Elles étaient nombreuses et elles étaient fréquentes, tes remises en questions.
Mais c’était bien la première fois qu’elles impliquaient Archie.

Ça te fait bizarre d’y penser, mais t’es bien incapable de t’en empêcher. Elles te sont tombées dessus sans même que tu ne les vois venir, les grandes questions. Celles avec des majuscules partout et un niveau de sérieux que vous avez toujours gardé à distance, Archie et toi, toujours remis à plus tard quand bien même le temps filait entre vos doigts. C’est que vous n’aviez pas besoin de penser à demain quand vous étiez si bien dans le maintenant. Quand ça semblait si simple et naturel de passer tout ton temps libre avec le Kwanteen, pratiquement depuis le moment ou il était rentré dans ta vie, ce samedi soir, trop tard dans un taxi qui errait les rues de Brisbane. Toi qui avait si longtemps cherché ta place, tu n’avais jamais questionné le fait que tu avais une place juste là, à côté du brun. Ça c’était placé sous tes yeux comme une évidence même et pour une rare fois dans ta vie, tu pouvais tout simplement en profiter. Jusqu’au moment ou tu ne pouvais plus. Et le moment était arrivé, sans même que tu ne le vois venir.

Elle avait des étoiles dans les yeux, ton amie Brenda alors que ses mains étaient venues se poser sur son ventre à peine gonfler, annonçant avec une joie terriblement contagieuse qu’elle était enceinte. Elle était la première de tes amies à tomber enceinte et tu n’avais pu t’empêcher de ressentir toutes les grosses émotions qui la traversaient. Tu avais toujours été comme ça, empathique au point de ne plus faire la différence entre les émotions des autres et les tiennes, surtout quand c’était intense comme ce l’avait été plus tôt. Et quand les émotions étaient finalement redescendus, quand le high avait laissé place à un normal qui ressemblait presque à un low, les questions s’étaient imposées dans ton esprit. Celles qui étaient normales de se poser après un certain temps en couple, celles qui pourtant, n’avaient jamais été mis au centre de ta relation avec Archie. Est-ce que Archie voulait des enfants? Est-ce que toi tu voulais des enfants? Est-ce que tu t’imaginais avoir des enfants avec Archie? Est-ce que tu pouvais tout simplement t’imaginer passer le reste de ta vie auprès du Kwanteen? C’était une chose d’être bien avec lui dans le présent, tu réalisais soudainement que ça en était une autre complètement de tenter de te projeter plus loin que le lendemain et comprendre subitement que jamais il n’avait été question de plus tard et maintenant que l’idée s’était fait son chemin dans ton esprit, tu étais incapable de t’en défaire.

Tes mains sont encore glissantes de la crème que tu viens d’appliquer alors que Archie sort de la salle de bain, prenant place à côté de toi dans son lit comme il le fait chaque soir depuis plusieurs mois déjà. Est-ce que c’est seulement une habitude, que de dormir avec lui? De venir poser tes lèvres sur les siennes quand il s’approche? Tu ne t’es jamais vraiment posée la question avant ce soir, et voilà que c’est la seule chose à laquelle tu penses alors que tu l’embrasses comme tu l’as pourtant fait des centaines de fois auparavant. « T'as vu, ils ont annoncé la nouvelle sur Facebook. » que tu lances, comme si tu avais soudainement besoin de remplir un silence qui n’avait pourtant jamais été lourd auparavant. Comme si tout d’un coup, tout était en train de changer sous tes yeux et tu ne savais pas comment faire marche-arrière. Tu tournes ton téléphone dans la direction du Kwanteen, ou il peut apercevoir une photo de ton amie Brenda avec son copain de longue date devant un babillard avec une annonce cliché du genre Baby on board, coming winter 2015. « Est-ce que tu veux des enfants Archie? » Tu te sens presque mal de poser la question, comme si ce n’était pas de tes affaires, alors que c’est le genre de choses qu’on se demande quand on est en couple depuis un certain temps, pas vrai?

@Archie Kwanteen

Il n’a jamais réfléchit à la suite. Archie a toujours vécu dans le présent, oubliant de se soucier des conséquences de certains de ses actes, et oubliant de se projeter dans le futur sur le long terme. Son compte en banque grossit tous les jours sans qu’il ne soit obligé de passer huit heures dans un bureau, l’appartement qu’il partage avec Autumn est grand, spacieux, parfait, comme dans ses rêves. La jeune femme, elle, arrive encore à le faire rire aux larmes et leur complicité n’a fait que croître au fils des mois. Ses parents l’adorent parce qu’elle est tellement gentille, Autumn, et tellement belle. Mais, le plus important, il est bien avec elle et il ne se pose pas toutes les questions du monde quand il croise son regard.

Rien n’a changé. Et pourtant, quand Archie observe son reflet dans le miroir, rasoir à la main, il n’arrive pas à détacher son esprit de ce couple parfait que forment Brenda et Marc. Aujourd’hui, ils les avaient invités à passer un moment dans un grand parc vert pour leur annoncer la grande nouvelle : l’enfant n’est plus seulement un projet, il est devenu une réalité. Légèrement mal à l’aise, Archie avait gentiment refusé de toucher le ventre de la jeune femme, à peine rond. Il avait échangé un regard avec Autumn et avait semblé y lire la même interrogation qui traversait son esprit à lui.

En soupirant, il pivote sa tête vers l’arrière pour aplatir la peau de son cou afin de mieux glisser la lame, soignant sa barbe de la même façon. Comme tous les jours, il débarrasse le dessous de son menton du moindre poil et trime avec amour ceux qui parsèment ses joues. Il est bien un des rares garçons à soigner son apparence juste avant de se coucher. Il dit toujours que ça lui sauve du temps, le matin, avant de partir à la conquête du monde. Terminant le travail en passant une serviette humide là où une fine couche de mousse blanche, il rejoint rapidement la chambre à coucher en éteignant la lumière de la salle de bains au passage. Un sourire étire ses lèvres quand il rejoint Autumn dans le lit et il lui vole un baiser avant de se poser près d’elle, téléphone en main, pour lire ses courriels une dernière fois avant de s’endormir. « T'as vu, ils ont annoncé la nouvelle sur Facebook. » Il reste silencieux quelques secondes, concentré à lire la fin d’un de ses messages. Il soulève finalement le nez pour interroger la jeune femme du regard. « Hein ? Oh. Brenda et Marc. » Il devine avant de secouer la tête de droite à gauche. Il n’a pas ouvert le réseau social de la journée. Il regarde à peine la photo que lui montre Autumn. « Non, je n’ai pas vu. Ils ont dû obtenir des centaines de likes. » Il glousse en reposant son attention sur son propre téléphone. Il ne veut pas penser plus longtemps à cette annonce de grossesse. Il a peur de la prochaine question que sa compagne pose à peine quelques secondes plus tard. « Est-ce que tu veux des enfants Archie? » Il se met machinalement à gratter la coque de son téléphone, là où le plastique s’effrite depuis quelques mois déjà. Il entrouvre la bouche, puis la referme, et fronce les sourcils. Non. Il ne veut pas d’enfants. Il aimerait avoir le courage de le dire à voix haute sans passer par quatre chemins mais il craint déjà de voir la réaction dans le visage de sa petite étoile. Est-ce qu’elle attend de fonder une famille avec lui ? Il n’a jamais eu l’impression que leur destin se trouvait là, et, quand il se perd dans les yeux de la belle, il ne lit rien de déstabilisant. Tous les deux pensent à la même chose. Il en est presque certain. « Je ne crois pas, non. » Et un sourire nerveux étire ses lèvres, un ricanement fait vibrer sa poitrine. « Je ne nous ai jamais imaginés entourés de gosses, j’avoue. On les tuerait probablement par erreur. » Il se mord le bout de la langue pour s’empêcher d’en dire plus, de peur d’avoir mal lu dans les pensées d’Autumn, cette fois. « Et toi, alors ? T’as le cœur maternel ? » Il lui demande en retour, la gorge légèrement nouée par l’appréhension. Ils sont parfaits, tous les deux. Leurs querelles se terminent toujours par des éclats de rire parce que le sujet du débat n’est jamais sérieux. Jamais il ne remettra en question leur affection, leur complicité, leur sens de l’humour similaire. Il l’adore, la jeune femme, et pour rien dans l’univers il ne cessera de la protéger du reste du monde. Mais, soudainement, il se rend compte qu’il n’a jamais prononcé les mots sacrés pour elle.    

Dans un monde parfait, la discussion serait venue naturellement entre Archie et toi. Elle aurait pris place entre deux blagues, entre deux anecdotes la journée ou peut-être même entre deux baisers. Elle n’aurait pas été lourde, tu n’aurais pas non plus eu l’impression de forcer ou de presser les choses. Mais ce n’est pas ce qui se passe en ce moment, tu le sens et tu n’as même pas besoin de lever les yeux vers Archie pour savoir que lui aussi. Si une partie de toi a envie de faire semblant de rien, de repousser le moment, il y a cette petite voix dans ta tête qui te rappelle qu’avec lui, ça n’a jamais été une histoire de prétention. C’est auprès de lui que tu as enfin eu l’impression de te trouver et tu refuses de ternir ça parce que soudainement, tout n’est plus si simple. Les images défilent sur ton mur Facebook, mais Archie n’y prête pas grande attention, le nez dans son propre téléphone. « Hein? Oh. Brenda et Marc. » Tu te contentes de hocher la tête, ouvrant le post de l’annonce, fascinée par le nombre de likes et les dizaines de commentaires qui défilent sous tes yeux. « Non, je n’ai pas vu. Ils ont dû obtenir des centaines de likes. » « Presque 300 et 62 commentaires. » que tu annonces tout en continuant de lire les différents messages de félicitations. Tu prends d’ailleurs quelques secondes pour taper le tien avant de relever les yeux et de finalement regarder le Kwanteen droit dans les yeux.

Elle file la question et elle prend toute la place.
Elle file la question et elle a un drôle de goût de fin.

Il hésite pendant un instant Archie et tu pourrais presque jurer que tu sais ce qui se passe dans sa tête, sans toutefois ce qu’il pense. Comme si soudainement, la question n’était pas vraiment est-ce que tu veux des enfants mais plutôt est-ce que tu imagines un futur pour nous deux? Tu attends une poignée de secondes, et puis une autre et le temps semble soudainement plus long dans cet entre-deux. « Je ne crois pas, non. » Oh. Tu mets quelques secondes à entendre, à comprendre la réponse d’Archie. À comprendre surtout que tu es de moins en moins certaine d’avoir la même réponse que lui. Tu ne baisses pas les yeux toutefois, ton regard toujours plongé dans le sien, à la recherche de cette familiarité qui vous suit depuis le tout début. « Je ne nous ai jamais imaginés entourés de gosses, j’avoue. On les tuerait probablement par erreur. » Tu échappes un rire, mais tu secoues la tête parce que t’es pas d’accord, pas complètement du moins. « Je pense qu’on les oublierait peut-être quelque part mais on arriverait sûrement à les garder en vie. » Tu te veux tout aussi humoristique que lui alors que tu réalises avec surprise que ton avis est divergent du sien, ce qui n’arrive pas souvent, voire même jamais. « Et toi, alors? T’as le coeur maternel? » Il y a encore un silence qui s’installe pendant quelques secondes, les quelques secondes que ça te prend pour te poser véritablement la question pour ce qui semble être la première fois tant tu es prise au dépourvu. Depuis ta plus tendre enfance, on t’avait inculqué la notion que c’était le but premier de la femme après tout. Faire des enfants, s’occuper de sa famille. Si tu avais rejeté la majorité des croyances que tes parents avaient tenté de t’inculquer, il semblerait que cette dernière se soit bien installée dans ton subconscient. « Je pense que oui. » T’as l’impression de manquer de souffle soudainement alors que tu baisses les yeux pendant quelques secondes avant de les lever à nouveau, appréhendant la réaction d’Archie. « Enfin, pas demain matin. Mais dans quelques années, après mes études… Je voudrais avoir des enfants, oui. » Tu tentes un léger sourire alors qu’un rire nerveux vibre dans le fond de ta gorge. Alors quoi maintenant? que tu aimerais demandé sans toutefois oser le dire à voix haute. Ta main vient instinctivement trouver celle du Kwanteen alors que le silence semble dire évoquer toutes ses choses que vous ne vous êtes jamais dites. « On a jamais vraiment parlé de ce qu’on voulait. Plus tard. Pour nous deux. » Vous aviez jamais eu à le faire et même si concrètement, rien n’a changé, tu ne peux t’empêcher d’avoir le sentiment qu’implicitement, tout a changé.

Il ne voulait pas repenser à cette histoire de ventre arrondi et de création de famille juste avant d’aller se coucher. Maintenant qu’Autumn lui a présenté la photo sur Facebook, elle reste collée au fond de son crâne et elle tache tous les mails qu’il tente en vain de lire, incapable de se concentrer. À chaque virgule, il se pose une question. À chaque point, il ne trouve pas de réponse. Mais il est bien obligé d’agir comme s’il n’était pas troublé ; il ne veut pas que sa copine remarque quoi que ce soit, le moindre malaise. Ça a toujours été parfait entre eux, il continue de penser que le destin les a unis parce qu’ils étaient faits pour devenir les plus grands complices de l’Australie. Bonnie et Clyde, sans les crimes commis. « Presque 300 et 62 commentaires. » L’information ne l’intéresse pas du tout puisqu’il est trop préoccupé par tout le reste. Il hoche de la tête, mollement, sans grande conviction, et se remet à ses occupations même s’il n’arrive plus à lire correctement les mots qui constituent ses messages. Il faut dire que la paperasse administrative lui passe au-dessus de la tête en ce moment. Et ce n’est pas à cause de la fatigue puisqu’Archie n’est jamais fatigué. Il peut passer des jours sans fermer les yeux et seulement quelques cernes, qu’il ne sent pas, viennent trahir son manque de sommeil. Le café fait des miracles, qu’il dit. C’est ce nectar qui lui a permis d’obtenir le titre de millionnaire à un âge si hâtif. Il pensait que c’était tout ce qui importait.

Il ne s’est jamais imaginé bercer un enfant au creux de ses bras pour faire taire ses pleurs. La simple idée de s’occuper d’un être vulnérable le terrifie. Il n’a pas l’impression que c’est un travail qui lui colle à la peau. Toute sa vie, il a pris des décisions qui l’avantageaient, lui. Pas les autres. Il n’a pas le cœur dans la main et craindrait presque d’oublier de nourrir un bébé pendant des jours, comme il oublie lui-même de se reposer. C’est avec une touche d’humour et de sarcasme qu’il annonce son opinion vis-à-vis des gosses, à Autumn, qui semblait terriblement sérieuse lorsqu’elle lui a demandé s’il souhaitait devenir père dans le futur. « Je pense qu’on les oublierait peut-être quelque part mais on arriverait sûrement à les garder en vie. » Sa réponse, sarcastique elle aussi, le rassure d’une façon. Il rigole à son tour en acquiesçant, passant inconsciemment sa main dans sa barbe pour dissimuler un inconfort qu’il ne pourrait pas décrire. « Jusqu'à ce que la DPJ vienne nous les prendre. » Il lâche finalement son téléphone avant de renvoyer la question à la jeune femme qui hésite pendant trop de secondes. Il commence à se douter de la suite et ses lèvres son pincées. « Je pense que oui. » Il est surpris de ne pas avoir eu raison, cette fois. Il pensait la connaître comme le fond de sa poche et, ce soir, elle lui jette un regard qu’il n’a jamais vu jusqu’à présent. Ça le pétrifie et il reste muet. « Enfin, pas demain matin. Mais dans quelques années, après mes études… Je voudrais avoir des enfants, oui. » Après un an, ils n’avaient jamais abordé le sujet. Il pensait que ce projet n’existait ni dans sa tête, ni dans celle d’Autumn. Lui, il veut devenir le meilleur des meilleurs. Se hisser dans le haut de la hiérarchie et ne plus jamais se faire donner d’ordres, pas même de la part de son père. Il veut lui prouver qu’il ne se contentera pas seulement d’être son ombre. Les yeux d’Autumn ne reflètent pas les mêmes rêves. « Oh. » Qu’il arrive à marmonner, le seul son qui peut s’échapper de ses lèvres alors qu’il refuse d’imaginer un gosse grandir avec eux dans cette maison. Il sait qu’il serait un mauvais père. Les relations humaines, ce n’est pas tellement son truc. Il craindrait de ne pas apprendre les bonnes valeurs à un être innocent ; son propre père a fait la même erreur avec lui. Combien de fois s’en est-il voulu d’avoir agis comme le pire des imbéciles durant toute sa scolarité ? Il a blessé énormément de gens et il le conçoit depuis seulement quelques années. Il n’avait pas la maturité pour le comprendre, avant. « On a jamais vraiment parlé de ce qu’on voulait. Plus tard. Pour nous deux. » Il relève le regard ; sa tête s’était baissée machinalement tandis qu’il confrontait ses pensées. « C’est vrai. On vit au jour le jour. » Il dit, en haussant les épaules. Mais il voit bien que la jeune s’attend à plus de sa part. « On est heureux, pas vrai ? » La voilà, la discussion qu’il craignait sans le savoir. « J’ai l’intention de continuer dans cette lancée, pour t’offrir tout ce dont tu rêves. » Une voiture hors de prix ? Une maison sur le bord de la côte pacifique ? Des voyages toutes les semaines à travers le monde ? « Tu n’auras même pas besoin de travailler, si tu en as pas envie. » C’est bien ça que les femmes ont envie d’entendre, non ?

« Jusqu’à ce que la DPJ vienne nous les prendre. » La conversation tourne sur l’humour, sans doute pour ignorer un peu plus longtemps cette drôle de tension qui s’est installée entre vous. Il est sincère pourtant le sourire qui vient habiter ton visage espiègle, tu t’imagines la scène avec amusement pendant quelques secondes et puis tu te souviens qu’il est en parti sincère dans son humour tordu. Il ne veut pas d’enfant. Ne s’imagine pas une vie de famille qui est composé de plus que de lui et de toi. Pas de mini vous qui coure partout autour de vous. Pas d’éclats de voix et d’éclats de rire enfantins. Ça te chavire pas de l’entendre, c’est pas comme si tu rêvais de ça depuis des mois ou quoique ce soit. C’est seulement que là tu réalises que tu t’as jamais vraiment pris le temps de rêver de plus tard avec lui. Satisfaite du moment présent, tu te demandes soudainement si tu n’es pas passée à côté de quelque chose complètement. Il te faut penser vite quand viens le temps de répondre à la question à ton tour. Des enfants. Une vie de famille. Tu en veux, oui. Éventuellement. Quand t’auras enfin l’impression que tu as trouvé ta place dans cet univers et que tu seras assez forte pour prendre en charge l’existence d’un autre. Est-ce que ce jour viendra vraiment? Tu veux le croire. « Oh. » Et il est surpris Archie de réaliser que ta réponse ne concorde pas avec la sienne et tu te mordilles déjà  la lèvre, ton regard ne lâchant pas le sien.

Oh.
Qu’est-ce qu’on fait maintenant?

Tu continues sur une lancée de questions et d’affirmations qui sont bien loin de vos conversations de tous les jours et tu cherches dans le fond des prunelles du Kwanteen à savoir s’il pense les mêmes choses que toi, s’il en arrive à cette même conclusion un peu surprenante, un peu triste aussi, sans jamais être capable d’avoir cette certitude que tu avais pourtant l’habitude de trouver auprès de lui. « C’est vrai. On vit au jour le jour. » Tu souris doucement tout en hochant la tête. T’as jamais pensé que c’était une mauvaise chose, ça te faisait du bien même de ne pas être autant dans ta tête depuis que tu avais trouvé ta place auprès d’Archie. Mais tu doutes maintenant. Est-ce que ça peut vraiment fonctionner sur le long terme, si vous ne faites jamais de plans? Si vos rêves ne se rejoignent pas? Si les sentiments que tu éprouves pour lui ne sont pas ceux que l’on devrait ressentir pour la personne qui partage tout de ton quotidien? « On est heureux, pas vrai? » Oh Archie. « Évidemment. » Il n’y a aucun doute possible dans ta réponse, évidemment que vous êtes heureux. Tu es bien avec lui, tu te sens forte à côté de lui, tu te sens invincible quand il murmure des bêtises sur le reste du monde dans le creux de ton oreille et que soudainement, c’est lui et toi contre l’univers en entier. « J’ai l’intention de continuer dans cette lancée, pour t’offrir tout ce dont tu rêves. » Le problème avec le plan d’Archie, c’est que t’es pas sûre de quoi sont composés tes rêves. Pas certaine non plus qu’ils concordent avec ceux du jeune homme. « Et si je rêve de fonder une famille? » Premier problème. Parce qu’il veut pas d’enfants, il vient de le dire et jamais que tu le forcerais à quelque chose qui ne lui plaît pas. Tu le connais de toute façon, jamais qu’il se plierait à quelque chose dont il n’a pas envie. « Tu n’auras même pas besoin de travailler, si tu en as pas envie. » Un rire siffle entre tes lèvres alors que tes mains viennent trouver les siennes, tes doigts caressant machinalement sa peau. « Je t’adore, tu le sais ça? » que tu couines comme une gamine qui le regarde avec admiration. Tu adores Archie. Mais soudainement, t’es pas certaine que ce soit suffisant pour tout ça. Pour cette vie à deux que vous avez créer, parfaitement à votre image mais pas exactement à l’image de ce que devrait être un couple. Pas exactement à l’image de cette grande histoire d’amour dont tu rêvais gamine, dont tu rêves encore au fond. « Peut-être qu’on veut pas vraiment les mêmes choses finalement, à long terme. » Ça te fait de la peine de l’admettre à voix haute. Parce que tu sais qu’après cette conversation, il sera tout simplement impossible de retourner à ce qui était, à ce qui n’est déjà plus. « Peut-être qu’on s’aime pas comme on devrait. » C’est drôle de le dire quand tu réalises qu’en un an de relation, vous ne les avez jamais prononcé, ces mots-là.

Les questions ne lui étaient jamais venu à l’esprit. Autumn faisait partie de son quotidien au même titre que sa famille, ses amis, son travail. Elle et lui partageaient un appartement depuis quelques mois déjà et les draps s’étaient imprégnés de leur parfum respectif pour créer un mélange homogène. Il aimait rentrer tard le soir pour la découvrir devant la télévision, étendue à regarder n’importe quelle série sur Netflix. Il aimait se glisser derrière elle sur le canapé pour prendre place à ses côtés. Il aimait lorsqu’elle baissait le son de la télévision pour lui raconter sa journée et il l’écoutait d’une oreille attentive, observant ses lèvres roses danser, ses yeux bleus tournoyer de droite à gauche quand elle tentait de se rappeler certains passages, il aimait ensuite prendre sa mâchoire entre ses doigts pour lui voler son sourire, et il aimait par-dessus tout poser sa bouche contre la sienne pour lui partager sa chaleur. Il aimait lui faire l’amour entre deux plaisanteries – parce qu’ils n’arrivaient jamais à prendre les choses au sérieux, ces deux-là, et il aimait entendre sa respiration s’accélérer pour finalement imploser en petits soubresauts parfois entrecoupés de gémissements satisfaits.

Ils sont heureux. Il n’a jamais cherché plus loin que ça. Elle n’avait jamais maudit ses horaires surchargés et sa tendance à prioriser le travail et il pensait qu’elle appréciait ce cœur qu’il donnait à l’ouvrage, peut-être parce qu’elle rêvait elle aussi de ce que la richesse pourrait leur apporter à tous les deux. « Évidemment. » Archie observe les yeux d’Autumn un à un. Il a entendu le « mais » dans sa réponse ; pourtant, elle n’étale pas plus le fond de ses pensées. Depuis le début de leur relation, il n’a voulu que d’une seule chose : l’avoir à ses côtés pour rire et pour partager des moments intimes. Il n’imagine personne d’autre prendre sa place même s’il n’a jamais pensé que ce lien qu’il entretient avec elle correspondait à la définition de l’amour. Elle est sa meilleure amie mais il ne rêve pas de fonder une famille avec elle (peut-être même avec personne). Le problème, c’est qu’Autumn pense autrement. « Et si je rêve de fonder une famille? » Ce n’est pas son argent qui pourra lui offrir cela, il en a conscience. Le jeune homme s’humecte les lèvres puis se mord l’inférieure avant de relever ses perles bleues dans celles de sa copine. « Peut-être que je changerai, je n’en sais rien. On est encore jeunes. » Il tente en haussant les épaules, très peu convaincu. Il sait où se dirige cette discussion. Ça l’effraie un peu mais son instinct ne tente pas d’éviter la suite, comme s’il avait deviné dès le jour 1 qu’ils ne pourraient pas continuer dans cette lancée éternellement. En dernier recours, il lui rappelle qu’elle n’aura plus besoin de ramener de l’argent si elle n’a pas envie de le faire. Ils seront riches, rien ne pourra les arrêter, et ils pourront continuer à se moquer des passants et à faire l’amour dans les hôtels les plus dispendieux du monde. « Je t’adore, tu le sais ça? »  Son sourire se joint au sien et il soulève la main, prêt à accueillir le visage d’Autumn pour mieux l’embrasser mais il réalise que ce n’est pas la suite qu’il attendait. Il voit l’hésitation dans les traits de la jeune femme et il rabaisse la main, haussant un sourcil. « Qu’est-ce qu’il y a ? » Il sait ce qu’il y a mais il préfère jouer le rôle du sourd. C’est plus facile de faire comme s’il n’y avait pas de problème. « Peut-être qu’on veut pas vraiment les mêmes choses finalement, à long terme. » Un long et profond soupir gonfle sa poitrine. Il pose l’arrière de son crâne contre l’oreiller qu’il a surélevé à la hauteur de sa nuque. Il fixe le plafond. « Peut-être qu’on s’aime pas comme on devrait. » Il est hésitant mais il est d’accord avec elle. Seulement, l’admettre à voix haute les pousserait à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ce qu’ils entretiennent depuis un an, peu importe ce que c’est. « Tu as raison. » Il admet enfin d’un seul souffle. Ses traits s’affaissent et trahissent les pensées qui lui traversent l’esprit. « On ne s’est jamais dit qu’on s’aime, c’est ça ? » Il esquisse un minuscule sourire avant d’hausser les épaules : « On n’est pas vraiment un couple normal. On ne l’a jamais été. On s’amuse bien ensemble, mais on n’envisage pas d’avenir. Je ne t’en veux pas, d’en parler, parce que je pense exactement comme toi. Seulement… Je ne voudrais pas te perdre, non plus. T’es mon humaine préférée, même si… Je ne suis pas amoureux. » Il marmonne en passant sa main dans sa tignasse pour la ramener vers l’arrière. Il a enfin lâché son téléphone qui repose maintenant sur la table de chevet. Légèrement embarrassé, il tente : « Est-ce que c’est parce que tu as rencontré quelqu’un d’autre que tu m’en parles ce soir, ou c’est seulement Brenda et Marc qui t’y ont fait penser ? »


@Autumn Galloway

Tu te demandes si vous seriez en train d’avoir cette conversation si ce n’était pas de l’annonce de Marc et Brenda aujourd’hui. Sûrement pas. Si ce n’était pas de cet élément déclencheur, vous seriez sans doute en train de vous raconter des anecdotes de vos journées respectives, de ces moments que vous n’avez pas passé ensemble, à rire de bêtises et juste profiter de la présence de l’autre. Si ce n’était pas de cet élément déclencheur, ça aurait facilement pu continuer sur cette lancée, parce que vous étiez bien et que vous n’aviez pas besoin de plus. Du moins, jusqu’au prochain élément déclencheur. Jusqu’au prochain petit doute qui se serait inséré dans ton esprit ou dans le sien. Vous auriez pu acheter un peu plus de temps, mais tu n’es pas certaine que la finalité aurait été bien différente. Parce que ce n’est rien qu’Archie a fait ou n’a pas fait, personne qui ne porte un blâme quelconque. C’est une simple constatation que de comprendre finalement que vous n’avez jamais imaginé de futur ensemble probablement parce qu’au fin fond de vous, vous saviez que ça mènerait à ça. À cette conversation maladroite ou chaque mot pèse comme une réalité qu’il vous était bien plus simple d’ignorer et de mettre dans un coin. « Peut-être que je changerai, je n’en sais rien. On est encore jeunes. » « En un an, je ne t’ai jamais vu changé d’idée sur quoique ce soit. » Ce n’est pas un reproche, loin de là. C’est un autre fait évoqué de pleine voix qui rappelle que de vous deux, tu es celle qui change constamment d’idée. Celle qui revient constamment sur ses choix, qui questionnent à n’en plus finir si elle a pris la bonne décision. Mais pas sur ça, tu le sais. Comme tu sais que si Archie dit aujourd’hui ne pas vouloir devenir père, c’est quelque chose de fixe, pratiquement couler dans le béton. Parce qu’il est comme ça Archie, sûr de loin au point de ne jamais se remettre en question. « Je ne voudrais pas que tu changes pour moi. » Parce que c’est comme ça que tu l’aimes Archie, avec son assurance démesurée et toutes ces convictions, son humour tordu et cette confiance que tu admires autant que tu l’envies, celle que tu t’es toi-même découverte au fil des mois passés avec lui.

« Qu’est-ce qu’il y a? » Tu hausses les épaules tout en te mordant les lèvres. Tu n’as pas envie de dire les choses, mais tu sens que tu n’as plus vraiment le choix. Même si c’est une évidence, la réalisation pince, elle laisse ses marques et tu ne peux t’empêcher de te demander ce qui va se passer, après. Tu le suis du regard alors qu’il s’installe contre son oreille, et si normalement tu aurais laissé ta tête venir se lover contre son torse, tu te contentes de rester assise et de lui faire face. « Tu as raison. » Tu ne sais pas si tu es triste ou soulagée de l’entendre, mais de voir un léger sourire se former sur ses lèvres te rassure, ne serait-ce qu’un petit peu. « On n’est pas vraiment un couple normal. On ne l’a jamais été. On s’amuse bien ensemble, mais on n’envisage pas d’avenir. Je ne t’en veux pas, d’en parler, parce que je pense exactement comme toi. Seulement… Je ne voudrais pas te perdre, non plus. T’es mon humaine préférée, même si… Je ne suis pas amoureux. » « T’es mon humain préféré aussi. » que tu réponds sans la moindre hésitation et cette fois-ci, tu n’hésites pas alors que ta tête vient se poser contre son torse. Il n’y a pas besoin d’être amoureux, ni même d’être un couple pour les marques d’affection, pour ce qui s’est toujours fait naturellement entre vous. « Ça changera jamais ça, promis. » Tu lèves les yeux et croise son regard à nouveau et tu lui offres un sourire moins tendu alors que tu prends tes aises contre lui. « Est-ce que c’est parce que tu as rencontré quelqu’un d’autre que tu m’en parles ce soir, ou c’est seulement Brenda et Marc qui t’y ont fait penser? » Tu secoues la tête, tu veux pas qu’il pense ne serait-ce qu’une seule seconde que cette discussion a lieu parce que tu as fais une nouvelle rencontre. « Non, non, il n’y a personne d’autre. C’est juste de les voir si heureux et amoureux, ça m’a fait comprendre qu’on avait pas ça, nous. La partie amoureux je veux dire. » Il l’a dit lui-même, il ne l’est pas et force est d’admettre que toi non plus. « Ça va être bizarre, de ne plus dormir avec toi. » que tu admets, parce que tu sais que la suite logique des choses, c’est que tu te trouves ton propre appartement, ou du moins, que tu arrêtes de partager ton lit avec Archie. Que vous appreniez à être des amis, peu importe ce que ça veut dire ou quelle forme ça va prendre. Mais ce soir, tu te niches contre lui sans la moindre intention de partir. Tu prolonges le moment, l’habitude, le confort qu’il t’apporte. Demain, ce sera autre chose mais pour l’instant, malgré tout, t’es vraiment bien juste là, dans ses bras.

« En un an, je ne t’ai jamais vu changer d’idée sur quoique ce soit. » Elle marque un point. Archie a toujours eu une personnalité de béton. Il sait ce qu’il veut, ce sont il a envie, ce dont il a besoin (il croit) et c’est ainsi. Très rarement on a réussi à lui implanter une nouvelle idée. Il a tout appris de son père et de son expérience au milieu d’autres hommes d’affaire comme lui. Il est vrai qu’il n’a jamais été doté de romantisme, ni à l’encontre d’Autumn, ni à l’encontre d’une quelconque. Il aurait peut-être pensé que, après une année de relation avec la jeune femme, il aurait senti quelque chose de nouveau fleurir en lui : en vain. Cela ne l’empêche pas de penser que ces douze derniers mois, presque treize, avaient été à la hauteur de ses espérances. Autumn et lui avaient ri énormément, seulement eux deux contre le monde. Il l’avait vu prendre de la maturité et de la confiance. Elle avait grandi, tout comme lui. Il ne tirait que du positif de cette relation même si elle était hors norme. « Je ne voudrais pas que tu changes pour moi. » Une moue s’installe sur le visage d’Archie et il hoche doucement de la tête. Il attrape la main de son amie pour jouer machinalement avec ses doigts en les observant. Il la laisse finalement retomber sur le matelas et relève le nez pour offrir un regard compréhensif à Autumn. « T’as raison. Je ne pense pas que je pourrais changer, de toute façon. » Il ricane en grimaçant. Il sait très bien pourquoi jamais l’idée d’avoir des enfants ne lui a effleuré la pensée. Au plus profond de son cœur, il n’a jamais considéré les femmes comme des partenaires d’une vie. Mais, cette idée, il la brûle, l’écrase avec sa semelle et lui crache dessus. Cela faisait longtemps qu’il ne s’était pas battu contre lui-même. Il avait oublié, en compagnie de sa copine, que sa véritable nature le poussait jadis à poser les yeux sur les hommes aussi. Un frisson couvre sa peau de chair de poule et il souffle un dernier soupir long : « Et puis, un petit Archie, ou une petite Autumn de plus sur cette Terre : elle explose, c’est certain. » Rire mou dénué d’émotion. Il passe sa main dans son cou.

L’évidence tombe. Tous les deux le savaient au fond de leur être qu’ils n’étaient pas comme les autres. Ils ne se sont jamais partagé des mots d’amour. Ils ne se sont jamais regardés dans le blanc des yeux tandis que les secondes et les minutes s’écoulaient lentement. Il n’a jamais senti les papillons dont toutes les histoires parlent. Ça n’avait pas été un coup de foudre, non plus. Seulement une rencontre dans un taxi en plein déluge. Il l’avait trouvé magnifique, évidemment, mais un futur à ses côtés ne s’était pas tracé derrière ses paupières. Mais, ce qu’ils possèdent est tout aussi précieux. Il ne veut pas la perdre. « T’es mon humain préféré aussi. » Lèvres pincées, il lui offre un sourire rassuré. Il enroule machinalement son bras autour d’elle pour la serrer contre son torse. C’est ce qu’ils ont fait pendant un an : le réflexe sera toujours là, encré au fond de lui comme un instinct primaire. Il ne peut s’empêcher de lui demander si elle a rencontré quelqu’un d’autre qui aurait fait naître des papillons dans son ventre à elle. « Non, non, il n’y a personne d’autre. C’est juste de les voir si heureux et amoureux, ça m’a fait comprendre qu’on avait pas ça, nous. La partie amoureux je veux dire. » Il n’aurait pas été jaloux si elle avait répondu autrement, étrangement. Comme s’il n’avait pas l’impression qu’Autumn lui appartenait. Le sentiment est étrange et le bouleverse, même. Il se met à fixer le plafond, sourcils froncés, se demandant si la jalousie avait déjà existé dans son cœur avant de disparaître ou s’il n’avait jamais ressenti le besoin de faire de la jeune femme sa sienne, son unique. « Ouais, je comprends. » Il marmonne, sceptique. « C’est ridicule. » Il reprend en regardant Autumn. « Je n’aurais pas été jaloux si tu m’avais dit que tu voyais quelqu’un d’autre. J’aurais peut-être même… été heureux pour toi ? » La réalisation lui arrache une moue surprise et un ricanement perdu s’échappe de ses lèvres en bouffées saccadées. Il pose son menton sur la tête de son amie pour l’empêcher de voir son visage. Il se trouve soudainement ridicule. « Ça va être bizarre, de ne plus dormir avec toi. » Le constat le surprend et retourne son estomac. C’est vrai. Il n’a plus l’habitude de posséder un lit à lui tout seul, un lit tellement large et vide qu’il s’y sent comme dans le milieu de l’océan, carcasse offerte à tous les prédateurs à l’odorat aiguisé. « On est pas obligé de tout arrêter d’un seul coup. Tu veux me faire faire une crise cardiaque, ou quoi ? » Il glousse, souhaitant éviter de penser à la suite. Il n’aime pas les changements de routine. Il a toujours misé sur la stabilité. « On peut rester colocataire le temps que tu… te lances dans de nouvelles aventures ? » Les termes utilisés, quétaines à souhait, lui soulèvent le nez. « Celui ou celle qui ramène quelqu’un d’autre à l’appart a tous les droits sur le lit. » Il propose, à moitié sérieux, à moitié sarcastique. La vérité, c’est qu’il ne veut pas se retrouver seul. Il craint la solitude. Alors il cache son inconfort derrière de mauvaises blagues. « Mais, si tu veux te joindre à moi si je ramène une autre fille, t'es la bienvenue. »    

Spoiler:

« T’as raison. Je ne pense pas que je pourrais changer, de toute façon. » Tu secoues la tête. Toi non plus, tu penses pas qu’il pourrait changer, le Kwanteen. Et par dessus-tout, t’as pas vraiment envie qu’il change non plus. Même si votre relation elle, doit changer. Même si l’habitude et le confort qui existent entre vous deux doivent soudainement disparaître, tu espères sincèrement que certaines choses resteront les mêmes. La facilité que tu as à lui parler, les millions de moqueries sur le monde entier que vous sortez tous les deux, les fous rires qui vous appartiennent et cette complicité que tu espères ne disparaîtra pas même si vous arrêtez toute démonstration d’affection physique. Ou du moins, celles qui sont associées normalement au couple. C’est pas parce que vous couchez plus ensemble que tu peux plus te blottir dans ses bras comme en ce moment, pas vrai? « Et puis, un petit Archie ou une petite Autumn de plus sur cette Terre : elle explose, c’est certain. » « On évite le destruction de la planète, t’as vu comme on est selfless. » Archie rit, mais pas vraiment et toi, tu te contentes de ricaner à la simple idée. C’est sûr qu’un mélange de vous deux, c’est une combinaison chaotique. Une combinaison qui n’existera jamais, vous l’avez tous les deux bien compris et si t’aurais aimé que ça se fasse sans malaise et sans répercussion, la vérité c’est que ça vient chambouler tout ce que vous avez pris pour acquis dans la dernière année.

Il te demande s’il y a quelqu’un d’autre, si un autre garçon ne serait pas venu chambouler ton univers pour venir créer cette conversation. Tu lui assures que ce n’est pas le cas, tu peines d’ailleurs à imaginer que tu puisses te sentir prête à te remettre en couple avec qui que ce soit si rapidement même si techniquement, tu ne vis pas un échec amoureux en mettant fin à ta relation avec Archie telle qu’elle est actuellement. « Ouais, je comprends. » Tu échappes un long soupir alors que tes doigts viennent machinalement jouer avec le tissus de son t-shirt. « C’est ridicule. » Tu lèves la tête et si tu ne lui demandes pas à voix haute ce qui est ridicule, tu sais qu’il peut lire la question dans tes yeux. « Je n’aurais pas été jaloux si tu m’avais dit que tu voyais quelqu’un d’autre. J’aurais peut-être même… été heureux pour toi? » Il te fait rire à nouveau. « Tu penses que tu pourras te souvenir de ce moment quand j’aurai vraiment rencontré quelqu’un d’autre? » Parce que le moment viendrait tôt ou tard et tu ne pouvais qu’imaginer que la présence d’Archie et la complicité de votre lien pourrait éventuellement être intimidante pour un potentiel petit-ami. « Pas question de faire peur à mes prétendants, compris? » que tu lances, plein d’humour dans la voix. « Et en échange, je promets de ne pas faire fuir celle qui fera éventuellement chavirer ton coeur. » Tu n’avais pas l’intention de sortir de la vie du Kwanteen et tu espérais que ce petit arrangement aurait le pouvoir de le rassurer et de détendre l’atmosphère en même temps, bien que tu ne pouvais t’empêcher de te sentir un peu triste face à tous ces changements à venir. « On est pas obligé de tout arrêter d’un seul coup. Tu veux me faire faire une crise cardiaque, ou quoi? » Tu secoues la tête tout en riant. « On peut rester colocataire le temps que tu… te lances dans de nouvelles aventures? » « T’allais quand même pas me mettre à la porte. » Tu lèves la tête et lui fais des gros yeux, prétendant d’être offusquée par sa suggestion. « Je suis pas pressée de partir. » Parce que tu les aimes bien, vos habitudes et t’es pas très chaude à l’idée de vivre toute seule après tout ce temps à vivre avec lui. « Celui ou celle qui ramène quelqu’un d’autre à l’appart à tous les droits sur le lit. » « Deal. » Tu sais pas s’il est vraiment sérieux, tu pourrais pas dire si toi-même tu l’es, mais c’est ce genre de trucs que tu ne veux pas perdre avec Archie alors tu joues le jeu. « Mais si tu veux te joindre à moi si je ramène une autre fille, t’es la bienvenue. » Tu fais une grimace tout en secouant légèrement la tête. « J’suis pas certaine d’être ouverte au partage. » que tu avoues alors que tu reposes ta tête sur son torse. « Te sens pas obligé de ramener une autre fille trop vite quand même. » que tu souffles d’une voix plus basse, plus douce aussi. Parce que même si t’es pas amoureuse d’Archie, t’es attachée à lui plus qu’à n’importe qui d’autre et tu le sais bien que la première fois que tu vas le voir avec une autre, ça va pincer, ne serait-ce qu’un petit peu.

Les dés avaient été lancés et leur destin scellé : Autumn et Archie protégeraient la Terre d’un cataclysme en évitant de la peupler de mini eux. La discussion avait rassuré le garçon d’une certaine façon et il se donnait maintenant le droit de souffler un peu et de se détendre. Au fond de lui, il savait que la jeune femme ferait une excellente mère, seulement, tous les deux ne feraient pas un bon duo pour donner la vie. L’actionnaire n’a jamais imaginé bercer un enfant dans ses bras, ni chantonner des comptines aux paroles terriblement niaises, ni ramasser une tache de vomi dans le tapis du salon. Lorsqu’il imagine son futur, il le voit rempli d’argent et de liberté, peut-être sur une île au milieu du pacifique, peut-être dans une ville américaine, peu importe. Il n’y a qu’une seule chose dont il est certain : il ne souhaite pas être attaché à un rocher puis largué par-dessus-bord.

Même si le sujet de la séparation s’est glissé naturellement entre lui et Autumn, il souhaite tout de même connaître les raisons derrière cette soudaine honnêteté. Il pense d’abord que sa protégée a rencontré un autre homme mais elle réfute l’hypothèse. Dans tous les cas, il ne pense pas qu’il aurait réellement été déçu de l’apprendre, comme s’il savait qu’il n’appartenait pas à elle, et qu’elle n’appartenait pas à lui. Ils ne sont pas enchaînés. « Tu penses que tu pourras te souvenir de ce moment quand j’aurai vraiment rencontré quelqu’un d’autre? » Mais ça ne l’empêchera pas de vouloir assurer sa sécurité dans le futur, même s’ils ne dorment plus sous les mêmes couvertures. « Je ne peux rien te promettre. Peut-être que je serai pire que ton père lorsqu’il s’agira d’examiner tes futurs prétendants. » Il le dit avec une pointe d’humour même si, au fond, il sait qu’il ne laisserait aucun con approcher Autumn. Il la connait dans sa vulnérabilité. Lorsqu’ils se sont rencontrés, il a rapidement constaté qu’elle était une jeune femme qui s’adaptait à son environnement pour le mieux ou pour le pire. « Et en échange, je promets de ne pas faire fuir celle qui fera éventuellement chavirer ton coeur. » Le sourire qui étire ses lèvres est léger tandis que l’idée lui effleure l’esprit. Non. Il ne pense pas qu’une femme fera chavirer son cœur. Mais inutile de lancer la discussion qui l’effraie bien trop. « D’accord, d’accord. » Il marmonne en levant les yeux vers le plafond pour finalement rabaisser le nez et poser ses lèvres sur la tête d’Autumn, scellant la promesse.

Un frisson lui traverse l’échine lorsque son amie lui rappelle que, par conséquent, ils ne partageront plus ce lit. Même s’il ne craint pas le célibat, il doit admettre qu’il n’est pas prêt à tout de suite se retrouver seul dans cet appartement trop grand pour un être humain. « T’allais quand même pas me mettre à la porte. » Évidemment pas. « Tu peux rester autant que tu veux. Et même dans le futur, peu importe quand, tu peux repasser, ça me fera toujours plaisir. » L’appartement reste à lui, c’est une évidence. Le loyer est terriblement élevé dans ce coin luxueux de Brisbane et il n’a jamais demandé à Autumn d’en payer la moitié. Malgré tout, il ne pense pas posséder le lit pour autant. Alors il propose un deal ridicule que la jeune femme entre dans le jeu sans poser de questions. Il ne pense pas réellement rapporter des femmes ici en sa présence. Il possède un minimum de conscience. « J’suis pas certaine d’être ouverte au partage. » Il fait une moue faussement déçue. « Te sens pas obligé de ramener une autre fille trop vite quand même. » Ses mots soulèvent la commissure de ses lèvres. Au fond, tous les deux sont prêts à laisser l’autre faire son envol, mais ils sont d’accords sur une chose : ça ne sert à rien de presser les choses parce qu’ils sont heureux ensemble, amants ou amis. Ça a toujours été le cas.