La foule se pressait et s’entassait dans l’aéroport. Bientôt, on appellerait le numéro de leur vol. Entre la durée d’embarquement et le vol, dans quelques heures, ils seraient à Sydney. Eddie et Callie, le frère et la soeur, réunis pour quarante-huit heures tout entières. Comme à son habitude, Callie était prête depuis plusieurs heures. Elle avait enfilé une jolie robe jaune soleil, achetée pour l’occasion. Elle était impatiente de retourner à Sydney. En toute honnêteté, elle ne se souvenait pas énormément de la ville. Par contre, des bribes de souvenirs de son enfance resurgissaient, parfois, en repensant à leur vieille maison. Du fond du coeur, Callie espérait qu’elle soit toujours là. Les parents des jeunes Yang lui avaient donné l’adresse, mais eux-mêmes ne savaient pas ce qu’ils trouveraient là-bas. Elle jeta un oeil à son portable, Eddie devrait arriver sous peu. Callie se hissa sur la pointes de ses tennis blanches à la recherche d’une tête brune. Ou peut-être devait-elle chercher une tête rousse, bleue, ou rouge. Bientôt, elle obtint sa réponse, Callie. C’est un Eddie bel et bien brun qui franchissait les portes vitrées. « Oppa ! » Lança-t-elle tout sourire. C’était vrai, vrai de vrai, il était là, ils allaient à Sydney rien que tous les deux. Elle se rua dans sa direction, l’attrapant par le cou. « Tu vas bien ? Tu as bien câliné les petits ? » demanda-t-elle. Loopy, Poby et Missy avaient été au coeur des préoccupations de son frère pour les prochaines quarante-huit heures. Il faut dire que les matous n’avaient pas pour habitude que leur papa s’absente. Elle observa la mine fatiguée de son frère. Un bain de soleil loin de l’agitation quotidienne lui ferait le plus grand bien. « Je t’ai pris un coussin pour le voyage. Tu pourras dormir un peu, je m’occupe de tout. » ajouta-t-elle en souriant. En temps normal, Callie était celle qui écrasait le plus durant les trajets, quels qu’ils soient. Mais cette fois-ci, elle comptait bien placer son frère avant tout, encore plus que d’ordinaire. Elle inspira profondément en fermant les yeux. « Tu sens ? Ca sent… Les vacances ! » Scanda-t-elle en levant les bras au ciel, tout sourire. Certes, des vacances de quarante-huit heures, mais elle comptait bien en profiter, Callie. Elle attrapa Eddie par la main, se dirigeant vers la porte d’embarquement. « Ils ne vont plus tarder à nous appeler, on devrait se dépêcher pour être en tête de file ! » Et l’aéroport, elle le connaissait bien, elle n’eut aucun mal à se faufiler entre les voyageurs pour rejoindre les portes. Impatiente, vous dites ? Heureuse serait plus juste.
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Ses premiers jours off depuis peut-être bien deux ans, si ce n’est pas plus, Eddie en voit enfin la couleur. Il ne s’accorde jamais la moindre pause en dehors du théâtre et de ses cours car il a opté pour une vie où la danse l’occupe sur tous les plans, et si on l’écoute il pourrait tenir encore longtemps comme ça. C’est possible qu’il dise vrai Eddie mais il faut admettre que ces deux jours avec Callie loin du boulot ne seront pas de trop, et elle l’a prévenu suffisamment tôt - il y a deux mois de ça - pour qu’il ait aussi eu le temps de s’organiser. Leur escapade à Sydney est inscrite dans son agenda depuis des semaines et Eddie se réjouit assez de retourner dans la ville qui l’a vu naître et où il a également fait ses années de conservatoire. C’est chargé en souvenirs pour lui, si seulement ça ne l’obligeait pas à prendre l’avion tout irait pour le mieux. Il n’aurait pas dit non à un voyage en train Eddie à la place et pour ça il se serait même presque découvert une conscience écologique, mais il ne peut pas nier qu’un vol de deux heures l’emporte très largement sur un trajet en train de près de quatorze heures. C’est juste qu’il déteste l'idée de mettre sa vie entre les mains d'un inconnu sans savoir si celui-ci a bien dormi, et s'il est réellement en état de piloter l'un de ces monstres volants alors il sortirait n'importe quel prétexte pour y échapper, mais ce n’est pas comme s’il avait le choix ici. Ça lui rappelle ses allers-retours entre Sydney et Brisbane pendant ses études, il n’était jamais bien tranquille quand il fallait embarquer à bord de ces appareils et il ne l’est pas plus aujourd’hui. Ce serait fou qu’il leur arrive quelque chose en l'espace de deux heures mais son karma craint pas mal ces derniers temps, alors dans le doute il éternise un peu les au revoir avec ses chats des fois qu’il ne soit pas de retour comme prévu dans deux jours. Sauf qu’il est une nouvelle fois en passe de se mettre en retard Eddie, et quand on a un vol à prendre c’est à éviter. Il met donc le turbo pour déjouer le temps actuellement contre lui et rejoint finalement l’aéroport dans un timing raisonnable, où il a le plaisir de retrouver sa jeune sœur d’ors et déjà prête à partir.
Eddie accueille son étreinte et dépose un furtif baiser sur son front, un geste affectif que le danseur se permet rarement lui qui n'est pas très démonstratif mais il n'oublie pas la date du jour, il n'a même pas cessé d'y penser depuis qu'il est debout. C'est non seulement la journée internationale du bonheur, mais c'est aussi et avant tout la journée de Callie et à ses yeux c'est tout sauf un hasard si les deux coïncident. « Joyeux anniversaire yeodongsaeng. » Son cadeau il le lui donnera plus tard quand ils seront à Sydney car dans un aéroport il trouve que ça manque terriblement de charme, et d'intimité. « T'es toute jolie en jaune. J'ai pas checké la météo à Sydney mais tu vas apporter le soleil avec toi là-bas c’est sûr. » Ce n'est pas très malin d'avoir fait son sac à l'aveugle sans tenir compte du temps qu'ils auraient une fois sur place, et ça ne lui ressemble pas non plus sachant qu'il peut savoir ça en deux clics sur son téléphone. Certes, mais il faut croire qu'il avait la tête un peu ailleurs en se préparant pour le grand départ et en ce moment ça se comprend assez. « Ça va oui. J'aime juste pas dire au revoir à mes enfants, mais eomma peut bien s'en occuper deux jours. » Il affiche un sourire de façade car ça lui coûte sacrément d'avoir dû solliciter leur eomma pour ça, seulement aucune autre alternative ne s'offrait à lui alors sa fierté il l'a mise de côté pour une fois. Ça le perturbe aussi un peu de ne plus les appeler ses fils comme il l'a longtemps fait mais avec la récente arrivée de Missy dans la famille il faut bien qu'il s'adapte, même s'il se considère toujours comme l'heureux papa de trois adorables boules de poils, ça ne change pas ça. « D'ailleurs tu peux voir que ton vieux frère est à l'heure. » il lui fait remarquer en bombant le torse puisqu'il n'est pas peu fier de lui sur ce coup-là Eddie, c'est suffisamment rare pour qu'il puisse le souligner car elle n'est pas sans savoir qu'il est le roi quand il s'agit de se mettre en retard. Moins bien organisé que lui on ne fait pas. « C'était pas gagné mais j'ai demandé à Wesley de griller deux feux rouges, il était pas serein le pauvre. » Eddie se marre doucement devant la mine déconfite de sa jeune sœur, ce n'était pas une chose à lui dire et il peut déjà anticiper le coup qu'il va se recevoir sur le bras. Disons qu'il ne se voyait pas laisser sa moto devant l'aéroport pendant deux jours alors il s'est arrangé avec l'un des gars du groupe pour qu'il le dépose ce matin, un service qu'Eddie lui revaudra à l'occasion si toutefois il ne fait pas mine de l'oublier très vite. Elle est mignonne Callie, elle a pensé à lui prendre un coussin pour le voyage et cette attention attendrit aussitôt le danseur. « C'est adorable yeodongsaeng mais tu sais je doute de parvenir à fermer l'œil. On parlera plutôt, je préfère. » Déjà parce que le trajet ne sera pas bien long, et aussi parce qu'il n'est pas assez à l'aise en avion pour dormir en ne sachant pas quel sort lui réservent le pilote, les conditions météorologiques, le fonctionnement interne et potentiellement défaillant de l'appareil, en bref tous les facteurs qui peuvent jouer dans la survenue d'un incident éventuel. Penser directement au pire c'est son truc à Eddie, et s'il n'y avait qu'en avion qu'il était comme ça.. Callie laisse entendre qu'ils seront bientôt appelés et c'est vrai qu'avec tout ça leur embarquement est imminent, il s'agirait de ne pas rester plantés là. « Oui t'as raison, allons-y sans tarder. » Ni une ni deux Eddie embarque sa jeune sœur avec lui en direction du comptoir d'enregistrement pour les derniers vérificatifs avant leur vol, et une fois les contrôles effectués il n'ont plus que quelques minutes à tuer avant de laisser officiellement Brisbane derrière eux.
Le plus dur commence maintenant pour Eddie. L'avion vient tout juste de s'élancer dans le ciel brisbanien et il se rappelle que la plupart des accidents aériens surviennent dans les premières minutes suivant le décollage. Il tient donc les comptes dans sa tête en se gardant bien de partager son inquiétude avec Callie, et il s'autorise seulement à respirer une fois que les dix premières minutes sont passées. Un peu tôt pour dire qu'ils ont évité le pire, mais Eddie est déjà un peu plus disposé à se détendre après ça. Pour oublier un peu où ils se trouvent le danseur s'empresse de faire la conversation à sa jeune sœur, car ce jour n'est définitivement pas un jour comme les autres et une pensée l'amuse assez à ce moment-là. « Eomma t'as souhaité un bon vingt-quatrième anniversaire je présume. Elle lâche pas les traditions, j'ai beau lui dire qu'ici ça s'applique pas elle veut rien entendre. » Pendant longtemps Eddie a déploré le fait que leur eomma ne voulait pas se détacher de la vieille tradition du hanguk-nai car ça l'agaçait plus qu'autre chose qu'elle lui associe d'office une année de plus au nom de croyances qu'elle n'a pas su lui inculquer, mais à présent il s'y est fait et il la laisse croire ce qu'elle veut tant qu'elle ne tente pas de le convertir aux mêmes idées - il a capitulé pour ça comme pour tant d'autres choses, et il n'y a au final que pour la danse qu'Eddie n'a jamais cessé de lui tenir tête. « Je crois qu'on sait tous les deux la première chose qu'on va faire quand on sera arrivés. » il reprend en laissant glisser son regard vers Callie à ses côtés, qui lit forcément dans ses pensées là tout de suite car ils ont un projet à Sydney : remonter le temps et revenir sur les traces de leur enfance, des souvenirs par milliers les y attendent même s'il suppose que Callie se souvient moins bien de cette époque que lui. « J'ai envie de croire que notre ancienne maison est toujours là moi. Après tout ça fait quoi, quinze ans qu'on est partis? C'est pas improbable que la famille qui l'avait achetée à notre départ y vive encore. » Il y croit au plus profond de lui Eddie et ça le décevrait qu'en fin de compte la maison ne soit plus là. Et dire qu'il y a fait ses trois années de conservatoire mais n'a pas eu une seule fois la curiosité d'aller voir cette fameuse maison, alors que les occasions n'ont vraiment pas manqué pour ça. Au moins le suspense est total et la surprise garantie, sans qu'ils sachent toutefois si elle sera bonne ou mauvaise.
Déjà cette journée avait un goût de vacances. Une robe couleur soleil, une valise, l’effervescence de l’aéroport et la joie de partir en tête à tête avec son frère. Alors lorsqu’elle le vit, elle ne put réfréner sa joie et lui sauta au cou. Il aurait pu lui dire non, lui dire qu’elle était trop enfantine et irresponsable de prévoir un voyage sur un coup de tête. Mais peut-être était-ce parce qu’elle avait prit sa posture d’adulte, ce jour-là, en expliquant à Eddie qu’il n’avait pas le choix. Ou peut-être était-ce parce qu’au fond de lui, il savait qu’il en avait besoin. Quoi qu’il en soit, il avait accepté de venir, et aujourd’hui, Callie était la personne la plus heureuse du monde. « Joyeux anniversaire yeodongsaeng. » lui souffla-t-il après avoir déposé un baiser sur son front. Le sourire de Callie illumina son visage. « Tu aurais pu te mettre un ruban sur la tête pour l’occasion, oppa. » répondit-elle, taquine. Elle était survoltée. Elle refusait cette idée, mais force était de constater qu’à continuer de la sorte, elle s’effondrerait comme une masse une fois à l’hôtel ce soir. « T'es toute jolie en jaune. J'ai pas checké la météo à Sydney mais tu vas apporter le soleil avec toi là-bas c’est sûr. » ajouta Eddie. Callie qui craignait qu’il ne tique sur la longueur (toujours, selon lui) discutable de sa robe, elle fut agréablement surprise. « Merci. T’es pas mal non plus. On va nous prendre pour un duo de star, tu vas voir. Et rassure-toi, un grand soleil nous attends ! » répondit-elle en jetant sa chevelure de jais derrière son épaule. Habituée des vols, elle avait hésité à venir en jogging et sweatshirt, alias la meilleure tenue de voyage. Mais elle avait prit le parti de miser sur le faible temps de vol pour sortir cette jolie robe. « Tu es bien élégant. Même... Rayonnant. » conclut-elle, effleurant ses cheveux qui tombaient sur son front. Le brun lui allait décidément très bien. « Ça va oui. J'aime juste pas dire au revoir à mes enfants, mais eomma peut bien s'en occuper deux jours. » ajouta-t-il, faisant sourire Callie. Elle était contente que leur mère s’occupe des chats de son frère. Pour lui, c’était ses véritables bébés, autant dire qu’il ne les confiaient pas à n’importe qui. Peut-être que leur relation s’arrangerait doucement ? « D'ailleurs tu peux voir que ton vieux frère est à l'heure. » souligna-t-il. Callie lâcha un petit rire. « J’ai vu ça, oppa. Je vois que tu progresses. » Le congratuler, oui, mais non sans une pointe de pragmatisme, du grand Callie. « C'était pas gagné mais j'ai demandé à Wesley de griller deux feux rouges, il était pas serein le pauvre. » jugea-t-il bon d’ajouter. Callie perdit immédiatement son sourire. Elle se retint de lui taper le bras comme elle savait si bien le faire. Elle serra les dents. Et s’ils avaient été heurtés en chemin ? Callie l’aurait attendu durant de longues minutes, sans parvenir à le joindre. Elle aurait fixé inlassablement son écran de téléphone, vérifié mille fois qu’il était bien en mode sonnerie et non silencieux. Elle lui aurait laissé des tas de messages vocaux et aurait finit par voir la nouvelle sur les écrans géants de l’aéroport. Elle aurait été seule, elle aurait été anéantie, elle n’aurait plus jamais été Callie. Elle ravala ses larmes. Il fallait qu’elle se calme, elle partait bien trop loin dans son imaginaire. Respire, Callie. Eddie est là, il va bien. Certes, mais elle comptait bien lui passer l’envie de recommencer. Elle empoigna sa valise fermement, regard sombre, mâchoire crispée. Elle aurait pu le taper devant tout le monde, tant pis s’il se mettait à bouder ou si tout l’aéroport se retournait sur eux. « 바보 * » murmura-t-elle entre ses dents serrées. Heureusement qu’il se rattrapa sur le programme prévu dans l’avion, autrement, ses larmes serraient revenues à l’assaut. « C'est adorable yeodongsaeng mais tu sais je doute de parvenir à fermer l'œil. On parlera plutôt, je préfère. » répondit-il. C’est vrai qu’Eddie n’était pas particulièrement fan de l’avion. Mais peut-être se surprendrait-il lui-même, qui sait ? Callie savait comme son frère était fatiguée. Cette pause forcée allait peut-être mettre son corps sur « off » quelques jours ? Du moment qu’il revenait à Brisbane en meilleure forme, c’est tout ce qui comptait pour la belle brune. En attendant, l’heure était venue d’embarquer, et les deux Yang s’y attelèrent sans plus tarder.
Comme à son habitude, Eddie était crispé. Callie s’enfonça dans son siège, habituée de ces oiseaux de fer. Eddie, lui, était si nerveux qu’il aurait pu arracher les accoudoirs. « J’ai fait une pensée magique. Il ne nous arrivera rien. » assura Callie. Chaque fois qu’elle prenait l’avion, elle avait toujours le même rituel. Ses pieds ne touchaient jamais les lignes du carrelage du couloir d’embarquement. Mais ça, elle ne l’avait jamais dit à personne. Elle n’en dit pas d’avantage à Eddie, se contentant d’un clin d’oeil. Si elle en dévoilait davantage, cela romprait le charme. A mesure que les minutes passèrent, Eddie retrouva son calme. « Eomma t'as souhaité un bon vingt-quatrième anniversaire je présume. Elle lâche pas les traditions, j'ai beau lui dire qu'ici ça s'applique pas elle veut rien entendre. » lança-t-il. Et il avait visé juste. Callie sortit son portable de sa poche, relisant à nouveau le sms de leur mère. Bien qu’elle lui avait souhaité en face, elle avait jugé bon de lui souhaiter à nouveau pas sms « pour que tu puisses l’avoir avec toi à Sydney et le relire quand tu veux. » « Je crois qu’elle ne lâchera jamais l’affaire. Tant pis, je suis un peu plus grande, dans ce cas. » relativisa-telle en haussant les épaules. « Je crois qu'on sait tous les deux la première chose qu'on va faire quand on sera arrivés. » ajouta Eddie. Oh que oui. Un sourire de malice étira les lèvres de la jeune Yang et elle s’empressa de saisir son sac à dos. Elle en extirpa Le Corbusier et le déposa sur ses genoux. « Oppa, je te présente Le Corbusier. Je l’ai acheté peu avant de partir à Seoul. Il est bien rempli, comme tu peux le voir. Mais j’ai gardé de la place pour ce jour. Je savais qu’il viendrait. » Elle l’ouvrit fièrement sur une double page vide, laissée libre pour leur retour à Sydney. Il n’y avait plus qu’à y coller leurs propres souvenirs. « J'ai envie de croire que notre ancienne maison est toujours là moi. Après tout ça fait quoi, quinze ans qu'on est partis ? C'est pas improbable que la famille qui l'avait achetée à notre départ y vive encore. » ajouta Eddie, optimiste. Callie aussi voulait y croire, et rien ne semblait aller à l’encontre de cette pensée. Elle avait même essayer de rentrer l’adresse sur Google Maps. Hélas, sur place, les clichés n’étaient pas très récents. Au moins, elle savait qu’en deux-mille-dix, leur maison était toujours debout. Coincées contre la reliure de son journal intime, quelques photos données par leurs parents et une adresse notée au dos. « Regarde… » dit-elle en montrant les photos une à une. Sur l’une d’elles, les deux têtes brunes des jeunes Yang. Ils souriaient de toutes leurs dents devant la maison, un imposant prunier en fleurs parsemant le trottoir de pétales roses. « On avait un prunier à la maison ? » Demanda Callie, sceptique. Elle ne se souvenait pas du tout de cela. Elle fut alors un peu déçue. Reconnaîtrait-elle seulement leur ancien foyer ? « Je suppose qu’on ne se souvient pas de beaucoup de choses quand on a six ans. » souffla-t-elle. Elle n’ajouta rien l’espace d’un instant, le regard perdu sur le cliché. « Je me souviens du piano du salon ! » Lança-t-elle, bondissant dans son siège. Un vieux piano droit en bois sombre. C’est sans doute à partir de là que la jeune femme s’était intéressée à cet instrument. Cela n’avait été que le début d’une grande histoire. Ensuite, il y avait eu Dirty Dancing et « She’s Like The Wind ». Callie se remémora alors comme elle s’entêtait à jouer aussi justement que possible, simplement en écoutant les notes du film. Bien entendu, l’affaire avait été plus que compliquée, mais le jeu en valait largement la chandelle. Entre son frère qui s'échinait à répéter les chorégraphies et elle qui tentait tant bien que mal de jouer juste, la maison avait été bien animée.
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Il y a encore quelque mois une escapade de deux jours à Sydney n'aurait pas du tout été envisageable pour le duo Yang, entre Callie qui terminait ses études à l'autre bout du monde et Eddie qui a connu une fin d'année particulièrement chargée au théâtre. Et même lorsque sa jeune sœur lui a parlé de ce mini séjour dans la ville de leur enfance pour son anniversaire et lui a demandé de s'organiser en conséquence le danseur a exprimé certaines inquiétudes, vis-à-vis de son travail surtout. Il ne pensait pas pouvoir se le permettre vu qu'il est sur mille et uns projets en ce moment et pourtant le voilà bel et bien sur le point de s'envoler pour Sydney, avec une Callie toute contente d'être parvenue à le convaincre. Ce ne sont que deux petits jours après tout, en si peu de temps il ne devrait pas y avoir de souci avec son boulot ou même ses chats, l'un et l'autre se trouvant entre de bonnes mains même si Eddie n'a confiance qu'en lui-même pour les gérer. Mais c'était trop important pour Callie de toute façon, il n'aurait pas eu le cœur de lui refuser ça qui plus est pour son anniversaire et en prévoyant le coup deux mois à l'avance. Un anniversaire qu'ils célèbreront comme il se doit une fois sur place, même s'il ne se voit pas attendre d'être arrivés là-bas pour le lui souhaiter. Callie est d'avis qu'il aurait pu marquer le coup en se ramenant avec un ruban sur la tête, une pensée qui le fait aussitôt rouler des billes. Quant à la robe de la benjamine Yang que le danseur vient complimenter il n'a étonnamment rien à redire sur la longueur de celle-ci pour une fois, c'est décidément un jour à marquer d'une pierre blanche. « Oui d'ailleurs un tapis rouge nous attend à la sortie de l'avion. Parce que bon les deux enfants prodiges de retour dans la ville qui les a vu naitre c'est un évènement là-bas, tu imagines bien. » Qui a dit qu'Eddie ne s'essayait pas à quelques traits d'humour parfois ? Bien évidemment les habitants de Sydney se fichent pas mal de les revoir tous les deux même s'ils auront peut-être la chance d'y retrouver d'anciennes connaissances, après tout quinze années ont passé depuis leur départ il y a donc peut-être une infime chance qu'on se souvienne d'eux, surtout qu'ils n'ont l'un et l'autre pas beaucoup changé. Callie le trouve élégant mais il n'a pas cette prétention-là, il tenait juste à s'habiller de façon convenable pour ce voyage très symbolique pour tous les deux mais peut-être qu'il regrettera une fois dans l'avion, notamment le choix de cette chemise qui pourrait rapidement s'avérer assez peu confortable. Et puis il commet une bourde Eddie, le temps d'un instant il oublie à quel point sa jeune sœur est sensible à tout ce qui peut lui tomber dessus alors il s'amuse à lui raconter la pression qu'il a mis à Wesley pour qu'ils rejoignent l'aéroport dans les temps - et surtout les risques qu'il lui a fait prendre sur la route, ce qui vaut à Callie de perdre automatiquement son sourire. Elle ne dit rien, semble même faire tout ce qu'elle peut pour se contenir et à ce moment-là Eddie est bien incapable de dire si elle se retient de pleurer ou de le frapper, mais une chose est sûre cette révélation ne passe pas. Il la connait bien Callie et il peut imaginer ce qui lui passe par la tête en ce moment, ça ne doit pas être joli à voir et son intention n'était pas du tout de la tourmenter juste avant leur vol. « Fais pas cette tête yeodongsaeng ! Je suis arrivé en un seul morceau et en plus on ne ratera pas notre vol, t'as deux raisons de sourire là. » Le danseur continue de prendre les choses avec légèreté tandis que Callie reste drôlement silencieuse, une attitude pour le moins révélatrice du fait qu'elle se bat actuellement contre les pensées que cette situation lui inspire. Des pensées probablement tragiques, dans lesquelles elle doit s'imaginer le pire lui arriver car sans le vouloir Eddie a réveillé l'une des grandes craintes de sa sœur. Et quand finalement elle se décide à réagir c'est juste pour le traiter d'idiot, ce qu'il n'a franchement pas volé car idiot il ne fait aucun doute qu'il l'a été en pensant naïvement que sa remarque allait passer. « Allez Eun-bi.. excuse-moi, c'était stupide. » il souffle avant de la ramener contre lui et de l'y maintenir quelques secondes, car avec tout ça il s'en voudrait presque Eddie. Implorer le pardon de quelqu'un il ne le fait jamais mais ici il a besoin de celui de Callie, besoin de s'assurer qu'il n'a pas gâché leur petit séjour avec son inconscience et besoin surtout de la revoir sourire. Il mériterait des baffes parfois Eddie, ça lui permettrait peut-être de filer un peu plus droit et de songer aussi au poids de ses mots au lieu de les lancer sur les autres comme des missiles. Même Callie se retrouve victime de son indélicatesse, et s'il y a une personne sur cette terre qu'il se soucie de pouvoir heurter c'est bien elle.
Une fois dans l'avion l'assurance du danseur s'envole complètement, laissant place à un début d'angoisse qui ne se dissipera que lorsqu'il sera sûr d'arriver à destination en vie et sur ses deux jambes. Car même là Eddie est incapable de faire confiance aux autres, et ce n'est vraiment pas à lui qu'il faut rappeler les statistiques bien connues concernant les accidents aériens, soi-disant très rares chaque année. Rares mais il y en a pourtant, et lui c'est tout ce qu'il retient. À ses côtés sa jeune sœur tente d'éponger son inquiétude en lui assurant avoir formulé une pensée magique, et s'il n'était pas extrêmement tendu il sourirait certainement en entendant ça car c'est du Callie tout craché. Tout est bon pour ne pas penser au fait que leurs deux vies et celles de la centaine d'autres passagers se trouvent actuellement entre les mains d'un pilote dont il ne connait rien, alors il évoque leur eomma et devine sans mal qu'elle ne s'est encore pas faite prier pour recourir aux traditions en souhaitant un joyeux anniversaire à Callie. « Oui enfin tu restes ma yeodongsaeng. » il s'empresse de répondre à la benjamine Yang qui se targue du coup d'être un peu plus grande, en considérant l'année supplémentaire accordée par Sun-Hi. Callie reste sa petite sœur et il ne s'est pas vraiment fait à l'idée qu'elle avait grandi au point d'être aujourd'hui une adulte elle aussi. Cette idée ne réjouit pas beaucoup Eddie pour des raisons qu'on imagine bien le connaissant, et dans sa tête il continue de l'infantiliser pas mal en dépit du fait qu'elle est à présent sur le point de faire son entrée dans le monde du travail, autrement dit de prendre prochainement son indépendance. Chose encore inimaginable pour lui, et pourtant en passe de se produire plus tôt qu'il se l'imagine. Alors qu'il se demandent à présent si la maison de leur enfance est toujours là où ils l'ont laissée une quinzaine d'années plus tôt Callie fait apparaitre devant ses yeux ce qu'il identifie d'abord comme étant un bouquin, et qu'elle lui présente sous le nom du Corbusier. Un nom probablement pas choisi au hasard, même si le danseur n'est pas sûr de détenir la référence ici. Le regard d'Eddie parcourt les pages jusqu'à cette fameuse double page vide, prévue depuis longtemps pour ce grand jour d'après Callie. Elle a pris avec elle des photos d'époque aussi, que le danseur se plait à redécouvrir non sans éprouver une certaine nostalgie. « Mon dieu tu étais minuscule. » il constate en étirant un tendre sourire face à la petite bouille de Callie, haute comme trois pommes sur le cliché en question. Eddie se tient fièrement à ses côtés, déjà incapable de la laisser seule alors qu'ils n'étaient que des mômes. Elle s'interroge alors sur la présence d'un prunier devant leur maison comme il en apparait un sur la photo, et pour le coup Eddie est un peu confus en voyant ce dernier. « Pour être tout à fait honnête j'avais plutôt gardé le souvenir d'un pommier mais ne me demande pas pourquoi. » Il ne saurait pas justifier ça, c'est simplement l'image qu'il en avait gardé mais apparemment à tort. Callie suppose qu'elle était un peu trop jeune au moment de leur départ pour être capable aujourd'hui de se remémorer beaucoup de choses, et le danseur acquiesce d'un léger mouvement de la tête. « Ça te reviendra j'en suis sûr, quand on y sera les souvenirs ressurgiront par milliers. » Il avance ça avec certitude alors qu'en vérité il n'en sait rien Eddie, peut-être que sa jeune sœur garde simplement moins d'images de cette époque que lui car ils n'ont pas forcément été marqués de la même façon par leurs premières années à Sydney. « Et moi donc ! » il s'exclame à l'évocation du piano dans le salon, dont Callie se souvient parfaitement bien là par contre. « On n'arrivait pas à t'en décoller mais c'est une bonne chose, car sans toi ce piano aurait pris la poussière à coup sûr. » Eddie s'est d'ailleurs longtemps demandé pourquoi ses parents avaient investi dans cet imposant instrument quand ni l'un ni l'autre n'ont pourtant l'âme de musiciens. Une part de lui pense qu'ils espéraient bel et bien susciter une vocation de virtuose chez l'un de leurs enfants, et sans surprise c'est Callie qui s'est montrée la plus réceptive, et de très loin. « Je me souviens de notre chambre aussi. J'insistais pour rapprocher mon lit du tien, je pensais que ça me permettrait de mieux veiller sur toi. » C'était annoncé dès le départ qu'Eddie deviendrait ce grand-frère hyper protecteur, angoissant à l'idée de perdre de vue Callie et il va évidemment sans dire qu'il s'est fait beaucoup de mouron durant les études de celle-ci à Séoul. Par chance le décalage horaire entre l'Australie et la Corée n'est que d'une heure, il pouvait donc à peu près calquer son rythme sur le sien afin d'obtenir des nouvelles aussi souvent qu'il le désirait, et au moment qui l'arrangeait.
Au terme de deux heures de vol, arrivée à Sydney.
Callie avait raison, un grand soleil les accueille à leur sortie de l'avion tandis que le petit duo s'infiltre rapidement à l'extérieur avec l'idée toujours très présente de renouer avec leur ancienne maison. C'est elle qui dispose de toutes les informations pour retrouver celle-ci puisqu'elle est en charge de l'intégralité du voyage, Eddie la laisse donc faire et est bien forcé d'admettre que sa jeune sœur a vraiment tout prévu et s'en sort royalement bien. Elle fournit au chauffeur du taxi l'adresse qui était autrefois la leur, et tous deux croisent à présent les doigts pour ne pas avoir de mauvaise surprise à la fin du trajet. Le véhicule se stoppe au bout d'une dizaine de minutes et Eddie n'ose pas regarder à travers la vitre, car si jamais il s'avère que leur maison n'est plus là ou qu'une autre s'y trouve il ne sait pas comment il l'annoncera à Callie. Mais l'évidence les frappe finalement une fois devant l'imposant prunier qui lui, n'a pas bougé depuis tout ce temps. Il fait de l'ombre à une maison juste derrière, assez petite, habillée de briques rouges et jaunes, d'un porche et encerclée d'une clôture blanche. Cette maison est bien la leur, elle est exactement à l'image qu'Eddie en avait conservé alors il tourne aussitôt sa tête vers Callie en espérant que le déclic a aussi lieu de son côté. « Regarde c'est elle, c'est notre maison ! » Il n'en croit pas ses yeux, même le dire semble surréaliste. Ils ont beaucoup imaginé ce moment l'un et l'autre, sans savoir toutefois comment ils réagiraient réellement une fois devant. « Rien n'a changé c'est dingue, j'ai l'impression de revenir quinze ans en arrière. » C'en est même troublant, on jurerait que le temps s'est arrêté alors que les nouveaux propriétaires auraient pu opérer un certain nombre de changements pendant tout ce temps, quand il pense qu'ils n'ont même pas touché à ce revêtement pour le moins vieillot qui a toujours rendu leur maison très reconnaissable au milieu de toutes les autres. « Tu réalises ? Parce que moi non. » Les souvenirs sont présents en nombre dans son esprit, il se revoit jouer dans ce jardin avec Callie et sa eomma se tenir sous le porche à les surveiller. C'est vieux et pourtant c'est encore très frais pour le jeune danseur, il pensait avoir enfoui en lui une bonne partie de son enfance mais il se retrouve d'un coup capable de restituer un paquet de moments plus ou moins significatifs passés ici. Dans un élan un poil mélancolique il vient saisir la main de Callie, avant d'énoncer la question qui lui trotte dans la tête depuis qu'il a posé les yeux sur cette fameuse maison. « On n'oserait quand même pas sonner, si ?.. » C'est drôle car en temps normal Eddie ne s'interrogerait pas de la sorte, il agirait sans se soucier de rien ni personne mais aujourd'hui c'est Calie qui décide. Il ne sait pas si elle souhaite aller plus loin, et savoir si leur ancienne maison est encore habitée. Lui est assez curieux de le découvrir mais ce ne sont peut-être pas des choses qui se font, et pour le coup ça c'est à sa jeune sœur d'en juger.
« Oui d'ailleurs un tapis rouge nous attend à la sortie de l'avion. Parce que bon les deux enfants prodiges de retour dans la ville qui les a vu naitre c'est un évènement là-bas, tu imagines bien. » lança Eddie, soulignant l’allure de lui-même et de sa soeur. Incroyable, mais vrai, il s’essayait là un touche d’humour plutôt bien amené. Quelle mouche, diable, l’avait piqué ? Un rictus amusé prit place sur le visage de la benjamine, ne manquant pas de rebondir là-dessus. « J’aurais peut-être dû demander au chauffeur de venir nous chercher. » répondit-elle d’une voix exagérément guindée. Elle pouffa de rire, imaginant à quoi ressemblerait leur vie si elle était rythmée par les sorties avec chauffeur, galas et autre soirées mondaines. Elle reprit rapidement son attitude naturelle par la suite. En effet, elle était impatiente de s’envoler vers Sydney avec Eddie. Elle avait été étonnée de le voir à l’heure. Elle était loin d’imaginer le stratagème qu’il avait dû mettre en place pour cela… Elle imagina son frère, passager d’une moto roulant à toute berzingue dans Brisbane. Et cette image ne lui plut absolument pas. La Callie rigolote laissa place à la Callie triste en un claquement de doigt. Pour peu, on se serait cru dans un film d’animation. Imaginez un peu une scène où la colère et la joie se succéderaient pour prendre le contrôle d’un tableau de bord émotionnel géant, et vice-versa. Mais cette fois-ci, contrairement à la dernière fois qu’Eddie avait eu des mots blessant la demoiselle, elle se retint de tout geste déplacé envers son frère. Pourtant, ce n’était pas l’envie qui lui manquait. Son estomac se noua, sa gorge de même. Elle retint ses larmes : elle n’était plus une enfant. C’était son anniversaire. Elle devait agir en adulte responsable. C’est pourquoi elle le traita sobrement d’imbécile. « Fais pas cette tête yeodongsaeng ! Je suis arrivé en un seul morceau et en plus on ne ratera pas notre vol, t'as deux raisons de sourire là. » tentative d’Eddie numéro un pour rattraper le coup. De toute évidence, un coup d’épée dans l’eau ne faisant que décocher un roulement d’yeux de la part de la jeune Yang. « Hm. » marmonna-t-elle. « Allez Eun-bi.. excuse-moi, c'était stupide. » souffla-t-il, profitant qu’elle ne regarde pas pour l’attirer contre lui. Elle resta les bras croisé sous la poitrine, décidée à ne pas lâcher le morceau. Cependant, elle était bien obligée d’admettre que son frère pouvait effacer beaucoup de choses avec une étreinte. Elle laissa retomber mollement ses bras et plaqua son visage contre son torse. « Ne recommence jamais ça. » articula-t-elle d’une voix étouffée, son visage contre sa chemise. Elle ne pouvait pas rester fâchée contre lui bien longtemps. Surtout lorsqu’il la prenait dans ses bras, lorsqu’il l’appelait par son second prénom.
Mais il était maintenant l’heure de se diriger vers les portes d’embarquement. Un a un, ils franchirent les différents portiques et guichets. Callie se laissa tomber dans un soupir de soulagement dans son fauteuil, sourire béat aux lèvres. Dans deux heures, il seraient à Sydney. C’était pour Eddie, que le trajet allait sembler long. Même en évoquant une pensée magique, il ne bougea pas d’un cil. Heureusement qu’ils ne partaient pas pour Paris, songea Callie. En discutant de leur maman, Eddie sembla retrouver, curieusement, un poil d’assurance… et de couleurs. « Oui enfin tu restes ma yeodongsaeng. » souligna-t-il. Oui, Callie avait beau être vieillie d’un an par leur mère, à cheval sur les traditions, elle n’en restait pas moins la petite soeur d’Eddie. « Je le serai toujours. » confirma-t-elle. En même temps, elle n’allait pas le contredire. Cette situation lui avait toujours paru confortable. Peut-être changerait-elle d’avis le jour où elle lui présenterait un petit-ami, mais pour l’heure, elle en était loin. Et puis, ce week-end, tout ne tournerait qu’autour de leur passé, à tous les deux. Callie ouvrit son journal intime sur ses genoux, laissant les souvenirs prendre vie, chacun leur tour. Des photos d’eux bébé, leurs parents, l’océan, le piano, la maison. « Mon dieu tu étais minuscule. » souligna Eddie. Callie sourit pour toute réponse. Encore aujourd’hui, elle restait un petit gabarit. Ce qui retint l’attention de Callie, c’était plutôt le prunier, devant la maison. « Pour être tout à fait honnête j'avais plutôt gardé le souvenir d'un pommier mais ne me demande pas pourquoi. » avoua Eddie. Callie soupira. Difficile de dire si c’était de soulagement, voyant que Eddie non plus ne se souvenait pas de ce détail, ou de la résignation, face au fait qu’elle ne se souvenait pas d’autant de choses qu’elle le pensait. « Ça te reviendra j'en suis sûr, quand on y sera les souvenirs resurgiront par milliers. » assura son grand-frère. Callie opina du chef. Il avait raison, après tout. Parfois, il suffit d’un parfum, d’une chanson pour éveiller des souvenirs dont on ne soupçonnait guère l’existence. « Tu as raison. » souffla-t-elle. Leur regard se posa sur la photo du salon, avec le grand piano droit près de la fenêtre. Là, elle se souvenait clairement. Ses yeux se firent ronds, comme des billes. « Et moi donc ! » Renchérit Eddie. « On n'arrivait pas à t'en décoller mais c'est une bonne chose, car sans toi ce piano aurait pris la poussière à coup sûr. » il avait raison. Callie se souvenait clairement de ce piano et du temps passé à jouer. Nouvelle photo, de leur chambre, cette fois-ci. « Je me souviens de notre chambre aussi. J'insistais pour rapprocher mon lit du tien, je pensais que ça me permettrait de mieux veiller sur toi. » C’est vrai, ça. Callie s’en souvenait maintenant. « C’était bien plus efficace pour effrayer les « Monstres du Dessous du Lit ». » reconnut-elle. « Je me souviens que je me hissais sur ton lit pour que tu me lises des histoires. Tu étais si gentil de me lire tes bandes-dessinées. » reconnut-elle. A l’époque, elle n’y avait guère prêté attention. Aujourd’hui, elle se disait toutefois que l’exercice devait être difficile. Photo après photo, ils retrouvèrent des bribes de leur enfance : le premier anniversaire d’Eddie dans un magnifique hanbok, les jeux dans le jardin, les vacances à Jeju… C’est tout juste s’ils ressentirent les deux heures de vol.
Callie s’étira de tout son long à la sortie de l’aéroport. Il faisait beau, presque chaud. Elle descendit ses lunettes de soleil sur son nez d’un geste. « Bien, allons-y ! » lança-t-elle à son frère. Elle fit signe à un chauffeur de taxi et celui-ci les aida à glisser leur valises dans le coffre. Callie fournit l’adresse de la maison, espérant qu’elle soit toujours debout. Après une poignée de minute le taxi s’arrêta. Callie régla la course et tous deux récupérèrent leurs valises. Le coeur de la jeune femme manqua un bond en voyant la demeure. « Regarde c'est elle, c'est notre maison ! » Eddie semblait être euphorique. Callie était bien plus secouée qu’elle ne le pensait. « Notre maison… » répéta-t-elle. « Rien n'a changé c'est dingue, j'ai l'impression de revenir quinze ans en arrière. » Un sourire s’étira sur les lèvres de la jeune Yang. Elle était là, jaune et rouge, le petit patio bien entretenu, les fleurs resplendissantes bordant le gazon… Et le prunier. « Tu réalises ? Parce que moi non. » « Je n’en suis pas vraiment sûre. » admit Callie. Tout cela semblait si irréel. Avec le soleil à son zénith, la maison semblait nimbée d’une aura chaleureuse, presque divine. C’est comme si le temps s’était figé. C’est la main d’Eddie se glissant dans la sienne qui sortit Callie de sa torpeur. « On n'oserait quand même pas sonner, si ?.. » Callie entrouvrit la bouche mais aucun son n’en sortit. Ce genre d’idée était plutôt du ressort de la benjamine et non de son aîné. « Attends… Non… On ne va quand même pas… ? » Ses derniers mots restèrent en suspens, tandis que son regard se porta sur la porte en bois. « Tu penses que…? » Son regard interrogeait le sien. Son coeur accéléra contre sa poitrine. Doucement, Callie lâcha la main de son frère, hypnotisée par la maison. Elle emprunta le chemin jusqu’à la porte d’entrée. Son coeur tambourinait plus fort, toujours plus fort. Elle se retourna pour jeter un oeil à Eddie. Sa main tremblante s’éleva, venant frapper trois coups fermes contre la porte.
Spoiler:
WIN : Après quelques secondes, les propriétaires, un couple de jeunes parents, ouvrirent la porte. C’est Monsieur qui se posta devant Callie, demandant s’il pouvait la renseigner. Malheureusement, Callie ne parvint pas à articuler grand chose. « Je… Je suis désolée de vous déranger, je… Nous… » baragouina-t-elle en ravalant péniblement sa salive. Sa main farfouilla dans son sac à la recherche de la photo de la maison. L’homme s’en saisit, regardant la photo avant de retourner celle-ci. Au dos, l’inscription d’une date au marqueur noir était présente. Il opina, semblant comprendre les motivations des deux jeunes.
SO CLOSE : Après quelques secondes, une jeune femme ouvrit la porte. Elle était vêtu d’un tailleur bleu marine et se cheveux étaient retenus en arrière par une élégante barrette nacrée. Elle se posta devant Callie, demandant si elle pouvait la renseigner. Contre sa poitrine, elle serrait un porte document affublé du logo « Sydney Living - Estate Agency » Malheureusement, Callie ne parvint pas à articuler grand chose. « Je… Je suis désolée de vous déranger, je… Nous… » baragouina-t-elle en ravalant péniblement sa salive. « Nous avions rendez-vous à 11h30. » La femme face à elle ne sembla pas comprendre ce que disait Callie. « Vous n’êtes pas inscrits sur ma liste, mademoiselle…? » « Yang. Callie et Eddie Yang. » répondit Callie d’une voix pleine d’assurance. Elle pouvait être bonne actrice, quand elle le voulait. La femme chercha sur sa liste et son smartphone. « Je suis désolée, je ne… » « Nous avons fait 4 heures de route pour visiter cette maison… Ne me dites pas que nous sommes venus pour rien ! Eddie ! Tu entends ça ? » Cela lui fit tout drôle d’appeler son frère par son prénom. Elle espérait qu’il rentre dans son petit jeu toutefois.
FAIL : Personne ne vint ouvrir. Même en s’y risquant une seconde fois. Et regardant par la fenêtre sur rez-de-jardin, Callie constata que la pièce était vide. Au mur, des traces carrés et rectangulaires témoignaient de cadres ayant été longuement suspendus. Au sol, le parquet clair ne brillait pas. Pour cause, on pouvait voir, par les raies de lumières, la poussière flotter mollement dans les airs. Callie poussa un petit soupir de déception. « C’est vide. » lança-t-elle à Eddie. Elle se retourna et se dirigea vers lui. « Je suppose qu’elle sera habitée bientôt. Je ne vois pas de pancarte « à vendre » ».
ÂGE : des milliers d'années, mais je suis bien conservé. STATUT : marié au hasard. MÉTIER : occupé à pimenter vos vies, et à vous rendre fous (a). LOGEMENT : je vis constamment avec vous, dans vos têtes, dans vos esprits, et j'interviens de partout, dans vos relations, dans vos joies, vos peines. POSTS : 31460 POINTS : 350
TW IN RP : nc PETIT PLUS : personne ne sera épargné, c'est promis les chéris.AVATAR : je suis tout le monde. CRÉDITS : harley (avatar), in-love-with-movies (gif) DC : nc PSEUDO : le destin. INSCRIT LE : 15/12/2014
The sunset glow on my time machine Freeze this moment In the gap between the two worlds I want to leave a trace of you and me
Callie a raison, c’est un idiot. Lui faire un coup pareil le jour de son anniversaire mais où a-t-il la tête au juste ? Son intention n’est évidemment pas de la blesser mais il néglige totalement sa sensibilité à ce moment-là, alors qu’il sait pourtant que sa sœur est reine quand il s’agit de se faire du mouron pour lui. Il le lui rend bien d’ailleurs, c’est même la base de leur relation de s’en faire très facilement l’un pour l’autre. Eddie n’avait vraiment pas besoin de lui dire ça, car à quoi bon l’inquiéter pour rien alors qu’il est arrivé en un seul morceau à l’aéroport ? Pourquoi infliger ce genre d’image à Callie à quelques minutes de leur vol, et un jour aussi symbolique que celui-ci. C’est la manie qu’il a de ne jamais peser ses mots avant de les jeter à la figure de son interlocuteur, Eddie n’a pas le moindre recul dessus et il s’étonne ensuite qu’ils puissent blesser ou être mal perçus. Il ne considère pas assez leur effet sur les autres, et depuis le temps il faut croire qu’il n’a toujours pas retenu la leçon. Callie ne mérite pas ça, il la voit vraiment affectée et il se sent comme le dernier des cons, qu’il est de toute évidence ici. Alors il bataille pour tenter de la faire sourire mais c’est laborieux, elle lui en veut et n’est certainement pas prête à lui passer cette nouvelle indélicatesse comme ça. Il finit donc par s’excuser, et elle sait qu’il ne le fait pas facilement. C’est sincère pourtant, la dernière de ses envies est de la voir triste alors qu’ils s’apprêtent à rejoindre la ville de leur enfance pour deux jours censés être mémorables. Et finalement ce sont ses gestes, plutôt que ses mots, qui semblent porter leurs fruits et apaiser la benjamine Yang. Elle lui demande de ne pas recommencer et il faut espérer que cette fois Eddie imprimera la chose. Il a la volonté pour ça mais il reste profondément maladroit avec tout ce que ça implique, comme de balancer ce type de remarques et tant d'autres à la volée sans réaliser sur le moment leur impact. Mais il veut se convaincre, et la convaincre qu’il fera davantage attention à l’avenir. Croire que ça lui servira de déclic cette fois, même si sa prochaine gaucherie n’est peut-être pas loin après ça. « Promis. » il souffle en la serrant tendrement contre lui et ce n’est pas une promesse dans le vent, c’est en tout cas ce qu’il se dit en la formulant mais Eddie reste Eddie.
L’avion reste la seule véritable phobie du danseur mais sa jeune sœur parvient à lui faire oublier où ils se trouvent en les replongeant elle et lui dans les souvenirs de leur enfance. Des photos d’eux tous petits jusqu’à leur adolescence qui les replacent inévitablement dans les premières années de leur vie à Sydney, au temps de l’insouciance. Eddie se laisse transporter car il n’avait pas revu ses photos depuis un bail, et c’est un plaisir pour lui de se remémorer tout ça puisqu'il a toujours dit que ses meilleures années c’est à Sydney qu’il les avait passées. Son attachement pour cette ville est indescriptible car en dehors du fait d’y avoir grandi c’est aussi là qu’il a effectué ses années de conservatoire, et là qu’il a fait certaines des rencontres les plus importantes de sa vie. Il n’est pourtant pas de ceux qui se retournent volontiers sur le passé mais ici il faut croire qu’il en a besoin, comme s’il cherchait à se rattacher à quelque chose qu’il aurait le sentiment d’avoir perdu. Ce n’est pas si vieux tout ça, et pourtant il a l’impression que c’était dans une autre vie pour lui. Il n’a plus rien à voir avec le jeune garçon sur ces photos, alors qu’en comparaison Callie n’a vraiment pas changé. Elle est la même qu’à l’époque, tout du moins dans son regard à lui que l’on sait très peu objectif la concernant. « Tu étais si mignonne, et si innocente. » Elle l’est toujours Callie, en tout cas mignonne car innocente.. dans sa tête oui, c’est encore le cas mais qu’en est-il vraiment ? Sa sœur est une femme aujourd’hui même s’il a beaucoup de mal à l’admettre, et encore plus à l’accepter car il ne l’a pas vue grandir. « Satanés monstres il était pas question qu’ils viennent t’embêter. » il réplique dans un sourire presque mélancolique, alors que sa jeune sœur lui rappelle la coutume qu’il avait de l’accueillir tous les soirs sur le bord de son lit pour lui lire des histoires. Et pas n’importe lesquelles, il ne risque pas de l’oublier ça non plus. « Mais oui je m'en souviens très bien. J'avais toute une collection de Bongo Comics, j’ai vraiment l’impression d’avoir grandi avec les Simpson. » Ce n’est pas qu’une impression à vrai dire, même si pendant longtemps il ne les a connus que sur papier puisque leurs parents ont rechigné un moment à l’idée d’investir dans un téléviseur. Ils ont néanmoins fini par céder quand ils ont estimé que les enfants devenaient assez grands pour ça mais ils le regrettent encore aujourd’hui, sachant que cet achat a permis sa grande révélation pour la danse. Tout est parti de là, et s’il n’était pas tombé par hasard sur ce fameux programme nul ne sait si Eddie aurait développé plus tard et d’une autre manière cette passion qui l’anime depuis maintenant douze ans. « Qu’est-ce qu’elles sont devenues d’ailleurs ces bandes dessinées ? » il s’interroge à haute voix, n’ayant pas le souvenir de les avoir revues récemment. Quand il a quitté le foyer familial pour vivre dans son premier appartement Eddie a pourtant emporté un tas d’objets liés aux différentes époques de sa vie, mais ces bandes dessinées il sait qu’il ne les a pas prises avec lui. Il ne pourrait pas dire où elles se trouvent aujourd’hui, si toutefois elles n’ont pas fini à la poubelle un beau jour sans qu’il n’en sache rien. « Appa les a sûrement bazardées. » Maintenant qu’il y pense ça ne le surprendrait pas car leur père ne comprenait pas l’intérêt qu’il pouvait avoir pour ce genre de lectures. Il aurait préféré qu’Eddie lise de vrais bouquins mais pour capter l’attention d’un gamin qui se déconcentre si vite il fallait impérativement une narration graphique et un récit séquentiel, ainsi que l’univers délirant de Matt Groening dont il a toujours été fan. « C’était le bon temps en tout cas. » il vient conclure tandis que la nostalgie se ressent nettement chez lui. C’était l’époque où tout était encore simple, y compris dans les rapports avec ses parents. L'époque où ils n’avaient à se soucier de rien, ou presque.
Avec tout ça il ne voit pas le vol passer et leur arrivée à Sydney se fait plus vite qu'il ne l'aurait cru, ce dont Eddie ne risque pas de se plaindre. Leur première mission une fois sur place consiste à retrouver la maison qu'ils occupaient à l'époque, l'adresse ils l'ont encore parfaitement en mémoire comme s'ils l'avaient quittée hier alors que quinze années ont passé depuis qu'ils ont franchi le petit portail à piquets blancs pour la dernière fois. Et une fois cette maison devant leurs yeux le duo constate qu'elle n'a pas du tout souffert du temps écoulé, elle est exactement telle qu'ils l'avaient laissée et c'en est même perturbant pour Eddie qui s'était imaginé qu'elle aurait tout de même un peu changé du fait d'avoir notamment eu de nouveaux propriétaires. Une famille l'avait achetée mais se pourrait-il qu'ils y vivent encore ? Il y a forcément une chance mais Eddie ne saurait pas l'estimer, et à présent il lutte contre l'envie d'aller vérifier ça. Le danseur lance l'idée plutôt sérieusement mais il n'envisage rien sans l'accord de Callie, car si elle considère que ce n'est pas la chose à faire il ne les entrainera pas tous les deux là-dedans. Il l'observe et se rend bien compte que cette idée la travaille aussi, elle en a probablement autant envie que lui mais une certaine appréhension demeure chez l'un et l'autre. Est-ce que ça se fait, au moins, d'aller toquer chez les gens comme ça sous prétexte qu'ils habitaient cette maison quinze ans plus tôt ? Il n'en sait rien mais la question est finalement vite réglée, Callie s'avance alors jusqu'à la porte et y frappe plusieurs coups. Trois, il fait les comptes deux petits mètres derrière elle et s'il n'est pas à ses côtés c'est parce qu'il songe à la première image qu'auront ces gens en ouvrant leur porte. Callie inspire confiance avec son visage d'ange, tandis que la première impression qu'on se fait de lui est souvent mauvaise parce qu'il est naturellement nonchalant et ne sourit pas, alors il se tient en retrait c'est sûrement mieux. Plusieurs secondes s'écoulent, le temps lui parait bien long et il suppose que c'est encore pire pour Callie qui fait face à cette porte sans que rien ne se passe. « Alors ? » il demande d'une voix légèrement insistante car c'est calme, bien trop calme à son goût. « Rien ?.. » Elle n’a toutefois pas besoin de lui répondre car très vite il comprend Eddie. Il comprend à sa tête qu’elle tourne vers lui et au regard qu’elle lui lance qu’il n’y a personne et que cette maison n’est même sûrement plus habitée du tout. Ils se sont emballés pour rien alors qu’ils y croyaient certainement l’un comme l’autre, lui en tout cas avait vraiment commencé à y croire. Callie fait le tour pour regarder par une fenêtre et lui indique que la maison est vide, alors il la rejoint sans attendre avant de passer un bras autour de ses frêles épaules. « Oh Callie je suis désolé. » Désolé oui, il endosse la responsabilité de tout ça comme si c’était de sa faute si personne n’est venu ouvrir, et ce parce qu’il misait beaucoup sur ce retour en enfance pour faire plaisir à sa sœur. Eddie réalise qu’il ne va pas pouvoir lui offrir un tour de leur ancienne maison et ça le rendrait presque amer, il espérait tellement qu’elle soit encore habitée et il sait que Callie aussi, il la sent déçue même si elle fait en sorte de ne pas trop le montrer. « Je peux t’emmener dans le parc où on allait toujours jouer sinon, ou devant notre ancienne école. Que veux-tu faire ? Dis-moi. » Il ne veut pas en rester là Eddie car cette maison n'est pas l'unique chose les rattachant à Sydney, les lieux emblématiques pour eux dans cette ville ne manquent pas et il est prêt à l'emmener dans chaque endroit avec lequel elle désirera renouer. « Quitte à être revenus ici autant récolter un maximum de souvenirs, on peut aussi parcourir le quartier pour voir si nos voisins sont toujours là. » C'est une idée ça aussi, après tout les Yang étaient bien intégrés dans ce quartier et pas mal de gens doivent encore se souvenir d'eux s'ils ne sont pas tous partis depuis, bien sûr. « Tu te souviens de Madame Ross ? C'est dingue ce qu'elle t’adorait. Moi elle m’aimait un peu moins et jusqu’à la fin elle m’a appelé Teddy, mais je crois qu’elle serait vraiment contente de te revoir si elle vit encore dans la maison jaune au bout de la rue. » Une gentille dame qui s’était pris d’affection pour la petite Callie, et qui trouvait que son aîné était trop sur son dos déjà à l’époque. Eddie se revoit lui courir après en lui criant qu’elle allait se faire mal, et Madame Ross lui répondre de la laisser jouer avec ses fils - des gosses qui doivent avoir à peu près leur âge, à présent. Il ne les aimait pas beaucoup Eddie car l’un d’eux, une vraie petite brute, était amoureux de Callie alors dès son plus jeune âge il s’est mis en tête de repousser la moindre présence masculine autour d’elle dans un délire de protection et on constate que ça ne s’arrange vraiment pas avec le temps. Ils peuvent toujours aller voir ce qu’il en est puisqu'ils sont là, mais il faut leur souhaiter d'avoir davantage de chance avec leur ancienne voisine car deux déceptions dans la même journée ça ferait beaucoup.
L’attente paraissait interminable. Pourtant, elle savait se montrer patiente, Callie. Mais là, son impatience l’emportait. Son coeur battait à vive allure. D’un instant à l’autre, la porte allait s’ouvrir. Qui donc en sortirait ? Un père de famille, dont les enfants passeraient habilement entre ses jambes ? Un jeune couple, aux vêtements couverts de peinture ? Callie le saurait bientôt. Ou peut-être pas. Elle frappa à nouveau, se disant que, peut-être, l’animation à l’intérieur était telle que les occupants n’avaient pas entendu la première fois. Mais à nouveau, personne en vint ouvrir. « Alors ? » Eddie aussi s’impatientait. « Rien ?.. » Les épaules de Callie retombèrent doucement. Personne ne vint ouvrir. Même en s’y risquant une seconde fois. Et regardant par la fenêtre du rez-de-jardin, Callie constata que la pièce était vide. Au mur, des traces carrés et rectangulaires témoignaient de cadres ayant été longuement suspendus. Au sol, le parquet clair ne brillait pas. Pour cause, on pouvait voir, par les raies de lumières, la poussière flotter mollement dans les airs. Callie poussa un petit soupir de déception. « C’est vide. » lança-t-elle à Eddie. « Oh Callie je suis désolé. » souffla son frère. Elle se retourna et se dirigea vers lui. « Je suppose qu’elle sera habitée bientôt. Je ne vois pas de pancarte « à vendre » ».« Je peux t’emmener dans le parc où on allait toujours jouer sinon, ou devant notre ancienne école. Que veux-tu faire ? Dis-moi. » La jeune Yang haussa les épaules. Il y mettait du sien, Eddie. Mais cela ne suffisait pas à lui rendre son sourire. Pourtant, elle le savait qu’elle ne devait pas trop attendre après cette maison. Mais elle avait tendance, parfois, à laisser libre court au coeur plutôt qu’à la raison. « Quitte à être revenus ici autant récolter un maximum de souvenirs, on peut aussi parcourir le quartier pour voir si nos voisins sont toujours là. » Callie balaya la rue du regard. Pourquoi pas ? « Tu penses qu’ils seront toujours là ? » Pour le coup, Callie était un peu plus dubitative. « Tu te souviens de Madame Ross ? C'est dingue ce qu'elle t’adorait. Moi elle m’aimait un peu moins et jusqu’à la fin elle m’a appelé Teddy, mais je crois qu’elle serait vraiment contente de te revoir si elle vit encore dans la maison jaune au bout de la rue. » Callie laisse un rire s’échapper. C’est vrai ça, mille fois elle l’avait appelé « Teddy ». « Elle nous donnait souvent des biscuits à la confiture… » se remémorait Callie. « Et ses fils avait des bicyclettes géniales. » Elle inspira profondément. « Essayons. » décida-t-elle. Elle commença à descendre la rue, avant de se stopper net. Elle se rendit compte qu’elle ne s’aventurait pas vraiment dans la direction où se trouvait la maison de Madame Ross. « C’est là-bas. » rectifia-t-elle en tournant les talons. Au passage, elle attrapa le bras de son frère. Voilà qu’elle retrouvait tout son dynamisme. Il en fallait peu, décidément. Elle détailla la bâtisse jaune citron. Elle se dit alors qu’elle n’était pas certaine de pouvoir encaisser une nouvelle déconvenue. « J’y vais ? » Demanda-t-elle à son frère, cherchant un certain soutien dans son regard. Elle s’avança ensuite vers le perron, pressa la sonnette.
Spoiler:
WIN : Carré poivre et sel, peau claire et lèvres fines. Madame Ross n’avait pas changé, ou presque. « Bonjour, je peux vous renseigner ? » demanda-t-elle à une Callie abasourdie. Elle ne put répondre quoi que ce soit. La femme regarda par dessus son épaule. Ses yeux se plissèrent pour mieux voir. « Teddy… ? » souffla-t-elle. « Callie ? » Ajouta-t-elle en posant à nouveau son regard sur la jeune Yang. Tout ce que put faire Callie, c’était hocher la tête dans de grands mouvements.
SO CLOSE : Un jeune homme, d’une tête de plus que Callie, ouvrit la porte. Son bras gauche était entièrement couvert de tatouages. « Oui, vous cherchez quelqu'un ? » lança-t-il. Quelque chose dans sa voix témoignait qu’il n’attendait pas vraiment de réponse. Callie se sentit un peu petite, tout à coup. Son regard glissa sur une photo accrochée au mur de l’entrée. Elle était presque certaine qu’au centre de celle-ci se tenait Madame Ross. Mais comment pouvait-elle engager la conversation avec ce gaillard ?
FAIL : Elle avait beau s’être préparée à cette éventualité, sa déception fit, à nouveau, retomber ses épaules. Personne ne vint ouvrir. « Allons-nous-en. » souffla Callie, commençant à s’éloigner de la maison. « Allons en ville. Et à l’hôtel. Enfin, à l'hôtel ET en ville. » proposa Callie. Ils trouveraient bien quelque chose à faire, mais d’abord, ils devaient déposer leur bagages. « J’ai choisi une super chambre. Il y a une baignoire immense et une vue sur la mer. » s’empressa-t-elle d’ajouter pour masquer sa déception.
ÂGE : des milliers d'années, mais je suis bien conservé. STATUT : marié au hasard. MÉTIER : occupé à pimenter vos vies, et à vous rendre fous (a). LOGEMENT : je vis constamment avec vous, dans vos têtes, dans vos esprits, et j'interviens de partout, dans vos relations, dans vos joies, vos peines. POSTS : 31460 POINTS : 350
TW IN RP : nc PETIT PLUS : personne ne sera épargné, c'est promis les chéris.AVATAR : je suis tout le monde. CRÉDITS : harley (avatar), in-love-with-movies (gif) DC : nc PSEUDO : le destin. INSCRIT LE : 15/12/2014
The sunset glow on my time machine Freeze this moment In the gap between the two worlds I want to leave a trace of you and me
Elle est terriblement déçue Callie, sa sœur n’a même pas besoin de le dire puisqu’il lui suffit de l’observer pour s’en rendre compte. Et forcément si elle est déçue alors Eddie l’est aussi, il comptait sur le fait de renouer avec leur ancienne maison où ils ont des tas de souvenirs mais sûrement pas autant qu’elle. Il a voulu croire qu'elle était encore habitée mais ils ont visiblement mal choisi leur moment, Callie lui faisant remarquer qu’elle sera certainement occupée dans peu de temps puisqu'elle est vide et n'est de toute évidence pas à vendre. Eddie culpabilise aussitôt de ne pas pouvoir faire ce cadeau à sa sœur, n’aurait-il pas mieux valu qu’il se renseigne avant pour lui éviter cette fausse joie ? Il avait espéré autre chose pour l’anniversaire de Callie mais il peut peut-être encore se rattraper, tout n’est pas perdu. Il ferait n’importe quoi pour la faire sourire de nouveau et pour chasser cette immense déception chez elle, alors il lui propose d’abord une petite virée dans un parc qu’ils connaissent bien ou près de leur ancienne école, avant de songer à leurs anciens voisins qui vivent peut-être encore ici. Comme pour leur ancienne maison ça reste très incertain mais Eddie ne peut pas imaginer qu’ils puissent être malchanceux au point de trouver une nouvelle fois porte close. Callie se demande s’il y a une chance que la famille Ross n’ait pas bougé en quinze ans et il suppose que l’espoir est encore permis, ici. « Je me dis que c’est pas impossible ? On ne saura que si on va voir. » Alors oui c’est risqué et il s’en voudrait vraiment de causer une nouvelle déception à sa sœur, mais la perspective d’assister à de jolies retrouvailles entre Madame Ross et Callie à laquelle celle-ci était très attachée le motive à retenter sa chance. Il constate que sa sœur a conservé certains souvenirs de cette époque elle aussi, elle lui rappelle même l’habitude qu’avait leur voisine de leur donner des biscuits à la confiture. « Je m’en rappelle, appa n’était pas trop d’accord parce qu’il pensait que ça nous donnerait plein de caries. » Eddie se souvient qu’en dehors de ça leurs parents et la plupart de leurs voisins s’entendaient bien, les Yang n’ont jamais connu de soucis d’intégration à Sydney et ils étaient une petite famille plutôt très appréciée dans le quartier. Il suit Callie jusqu’à la fameuse maison jaune et se laisse entraîner par le bras, une certaine appréhension commençant à se faire ressentir de son côté. Il croise secrètement les doigts tandis que la benjamine Yang s’avance et semble chercher une approbation dans son regard pour savoir si elle peut se lancer. « Allez cette fois c’est la bonne, on y croit. » Ça ne peut pas capoter deux fois de suite, il y aura forcément quelqu’un pour leur ouvrir cette fois.. non ? Eddie remarque un détail pendant que sa sœur appuie sur la sonnette, il n’y a pas de véhicule dans l’allée et c’est encore une chose qu’il aurait été bon de vérifier avant d’entreprendre quoi que ce soit. Il a un mauvais pressentiment mais c’est trop tard, et ses craintes se confirment lorsque la porte reste désespérément close face à eux. « C’est pas possible.. » soupire-t-il. Le destin s’acharne et il culpabilise une fois de plus de faire vivre ces désillusions à Callie le jour de son anniversaire, alors qu’il n’y est pourtant pour rien. Eddie passe un bras autour des épaules de sa sœur en guise de réconfort, il n’ose pas imaginer à quel point elle peut être déçue et il ne compte pas aller à l’encontre de ses plans après ça. Callie propose de rejoindre leur hôtel et il comprend que l’idée est surtout de partir d’ici, elle veut laisser ces déceptions derrière eux au plus vite et c’est donc ce qu’ils vont faire. « Oui allons-nous-en. Je rappelle le taxi. »
Le duo Yang récupère ses bagages puis passe la porte de l’hôtel, avant de se voir attribuer la chambre 305. Eddie ne sait pas à quoi s’attendre car c’est Callie qui a pris en charge cette partie de leur voyage mais la curiosité le gagne à mesure qu’ils approchent de leur chambre compte tenu des indications qu'elle lui a donné un peu plus tôt. Il passe la clé magnétique et pousse la porte tout en traînant leurs valises à l’intérieur, et c’est là qu’il découvre que Callie a vu les choses en grand pour leur petit séjour. « Oh purée ! » Eddie n’a pas l’habitude des chambres d’un tel standing, il comprend que sa sœur désirait marquer le coup mais il ne peut pas s’empêcher de penser que c’est limite trop beau, surtout pour juste deux petits jours. « Yeodongsaeng la chambre est super et la vue incroyable, vraiment, mais.. » Évidemment il y a un mais, avec lui c’est presque inévitable. « Ça a dû te coûter un bras non ? » Ce n’est pas difficile à deviner à moins que Callie ait profité d’une promo très intéressante, mais la connaissant elle est bien capable d’avoir encore dépensé sans compter pour lui. Et ça Eddie n’aime pas, elle le sait. « Je t’avais demandé de ne pas trop dépenser pour moi. C’est ton anniversaire, pas le mien. » Il ne trouve déjà pas normal que Callie ait insisté pour payer leur chambre, elle n’avait vraiment pas besoin de choisir la plus belle même s’il ne se plaindra évidemment pas de cette imprenable vue sur la mer de Tasman. « Pour la peine je t’invite au restaurant ce soir et inutile de me dire non, j’appelle pour réserver juste après. » Ce n’est même pas négociable, il lui doit bien ça et tant pis s’il ne peut pas trop se le permettre. Ce n’est pas l’anniversaire de Callie tous les jours, et ils ne reviennent pas non plus très souvent dans la ville qui les a vu naitre. « D’ailleurs à ce propos.. tu veux ton cadeau maintenant ou tout de suite ? » Eddie avait promis de lui donner son cadeau une fois arrivés et maintenant qu’il a accès à sa valise et qu’ils sont installés dans leur chambre il ne voit plus de raison de retarder ce moment. Il est un peu stressé, forcément, comme chaque fois qu’il remet un cadeau à quelqu’un puisqu’il n’estime pas être le meilleur pour les choisir. Eddie sort donc sans attendre de sa valise une pochette cadeau qu’il remet à sa sœur avec la plus grande précaution. « Tu peux ouvrir. » il l’informe dans un sourire et il l’observe maintenant déballer le tout. À l’intérieur se trouve un petit écrin, renfermant un précieux outil pour la jeune architecte qu’elle est et qui ne fut pas simple à trouver dans ce modèle très précis : un stylo E-Motion Faber-Castell, la marque lui a semblé prestigieuse pendant ses recherches car Eddie n’a évidemment pas acheté le premier truc qu’il a trouvé sans se renseigner. « J’espère qu’il te plait ! J’en ai lu beaucoup de bien et je me suis dit que tu méritais le meilleur pour travailler dans de bonnes conditions. Il est gravé à ton nom, on peut considérer qu’il est unique comme ça. » Il n’était vraiment pas donné ce stylo mais le prix l’a lui aussi convaincu de sa qualité, et Callie ne pourra de toute façon rien lui dire après cette folie qu’elle a faite en leur prenant cette chambre immense. Et puis Eddie a une bonne excuse lui, c’est l’anniversaire de la personne qui compte le plus à ses yeux alors il n’allait sûrement pas se limiter en terme de dépense.
Il a raison, Eddie. Ils ne seraient fixés qu’en prenant leur courage à deux mains. Presser la sonnette, attendre quelques instants, et voir quel visage s’offrait à eux. Serait-il celui de la douce Madame Ross ? Cette réponse s’offrirait bientôt à eux. Ou peut-être pas, si l’on prend en compte la déconvenue tout juste affrontée par le duo. Mais si Callie était capable de se parfois de laisser abattre, elle repartait rapidement. Elle avait dû apprendre à rebondir vite, très vite. Le monde n’attend pas. Alors cette fois-ci, elle avance d’un pas déterminé. J’arrive, Madame Ross, préparez les biscuits à la confiture ! Tête haute et sandales martelant le sol, elle impose la cadence comme si rien ne pouvait l’atteindre. Après tout, c’est leur séjour, leur moment. Il doit bien exister, quelque part au fin fond de la bibliothèque régissant toutes les lois de l’univers, une quelconque jurisprudence disposant que toute personne accomplissant un voyage avec un être cher ne peut subir plus d’une déconvenue, n’est-ce pas ? En écoutant son frère se replonger tendrement dans leur souvenirs d’enfance, Callie a envie d’y croire. Pour peu, elle sentirait presque l’odeur beurrée des biscuits trônant dans la grande boîte en fer.
« Allez cette fois c’est la bonne, on y croit. » Callie opine. Callie sonne. Callie attend. Callie baisse ses épaules. Callie soupire. « C’est pas possible.. » souffla son frère. Et pourtant. C’en est trop pour aujourd’hui. La vaillante petite Yang ne souhaite pas voir son moral entaché, ni celui de son cher frère. Elle proposa alors d’aller à l’hôtel déposer leur bagages et de passer. À tout autre chose. Après tout, le monde n’attend pas. D’ailleurs, ni l’ancienne maison, ni les anciens visages, ne les ont attendus. « Oui allons-nous-en. Je rappelle le taxi. » Et en attendant le retour de celui-ci, Callie prit place sur sa valise, accordant un signe de tête à son frère pour toute validation.
La citadine noire les déposa au pied de l’hôtel une poignée de minutes plus tard. Callie était impatiente de découvrir la chambre et la vue qu’elle offrait. Ayant apporté un soin tout particulier à l’organisation de ce séjour, elle n’avait lésiné sur aucun détail. Ce n’était pas seulement son anniversaire, c’était aussi des petites vacances improvisées pour son frère. Les quelques marches laissèrent place à une grande porte tambour aux vitres fumées. A l’intérieur, tout était résolument contemporain. Murs crème, canapés nordiques en cuir brun, meubles en bois brut. L’oeil de Callie jonglait avec agilité de point de fuite en point de fuite, de coloris en matière. Un sourire satisfait étira ses lèvres malgré elle. Comme un personnage de jeu vidéo, son environnement avait un fort impact sur elle. Le réceptionniste la tira de ses rêveries. Leur nom donné, elle signa un registre. En échange de quoi, on lui remit une clé magnétique, qu’elle confia à son frère. « A toi l’honneur. » glissa-t-elle, sans trop s’avancer. Si la benjamine était sous le charme du lieu, elle craignait d’ores et déjà les remarques de son frère inquiet.
« Oh purée ! » lâcha Eddie avant même que Callie n’ait pu prononcer quoi que ce soit. Il semblait détailler chaque aspect de la chambre. Des lits, qui au passage semblaient indécemment confortables, à la vue, rien n’échappait au regard de son aîné. « Yeodongsaeng la chambre est super et la vue incroyable, vraiment, mais.. » commença-t-il. Ah, nous y voilà. Callie n’eut pas le temps de répliquer quoi que ce soit qu’Eddie revint à la charge. « Ça a dû te coûter un bras non ? » Elle leva les yeux au ciel. « J’en étais sûre. » souffla-t-elle. « bla bla blaaaa… » envoya-t-elle pour toute réponse, marchant -faussement- penaudement vers son frangin. « bla bla blaaaaaa ! » Répéta-t-elle à son oreille. Envolé le petit air penaud, bonjour la Callie insouciante. Enfin, insouciante. Elle était simplement décidée de contaminer son frangin avec son état d’esprit actuel. Et dans celui-ci, il n’y avait pas la place pour les tracas financiers et autres petites choses inutiles. « Je t’avais demandé de ne pas trop dépenser pour moi. C’est ton anniversaire, pas le mien. » ajouta Eddie. « Exactement. C’est mon anniversaire, alors arrête de m’embêter avec tes inepties. » siffla-t-elle. Retournait-elle les paroles de son frère contre lui ? Non, elle n’oserait pas. Quoique… « Et puis, c’est aussi un peu tes mini vacances, tu te souviens ? A quand remonte la dernière fois que tu as totalement décroché, et dans un cadre aussi cool que celui-là ? » Demanda-t-elle, désignant la pièce d’un large geste du bras. Un sourire victorieux s’afficha sur son visage. One point. Bon, elle savait que son frère avait tendance à s’inquiéter, voire trop, parfois. Dans le cas contraire, peut-être aurait-elle tenu le même discours. « Ne t’inquiète pas pour la chambre, vraiment. J’ai plein d’astuces. » confia-t-elle, histoire qu’il lâche un peu de vapeur.
« Pour la peine je t’invite au restaurant ce soir et inutile de me dire non, j’appelle pour réserver juste après. » affirma Eddie. Callie pinça ses lèvre pour réfréner un sourire moqueur. Sérieusement, oppa ? Comme si Callie avait la force de refuser un restaurant, qui plus est offert. Elle se demanda même un instant si elle était génétiquement conçue pour pouvoir refuser ce genre de proposition. Mais avant même qu’elle ait pu y trouver une réponse, Eddie la tira de ses pensées. « D’ailleurs à ce propos.. tu veux ton cadeau maintenant ou tout de suite ? » Les yeux de Callie devinrent ronds, comme des billes. « Je… » commença-t-elle. Mais rapidement, son frère s’activa dans la pièce, entreprenant d’ouvrir sa valise. Callie déglutit péniblement. Bien entendu, elle adorait les surprises. Cependant, le dernier en date de la part de son frère n’était pas des moindres. Elle espérait qu’il n’ait pas fait de folie, à nouveau. Elle ferma les yeux et se mordit la lèvre. Voilà qu’elle se mettait à réfléchir exactement comme lui. « Tu peux ouvrir. » souffla-t-il. En plein conflit intérieur, Callie hésita. Le sourire de son frère la conforta toutefois à prendre possession de la petite pochette, avec soin. « Eddie, je… » commença-t-elle en fixant le papier. Elle avait l’air bien maline, la jeune brune. Elle leva les yeux sur lui puis se décida à tirer la cordelette argentée. Un écrin pommelé, renfermant un porte-mine, y était abrité. Un porte-mine Faber-Castell. Un porte-mine Faber-Castell, gravé à son nom. « J’espère qu’il te plait ! J’en ai lu beaucoup de bien et je me suis dit que tu méritais le meilleur pour travailler dans de bonnes conditions. Il est gravé à ton nom, on peut considérer qu’il est unique comme ça. » lança-t-il. Il était si fier de ses recherches, fier de sa trouvaille. Non, il était heureux. Callie n’avait pas le coeur de lui retirer cela. Sa vue se brouilla lorsque son doigt effleura la gravure délicate. Eun-bi. Elle referma doucement l’étui. Elle enlaça son frère, ses épaules retombant dans un soupir. « C’est le meilleur cadeau d’anniversaire de tous les cadeaux d’anniversaire. » reconnut-elle. Ses larmes mouillèrent la chemise de son frère. Désolée, oppa. « Merci. Je te dessinerai la plus belles des maisons avec, tu verras. » murmura-t-elle, comme une promesse. Ce n’était pas qu’un stylo, ce n’était pas qu’un cadeau. C’était l’espoir et le soutien de son frère matérialisés dans un petit objet délicat. Il croyait en elle, ça avait toujours été le cas. Elle ne put que réaliser encore un peu plus comme elle avait de la chance d’être sa petite soeur. Un instant plus tard, elle se résolut enfin à lâcher son frère, craignant de finir par ruiner sa chemise. « Désolée. » souffla-t-elle en essuyant ses larmes d’un revers du bras. « Je l’adore. J’en prendrais soin. » promis-t-elle. Elle s’éloigna en direction du balcon terrasse et regarda la vue un instant. La mer était calme et reflétait les rayons du soleil. D’ici, on aurait pu croire que des milliers de petits poissons effleurait la surface de l’eau. « Tu as le don pour toujours me mettre dans tous mes états, hein ? » Ajouta-t-elle, tentant de rire de la situation. Elle inspira profondément. Ils devraient aller à la mer, et aussi au restaurant. Elle mourrait d’envie de faire une chasse aux coquillages, pour son journal intime, Le Corbusier. Mais pour l’heure, elle avait envie de faire quelque chose d’inédit. « Tu veux sortir ? » lança-t-elle. Il fallait dissiper toutes ces larmes, bien qu’elles ne soient pas dues à la tristesse. « J’ai une idée ! » ajouta-t-elle. Et Eddie ne savait que trop bien ce que cela signifiait. Elle sortit son portable et pianota dessus quelques instants. Un sourire satisfait s’afficha sur son visage une fois les informations recherchées en sa possession. « J’ai hâte, allons-y ! » Elle enjamba les valises et attrapa la main de son frère. « Promis, ça ne fait pas peur. » assura-t-elle. Pas de fantômes ni de démons à l’horizon. Qui cela rassurait-il, au fond ?
Nul besoin d’arrêter un taxi pour se rendre sur place. En quelques minutes de marche seulement, il atteignirent le lieu convoité par la jeune Yang. « Allie’s Roller », voilà ce qu’indiquait l’enseigne. Callie n’avait jamais posé un pied sur des patins à roulette auparavant. « Ca va être génial ! Et ca va nous ouvrir l’appétit avant le dîner. » elle bouscula gentiment son frère et s’avança vers l’entrée. « Alors, tu viens ? » Demanda-t-elle, une main sur la poignée de la porte.
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Pas le temps de se laisser abattre, la chance n’est pas de leur côté mais ce séjour n’a probablement pas encore dévoilé toutes ses surprises - en espérant que les prochaines soient bonnes, pour compenser. Le duo lance un dernier au revoir à leur ancienne maison et à cette rue qui les aura au moins rendus tendrement nostalgiques pour rejoindre l’hôtel où une chambre réservée par la benjamine Yang les attend. En chemin Eddie n’est pas bien bavard, il économise ses mots pour ne pas brusquer Callie qui semble encore pas mal sous le coup de sa déception. Et il respecte ça, ce voyage est tellement important pour elle comme pour lui qu’il lui accorde ce petit moment pour digérer avant la suite. Le taxi les laisse devant l’imposant hôtel dont l’intérieur laisse déjà présager que leur chambre sera d’un certain standing, de quoi faire perdre sa sérénité à peine retrouvée à Eddie. Parce qu’il la connait trop bien sa petite sœur, elle n’a sûrement pas pu s’empêcher de prendre ce qu’il y a de mieux sans être très regardante sur ses dépenses, or ce n’est pas lui qui fête son anniversaire mais bien elle. Les rôles sont inversés et il voit effectivement un peu rouge en découvrant ladite chambre, sa grandeur et sa vue lui donnant une nette indication de ce qu’elle a pu coûter. Callie l’avait vu venir et c’est vrai qu’il est prévisible sur ce coup-là Eddie, et avec tout ça il en oublie même de profiter du moment et du cadre. Ils sont à Sydney dans la ville de leur enfance où ils viennent d’essuyer deux grosses désillusions, l’idée est de faire le plein de positivité après ça mais lui préfère s’inquiéter pour le coût de ce voyage. « Ce sont pas des inepties yeodongsaeng, je voudrais juste que tu penses un peu plus à toi parfois. » Qu’elle se fasse plaisir et dépense ses futurs salaires dans des cadeaux qu’elle se fera à elle-même, en l’oubliant un peu lui. Mais il rêve Eddie, toute la générosité a été mise sur sa sœur dans leur duo alors elle n’est pas près d’arrêter de gâter son aîné. Et elle trouve même les mots pour retourner cette situation contre lui, en lui faisant très justement remarquer qu’il n’a pas eu de vraies vacances depuis trop longtemps et que ce séjour est l’occasion pour lui de lever enfin le pied. « Bon, bon.. c’est pas tellement faux ce que tu dis. » il admet en se tenant les hanches avant de scruter tout autour de lui l’intérieur de cette chambre foisonnant de petits détails. Elle l’a vraiment bien choisie Callie mais ça ne l’étonne pas, sa sœur a l’œil pour ces choses-là et beaucoup plus de goût que lui en la matière. « Ce lit a l’air beaucoup trop confortable, ça va me changer de mon vieux matelas. » Et pour s’en faire une idée il vient sans attendre s’y assoir pour en juger la fermeté, qui lui semble idéale au point qu'il peut presque déjà entendre son dos lui dire merci. Peut-être que tout ce confort le motivera à investir dans un matelas digne de ce nom à son retour car ce ne serait pas du luxe, même s'il y a bien longtemps qu'il envisage de le faire sans pour autant concrétiser l'idée.
Callie a voulu lui faire plaisir et à présent c’est à son tour de faire chauffer la carte bancaire pour elle, l’invitation au restaurant après ça étant inévitable pour marquer le coup et retrouver aussi un peu d’honneur car Eddie ne vit pas forcément très bien le fait que tout ce voyage ait été à la charge de sa jeune sœur comme s’il s’était contenté de mettre les pieds sous la table. Il veut participer à sa manière mais l'heure du diner semble encore loin, par contre il est plus que temps de lui remettre son cadeau selon lui. Eddie ne sait pas s’il a visé juste avec celui-ci, il a tenu à lui offrir quelque chose d’aussi symbolique qu’utile mais qui sait, il est peut-être bêtement tombé à côté avec son porte-mine malgré tout le soin apporté au choix de la marque et du modèle. Il s’est donné du mal avec ce cadeau et il espère quand même que ça se voit, même l’emballage est soigné alors qu’il n’a jamais été très doué dans le maniement de papier cadeau. Callie en perd ses mots et il ne sait pas quelle émotion prédomine chez elle, pourvu que ce ne soit juste pas de la déception. Ce silence chez sa jeune sœur pousse le danseur à justifier son choix et il ne manque pas de lui faire remarquer la gravure à son nom, au cas où ce petit détail ne lui aurait pas encore sauté aux yeux. Son regard remonte avec une certaine appréhension vers le visage de Callie dont la réaction se fait attendre, et un grand sourire détend finalement ses lèvres lorsque celle-ci lui saute dans les bras. Le meilleur de tous les cadeaux d’anniversaire elle y va peut-être un peu fort, mais elle lui fait tellement plaisir en lui disant ça comme en lui promettant de lui dessiner la plus belle des maisons. « Tout ce que tu voudras Eun-bi. » Une maison c’est ambitieux alors qu’il semble voué à vivre dans un petit appartement encore longtemps avec ses revenus précaires d’artiste mais il aime l’idée, elle le charme et le fait même rêver. « Mais.. attends tu pleures ? » il l’interroge en laissant échapper un léger rire tandis qu’elle défait son étreinte. La sensibilité de la benjamine Yang n’est plus à prouver depuis le temps mais Eddie n’avait pas en tête de la bouleverser autant, que ce soit de joie ou de tristesse il n’aime pas la voir pleurer même si c’est bien la preuve ici que son cadeau lui va droit au cœur. « Pas de larmes, s’il te plait. » ajoute-t-il en prenant le relais pour essuyer celles-ci. Callie s’échappe un instant pour rejoindre le balcon et il ne la retient pas, face à la mer de Tasman elle évacue certainement le trop-plein d’émotions de cette journée et il ne veut pas interrompre ce moment. La mettre dans tous ses états c’est vrai qu’il sait y faire Eddie, dès leurs retrouvailles à l’aéroport il avait réussi à l’ébranler en lui confiant avoir fait prendre tous les risques à son pote sur la route pour ne pas rater son avion. Avec lui mieux vaut avoir le cœur bien accroché, elle ne serait pas la seule à pouvoir le dire. Callie finit par revenir vers lui et il hoche la tête alors qu’elle lui demande s’il souhaite sortir, car rester enfermé dans cette chambre ne fait pas trop partie de ses plans alors que Sydney n’attend plus qu’eux. « Je te fais confiance mais.. tout sauf un saut à l’élastique, hein. Tu sais que ça je ne peux pas. » Son regard à cet instant le prouve, il veut bien se laisser porter mais ce n’est pas aujourd’hui qu’il compte affronter sa peur du vide, pas alors qu’il a déjà enduré plusieurs heures d’avion pour elle. Callie a toujours de bonnes idées, oui, mais Callie aime aussi beaucoup trop le taquiner alors il demande à voir et accepte de se laisser surprendre non sans paraitre un peu méfiant en quittant l'hôtel.
Le fait de pouvoir rejoindre leur prochain lieu de rendez-vous à pied est déjà censé le rassurer un peu mais c’est en voyant l’écriteau du Allie’s Roller qu’Eddie retrouve un semblant de tranquillité. Il n’a jamais fait de roller mais il en a déjà eu envie alors cette idée l’inspire bien, ce sera un bon moyen de tester son équilibre même s’il devra veiller à limiter ses chutes avec sa récente blessure au genou. « Ça me dit bien, je pense qu’il est temps qu’on découvre ce qu’on vaut sur ces machins. » Spoiler : en ce qui le concerne, pas grand-chose. C’est avec le sourire aux lèvres que le danseur se laisse entraîner à l’intérieur où leur sont remis les fameux rollers, une paire de genouillères et de coudières chacun sans oublier le casque, en plus de quelques indications qui devraient être utiles aux débutants qu’ils sont. Après un rapide entraînement sur place on considère qu'ils sont prêts mais on leur conseille quand même de ne pas s’éloigner du secteur, Eddie ne se voyant de toute façon pas parcourir toute la ville sur ces roulettes, pas pour une première fois. Et les voilà lâchés dans la nature, équipés de la tête aux pieds. « Wow c’est.. pas évident. » À peine lancé à l’extérieur les jambes du danseur chancellent déjà mais il tient son équilibre autant qu’il peut au côté d’une Callie semblant un peu plus à l’aise. « Je te proposerais bien de faire la course jusqu’à cet arbre pour déterminer qui pourra choisir son côté du lit ce soir mais je vais me viander, c'est sûr. » Et est-il prêt à prendre ce risque avec un genou blessé et les cours et spectacles qui l’attendent à Brisbane pour lesquels il devra être pleinement opérationnel d'ici deux jours..? Eh bien oui, ce n’est encore pas aujourd’hui qu’il va être raisonnable de toute évidence. « Je plaisante, bien sûr qu’on va le faire ! À trois on y va, un.. deux.. » trois. Le duo s’élance à toute vitesse vers l’arbre de la victoire sur leurs rollers qu’ils ne maitrisent pas très bien et sans qu'on ne sache par quel miracle ni elle ni lui ne tombe. Eddie se fait par contre rapidement distancer mais c’est le prix à payer pour être resté sur ses deux jambes, de quoi lui faire relativiser sa deuxième place. La victoire de Callie est donc incontestable mais l’histoire ne dit pas s’il l'a laissée gagner pour son anniversaire ou s'il a juste été le plus mauvais. « Bravo, je m’incline. Tu prendras le côté que tu veux du coup, et puis t’auras aussi le droit de prendre le plat le plus cher ce soir. » Il la gratifie d’un clin d’œil pour masquer le fait que cette dernière offre va faire sacrément mal à son porte-monnaie par ces temps difficiles mais il y tient Eddie, s’il y a une occasion pour laquelle il ne doit pas se restreindre c’est bien celle-là. Pour les beaux yeux de sa Callie il ne compte pas ses sous alors tant pis si ça doit l’amener à se serrer la ceinture tout le mois prochain, ses priorités ont du sens pour une fois. « Finie la compétition, viens. » Sur ces mots Eddie tend une main vers elle avec l’idée d’entreprendre le reste du parcours main dans la main, complices et soudés en plus d'être certainement un peu plus stables aussi, à deux.