonner faux sur le moindre sujet. C'est à la fois un soulagement et une nouvelle source de nervosité pour moi. J'ai l'impression de jouer quitte ou double. Et je n'ai plus qu'à croiser les doigts. Peut-être que tout va bien se passer, finalement. Jane me rend mon téléphone après avoir consulté les photos des œuvres. Elles ont eu l'air de lui plaire -ou tout du moins, d'être intéressantes à ses yeux. « Si l'un d'eux vous plaît, je peux le faire livrer chez vous. » dis-je en glissant l'appareil dans la poche de ma veste. Quitte à disséminer des toiles un peu partout auprès de mon entourage, pourquoi pas m'exporter jusqu'à Perth. Remarquant qu'il avait touché un sujet sensible, le père de Joanne prend les devants en m'assurant qu'elle ne leur avait rien dit au sujet de ma famille, et que je ne suis pas obligé d'en parler. Je me sens réellement touché par les paroles de Martin et le respect qu'a eu ma compagne pour cette partie de ma vie, ne manquant pas de deviner d'où elle son caractère si compréhensif. « Disons que… C'est un sujet vraiment délicat. Je ne pense pas que ce soit le bon soir pour l'évoquer. » j'avoue, le regard fuyant malgré moi. L'objectif de la soirée étant plutôt de faire bonne impression, je ne pense pas que partager le caractère de mes parents, l'esprit malade d'Edward, leur éducation sans pitié ou encore le suicide de mon frère aille dans ce sens. Peut-être une prochaine fois, s'ils tiennent à me connaître. Après tout, j'ai conscience qu'il est nécessaire d'en savoir un peu sur ma famille pour pleinement me comprendre -et d'autant plus pour savoir pourquoi je peux être aussi secret. D'ailleurs, en avouant ne pas savoir grand-chose au sujet des parents de Joanne, son père souligne qu'elle non plus ne souhaite pas beaucoup parler d'elle. « C'est quelque chose que nous avons en commun. » je fais remarquer avec un sourire à l'attention de la jeune femme. A se demander de quoi nous pouvons discuter à la maison. J'apprends donc les professions des parents Prescott -et leur vive attente de l'heure de la retraite, ce qui me fait doucement sourire. Pour ma part, je me demande vraiment ce que je pourrais faire de mes dix doigts le jour où je serais trop vieux pour être obnubilé par le travail. Jane évoque la maison au pied de la plage que possède la grand-mère de la jeune femme. « Ah, en revanche, Joanne m'a beaucoup parlé de cette maison. » dis-je, retrouvant le sourire et mes aises petit à petit. Je serre un peu plus la main de Joanne dans la mienne, lui adressant un regard tendre. « Nous avions déjà parlé de nous y rendre un jour. » La liste des lieux à visiter est longue maintenant, peut-être ne s'en souvenait-elle plus. Mais moi, je la garde accrochée dans un coin de ma tête, attendant le moment opportun pour prendre des vacances avec elle, voyager un peu, quitter nos obligations et nous couper du monde. « Pour de prochaines vacances peut-être ? » je lance en haussant les épaules, songeant, pourquoi pas, à Noël. Oui, un Noël en famille dans cette maison dont elle parle beaucoup pourrait faire plaisir à Joanne, et je tiens énormément au caractère unificateur des fêtes de fin d'année. Jane nous quitte pour se rendre en cuisine. Martin, quant à lui, ne perd pas de temps pour asséner une nouvelle question. L'exclamation de sa fille m'arrache un rire. « Bien sûr que je vais répondre, juste pour savoir ce que tu as pu dire sur moi ensuite. » dis-je, taquin à souhait. Avant que je puisse parler, sa mère vient la chercher, et la jeune femme disparaît. Mon regard la suit jusqu'à la cuisine avant de se reporter sur son père. « Je pense que vous avez vraiment réussi votre fille. Elle est magnifique. » je murmure. « Pas seulement physiquement bien sûr. Enfin, je veux dire, bien sûr qu'elle est belle. Vraiment très belle. Je… » Ma voix faiblit. Martin fronce les sourcils, voyant que je m'enfonce tout seul -et que plus il plisse les yeux, plus je me perds, ce qui doit vraiment le faire rire. Son expression se déride, et je comprends qu'il se joue de moi. Ma nervosité doit être un plaisir pour lui. Je reprends un peu contenance, et poursuis ; « Elle est belle toute entière je veux dire. Et j'ai connu peu de belles choses à Londres. » Je ne m'éternise pas sur ce détail. Sujet sensible, il l'a compris. Mon regard se reporte sur Joanne. « Elle est toujours douce et tendre, elle est dotée d'une générosité rare. Elle se donne énormément de mal pour me comprendre, toujours avec une patience à toute épreuve. Elle a de la conversation, elle est intéressante, nous partageons beaucoup de passions. Elle cherche toujours à tirer le meilleur de moi, à me soutenir dans tout ce que je fais, et elle m'inspire des choses que je ne me connaissais pas. » Comme l'envie de fonder une famille. Mais il est beaucoup trop tôt pour avouer cela à son propre père, qui me découvre à peine. Je me demande si elle leur a parlé de l'avortement. « Je n'ai jamais aimé avant elle, vous savez. » Et je ne veux aimer personne d'autre. Elle est l'amour de ma vie à mes yeux, je le lui ai déjà avoué, et cette certitude est très loin de s'amoindrir avec le temps. « C'est vraiment un ange. » j'ajoute, légèrement songeur. Mon regard se baisse vers le fond de mon verre lorsque j'avoue ; « Je crois que je ne comprendrais jamais pourquoi elle est revenue. » Puisqu'elle leur a tout dit, Martin sait probablement de quoi je veux parler. Je termine mon vin d'une traite, puis une voix s'élève depuis l'intérieur de l'appartement. « C'est prêt ! » Sur le modèle du père de Joanne, cherchant à me rendre utile, je prends mon verre ainsi que quelques coupelles remplies des différents biscuits apéritifs ou des crudités qui se trouvaient sur la table de la terrasse pour les emmener dans la cuisine. Là, alors que la jeune femme me tourne le dos, je glisse un baiser dans son cou. « Je peux aider en quelque chose ? » je demande à sa mère qui porte un grand plat entre ses gants molletonnés. « Allez juste vous mettre à table, mon garçon. » répond-t-elle. L'odeur et la forme du plat m'interpelle. J'hume l'air et inspecte rapidement ce que Jane tient. « Ce sont des lasagnes ? » Ce n'est pas vraiment une question, bien sûr que c'en sont. « C'est toi qui leur a dit ? » je demande à Joanne avec un sourire. « Même pas ! Maintenant, ouste. » Sa mère m'assène un coup de torchon de cuisine dans le dos, me faisant signe, joueuse, de sortir de sa cuisine. Je m'incline respectueusement, tout aussi joueur -ne m'attendant pas vraiment à avoir aussi vite cette espère de complicité avec Jane Prescott, mais tout de même ravi. Je me dirige donc vers la table et, comme me l'indique Martin, m'approprie n'importe quelle chaise. Le plat fume devant nous, et c'est autant un régal pour les yeux que pour les narines. « A mon tour de savoir ce qui a été dit sur moi. » dis-je au père de Joanne lorsque celle-ci s'installe à côté de moi, ne comptant pas être le seul dans l'embarras ce soir.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne lisait l'enthousiasme de Jamie en voyant le plat que sa mère avait concocté. Une belle coïncidence, qui faisait énormément plaisir. Tout le monde s'installa à table, et Jane commençait à couper plusieurs tranches de lasagnes. "Elle parle tout le temps de toi." commença-t-elle. La cadette leva les yeux au ciel, se sentant déjà honteuse de ce qui allait être dit. Surtout que Jane ne lésinait pas sur les paroles. "D'abord, tu étais plutôt mal vu, avec ce qu'il s'était passé au bar, c'est ça, hein, Martin ?" Elle commença à servir les parts. "Puis sa vision a changé. Te trouvant beaucoup plus de qualités que de défauts à vrai dire. Rien qu'à écouter ta voix, on entendait qu'elle était totalement tombée sous ton charme. Elle complimentait sans cesse ton physique..." Jane leva ses malicieux brièvement sur lui. "...et il faut avouer qu'elle n'avait pas tout à fait tort de ne pas arrêter d'en parler." Martin lâcha un rire avant de retrouver un peu de son sérieux. "Elle parle souvent aussi de votre difficulté à exprimer vos sentiments et émotions comme vous le voudriez. Que ce n'était pas toujours facile mais que ça vous rendait d'autant plus adorable. Elle dit aussi qu'elle se sent en sécurité à vos côtés, aimée avant tout. Que vous avez énormément à donner alors que vous demandez presque rien de sa part. Elle apprécie votre esprit critique, et son ouverture aussi. Elle vous trouve généreux, dévoué, authentique, érudit, d'une profonde bienveillance." Il souriait tendrement en regardant sa fille, qui elle, avait l'allure d'une gamine que l'on venait vraiment de punir. Mais jamais elle n'oserait rétorquer quoi que ce soit à son père. Jamais. "Elle a énormément d'admiration pour vous, Jamie. Je crois avoir rarement vu pareille dévotion pour l'être aimé." dit-il en toute honnêteté, d'un ton très calme, le regard doux posé sur sa fille qui était en train de se faire servir. Une fois l'assiette posée, Joanne s'excusa afin de se rendre aux toilettes -surtout une bonne opportunité pour s'isoler un peu et cacher sa honte. Une fois éclipsée, Martin ajouta, le ton songeur. "D'une beauté certaine, mais avec toute la fragilité que l'on peut y associer." "Martin, ce n'est pas le moment de penser à cela." dit son épouse, afin de ne pas aborder un autre sujet délicat, réunissant beaucoup d'optimisme. "Tu l'as bien vue, elle va bien, elle est rayonnante." ajouta-t-elle en s'installant. L'époux sourit tristement, trouvant de retrouver de lui-même. "Oui, tu as raison. Pardonnez-moi, Jamie, il est difficile de ne pas se faire du soucis après tous ces récents événements. L'hopitalisation, l'avortement. Sans compter ce qu'il s'était passé avant. Même pour moi, ça fait un peu beaucoup." confessa-t-ill, les yeux perdus dans le vide. "Mais j'ai bon espoir pour elle. Elle est suivie médicalement, elle se porte bien." "Et elle est heureuse avec Jamie." compléta Jane, souriant à la personne concernée. Martin acquiesça d'un signe de tête. Ca ne devait jamais être évident pour un père de confier sa fille à un homme en dehors de la famille, surtout en sachant qu'elle venait de passer une année particulièrement difficile, et que sa précédente union avait fini par un divorce. Il y avait de quoi s'inquiéter un peu tout de même, mais s'il avait un bon avis concernant celui qui deviendrait un jour son beau-fils. Jane, quant à elle, semblait bien plus sereine sur ce point, débordante d'optimisme. Martin l'était aussi, bien évidemment, mais son côté paternel prenait un peu le dessus, peut-être plus étant donné que c'était la cadette. Joanne rejoignit la table -contente de savoir qu'elle ait pu manquer le reste de la conversation, s'ils parlaient encore d'elle. Tout le monde se souhaita bon appêtit, et les cliquetis des fourchettes sur les assiettes commençaient à se faire entendre. Pendant un moment, il n'y avait que ça, pas de conversation particulière - ce qui signifiait certainement que le plat était très bon. Jamie avait l'air de se régaler. A la fin du plat principal, Martin et Jane débarassèrent, suppliant à leurs hôtes de rester installé. La jeune femme posa sa main sur la cuisse de son compagnon, y effectuant de tendres caresses. A voix basse, elle dit. "Pardonne mon Papa, il aimerait juste s'assuer que tu es le bon." avec un sourire rassurant. "J'espère qu'il ne te dérange pas trop avec toutes ses questions. Mais il est quelqu'un de très gentil. Il s'attache très vite aux gens qu'il veut apprendre à connaître." Il n'allait peut-être pas non plus devenir un père de substitution pour Jamie -enfin, qui sait ce qui pouvait arriver-, mais il tâchait toujours de bien intégrer les nouveaux membres de la famille, il était très réceptif. Joanne l'admirait beaucoup, elle adorait son père plus que tout -et sa mère aussi, bien évidemment. "Tu vas bien ?"
Finalement, je suis autant dans l'embarras que Joanne face au discours que me rapporte sa mère. Elle n'hésite pas à mettre l'accent sur mon physique -sûrement parce que sa fille fait de même auprès d'elle, mais elle est plus discrète à ce sujet face à moi. La mère glisse également un compliment. Je m'efforce de ne pas finir rouge comme une pivoine, mais j'imagine que mes joues ont pris des couleurs. Peu de personnes comprennent que je m'entretienne autant juste pour moi, et non pour attirer le regard des femmes -regards que je suis toujours incapable de voir lorsqu'ils se posent sur moi avec une certaine envie. Ma pensée est assez pratique. Si les gens savaient à quel point le métier de journaliste, et de rédacteur en chef, peut être épuisant, ils sauraient qu'il est important d'être en grande forme. Quoi qu'il en soit, je baisse un instant les yeux, gêné. Je le suis d'autant plus lorsque Martin en vient à mon éternelle incapacité à exprimer mes émotions. Je suppose qu'elle s'est quand même bien gardé de leur dire de quelle manière je les exprime, en dehors des mots. Je ne pensais pas que cela pouvait participer à un quelconque charme, me voyant plutôt comme une immense source de frustration. Après tout, ce n'est pas de tout repos de devoir essayer de me décrypter à longueur de temps, même si Joanne s'en sort vraiment bien. Tombe une avalanche de compliments qui me sont rapportés par le père de la jeune femme et m'obligent à fixer mon assiette -tout en remerciant le ciel pour être déjà assis. Je jette un coup d'oeil du côté de Joanne qui, comme moi, n'est plus très à l'aise. Et la voir avec cet air enfantin me fait sourire doucement. Puis je m'efforce de regarder son père qui continue son discours, évoquant de l'admiration de la part de sa fille pour moi. Je fronce les sourcils, la regarde. De l'admiration pour quoi ? Je n'ai strictement rien fait qui mériter d'être admiré. Et sûrement pas pas elle. Je n'ai pas un regard de sa part, pas une once de réponse à mon air interrogateur ; Joanne s'excuse et s'éclipse jusqu'à la fin de la conversation. Je reste un peu perdu dans mes pensées pendant que ses parents débattent de son état de santé. Mais Jane a raison, elle va bien. Elle a plus besoin d'optimisme que de remarques lui rappelant son état. Je sors de ma torpeur lorsque j'entends mon nom. Mon attention regagne Martin. Ils sont donc au courant pour l'avortement. Sur le moment, je ne sais vraiment pas où me mettre. Je ne sais pas comment peut se sentir un père en sachant que sa fille aurait pu être enceinte aussi vite d'un homme qu'il n'avait jamais rencontré. Je ne sais pas s'il peut m'en vouloir que cela soit arrivé. Peut-être même qu'il en sait plus que moi sur l'état d'esprit de Joanne à ce sujet. A vrai dire, une montagne de questions déferlent dans mon esprit. C'est un peu beaucoup pour tout le monde. J'adresse un sourire trop faible à Jane qui tente de rappeler que sa fille est heureuse avec moi. « Je l'espère. » je murmure avant de me servir un verre d'eau pour faire diversion. Je fais tout pour, et je ne suis jamais sûr que cela soit vraiment le cas. Je pense toujours que je ne suffit pas. Qu'elle souhaite bien trop être mère pour que je suffise à moi seul. Joanne revient à table, et je lui adresse un sourire de façade afin qu'elle ne se doute pas de la tournure prise par la conversation à ce sujet. Elle n'apprécierait pas d'être encore vue comme une petite poupée malade. Elle se donne bien trop de mal pour essayer d'être forte. Je profite du repas pour souffler. Tout le monde est trop occupé avec son assiette pour m'engloutir sous de nouvelles questions. Ne pas avoir à user de ma voix me fait du bien, ne pas avoir à parler de moi non plus. Je me contente de savourer les lasagnes, n'oubliant pas de complimenter Jane sur sa cuisine. Il lui faut beaucoup insister pour que je daigne rester assis pendant qu'elle et son mari débarrassent la table lorsque le plat est terminé. Je me retrouve un temps soit peu seul avec Joanne. Nous retrouvons un peu de ce contact physique qui m'est cher et me manque terriblement lorsqu'elle se trouve près de moi dans qu'il ait lieu. Ma main se pose sur la sienne. « Et tu crois que je passe bien le test ou je vais finir recalé ? » je demande avec un léger sourire. Tout se passe bien, je suis assez confiant. Et bien plus à l'aise qu'à notre arrivée. « Tu sais, il n'y a qu'un seul sujet que je préfère éviter, et il a l'amabilité de le respecter. » je réponds, haussant les épaules. « Je n'en demande pas plus. » Du reste, il peut m'embêter autant qu'il le veut à propos du travail, de la peinture, de mon argent s'il le veut, de ce que je ferais pour sa fille. Je répondrais à tout, sans broncher. Je suppose que je suis un peu là pour ça. Et que c'est un mal nécessaire pour la suite de cette relation. Je ne pense pas que Martin puisse s'attacher vite à la personne qui a envoyé un homme à l'hôpital, puis levé la main sur sa fille après l'avoir mise enceinte, mais si je peux effacer ces événements en faisant preuve de bonne foi, cela sera déjà un bon début. « Ca va, ne t'en fais pas. Un peu fatigué. Et puis, ça reste éprouvant comme expérience. » j'avoue avec un sourire en coin. « Tes parents sont des gens bien. » j'ajoute, légèrement envieux. Qui sait ce que je serais devenu si mes parents avaient été la moitié de ceux de Joanne ? Non, je n'y pense pas. Toutes mes épreuves m'ont conduit ici, jusqu'à elle. Je moindre changement dans mon passé aurait pu aboutir à une réalité où je ne l'aurais pas rencontrée. Tout m'a conduit à elle. « Je ne pensais pas que tu leur aurait parlé de l'avortement. » Mon regard se pose sur les Prescott, évaluant le temps qu'il nous reste pour discuter un peu seul à seul -et quelque chose me dit qu'ils se traînent afin de nous laisser ce luxe. « Et toi, comment tu vas ? » je demande en retour, serrant un peu plus sa main dans la mienne. Ses parents nous tournent même le dos. J'en profite donc pour me pencher vers Joanne et déposer un baiser sur ses lèvres. « Je t'aime. » je murmure avec un sourire, pile avant que Jane revienne, non sans un regard complice, pour déposer le dessert sur la table.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne était satisfaite de ne pas avoir entendu la fin de la conversation, et elle ne voulait rien en savoir de toute manière. Elle n'aimait pas trop lorsqu'on parlait d'elle globalement, que ce soit en bien ou en mal. Elle était toujours mal à l'aise pour ce genre de choses, elle ne savait pas vraiment pourquoi. La peur du jugement, certainement, ou de décevoir - ce qui était pour elle la pire chose à commettre. Le jeune couple avait un moment à eux deux, l'espace de quelques instants. Jamie demandait s'il avait fait bonne impression ou non. La belle blonde lui sourit tendrement, en lui répondant à voix basse. "J'ose espérer que oui. Je ne sais pas vraiment de quelle manière ils vont réagir. Après le divorce et tout le reste surtout..." Ses épaules se haussèrent, elle était incapable de donner une réponse claire. "Je n'ai pas la moindre idée si leurs exigences ont changé ou non. Ce n'est pas impossible qu'ils demandent à te parler en privé. Enfin, je veux dire, sans moi. Ils avaient fait ça avec mon ex-mari, mais il ne m'avait jamais dit ce qui a été échangé." Joanne ignorait s'il y avait des points à revoir, ou s'il avait été débordé de compliments, si on lui avait fait part d'une certainement méfiance. Elle n'en saura certainement jamais rien. "Papa n'est pas du genre à forcer la main à qui que ce soit. Il est vraiment patient, et sait comprendre les choses. Il a bien remarqué de lui-même que ta vie n'a pas été toute rose. Il a le compas de l'oeil, pour décrypter ce genre de choses." Elle lui sourit, gênée. "Mais je pense qu'un jour ou l'autre, il ira chercher une raison de ce qui a pu se passer entre nous, pourquoi tu es comme tu es. Mais, tu peux être certain qu'il attendra l'information de ta part. Il n'ira jamais la chercher lui-même." La cadette Prescott se doutait que ce n'était pas un moment agréable à vivre pour son compagnon, à être enterré par une multitude de questions. Elle se faisait un peu de soucis pour lui. Et elle avait raison, au vue de la réponse que le bel homme venait juste de donner. Ses yeux bleus le regardaient tendrement, alors que sa main libre vint doucement caresser ses cheveux. "Je les aime beaucoup." lui répondit-elle après que Jamie ait parler des parents Prescott. Comme si cela ne s'était pas remarqué, mais la jeune femme trouvait bon de le dire. Ce n'était pas quelque chose d'évident pour Jamie, qui avait une relation tout à fait différente avec ses propres parents. Comme deux extrêmes qui découvraient peu à peu l'autre. Deux mondes différents, jusque dans l'éducation des enfants. A se demander comment sera celle des enfants de Jamie et Joanne. S'ils en avaient. BIen évidemment, il parla du fait que Joanne ait mentionné l'avortement à ses parents. "Je suis désolée, Jamie. J'aurais du t'en faire part." dit-elle en baissant les yeux, se sentant coupables. "Je n'arrive pas à leur mentir, ou à prétendre que ça va bien. C'était comme pour la fausse-couche, ils avaient deviné qu'il y avait quelque chose en plus mais ne voulaient pas en parler avec moi de peur que cela m'enfonce davantage. Ils ne me l'ont avoué que très récemment. Il suffit de pas grand-chose pour simplement savoir que quelque chose ne va pas." Ils connaissaient leur fille par coeur, ses réactions, ses manières d'agir selon ce qu'il se passe, ses mimiques, tout. "Je vais bien. Ils m'avaient beaucoup manqué, ça me fait plaisir de passe un peu de temps avec eux, malgré les raisons évidentes de cette invitation."dit-elle en souriant. Jamie se pencha sur elle afin de l'embrasser doucement et lui partager quelques mots d'amour à sa belle, qui le lui retourna verbalement, et un sourire discret. Jane posa le dessert sur la table. Il s'agissait d'un cake au citron. Elle confessa qu'elle comptait préparer une autre viennoiserie, mais la crème pâtissière n'avait pas donné -un échec rare-, et elle n'avait pas eu le temps d'aller racheter tous les ingrédients nécessaires avant que ses invités n'arrivent. Elle s'en voulait beaucoup, mais Joanne la consola en disant que toutes ses pâtisseries étaient délicieuses, qu'importe ce qu'elle pouvait faire. Ce qui était on ne peut plus vrai. Tout le monde était servi, Martin s'était occupé de ramener tisane ou café pour ceux qui le désiraient. Joanne avait opté pour une tisane à la verveine. Le dessert passait, accompagné de conversations diverses. Une fois les assiettes vides, le père Prescott s'adressa à Jamie. "Pouvons-nous te parler quelques instants ?" Il invita sa femme et lui à se rendre sur la terrasse. "Ne touche à rien ma chérie, je débarrasserai et ferai la vaisselle après." "Ne t'en fais pas, Maman, ça ne prendra qu'un instant." dit-elle au moment où Jane s'éclipsa. La fameuse conversation mystérieuse, c'était à prévoir. Tout ce qu'elle pouvait deviner, c'était que c'était assez sérieux pour le moment, mais personne ne semblait être en colère, ou quoi que ce soit. Ne sachant combien de temps ça allait durer, la belle blonde commença à rassembler les assiettes et les couverts, dégageant peu à peu la table de la salle à manger, rangeant tout à sa place et disposant le matériel sale dans le lave-vaisselle.
J'espère aussi avoir réussi à faire une bonne impression. Tout du moins, avoir réussi à écarter quelques unes de leurs craintes à mon sujet. Je suppose que je ne dois pas m'attendre à avoir la bénédiction des parents de Joanne dès ce soir. Mais du moment qu'ils ne me jettent pas hors de la vie de leur fille, je saurais faire avec leurs appréhensions. J'aurais sûrement droit au tête-à-tête dont m'a parlé la jeune femme, et mon coeur tambourine à cette idée. Je me sens comme David face à deux Goliath. Ils reviennent d'ailleurs autour de la table lorsque le dessert est servi. Un cake au citron, aussi simple que bon. La tisane allant avec est la bienvenue. Je continue de me faire aussi petit que possible, répondant à une question par-ci par-là, mais je préfère rester légèrement en retrait afin que Joanne aussi puisse profiter du dîner avec ses parents sans que tout ne tourne autour de moi. De toute manière, à table, comme le reste du temps, je ne suis pas le plus bavard qui soit. Les parts de gâteau terminées, seules quelques secondes de silence me servent de répits avant que le père de Joanne ne formule son souhait de me parler. J'acquiesce d'un signe de tête, la gorge trop serrée pour articuler quoi que ce soit, puis le suit ainsi que sa femme sur la terrasse. J'adresse un faible sourire à la jeune femme, histoire de dire (et de me faire croire) que tout se passera très bien. « C'est difficile de avoir quoi penser, Jamie. Je veux croire dans ce que ma fille a dit de vous, et dans la personne que j'ai face à moi. Mais je reste perplexe. Tu nous excuseras d'être aussi méfiants, mais vu la manière dont s'est terminée son premier mariage, nous voulons être sûrs de confier notre fille à quelqu'un de bien. » Martin annonce la couleur avec un air à la fois sérieux et doux, si bien que je parviens à garder mes moyens. Jane renchérit ; « Et vous avez l'air d'être quelqu'un de bien Jamie, on ne dit pas le contraire. » J'esquisse un sourire qui disparaît aussitôt. « Mais tout ce qu'il s'est passé dans votre relation me laisse encore perplexe. » reprend le père. Je déglutis, baisse un instant le regard, murmurant un ; « Je comprends. » Mes doigts se lient entre eux afin que ma nervosité de me pousse pas à les laisser trop s'agiter. Je mordille ma lèvre, cherchant mes mots, avant de relever mes yeux vers les Prescott. « Joanne et moi avons parfaitement conscience de vivre une relation complètement hors normes que très peu de personnes parviennent à comprendre, ou simplement à accepter. Tout va très vite, tout est très intense. Nous sommes partis pour Londres quelques semaines à peine après notre rencontre, puis elle a emménagé avec moi à peine quelques semaines plus tard. Tout a toujours l'air fou ou complètement déraisonnable, mais je crois que nous ne faisons que fonctionner à l'instinct, en répondant à un besoin de l'autre. » Je ne nourrit pas vraiment d'espoir à l'idée qu'ils puissent comprendre cette relation que je leurs dépeins, et dont leur fille leur a longuement parlé. Je ne connais pas leur histoire, mais je sais que celle de Joanne et moi ne s'entend pas tous les jours. Et j'ai l'impression que mes mots sont faibles, que mes idées sont confuses, que rien de ce que je dis ne peut vraiment les éclairer. « J'aimerais vraiment réussir à vous faire comprendre à quel point je l'aime, et ces sentiments m'ont l'air si énormes que je ne peux pas les contenir. » Je suis toujours à l'étroit dans ce corps, le coeur menaçant d'exploser sous la pression d'émotions qui lui avaient été non seulement inconnues, mais qui l'ont envahit avec une puissance démesurée. « Rien que la manière dont tout à commencé présageait quelques tumultes, c'est vrai, mais nous sommes heureux à notre manière, et aujourd'hui encore plus qu'avant. » je conclus, faisant toujours autant preuve d'honnêteté et de bonne foi, puisque cela a toujours payé jusqu'à présent. Je crois vraiment que Joanne et moi avons trouvé une meilleure harmonie depuis que nous nous sommes retrouvés. Nous sommes plus clairs sur notre relation, plus stables, un peu plus raisonnables malgré tout, et nous voyons l'avenir en regardant dans la même direction. Quelque chose a changé, et c'est pour le mieux. « Je crois savoir pourquoi elle est revenue vers vous. Mais je dois m'assurer que vous ne lèverez plus la main sur elle. » Je lève sur Martin un regard suppliant de me croire. « Je vous assure que ça n'arrivera plus jamais. Je… » Après quelques secondes d'hésitation, même si ça ne m'enchante pas, je leur explique ce que le médecin de Joanne m'a diagnostiqué, l'échec du premier traitement, et le fait que le nouveau marche très bien, que je suis suivi de près fin qu'une crise comme celle qui nous a séparés n'arrive plus. Ce qui est le cas jusqu'à présent. Je suis plus calme, plus serein, je n'ai plus l'impression d'être un tas de braises qu'un rien peut enflammer. En toute bonne foi, je leur avoue que je ne sais pas pourquoi je suis ainsi. « Mais je suppose que cela a un lien avec les événements qui ont eu lieu à Londres, avec ma famille. Je vous l'ai dit, c'est un sujet délicat… » La mère de Joanne pose sa main sur les miennes, cherchant sûrement à calmer ma nervosité, plus palpable que jamais. « J'espère que tu accepteras de nous en parler un peu plus un jour. » J'acquiesce. Un jour. J'aurais aimé qu'il soit plus simple pour moi d'en parler. Mais je dois aussi m'accorder avec Joanne sur ce que je peux dire ou non au sujet d'Edward. Peut-être que la jeune femme ne m'assimile en rien à lui, mais rien ne m'assure que ses parents feront de même. Martin reprend la parole ; « Quels sont tes projets avec elle ? » Toujours très sincère, je réponds ; « L'épouser, un jour. Et puis nous parlons parfois d'avoir des enfants, de fonder notre propre famille, et c'est vraiment ce que nous désirons. » Je devine un peu de surprise dans leurs yeux. « Si tôt ? » Là encore, je me lance dans quelques explications, commençant par leur assurer que ne faisons qu'y songer pour le moment. Je leur raconte, très brièvement, qu'avant l'avortement de Joanne, je ne voulais pas avoir d'enfants. Que cet événement m'avait fait prendre conscience que je souhaite vraiment avoir une famille avec elle. « Elle le sait déjà : à mes yeux, depuis le début, elle est la femme de ma vie. » Je crois qu'en dehors de mes longues conversations avec Charlie et Lehyan, je n'ai jamais autant tergiversé à propos de ma relation avec Joanne de manière aussi ouverte. Je me dis que c'est nécessaire, c'est ce qu'il faut pour que ses parents puissent voir à quel point je tiens à elle. Quelques secondes de silence flottent dans l'air. Puis Martin appelle sa fille ; « Joanne ! Rejoins-nous, ma puce. Trinquons une dernière fois avant que Jamie ne veuille s'enfuir en courant. » Il me sourit, et je ne peux m'empêcher de rougir un peu. C'est vrai que j'ai hâte de rentrer à la maison. J'apprécie les parents de la jeune femme, néanmoins, ce dîner éprouve mes nerfs. Notre bulle me manque.