the name of the game
Megan Monroe & @Micah Tomlinson

Chacun est là pour se faire voir. Tous ont revêtu des robes et trois pièces de créateurs, toutes semblent concourir au titre de celui qui portera le plus gros joyau, tous rient aux éclats, parlent aux bonnes personnes, abordent des sujets triés sur le volet pour sembler plus importants, plus intéressants, plus cultivés ou plus empathiques qu’ils ne le sont réellement, tous sont là pour marquer les esprits, faire la une des journaux en tant que best dressed celebrity, tous souhaitent que leur nom reste sur toutes les lèvres.

Tous sauf moi.

Moi, je n’aspire qu’à me fondre dans la masse. Qu’à passer inaperçue et n’intéresser personne. Parce que ma place n’est pas ici. Parce que si je donne le change en agissant comme un poisson dans l’eau, je n’aurais jamais dû être conviée à ce gala de bienfaisance. Je n’ai pas l’argent pour. Je n’ai pas la célébrité pour et, surtout, je ne suis animée d' aucune bonne intention. Je vis pour le buzz, je respire scandale et je me nourris scoop. Bien sûr, mon appareil photo est resté au vestiaire : j’ai investi dans un téléphone portable dernier cri dont les clichés n’arrivent pas à la cheville de ceux capturé par mon réflexe flambant neuf - la faute à cette journaliste de pacotille qui a projeté l’ancien sur le bitume - mais l’appareil a l’avantage d’être discret. Ici, hors de question de me balader avec mon appareil pendu autour de mon cou. Ici, je dois sembler être l’une des leurs pour qu’ils baissent leur garde. Pour qu’ils se pensent à l’abri des regards. Bien sûr, je dois mon invitation à Cameron. L’une de ses célébrité a décliné, et j’ai pris sa place au pied levé. Tant que personne ne s’intéresse à moi, je suis à l’abri. Et j’ai appris à me fondre dans le moule lors de ces événements. Je porte une robe luxueuse juste ce qu’il faut pour ne pas attirer l’attention, mais pas assez pour fasciner qui que ce soit. J’ai assez de bijoux pour que leur absence ne soit pas suspecte, mais trop peu pour briller de mille feux. Je suis une taupe parfaite, puisque jusqu’ici, personne ne m’a jamais démasquée.

Personne, sauf la silhouette qui s’avance vers moi avec un sourire victorieux sur les lèvres. Ce soir, il a gagné la partie. Mais notre petit jeu n’a pas de fin : la prochaine fois, je serai une ombre, une ombre qu’il n’apercevra même pas. Depuis le temps, je le connais. Il va m’adresser un perdu avec un immense sourire. « Le dis pas. T’as gagné, reste humble. » Humble, il ne l’est pas et je ne l’envisage même pas sérieusement alors que mes doigts capturent une coupe de champagne au vol. « C’est dommage, la photo que j’avais réussi à prendre de toi était plutôt réussie. T’avais la bouche ouverte et le regard parfaitement vide. » Je nargue alors que je ne devrais pas la ramener. Il peut me faire foutre dehors en claquant des doigts, mais moi, je peux aussi révéler au grand public toutes les fois où il s’est servi de moi pour faire sa pub, pour monter de toute pièce une photo volée. Si j’avais gagné, je lui aurais envoyé le cliché par texto en quittant la soirée. J’étais là, tu ne m’as pas vue. Sauf que je suis prise la main dans le sac, et que je ne suis pas assez mauvaise perdante pour le nier : juste assez pour ne pas vouloir m’appesantir sur le sujet. « Allez c’est bon, crache le morceau, tu veux quoi cette fois ? » Comme contrepartie. Comme récompense pour sa victoire. Parce qu’il y a toujours quelque chose, parce que le brun est parfaitement conscient que les médias peuvent construire autant qu’ils peuvent détruire, parce qu’il fait partie des plus intelligents : ceux qui ont compris qu’ils pouvaient bosser avec moi plutôt que de fuir mon objectif.

Chaque fois qu'il l'apercevait ses lèvres s'étiraient, la victoire aux commissures, en un rictus satisfait.  Elle qui rasait les murs, gardait cet air éternellement candide, comme une enfant qui serait là par hasard, pensait berner son auditoire. De fait, avec ses airs innocents et ses parures discrètes, Megan se fondait dans la masse. Ni trop assurée dans ses gestes, ni trop timides dans les sourires qu'elle accordait à ceux qui avaient la chance de la remarquer, sous ses allures chétives. Elle l'avait trompé une fois. Peut-être deux. Puis Micah avait fini par démasquer celle qui se trouvait toujours au bon endroit au bon moment, objectif précieusement dissimulé, pour capturer des instants qui auraient dû rester confinés entre les murs majestueux de grands palaces, comme l'étaient les sommets des plus éminents du monde. Ce qu'ils faisaient ici n'avait rien de très confidentiel. Au contraire, personne ne se plaignait jamais de ces clichés volés, bien trop flattés de voir leur prétendu altruisme documenté dans la presse sans avoir eu à  le commanditer. A l'évidence Megan avait choisi le bon filon. Adossé au cadre d'une porte, les mains nonchalamment plongées dans les poches de son pantalon de costume, Micah l'observait en silence. La voir évoluer dans la pièce, insouciante, était aussi fascinant qu'amusant. Lui-même avait oublié ce qu'il faisait là ce soir. Une sombre histoire de parrainage. Il écoutait distraitement les conversations artificielles qui se tenaient autour de lui, jamais très intimes. Les enchères des plus belles paroles, autant que les prouesses autoproclamées avec ostentation, avaient tendance à l'ennuyer.

Ni une ni deux, Micah s'élança vers la jeune femme sans se départir d'un sourire triomphant. C'était presque jouissif, de la voir se décomposer quand leurs regards se croisaient, comme le faisaient toutes les personnes qui lui vouaient une évidente antipathie. « Humble ? N'est-ce pas le thème de la soirée ? » rétorqua-t-il avec condescendance. Pour sûr, dans sa robe sans prétention, Megan était la plus humble du bal. Elle le taquina machinalement, accès d'orgueil avant de lui accorder la victoire, et la récompense qu'elle impliquait. « C'est dommage comme tu dis. Mais je suis prêt à t'en offrir une bien meilleure si tu te tiens bien. » La menace était subtile, mais elle était assez perspicace pour la comprendre. Megan n'était pas la bienvenue ici, et pas même elle ne saurait se convaincre du contraire. Comme un gosse capricieux, Micah ne se gênait pas pour la faire chanter un peu. C'était leur marché après tout. « Qu'est-ce que tu as pris d'autre de beau dis-moi ? J'ai pas l'impression qu'il se passe grand-chose d'intéressant ce soir. Et pourtant je suis là. » Il ne pouvait s'empêcher de se montrer arrogant, près à la piétiner de sa notoriété, tandis qu'elle n'était qu'un insecte, la lie du journalisme. « T'es futée Misty. Mais ça tu le sais. J'ai peut-être bien une mission pour toi, et j'ai l'impression que c'est pas un hasard si on se croise ce soir. » dit-il quand elle consentit enfin à s'enquérir de sa contrepartie. Cette fois, avait-elle précisé. A ses oreilles, cela sonnait comme le doux aveu de sa supériorité. « Tu connais Rory Craine ? Bien-sûr que tu connais Rory Craine. Son idylle avec Stella Madson dure depuis quelques mois et j'ai besoin de toi pour qu'on en parle. Ça doit bien valoir son pesant d'or le cliché d'un baiser spontané, non ? »

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Megan Monroe & @Micah Tomlinson

Bien sûr qu’il a un putain de sourire de conquérant sur le visage alors qu’il s’approche de moi, Tomlinson. Il a l’air d’un gamin le jour de noël et je sais d’avance qu’il va jouer les insupportables craneur, et c’est comme ça que je le déteste autant que c’est comme ça que je l’apprécie. Parce qu’il n’a pas froid aux yeux. Parce qu’il ne s’offusque pas et n’affiche pas une moue outrée en m'apercevant, parce qu’il a compris depuis bien longtemps qu’il pouvait jouer avec moi plutôt que jouer contre moi, et ça fait de lui l’un de mes meilleurs allié dans ce monde là. Je publie rien qui soit compromettant pour lui tant qu’il me donne quelque chose d’autre à me mettre sous la dent et, puisqu’il enchaîne les frasques, il y a toujours quelque chose. Il est derrière la plupart des choses qui fuitent à son sujet, et ça en fait à mes yeux un incroyable communicant. S’il n’avait pas décidé de jouer au playboy derrière une caméra, il aurait fait un redoutable commercial, à n’en pas douter. « Humble ? N'est-ce pas le thème de la soirée ? » Je lève un sourcil et, surtout, je relève le coup d'œil de l’acteur sur ma silhouette habillée d’une robe bien moins tape à l'œil que celles de ses congénères. C’est moi qu’il qualifie d’humble, mais, je le sais, mais c’est moins une insulte qu’une pique dont il a le secret, et elles m’amusent, ces dernières. « C’est triste. De voir la moitié des femmes ici présentes essayer si fort pour ressembler à des singes auxquels on aurait enfilé une jolie robe. » Quand moi, je n’ai pas besoin de ça, il est là le sous entendu à peine dissimulé. « Des hommes aussi. Il t’a coûté combien ce costume ? C’est de la location ? » Je lui adresse un clin d'œil avant de me reconcentrer sur l’assemblée. Notre échange ne peut pas durer plus de quelques minutes, au risque d’attirer une attention non désirée sur moi mais, pour l’instant, chacun semble centré sur son propre nombril et c’est parfait en plus de ne pas être surprenant.

« C'est dommage comme tu dis. Mais je suis prêt à t'en offrir une bien meilleure si tu te tiens bien. » La tête penchée sur le côté, j’attrape une coupe de champagne sur le plateau d’un serveur, pour mieux me fondre dans la masse. « Tu m’intéresses. Sur quelle pauvre fille t’as décidé de jeter ton dévolu ce soir ? » Où et à quelle heure la prendra-t-il dans ses filets ? Puisque lorsqu’on parle de lui, c’est toujours de ce genre de clichés qu’il est question. « Qu'est-ce que tu as pris d'autre de beau dis-moi ? J'ai pas l'impression qu'il se passe grand-chose d'intéressant ce soir. Et pourtant je suis là. » Il sait pertinemment que, pour l’instant, je suis venue pour rien. C’est souvent le cas dans ce genre d’événement, les gens se tiennent trop bien pour que je puisse empocher le moindre chèque à la fin de la soirée. Mais j’entends des choses, l’alcool délie les langues et, parfois, je fais quelques découvertes intéressantes. C’est un investissement, en quelque sorte. Quelque chose me dit que, ce soit, c’est la langue de Micah qui est prête à se délier. « T'es futée Misty. Mais ça tu le sais. J'ai peut-être bien une mission pour toi, et j'ai l'impression que c'est pas un hasard si on se croise ce soir. » - « Une mission ? » Il a beau m’avoir trouvée ce soir, il sait qu’avec moi, rien n’est gratuit. « Tu connais Rory Craine ? » Tout le monde connaît Rory Craine et, ces derniers temps, plus en mal qu’en bien. Mais Craine est surtout un sujet surexploité par les médias. Tout ce qui le concerne et qui concerne l’arrêt du tournage de The Trail’s End a déjà fait au moins une fois la une de toute la presse à scandale et à mon sens, la piste Craine est bouchée. Les gens font une overdose de cette histoire, et la vérité ne tardera de toute façon pas à exploser.

Aucun scoop. Rien qui ne m’intéresse ce soir en tout cas. «  Bien-sûr que tu connais Rory Craine. Son idylle avec Stella Madson dure depuis quelques mois et j'ai besoin de toi pour qu'on en parle. Ça doit bien valoir son pesant d'or le cliché d'un baiser spontané, non ? » Je fronce les sourcils, bien plus intéressée par ces révélations que je ne l’étais à la simple évocation du nom de l’acteur. « T’essayes de me faire croire que Craine fréquente une fille depuis plusieurs mois et que c’est pas encore sorti ? » Si c’est le cas, ça c’est intéressant. « Et évidemment, toi tu sais où et quand je pourrais dénicher les tourtereaux ? » J’ignore comment, mais l’air suffisant qui orne son visage le dit pour lui. « Tu sais comment je fonctionne. Je fais rien si je sais pas ce que t’y gagnes toi. » Parce que je veux un deal équitable. Parce que je veux m’assurer qu’il n’en retire pas bien plus que moi. Parce que, moi aussi, j’ai envie de poser mes conditions. « Ça a quelque chose à voir avec elle, je me trompes ? » Je n’ai pas besoin de préciser qui se dissimule derrière ce elle, et il n’a pas besoin de me confirmer que je ne me trompe pas.

Au pays des vanités, si ce n'était pour les gestes, parler d'humilité relevait davantage de l'insulte que de la flatterie. Megan l'avait compris sans pour autant s'en offenser, consciente qu'elle n'assistait à ces galas que par intérêt. Au contraire, elle était bien maligne de se dérober aux yeux inquisiteurs. Sa robe n'était pas de mauvais goût, n'importe qui d'autre lui trouverait d'ailleurs un charme discret, mais elle paraissait bien insipide dans ce cortège exubérant de couleurs, de bijoux flamboyants et d'associations invraisemblables. En la toisant de la tête aux pieds, Micah avait moins voulu la mépriser que saluer la maîtrise de son camouflage. Avec le temps, la jeune photographe avait appris à s'approprier des codes qu'elle trouvait certainement surfaits. Derrière ses airs faussement hagards, elle avait aussi appris à déguiser toute l'arrogance que les gens qui la déconsidéraient lui inspiraient paradoxalement. C'était bien ironique, mais Micah était encore assez perspicace pour se rendre compte qu'elle trouvait leurs outrances plus ridicules encore que sa prétendue insignifiance. Il s'était attendu à la riposte, en témoignait son éternel sourire satisfait. « Amen, moi non plus j'aime pas les gens qui en font trop. » dit-il avec une ironie non feinte. Megan saurait s'en amuser. Leurs rencontres jamais préméditées étaient si fréquentes qu'ils pouvaient se targuer de se connaître un peu. L'acteur aimait sa fougue et la façon qu'elle avait de ne pas s'écraser sous le poids de l'influence. Ici elle n'était qu'une mortelle parmi les dieux. « Dans ton jargon c'est de la location, mais c'est plutôt un prêt. Les marques savent à qui s'adresser pour se faire un peu de pub gratuite. J'ai rien à payer, je me contente juste de rester aussi fabuleux que d'habitude. » La plaisanterie était si sincère qu'il était facile d'en déceler la part de vérité. Comme beaucoup de ses confrères, Micah s'aimait avec conviction.

D'une main agile, Megan avait attrapé une coupe de champagne sur un plateau innocent. Ses yeux n'avaient pas bougé. « Aucune n'est aussi intéressante que toi à cet instant. » Si le ton était trompeusement charmeur, l'hypocrisie n'était pas entière. Ils savaient tous les deux qu'il avait gagné la partie. Il n'attendait que par politesse d'annoncer l'objet de la récompense promise. Convaincu que la chute était digne d'intérêt, il déroulait son histoire, scrutant les moindres réactions de Megan. L'indifférence tout d'abord, puis un enthousiasme curieux. Au premier abord, le nom de Rory Craine n'avait pas semblé la captiver. Foncièrement, Micah s'en était réjoui. Elle l'estimait à l'évidence autant que lui. « Il sait se faire discret depuis le scandale avec Byers. Cela dit sa copine n'a rien de discret, elle est même tout l'inverse. » distilla-t-il, en prenant toujours soin de laisser planer les mots. « Mais t'as tout compris. Moi aussi j'ai mes sources. » La lueur d'intérêt dans les yeux de Megan étincelait plus fort encore que les diamants qui flânaient aux cous des invitées. Micah déchanta quand elle s'appliqua à lui rappeler les règles du jeu. « Parce que je pourrais pas juste faire ça par charité ? Pourquoi tu crois que je suis là ce soir ? » s'exclama-t-il pour gagner du temps. Dans sa tête, sa proposition était assez alléchante pour lui faire oublier qu'il y avait toujours une contrepartie. Elle n'avait pas eu besoin d'invoquer le nom de Penny pour qu'il se mette à flotter dans la pièce. « Depuis quand ça t'intéresse ? J'ai peut-être besoin d'un coup de pouce pour démystifier un peu Rory à ses yeux. Évidemment si elle décide de venir pleurer dans mes bras ils seront grand ouverts. » avait-il concédé en haussant les épaules. Malgré toute la désinvolture qu'il essayait de feindre, la récompense lui tenait à cœur. « Alors, tu marches ou pas ? »

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Megan Monroe & @Micah Tomlinson

« Amen, moi non plus j'aime pas les gens qui en font trop. » - « Menteur. » Au royaume du paraître, Micah Tomlinson est roi et je doute que quiconque puisse se targuer de le connaître, le vrai lui et pas celui qu’il est pour les caméras. De mon côté, je me fiche bien de savoir s’il est réellement un dur à cuire ou s’il pleure encore lorsqu’il regarde le Roi Lion : tant que son charmant minois se vend, alors je signe.

Surtout qu’il n’est pas avare en tuyau, le brun. La plupart le concernent directement - il aime faire parler de lui et a compris que la presse à scandale était le meilleur moyen pour ça à condition qu’on se fiche que la publicité soit bonne ou mauvaise, que l’article soit basé sur des faits ou sur de l’air - mais il me glisse parfois une ou deux informations concernant d’autres artistes moyennant un service. Rien n’est jamais gratuit, mais l’affirmation fonctionne aussi bien dans un sens que dans l’autre alors je ne m’en offusque pas. « Dans ton jargon c'est de la location, mais c'est plutôt un prêt. Les marques savent à qui s'adresser pour se faire un peu de pub gratuite. J'ai rien à payer, je me contente juste de rester aussi fabuleux que d'habitude. » - « Tu devrais presque me filer une partie de ton cachet dans ce cas, pour chaque photo que je prends de toi qui donne de la visibilité aux marques qui te payent. » Si je lui montre toutes mes dents, mon sourire n’a pas grand chose d’authentique. Ô, bien sûr, je ne le déteste pas, l’acteur. J’ai même une certaine dose de respect pour son culot même si je me garde bien de l’exprimer à voix haute. Le seul problème avec lui - si toutefois c’en est un - c’est que jamais au grand jamais je ne lui accorderais ma confiance. Notre entente est basée sur ce que nous pouvons nous apporter l’un à l’autre et je suis certaine que s’il pouvait y gagner quelque chose ou si c’était le seul moyen de sauver sa peau, il n'hésiterait pas une seule seconde avant de me sacrifier. L’inverse était également vrai, il serait hypocrite de m’en offusquer.

« Aucune n'est aussi intéressante que toi à cet instant. » Moi verre coincé entre mes doigts je l’observe, regard en coin et sourire aux lèvres. « J’arrive pas à croire que ça fonctionne, ça. » D’un vague geste de la main, je le désigne. Son sourire, ses dents si blanches, son air charmeur et ses phrases d’accroche à deux balles.

Mais il a gagné. Aujourd’hui il a gagné puisqu’il peut me faire mettre à la porte sans que je n’ai eu le temps de prendre la moindre photo qui rembourse la robe que j’ai sur le dos et si je me permets quelques traits d’esprit, c’est uniquement parce que je sais qu’il ne s’en offusquera pas. J’attends. J’attends de connaître la couleur de ses exigences que je devine à des fins personnelles. « Il sait se faire discret depuis le scandale avec Byers. Cela dit, sa copine n'a rien de discret, elle est même tout l'inverse. » Je fouille ma mémoire à la recherche d’une information du genre qui aurait fuité dans les médias. Force est de constater que je ne trouve rien, et je suis pourtant bien informée. « Tu m’intéresses. Elle fait partie du milieu ? J'en ai jamais entendu parler. » Et j'entends parler de tout le monde. Si elle veut qu’on la voit, elle ne sera pas compliquée à trouver. Peut-être même facile à approcher. Sauf si… « Mais t'as tout compris. Moi aussi j'ai mes sources. » - « Et tes sources s’appellent aussi Stella c’est ça ? Quelle drôle de coïncidence. » Elle ne serait pas la première à tourner autour d’une star aspirante pour capter un peu de lumière et de célébrité.

Sauf que je connais Tomlinson. La proposition qu’il me fait est alléchante, mais à moins de savoir ce qu’il gagne à tout ça je ne peux pas accepter. Question de confiance, voyez ? « Parce que je pourrais pas juste faire ça par charité ? Pourquoi tu crois que je suis là ce soir ? » - « Personne donne à ces soirées. Ou en tout cas, pas sans s’assurer que tout le monde soit là pour le voir et en parler. » Ils sont tous là pour la même raison : au mieux se donner bonne conscience, au pire se faire passer pour de bon samaritains et Micah n’échappe certainement pas à la règle. « Depuis quand ça t'intéresse ? J'ai peut-être besoin d'un coup de pouce pour démystifier un peu Rory à ses yeux. Évidemment si elle décide de venir pleurer dans mes bras ils seront grand ouverts. » Mes lèvres s’étirent lorsque je comprends que j’ai touché juste : satisfaisant, mais pas surprenant. « Micah Tomlinson en amoureux transis, si on me l’avait dit... Tu pourrais utiliser ça pour donner un peu de substance à tes rôles. » Les bulles ont tout leur temps pour pétiller dans mon verre : je l’ai pris pour me donner de la contenance plus qu’autre chose. « Alors, tu marches ou pas ? » - « Bien sûr. »

Sauf qu’il doit se douter que c’est pas si simple.

« Mais à une condition. » Mes lèvres s’étirent un peu plus, formant un sourire presque carnassier. « Quand elle viendra pleurer dans tes bras, je veux être là. Je veux l’exclusivité là dessus aussi. » Un bras croisé sous l’autre, je quitte la foule des yeux pour enfin me tourner entièrement dans sa direction. « Si ta belle daigne t’accorder un peu d’attention et un rencard, je veux savoir où et quand. Et si tu me donnes un baiser fougueux à la fin du rendez-vous, t’auras même ta part. » Qu’il devra négocier durement évidemment, il me connaît bien pour le pressentir.

Menteur. L'accusation de Megan aurait pu paraître insultante si elle n'était pas si pertinente. Micah avait décidé de s'en amuser, esquissant un sourire satisfait. Évidemment qu'elle était si perspicace sur ses intentions. Il suffisait de l'avoir croisé au moins une fois pour savoir que les agissements de Micah Tomlinson étaient souvent une succession de machinations, le résultat d'ambitions opportunistes. D'ailleurs, Megan pouvait bien se flatter de graviter autour de lui. C'était un signe qu'elle était utile dans la mise en scène de sa vie. Lui-même n'était pas totalement naïf concernant les desseins de la jeune femme. Au moins aussi audacieuse que lui, elle n'usait pas que de son minois pour se fondre dans une masse flamboyante, mais pour obtenir quelques faveurs. Aux yeux de Micah, elle n'était pas cette femme au charme escroc qui en bernait d'autres que lui, tout comme il la savait insensible au sien. Il aimait cependant jouer de cette fausse attirance que chacun aimait faire valoir. C'était leur principal atout à tous les deux, même s'il ne s'était jamais montré efficace dans leur relation accidentelle. Megan perdait rarement le nord, se risquant à l'impertinence alors qu'elle la savait vaine. Une qualité que Micah admirait à l'évidence. « Fais gaffe tu deviens insatiable. Mais sois pas trop présomptueuse, si c'était pas toi qui prenais les photos ce serait quelqu'un d'autre. » avait-il objecté pour la remettre à sa place. Megan avait tendance à oublier qu'elle n'était qu'un instrument, et non l'objet qui attirait les convoitises. Si lui ou n'importe lequel de ses congénères vivaient une vie sans frasques, elle n'aurait plus d'autre choix que de troquer des robes qu'elle aimait foncièrement porter contre une veste de camouflage, et s'en remettre à photographier le quotidien des animaux dans la forêt australienne. Dans un recoin de sa tête, Micah l'entendait aisément répliquer que la différence était minime.

Ses sourires de façade ne servaient qu'à masquer une pointe de mépris. On sentait qu'elle s'appliquait à ne pas le froisser, tout en flirtant avec une audace qui plaisait à l'acteur. Un exercice d'équilibriste qu'elle avait jusqu'à ce jour plutôt bien maîtrisé. Une preuve qu'ils avaient fini par s'apprivoiser. « Vraiment ? Tu demanderas à celles et ceux qui alimentent des Tumblr en mon nom. » avait-il frimé. Obsédé par son image, Micah cultivait un ego déjà démesuré en s'abreuvant des éloges qu'on faisait de lui sur internet. Megan était d'ailleurs un vecteur non négligeable des plus beaux clichés qu'on pouvait relayer de lui. Et Stella le serait aussi, une fois qu'ils auraient conclu un marché qu'elle ne pouvait pas refuser. Contre toute attente Megan minaudait. Son orgueil parlait, car en plus d'être équitable, cette affaire lui offrait une nouvelle alliée dans sa course au scoop. « Plus ou moins. Elle est aspirante influenceuse. Ambitieuse, si tu vois ce que je veux dire. » Sous-entendu qu'elle était aussi impitoyable qu'eux, prête à toutes les bassesses pour se hisser au rang de célébrité. « Qu'elles s'appellent ou non Stella, ça change rien pour toi. » avait-il rétabli, pour le moment déterminé à entretenir sa complicité avec Stella sans intermédiaire. Si Megan voulait des conseils, il faudrait qu'elle continue à se fier à lui.

« Heureusement que tu es là pour le voir alors. Tu as pas un ami journaliste à qui parler de ma future et généreuse contribution ? » Avoir une photographe dans ses contacts était un atout dont d'autres ne pouvaient pas se vanter, mais Micah n'était jamais avare quand il était question d'instrumentaliser ses choix. Megan s'entêta à badiner. La frontière entre connivence et désinvolture était si maigre qu'elle manquait presque de l'agacer. « Je savais pas que tu étais aussi critique de cinéma. Si jamais tu as besoin de te reconvertir un jour, j'ai aucun doute que tu ferais un bon agent. Mais si j'avais besoin de conseils sur mon jeu j'irais demander à quelqu'un de mieux placé. » Il avait répondu par fierté. A vrai dire, l'avis d'un public non averti comptait souvent plus aux yeux d'un acteur que celui d'un critique. C'était lui qui engendrait les recettes et investissait dans l'avenir d'une tête d'affiche. Mais c'était leur dynamique. Micah ignorait jusqu'où allait la sincérité de Megan dans ses élans de sarcasme. Au moins elle avait fini par acquiescer. L'espace d'une seconde il avait failli douter de l'appétence de son offre. « Ça me semble équitable. On a un marché. » Les bulles de champagne pétillaient moins encore que la lueur de complaisance dans les yeux de Megan. Micah avait tendu sa main pour clore le contrat. « T'as plus qu'à remplir ta part maintenant. Je te dirai où et quand Penny et moi auront rendez-vous, mais pour ça tu dois d'abord réussir à lui faire oublier qu'elle a des chances avec Rory. Le reste j'en fais mon affaire. »

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Megan Monroe & @Micah Tomlinson

« Fais gaffe tu deviens insatiable. Mais sois pas trop présomptueuse, si c'était pas toi qui prenais les photos ce serait quelqu'un d'autre. » La vérité, c’est que je l’ai toujours été, insatiable. Il a rapidement été assez évident que jamais au grand jamais je ne me contenterais de l’inégale distribution des cartes à la naissance, que je ferais plutôt partie de ceux qui triment et rament pour s’élever, quoi qu’il en coûte. Je ne sais pas grand-chose de Micah : notre relation n’est pas de celles où chacun s’épanche en détails sur son passé. Pourtant, quelque chose en lui me fait dire que nous ne sommes pas si différents : que lui aussi est né avec une ambition aussi dévorante que l’es son égo. « Peut-être, mais t’auras jamais l’air autant à ton avantage que sur les miennes. » Je suis gorgée d'orgueil pour une seule raison : je sais que ma réussite dans le milieu n’est pas simplement le résultat de bonnes connexions. Je sais qu’en plus d’être douée pour tirer le meilleur parti de chacune de mes relations, j’ai un vrai talent dans ce que je fais. Un talent gâché à prendre des photos de divas dans son genre, d’ailleurs. « Vraiment ? Tu demanderas à celles et ceux qui alimentent des Tumblr en mon nom. » - « Fais gaffe, tu deviens égocentrique. » Il l’a toujours été, mais un sourire triomphal étire mes lèvres et, alors que je jette un coup d’oeil aux invités qui nous entourent - rester trop longtemps au même endroit dans ce genre d’événement vous place souvent sous le feu des projecteur - avant de me concentrer à nouveau sur Tomlinson : il le mérite ; il a visiblement quelque chose d’intéressant à me proposer.

Les amours de Rory Craine et sa presque co-star ont rythmé l’hiver et l’été dernier. Personnellement, je trouve ça ennuyeux à mourir puisque je doute qu’ils aient déjà dépassé le stade du moindre baiser, mais qui suis-je pour refuser aux midinettes ce qu’elles veulent ? Et ce qu’elles veulent, c’est quelque chose à se mettre sous la dent. Une jeune femme plus précisement, une qu’elles pourront détester autant qu’admirer, une qu’elle pourront envier puisqu’elle s’affiche aux bras d’un ex-célibataire en vue. « Plus ou moins. Elle est aspirante influenceuse. Ambitieuse, si tu vois ce que je veux dire. » - « Vénale donc. » Heureusement qu’il a ajouté ce détail, en entendant les mots aspirante influenceuse mes yeux ont bien failli se lever et rouler jusqu’à quitter leurs orbites. Les histoires d’amour font vendre, mais moi elles ne m’intéressent pas personnellement. Les histoires de manipulation en revanche ont toute mon attention. « Qu'elles s'appellent ou non Stella, ça change rien pour toi. » « Laisse-moi juger de ce qui change quelque chose ou pas pour moi. » Moi, je veux savoir si elle est fiable, cette source nommée Stella. Si elle est prête à se battre pour du bon contenu. « Elle est prête à quoi pour sa minute de gloire ? » A tout est ma réponse favorite à cette question.  

« Heureusement que tu es là pour le voir alors. Tu as pas un ami journaliste à qui parler de ma future et généreuse contribution ? »
« Considère que c’est fait. Mais donne, ne fais pas juste semblant, ce genre d’information se vérifie sans mal. »

La transaction - c’en est une - est vite expédiée puisqu’elle ne m’intéresse qu’à moitié. Moi, ce que je veux savoir, c’est jusqu’où lui aussi sera prêt à aller pour gagner le cœur de sa belle et discréditer Craine à ses yeux. « Je savais pas que tu étais aussi critique de cinéma. Si jamais tu as besoin de te reconvertir un jour, j'ai aucun doute que tu ferais un bon agent. Mais si j'avais besoin de conseils sur mon jeu j'irais demander à quelqu'un de mieux placé. » Je hausse les épaules plutôt que d’à nouveau nourrir son égo : il n’a pas besoin de moi. Je sais quand jouer, je sais quand le flatter et je sais quand me taire : les starlettes dans son genre ne sont pas bien compliquées à mettre dans la poche. Elles veulent toutes la même chose au fond : plus d’attention qu’elles ne peuvent en rêver. « Ça me semble équitable. On a un marché. » Il tend sa main, et je l’attrape. Si je m’attarde un instant, ses doigts entre les miens, c’est pour m’assurer qu’il tienne réellement sa part du marché, pour juger de sa détermination. « T'as plus qu'à remplir ta part maintenant. Je te dirai où et quand Penny et moi auront rendez-vous, mais pour ça tu dois d'abord réussir à lui faire oublier qu'elle a des chances avec Rory. Le reste j'en fais mon affaire. » - « Je te jure que si tu me roule, je te pourris la vie Micah. » J’en suis capable, on le sait tous les deux. S’il peut beaucoup de choses, je peux de mon côté faire la pluie et le beau temps pour sa cote de popularité. « Si quelqu’un d’autre que moi obtient ces photos, ta carrière est terminée. » La mienne avec, certainement, mais je suis mortellement sérieuse lorsqu’il est question de vengeance.

A la différence de Micah, la photographe n'était pas née avec la certitude de côtoyer ce monde. La façon dont elle se fondait dans le décor était d'ailleurs assez symptomatique, le produit de la conviction qu'elle avait, foncièrement, de ne pas être tout à fait à sa place. Elle avait dû redoubler d'efforts pour se hisser à sa place, manifester bien plus de hargne et d'obstination que lui pour prouver sa légitimité, et écraser les autres au passage. Objectivement, elle était bien plus méritante que l'enfant favorisé, arrogant et capricieux qui lui donnait la réplique, et ses quelques accès d'humilité n'étaient que l'expression de tout le mépris latent qu'elle ressentait à son égard. « J'admets que tu as un certain talent pour me sublimer. T'es sûre qu'il y a pas un peu d'amour transi là-dessous ? » avait-il répliqué, sarcastique. Micah n'était pas prétentieux au point de croire à toutes les expressions de son prétendu charme envoûtant. Sa vantardise exagérée trahissait d'ailleurs la banalité d'un manque que ni l'argent ni la célébrité ne pouvaient combler. Il était vrai que Megan était douée. En lui confiant son image, l'acteur avait exprimé une forme de respect implicite pour son travail. Pour la reconnaissance en revanche, il valait mieux qu'elle se fie à ses cachets plutôt que d'attendre des compliments de sa part. « Non ? Tu crois ? » avait-il répondu faussement outré. En plus d'être égocentrique, Micah était plutôt lucide sur ses défauts. Il avait même tendance à les pousser à l'extrême. Les caractères insipides ne marquaient personne.

Ses révélations s'étaient d'abord heurté à l'indifférence. Les rebondissements de la vie sentimentale de Rory Craine avaient cessé d'intéresser la presse depuis qu'ils étaient apparus aussi prévisibles que sa personnalité. Si Micah avait foi en cette histoire, c'était simplement parce que Stella avait apporté du sang neuf à une affaire qui avait fini par tourner en rond. Megan trancha. Dans sa bouche, les attributs les plus péjoratifs avaient presque un goût de flatterie. « Pourquoi tout de suite parler de vice ? T'as sans doute pas tort, mais après tout tu te fiches aussi bien que moi de ses motivations tant qu'elles vont dans le même sens que nous. » Et du peu qu'il avait échangé avec elle, la starlette en devenir avait tout l'apanage d'une alliée. « Elle est prête à tout. Entre nous, elle a l'air aussi impitoyable que toi et moi. C'est au moins ça qu'elle a pour réussir dans le milieu. » Micah savait que cette réponse attendue était celle qu'elle avait imaginée. D'humeur généreuse, Megan lui avait accordé une seconde faveur. Quoique suspicieux, Micah ne chercha pas à comprendre à quel moment elle l'avait arnaqué pour céder si facilement à ses caprices. « Bien-sûr que je vais donner. Est-ce que tu crois que je fais partie de ces gens qui viennent profiter du banquet du mariage sans rien laisser dans la cagnotte ? » La question était rhétorique, et lui-même n'était pas certain de pouvoir y répondre. Le marché fut scellé. Même sans contrat, les deux comparses connaissaient le poids de leurs promesses. La vaine tentative d'intimidation de la jeune femme lui arracha un sourire condescendant. A vrai dire, elle avait raison, mais Micah était bien trop convaincu de l'infaillibilité de son plan pour contempler le moindre échec. « Pourquoi je vendrais ces photos à quelqu'un d'autre ? Après tout, c'est pas toi la meilleure pour immortaliser mes moindres faits et gestes ? » avait-il conclu avec une complaisance qui lui collait à la peau depuis le début de leur entrevue.

the name of the game
Megan Monroe & @Micah Tomlinson

« J’admets que tu as un certain talent pour me sublimer. T’es sûre qu’il y a pas un peu d’amour transi là-dessous ? » Même si je le connais, je ne peux m’empêcher de lever les yeux au ciel. « Rassure moi, tu penses quand même pas que toutes ces filles qui te tournent autour, c’est de l’amour ? » Il a beaucoup de défauts l’acteur, mais je doute qu’il soit stupide au point de penser que l’attention qu’il reçoit est sincère. Que c’est à lui, que ces femmes vénales s’intéressent. Finalement, les confidences qu’il me fait à propos de la nouvelle copine de Craine viennent appuyer mon discours : je comprends en lisant entre les lignes qu’elle n’est avec lui que pour se faire un nom, pour percer dans un milieu impitoyable qui, contrairement à ce que les gens peuvent penser, ne m’intéresse guère. Je laisse la lumière aux autres : je suis parfaitement à mon aide dans l’ombre, derrière l’objectif plutôt que devant. « T’es pas compliqué à sublimer. Et ne fais pas semblant de pas en être conscient. » Ce n’est pas un compliment : combien de magazines pour adolescente l’ont proclamé beau gosse de l’année depuis qu’il a commencé dans le milieu ? Moi, ce qui l’intéresse, c’est son vice. C’est la facilité avec laquelle il a embrassé la dure réalité qui vient avec sa célébrité : être sous le feu des projecteurs, cela nous dessert à moi de l’utiliser à son avantage. Moi, c’est la possibilité que je lui offre.

« Pourquoi tout de suite parler de vice ? T’as sans doute pas tort, mais après tout tu te fiches aussi bien que moi de ses motivations tant qu’elles vont dans le même sens que nous. » - « Tu te trompes. Connaître les motivations d’une personne, c’est savoir jusqu’où elle est prête à aller. » Et je n’ai pas envie que, quelque part en cours de route, sa Stella nous claque entre les doigts en réalisant qu’elle ne veut pas planter un couteau dans le dos de son nouvel amoureux. Savoir que c’est la célébrité qui la motive, savoir qu’elle est prête à tout pour obtenir sa part du gâteau, c’est une sorte d’assurance. « Elle est prête à tout. Entre nous, elle a l’air aussi impitoyable que toi et moi. C’est au moins ça qu’elle a pour réussir dans le milieu. » Et dans le milieu en question, c’est un atout de poids. « Prête à tout. Comme je les aime. » Pour l’instant, je m’en tiens à ça. Pour l’instant, j’accepte que le brun fasse l’intermédiaire et j’accepte de lui faire confiance. « Bien-sûr que je vais donner. Est-ce que tu crois que je fais partie de ces gens qui viennent profiter du banquet du mariage sans rien laisser dans la cagnotte ? » Se soucie-t-il vraiment de ce que je crois ? On sait lui comme moi que non. « Y’a plus grand chose qui peut me surprendre, Micah. » Déjà, je jette des regards au reste de l’assemblée, soucieuse de ne pas être surprise à rester trop longtemps en compagnie de l’acteur. Dans la foule, je suis invisible. A ses côtés, je suis sous les projecteurs, et je dois bien être la seule personne présente dans cette pièce à ne pas vouloir d’un quart d’heure de célébrité. « Pourquoi je vendrais ces photos à quelqu’un d’autre ? Après tout, c’est pas toi la meilleure pour immortaliser mes moindres faits et gestes ? » Je suis la meilleure - on le sait tous les deux - mais je ne suis pas assez idiote pour ne pas assurer mes arrières lorsqu’il s’agit de lui. « Tu me tiens au courant. Tu fais pas ça dans mon dos. » Je répète, persuadée qu’une seconde couche n’est pas inutile avec lui. « Je me tire. Les gens vont penser que je suis ta nouvelle copine sinon, ça arrangera pas nos affaires. » L’idée me semble risible, mais je ne veux pas prendre le risque de voir les regards braqués sur moi. « T’as mon numéro. » Un dernier regard, et je disparais dans la foule, un sourire provocateur au coin des lèvres.