Saül n'attend pas. Saül n'a pas l'habitude d'attendre. On l'attend partout : pour ses rendez-vous professionnels autant que pour le reste de ses occupations. Même pour le poker, on l'attend. On guette sa montre, on soupire, on se plaint de sa capacité à faire patienter les gens qu'il a lui-même sollicités. Mais aujourd'hui, Saül attend. Il observe la porte, se promène dans les couloirs en attendant son rendez-vous du jour. C'est un rendez-vous qu'il a lui-même improvisé, ce qui lui arrive rarement. Rien n'est improvisé dans l'agenda de Saül, mais il est prêt à faire une exception pour une affaire comme celle-ci.

Mais il attend. Il est patient. Il est venu le soir, quand il a compris qu'il aurait plus de chance de l'attraper au vol à ce moment là; mais elle n'est pas sortie. Elle n'a pas mis la tête dehors. Il attend, le regard accroché à la porte. Ariane et Abel l'attendent pour le repas et ça tombe bien : l'italien ne s'éternisera pas. Après un énième regard à sa montre, l'homme d'affaires cède à l'impatience. Sous son bras, une chemise cartonnée tient une fière place. Elle est un peu enflée, pleine de tout ce que Saül a pu obtenir au sujet de Misty. Un vrai nom de sorcière. L'allure d'une gamine. Pas le genre qu'on croirait capable de fouiner, pas le genre qu'on estime avoir les épaules suffisamment larges pour se faire une place là où elle ne devrait pas être. Elle est comme la moisissure; prise trop tard, elle envahira tout. Voilà qui tombe bien, parce que Saül n'est pas homme à se laisser surprendre. Il faut avouer que cette fois-ci, pourtant, elle a su avoir un coup d'avance. Mais Saül a encore quelques cartes dans sa manche.

Si elle ne répond pas au prochain coup qu'il plante du poing contre le bois de la porte, il y mettra une charge de l'épaule. « Ouvrez, je sais qu'il y a quelqu'un. » "Megan n'est pas ici", dira sa colocataire. "Je vais attendre", qu'il répondra. S'il faut qu'il passe la nuit dans ces maudits escaliers, il le fera, quitte à se ruiner le dos et l'orgueil. On ne farfouille pas dans la vie du Williams sans y laisser des traces et si le travail de cette fouine est digne des plus grands, ce n'est pas le premier chantage auquel Saül est confronté. Rien ne l'agace plus que les rapaces. « Plutôt que de vous savoir en train d'envoyer des mails, j'ai préféré venir vous voir en face. C'est plus agréable, non ? » Son poing martèle encore contre la porte, qu'il finira par marquer de la semelle de sa chaussure. Les voisins finiront peut-être par appeler la police, à ce rythme. Tant pis.

Enfin, le bruit cesse. D'un mouvement brusque, Saül arrache l'élastique qui ferme la pochette cartonnée. A l'intérieur, soigneusement rangées, les preuves attendent. Puisqu'elle ne veut pas ouvrir, l'italien trouvera un autre moyen de communiquer avec elle. Voilà qui lui rappelle les papiers passés sous la porte de Auden pour lui demander combien les parents avaient été rudes avec lui, pour le punir d'une bêtise ou deux. « Je croyais que la vie de photographe de presse donnait au moins le luxe de s'offrir un endroit à soi, Megan. » Cette fois-ci, Saül a quelques pions d'avance.

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Megan Monroe & @Saül Williams

L’idée était mauvaise. Du début à la fin, de A à Z, de l’introduction à la conclusion. N’importe qui d’autre aurait plissé le nez et fait marche arrière en comprenant que Williams dissimulait quelque chose de bien plus énorme et illégal qu’une liaison ou une attirance secrète pour la gente masculine. Si dans les deux derniers cas il aurait risqué de perdre son épouse, pour détournement de fond il risque plusieurs années de prison, il risque de voir sa réputation détruite, de perdre son job et tout ce qu’il a, finalement. N’importe qui se serait dit que, menacé de tout voir s’effondrer, l’homme d’affaire répliquerait et aurait réalisé qu’il valait faire marcher arrière et enterrer mes découvertes. Parce que je n’ai pas les épaules. Parce que je me suis empêtrée dans quelque chose qui me dépasse.

N’importe qui, mais pas moi. J’ignore le danger jusqu’à me retrouver dans les emmerdes jusqu’au cou et, là encore, je continue de nager à contre courant. Je ne suis pas raisonnable ou mesurée. Je ne suis pas réfléchie et capable de me poser pour peser le pour et le contre. Je ne l’ai jamais fait et ce n’est pas aujourd’hui, alors que je rêve d’un joli pactole à la clé, que je vais commencer.

Les coups contre la porte me font sursauter alors que je sortais de la douche. Ce soir, j’ai décidé de m’offrir une soirée à moi : Shiloh n’est pas là et, après un masque pour le visage, une épilation des sourcils et un bain d’huile pour mes cheveux, je me suis glissé sous le filet d’eau chaude et j’ai fermé les yeux pendant de longues minutes. Tout était parfait. Persuadée que Williams finirait bien par payer pour enterrer mes découvertes, je me suis même projetée. J’ai profité de la sensation grisante d’avoir un pactole à portée de main, et j’ai imaginé comment je dépenserai tout l’argent qu’il allait m’offrir pour faire cesser ce chantage. Jamais je n’ai pensé possible qu’il me retrouve, qu’il remonte jusqu’à moi et je n’ai pas senti le vent tourner. « Ouvrez, je sais qu'il y a quelqu'un. » Pourtant il est là et, interdite, j’observe la porte d’entrée trembler au rythme de ses coups, et un coup d'œil dans le judas m’a confirmé son identité. Il aurait pu tomber sur Shiloh. J’aurais pu mettre en danger ma colocataire et, aujourd’hui, je me sens si vulnérable que j’en tremble, enroulée dans ma serviette de bain. Dans n’importe quel film, un homme de main m’attendrait aussi derrière la porte. Il m’infligerait la correction du siècle avant de me laisser pour morte dans mon appartement ou sur un trottoir. Sauf que nous sommes dans la vraie vie, et que je tente de garder la tête froide : personne ne m’attend de l’autre côté de la porte pour me saigner. « Plutôt que de vous savoir en train d'envoyer des mails, j'ai préféré venir vous voir en face. C'est plus agréable, non ? » Je disparais dans ma chambre et, les mains tremblantes, j’enfile rapidement des sous-vêtements propres et une tenue de sport qui traîne sur ma chaise de bureau. Je dénoue la serviette qui tenait mes cheveux avant de regagner le couloir qui mène à la porte d’entrée, celle la même sur laquelle l’italien déverse encore et toujours son impatience.

Les coups cessent, et j’arrête de respirer avec eux. Mes yeux sont attirés par les feuilles qu’il glisse sous la porte d’entrée et, sans un bruit, je m’approche pour m’en saisir. Mes yeux parcourent la feuille et j’ai la tête qui tourne. Williams ne s’est pas contenté de chercher un moyen radical et simple pour me faire taire : il a constitué un véritable dossier sur moi et un frisson me parcourt l’échine. « Je croyais que la vie de photographe de presse donnait au moins le luxe de s'offrir un endroit à soi, Megan. » Mon prénom résonne comme une provocation et je déglutis, prends une profonde inspiration, et j’entrebaille la porte d’entrée. « Vous êtes venu tout seul ? » Le cas contraire, son garde du corps aurait violemment poussé la porte et, de toute façon, je n’aperçois personne d’autre. « Ma mère m’a toujours dit de jamais laisser entrer d’inconnus. » Le ton est sarcastique, et je masque ma peur derrière mon cynisme. « Vous êtes là pourquoi ? » Pour discuter ? Pour me filer une correction ? « Mon mec va pas tarder à arriver. Vous avez quelques minutes, pas plus. » Mon mec n’existe surtout pas, mais il représente une vaine tentative de lui faire comprendre qu’il vaut mieux qu’il évite de me cogner. La peur au ventre, je recule de trois pas et j’ouvre un peu plus la porte. « Comment vous m’avez trouvée ? » Est-ce important, au fond ?

Derrière la porte, on s'agite. Il a cessé de bouger, Saül. Il attend à nouveau, patient, quand les pas se font plus pressants de l'autre côté de la porte. Dans la sécurité de l'appartement, quelqu'un s'est rendu compte de sa présence. Comment ne pas le faire, quand il donne des coups contre le bois depuis de longues minutes déjà ? Elle a probablement posé sa main contre la surface boisée, jeté un œil dans le judas pour se confronter au visage fermé de l'italien. Si Saül avait été observateur, il aurait remarqué la rainure de lumière, mouvante, au sol. Au lieu de ça, ses yeux sont rivés devant lui, allant de la serrure à la poignée. Elle finira par ouvrir. Si elle ne le fait pas, il reviendra encore, encore et encore. Saül n'est pas très patient, mais il a l'art de la traque dans le sang. Quand on navigue dans les eaux troubles de la finance, on apprend à se faire requin. Megan est jeune, elle affiche sa vie sur les réseaux sociaux en toute impunité et vole celle des autres à l'aide de son objectif. Par chance, Saül a la peau dure. La menace de le faire renvoyer de son poste ne le laisse cependant pas de glace et si la naissance d'Abel l'a grandement assagit, il n'en reste pas moins celui que l'on surnomme coccodrillo, l'animal à sang froid.

Enfin, après ce qui semble une éternité passée à glisser des feuilles par dessous la porte close, la lumière change. S'il avait été capable d'afficher autre chose qu'une mine contrite, Saül aurait probablement arboré un sourire contenté. « Vous êtes venu tout seul ? » « Perspicace. » Téméraire. Fouineuse. Sorcière. De toutes les sangsues, elle est celle qui préoccupe le plus un Saül dont les mains ne sont plus si blanches et qui s'abîment à force de trafiquer des comptes. Peut-être aurait-il fallu qu'il mette des gants, qu'il prenne son temps; mais ce n'a jamais été dans ses habitudes. « Ma mère m’a toujours dit de jamais laisser entrer d’inconnus. » Elle a les papiers qu'il a glissé sous la porte entre les doigts et Saül sait que c'est ce qui l'a motivé à ouvrir. « Pour ce que je sais, ta mère ne s'est jamais beaucoup occupée de toi. » Le ton glacial tranche assez bien avec la brulante colère qui l'habite. Il en a oublié le vouvoiement, Saül. C'est peut-être la surprise de se retrouver face à une si jeune personne qui lui fait perdre ses bonnes manières; aussi doit-il se souvenir qu'il fait fasse à son corbeau et pas à une femme qui a l'âge de son fils. Cosimo, parlons-en d'ailleurs. Ou pas. Bientôt, peut-être. « Et puis, je crois que nous ne sommes pas des inconnus. Plus depuis que vous avez envoyé le premier mail. » Il en sait plus sur elle qu'il n'en sait sur Damon. Elle a un joli visage, un air enfantin qui tranche avec sa profession. Elle a des yeux insoupçonnables, des cheveux en bataille que l'on devine dans l'embrasure de la porte. Elle donne l'impression d'être une biche entre les phares d'une voiture autant qu'elle pourrait être un serpent dans l'herbe. Latet anguis in herba.

« Vous êtes là pourquoi ? » Pour parler orage, tempête, pluie et tonnerre, évidemment. Les yeux de l'italien ne lâchent pas la mince tranche de ce qu'il peut voir de Megan, dans la lumière du couloir. Sous son bras, la pochette s'agite imperceptiblement. Elle sait pourquoi il est venu, il n'a pas besoin de faire dans l'explicite. « Mon mec va pas tarder à arriver. Vous avez quelques minutes, pas plus. » Un rire manque de s'échapper des lèvres de l'homme d'affaires. Elle a du cran, l'art et la manière d'envoyer balader ses plaignants. Malheureusement pour elle - pour eux - le plaignant du soir n'est pas prêt de s'en aller, surtout pas maintenant qu'elle a entrouvert la porte. Il y glisserait bien un pied pour s'assurer qu'elle ne la refermera pas. « Je serai très bref. » qu'il promet, d'un ton presque mielleux. L'erreur de l'italien réside peut-être dans son trop plein d'assurance, invoqué par la sensation d'avoir à nouveau l'avantage. Elle est pourtant celle qui détient les secrets, mais elle a eu la maladresse de les lui offrir sur un plateau d'argent - par mail, très exactement. « Comment vous m’avez trouvée ? » « Un bon investigateur ne dévoile pas ses sources, Megan. » Il déteste quand on l'appelle par son prénom, soupçonne donc que tout le monde est logé à la même enseigne. La froideur laisse place à l'arrogance qui le caractérise. "Tout est dans le menton", lui a-t-on dit un jour.

Ses doigts parcourent à nouveau les papiers qui se trouvent dans la pochette - ceux qu'elle n'a pas déjà en main. Le mec, fantôme ou pas, attendra son tour. « Les gens que vous avez l'habitude de voler ne sont pas comme moi. Ils se fichent d'exposer des amantes, ils se fichent aussi d'exposer leurs consommations. » Elle sait peut-être aussi pour les excès de l'italien, mais il ne lui laissera pas le luxe de dévoiler cette partie là aussi de ses errances. « Je veux que nous compreniez que nous ne jouons pas dans la même cour, eux et moi. » Ni elle et lui, il est inutile de le préciser. « Mais j'admire votre audace. Les mails... Rafraîchissant. » "Agaçant", c'est plutôt le mot, en fait. Saül se souvient encore des sueurs froides qu'il a éprouvées en comprenant qu'il avait été pris la main dans le sac si tôt, dans ses manœuvres. Et par une gamine, en plus de ça... C'est humiliant. Heureusement, l'italien tombe enfin sur la feuille qu'il voulait sortir du lot. Des relevés hôteliers en pagaille. « Il est marié, n'est-ce pas ? » Le voilà qui en tend un exemplaire à Megan, dans l'entrebâillement de la porte. « Cameron Russo. »

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Megan Monroe & @Saül Williams

Est-il là pour me refaire le portrait ? Est-il venu seul ? Patientera-t-il devant la porte d’entrée jusqu’à ce que j’ouvre, ou bien finira-t-il pas la défoncer pour s’inviter à entrer tout seul ? Vous allez me dire que j’aurais mieux fait de me poser toutes ces questions avant de le faire chanter. Et vous auriez raison de le faire, pour ce que ça vaut. Sauf que je ne réfléchis jamais avant. A la loterie de la naissance, j’ai fait l’impasse sur la tempérance et j’ai reçu à la place un peu trop d’audace et d’insouciance. Je finis toujours par payer le prix de mes conneries : concernant ma petite tentative d’escroquerie, je ne m’attendais simplement pas à ce que ça arrive aussi tôt. « Perspicace. » Il se dit seul. Il a l’air seul mais je ne peux m’empêcher de jeter des regards soupçonneux à gauche et à droite. Qu’il soit seul ne change finalement pas beaucoup la donne : je doute qu’il soit capable de se salir les mains au point de me régler définitivement mon compte, mais je suppose que ne souffrirait d’aucun cas de conscience à l’idée de me passer à tabac. « Pour ce que je sais, ta mère ne s'est jamais beaucoup occupée de toi. » Là, je grince des dents. J’ai pas regardé les papiers qu’il a glissé sous la porte assez longtemps pour me rendre compte qu’il était remonté aussi loin. Mon passé, il n’y a que Shiloh qui le connaisse, et elle connaît également la règle d’or : ne jamais en reparler avec moi. « Allez vous faire foutre. » Mon regard noir accroche la sien, pour autant, je ne ferme pas la porte, pas plus que je ne l’ouvre plus grand pour le laisser entrer. Pas avant que je comprenne quelles sont ses intentions. « Et puis, je crois que nous ne sommes pas des inconnus. Plus depuis que vous avez envoyé le premier mail. » Moi je pensais l’être. Moi, je me cachais fièrement derrière un alias de mon invention, fière de ne jamais avoir été inquiétée, fière d’être assez discrète pour qu’aucune des célébrités à deux balles que je fréquente ne sache que c’est aussi moi qui délivre ces précieuses photos à la presse. « Je serai très bref. » « C’est bien ce qui me fait peur. » Un coup de poing dans les dents, c’est bref non ? « Voyez, je suis assez fière d’avoir des dents parfaitement alignées sans jamais avoir eu besoin d’appareil. » J’ai pas envie que ça change. « Vous êtes là juste pour discuter ? » J’attends un hochement de tête, une confirmation, même une pointe de sarcasme qui pourra me rassurer.

Il fallait refermer la porte et le laisser derrière. Il fallait appeler les flics. Voilà ce que vous me diriez sûrement. Sauf que je ne fais preuve de bon sens qu’après avoir pris mes décisions et seulement les jours pairs. Pas de chance, on est le onze du mois. Alors j’ouvre un peu plus grand, je recule de quelques pas mais je l’invite pas pour autant à faire comme chez lui, plus vite il partira, plus vite je serai soulagée. « Un bon investigateur ne dévoile pas ses sources, Megan. » Ses sources, il les a certainement grassement payées avec l’argent qu’il vole à son entreprise. Les gens comme Williams ont assez de fric pour acheter tout ce qu’ils veulent, et ça aussi, j’aurais dû y penser. J’y ai pensé, je me suis simplement dit qu’il achèterait mon silence, que ça lui causerait moins de tracas que de se faire chier à enquêter sur moi. « Les gens que vous avez l'habitude de voler ne sont pas comme moi. Ils se fichent d'exposer des amantes, ils se fichent aussi d'exposer leurs consommations. » « Je vole rien. » Et ça, je n’en démordrais pas. « Les secrets ça devrait appartenir au domaine public. » Parce que ça fout des gens en l’air, ça détruit des familles, et ça crée toujours un bordel monstre. Moi, je rétablis l’ordre des choses. « Je veux que nous compreniez que nous ne jouons pas dans la même cour, eux et moi. Mais j'admire votre audace. Les mails... Rafraîchissant.» Il a un complexe de dieu l’italien. Vu tout ce que je sais sur lui, ça devrait pas me surprendre. « Je vous propose pas de boire un thé ou un café. Je sais que vous préférez la poudre, mais j’ai pas de ça chez moi. » Je pique. Je mords parce que c’est mon mécanisme de défense. On parle de secrets, et je lui montre que moi aussi je n’ai pas encore joué toutes mes cartes dans les mails.

Lui aussi en a encore quelques unes dans la manche, d’ailleurs.

« Il est marié, n'est-ce pas ? » J’ai pas besoin de baisser les yeux pour savoir de qui il parle. Des hommes mariés, je n’en fréquente pas cent. Si je le fais, c’est pour voir ce qu’il a en sa possession pour le prouver. Des photos ? Des relevés de journal d’appel ? Nos textos ? Ah, des notes de chambre d’hôtel. « Cameron Russo. » « Connais pas. » Je hausse les épaules, je joue les innocentes même une fois prise la main dans le sac. « Vous avez sûrement un meilleur radar que moi pour détecter les hommes adultères. » Puisqu’il fait partie du lot ou en tout cas, il en fait partie. J’ai pas besoin de le préciser, ce serait insulter son intelligence et s’il est beaucoup de choses, il a pas l’air d’un idiot. « Il a l’air d’aimer l’Emporium, c’est tout ce que je peux vous dire. Paraît qu’ils ont une piscine à débordement sur la terrasse. » Et des chambres à se damner, et une vue imprenable sur toute la ville. Il l’a emmenée là bas, sa maîtresse slash nouvelle épouse slash mère de son rejeton conçu hors mariage ? « Vous avez dû débourser une fortune pour constituer ce joli dossier. C’est con, j’en demandais pas tant. »

« Allez vous faire foutre. » Oh elle a du chien, la gamine. Elle a du mordant, elle sait répondre. Elle donne à opiner du chef, elle fait faire à Saül un petit hochement de tête qui, chez lui, signifie autant un "merci" que le respect. Les répliques de l'italien ont fait leur effet et il n'en attendait pas moins, lui qui se sait si bien renseigné sur le cas Megan Monroe. Elle a su se faire corbeau chanteur mais Saül sait se faire patient, quand il s'agit d'attendre ses proies. C'est comme cela que font les crocodiles, dans la nature. Et Saül a toujours adoré les observer. Mais il sera bref, l'homme d'affaires. Plus bref, disons, que ce qu'ont l'habitude de faire les crocodiles. Il en a assez d'attendre. Cette fois-ci, il se sait avantagé. « C’est bien ce qui me fait peur. » Oh, elle a raison d'avoir peur, mais elle a tort de l'avouer. « Voyez, je suis assez fière d’avoir des dents parfaitement alignées sans jamais avoir eu besoin d’appareil. » De bons gènes, alors. Parfait. « Je sais. » qu'il lance, sourire mauvais aux lèvres. Non il ne sait pas, mais il souhaite s'assurer qu'elle sache, elle, qu'il a le pouvoir de tout découvrir. Qu'il a un coup d'avance sur elle, même quand elle pensait mener la danse avec ses petites manigances. « Vous êtes là juste pour discuter ? » « Juste pour discuter. » Ce qui est, en soi, une bataille pire que celle qui pousse parfois Saül à utiliser ses poings.

Mais "juste pour discuter" ne signifie pas pour autant que la bagarre se jouera sans armes. Saül a déjà dévoilé combien il en sait au sujet de Megan et il sait déjà ce qu'elle a appris à propos de lui. Sont-ils à égalité pour autant ? Non, bien sûr. Si Saül est venu, c'est parce qu'il jubile de lui montrer qu'elle a déjà perdue. Qu'elle est déjà perdue si elle n'accepte pas les termes du contrat qu'il lui présentera bientôt. « Je vole rien. Les secrets ça devrait appartenir au domaine public. » Un choix de mots audacieux, pour une gamine qui se perd entre les draps d'un homme marié. Les secrets ne sont la possession que des gens qui peuvent de les acheter. « Je vous propose pas de boire un thé ou un café. Je sais que vous préférez la poudre, mais j’ai pas de ça chez moi. » Alors ça aussi, elle sait. Saül continue de feuilleter ses papiers, l'air de rien. Il retient un geste machinal, celui qui repousse la poudre du dessous de ses narines.

Si Megan n'a pas de poudre, elle sait en revanche dissimuler ses attirances en se cachant derrière l'objectif. Les relevés de l'hôtel n'apprennent rien à Megan qu'elle ne sache déjà et elle ose nier, en plus, la gamine. Elle a la peau plus dure que Saül ne voudrait le concéder, lui qui s'attendait à ce qu'un regard la trahisse. Au lieu de ça, elle ne flanche pas. Cameron Russo ? « Connais pas. » Saül laisse le papier lui glisser des doigts, alors qu'il garde ses yeux arrimés à ceux de la jeune femme. Les papiers s'amoncèlent doucement à ses pieds. « Vous avez sûrement un meilleur radar que moi pour détecter les hommes adultères. » « Oh ça c'est bas. » Mais maintenant, il est marié. Maintenant, Ariane et lui sont dans les clous. Maintenant il y a Abel. Plus rien n'est comme avant et la pique n'atteint pas l'homme d'affaires, qui déteste pour autant qu'on le mette dans le même sac que l'espèce d'artiste qu'est Russo. Bien sûr, Saül ne connaît rien à ce monde, mais il côtoie ces starlettes de loin - et de loin, c'est déjà trop proche. « Il a l’air d’aimer l’Emporium, c’est tout ce que je peux vous dire. Paraît qu’ils ont une piscine à débordement sur la terrasse. » « Oui, je sais. » Non, il ne sait pas. Ariane et lui ne fréquentait pas cet hôtel, trop exposé à des découvertes du genre qu'il expose à la photographe. « Vous avez dû débourser une fortune pour constituer ce joli dossier. C’est con, j’en demandais pas tant. » « Russo, il en demandera tant. Sa femme paiera cher pour l'avoir entre les doigts. » Elle ne lâchera pas, la gamine. Elle est plus tenace que la gale. C'est une plaie qu'il faudra traiter par le feu - le plus tôt sera le mieux.

Rangeant ses papiers, Saül semble déjà sur le départ. « J'ai quelques contacts qui seront ravis de se débarrasser de vous et de votre couverture. Lauren... » La femme de Cameron. Si elle le menace de le quitter, qu'adviendra-t-il de la gamine ? Saül secoue la tête, plante à nouveau ses yeux dans ceux de Megan. C'est bleu contre bleu, alors que le picador s'apprête à achever le taureau sur le sable de l'arène. « Il l'a quittée pour vous ? S'il ne le fait pas maintenant, il ne le fera pas non plus quand le divorce lui pendra au nez. Croyez-moi, je les connais, les hommes adultères. » Et ce sourire, oh ce sourire qui ne le quitte plus. « Megan Monroe perdra ses passe-droits et ses nuits à... l'Emporium. Une tragédie. Vous demanderez à Russo de vous écrire un film à ce sujet. » A moins que...

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Megan Monroe & @Saül Williams

Ne le laisse pas entrer. Ne le laisse pas entrer. Elle tente de crier, la petite voix de la prudence dans ma tête. Elle tente de se faire entendre pour une fois, juste une fois pour changer. Elle voudrait que je referme la porte à double tour, que j’appelle les flics si l’homme d'affaires continue à déverser son impatience sur la porte d’entrée, quoi qu’il m’en coûte puisque ma sécurité est plus importante. Sauf que je ne me suis pas construite en jouant cette carte-là. Je n’ai pas réussi à tirer mon épingle du jeu malgré la donne plutôt pourrie que j’avais au début en étant prudente et en ne prenant aucun risque. Pour protéger ses arrières, je soupçonne l’italien prêt à tout et ce n’est certainement pas le fait d’anéantir quelqu’un comme moi qui lui pèsera sur la conscience. Les gens comme moi ne sont rien pour les gens comme Williams. « Juste pour discuter. » Il m’offre la confirmation dont j’avais besoin et, si je sonde son regard à la recherche d’une preuve de sa sincérité, je finis toutefois par ouvrir le verrou qui bloquait la porte.

Je ne l’invite pas à faire comme chez lui. Je ne l’invite pas à s’installer pour discuter calmement autour d’un café ou d’une tasse de thé. Je reste autant sur la défensive que plantée dans l’entrée, attendant qu’il joue ses cartes pour jauger de mes chances d’emporter la partie. Il sait qui je suis. Il est capable de lier ma véritable identité à celle que j’ai créée de toutes pièces. Il est capable de détruire ce que j’ai construit en rendant mon visage public et, ce faisant, de me priver de toute chance de passer inaperçue au sein des événements mondains que fréquentent les starlettes australiennes.

Et alors ? J’ai tout construit à partir de rien, je peux reconstruire. M’installer ailleurs, quitter Brisbane ou même y rester, mais laisser le temps aux gens d’oublier qu’il est plus prudent d’associer mon joli minois à celui d’une persona non grata Je m’en fous. Je m’en fous un peu moins quand il fait glisser jusqu’à moi la première carte maîtresse de son jeu, la preuve de ma liaison avec un homme tout sauf libre. « Oh ça c'est bas. » C’est bas parce que je panique. C’est bas parce que mes mécanismes se mettent en place et que je me retrouve comme souvent à devoir nager à contre courant pour tenter de me sortir d’une galère dans laquelle je me suis moi même fourrée. Mais j’ai l’habitude de boire la tasse, sûrement plus que lui qui mène depuis la naissance une vie de privilégié. « Oui, je sais. » - « Grand bien vous fasse. » Si j’ai la peau dure, je suis tendue. Je suis tendue puisque je sais qu’il n’est pas là juste pour que mon chantage cesse : il aurait pu faire ça à distance. Il est là parce qu’il a lui aussi des cartes à jouer, et je doute d’avoir envie de savoir lesquelles. « Russo, il en demandera tant. Sa femme paiera cher pour l'avoir entre les doigts. » Sa femme. Si je passe mes nuits et jours à me tenter de me convaincre qu’elle ne représente pas l’ennemie - je n’aspire pas à l’avoir pour moi seule - un frisson me parcourt toutefois l’échine lorsqu’il ramène sur le devant de la scène le statut social de mon amant. « J'ai quelques contacts qui seront ravis de se débarrasser de vous et de votre couverture. » Il continue d’abattre ses cartes : après la liaison, les fondements même de mon existence. Naïve, pressée et orgueilleuse, je l’ai attaqué sans le penser capable de riposter si fort. « Lauren... Il l'a quittée pour vous ? S'il ne le fait pas maintenant, il ne le fera pas non plus quand le divorce lui pendra au nez. Croyez-moi, je les connais, les hommes adultères. » - « Je me fous qu’il la quitte ou pas. » Parce que je ne suis pas une gamine idiote : je ne me berce d’aucune illusion et jusque-là, ma clairvoyance m’a empêchée de tomber amoureuse. Je suis peut-être attachée à lui ou à tout ce qu’il représente - les limites sont devenues floues - mais je n’ai jamais exigé de devenir le centre de son univers. « Megan Monroe perdra ses passe-droits et ses nuits à... l'Emporium. Une tragédie. Vous demanderez à Russo de vous écrire un film à ce sujet. » - « Je suis pas une grande fan du septième art. » Je suis forte. Je me suis bâtie seule. Je n’ai pas besoin de Williams, pas besoin de Cameron et pas besoin de Misty Meadow non plus.

Sauf que, d’un coup, la perspective de tout perdre me donne le tournis. D’un coup et maintenant qu’il étale sous mes yeux le résultat de mes conneries, j’ai le ventre qui se noud et la gorge qui se serre. Je peux encaisser de tout perdre, mais je n’en ai pas envie. Je ne veux pas avoir à me réinventer une fois de plus. Je ne veux pas recommencer tout en bas de l’échelle : je me souviens encore de la galère de mes débuts. Je me crois peut-être forte, mais il faut croire que je ne le suis pas tant que ça. Que je me suis habituée à mon mode de vie, à mes passe-droits. Megan Monroe n’a pas envie de se retrouver dans un appartement aussi miteux que celui dans lequel elle a grandi. Megan Monroe n’a pas envie de renouer avec la solitude, celle qui tord le ventre lorsque les lumières sont éteintes. « Vous êtes méprisable. » Tout chez lui l’est. Son assurance, ses larcins, sa malhonnêteté et sa certitude qu’il s’en sortira toujours et malgré tout parce qu’il est né dans la bonne famille. « Et avec ou sans moi vos sales petits secrets resteront pas éternellement cachés. » Avec ou sans moi. Le début de la reddition. J’avance doucement, je renifle le terrain, je me demande ce qu’il veut, ce qu’il propose puisque s’il n’avait rien à offrir pour enterrer la hache de guerre il ne serait pas là. « Qu’est ce que vous voulez ? » Les doigts serrés sur les relevés qu’il m’a donné, je désigne la pochette en carton qu’il tient dans ses mains du bout du menton. « Qu’est ce que vous avez d’autre ? » Je veux connaître l’étendue des dégâts. Je m’accroche comme je peux pour chasser la désagréable impression qu’il me tient. « Vous auriez pas fait le déplacement juste pour me montrer ça. Et vous auriez pas fait le déplacement juste pour me faire taire. » Je suis dos au mur, mais je suis pas stupide pour autant.
 

« Je me fous qu’il la quitte ou pas. » « Cela ne durera pas longtemps. » Parce que Russo ne quittera jamais son laideron de femme. Il a probablement construit avec elle une bulle qu'il voudrait sauver de la tempête. Megan est un à-côté. Megan est une distraction. Megan sera écartée quand elle deviendra gênante - et elle le sait. Elle le sait et elle n'en a pas peur, ou alors elle sait parfaitement mimer le calme et l'assurance. Encore des qualités que Saül ne peut qu'admirer. S'il est venu ragaillardi par l'assurance que son plan allait fonctionner, l'italien ne s'attendait certainement pas à affronter le mur que constitue Megan Monroe, avec son arrogance et son répondant de lionne. Russo finira pas la quitter et c'est bien dommage, parce qu'ils auraient fait une jolie paire. Monroe aurait fini par devenir le centre de l'attention de la presse et ça, Russo ne l'aurait peut-être pas toléré. On aurait fini par l'oublier lui à son profit à elle. Elle aurait vécu la grande vie, la vraie, pas celle qu'elle dissimule derrière un pseudonyme. « Je suis pas une grande fan du septième art. » « Vous auriez été grandiose sur un grand écran. C'est modeste de votre part de penser le contraire. » qu'il lance, moqueur. L'élastique de sa pochette claque alors qu'il amorce un mouvement pour se détourner. Cette bataille-ci n'est pas perdue, mais elle n'est pas gagnée non plus. Sûr de lui, Saül est convaincu qu'elle finira par accepter d'écouter ce qu'il a à proposer. Il reviendra peut-être jouer au porte-à-porte, un jour ou l'autre.

Peut-être plus tôt que prévu.

« Vous êtes méprisable. » C'est un "merci" qui passerait presque la barrière des lèvres de l'italien, mais rien ne vient. Ses yeux retrouvent ceux de la jeune femme. « Et avec ou sans moi vos sales petits secrets resteront pas éternellement cachés. » Mais avec toi, ils ne resteront pas cachés du tout. Et il ne peut en être ainsi, pas alors que tout est parfaitement parfait et que la vie est douce. Pas alors que les choses rentrent dans l'ordre... ou presque. « Qu’est ce que vous voulez ? » Voilà donc la partie que préfère Saül : les négociations. Il n'y a en fait rien à négocier, ou du moins pas grand chose. « Que tout s'arrange, pour tout le monde. » Mais surtout pour lui. « Qu’est ce que vous avez d’autre ? » Le voilà qui fronce les sourcils, à présent. « Votre carrière et votre source principale entre les doigts. Ce n'est pas assez ? » Parce qu'il cherchera plus, s'il le faut. Parce que sa conne de génitrice pourrait peut-être se mettre à parler, elle aussi, s'il pouvait la retrouver et la pousser un petit peu à donner sa vision des choses. Quelques billets pourraient peut-être arranger les choses. « Vous auriez pas fait le déplacement juste pour me montrer ça. Et vous auriez pas fait le déplacement juste pour me faire taire. » Qu'elle est intelligente, cette gamine. Elle ira parfaitement bien pour remettre Damon dans le droit chemin.

Saül ménage son effet, mais Saül ne sourit plus du tout. Il n'y a pas à sourire, quand on en vient à ces sujets là. « J'ai une solution qui nous arrangera tous les deux. Vous y gagnerez la sécurité, un statut, et un accès au monde dans lequel vous peineriez à vous cacher, si nous continuions notre petite guerre. » Et tout est déjà écrit, rédigé, avec le soin qu'on connaît à l'homme d'affaires. Tout ce qu'il lui propose, c'est déjà beaucoup - selon lui. « J'ai un fils d'à peu près votre âge que je dois marier pour des questions personnelles et juridiques. » Pour des questions qu'il ne lui exposera pas, pas avant qu'elle y soit mariée - si elle consent à se laisser passer la bague au doigt. « C'est un mariage qui vous assurera une certaine sécurité financière et un statut social unique. Mais vous le savez déjà, Megan. » Si elle a bien fait son enquête, elle le sait déjà. Dans la pochette cartonnée, le contrat prénuptial attend sagement d'être dévoilé. A la seconde où elle osera sous-entendre qu'elle pourrait accepter, Saül dégainera le sésame qui lui ouvrira l'autoroute de la tranquillité.

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Megan Monroe & @Saül Williams

« Cela ne durera pas longtemps. » - « C’est gentil de vous inquiéter pour moi, mais jusque-là j’ai pas le moindre problème à ce niveau. » Je là je suis toujours capable de capter son attention, de lui manquer d’une entrevue à la suivante, de créer un besoin urgent de me voir d’une photo aguicheuse envoyée sur son téléphone, de le faire accourir en claquant des doigts. C’est ce que je me dit pour combattre la frustration, celle des soirs où il annule nos plans pour rester avec elle, celle des weeks end entier dans d’autres ville auxquels elle a droit quand je dois me contenter de chambre d’hôtel, celle qui naît du simple fait de savoir que je le partage, avec elle seulement peut-être, mais c’est déjà trop. « Vous auriez été grandiose sur un grand écran. C'est modeste de votre part de penser le contraire » Je réponds d’un regard noir. J’aurais pu lui dire que même si c’était vrai, je suis bien plus à l’aise derrière l'objectif. Que je l’ai trop observé cet univers de starlettes et d’hypocrisie et que je suis bien trop entière pour aspirer une seule seconde à en faire partie. Sauf que Williams n’est ni mon confident ni mon psy, dieu soit loué, et qu’il ne mérite pas que je gaspille ma saville à lui expliquer pourquoi certaines personnes sont plus à l’aise dans l’ombre que sous les projecteurs.

Non, je veux que cette discussion s’achève. Qu’il prenne ses clics et ses clacs (et surtout ses preuves sordides de ma liaison) et qu’il disparaissent aussi vite qu’il est apparu. Je veux qu’il quitte mon appartement puisque chaque objet qu’il touche ou qu’il effleure me semble souillé et empoisonné. « Que tout s'arrange, pour tout le monde. » - « Que tout s’arrange pour vous. » Le reste, il s’en moque évidemment. « Votre carrière et votre source principale entre les doigts. Ce n'est pas assez ? » - « De plus que les relevés de chambre d’hôtel, je veux dire. » Puisque, sans photos, sans témoignages, ils prouvent peut-être que Cameron a une liaison mais ils ne m’impliquent pas directement là dedans. Bien sûr, ça n’a pas la moindre importance. Qui que soit la fille, Lauren menacerait de le quitter et je passerais à la trappe. Mais je fais bonne figure, je compose un regard froid, un regard de garde pour garder la face. « C’est beaucoup. Mais face à votre réputation, votre fortune, votre liberté et peut-être même votre mariage, qu’est ce que ça représente finalement ? » Moi je ne suis rien ni personne. Lui par contre, il a tout à perdre.

Il a tout à perdre mais je ne suis pas naïve. Je sais que, dans un monde comme le nôtre, les gens comme moi l’emportent rarement face à des gens comme lui. Ceux qui ont de l’argent, du pouvoir et autant de leviers pour détruire leurs opposants. Mais je ne l’imagine pas capable d’avoir fait le déplacement juste pour me prévenir qu’il allait m’enterrer. Non, s’il est là, c’est qu’il veut quelque chose. S’il est là, c’est qu’il a quelque chose à me proposer. « J'ai une solution qui nous arrangera tous les deux. Vous y gagnerez la sécurité, un statut, et un accès au monde dans lequel vous peineriez à vous cacher, si nous continuions notre petite guerre. » Présentée comme ça, la situation semble tourner en ma faveur. Mais je me méfie de lui, je me méfie de ce qui va arriver puisqu’il transpire la malhonnêteté de chaque pore de sa peau. « J'ai un fils d'à peu près votre âge que je dois marier pour des questions personnelles et juridiques. » Mes yeux déjà grands s’écarquillent et mangent un peu plus mon visage. Je m’attendais à un paquet de choses, mais certainement pas à ça. Incrédule, je reste muette et pour peu je chercherais la caméra cachée. « C'est un mariage qui vous assurera une certaine sécurité financière et un statut social unique. Mais vous le savez déjà, Megan. » Et au terme de sa tirade, j’éclate de rire. Un rire cristallin, mais un rire nerveux. Parce qu’au fond je le sais déjà, que ce n’est pas une blague : il est prêt à tout. « Épouser votre fils, rien que ça. » A quelle époque se pense-t-il ? Arranger un mariage est encore d’actualité dans l’univers dans lequel il évolue. « Après tout ce que vous avez découvert sur moi, vous voulez que j’épouse votre fils ? » Mon milieu social d’origine, la façon dont j’occupe ma vie et ma liaison sordide, tout cela ne fait-il pas un peu tâche pour l’homme d’affaires ?

Et là, les battements de mon cœur s’accélèrent. Parce qu’il sait déjà que tout ça n’est qu’une connerie, que je devrais le foutre à la porte et la verrouiller avant d’attraper une valise et de me tirer à l’autre bout du pays. Seulement moi, je réfléchis à toute vitesse et, comme cela va souvent de paire, je réfléchis mal. Je l’envisage vraiment. Je me surprends à me questionner sur ce que serait ma vie si j’acceptais, et ce qu’elle serait s’il mettait toutes ses menaces à exécutions. Je me rattrape aux branches et je me demande comment sauver les meubles. « Je suis pas conne. C’est une cage dorée que vous m’offrez. » Et j’ai passé toute mon enfance et mon adolescence en cage : je n’ai pas l’intention de me laisser enfermer à nouveau. « A quoi il me servirait, cet accès à votre monde si je suis en cage hein ? » Si je ne peux plus exercer mon boulot ? S’il exige de moi que je me comporte d’une façon et pas d’une autre ?

Pourtant, il a prononcé un mot qui capte mon attention et je le soupçonne de m’avoir assez étudiée pour en être conscient. Peut-être pense-t-il cependant que c’est le statut social unique qui me fait briller les yeux, qui pousse mon esprit malade et avide à considérer son offre, pour de vrai. Mais ce n’est pas le cas, le mot qui retentit encore et encore dans ma tête c’est la sécurité qu’une telle association m'offrirait. Et la sécurité, quand on a vécu la vie que j’ai vécu, c’est tout ce à quoi on aspire.

« Que tout s’arrange pour vous. » Evidemment. Pour qui d'autre ? Est-ce si important ? Si, au passage, les autres peuvent bénéficier aussi des arrangements faits dans la vie de l'homme d'affaires, tant mieux. Sinon... « De plus que les relevés de chambre d’hôtel, je veux dire. » Saül lâche un rire, piqué par l'arrogance de la jeune femme. « Vous croyez qu'il faudra plus à cette femme ? Vous ne valez pas plus pour Russo. Il ne se mettra pas en danger pour vous. » Il déteste qu'elle tente de renverser la situation. Bien sûr qu'elle doit avoir des preuves, elle. Mais elles ne sont rien face à la réputation de Michael Hills. Ils couvriront Saül, bien sûr. Saül est celui qui est a sorti de la merde quand ils y étaient jusqu'au cou. Quand plus plus personne n'achetait leurs parures. Quand il a fallu trouver de nouvelles équipes et taper du poing sur la table pour que les investisseurs ne s'enfuient pas en courant. Oui, Saül ose espérer que tous ne lui tourneront pas le dos, si Megan devait faire éclater un scandale.

Et après tout, elle n'est rien qu'une petite lanceuse d'alertes. Rien de très important, à l'échelle du monde dans lequel évolue Saül. Elle a bien plus à perdre, bien plus à reconstruire. Cela, le quarantenaire tient à s'en convaincre. « C’est beaucoup. Mais face à votre réputation, votre fortune, votre liberté et peut-être même votre mariage, qu’est ce que ça représente finalement ? » « Cela représente toujours plus que la vie d'une gamine qui a choisi de mettre son nez là où il ne fallait pas. » Il est prêt à tout risquer, Saül. Après tout, il n'y a pas d'autre solution. Ariane n'approuvera pas, mais Ariane sera avec lui dans ce combat là. C'est tout ce qui compte. L'argent, la réputation... Tout cela, Saül refuse d'y penser. Dans l'immédiat, il faut sauver les meubles, même si pour cela, il faut jeter une pauvre gamine sous le bus.

Epouser Damon, rien que ça. Le rire, ce n'est pas une réaction que Saül attendait. La consternation, oui. La colère, aussi. Le rire ? « Épouser votre fils, rien que ça. » Il est pourtant très sérieux, Saül, quand il opine du chef comme si la tâche n'était pas si absurde. Il a la sensation que le marché qu'il offre à Megan est loin d'être malhonnête. Plus que ça, la vie qu'il vend à Megan pourrait être bien meilleure que celle qu'elle vit en ce moment même, pleine d'insécurité et d'incertitudes. Bien sûr, c'est un monde que Saül ne connaît pas, ou de très loin. Lui aussi il a un jour eu besoin de se plier aux règles de plus grand que lui. Ca a toujours été pour mieux écraser les autres par la suite, cependant. N'est-ce pas ce qu'il offre à Megan ? Des armes pour écraser les autres - mais certainement pas lui. « Après tout ce que vous avez découvert sur moi, vous voulez que j’épouse votre fils ? » C'est après tout ce qu'elle a découvert sur lui qu'il veut qu'elle épouse son fils. « Et bien, vous avez certaines qualités qui pourraient lui être bénéfiques. » Le simple fait qu'elle soit une femme en est une.

« Je suis pas conne. C’est une cage dorée que vous m’offrez. » C'est mieux qu'une cage tout court. « A quoi il me servirait, cet accès à votre monde si je suis en cage hein ? » « Les jeunes gens dans votre genre ne se préoccupent que de leur liberté personnelle. C'est plutôt affligeant. » La liberté est un bonheur personnel. Une chose à laquelle on accède après des sacrifices. Un fantasme dont on ne se rassasie que pour un temps, avant qu'elle ne fane et ne laisse place à la déception. « Si c'est la pratique de votre... métier, qui vous inquiète, je vous demande de réfléchir à ce que ce que vous appelez la "cage dorée" pourra y apporter. » Pour Saül, elle n'a de toute façon pas de métier. Pourquoi s'en inquiéter, alors ? « Je ne vous demande pas d'aimer mon fils. Je ne vous demande que de signer quelques papiers qui vous assureront plus de sécurité que vous n'en avez jamais connu. Je vous demande de faire connaissance avec lui et d'être là pour l'épauler, comme il sera là pour le faire en retour. » Elle cèdera. Elle doit céder. « Je vous propose de venir jouer dans la cour des grands. Qu'en dites-vous ? » Le mariage, c'est pour le meilleur et pour le pire. Elle n'aura plus qu'à vivre le meilleur, après avoir traversé le pire.

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Megan Monroe & @Saül Williams

« Vous croyez qu'il faudra plus à cette femme ? Vous ne valez pas plus pour Russo. Il ne se mettra pas en danger pour vous. » Je serre la mâchoire, je fais grincer mes dents du haut contre celle du bas sans pour autant quitter Williams des yeux. Il a raison et je ne cherche même pas à la nier : si sa tendre et douce n’a ne serait-ce qu’un soupçon quant à ses infidélités, il mettra fin à tout. Parce que j’ai beau être attachée à lui, je ne suis pas naïve et aveuglée pour autant : il est lâche, mon amant. Il tient trop à sa petite vie parfaite pour prendre le risque qu’un écart ne vienne tout gâcher. Il sauvera les apparences et il s’accrochera à ce qu’il reste à sauver de son mariage et moi je me verrai obligée de me passer de mon meilleur atout, mon meilleur informateur. « Cela représente toujours plus que la vie d'une gamine qui a choisi de mettre son nez là où il ne fallait pas. » En guise de réponse, je laisse échapper un rire sarcastique. Je n’ai pas besoin d’argumenter, pas besoin de débattre avec lui pour que nous sachions tous les deux que je le tiens autant qu’il me tient : il ne serait pas là sinon. S’il était certain d’avoir la main gagnante, s’il était persuadé de pouvoir me détruire sans que je ne lui rende la pareille, il aurait agi sans me prévenir au préalable. Il aurait frappé et je n’aurais rien vu venir.

Mais il est là, et cela signifie qu’il a quelque chose à proposer, une solution, qu’il veut quelque chose. La révélation du quelque chose en question me fait écarquiller les yeux et éclater d’un rire nerveux. L’italien plaisante, c’est la seule explication au ridicule de la situation. C’est la seule chose qui explique qu’il me fasse son offre avec un tel aplomb. Mon rire, il est surtout nerveux. Il le devient d’autant plus lorsque je comprends qu’il est sérieux, qu’il a été sérieux tout au long de cette conversation. « Et bien, vous avez certaines qualités qui pourraient lui être bénéfiques. » « Des qualités qui… » Incrédule, je fais écho à ses paroles le temps que l’Information, celle avec un i majuscule me monte au cerveau. Si Saül Williams est sur le pas de ma porte, c’est pour arranger un mariage entre moi et son fils que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam. « Qu’est ce qu’il en dit de tout ça ? » Sourcils froncés, je cherche à comprendre quel jeune homme normalement constitué accepterait ce genre de proposition. « Qu’est ce qui cloche chez lui ? » Pourquoi un père voudrait-il arranger une union pour son fils, un bon parti qui plus est, avec une jeune femme qui n’est personne ?

« Les jeunes gens dans votre genre ne se préoccupent que de leur liberté personnelle. C'est plutôt affligeant. » Ok boomer. Je veux savoir ce qu’il m’arriverait à moi dans toute cette histoire, sa réalité et ses problématiques à lui, je m’en moque. Il y a bien longtemps que j’ai appris à ne me préoccuper que de moi-même : personne ne le fera à ma place. « Si c'est la pratique de votre... métier, qui vous inquiète, je vous demande de réfléchir à ce que ce que vous appelez la "cage dorée" pourra y apporter. » Un ticket d’entrée dans un milieu que je ne pouvais que rêver de frôler du doigt : c’est ça qu’il me propose. Mais dubitative et persuadée de tomber dans un piège, je garde mes bras croisés sous ma poitrine et les sourcils froncés. « Mon boulot, je pourrais continuer à l’exercer ? De la manière dont je le souhaite ? » Si et je dis bien si je venais à accepter sa proposition, ce serait pour ne pas devoir tirer un trait sur tout ce que j’ai construit. Quel intérêt si au bout du compte c’est ce que l’on attend de moi ? « Je ne vous demande pas d'aimer mon fils. Je ne vous demande que de signer quelques papiers qui vous assureront plus de sécurité que vous n'en avez jamais connu. Je vous demande de faire connaissance avec lui et d'être là pour l'épauler, comme il sera là pour le faire en retour. » Il ne suffit que de signer quelques papiers. C’est toujours plus compliqué que ça. C’est toujours plus compliqué qu’une signature en bas d’un contrat et ce sont les petits caractères qui m’inquiètent.

Comment peut-il vouloir ça pour son propre enfant ? La froideur de l’homme d’affaires me glace le sang. Et le jeune homme dont il est question, de quel monstre s’agit-il pour accepter sans ciller ce genre de situation ? Est-ce ce que je suis aux yeux du monde, de celui de l’italien en tout cas, une marchandise ? Le terme me fait froid dans le dos mais une part de moi, la plus incontrôlable, ne peux quitter des yeux la pochette en papier qu’il tient sous le bras. Qu’est ce que cela fait, de faire partie de ce genre de famille ? De contrôler tout le monde, de pouvoir tout faire, d’avoir enfin les manettes de sa propre vie ? Qu’est-ce que cela fait de ne manquer de rien et d’avoir tous les regards braqués sur soi en permanence ?

Qu’est ce que cela fait, de faire partie de quelque chose de plus grand que soi ? De ne plus être un laissé pour compte ? « Je vous propose de venir jouer dans la cour des grands. Qu'en dites-vous ? » Ma respiration est bruyante, preuve que mes méninges s’agitent. Au terme d’un silence pesant, trop pesant, je pose une question. Une seule. Mais une qui prouve que je mets mon doigt dans un engrenage qui me dépasse. « Qu’est ce qu’il y a d’écrit dans ce contrat ? » D’être là pour lui et pour l’épauler. Comme il le sera en retour. Williams ne laisse rien au hasard. S’il a choisi ces mots, c’est qu’il devait se douter qu’ils ne me laisseraient pas une fille avec une histoire indifférente.

« Qu’est ce qu’il en dit de tout ça ? » Il n'en dit rien parce qu'il n'a pas le choix. Le regard de Saül doit se montrer plus révélateur que de simples mots. En attendant, Damon n'a pas son mot à dire. Il n'aura qu'à se laisser porter - comme c'est facile. A la question de Megan, donc, Saül ne répondra pas. Il n'a pas besoin de se montrer si explicite, elle doit commencer à comprendre en face de qui elle se trouve. « Qu’est ce qui cloche chez lui ? » « Rien qui puisse vous porter préjudice. » Oh, si. « Il est gentil. Et un peu indiscipliné, aussi. » C'est le mot du moment, indiscipliné. Damon est le garçon préféré de Saül quand il se fait craindre de ses collègues et lorsqu'on parle de lui en bien. Cosimo est un enfant indiscipliné à qui il faut apprendre à être raisonnable - pour ne pas dire "à qui il faut apprendre à se taire et à écouter les grandes personnes" - et qui a déjà accepté que son père œuvrait pour son bien. Mais mesure-t-il bien que son père est déjà sur le sentier de la guerre ? A-t-il deviné que Saül ne mettrait que quelques petites semaines pour trouver celle qui serait une candidate parfaite pour le rôle ?

Donc, qu'est-ce qu'en dit Damon ? Beaucoup, certainement, dans l'oreiller contre lequel il pleure la nuit. Pathétique. Mais heureusement, son père est là pour sauver l'honneur qu'il lui reste. Megan est le joyau de la couronne, la clef de voûte. Saül sait qu'il ne trouvera pas mieux parce que tout se goupille si bien - comme c'est pratique. « Mon boulot, je pourrais continuer à l’exercer ? De la manière dont je le souhaite ? » Il faudra pourtant faire des concessions et Saül n'en mesure pas encore tout à fait les conséquences. L'homme d'affaires marque un temps d'arrêt. Surtout, ne pas se montrer trop précipité. C'est faire montre d'empressement et c'est donner à son adversaire la sensation qu'il est au contrôle des négociations. Saül ne laissera pas à la gamine ce confort. Bien qu'il soit en position de demande, elle a aussi beaucoup à perdre en refusant les propositions du quarantenaire. « Je vous serais grè de ne pas faire trop de vagues dans le cadre de vos activités. » C'est à dire "cesser de fouiner là où elle n'a pas sa place". Mais cela, elle doit l'avoir compris en s'attaquant à l'italien. Cependant, dans le malheur de Megan, il subsiste encore quelques traces de chance. C'est d'une cage dorée dont Saül ouvre la porte. Une cage dont elle peut s'éclipser s'il lui en vient l'envie, tant qu'elle y rentre avant que minuit ne sonne. Saül serait-il la bonne fée des contes ? Lui qu'on dit mauvais sait se montrer généreux, au final.

La respiration de Megan indique déjà à Saül que si elle n'a pas dit "oui", elle y pense. C'est à cela que l'homme d'affaires sait qu'il a gagné. Elle zieute la pochette dans laquelle Saül a déjà rédigé l'ébauche de ce qui pourrait ressembler à un contrat prénuptial. Quelques closes de rien du tout qui marquent simplement le début d'une nouvelle vie, pour cette enfant qui a mis un pied dans un monde auquel elle n'appartient pas. C'est une invitation, voilà. Rien de plus. « Qu’est ce qu’il y a d’écrit dans ce contrat ? » Au tour de Saül de faire durer le suspens. Il a abandonné tout sourire depuis quelques secondes. Ne pas trop jubiler, parce que c'est l'apanage de ceux qui n'ont pas l'habitude de gagner. « Je vous l'ai déjà dit: pour vous, une sécurité inespérée. » Et l'assurance que Damon se range. Parce que dans l'esprit de Saül, il ne suffira que de quelques papiers. Damon sait être raisonnable, c'est bien la plus grande de ses qualités. Sans se presser, Saül ouvre à nouveau la pochette, véritable cheval de Troie. Sous les photos, quelques feuilles reliées les unes aux autres par une sobre agrafe. « Tout a été vu avec un avocat dont je vous communiquerai les informations sous peu. » Quand elle aura signé. De sa poche, Saül sort sa carte de visite, qu'il laisse avec le feuillet tendu à Megan. « Il n'y a pas de piège. Tout est là. » qu'il assure en fermant la pochette.

Déjà, Saül est sur le départ. Il a rempli sa mission, a fait ce pour quoi il s'est présenté à la porte de cette petite fouine. Il est maintenant temps de célébrer, parce que Megan signera les papiers que Saül lui a tendu. Il ne peut en être autrement, au vu des conséquences exposées par l'italien. « Prenez le temps d'y réfléchir. Je ne veux que votre bien. Et vous ne voulez pas vous lancer dans une bataille que vous ne pourrez pas gagner, croyez-moi. » L'homme d'affaires resserre machinalement sa cravate. C'est son bureau qu'il retrouvera avant d'aller tout annoncer à Ariane. « J'ai été comme vous, un jour. » Et maintenant, il est pire. « Nous nous reverrons bientôt. » Cela, Saül en est assuré.