Tu passes désormais le maximum de ton temps chez Asher, les passages à ton domicile représenté par ton navire Cadence se voulant exponentiellement ponctuels et prompts. Les dernières fois que tu as dormi seul sur ton bateau, un sentiment de vide t'a sournoisement et immanquablement englobé tout entier, sensation que tu n'avais pas ressenti depuis des décennies. Tu avais longtemps constitué un maître dans l'art de la solitude, naviguant en solo et ne t'attachant à aucun lieu ni personne. Tu réfutais même l'optique d'un acolyte. Néanmoins, Asher avait su révolutionner ton monde tel le plus bouleversant des tsunamis, redéfinissant l'homme que tu aspirais manifestement à devenir.

Tu persistes néanmoins à résider sur Cadence lorsque tu augures une nuit à venir difficile ou tu sens ton état beaucoup trop fébrile. Tu n'as pas envie d'inquiéter ton fiancé ni de répéter l'épisode de la Saint Valentin, alors, lorsque tu te sens défaillir, tu optes pour le faire dans une intimité parfaite. C'est ta manière de le préserver, de l'éloigner de l'impact potentiel que tes maux pourraient avoir sur lui. Sur ce point-ci, le Levi du passé n'a guère changé. Tu te sens toujours mal d'imposer ton cancer à ton amant, comme tu refuses de le mêler aux aléas négatifs de ta maladie. Tu es prêt à mener ce combat discrètement si cela assure davantage la sérénité de l'homme que tu aimes.

Tu n'avais cependant pas prévu te sentir mal au beau milieu de la journée alors que tu étais avec Johnny et Agnes à l'appartement de la colocation. Le musicien, armé d'une patience d'ange, te montrait le fonctionnement de certains de ses appareils à mixage et tu étais véritablement admiratif et comblé. Johnny possédait tellement d'outils que tu avais l'impression que sa chambre formait le plus majestueux des coffres à jouets et tu n'avais qu'une envie : tout essayer sans limite. Si tu apprivoisais vite les instruments, il te fallait toutefois beaucoup d'aide pour la technique. Néanmoins, tu pensais te débrouiller de mieux en mieux - Johnny même le disait. Tu puisais éhontément sur tes ressources, naturellement incapable de les jauger de toute façon, ton mental focalisé sur la magie qu'opérait le musicien, jusqu'à ce que celui-ci commence à t'alerter.

Tu te redressais sur ton dossier, le teint livide, sans expression. Lentement, tu déglutissais, ignorant ce dont le goût qui se faisait de plus ne plus proéminent dans ta bouche était annonciateur. Tu sentis ton cœur douloureux dans ta poitrine, si douloureux que ta respiration en était affaiblie drastiquement. Tu avais l'impression de passer du froid au chaud, puis du chaud au glacial. « You okay dude? » tu perçois à peine Johnny s'enquérir, comme n'a aucunement conscience d'Agnes qui s'est installée à côté de toi, inquiète. Tu ambitionnes de te mouvoir, mais aucun de tes membres ne te répondent et bien vite, tes sens s'éteignent. C'est Agnes qui te réceptionne, ensuite aidée de Johnny, quand tu perds brusquement connaissance, ton organisme capitulant.

T’es à la maison de retraite à aider le déménagement de quelques affaires. T’es fasciné par le turn over qui est le résultat de décès de personnes à chaque fois. Et le bon côté c’est que ça te fait plus de boulot en extra et donc plus d’argent dans ta poche. Ton téléphone vibre dans ta poche alors que tu es en train de porter à l’aide de Autumn un bureau de type secrétaire qui a l’air d’avoir mille an. Quand vous posez le meuble dans le van, tu prends ton portable pour voir de qui il s’agissait. Johnny. Ton ami, ton coloc, ton bandmate. Tu poses le pour et le contre de le rappeler tout de suite mais tu n’as pas le temps d'y penser plus car voilà ton écran qui s’illumine de nouveau du nom de ton coloc. Tu décroches.

« Hey, be quick. »
« Levi’s at the hospital. »

T’as l’impression qu’on vient de te rouler dessus avec un poids lourd. « What happened? How is he now? » Johnny qui explique l’état de Levi à votre appart’ et qu’ils ont été aussitôt à l’hôpital. « Now we're waiting, I don’t know what’s happening, they won’t let us see him. » Ton teint est pâle, t’imaginant bien sûr le pire. « I’m coming. » Tu raccroches et explique que tu as une urgence à Autumn. Elle ne peut clairement pas douter du contraire vu ton état de panique apparent et ton visage qui a perdu toute couleur.

Tu prends un Uber car tu n’as pas envie de te trimballer avec le van que tu as pris pour venir ici. T’es pas trop en état de conduire non plus vu comme tu te ronges les sangs. Heureusement il n’y a qu’une vingtaine de minutes pour arriver à l’hôpital. Quand vous n’êtes plus trop loin la voiture se trouve dans un bouchon et t’as vraiment pas la patience. « I’m off here. » Tu marches vite, puis tu cours, tes jambes propulser par l’adrénaline.

Une fois aux urgences tu trouves Johnny et Agnes dans la salle d’attente. Ils n’ont pas encore eu de nouvelles de Levi et tu t’approches de la personne qui a l’air de gérer les gens dans cette pièce derrière le comptoir, demandant si tu peux voir Levi Lionhart qui est arrivé y’a peu. Elle te demande ton lien avec le patient. « I’m… » Si y’a bien un moment où il faut pas hésiter c’est là Asher. « I’m his fiancé... Boyfriend, partner whatever. Fiancé. » Tu conclus. Tu te fourvoies dans les labels. Tous ceux là qui n’ont que très rarement franchi la barrière de tes pensées. Tu es visiblement très perturbé par toute la situation. Ton coeur bat à un milliard. Ta respiration qui se fait plus rapide. Tu évites complètement le regard de la personne en charge, inquiet de l'éventuel jugement que tu y verrais sans préavis. Please let me see him. « Follow me please. » Qu’elle te dit en ouvrant la porte pour te laisser passer de l’autre côté. Tu te dis qu’elle te laisserait pas passer pour le voir s’il était à l’article de la mort. Or maybe that’s exactly what they would do. L’important là c’est que tu vas pouvoir le voir dans les courtes minutes qui suivent et ça te rassurera plutôt que de continuer à t’imaginer le pire.

« Did he say fiancé? »
« Twice. »

Je me rendais vers l'office infirmier après avoir libéré l'index violacé et enflé d'une adolescente de quinze ans d'une bague métallique qui y était restée coincée depuis plus de quinze heures lorsque mon attention fut attirée par une arrivée plutôt houleuse. Un trio, dont l'un des membres paraissait de prime abord inconscient, se dirigeait vers la borne d'accueil non sans difficultés. Je réduisais rapidement la distance me séparant du groupuscule, accompagné par une autre soignante et un brancardier. « Hello. What happened? » Je m'enquérais alors que mes mains se portaient déjà sur le malade livide en vue de vérifier son pouls puis aider Jeff à décharger l'homme qui le portait pour le sécuriser sur un brancard. L'on nous expliquait rapidement que le garçon s'était évanouit sans préavis particulier et qu'il était atteint d'un cancer. Ma collègue se chargeait de recueillir, en plus de confirmer son identité, le maximum d'informations nécessaires à sa prise en charge et Jeff et moi prenions le chemin d'un box libre afin de l'y installer.

Nous transférons le patient du brancard au lit puis mon collègue me délaissa pour inscrire l'entrée dans le système informatique tandis que je terminais l'installation du patient et effectuais les premiers examens. Peu de temps après, un urgentiste vint me rejoindre et prescrivit une batterie d'examens complémentaires afin de déterminer les causes précises de l'état du malade et les volets sur lesquels il fallait clairement se concentrer. Lionhart était certes stable et autonome, sa condition demeurait faible et fragile. Je confiais des analyses biologiques que je venais de prélever, munies d'une étiquette caractérisant leur caractère urgent, à un personnel qui fila les déposer au laboratoire. Je m'attaquais par la suite à la suite des actes prescrits par le médecin, accompagné ici et là par ce dernier qui naviguait déjà entre plusieurs infortunés.

Une trentaine de minutes plus tard, Jane apparût dans le box pour indiquer que le fiancé du patient était arrivé et demander si celui-ci pouvait voir le malade. L'urgentiste acquiesça sèchement, frustré depuis plusieurs minutes de ne pas être en mesure de joindre l'oncologue du patient, répétant incessamment qu'il ne comprenait pas que ce dernier ne puisse pas décrocher son téléphone. « Hello, I'm Dr Lundgren. I'm the physician who will take care of your fiancé today. We run a battery of tests to determine exactly what has caused his loss of consciousness and we are adjusting some of his numbers right now. » Je lève les yeux sur le blond que je pourrais décrire aussi blême que son compagnon et m'interroge sur le degré de compréhension que celui-ci peut avoir sur les propos assez techniques formulés par le médecin. J'accroche toutefois la perfusion fraîchement préparée et sors le matériel nécessaire à l'administrer au Lionhart, tout en me promettant de traduire, si cela était nécessaire, au proche du patient quand le médecin aura quitté le box. J'étais conscient que dans ces situations brusques telle que l'actuelle, les informations ne sont pas forcément aisément assimilées ni retenues et de multiples questions peuvent également surgir, maximisées par l'inquiétude et le stress. J'étais volontaire à accompagner le trentenaire autant que possible au travers de cette épreuve. « I am trying to contact his oncologist to know more about his record. Has he been feeling frail or fainted recently? Has he lost consciousness in the past? » J'accorde un nouveau regard au fiancé, désormais mitraillé de questions, avant de perfuser le patient qui demeure de marbre. « Do you know what medecine he takes and whether he is undergoing treatment? If he is, when was his last dose? » Dr Lundgren a beau être un excellent professionnel, il n'en reste que je le considère toujours très transparent vis-à-vis de l'agacement qu'il ressent quant au fait de ne pas avoir dès qu'il le souhaite les renseignements précis qu'il juge utiles à la prise en charge de son patient. Le cancérologue de garde a beau lui être d'une aide non négligeable, il est beaucoup trop méticuleux pour s'en contenter et désire ardemment le concours de l'oncologue précisément en charge de ce dossier, ou à défaut, de son accompagnant proche pour obtenir les dernières informations fraiches et quotidiennes concernant le malade.

Tu jettes des coups d’oeil à tous les coins de tous les couloirs que tu traverses pour rejoindre le lit où se trouve Levi. Il est toujours inconscient. Ca te fiche un coup énorme de le voir comme ça allongé dans un hôpital. La seule chose qui te rassure un peu c’est qu’il n’a pas de tubes dans la gorge ou quoi. « Hello, I'm Dr Lundgren. I'm the physician who will take care of your fiancé today… » Tu essaies vraiment d’écouter les mots du docteur mais ton esprit est dans tous les sens et ses phrases sont du chinois pour toi. Tu réalises qu’il y a une personne d’autre dans la pièce mais ton esprit est rapidement repris par Levi. Que tu n’arrives pas à quitter des yeux. « I am trying to contact his oncologist to know more about his record. Has he been feeling frail or fainted recently? Has he lost consciousness in the past? »

Les questions du docteur que tu entends clairement et au fur et à mesure des réalisations de ta totale ignorance, l’émotion te gagne. « Do you know what medecine he takes and whether he is undergoing treatment? If he is, when was his last dose? » Et il ne s’arrête pas là. Tout comme tes émotions qui sont en train de se matérialiser en remplissant tes yeux d’eau. « I don’t know… He… » Tu sens les larmes couler sur tes joues. Tu vas les essuyer aussitôt mais y’en a d’autres pas loin, tu le sais. T’aurais bien besoin d’une chaise. « He doesn’t like to talk about this… » Tu n’es pas en train de sangloter mais les larmes redoublent sur ton visage. Tu te sens vraiment comme inutile et impuissant, alors que ces informations sont importantes pour que Levi aille mieux. Tu continues d’essuyer tes yeux avant de tenter de te reprendre un minimum.

Tu sais certaines choses Asher, concentre toi. Dis leur tout ce qui pourrait les aider à ton avis. Tout ce qui a un lien avec son cancer. « He had nauseas on Valentine’s day and he… I dropped him off at the hospital for an appointment a few weeks ago… » Mais t’as aucune idée de quoi il s’agissait. « Maybe Agnes will know more. She’s in the waiting room. » Parce que ton cerveau est quand même en train d’essayer plus fort que jamais à trouver des solutions à toutes ces questions. Car tu ne peux juste pas rester là à juste pleurer sans rien faire que le voir inconscient sous tes yeux. What are you doing Levi… Tu n’oses pas aller le toucher depuis que t’es entré dans cette pièce mais tu t’y résous enfin, posant ta main sur la sienne. Tu détestes les pensées qui te traversent. Tu refuses d’imaginer un monde sans lui.

Tout en installant la perfusion sur le patient, je lorgne avec attention et préoccupation sur le fiancé  qui vient de pénétrer le box. L'urgentiste en charge du malade ne tarde pas à se présenter ainsi qu'à l'assaillir de questions, certes primordiales et légitimes, mais qui ont pour effet d'ébranler encore davantage le proche. J'inspire profondément tout en terminant le réglage de la perfusion. Je remarque que le médecin stoppe sa tirade, aspirant également à offrir une occasion de répondre au trentenaire. « I don’t know… He… » Je constate le blond sécher ses joues désormais humidifiées par les larmes. Sa réaction a un impact direct sur mon cœur qui se serre et tu remontes légèrement le drap sur le torse du patient dans l'optique de donner l'illusion que la situation est moins catastrophique qu'il peut se l'imaginer, que le brun se repose lourdement. Avec l'expérience, j'avais mémorisé que l'image que rejetait l'infortuné dans son lit était loin d'être dérisoire. Rejoindre son proche qui semble dormir paisiblement, dans une même scène que l'on pourrait l'y croiser à domicile, est bien moins choquant que d'être à son côté dans un lit défait dévoilant plusieurs dispositifs médicaux.

« He had nauseas on Valentine’s day and he… I dropped him off at the hospital for an appointment a few weeks ago… » Je souris et acquiesce, comme pour valider les informations du jeune homme même si je redoute qu'elles ne soient pas très utiles. « Maybe Agnes will know more. She’s in the waiting room. » « Is he treated here? » Je le questionne sur une intonation douce. S'il me répond par l'affirmative, nous pourrions très probablement retrouver le dossier du Lionhart dans la base, ce qui facilitera les recherches. Dans tous les cas, j'allume déjà l'ordinateur du box pour m'en enquérir. Le téléphone portable de l'urgentiste sonne par la suite et il s'excuse en quittant le box. J'en profite pour tirer une chaise et la positionner près du lit, à quelques centimètres d'où il s'est avancé pour tenir la main du patient. Je dépose aussi une boîte de kleenex sur le matelas. « You can sit if you want to. » J'attends que l'ordinateur de la pièce s'allume puis considère silencieusement le couple quelques minutes, désireux de leur laisser un instant, avant de rassurer : « It's not uncommon. His body mostly needs a break and some help. » L'anémie et la tension faible détectées plus tôt ne mentaient pas, tout comme la fatigue liée au cancer très répandue chez ces patients. « He's in good hands. » J'ajoute dans ma mission de le rassurer, ne pouvant réprimer un léger sourire en apercevant la main du patient se mouvoir dans celle de son proche peu après mes mots.

« Is he treated here? » Tu hoches la tête, essuyant tes yeux de nouveau. Tu constates que les larmes se sont arrêtées. L’infirmier t’apaise juste de par sa présence. C’est le docteur qui te stresse à avoir le nez dans ses notes et toutes ses questions. Le doc s’en va et tu te dis que si le doc s’en va, c’est que ça va non ? Après tout, Levi a juste l’air de dormir… Tu lâches pas sa main. T’as le fol espoir de le sentir émettre une pression sur la tienne.

« You can sit if you want to. » Tu remarques la chaise qu’il a apporté et t’assois dessus sans penser à lui dire merci. Ton esprit est bien trop préoccupé par l’état de Levi. Tu remarques la boîte de mouchoirs et t’en prends un pour t’essuyer mieux le visage qu’avec tes mains. Tu prends une grande inspiration, ça pourrait être un soupire en fait. Tu ne sais pas. Tu es juste en train d’essayer de mettre tes pensées dans le bon sens… Mais t’as du mal. « It's not uncommon. His body mostly needs a break and some help. » Ton attention qui se porte sur l’infirmier qui est le premier qui te dit enfin l’état des choses. Tu te sens soulagé par ses mots. Il a l’air de savoir de quoi il parle. Il ne dirait pas ça si ce n’était pas le cas. Il sait faire son boulot.

« He's in good hands. »
« Thank you. »

Tu n’as jamais osé faire quelconque recherche à propos du cancer. A mi chemin entre la flemme et la peur. Si tu es dans l’ignorance de ce qu’il peut éventuellement lui arriver, tu ne t’inquiètes pas. Et puis Levi est toujours tellement plein de vie avec toi. C’est presque si tu oublies des fois - souvent - qu’il est malade. C’est quand il a froid alors qu’il n’y a pas raison de l’être - à ton avis - que tu as une petite piqûre de rappel. Bien sûr l’épisode de la st Valentin, tu ne l’oublieras jamais. Tu as changé bien des choses dans ta vie, dans ta tête, suite à ça. Y’a tellement rien d’important quand il se trouve que la santé de Levi est en jeu. « How long until he wakes up…? Just… For me to have an idea and… » … And stop thinking he’s going to die.

Tout en toi semble terriblement lourd, tu as la sensation d'être prodigieusement affaissé, oppressé de toute part par une masse suffocante, effarante. Une tétanisante fatigue t'étreint vicieusement, chaque battement de ton cœur te sonne fastidieux et l'air environnant semble si dense qu'il te donne l'impression de ne pas être adapté à tes capacités respiratoires. Tes muscles sont immobilisés par cette puissance éreintante, tant que tu n'as pas le choix de simplement subir, condamné à patienter pour que tu puisses reprendre les forces suffisantes à t'extirper de cette prison physique dans laquelle tu désespères. Ton esprit est également embué, bien que tu ressentes les gestes que l'on pose à ton encontre, entends plus ou moins distinctement les paroles aux alentours. Seulement, les réactions manquent, tant tu es piégé au creux de cet intransigeant état amorphe.

La voix d'Asher te procure davantage d'énergie, toutefois. Comme le public qui te porte lors des concerts en dépit de l'exténuation qui s'invite pernicieusement. Tu sens une pression contre ta main, te plais à croire qu'il s'agit de ton fiancé et non d'un soignant qui recherche une nouvelle fois ton pouls ou souhaite t'accrocher ce que tu devines être un bracelet exhibant les informations basiques sur ton cas. Tu tentes d'ouvrir les yeux mais rien n'y fait, tu en es lamentablement incapable ; alors, tu te concentres sur tes doigts et tu crois dur comme fer que tu parviens à les animer contre la peau de ton amoureux.

« How long until he wakes up…? Just… For me to have an idea and… » Tu es désormais convaincu qu'il s'agit du Buckley à tes côtés et si tu n'étais pas si ankylosé, ton cœur battrait certainement plus vite ou tu froncerais au moins les sourcils. Quoi que ce soit pour lui indiquer que tu es présent, que tu vas bien. Relativement bien. Pas si mal. « I can't tell you exactly, but he can breath on his own. His heart rate is low but it is not surprising. We are giving him medecine to boost him up. » Medecine doesn't work fast enough, you clown, tu penses sauvagement en te concentrant sur tes doigts, désirant ardemment faire sentir à Asher que tu es là, qu'il n'a pas à s'inquiéter. I'll be fine. You're good. Le son de la machine à ta droite se fait de plus en plus insistant, tu ignores si c'est parce que tu t'extrais progressivement de cette ignoble torpeur ou si c'est parce que ton organisme te fait de nouveau lâchement défaut, mais tu as véritablement l'impression de désormais avoir l'un des doigts du musicien autour du tien. Tu te félicites d'être potentiellement parvenu à clore la boucle et le réconfort t'envahit éhontément. Tu reprends le contrôle, peu à peu, et laborieusement, tu aveugles tes pupilles de la salle lumineuse. Tu tentes de prononcer un salut pour signaler que tu es de retour mais le son qui émane de ta gorge ressemble davantage au grognement d'un ourson mal léché que le Hi que tu ambitionnais. Tu grimaces en réponse aux pics de douleurs qui s'incrustent dans le comité d'accueil. Ta gorge se noue douloureusement mais tu as accompli ton objectif, tes doigts sont tous entremêlés à ceux d'Asher. Le soupir qui file entre tes lippes en dit long sur le soulagement qui vient t'enlacer.

« I can't tell you exactly, but he can breath on his own. His heart rate is low but it is not surprising. We are giving him medecine to boost him up. » Tu hoches la tête, appréciant les détails qu’il te donne. Ca te rassure beaucoup. Ta respiration se fait un peu plus tranquille ou du moins, tu fais en sorte qu’elle le soit. Tu te sens tout sauf à l’aise dans cette configuration. Sous les yeux d’un inconnu qui te rassure sur l’état de santé de Levi alors que tu tiens la main de ce dernier parce que tu es effrayé comme jamais. Première fois que ça se produit et tu te demandes combien de premières fois tu auras encore avec Levi. T’es en train d’arrêter de penser que c’est ses derniers instants. Mais pour le fun, t’es en train de réfléchir à quels étaient tes derniers mots à son égard ce matin. T’as quitté l’appart’ avant lui. Tu as déposé un baiser sur sa nuque pour pas le déranger alors qu’il buvait son café installé au comptoir de la cuisine. T’as caressé son dos au passage. « I should be done by 6. » Une journée avec des horaires plutôt conventionnelles. C’est un des bons points de ces extra shift qui ne sont pas au bar. Levi aura eu le mérite de te faire débaucher plus tôt. Tu t’occuperas des détails avec le job plus tard. Clairement pas ta priorité là. Au pire quoi ? T’es viré? Tu t’y attends tous les jours depuis plusieurs mois maintenant, mais apparemment tu fais du bon boulot ces derniers temps.

La main de ton fiancé presse la tienne. « Levi…? » Il te répond par un grognement mais tu prends, tu t’en fou. « Oh my god… He's awake. » Ta deuxième main qui va se poser sur la sienne alors que vos doigts sont enlacés. Tu sais pas quoi dire parce que clairement il n’est pas encore en grande forme et… t’es juste content de le voir réagir. Tu serres sa main doucement. Tu la couves des deux tiennes comme si c’était la chose la plus précieuse de cette planète. It is. Tu n’oses pas le toucher ailleurs. L’embrasser. Il a sûrement besoin de se reposer plutôt que d’être émoustillé par tes baisers qui ne le laisseront pas de marbre. Chill.

« Levi…? » Tu as la confirmation ultime qu'Asher se trouve à tes côtés et ça te procure une force indescriptible, un élan de motivation indéniable. Tu recueilles le maximum d'informations qui te sont accessibles par la suite. Tu as certes conscience que tu te trouves à l'hôpital, que Johnny et Agnes ont été ceux qui t'ont conduit jusqu'ici, et que tu es hospitalisé dans un service du centre de soins le plus proche, mais tu ne peux que conjecturer sur les personnes qui ont prévenu le Buckley de ton arrivée dans l'établissement de santé. Ton sang ne fait qu'un tour lorsque tu songes qu'il n'est même pas répertorié comme ta personne de confiance, non pas parce que tu ne le considères pas comme tel, mais bien puisque tu étais persuadé que jamais ce genre de péripétie ne surviendrait.

Tu milites férocement contre ton état amorphe et l'exténuation qui te rend impuissant face à la gravité pour ouvrir enfin tes paupières. Tu forces tes pupilles à s'adapter à la luminosité de la pièce d'un blanc immaculé et la douleur vient s'immiscer dans plusieurs parties de ton organisme. « Oh my god… He's awake. » Tu grimaces mais tu as réussi à entrelacer tes doigts à ceux de ton fiancé et cet accomplissement te réconforte. Naïvement, tu te dis qu'il ne quittera pas la pièce de la sorte, qu'il ne partira pas sans toi d'ici. Qu'il ne pourra pas t'en vouloir ou te considérer comme un fardeau. Il couve ta main des siennes et non sans difficultés, tu tournes un peu la tête de façon à pouvoir l'observer facilement. A son teint, tu devines l'inquiétude et le stress qui l'ont saisit. Ses yeux te semblent même un peu rougis, ce qui t'atterre indubitablement et t'invoque une conséquente colère contre toi-même. Tu meurs d'envie de le prendre dans tes bras et le rassurer, lui confirmer que tout va bien une nouvelle fois.

« Jensen, » un docteur somme l'infirmier du couloir et celui-ci indique qu'il vous laisse en tête à tête et qu'au besoin, vous pouvez presser la sonnette rouge au-dessus de ton lit. Tu n'essaies même pas de chercher où elle se trouve, ton regard rivé sur Asher. C'est le seul lien que tu es capable d'assurer pour l'instant, en plus de tes doigts, et tu y tiens bec et ongles. « Can we go now? » Tu pries d'une voix rauque et faible en serrant le plus possible la main de ton fiancé, comme si tu voulais lui démontrer par cet acte que tu étais bien capable de quitter l'établissement. Tu te fiches prodigieusement de la fatigue ou des douleurs qui traversent ton corps, tu veux retrouver ton quotidien avec ton amant, tracer un trait sur cet épisode désastreux pour fonder la vie heureuse que le Buckley mérite. You want to be home again, next to him.

Il réagit de plus en plus et ça te fait un bien fou. Tu n’aurais jamais cru que le voir bouger de quelques millimètres pourraient un jour te mettre dans une si grande joie. Il est même en train d’ouvrir les yeux mais il galère et tu comprends bien pourquoi. Tu te dis que ça doit correspondre un peu à une gueule de bois ce qu’il est en train de vivre et ça tu connais. En vrai t’as aucune idée mais il ne doit pas être dans un si bon état que ça alors ça doit pouvoir se comparer d’une certaine façon. Il tourne la tête vers toi et tu ne peux pas retenir ton sourire. Tes mains qui tiennent toujours la sienne et tu ne comptes pas t’en défaire. « Hey… » L’infirmier qui se fait appeler à l’extérieur et qui t’indique le bouton pour le joindre. Tu espères ne pas avoir besoin de l’utiliser.

« Can we go now? »
« I don’t think we can. »

Tu comprends bien qu’il veuille rentrer mais tu ne comptes pas l’aider pour sortir dans la minute. Tu te sentiras bien mieux de le voir se rétablir plus que ça avant que vous ne retirez chez vous. Il serre ta main et tu sais qu’il veut vraiment partir. « I’m not working here, you’ll have to check with the doc. » Tu espères sincèrement que ce dernier ne le laissera pas partir trop tôt. Tu espères aussi que Levi ne va pas sortir contre l’avis des professionnels. Tu ne saurais pas comment gérer ça. Tu te doutes qu’il n’a pas envie de mourir mais… ça reste délicat. « I don’t like him. The doc. Don’t remember his name. Something with an L. » Tu es en train de bitcher sur le docteur au calme avec ton fiancé qui est encore à moitié inconscient sur un lit d’hôpital. T’es juste content de pouvoir avoir une conversation avec lui de nouveau. Il est vivant. Il est conscient. Tu vas doucement lever la main de Levi pour y déposer un baiser sur sa peau.« How do you feel ? » Tu parles beaucoup Asher. Chill. Il va pas mourir. Shut up.

« I don’t think we can, » est la réponse d'Asher lorsque tu l'implores que vous quittiez les lieux, si possible sur-le-champ. Tu déglutis difficilement, manquant de t'étouffer au passage, ta déception se lisant aisément dans le regard que tu conserves fixé sur lui. Néanmoins, tu n'insistes pas, si ce n'est que tu presses davantage tes doigts contre les siens, comme pour lui démontrer à quel point tu as de la force et argumenter au profit de cette fuite du système médical. Ta stratégie n'est pas très glorieuse toutefois, bien que le Buckley semble deviner ce que tu mijotes, puisqu'il ajoute : « I’m not working here, you’ll have to check with the doc. » Tu hausses doucement les sourcils, ayant beaucoup moins de foi à ce niveau-là. « You work magic on me though, » tu rappelles avec arrogance. Tu commences doucement à te résigner au fait que tu devras rester ici un petit moment. Tu t'autorises à fermer un peu plus les paupières, sans pour autant quitter du regard la silhouette de ton amant. « I don’t like him. The doc. Don’t remember his name. Something with an L. » Screw him, tu songes. « Most doctors are pricks, » tu ne portes pas l'hôpital et tout ce qui s'en approche dans ton cœur et ça transparaît éhontément. Tu souris néanmoins lorsque Asher vient porter doucement ta main à ses lèvres pour embrasser ta peau. « How do you feel ? » Tired and in a lot of pain, serait la réponse la plus directe, néanmoins, tu ne te résous pas à l'articuler. « In need of a lot ot these, » tu exposes en évoquant le baiser qu'il vient de t'offrir, et le pouvoir que tu leur avais donnés des mois plus tôt de soulager tes maux. Tu grimaces doucement et te mouves de quelques centimètres dans l'optique de trouver une position confortable, ce qui s'avère vain. « How do you feel? » Tu t'intéresses sincèrement, une pointe de culpabilité peinant ton cœur à lire ses traits encore tirés par le souci. « Did Johnny and Agnes call you? » Tu interroges, curieux. « Are they still here? » Tu t'inquiètes, ne souhaitant pas particulièrement ruiner la journée de tout le monde.

Levi qui fait l’enfant parce qu’il veut vraiment se tirer d’ici même si c’est tout sauf raisonnable. Le trouve hallucinant quand même. Maybe he’s used to that. Mais ce n’est pas ton cas. Faut qu’il te laisse entrer dans cette bulle de fucking cancer pour que tu t’habitues à ces moments et que tu le kidnappes vers votre lit très confortable plutôt que celui ci. « You work magic on me though, » Il a l’air véritablement bien mieux vu comme il te lance ce genre de chose avec ce ton de petit con qui t’a bien trop manqué. Ca te fait sourire doucement. Heureux de le voir reprendre du poil de la bête. « Most doctors are pricks, » Tu hoches la tête, tu le crois sur parole. T’as eu un rapide aperçu et t’as encore envie de claquer le gars. Il avait l’air d’être un robot avec toutes ses questions et aucune phrase réconfortante ou update sur l’état de Levi.

Tu n’aurais pas cru le voir sourire mais tu te sens fier d’avoir été embrassé sa main. Ca fait du bien de le voir autrement que comme un patient en souffrance. « In need of a lot ot these, » Tu en déposes un deuxième aussitôt, t’y laisses même tes lèvres sur sa peau. Mais il se met à grimacer, à croire que ça ne fonctionne pas si bien que ça. En tout cas ça te conforte dans le fait qu’il ne vaut mieux pas le bouger d’ici. Parce que tu l’avais considéré ? Kinda. T’en sais rien, mais s’il parle et il te répond sur ce ton c’est qu’il va pas mourir, c’est sûr. Mais t’es si sûr que ça ? Shut up now. « How do you feel? » Tu ne t’attendais pas à ce qu’il te retourne la question. « Better than you. » Pas un pour attraper l’autre avec vos réponses de merde là. Arrêtez de faire les gros durs. Mais non. Tu ne comptes pas lui répondre s’il ne le fait pas non plus. Deux petits cons vraiment. I can play that game too. Une technique que tu espères va le frustrer.

« Did Johnny and Agnes call you? »
« Yeah. »
« Are they still here? »
« I think so. »

Tu te mordilles brièvement la lèvre inférieure avant de reprendre la parole. Sa main toujours dans les tiennes. « The doc asked a hundreds questions that I couldn’t answer. Told them Agnes might know more. I don’t know if they’ve gone see her. » Does she Levi? Ils sont proches tous les deux et tu ne serais pas surpris que ce soit le cas. Tu serais même rassuré qu’il y ait au moins une personne qui peut donner les réponses importantes. Ou en tout cas, des questions qui t’ont paru importantes sur le moment. Tu n’es plus sûr de rien maintenant que Levi est réveillé.

Tu parviens à faire sourire Asher avec ta réplique sur la magie qu'il sait opérer sur ton organisme et cela te procure un sentiment de fierté indubitable. Tu aimerais tant pouvoir te redresser et chasser ses tracas et ses angoisses passées en créant des sillons de baisers, mais tu demeures cloué à ce lit d'hôpital, bien trop faible pour produire une telle action. Néanmoins, ta main demeure solidement au creux des siennes et ce geste t'est inestimable.

Asher te décrit l'urgentiste et tu lui livres ton opinion stipulant que la majorité des médecins sont des abrutis. Ils savent peut-être régler les soucis biologiques, ils sont pour la plupart dotés d'un comportement social des plus inadaptés. Et tu es le juge ici, ce qui signifie quand même beaucoup, selon toi. Le Buckley hoche la tête et tu lui souris en coin, tes paupières désormais mi-closes.

Ton fiancé vient porter ta main à ses lèvres et le baiser qu'il y dépose te fait sourire sincèrement. Tu lui expliques en avoir besoin davantage et obéissant, il répète son geste en y mettant cette fois-ci plus de temps. Au même moment, un pic de douleur vient te happer, qui t'arrache une grimace. Celui-ci estompé, tu as le culot de t'enquérir avec un intérêt franc de comment se sent ton amant. « Better than you. » Tu pouffes. « Low blow, » tu commentes. « Don't judge a book by its cover, rockstar, » tu préviens, malicieux, même si sur ce coup-là, tu espères bien qu'Asher se porte mieux que toi.

Tu t'intéresses ensuite aux duo qui t'a conduit jusqu'ici. Asher te confirme qu'il a été prévenu par vos amis communs et qu'ils sont probablement encore dans la salle d'attente du service des urgences. Tu te mords discrètement la lèvre en y songeant. « The doc asked a hundreds questions that I couldn’t answer. Told them Agnes might know more. I don’t know if they’ve gone see her. » Tu t'accordes quelques secondes de réflexion, puis bafoues l'engagement que tu as pris avec toi-même pour demander : « Do you wanna know this kind of answers? » Puis, tu complètes : « Everything is supposed to be integrated into my medical record. » Ou du moins, ce qui se passe sous les yeux des soignants, car bien entendu, ils sont ignares de tes épisodes hors contexte hospitalier. Tes yeux se posent ensuite sur l'horloge affichée au mur de la pièce et tu te rends compte qu'il n'est pas encore six heures, ce qui signifie qu'Asher devrait être au travail. « I'm sorry I've fucked your day up. »

Tu le fais rire avec ta réparti. « Low blow, don't judge a book by its cover, rockstar, » Et bien sûr il n’est pas impressionné et en remet une couche supplémentaire. Tu trouves ça fou qu’il veuille autant cacher sa douleur mais tu ferais certainement exactement la même chose si tu étais à sa place. Tu te contentes de garder tes lèvres non loin de sa main pour y déposer des baisers, même si un sujet plutôt sérieux arrive sur le tapis. « Do you wanna know this kind of answers? » La vraie question c’est est-ce qu’il veut que tu saches. « Everything is supposed to be integrated into my medical record. » Tu sais bien que ce n’est pas le cas vu les questions qu’il t’a posé l’autre con. T’as pas envie de contrarier Levi en le lui disant. Tu juges qu’il n’a pas la forme physique nécéssaire pour que tu puisses te laisser aller à ce genre de confrontation. Ca te fait même bizarre d’imaginer le confronter. Ca n’est jamais arrivé. « I'm sorry I've fucked your day up. » Un léger rire sur tes lèvres de sa phrase.

« You kidding, I’d do anything to avoid working. » Il croit vraiment que tu aimes ton boulot ? Tu as bien hâte du jour où tu pourras être dans ton groupe à temps plein. Tu laisses un bref silence s’installer, tes pouces caressant sa peau. Puis tu reprends la parole. « I know you don’t like to talk about this but… I only… It felt… I felt so useless when he asked me all these things like of course I would know. I told them I’m your fiancé and I was… Clueless. » Tu relèves les yeux vers lui en reprenant aussitôt. « But you’re awake now, it doesn’t seem like it was that much important. They’ve managed to give you whatever for you to get better so… » Tu hausses une épaule. …so it is not important this time. Tu espères que d’autres fois les détails éventuels ne seront pas non plus déterminant dans la finalité de son état. But I’d like to know Levi… i really do. Tu forceras rien quoi qu’il en soit, même si ça te semble important. Très important.

Asher te révèle qu'il a été en proie à des questions sur ton compte auxquelles il n'a pas su répondre. Aux termes et au ton qu'il emploie, tu devines que cet épisode n'était pas plaisant pour ton amant et tu espères vivement qu'il n'a pas contribué au rouge de ses yeux. Tu lui demandes avec sérieux s'il veut vraiment détenir les données nécessaires pour éventuellement renseigner des professionnels qui ont la flemme de se connecter à leur réseau pour lire ton dossier médical dans lequel est censé figurer les grandes lignes de ton état de santé. Néanmoins, une partie de toi peut assimiler aussi qu'en situation d'urgence, il est plus facile et rapide de questionner les proches que de fouiner sur un ordinateur. Tu soupires doucement tout en t'autorisant à fermer les yeux quelques secondes. Tu as vraiment envie de quitter ce lit qui te paraît horriblement inconfortable, mais tu sais pertinemment que tu n'as pas les forces de marcher très longtemps, ou de tenir assis juste pour le loisir de changer d'angle. Si tu disposais comme motivation le fait de quitter le centre hospitalier, tu étais convaincu de pouvoir passer au travers ton exténuation. Mais Asher ne semble pas partant pour passer outre l'avis médical et tu ne veux pas passer outre sa volonté. Alors, tu te contentes de t'excuser de ruiner ta journée, ce qui le fait rire, provoquant un tendre sourire sur tes lippes en retour.

« You kidding, I’d do anything to avoid working. » Tu ris doucement. « What would your dream life be if you wouldn't need to work at all? » Tu questionnes, curieux. Tu te concentres sur les caresses que ses pouces exercent sur ta peau, calant ta respiration sur leur rythme régulier. « I know you don’t like to talk about this but… I only… It felt… I felt so useless when he asked me all these things like of course I would know. I told them I’m your fiancé and I was… Clueless. » Tu palpes le désarroi d'Asher mais tu ne peux t'empêcher de te sentir très fier qu'il s'annonce comme étant ton fiancé à des inconnus. « But you’re awake now, it doesn’t seem like it was that much important. They’ve managed to give you whatever for you to get better so… » « You're the best medicine, » tu prononces avec une intonation de vérité générale. « I don't want you to feel useless. I'm sorry you felt that way. You're far from useless. » Tu te bouges laborieusement sur le matelas, à la recherche de confort. « I don't want to pollute your life with my cancer, » tu confies. « I want you to have the best of me. » Dit comme ça, tu as l'impression que ça sonne un peu comme de la triche, ou une sorte de mensonge. Ne démontrer que la bonne partie de soi-même. Pourtant, tu le faisais muni de la bonne intention de rendre heureux Asher, de le protéger autant que possible de la merde qu'il y a sur cette planète. Comme tu avais pensé, en 2019, qu'il était plus sain de rompre avec lui plutôt que de l'embarquer dans ton combat contre la maladie. Peut-être devrais-tu cesser de désirer épargner le Buckley de la sorte, peut-être que ce n'est pas la bonne manière d'agir. « But I keep no secrets from you. » S'il te pose des questions, tu y répondras assurément. S'il veut tout savoir, tu t'efforceras de le renseigner autant que possible. Tu ne veux pas lui mentir, ni lui cacher des choses qu'il veut savoir sur ton compte. « I can tell you whatever you wanna know. » Pourtant, c'est toi qui formulera la prochaine question : « Can you come closer. » Tu as vraiment envie de sentir davantage de lui contre toi. Tu aspires à t'enivrer de son parfum plutôt que respirer l'odeur de désinfectant qui rôde dans la pièce, à savourer davantage de sa chaleur. Tu le veux à proximité car il compose ta force la plus puissante et redoutable, ton indétrônable motivation ultime, pour ce second round contre ton cancer : il l'a insufflé en toi dès qu'il a gravé une partie de lui en ton être lorsqu'il t'a dérobé ce baiser dans l'obscurité d'un pub, une vie plus tôt. Tu le veux contre toi car tu es intimement convaincu qu'avec lui à tes côtés, absolument tout est possible et rien n'est insurmontable, tant tout sonne juste quand vous êtes ensemble. Tu le veux contre toi parce qu'il est ce que tu as de plus précieux au monde, il est ton univers et ton refuge dans tout ce chaos. « I'm glad you're here, » tu souffles.