Les semaines ont passées depuis la dernière fois où il a croisé Noa, depuis la dernière fois où il lui a même parlé. Elle a longtemps été son tout, sa bouée et son ancrage dans un monde nouveau mais elle si elle a gardé ce rôle durant de longues années, force est de constater que les choses ne sont plus ce qu’elles avaient pu être. Première rencontre ou presque sur le sol australien, petite amie, meilleure amie, elle sait tout de lui et il sait qu’elle n’a rien voulu lui cacher en retour. Ce sont les affres du temps qui causent tant de malheurs, sûrement. A vrai dire il n’en sait rien et ne pourrait pas le deviner non plus, mais c’est au moins une explication qui semble plausible et qui a au moins le mérite de ne causer de tort à personne. Ce n’est ni la faute de Noa, ni celle de Swann si le temps les ont séparés, ou au moins éloignés. Et si rien ne peut être effacé ou rejoué, l’anglais espère au moins pouvoir leur improviser des lendemains plus solaires dans lesquels ils pourraient s’appeler durant des heures pour ne parler de rien d’intéressant et tout serait parfaitement normal. Il en vient même parfois à jalouser la relation que la brune tient avec son frère, avant de toujours se remémorer qu’il n’a en aucun le droit d’avoir de tels sentiments, injustes au possible pour tous les partis.

La bouche en cœur et tout penaud, il se retrouve devant l’appartement de Noa sans trop savoir quoi lui dire, ne se rendant compte qu’à cet instant à quel point il aurait beaucoup de choses à lui faire rattraper à propos de sa vie. En retour, tout doit être plus ou moins similaire. Tout ce qu’il espère, c’est qu’elle aura eu une meilleure année que la sienne, puisqu’elle mérite d’être parfaitement heureuse. Le bonheur de Noa importe bien plus à ses yeux que le sien, même si l’anglais sait parfaitement que les deux ne sont pas incompatibles et bien au contraire. Au moins, il a pensé à amener à manger, supposant que puisque la fin de journée approche, ce serait forcément une bonne idée - même s’il estime qu’il est moralement acceptable de manger à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit et que Noa le sait parfaitement.

Fébrilement, à l’image d’un écolier venant vendre ses premiers billets de tombola, il vient toquer quelques coups à la porte de l’adresse donnée par Matt. Le blond a entendu parler d’un homme dans la vie de son amie, Gregory, mais ses informations s’arrêtent abruptement. Il l’a toujours connue libre comme l’air et il l’imaginerait mal se poser auprès de quelqu’un, mais après tout elle devient peut-être une adulte sage et posée. “Si jamais tu m’observes par le judas en te demandant si tu devrais m’ouvrir, sache que j’ai de la nourriture.” Il tente donc, armé de son meilleur sourire de façade sans savoir si elle ne risque pas de lui en vouloir de ses longues semaines d’absence. Quoi qu’il en soit, il fera tout pour que ce ne soit pas le cas, tout comme il essayera autant que possible de garder le lien avec elle, à défaut de vouloir mettre autant d’effort avec d’autres. "Et que ça sent vraiment très très bon."

Swann me manque, tout comme Isaac me manque, Josh me manque et Jane me manque aussi. Plus le temps, pas le temps, des excuses, des fausses excuses, le temps qui passe, tout qui file et puis plus rien. Les nouvelles à distances, les réseaux sociaux permettent de se tenir à minima informés. C’est tout ou rien, tout ou presque rien, en tout cas. Personne n’est a blâmer, parfois, même si je culpabilise, même si le tourbillon qui s’est installé dans ma vie – qui se nomme Greg – m’a emporté dans une spirale qui fait tant de bien que de mal – non, plus de bien que de mal. Le projet du bar suit son cours, nous demande beaucoup de temps, c’est son bar à Greg, mais je peux pas m’empêcher de me sentir investie dedans, je le vois changer au jour le jour, s’ouvrir et être moins aigri aussi. Le poids de son travail lui pesait tellement, s’en être débarrassé la libérer et j’en fais aussi moins les frais. L’eau est calme à l’horizon, peut être trop, en ce moment, signe avant-coureur d’un tsunami ? Et si pour une fois, c’était juste normal et qu’enfin, on avait la paix sociale, partout.
Ce soir je m’accorde du temps pour moi, Greg doit attendre un artisan dans son bar pour les derniers travaux, dernière ligne droite avant l’ouverture, on y est presque. Je m’autorise de rester seule, de ne pas le rejoindre – pour une fois. De toutes façons, il veut pas que je sois tout le temps dans ses pattes. Il a besoin de ça, moi aussi. Rentrée du travail, je m’affale littéralement sur le canapé, Doowap a mes pieds, il me tient chaud pendant qu’il ronfle et que je me vois obligée d’augmenter le son de la télé. Ca toque, je me redresse, bouscule un peu Doowap et pour autant, ça ne l’empêche pas de continuer à dormir, même après un petit grognement. « du calme monsieur. » que je lui dis, sans avoir l’intention de le déranger davantage. Je suis dans mon vieux t shirt beaucoup trop grand pour être présentable et comme j’ignore qui se pointe à cette heure, je m’approche silencieusement, comme si ca allait me permettre d’évaluer qui était derrière la porte. “Si jamais tu m’observes par le judas en te demandant si tu devrais m’ouvrir, sache que j’ai de la nourriture.” Cette voix qui résonne me fait sourire aussi tot. Qu’est ce que Swann fait là ? Je sais déjà que Matt a du lui souffler ma nouvelle adresse. Qui d’autre ? « Et que ça sent » J’ouvre la porte, sourire aux lèvres, je lui sauterai dessus s’il n’avait pas de la nourriture dans les mains. «…vraiment très très bon. » j’avoue, ça sent déjà très bon. « Donne moi ça. » je le libère, pousse la porte d’un coup de pied pour le laisser entrer et pose rapidement les sacs de bouffe sur la table derrière moi. « Viens viens ! » je me retourne et ouvre les bras pour enlacer mon ami. « Ca me fait vraiment plaisir de te voir. » je le garde contre moi un instant et me recule pour l’analyser de haut en bas. « Ca va, t’as bonne mine. » qu’il est beau, Swann avec son air toujours à côté d’la plaque.
Greg n’est pas là, ca aurait été l’occasion de les présenter, une prochaine fois. « T’as entendu mon ventre gronder en ville ? Pourquoi, c’est toujours une question de bouffe, hein ? » parce que ça a toujours été une question de bouffe, tout l’temps, avec tout l’monde. « comment tu vas ? »

Noa ne se fait finalement pas prier pour lui ouvrir la porte et son ami continue de penser que cela a quelque chose à voir avec le fait qu’il ait parlé de la bonne odeur de la nourriture entre ses mains. « Donne moi ça. » Avant même toute salutation, c’est bien le plat qu’elle prend à son tour entre les mains. C’est presque si elle le lui avait volé, Noa, et cette simple idée le fait sourire bien plus qu’autre chose. Certaines choses ne changent pas et pour une personne aimant la stabilité autant que Swann, il n’y a pas meilleure nouvelle qui soit. Le temps et la distance font leur œuvre mais les personnalités ne changent pas tant qu’on pourrait le croire. Les mouvements de la jeune femme sont rapides, pressés. Elle a toujours été comme ça : il ne faut pas perdre de temps, la vie est déjà bien trop courte. « Viens viens ! » Pressante et pressée, la Jacobs. Il sourit une fois de plus dans le même élan le faisant se rapprocher d’elle, ses bras venant se poser sur ses épaules pour l’étreindre sans aucune honte. Elle porte l’odeur d’un autre mais si c’est le prix à payer pour qu’elle soit heureuse alors il ne lui en tiendra jamais rigueur, bien au contraire. « Ça me fait vraiment plaisir de te voir. » - “Ça me fait plaisir aussi.” C’est évident, puisqu’il est le premier à être venu à sa rencontre, mais il juge nécessaire de prononcer ces paroles à haute voix et les murmurer contre ses cheveux bruns.

Lorsqu’elle fait un pas en arrière et qu’il se résout à la lâcher à son tour, les yeux noirs de Noa semblent se transformer en scanners l’analysant sans aucune honte ni retenue. Après tout, elle a toujours été comme ça et il n’est en rien étonné de son attitude. « Ça va, t’as bonne mine. » Elle a toujours des conclusions décalées, Noa, et une fois de plus ça suffit à le faire rire. Peu importe ce qu’il se passe dans sa vie, elle a un don pour le lui faire oublier l’espace d’un instant. “Je passe le test ça veut dire ? Heureux de le savoir.” Est-ce que ça veut dire qu’il aura le droit de partager avec elle la nourriture qu’il a lui-même amené, alors ? Parce qu’il reste tout de même certaines priorités dans la vie, voyez-vous. Ses mains reviennent dans ses poches par simple habitude alors qu’il prend le temps de relâcher ses muscles et respirer un peu mieux, rassuré qu’elle ne semble pas lui en vouloir du manque de contact gardé. “Tu triches, toi, t’as toujours bonne mine.” Qu’il râle et se plaint faussement, le mauvais comédien.

« T’as entendu mon ventre gronder en ville ? Pourquoi, c’est toujours une question de bouffe, hein ? »
“T’aurais préféré que je vienne te voir pour te demander de m’aider à déménager ?”

Les déménagements sont toujours un piège et toujours le moment de l’année où tous vos amis se retrouvent subitement à être très, très, très occupés. Il aurait voulu que ce ne soit qu’une blague et qu’il n’ait rien à déménager mais force est de se rendre compte que c’est ce qu’il a fait à deux reprises en peu de temps, passant de son éternel appartement à un plus grand avec Lucia, pour finalement se retrouver dans une collocation avec deux femmes qu’il ne connaît ni d’Eve ni d’Adam. Tout a changé bien trop rapidement pour qu’il n’ait le temps de tenir ses proches au courant mais maintenant, au moins, il peut faire le bilan final à Noa et lui éviter un quelconque suspens inutile. « Comment tu vas ? » Toujours la même question, pas vrai ? Swann fait donc la moue et hausse les épaules, ne sachant quel argument lui donner en premier lieu. “Ça va ça vient.” semble être la réponse la plus honnête à lui donner. Noa mérite la vérité, mais pas au point d’avoir à s’inquiéter pour lui. “On a rompu, avec Lucia.” Avant que les questions n’arrivent, il préfère prendre les devants. Toujours attristé par cette nouvelle, il prouve au moins qu’elle ne l’a pas mis à terre comme cela aurait pourtant été plus que plausible. “Mais puisque tu sens le shampoing pour homme, j’imagine que tout se passe bien avec Gregory ?” Il n’est pas jaloux, territorial ou envieux. Il n’est rien de tout cela, bien sûr, et ce n’est que par sincère amitié et curiosité qu’il lui pose la question, heureux qu’elle ait su trouver quelqu’un avec qui partager plus qu’une seule semaine de vie. “Je ne sais pas si je dois le plaindre ou le trouver chanceux.” Parce que Noa reste … Noa ? (trop) Fier de sa blague, il sourit finalement de toutes ses dents tel un enfant terrible.

La surprise fait son effet, pas la place pour la culpabilité, bien que j’aurai pu faire le premier pas, j’aurai pu être celle qui débarque à l’improviste pour apporter la bouffe, mais c’était pas le cas. Et je vais faire comme si Swann ne m’en tenait pas rigueur. J’espère en tout cas. Et maintenant qu’il est là, maintenant qu’il est passé au rayon X pour tenter de savoir s’il va bien – je crois -, j’avais plus qu’à profiter de sa présence, pour rattraper les semaines – ok, les mois – qu’on avait pas passé à se voir. De mon côté, comme il peut le voir, c’est nouvel appartement, en nouvelle compagnie. Fini les colocs, peut-être qu’il est temps de vivre comme une femme de 37 piges que je suis. Y a pas vraiment de règle, mais quand même, ça fait du bien de rentrer chez soi chaque soir et d’être vraiment attendue. “Tu triches, toi, t’as toujours bonne mine.” Il sait bien que non, mais le compliment est à prendre, j’en laisse pas une miette.
L’odeur de ses victuailles me chatouille le nez, ça sent bon et on allait en profiter, tant que c’est encore chaud. Je choppe le sac et vas m’installer sur le canapé, en l’invitant implicitement à me suivre, c’est pas loin, c’est juste derrière. « On a rompu, avec Lucia. » je m’interromps un court instant, le regardant avant de sortir de leur sac, nos plats. « Désolée. » j’ignore dans quelles circonstances s’est passée la séparation, je n’avais pas vraiment eu l’occasion de faire entièrement sa connaissance, si ce n’est de les voir roucouler de temps à autre au DBD. Elle n’y travaillait plus depuis un moment, Matt m’en avait touché deux mots. C’était ça, de travailler dans les bars, souvent, c’est de passage, pour avoir de meilleurs projets ensuite. Lucia avait été une excellente recrue pour Matt, en tout cas. Je n’avais jamais osé m’interposer dans cette relation, m’imposer plutôt, quand ils étaient ensemble, ils dégageaient une onde positive, beaucoup de bienveillance l’un envers l’autre, deux ados timides qui se découvraient à chaque instant.
Je suis curieuse, d’en savoir plus, j’imaginais que c’était la suite logique de la conversation, mais Swann esquive, comme si, une fois l’information donnée, ce n’était pas nécessaire de s’étaler sur le sujet. J’y reviendrai plus tard. “Mais puisque tu sens le shampoing pour homme, j’imagine que tout se passe bien avec Gregory ?” je passe une main dans mes cheveux pour glisser sous mon nez une méché et renifler le shampoing d’homme, il est possible que, mal réveillée, je me sois trompée de flacon. « On va dire qu’on est sur une phase montante. » que je lâche, parce que c’est pas toujours évident avec le Morton, mais qu’en ce moment, c’est la belle vie, alors autant en profiter. “Je ne sais pas si je dois le plaindre ou le trouver chanceux.” « Eh ! » la réponse me semble elle tout à fait évidente. « J’aime toujours me dire qu’il peut y avoir une part de jalousie en toi. » fausse jalousie qu’on aura jamais l’un pour l’autre. On a eu notre chance aussi, et celle de l’avoir comme ami me convient bien mieux, bien que la nostalgie me rattrape de temps en temps, comme si finalement, parfois, je n’étais pas vraiment sûre des choix que je faisais. « tiens. » je pose son plat entre ses mains, sortant ensuite les couverts à disposition. « Si tu restes un moment, tu devrais le rencontrer. » et j’en serai très fière.
Les premières bouchées se font sans patience. Et ma curiosité, toujours piquée à vif me rattrape. « Qu’est ce qu’il s’est passé ? Avec Lucia ? »

Il a toujours apprécié Noa parce qu’elle est différente. Elle est une caméléon passe-partout qui sait s’adapter à chaque situation et chaque interlocuteur, elle est toujours celle qui met à l’aise autrui avec son sourire ou ses mots. C’est grâce à la jolie australienne qu’il a pu considérer ce pays comme le sien dès le premier soir, et aujourd’hui encore il s’en sent redevable. Plus encore, il ne voudrait pour rien au monde laisser leur amitié s’effriter sous ses yeux à cause des aléas du temps. « Désolée. » Il la sait sincère ; ne s’attarde pas davantage sur le sujet. Swann lui devait la vérité mais il n’a pas envie de poser des mots sur des souvenirs encore trop récents dans son esprit, surtout pas alors qu’il en a le cœur lourd. Il est venu la voir en tant qu’ami venant partager un repas, non ses peines de cœur. Elle serait une bonne oreille, il n’en doute pas, mais ils ont des choses bien plus réjouissantes dont ils peuvent parler. Il hoche de la positive et ferme les paupières pour lui signifier qu’il la remercie mais n’y ajoute aucun mot, préférant souligner le fait qu’elle se confonde presque avec son nouveau petit-ami. «  On va dire qu’on est sur une phase montante. » Il sourit instinctivement, imginant déjà les scènes de ménages que ces lieux doivent accueillir de façon régulière. Sans connaître Gregory, il sait pourtant qu’elle ne se serait pas choisie un Labrador comme conjoint. « J’aime toujours me dire qu’il peut y avoir une part de jalousie en toi. » Cette fois-ci, c’est un rire qui fait place à son simple sourire. Un vraiment ? se lit sur son visage, bien qu’il ne trouve pas le temps de le lui prononcer. La répartie de la jeune femme l’amuse sincèrement. “De nous deux, qui dévisage toute personne qui s’approche un peu trop de l’autre, hm ?” Il reprend alors, amusé de la situation et des mots venant d’une Noa qui a tout d’un Pittbul dès lors qu’une femme semble un peu trop proche de Swann à ses yeux. Lui, il ne fait que s’assurer qu’elle soit bel et bien heureuse en ménage. Son bonheur est tout ce qui lui importe.

Pourtant, rien ne l’empêchera de se faire une place sur le canapé, et encore moins de partager un repas chaud en compagnie de son amie. Après tout, certaines priorités ne changeront jamais. « Tiens. » Alors il prend, l’anglais déjà affamé, comme c’est de toute façon le cas à chaque instant de chaque jour. « Si tu restes un moment, tu devrais le rencontrer. » - “Tant qu’il m’en colle pas une en me prenant pour ton amant, ça devrait bien se passer.” Non pas qu’il sous entende que ce soit le genre de la brune d’aller voir ailleurs, mais il a un certain donc pour s’imaginer les pires scénarios envisageables. “Il rentre tard. Travail ou sortie ?” Il ne connaît rien de cet homme, ce ne sont là que quelques brins de curiosité qui ne feront de mal à personne, non ? “Mais je serais heureux de le rencontrer. Pas d’anecdotes gênantes, promis.” Et Noa elle-même sait qu’il en a des tonnes à proposer à son sujet, plus ou moins entendables par autrui. La bouche pleine, il sourit maintenant de ses joues immenses, lui qui ressemble à un gamin trop fier de sa maigre répartie. « Qu’est ce qu’il s’est passé ? Avec Lucia ? » Et le voilà qui déglutit subitement, à grande peine. Son sourire se meurt, il ne prend pas la peine de cacher une tristesse qu’elle aurait de toute façon repérée. “Elle a pas une vie facile. Nous deux, ça n’aurait pas pu fonctionner à long terme.” S’il n’était question qu’eux deux alors il n’y aurait jamais eu de soucis mais la faute revient à son ex petit-ami veillant encore de trop près sur elle, n’hésitant pas à la menacer de mort pour s’assurer que Swann fasse un pas en arrière. Trop bon, trop con, il n’a pas pris aucun risque. Elle mérite d’être heureuse avec quelqu’un d’autre. Elle est forte, maintenant, elle n’a jamais eu besoin de lui et c’est encore moins le cas en cet instant. “Et j’ai vraiment envie de me poser. Je sais pas rencontrer des gens juste pour un soir, ou quelques semaines.” Ca faisait un an, Swann. “C’est sûrement mieux comme ça, pour tout le monde.” Il ne ressent que de la tristesse mais bientôt, il le promet, tout ira mieux. Pour elle autant que pour lui. "C'est moi qui ai rompu, je te vois venir. T'as aucune raison de lui en vouloir." Puisqu'elle n'est pas à l'origine de son coeur brisé, Noa n'a donc aucune raison de lui en vouloir, évitant ainsi à Swann de devoir calmer ses ardeurs.

“De nous deux, qui dévisage toute personne qui s’approche un peu trop de l’autre, hm ?” cette réflexion m’arrache un rire franc. Ok, je suis coupable. « Je veux juste m’assurer que personne n’abuse de toi. » j’hausse les épaules, d’une grande naïveté mais sans avouer qu’effectivement, j’avais tendance à baliser un peu trop les alentours dès qu’on s’approche de Swann. Un petit besoin de valider qui est dans les parages et qu’on le mérite vraiment. Parce que je connais toutes ses qualités et je connais aussi certaines de ses faiblesses et je n’admettrais jamais qu’on en abuse. « Mais laisse moi me dire que toi aussi, t’essais de t’en assurer. » et je sais bien qu’en réalité c’est le cas. Qu’il ne laisserait sans doute pas quelqu’un de malveillant rester trop longtemps dans les parages s’il s’en apercevait. Greg avait son caractère, mais il n’était pas quelqu’un de méchant. J’avais appris à composer avec. Peut être qu’il aura l’occasion de le remarquer de lui-même lorsque Greg arrivera, plus tard dans la soirée. “Tant qu’il m’en colle pas une en me prenant pour ton amant, ça devrait bien se passer.” « tant qu’on reste habillé, pas de crainte. » et le programme n’était pas de terminer à poil sur ce canapé donc, tout devrait bien se passer. « Je laisserai personne t’en coller une, dans tous les cas. » même pas Greg, bien que j’imagine ne pas faire le poids face à lui s’il se met en colère. “Il rentre tard. Travail ou sortie ?” j’ouvre le couvercle du plat avant d’attaquer ma première bouchée, c’est la bouche pleine que je réponds naturellement. « Il trav…. » je souffle, c’est encore bien chaud et je manque presque de me brûler. « Il travaille. Il vient d’ouvrir un bar, c’est le début, ca à l’air de marcher plutôt bien, mais on sait pas trop si c’est l’effet nouveauté ou si ca va vraiment duré, en tout cas, on croise les doigts. » j’étais contente de voir ce projet aboutir et de voir que Greg avait de nouvelles motivations depuis qu’il avait quitté son poste à la police. Une vraie nouvelle vie pour lui et un nouveau souffle. “Mais je serais heureux de le rencontrer. Pas d’anecdotes gênantes, promis.” Mon regard l’en remercie. « garde ça pour plus tard, même si j’suis sure qu’il t’adoptera si tu balance un ou deux dossiers contre moi. » du genre coalition. « soit pas trop dur. » que j’implore, amusée, lui donnant un semblant d’autorisation si ça pouvait aider Greg à se détendre.
J’aborde le sujet qui fâche, le large sourire et les joues gonflées de Swann disparaissent à l’instant même où je reviens sur Lucia et je m’attendais pas non plus à ce qu’il me réponde avec enthousiasme. Une moue s’affiche sur mon visage à mon tour, réellement désolée pour lui, car je me rends bien compte que ce n’est pas une nouvelle qu’il prend avec gaité de cœur. J’espère au moins ne pas lui avoir coupé l’appétit.  « Elle a pas une vie facile. Nous deux, ça n’aurait pas pu fonctionner à long terme. » Réponse peu convaincante, à mon goût. « Et j’ai vraiment envie de me poser. Je sais pas rencontrer des gens juste pour un soir, ou quelques semaines. » je grimace, comprenant mal où il voulait en venir. J’ai pas l’impression que sa relation avec Lucia soit si récente que ça…  « C’est sûrement mieux comme ça, pour tout le monde. » donc, elle l’a quitté, parce qu’elle a une vie compliquée ? Je comprends pas. Je fronce les sourcils, voyant bien que dans l’histoire, c’était lui qui subissait cette séparation. « C'est moi qui ai rompu, je te vois venir. T'as aucune raison de lui en vouloir. » il me laisse bouche bé et alors, j’y comprends vraiment rien. « Je capte pas. » je secoue la tête, pose mes couverts un instant. « Ca faisait pas un an que vous étiez ensemble ? ca tient pas la route. » Est-ce que j’suis trop intrusive là ? Maladroite ? « Qu’est ce qu’il te faut de plus, du coup ? Si tu veux te poser mais que tu as pris la décision de la quitter… »

« Je veux juste m’assurer que personne n’abuse de toi. » Il rigole sincèrement, relâchant tous ses muscles le temps d’une seconde. Sacrée Noa. Elle a un caractère bien trempé et bien à elle, c’est sans aucun doute ce qui lui a plu dès qu’il l’a rencontrée. “Qu’est-ce que je ferais sans toi ?” Il a la fâcheuse tendance de donner sa confiance un peu trop facilement mais même la patience de Swann a ses limites, il ne sait pas éternellement ployer face à autrui et vient toujours le moment où il fait entendre sa voix en cas de besoin. Avant ça, il aura tout de même tout fait pour éviter d’en arriver là. Les choses étaient parfois plus simples que Noa agissait tel un chien de garde face à lui, éliminant bon nombre de personnes avant que les quelques survivants n’osent venir partager un mot avec lui. C’est un temps révolu, pourtant : les deux amis ne passent plus autant de temps ensemble. « Mais laisse moi me dire que toi aussi, t’essaies de t’en assurer. » Ce n’est qu’une fausse plainte, elle sait bien qu’il réagirait bien plus vite face à un danger la concernant elle plutôt que lui. Les choses sont différentes dès qu’il est question de ses proches. “Qu’est ce que tu ferais sans moi ?” Rien, bien sûr, cela va de soi. Elle cesse d’exister dès que Swann n’est plus dans les parages, non ?

Bien rapidement, il laisse le sujet principal de la conversation retourner à ce qui l’intéresse davantage : Gregory. « Tant qu’on reste habillé, pas de crainte. » - “Mince, on est obligés tu crois ?” Il feind une plainte exagérée, a de grands yeux qu’il fait rouler au ciel, comme si garder ses vêtements paraissait soudainement être une épreuve insurmontable. Il ne garde son sérieux qu’une seconde, pourtant, éclatant en rire dès la suivante. Le temps où ils étaient effectivement nus l’un face à l’autre est révolu sans que ce ne soit en rien une mauvaise chose. « Je laisserai personne t’en coller une, dans tous les cas. » - “Je devrais vraiment penser à t’engager en tant que garde du corps.” Puisqu’en sa présence il ne recevra aucune gifle ni quoi que ce soit dans le genre, cela semble être une bonn idée - si tant est qu’il était réellement sous la menace perpétuelle de telles choses et incapable de se défendre seul, ce qui s’avère être doublement faux. Il serait prêt à l’engager à ses côtés si cela signifiait pouvoir profiter de sa présence, son sourire et ses blagues quelques heures par jour.

Noa se laisse happer par sa gourmandise, l’anglais à sa suite. Il engloutit le plat entre deux informations au sujet de son petit ami, son métier, ses occupations et tout ce qu’il s’en suit. Rien ne serait de trop alors qu’il tente de dresser un portrait aussi précis que possible de l’homme qu’il regrette ne pas connaître davantage. Son intérêt monte en flèche alors qu’il parle d’ouvrir un bar, ce qu’il trouve cocasse à rapprocher avec le métier de son frère, comme si elle choisissait dans son entourage uniquement des hommes pouvant la faire boire à l’oeil. Ce ne serait même pas impossible, la connaissant. “Je croise les doigts avec vous.” Et il est sincère, bien sûr. Loin de lui l’idée de toute compétition. En preuve de sa bonne foi, il promet même de ne pas (trop) divulger d’anecdotes gênantes au sujet de Noa, alors même qu’il en aurait des milliers à raconter, chacune capable d’être rangée dans des catégories bien croustillantes. « Garde ça pour plus tard, même si j’suis sûre qu’il t’adoptera si tu balances un ou deux dossiers contre moi. » - “Faut savoir, tu veux préserver ta réputation ou que je m’entende avec ton petit-ami ?” Comme s’il n’y avait réellement que deux issues possibles, il se fait dramatique, pesant davantage de mots sur un choix qui n’a pas lieu d’être. « Sois pas trop dur. » Elle a une voix bien différente, maintenant, au point où Swann en aurait presque pitié. Il sourit tendrement et passe une main dans ses cheveux qu’il ébouriffe pour ainsi dédramatiser la situation. Il ne sera dur que s’il en ressent le besoin, et pour un homme tel que lui il faut amasser bon nombre d’inquiétudes avant qu’il en vienne à une telle conclusion. Il aimerait parfois qu’elle puisse faire preuve d’autant de recul, raison pour laquelle il lui demande explicitement de se montrer clément envers son ex-petite-amie.

« Je capte pas. » Elle ne capte pas au point d’arrer de manger, ce qui démontre un certain niveau de gravité. Il en fait de même, bien plus parce qu’il en a l’appétit coupé plutôt qu’autre chose. Avoir à donner davantage d’explications au sujet de Lucia est la dernière chose qu’il voulait faire. « Ça faisait pas un an que vous étiez ensemble ? Ça tient pas la route. » Du bout des doigts, il masse ses tempes devenues soudainement douloureuses. Si, bien sûr que si ils étaient en couple depuis un an déjà. Non, bien sûr que non cela ne tient pas la route. Il fallait au moins l’impetuosité et la curiosité de Noa pour s’en rendre compte, là où aucun de ses proches n’a osé le questionner sur le sujet de façon aussi tranchée (et sanglante). « Qu’est ce qu’il te faut de plus, du coup ? Si tu veux te poser mais que tu as pris la décision de la quitter… » De la simplicité. Il veut une relation simple, naturelle, sans aléas, sans crainte de voir débarquer son ex-petit-ami pour lui faire du mal, sans crainte de la laisser seule au beau milieu de la journée alors qu’elle pourrait ne jamais lui revenir en un seul morceau. D’autres la protégeront bien mieux que lui, ils s’y appliqueront avec toute la force qu’il n’a pas, lui qui peine déjà à subsister lui-même. “Noa je sais que tu veux bien faire mais c’est pas aussi simple. On a rompu et on ne se parle plus, je dois tourner la page et elle aussi.” Leurs cicatrices sont différentes, pourtant, alors qu’il sait être l’homme qui aura brisé le cœur de Lucia. Il se rassure en se disant qu’il en a pas fait de même avec son bras, lui, au moins. “On était pas faits l’un pour l’autre.” Ils étaient heureux, mignons, niaies à souhait, mais il faut croire que rien de tout ceci n’était suffisant aux yeux du Destin. “Je vais me trouver une colocation, je pense. La maison est trop grande pour moi tout seul. Tu pourras trouver plein de trucs à leur reprocher, à défaut que t’aies une petite amie en guise de bouc émissaire.” C’est tout ce qu’il trouve à lui proposer en guise de compromis, incapable de lui promettre qu’il retrouvera quelqu’un rapidement alors qu’il n’a nullement le coeur à cela. "J'ai aucune idée de ce qu'il me faut vraiment mais je compte pas me reposer avec quelqu'un avant d'être certain qu'elle soit la bonne." Il est fatigué de devoir se reconstruire ruptures après ruptures, quand bien même ces dernière se comptent sur les doigts d'une main, ce sont autant de séparations de trop. "Avoue, ni toi ni moi on aurait cru que tu sois la première à te caser pour de bon." Il termine enfin dans un rire, laissant finalement ses yeux retourner sur les plats cuisinés qu'il a hâte d'enfin pouvoir engloutir.

Qu’est-ce que je ferai sans lui, qu’est-ce qu’il ferait sans moi ? Swann fait à présent parti de ces personnes qui prennent une place énorme dans mon cœur mais envers qui je manque à mes obligations, sans doute. Les démonstrations d’amitié sont pourtant bien moins nombreuses et sont loin de représenter réellement ce qu’est la réalité. Sans lui, sans Isaac, sans Josh, sans Matt, qu’est-ce que je ferai sans eux ? La simple idée de savoir qu’ils vont bien, qu’ils n’ont besoin de rien, même pas besoin de moi, me conforte, il suffirait d’apprendre qu’il leur manque un je ne sais quoi pour rappliquer. C’est ça l’amitié aussi, non ? Se laisser respirer, se tenir à courant, même à distance, tant que tout va bien, tout est ok. C’est dans les moments difficiles qu’il faut savoir être présent et se soutenir. Est-ce le cas ? Suis-je à la hauteur de mes propres exigences ? J’ose l’espérer, en me disant que Swann ne serait pas ici, si non.  
“Mince, on est obligés tu crois ?” Il y a bien longtemps que je ne ressentais plus ce besoin viscérale de virer mes fringues dès que je croisais le regard de Swann. Sa remarque me fait rire à mon tour, sachant bien qu’à présent, il est tout comme moi, comme qui dirait, vacciné de cette maladie d’amour qui nous habitait autrefois. « c’est une question de vie ou de mort » que je lance, amusée, mais en réalité, je crois vraiment que si Greg me surprenait à poil avec un homme, celui-ci risquait d’y laisser sa peau, quelques côtes et un nez… personne n’avait réellement envie de s’infliger ça. Même pas moi. - “Je devrais vraiment penser à t’engager en tant que garde du corps.” Et d’ailleurs, pas sûre de tenir le coup face à Greg, face à quiconque en réalité, du haut de mon mètre soixante-trois, trois têtes de moins que mon petit ami, la moitié de son poids, ou presque et surtout, je n’avais pas l’entrainement sportif dont il avait pu bénéficier ces dernières années en travaillant pour la police. J’étais loin de le suivre dans son addiction aux footings quotidien, une fois tous les quinze jours me semblait déjà bien suffisant.
Dès lors que je me mets à parler de Greg, de ses projets, qui deviennent les miens par procurations, j’ai l’impression de parler d’un passion qui m’anime depuis toujours. D’être habitée par un je ne sais quoi qui me fait du bien et qui m’apaise et me pose, tout en ayant une part d’excitation constante dans la voix, une pile qui me donne de l’énergie. “Faut savoir, tu veux préserver ta réputation ou que je m’entende avec ton petit-ami ?” « je suis prête à un petit sacrifice si ça permet que tout se passe bien. » et de toutes façons, je savais que leur rencontre se passerait forcément bien. Bien que Greg ait sans doute l’impression de rencontrer un gamin avec qui il ne saurait pas trop comment agir. Je le vois venir. Et j’imagine qu’il ne mettrait pas tout de suite Swann à l’aise, voulant peut être le tester. Alors, quelques dossiers ne seraient pas de trop. Mais de quels dossiers est-ce qu’on pouvait bien parler ? Si, Swann avait quelques références dans ses tiroirs… La main de Swann dans mes cheveux me font réagir aussitôt, remettant en place chaque mèche qui pourrait dépasser ici et là. Je comprenais bien que je pouvais lui faire confiance. J’avais presque hâte que Greg débarque. Mais en attendant, ce moment en tête à tête avec Swann nous permettait d’aborder des sujets plus sensibles…

Je bouscule sans doute Swann, je sais qu’il n’aime pas mes remarques, je sais qu’il n’a pas envie que je mette les pieds dans le plat comme ça. Je sais que je lui fais mal à la tête. Je sais qu’il regrette déjà d’être venu finalement. “Noa je sais que tu veux bien faire mais c’est pas aussi simple. On a rompu et on ne se parle plus, je dois tourner la page et elle aussi.” A vrai dire les raisons, le pourquoi du comment leur appartiennent, ma curiosité me pousse à investiguer davantage, mais soit Swann me donne les réponses franches et sincères, soit il ne me dit rien, en tout cas, les réponses bancales me donnent davantage envie d’aller plus loin. “On était pas faits l’un pour l’autre. Je vais me trouver une colocation, je pense. La maison est trop grande pour moi tout seul. Tu pourras trouver plein de trucs à leur reprocher, à défaut que t’aies une petite amie en guise de bouc émissaire.” Je lève les yeux au ciel, le sujet de la colocation arrivant rapidement sur le tapis à mon goût et balayant bien trop prématurément le sujet Lucia. Mais, j’avais bien compris que Swann ne souhaitait plus aborder leur relation. Je finirai bien, tôt ou tard par en savoir plus. « et tu sais que j’adore faire passer des entretiens. » les colocations, ma grande passion. Moi qui, rarement avait été capable de vivre seule, comme ce besoin de toujours savoir que quelqu’un serait là pour moi. "J'ai aucune idée de ce qu'il me faut vraiment mais je compte pas me reposer avec quelqu'un avant d'être certain qu'elle soit la bonne." Ah, on y revient, c’est le feu vert pour poursuivre sur mes questions ? "Avoue, ni toi ni moi on aurait cru que tu sois la première à te caser pour de bon." Ah qu’il est vilain à se moquer, avec son rire là. Je lève un doigt en l’air, plisse mes yeux et ouvre légèrement la bouche, n’ayant presque rien à y redire, bouche bée. « c’est petit. » je referme la bouche pour terminer mon plat, très bon au passage, je jette un œil sur le sac en papier recyclé pour noter le nom du restaurateur. « tu m’voyais quand même pas finir ma vie en colocation ? » petit pic en sa direction, les rôles sont inversés, ça y est. « en tout cas, j’crois que c’est sérieux avec Greg. » j’en suis sûre, voyons. « j’suis vraiment amoureuse. » ca somme comme un discours solennel. « J’attends la demande de mariage avec impatience. » que je lance, petite rire gêné entre les lèvres, gênée parce que c’était la vérité.
« tu veux boire un truc ? » je passe du coq à l’âne, me rendant compte qu’on avait rien à boire depuis qu’on avait commencé nos plats. « On a plein de bouteilles, depuis que Greg à ouvert son bar, il reçoit de l’alcool en tout genre, pour tester et être client ensuite… » ça, c’est un bon point.

« Je suis prête à un petit sacrifice si ça permet que tout se passe bien. » Au fond, Noa sait sans doute bien mieux que personne que Swann serait bien le dernier à mettre à mal les relations amoureuses d’autrui, encore moins celle de ses proches. Il a toujours donné sa chance aux hommes qu’elle a pu lui présenter, quand bien même il doutait fortement que certains d’entre eux aient quoi que ce soit de fréquentable. Tant qu’ils la rendaient heureuse, c’est tout ce qui importait, et donc il répondait par un sourire à leurs blagues qui n’en avaient que le nom et se faisait un plaisir de partager leurs anecdotes de nouveau couple. C’était une mécanique bien huilée qu’il a reproduit à de nombreuses reprises sans jamais perdre l’espoir qu’elle trouve un jour le bon, celui avec leqel elle n’aurait pas déjà envie de nouveauté au bout de quelques heures à peine. Cet inconnu dont elle chante tant les louanges semble être ladite personne, raison pour laquelle Swann ne manque pas de la taquiner à ce sujet, pourtant profondément heureux pour elle - et eux. La Noa qu’il a connu à son arrivée au pays a bien changé et tant mieux : elle était une personne formidable avant, elle ne l’est que plus encore désormais.

Il continue simplement de la détester lorsqu’elle s’obstine à faire trembler ses fondations fragiles, venant le questionner encore et encore sur un sujet encore bien douloureux pour lui : sa relation (déjà) terminée avec Lucia. Tout comme elle ne l’a jamais laissé donner son avis sur ses conquêtes, il ne souhaite pas que son amie en fasse de même à propos de celle qui a partagé sa vie durant plusieurs mois. Il préfère ne pas relever les yeux levés de Noa et son insolence pour se concentrer sur le positif qu’il peut tirer de cette soirée, et il n’a pas à réfléchir bien longtemps pour cela et ainsi déjà changer de sujet de conversation. Lui parler de la colocation qu’il convoite déjà semble être la meilleure chose à faire en cet instant. « Et tu sais que j’adore faire passer des entretiens. » - “Tu adores traumatiser des inconnus surtout.” Si entretien il devait y avoir, c’est assurément lui qui le passerait : il est hors de question de continuer à vivre dans la maison louée avec Lucia, elle appartient à leur histoire commune et à aucune autre. Pourtant, il lui offre une réponse en rigolant, certain qu’elle ne pense pas à mal le moins du monde. C’est sa façon à elle de lui dire qu’elle sera toujours là, et loin de l’anglais l’idée d’en douter.

De toute façon, il change déjà de nouveau de sujet, préférant se moquer gentiment de l’incapacité probante de son amie à rester bien longtemps aux côtés d’une seule et même personne - alors que de son côté, c’est tout ce qu’il a toujours recherché. Toute la comédie qu’elle instaure pour marquer le fait qu’elle soit outrée ne fait qu’amuser un peu plus le blond, éternel enfant. « C’est petit. » Absolument, et il ne s’en cache pas le moins du monde, en témoigne l’immense sourire affiché sur ses lèvres. « Tu m’voyais quand même pas finir ma vie en colocation ? » Il souffle en guise de rire, acceptant volontiers la pique (quand bien même il la trouve trop facile). Après tout, la colocation ça lui convient très bien. Il va vivre avec des gens avec qui il s’entendra forcément - puisqu’il s’entend de toute façon avec tout le monde - et les nuits seront moins occupées de cauchemars solitaires ; il a tout à y gagner, rien à y perdre. « Soyons honnêtes, t’aurais fini par tuer un de tes coloc et finalement c’est en prison que t’aurais finie ta vie. » L’anglais hausse les épaules, comme s’il n’y avait finalement aucune suite plus logique que celle-ci. Le pire pour elle aurait été de supporter un habit orange ne lui allant pas le moins du monde au teint.

« En tout cas, j’crois que c’est sérieux avec Greg. J’suis vraiment amoureuse. » Loin de lui l’idée de rire, désormais. Au contraire, c’est un sourire aussi fier qu’attendri qu’il affiche désormais, heureux que son amie semble enfin avoir trouvé la personne qui lui correspond. Noa aussi méritait de se poser après toutes ces années. « J’attends la demande de mariage avec impatience. » Dire qu’il allait faire la sienne à sa petite-amie et qu’il y pensait le plus sérieusement du monde il y a de ça quelques semaines encore. Swann espère que ses rêves deviendront réalité et que ce qu’elle ressent et entrevoit pour le futur est aussi partagé par ce Grégory. “Et moi de te voir essayer toutes les robes de mariée de l’univers avant de te dire que la première était la meilleure.” Il a sincèrement espoir qu’elle vivra ce jour merveilleux, ce qui semble être quelque chose de répandu dans son entourage. Alex passera le cap en octobre, déjà, et le temps file à une allure folle. “Fais lui toi-même la demande, après tout on est plus au Moyen-Age.” Elle n’a pas besoin de lui pour qu’on lui implante de telles idées. Si Noa veut vraiment se marier et qu’elle a l’impression que son petit-ami traîne, alors il sait par avance qu’elle n’aura aucun mal à prendre les devants.

« Tu veux boire un truc ? On a plein de bouteilles, depuis que Greg à ouvert son bar, il reçoit de l’alcool en tout genre, pour tester et être client ensuite… » Les explications s’enchaînent sans que Swann n’ait le temps de placer le moindre mot, il s’amuse de la situation et d’une Noa qui a déjà tout d’une gérante de bar à son tour. Sans doute qu’elle s’amuserait bien plus dans ce rôle que dans celui qu’elle tient à l’Association, pour laquelle elle pourrait continuer d’oeuvrer en tant que bénévole. Peu importe, ce n’est en rien le sujet de l’instant et encore moins la priorité alors qu’elle consiste plutôt à accepter une bouteille pour tester. La bonne excuse. “Choisis la plus belle bouteille, on s’en moque de ce que c’est, ça ira forcément avec le plat.” Maxime de Swann Buchanan : toute boisson se marie forcément avec un bon plat.