Quelques longues semaines s’étaient écoulées depuis que Nino s’était officiellement marié avec Katherine. Pour le moment, rien à signaler, tout semble se passer comme prévu, les dossiers pour valider ses papiers étaient en instance et il n’avait plus qu’à attendre le saint Grale pour pouvoir souffler une bonne fois pour toute. Rien n’était joué, mais à présent, il avait toutes les chances de son côté pour que ça fonctionne vraiment. Il ignorait combien de temps ça allait encore durer cependant. On ne lui donnait pas de délai, même pas de fourchette, mais il n’était plus à ça près, pour lui, le plus dur était passé. Enfin… sauf si on parlait d’Adèle. Parce que la brune ne lui menait pas la vie facile. Elle lui en voulait toujours de cette décision qu’il avait pris et depuis son mariage avec Katherine, il ne l’avait vu que deux ou trois fois, très peu en soit. Elle lui manquait, il n’avait aucune idée de comment se rattraper. Et si tout était déjà trop tard ? Et si il n’y avait pas de possibilité de revenir en arrière ? Pire, si Adèle était déjà passée à autre chose et qu’elle avait trouvé quelqu’un pour vivre sa nouvelle histoire d’amour passionnante et sa vie de princesse ? Ce serait sans doute sa meilleure décision à elle.
Le Pride Month, ces arc en ciel à chaque coin de rue rendait l’italien malade, il avait des nausées à croiser partout des hommes qui se tenaient la main, des hommes qui se maquillaient, qui arboraient fièrement leur sexualité. Les trans, femmes ou homme, les lesbiennes et tous les autres. Tous ceux dont il ne comprendrait jamais rien, tout ceux dont il ne voulait rien savoir, ceux dont il ne voulait même pas connaitre leur histoires, leurs experience. L’italien, encore dans une autre époque, bloqué au moyen âge, il ne comprenait pas et ne voulait pas comprendre. Cependant, si il y a quelques années, il se serait moqué, il aurait frappé deux hommes rien que pour avoir échangés des regards complices, il prend sur lui, il n’a plus cette haine intérieur qui lui donne envie de frapper. Il passe simplement son chemin, préférant détourner un peu le regard et faire comme s’il n’avait rien vu. Il souffle un peu, grogne, mais garde ça en lui, ne dit rien et fait sa vie. Il n’irait pas manifester contre tout ça. Il se contente juste de s’en foutre et de ne se mêler de rien. Peut être qu’il y a quelques progrès, à son échelle, mais il a encore beaucoup de chemin à faire.
La Chapelle de l’amour, si Adèle lui en voulait, c’est qu’elle lui avait reprocher de ne pas l’avoir choisi elle pour se marier, alors était-ce un moyen de se rattraper ? Symboliquement, l’italien s’était dit qu’il pouvait se marier ici, avec Adèle, devant ce guignole qui pratiquait les faux mariage. Une façon de lui dire qu’elle lui manquait. Fausse bonne idée, n’est-ce pas ?
Il lui avait envoyé un sms et il attendait déjà depuis une heure, persuadé à force qu’elle ne viendrait pas. Il avait pourtant essayé.


@Adèle Shephard

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Adèle relisait en boucle le SMS de l’Italien, ne comprenant pas vraiment ce qu’ils allaient faire dans la chapelle de l’Amour. C’est pas comme si ils étaient encore ensembles, ce n’était du moins plus vraiment le cas aux yeux d’Adèle, et elle ne comprenait pas que Nino puisse en douter. Il la connaissait suffisamment pour savoir qu’elle donne tout, qu’elle est du genre à croquer la vie, à sautiller partout où on la rend heureuse, et la distance qu’elle a pris avec lui, ne laisse aucun doute planer sur le fait qu’il y a malgré tout de gros nuages qui sont au-dessus d’eux. Elle avait peut-être été un peu naïve sur les bords, en s’imaginant qu’il puisse être heureux auprès d’elle, et qu’il n’est pas envie d’aller voir ailleurs, qu’il puisse se satisfaire dans le couple qu’ils formaient avant qu’il ne lui plante ce couteau dans le dos. Parce qu’elle n’a pas d’autres mots, pour dire ce qu’elle avait ressenti en découvrant cette lettre. Peut-être que si, il avait eu l’honnêteté de lui parler, de lui dire qu’il avait de gros souci, elle aurait pu l’excuser plus facilement, elle se serait empressé de l’aider, mais certainement pas en acceptant ce mariage bidon. Pour autant, elle ne l’avait pas dénoncé et elle ne le ferait pas. Une question d’éthique, d’honneur… Et peut-être parce qu’au fond elle l’aimait encore. Elle ne voulait rien laisser paraître, et n’en parlait qu’à peu de monde. Aux yeux de tous, Nino était un homme marié, désormais inaccessible. Aux yeux de Ash, de Will, de Hunter et de sûrement bien d’autres, et ça lui faisait mal. De devoir mentir pour le sauver encore une fois, alors qu’il ne semble pas lui faire suffisamment confiance pour qu’elle fasse partie du voyage, de son histoire. Elle ne sait pas réellement la raison qui la pousse pourtant à prendre le chemin de la chapelle, la curiosité ou peut-être le fait qu’elle soit indéniablement attirer par lui comme un aimant, même si il la fait souffrir, une fois de plus. Une fois de trop. Elle avait peut-être besoin de le revoir, et d’entendre sa voix, de savoir que malgré tout, tout allait bien pour lui. Et qu’il ne risquait pas de retourner dans son pays. Elle avait plus ou moins coupé les ponts avec lui, et les quelques fois où elle l’a aperçu, ce n’était qu’évasif, d’une banalité sans nom sans vouloir rentrer dans les détails de sa nouvelle vie. Et pourtant, elle avait encore tant de questions sans réponses. Vivait-elle sous le même toit que l’Italien ? Se voyaient-ils tous les jours ? Est-ce qu’ils s’amusaient aussi à jouer jusqu’au bout le jeu devant les gens ? Tant de questions que la Shephard n’était pas certaine de vouloir connaître. Ca la briserait un peu plus sans doute, mais elle refusait de s’enfermer dans un silence devant lui, de le laisser gagner sur ce terrain. C’était lui le fautif, pas elle. Il n’avait pas pris la décision qu’elle aurait voulue, et lui en voulait. Elle n’assistait même pas à la parade, elle se doute pourtant que Birdie, ou Primrose ne sont pas bien loin, mais elle avait décliné l’invitation pour s’y rendre quelques heures plus tard, à l’annonce de ce SMS sans savoir ce qu’elle attendait de cette entrevue. Et si elle avait longtemps hésité à s’y rendre c’est parce qu’elle sait que quand Nino veut se rattraper, il sait la toucher, d’une façon comme d’une autre. Même si elle ne le montre pas forcément tout de suite, ça gamberge bien trop dans sa tête et elle ne peut nier que sa présence réconfortante lui manque. Elle chasse de son esprit toute ses tentatives d’apaisement pour revenir dans le vif du sujet, plus encore quand elle aperçoit la fameuse chapelle devant elle. Elle toussote légèrement pour afficher sa présence dans le dos du jeune homme, « Nino… » Qu’elle prononce pourtant à voix basse, ne sachant pas très bien pourquoi elle se retrouve devant lui, alors que son cœur s’emballe. Elle n’en a pourtant pas oublié le passé et les semaines qui ont précédés. Elle reste à distance de lui, sans trop s’en approcher, « elle n’est pas avec toi ? » Petite provocation avant qu’un soupire sorte de ses lèvres, ça le mettait dans le bain au moins. Et surtout elle voulait lui laisser entrevoir que ce n’était pas parce qu’elle se retrouvait devant lui, qu’il est déjà tout excusé ! Loin de là même…

Il attendait en regardant défiler devant lui des couples qui avaient l’air heureux – bien que complétement éméchés pour la plus part – mais heureux quand même. Ceux qui étaient venu ici ne prenaient pas les mariages au serieux, mais c’était sans doute une façons de se prouver leur amour, ou de faire une déclaration à quelqu’un, ou alors peut être de faire une vraie demande en mariage. Toutes les raisons pouvaient être bonnes pour venir à la chapelle de l’Amour. Celle de Nino, c’était de tenter de reconquérir Adèle car le temps passait et elle lui manquait et surtout, il craignait le pire : qu’elle l’oublie totalement. Il ne savait jamais comment s’y prendre, l’italien. Il n’était pas un bon séducteur, il n’était pas un bon petit ami : la preuve, il avait fait n’importe quoi avec ce mariage, prêt à tout pour rester en Australie. Il en avait sacrifié sa relation, celle qui le maintenait à peu prêt à l’équilibre, celle qui le laissant dans le droit chemin, sans son pilier, il pouvait dévier à tout moment.
« Nino… » sa voix percute sa poitrine et la fait vibrer, l’italien sent son cœur être secoué dans sa cage thoracique et souffle avant de se retourner vers Adèle. La voir le réconforte et en même temps, lui fait perdre tous ses moyens. Il devient rouge, il a chaud et transpire soudainement. Elle est venue finalement, alors qu’il avait pensé que c’était la dernière chance et qu’elle ne prendrait pas la peine de le rejoindre. Elle n’avait pas répondu à son message, ou du moins, il n’y avait pas prêté attention, pour lui, c’était peine perdue. Mais il avait tenté et finalement, il n’avait pas fait ça pour rien.
« elle n’est pas avec toi ? » il soupire. « J’vois pas pourquoi elle serait là. » pas besoin de préciser de qui elle parle. Il comprend pas bien pourquoi Katherine est sur le tapis, pourquoi elle parle tout de suite d’elle. Vraiment, l’italien est à côté de la plaque, il pense encore qu’Adèle pourrait passer au dessus de tout ça. « J’suis content de te voir. » qu’il lâche, ne voulant pas parler davantage de Katherine, ce n’était pas le sujet, même si, qu’il le veuille ou non, il devrait quand même rendre des comptes. « Comment tu vas ? » elle a l’air en forme, même si elle semble être agacée, même si elle a deux révolvers dans le regard qui sont prêts à tirer à tout moment. « T’es en forme… » bon, c’est tout, t’as rien d’autres à dire l’italien ? Silence, visiblement, non…

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Adèle faisait tout pour l’oublier, elle essayait de mettre du sien pour rencontrer de nouveaux hommes, mais personne ne l’égalait, et lorsqu’elle se retrouva face à lui, elle se retrouve un peu comme la première fois. Adèle croit à l’amour, elle croit au coup de foudre et ça y ressemble fortement avec l’Italien. Bien qu’elle a couché avec son meilleur ami pour tenter d’oublier le Marchetti, panser ses blessures, bien qu’il lui arrive à présent de boire davantage qu’avant, il reste toujours présent dans son cœur. Il est toujours présent dans sa vie, qu’elle le veuille ou non, que sa fierté l’empêche de l’avouer ou non. Mais il est un homme intouchable, marié, désormais. Et elle n’a plus la force de se battre, désormais qu’il appartient à une autre. Et même si il a toujours essayé de la rassurer elle devine que quelque chose le lie à la Beauregard, il ne lui aurait rien demander si c’était pas le cas. Il n’aurait pas franchie le pas sinon, elle avait voulu croire jusqu’au bout qu’il y aurait un retournement de situation. Comme dans les films, qu’à la dernière seconde il crie un non et qu’il court jusqu’à elle, pour lui prouver son amour. Mais ses choses-là n’arrivent que dans les films, faut croire… Le prétexte de Lucia est un faux prétexte pour elle. Adèle n’arrive pas à digérer l’info, ce mariage. Elle n’arrive pas à tourner la page simplement. Et ce n’est pas faute de pas essayer. « J’vois pas pourquoi elle serait là. » Elle s’arrête à bonne distance de lui, le regardant un bref instant, le redécouvrant. Pour la première fois depuis ce mariage, ils arrivaient vraiment à se parler, même si elle ne pouvait guère s’empêcher de le piquer, à chaque fois. C’est encore trop frais, et Adèle est un peu rancunière quand on la blesse, Nino Marchetti n’est pas épargné. « Parce qu’elle est ta femme ? » Par exemple, et c’est du moins suffisant à ses yeux. Et c’est suffisant pour Adèle. Mais il a ce regard fuyant, et elle n’insiste pas. De toute évidence, elle n’attend désormais plus rien de lui, ou du moins veut le croire. Elle veut croire qu’elle ne ressent plus rien pour lui, qu’il ne lui procure aucun bien, mais la réalité est ailleurs, et Adèle ne l’admets pas. « J’suis content de te voir. » Elle aimerait en dire autant, elle ne sait même pas pourquoi elle est venue, qu’il se fasse pas de fausse espoir, elle est encore très loin de lui pardonner. « Comment tu vas ? » Elle apprécie les efforts de l’Italien, il a beaucoup changé depuis qu’elle le connaît, il y a plus d’un an, les choses ne se seraient pas passé ainsi, elle le sait. Il grandit et elle ne doute pas que Lucia y est pour quelque chose. « Comme tu peux le voir, je vais bien… » Elle ne l’épargne pas quand elle pose son regard sur lui, quand elle s’affranchit même d’un sourire léger. Elle rend bien le change parce qu’il lui manque quand même, un peu, suffisamment pour qu’elle pense à lui tous les jours mais que son cœur se resserre quand elle songe à ce qu’il est aujourd’hui. Et puis elle se plonge corps et âme dans son boulot, elle est convoitée par le concurrent direct de son patron, et ne doute pas une seul instant que le rejoindre n’est qu’une question de temps… « T’es en forme… » Il n’est pas venu là pour ça, si ? « Pourquoi tu m’as fait venir là ? » Elle s’ose, avançant d’un pas vers lui, « comment ça se passe ? » Le mariage, la cohabitation avec Katherine. Elle demande sans savoir pourquoi, mais elle a besoin de savoir qu’il va bien, qu’il ne sera pas renvoyé en Italie, elle s’inquiète pour lui, même si ils ne sont plus ensembles, pour Adèle du moins. Elle ne sait même pas si Nino l’a bien compris, et ça lui ferait mal d’en parler. Elle évite un peu son regard, finalement la question était bien plus simple dans sa tête que dîtes à voix haute.

Adèle est froide et garde ses distances, comme si pour elle, tout était fini depuis un moment. L’italien vivait dans une autre dimension, il ne comprenait rien à ce qui lui arrivait et ne voulait pas le comprendre. Il faisait comme si tout était au mieux dans le meilleur des mondes, comme si ça allait passer facilement auprès d’Adèle, comme si cette idée de chapelle allait tout arranger. Naïf, sans doute, son but était de pouvoir la retrouver. « Parce qu’elle est ta femme ? » il roule encore des yeux, il pourrait taper du pied, comme un enfant capricieux qui ne comprenait pas les réactions légitimes de ses parents. Pourquoi fait-elle semblant de ne pas comprendre aussi pourquoi il en était arrivé là ? Pourquoi ne le croyait-elle pas lorsqu’il lui disait que ce n’était que purement administratif ? Pourquoi s’obstinait-elle a croire qu’il y avait de l’amour entre lui et elle, et qu’il l’avait prise pour une idiote depuis tout ce temps. La maitresse qu’elle disait. A quoi bon répondre encore à ça ?
Il aimerait la prendre dans ses bras, la tenir contre lui et lui dire que tout finirait par s’arranger, mais il reste à distance, n’osant pas l’approcher, comme si l’attitude de la jeune femme suffisait à l’en dissuader. Elle avait installé un mur infranchissable entre eux. Le mur était entouré de mine et si l’italien osait s’approcher, il allait sans doute le regretter. Elle repoussait, froidement, toutes ses tentatives d’approche. « Comme tu peux le voir, je vais bien… » sans doute un peu trop bien ? Comme si la vie sans l’italien lui faisait du bien ? Après tout, il l’avait prévenu, qu’il n’était pas fait pour elle, qu’il n’était pas celui qu’elle croyait, elle avait décidée de rester, d’aller jusqu’au bout et lorsqu’elle a vu une facette de son visage, elle avait fui. Elle l’avait abandonné. « Pourquoi tu m’as fait venir là ? » elle s’approche, baissant les armes ? Enfin ? Un signe qu’il pouvait se détendre lui aussi ? Aller souffle Marchetti. Au pire, tu te prends encore un gros vent, une belle humiliation et après ça, tu lâcheras l’affaire une bonne fois pour toute. « comment ça se passe ? » il beugue, le système ne répond plus, il se sent si bête d’être ici, d’avoir pensé à ce scénario alors qu’ils sont entourés de personnes complètement ivres qui ne prennent pas au sérieux cette histoire de mariage devant Elvis, qui pourrait le prendre au sérieux ? Lui pour qui le mariage est sacré, il avait envoyé baladé absolument tous ses principes depuis cette demande à Katherine et encore plus à présent, ici même. Il sait pas quoi répondre à sa dernière question. Comment ça se passe, de quoi parlait-elle exactement ? Sa vie maritale ? Le néant, puisque c’était du vent. « Est-ce que tu veux m’épouser ? » qu’il lâche, comme ça, sans préavis, il se met même à genoux, il dégaine même une bague sortie de nulle part – de sa poche – même pas une belle boite qu’il a ouvert pour montrer la surprise, juste une bague, un anneau sans diamant, rien qui brille, on pourrait presque penser à un anneau de porte clé, mais quand même, ca reste une bague. Il s’attend à se prendre une giffle, il aura tout tenté.

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Nino ne semble pas comprendre, pour lui tout ça n’est qu’un jeu, une futilité sans doute. Elle devine ce qu’il pense : qu’elle se prend la tête pour rien, qu’il n’y a pas lieu d’être. Et pourtant, elle est là leur différence, cet énorme fossé entre eux : ils sont l’opposé même de leur sentiment. Il l’avait prévenu pourtant. Qu’il n’était pas fait pour ça, qu’il n’était pas un homme pour lequel, elle pouvait se battre, mais Adèle n’a jamais écouté, elle a foncé et le mur lui est douloureux aujourd’hui. Elle ne sait pas ce qu’elle fait là, et ça se voit, elle se tortille dans tous les sens, joue avec ses doigts, son regard se tourne sur l’Italien, la seconde d’après n’importe où tant qu’il n’est pas dans ses parages : elle ne l’a pas oublié. Elle a pourtant essayé, et elle essayera encore. Encore et encore, jusqu’à y parvenir, elle est tenace la petite – et Nino en est l’exemple quand elle a tout fait pour rentrer dans sa vie, pour décrocher ne serait-ce autre chose qu’un soupire de sa part. Mais la vérité est là, glaçante. Parce qu’elle ne peut pas accepter Adèle, qu’il soit marié avec une autre, quand elle n’attendait que ça. Quand elle, lui en parlait au détour de conversation banale, et que Nino a toujours dit que le mariage ce n’était pas pour lui. Il lui avait même évoqué brièvement sa rencontre avec celle qui l’a aimé autrefois avant qu’elle ne parte avec un autre. Elle ne sait pas vraiment pourquoi, ni les détails, c’est pas le genre du Marchetti de se confier. Encore moins sur son passé douloureux, parce que si il y a quelque chose qu’elle a compris : c’est sa douleur à cause de cette histoire. Elle a tenté le tout pour le tout, se rapprochant de lui, restant à Beauregard uniquement pour le voir, pour lui parler, devant les soupires de la secrétaire à l’accueil qui n’a pas lésiné sur ses roulements de yeux à chaque intervention de la Shephard pour pouvoir dompter l’Italien. Ce genre de chose qui voulait dire ‘fuie ma fille’ comme si ça suffirait. Noa aussi s’y est mis. La sorcière comme aime l’appeler Nino. Une sorcière pas si désagréable, loin de Cruella. Personne à part Nino ne pouvait la faire changer d’avis sur son compte et il y est arrivé avec brio. Elle pourrait le lui évoquer, elle pourrait le féliciter, mais elle en avait marre de ce jeu, d’avoir mal. A sens unique, quand elle ignore, lui ce qu’il ressent, ce qu’il pense. Pas un instant, il s’est excusé, pas un instant, il a tenté de s’approcher trop près d’elle. Il doit voir que c’est peine perdue, qu’elle a refermé les portes à la seconde même où il a pu prononcer ce oui, qui mettrait un terme à leur idylle. Elle avait tant espérer que jusqu’au bout, il n’aille pas au terme de ce mariage. Qu’il réalise les dégâts et elle est le dommage collatéral. Il semble un peu se préoccuper d’elle au vu des quelques sms qu’il lui a fait parvenir, lui qui déteste tout ce qui est téléphone portable, technologie. Lui qui est resté dans un univers parallèle, quand les progrès avancent. Ca l’a toujours fait rire, et elle s’est toujours un peu moquée de l’Italien sur ce fait. Parce qu’Adèle vit avec son temps, elle est jeune, elle aime la nouvelle technologie, son ordinateur portable, son téléphone, sa page facebook qu’elle alimente aussi fréquemment que possible, son compte instagram aussi, des délicieux plats d’Elia ou des desserts de Primrose. Le temps est long, les secondes passent, le silence persiste et ça devient lourd pour elle. Mais Nino ne connaît pas la demi-mesure, et elle le réalise quand sa bouche reste légèrement entre ouverte, face à une demande étonnante de sa part, « est-ce que tu veux m’épouser ? » Elle ne peut nier que son cœur s’emballe à tout rompre, que ses mains cherchent son bras pour le relever quand il décide même de mettre un genou à terre. Elle voit tous les regards posés sur eux. Ils attendant sans aucun doute son oui, eux aussi. Elle fronce les sourcils en le relevant alors qu’il lui présente un anneau, les efforts sont là et elle ne peut pas dire le contraire. Les efforts arrivent un peu tard, et il ne pourra pas le nier, à son tour. « C’était pas comme ça… » C’était pas comme ça que ça devait se passer, c’était pas comme qu’il devait faire sa demande. Et en d’autres circonstances, elle aurait dit oui, en d’autres circonstances elle lui aurait sauté dans les bras, elle aurait volé tel un oiseau qui apprend à vivre, à rire. Elle l’aurait embrassé sans même se soucier des gens autour. Mais la réalité la rattrape quand son visage se baisse sur cet anneau et que son cœur se resserre. Elle aurait pu dire oui pour le fun, si il n’y avait pas eu Katherine. Si il n’y avait pas eu ce choix qu’il a pris, il y a quelques semaines. « Non, Nino ! » Et c’était ce que tu aurais dû dire face à la Beauregard ! « C’est trop tard, maintenant, » elle arrache l’anneau de ses doigts avant de la jeter sur le sol, le regard déjà humide quand lui, déconne avec le mariage et l’amour, quand c’est pour elle, la chose essentielle à sa vie. Adèle fait demi-tour pour s’enfuir, sans même le gifler, peu importe tant qu’elle s’éloigne de lui, et le plus rapidement possible, les mains qui tremblent.

Voilà l’italien qui passe les secondes les plus longues de sa vie. Les secondes interminables sous le regard de la brune. Adèle est devenu seule maitresse du temps, du moment présent et de l’avenir. Elle avait entre ses lèvres le choix d’un avenir qui leur était commun ou de leurs chemins qui allaient se séparer. Nino misait gros sur cette demande, il s’était lancé avec le cœur, certain que c’était la bonne chose, la seule chose à faire pour tout rattrapé, puisque ce qu’elle lui demandait n’était pas possible dans l’immédiat. Non, il ne pouvait pas annuler ce mariage maintenant, il ne pouvait pas faire cette marche en arrière, si non, ce serait un retour direct en Italie pour lui. Il ne comprenait pas qu’Adèle ne puisse toujours pas l’entendre et il espérait lui faire retrouver la raison, comme si c’était elle qui l’avait perdu la première. Comme si lui avait toute sa tête et que ses décisions étaient les meilleurs. Il ne pensait jamais au mal qu’il pouvait faire, il pensait souvent à lui en premier, opportuniste et égoïste, pourtant, sa dernière intention était de faire du mal aux personnes qu’il appréciait, ceux qu’il affectionnait particulièrement. Sa mère en premier lieux, pour qui il aurait tout donner et pourtant, il lui en avait causé des soucis, il lui en avait fait voir de toutes les couleurs, il était celui qui lui avait causé sans doute tous ses cheveux blancs, celui qui, comme l’avait fait remarquer Vitto à son arrivée à Brisbane, celui qui l’avait sans doute mené tout droit vers la mort. Les soucis et le poids des remords que Nino avait fait porté à sa mère avaient surement joué sur ses nerfs, sur sa tension, sur son cœurs et son corps et tout avait fini par lâché. Son frère, qu’il voyait comme un modèle à suivre depuis toujours, celui dont il ne lâchait jamais les baskets, celui qu’il voyait comme le fils parfait, celui qu’il jalousait aussi, celui qu’il a longtemps défié, se sentant bien inférieur, incapable de lui arriver à la cheville, il avait alors choisi de faire tout son inverse, de lui montrer que non, il ne serait jamais comme lui et à quoi bon tenter quoi que ce soit ? Il y était incapable. Et Adèle, celle a qui il avait pourtant ouvert son cœur, il avait aussi prévenu, qu’il ne serait pas celui qu’il lui fallait, celui dont elle pourrait avoir un vrai soutien, parce qu’il le sait qu’à un moment donné il fini par déraper, qu’il ne répond pas à ce qu’on attend de lui, il le sait qu’il déconne, toujours. Et il se conforte dans cette position, comme ça il a l’excuse de dire : je vous avais prévenu, il a l’excuse de ne plus se sentir coupable, parce qu’il se défini ainsi, comme si rien n’était jamais sa faute et que c’était simplement une décision divine de tout faire basculer.
Et elle lâche, elle répond. « Non, Nino ! » trop tard. Et le pire, c’est son geste. L’anneau qu’il avait exposé entre ses mains, vers la brune, l’anneau qui était le symbole de leur lien, elle le prit et le jeta plus loin à terre avant de faire demi-tour et s’en aller, laissant l’italien au beau milieu de cette foule, humilié et le cœur arraché. Il resta genou à terre, sidéré par ce qu’il venait de vivre, sous le choc sans doute de ce rejet aussi violent que lorsque Vitto l’avait laissé dans cette cellule, refermant la porte derrière lui, disant à son frère qu’il lui serait plus jamais d’aucune aide. Combien de temps avant qu’Adèle ne change d’avis ? Combien de temps avant que Nino ne digère tout ça ? Il se releva, ramassa la bague et la balança à son tour par terre, le choc sépara l’anneau de son faux diamant. Qu’elle aille au diable.