Y’a voler en classe économique avec les paysans et y’a prendre un fucking jet privé pour aller essayer des robes à Melbourne, directement chez les Vera Wang de ce monde. Quand Saül m’a jeté entre les pattes la mission de trouver une robe déCENtE pour Megara la succube, c’était absolument prévu dès la première seconde que je ferais pas les choses à moitié. Le fait d’avoir été virée de la grande majorité des boutiques de designers de Brisbane après avoir choisi ma propre robe à moi n’aidant pas, j’avoue avoir dû gratter un peu la banque de contacts et de ressources aux alentours pour rendre le tout viable et possible. C’est là qu’Elise entre en jeu avec son fric, son avion de luxe, son champagne de reine, ses jugements de bourgeoise et sa carte bleue qui me fait déjà de l’œil. Mon fric aussi sera mis à profit, j’ai déjà toute une commande prête chez Agent Provocateur dont on parlera plus tard. On a d’autres priorités, là.

Après qu’on nous ait servi du homard et du caviar alors qu’on survolait la côte. Après que le co-pilote ait clairement fait du rentre-dedans à l’ancienne Williams qui est bien trop occupée à scruter la nouvelle et la future pour capter quoi que ce soit. Y’a fallu que je prêche pour elle au pauvre gars une fois qu’on débarquait, nouveau dans les parages, l’œil brillant et la bouche en cœur prêt à faire gaffe et à éviter toutes les blagues de merde de s’envoyer en l’air si ça lui permet d’avoir un ticket avec celle qui devient lentement mais sûrement autre chose que son ex-femme. Du progrès, j’ai dit.

Magalie se tolère. Elle est pas chiante, elle profite des bonnes choses mais elle jure pas trop avec le décor. Compte tenu de la situation merdique dans laquelle elle s’est elle-même foutue, c’est un art d’avoir l’air de flotter dans son bordel avec l’aisance dont elle fait preuve. Du coup on se tolère toutes. Je pense qu’Elise est bourrée. Je suis beaucoup trop heureuse pour que l’alcool ait pas fait son doux chemin jusqu’à mes neurones. Et dès lors qu'on arrive dans l’une des boutiques de la longue liste que le portefeuille de nous trois a composée, c’est un sourire de plus que je lance aux vendeuses encore hésitante à savoir si je les veux toute mortes d’ici quinze minutes, ou si j’ajoute ces quinze minutes-là à leur sursit. On verra bien si le progrès s’applique à la race humaine ou pas du tout. Calée dans l’un des canapés qui sont installés à même la salle des essayages, la flûte d’Elise n’est jamais vide, la mienne on plus. Celle de Margaret l'a suivie derrière les rideaux où elle doit enfiler la première ronde d'une sélection faite pour elle. De notre côté de la pièce, on s'impatienterait presque. « Si tu sors de là avec une horreur sur le dos je fais une crise. » essaie encore Ariane, essaie plus fort. Mes rires qui volent la chute de la phrase avant même que la menace soit lancée. Cheers à toutes les fiancées.



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Megan Monroe & @Ariane Parker-Williams & @Elise Rinehart  

Le problème, ce n’est pas tant le fait de ne pas pouvoir profiter d’une journée d’essayage avec mes proches. Je suis persuadée qu’une part de Shiloh pense encore que tout ça n’est qu’une vaste plaisanterie tant ça me ressemble peu, et il n’y a personne d’autre qu’elle avec qui j’aurais vraiment envie de partager ça, si c’était pour de vrai. Contrairement à ce que j’ai pu craindre, l’épouse de Saül est loin de lui ressembler - c’est à se demander ce qu’elle trouve à mon futur beau père - et à l’occasion de nos échanges qui jusqu’ici ont été plutôt brefs, elle m’a semblée sympathique. Jusqu’ici, c’est bien la seule de cette famille qui ne m’a pas accueillie comme si j’étais une intruse, la seule avec laquelle je n’ai pas l’impression de devoir constamment marcher sur des œufs.

Le problème n’est donc pas Ariane non plus. Ce n’est même pas non plus l’idée d’aller essayer des robes à l’autre bout du pays, comme si c’était quelque chose de normal, comme si tout le monde faisait ça. Je commence à comprendre que chez les Williams, extravagances et apparences sont les maîtres mots. A partir de là, je n’ai été qu’à moitié surprise de découvrir en arrivant directement sur le tarmac qu’il était prévu d’emprunter un jet privé. Je ne me sens pas à l’aise, pas à ma place dans cet univers mais s’il n’avait été question que de ça, j’aurais réussi à prétendre que tout était normal.

Non, le problème, c’est l’invité surprise. Ariane s’était bien gardée de me préciser que nous ne serions pas que toutes les deux et que, assise sur le siège en face de moi dans l’avion, la mère de Damon me fixerait comme si j’étais un animal exotique derrière une vitre de zoo. Je n’ose même pas sortir mon téléphone pour envoyer un message au jeune homme pour le prévenir et lui demander conseil. Je n’ose qu’à peine toucher à la flutte de champagne posée devant moi au risque qu’elle me saute à la gorge. Je fais bonne figure, je ris aux blagues piquantes de la rousse, je me tiens du mieux que je peux sur mon siège et je garde un radieu sourire accroché à mon visage, mais je préfèrerais être à des kilomètres de là. J’ai toujours eu le chic pour plonger la tête la première dans des situations inextricables mais je suis forcée d’avouer que, cette fois, j’ai fait fort. Cette fois, je suis dépassée par la tournure que prennent les événements. Dans la voiture qui nous récupère à l’aéroport de Melbourne, je me glisse à côté d’Ariane, le plus loin possible d’Elise et j’attrape mon téléphone pour taper rapidement un message à destination de son fils, mon futur époux. ”Surprise, ta mère est de la partie. Sur une échelle de 1 à 10, elle me déteste à quel point ?” Je range rapidement l’appareil dans mon sac à main, avant de laisser mon regard se perdre sur la façade des immeubles de cette ville où je n’avais jusqu’ici jamais mis les pieds.

Les magasins ont été sélectionnés par Elise. Les robes aussi semblent l’avoir été et, enfermée dans une vaste cabine d’essayage j’observe la première tenue que je suis supposée passer en grimaçant. La robe me semble trop vieillotte, trop longue, pas assez décolletée et surtout, elle ne me ressemble pas. « Si tu sors de là avec une horreur sur le dos je fais une crise. » - « Prépare un valium dans ce cas. » Parce que la robe que je me résous finalement à passer à tout pour coller à la définition d’une horreur à mes yeux. Je me sens étouffée, dissimulée sous bien trop d’épaisseur de tissu et tout sauf mise en valeur. « Je crois que je vais passer la suivante... » Je n’ai pas le temps de l’envisager réellement que la vendeuse tire le rideau de la cabine pour m’en sortir et m'entraîner au centre de la boutique pour nous observer sous toutes nos coutures, la robe et moi. « Hum. Je n’avais pas prévu qu’elle ait autant de poitrine. » sont ses seuls mots avant qu’elle ne disparaisse à l’arrière de la boutique, certainement pour rectifier ses plans et préparer d’autres robes. Moi, je me tourne vers Ariane et Elise, une grimage sur les lèvres. « Peut-être que je pourrais choisir moi-même les prochains modèles ? Je sais généralement assez bien ce qui me va. » Et les encolures bateau ne font certainement pas partie du lot.

Elle a dû se sentir fixée jolie Megan pendant tout le vol entre Brisbane et Melbourne. Un vol qui n'a pas été si long, mais qui a paru une éternité - elle doit sûrement se dire la même chose. Qu'elle se considère encore chanceuse que vous n'ayez pas changé de continent. Tu oserais presque dire que c'est une chance que Ariane soit là. Il n'y a qu'elle qui détend l'atmosphère - ou qui tente de. Tu dois tout de même avouer qu'elle tient bien son rôle. Saül doit l'avoir très bien menacé - quel homme charmant. Elle pourrait sûrement duper n'importe qui qui ne lui porterait pas l'attention que toi tu lui portes. Elle n'est pas bien Megan. Ça transparaît dans chaque pore de sa peau.

« Si tu sors de là avec une horreur sur le dos je fais une crise. » - « Prépare un valium dans ce cas. » Tu lèves déjà les yeux au ciel. Elle est sûrement très bien cette robe. De toute façon, même avec un drap en guise de robe elle serait encore jolie - c'est horrible de l'admettre. Qu'elle arrête de se plaindre pour un rien. « Je crois que je vais passer la suivante... » Fais ce que tu veux, qu'est-ce que j'en ai à faire. Mais la vendeuse n'est absolument pas du même avis, elle l'a tire de sa cabine pour l'exhiber devant tout le monde. Okay. Ariane peut faire une crise. Elle ne lui va pas du tout. On dirait que… « Hum. Je n’avais pas prévu qu’elle ait autant de poitrine. » Voilà. Même cette robe de coincé à l'air vulgaire sur elle. La vendeuse repart à la recherche d'une robe pour autant de poitrine parce qu'elle est incompétente et incapable de voir les formes de sa cliente apparemment. Tu jettes un rapide coup d'œil sur ta montre, comme si tu avais d'autre chose à faire. « Peut-être que je pourrais choisir moi-même les prochains modèles ? Je sais généralement assez bien ce qui me va. » Ton regard vient soudainement se fixer sur elle - pour faire changement. Ah tiens. Elle parle et elle a le culot d'avoir des opinions celle-là. « Bien sûr. Tu prends ce que tu veux. » Le sourire qui orne tes lèvres n'a absolument rien de sincère. Il est hypocrite à souhait et tu ne t'en caches même pas. Le choix est mitigé entre choisir que ton fils n'épouse pas une pute ou faire rager Saül qui n'approuvera jamais la robe qu'elle choisira. Ouais tu l'as vu son Instagram et ses photos de traînée. Franchement, Saül aurait pu faire un peu d'effort pour lui trouver une meilleure épouse à votre fils.

La vendeuse finit par refaire son apparition avec une nouvelle robe en main. « Elle vous trouve incompétente. On se passera de vos services. » Et elle se passera de la commission qui venait avec le service vu que Megan se croit meilleure qu'une fille qui conseille les autres pour leurs robes de mariées depuis des années, alors qu'elle, la gamine, elle doit vraiment s'y connaître en robe de mariée. La vendeuse reste un peu sous le choc - elle aurait sûrement dû bien lire le nom de la réservation avant de jouer la surprise. Elle comprend maintenant pourquoi personne d'autre ne voulait la prendre. Elle bredouille ce qui ressemble à des excuses, peu importe, mais elle repart avec sa robe. « Qu'est-ce que tu fais dans la vie, Megan ? » Mise à part montrer ton cul sur Instagram j'veux dire. Son prénom sonne presque comme une insulte quand il sort de ta bouche. Tant qu'à toutes se faire chier ici (ah non, Ariane s'éclate) aussi bien en apprendre un peu plus sur elle. Faut bien mettre en place les mensonges et les fausses louanges à son égard.

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Je dois être la seule future mariée au monde à choisir sa future robe sous l’oeil attentif de non pas une, mais de deux belles mères. Si c’est Ariane que Damon qualifie de sorcière, c’est plutôt la brune à laquelle j’aurais volontiers attribué ce sobriquet. C’est la première fois que j’ai affaire à elle et je ne peux même pas dire que j’aurais préféré que les circonstances soient différentes : je vis dans le déni et j’aurais préféré ne jamais avoir à la rencontrer, comme si c’était une solution parfaitement satisfaisante. Après tout, elle sait que ce mariage n’est qu’une mascarade. Elle sait que je n’ai rencontré son fils qu’une fois les fiançailles actées et elle a certainement toutes les raisons du monde de me détester.

Damon peut dire ce qu’il veut et m’accuser de tous les torts mais moi au moins, je ne lui impose pas une belle mère envahissante, froide et visiblement autant hypocrite que désagréable. Ils sont faux, les sourires qu’elle m’adresse. Je n’ai pas besoin d’une licence en psychologie pour m’en rendre compte et je la soupçonne de ne pas faire le moindre effort pour qu’ils semblent plus chaleureux. Oh non, Elise Williams veut que je sache ce qu’elle pense de moi même si son éducation l’empêche de le dire à haute voix. Foutue coincée. Foutue famille de culs serrés.

Lorsque la vendeuse me tire hors de ma cabine, j’ai définitivement l’impression d’être un animal au zoo que l’on observe derrière une vitre. La robe me va mal, je le sais pertinemment et je me sens étriquée à l’intérieur et, si j’en doutais, le regard de la jeune femme me l’aurais confirmé. Excusez-moi de ne pas être une planche à pain comme toutes les autres représentantes de la gente féminine réunies dans cette pièce. Mon esprit de provocation me pousse à brûler d'ajouter que son fils ne se plaint pourtant pas de mes formes mais ma raison me retient, elle qui n'obtient pourtant que rarement gain de cause. Inutile de jeter de l’huile sur le feu. « Bien sûr. Tu prends ce que tu veux. » Elle aurait pu m’insulter en dix huit langues différentes que l’effet aurait été le même. Si je peux en effet prendre ce que je veux, je suppose que c’est parce qu’il n’y a rien que je puisse faire pour changer son opinion à mon sujet et, au fond, je crois que je m’en fous. « Elle vous trouve incompétente. On se passera de vos services. » La pauvre femme rougit et je ne quitte pas ma future belle mère des yeux. Que tente-t-elle de faire ? M'impressionner ? Je ne suis pas facilement impressionnable et j’ai connu des gens bien plus durs à cuire qu’elle. Faire en sorte que je me sente coupable pour la pauvre vendeuse qui n’a rien demandé ? Il va falloir qu’elle fouille longtemps si elle veut trouver la moindre marque d’empathie à son égard sur mon minois. Non, je me contente de la fixer le menton bien haut et sans baisser les yeux d’un iota. Je suis sûre que ça l’emmerde, et moi je jubile.

J’ai l’autorisation de prendre ce que je veux alors je n’ai pas l’intention de m’en priver. En laissant mes doigts courir sur le tissu soyeux des robes accrochées sur les portants, j’en sélectionne quelques-unes que la vendeuse dépose dans la cabine. « Qu'est-ce que tu fais dans la vie, Megan ? » La question me parvient alors que, occupée à observer la longueur d’une robe, je tourne le dos à Elise. Je me retourne sans me presser avant de répondre d'une voix assurée. « Je suis photographe de presse. » Certainement pas le boulot auquel elle aspirait pour sa belle-fille, mais c’est toujours mieux que l’entière vérité. « Je travaille principalement sur les shootings de magazines de mode. » Ça, c’est complètement faux et Ariane le sait, mais quelque chose me dit qu’elle ne trahira pas mon vilain secret. « C’est pas le boulot du siècle mais au moins je gagne ma vie en faisant ce que j’aime. Je suis passionnée de photo depuis toute petite. » Cette fois-ci il n’y a pas l’ombre d’un mensonge : au-delà d’être mon gagne-pain, la photographie reste avant tout une passion. « Et vous Elise ? Damon m'a parlé du boulot de son père, mais pas du votre. » J’affiche un sourire ravissant, qui s’agrandit un peu plus suite à cette question. Comme la bonne maîtresse de maison et parfaite épouse qu’elle est, je mettrais ma main à couper qu’elle n’a certainement jamais travaillé de sa vie.

Dans l’avion c’était sympa parce qu’à chaque fois où Elise fixait un peu trop Marguerite, je pouvais la déconcentrer direct en lui pointant le co-pilote qui bavait juste qu’elle existe. Ici, c’est un peu moins facile de contenir la guerre froide, au point où j’ai totalement abandonné la bataille en me chargeant simplement de siffler autant de champagne que possible. Melbourne sait garder ses touristes bien hydratés. « Bien sûr. Tu prends ce que tu veux. » ahahahahaha, oh Elise. Sa voix est douce comme du cristal, si elle avait pu l’insulter sur le même ton le monde entier l’aurait prise pour une femme distinguée quand même. « Elle vous trouve incompétente. On se passera de vos services. » et c’est un doublé pour l’ancienne Williams, à qui j’offre un hochement de tête d’approbation et une salve d’applaudissements silencieux. Elle est en forme aujourd’hui.

« Qu'est-ce que tu fais dans la vie, Megan ? » oh boy. « Je suis photographe de presse. » oh boyyyyy. La bouteille que je pique sans que personne ne s’y oppose, buvant à même le goulot pendant que des flèches visent l'aorte et que des dagues se logent entre leurs côtes. Avouez, vous avez presque cru que c’était pas fictif et qu’elles venaient de passer en mode hunger games hen ? Ça serait possible.  « Je travaille principalement sur les shootings de magazines de mode. » elle ment presque bien, le bébé aux cheveux de poupée. Elise va voir direct dans son jeu à la seconde où elle va daigner s’y mettre le nez. « C’est pas le boulot du siècle mais au moins je gagne ma vie en faisant ce que j’aime. Je suis passionnée de photo depuis toute petite. » surtout si Magalie met autant d’effort et de bon vouloit à justifier son mÉtiEr. Derechef, je fais pas gaffe, renverse une larme de bulles sur le sac à main de celle qui marque définitivement son territoire sur Damon aujourd’hui. Elise, j’veux dire. C’est vrai qu’elles le font pas mal toutes les deux là. « Et vous Elise ? Damon m'a parlé du boulot de son père, mais pas du votre. »

C’est un rire qui remonte et une tête qui se secoue de gauche à droite, rien que pour statuer à quel point on se fait chier quand on est sur le banc de touche. « C’est bon c’est cool, ça se voit vous vous jugez toutes les deux on peut passer à autre chose ou y’a encore du venin qui doit être déversé ? » détestez-vous une fois pour toutes, arrêtez de mettre de la dentelle, hurlez-vous dessus et crevez l’abcès. Tout ira mieux après. « Parce que le scénario de la belle-mère qui déteste la fiancée et de la nouvelle femme qui veut prendre la place de la mère dans la vie du fils c’est du réchauffé. » en attendant ? En attendant je gobe ma flûte d’un trait tout en finissant par me lever, laissant le canapé derrière et filant vers l’étalage de robes où à mon tour, je parcours les tissus du bout des doigts. « Ouh celle-là est jolie. »

« Je suis photographe de presse. » Tu lèves les yeux au ciel. Photographe de presse. Tu les détestes tous. Megan est en première ou deuxième place ? Mh, c'est un choix difficile. Peut-être qu'il y aura égalité. « Je travaille principalement sur les shootings de magazines de mode. » Tes sourcils se froncent rapidement. Elle ment. Pourquoi elle ment ? Elle est douée pour mentir. C'est pas spécialement un compliment (loin de là même) mais c'est carrément un atout quand on entre dans une telle famille. Il faut savoir bien mentir pour réussir à survivre. Elle survivra, sans l'ombre d'un doute. Malheureusement. « C’est pas le boulot du siècle mais au moins je gagne ma vie en faisant ce que j’aime. Je suis passionnée de photo depuis toute petite. » Non, effectivement, ce n'est pas le boulot du siècle. C'est un passe-temps, voilà comment on appelle ça. Par chance qu'elle aura Damon pour subvenir à ses besoins. Tu en sais quelque chose là dessus. Épouser un Williams, c'est assurer son confort monétaire. En divorcer aussi, c'est selon.

« Et vous Elise ? Damon m'a parlé du boulot de son père, mais pas du votre. » C'est le rire strident de Ariane qui prend toute la place soudainement, qui te fait presque sursauter, qui te rappelle que vous n'êtes pas que toutes les deux. Il y aura des témoins si un meurtre se produit. Quoique Ariane semble plutôt être du genre à donner des conseils sur comment se débarrasser d'un corps que de dénoncer les coupables. « C’est bon c’est cool, ça se voit vous vous jugez toutes les deux on peut passer à autre chose ou y’a encore du venin qui doit être déversé ? » Elle pense quoi ? que tu vas juste l'accueillir à bras ouvert sans poser de questions ? Non, ce n'est pas comme ça que ça marche. Tout aurait été différent si Damon l'avait choisi lui-même. Tu aurais sans doute fait preuve d'une meilleure ouverture. Là, tu cherches l'arnaque. « Quand elle arrêtera de mentir, peut-être qu'on pourra passer à autre chose. » Les mensonges, c'est pour les autres et pas pour personnes d'autres dans cette pièce. « Parce que le scénario de la belle-mère qui déteste la fiancée et de la nouvelle femme qui veut prendre la place de la mère dans la vie du fils c’est du réchauffé. » Il y a ta mâchoire qui se contracte à ses derniers mots, alors que ton regard change de cible pour passer sur Ariane. Ça fera une petite pause à Megan. « Fais attention à ce que tu dis. » que tu la mets en garde. Les choses se sont peut-être améliorées entre vous deux, mais le retour à la case départ est encore bien possible. Y'a des choses sur lesquelles c'est pas permis de rigoler, genre Cosimo. Tu sais bien ce qu'elle voulait vraiment dire, mais juste de le supposer, c'est déjà trop. De toute façon, aucun moyen qu'elle arrive à vraiment prendre ta place. Bahhh, elle l'a déjà fait une fois. Outch.

Ariane finit par se relever du canapé pour aller rejoindre Megan au travers des robes dans les allées. « Ouh celle-là est jolie. » Elles sont soudainement toutes laides si on te demande ton avis (non, on te le demande pas). Ce n'était pas la meilleure idée du siècle de venir ici. Encore moins dans une autre ville. Tu ne peux pas juste t'en aller quand tu en as plein le cul (ce qui est déjà le cas). Tu pourrais toujours t'en aller et les laisser se débrouiller toute seul, mais ça implique de devoir gérer la colère de Saül, et, ouais, bof, tu n'es pas si suicidaire. Tu les observes de loin faire une pré-sélection des robes à essayer. Plus vite elle choisi, plus vite se supplice est terminé. Toi, tu te contentes d'avaler ta flûte d'un trait.

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Le temps passe, des regards noirs sont échangés et moi je comprends surtout que j’aurais jamais le moindre allié dans cette famille de psychopathes. Ariane était l’exception, Ariane me fait pas sentir que je suis en trop à chaque fois que j’entre dans une pièce, Ariane me sape pas toute ma confiance en moi - pourtant, je n’en manque pas - mais Ariane échange avec ma future belle mère des regards de connivence qui ne trompent pas.  Elles sont pas supposées se détester ces deux-là ? La brune parce que la plus jeune lui a pris sa place, et la rousse parce que l’autre a passé toute une vie avec son nouvel amant ? Famille de fou. Les protagonistes que j’ai eu la chance de rencontrer sont tous aussi fou les uns que les autres, les autres font figure d’éternels fantômes pour l’instant. « C’est bon c’est cool, ça se voit vous vous jugez toutes les deux on peut passer à autre chose ou y’a encore du venin qui doit être déversé ? » - « Quand elle arrêtera de mentir, peut-être qu'on pourra passer à autre chose. » Je me tourne pour lever les yeux au ciel tranquillement. Quel âge a-t-elle exactement Elise pour lancer ce genre de punchline digne d’un enfant d’école primaire ? N’est-elle pas supposée être la plus mature de nous deux ? La plus tempérée ? La plus hypocrite ? « Je crois pas que ma vie vous regarde de toute façon. Ni qu’elle vous intéresse. » Je murmure dans ma barbe mais assez haut pour que ça soit intelligible par les deux autres, l’air de rien, l’air de la fille qui observe les robes comme si elle était captivée.

« Parce que le scénario de la belle-mère qui déteste la fiancée et de la nouvelle femme qui veut prendre la place de la mère dans la vie du fils c’est du réchauffé. » Le pire c’est que je la déteste pas. Je déteste personne si ce n’est le mari qu’elle ont eu en commun. Si cela ne tenait qu’à moi, je ferais simplement de mon mieux pour arriver à évoluer dans cet univers sans avoir la perpétuelle impression de boire la tasse, si cela ne tenait qu’à moi je l’enverrai chier, l’ex madame Williams. Je n’ai pas l’intention de lui prendre sa place dans la vie de son fils, j’essaye simplement de comprendre laquelle il est disposé à me donner. C’est assez compliqué comme ça. A Ariane, j’adresse de grands regards de détresse. A Elise, j’offre mon indifférence puisque je décide d’être plus intelligente que ces piques mesquines. Ça ne doit pas être facile après tout, d’être sur le déclin et de voir débarquer une jeune fille comme moi dans la famille. Ou bien c’est la ménopause qui la rend si désagréable. « Fais attention à ce que tu dis. » Tant qu’elles se prennent le bec et qu’on me laisse tranquille, ça me va. Surtout que je soupçonne la rousse d’avoir assez de répondant pour ne pas avoir besoin d’aide, d’aucune sorte. « Ouh celle-là est jolie. » Ariane s’est glissée à mon niveau et mes lèvres articulent un merci avant d’esquisser un sourire. « C’est vrai qu’elle est mignonne. Mais tu vois j’imaginais quelque chose de plus... » Je pince les lèvres, avant de baisser d’un ton. « Quelque chose qui ne me donne pas l’impression d’avoir la quarantaine. Y’a d’autres endroits sur ta liste ? » Je suis sûre que oui. Je suis certaine qu’elle a élaboré un programme qu’on ne pourra même pas terminer.

« Quand elle arrêtera de mentir, peut-être qu'on pourra passer à autre chose. »
« Je crois pas que ma vie vous regarde de toute façon. Ni qu’elle vous intéresse. »
« Un point pour elle. »

Jouer les arbitres est particulièrement chiant, je préfèrerais et de loin être celle qui se bat dans l’arène. Mais d’un côté et de l’autre de la guerre j'ai des alliées et personne avait daigné m'avertir que j'allais finir par devenir la pote de service. Alors je secoue, je pique, je fais mes devoirs, c’est-à-dire de jouer le moindrement l’ange du chaos le temps qu’elles finissent par crever l’abcès. Lâcher des accusations à tout vent est une tactique, la suivante sera de brandit la photo de Saül au sol devant leur nez et de voir comment elles peuvent s’unir dans l’adversité le temps d’avoir un ennemi en commun. « Fais attention à ce que tu dis. » sinon quoi ? Elise était diamétralement plus cool quand elle gerbait dans la benne à ordures d’une ruelle et beaucoup moins quand elle se tâte à jouer les adultes. Dans un soupir, je tente de l’acheter sans même m’en cacher. « Et un point pour toi. » voilà, tout le monde a le même score, qui se bidonne.

Mes pas dérivent vers Margaret, elle a l’air au bout de sa vie quand elle chuchote des merci. Oh honey j’ai rien fait, tombe pas dans le panneau si vite sinon tu vas finir mariée contre ton plein gré à nouveau. « C’est vrai qu’elle est mignonne. Mais tu vois j’imaginais quelque chose de plus... » ouais, bah faut faire avec que veux-tu que je te dise. « Quelque chose qui ne me donne pas l’impression d’avoir la quarantaine. Y’a d’autres endroits sur ta liste ? » « C’est elle qui paie, profite du compte. » c’est Elise qui va brandir la carte à la toute fin et ça veut dire que si Maude (ouais je commence à sécher) est le moindrement brillante, aller vers la plus grosse dépense du coin sera au moins une maigre manière de se venger. On a les munitions qu’on peut. « Y’a de bons restaurants, sur ma liste. » c’est dit pour elle, c’est dit aussi pour Elise, c’est dit surtout pour grincer n'importe quoi aux oreilles de la vendeuse qui chôme pas à ramener une nouvelle salve de robes à essayer et qui au passage remarque que la première bouteille de champagne est depuis longtemps terminée. « Avec des tas de services, je suis distinguée. » d’ici là elles auront peut-être fini de se menacer et seront prêtes pour se planter de la jolie argenterie de riche dans l’aorte. C’est joli, rêver. « Si vous vous entendez sur une robe promis je vous en laisse. » des bulles de la seconde bouteille, celles qui remplissent d’abord ma coupe, avant que mes iris dérivent vers la sélection de robes qui semblent être à première vue un peu plus du goût de Meggie.

« Je crois pas que ma vie vous regarde de toute façon. Ni qu’elle vous intéresse. »
« Un point pour elle. »
Ton regard est vissé sur Megan. Il ne dévie qu'une fraction de seconde vers Ariane suite à son commentaire qui ne sert à rien, mais retrouve rapidement sa cible initiale. Au moins, elle avoue que c'est une putain de menteuse - dit la personne la plus honnête du monde bien évidemment. Elle a raison Megan, quand elle dit que sa vie ne t'intéresse pas. Pas le moins du monde. Mais si elle te regarde ? Quand même oui. À quelques mois d'épouser ton fils, sa vie te regarde quand même un peu. Et puis, tu essaies encore de comprendre pourquoi elle et pas une autre. Rien n'est laissé au hasard avec Saül. « Je suis très intéressée à savoir ce qui fait de toi l'heureuse élue. » C'est en grattant un peu d'informations sur elle que tu vas probablement finir par le savoir. Sinon, si Cosimo sait, il te le dira. Pourquoi est-ce qu'il te mentirait, lui ?

Ariane et Megan fouillent les robes, parlent sûrement dans ton dos. Qu'elle se défoule la gamine (laquelle?), parce qu'elle en aura pour des années à ne pas t'entendre la critiquer tous ces faits et gestes. C'est donnant-donnant. « Y’a de bons restaurants, sur ma liste. » C'était mieux quand elles s'occupaient pas de toi et que tu espérais que ça se termine rapidement. C'était pas dans le plan de faire durer ce supplice aussi longtemps. Le plan, c'était de trouver une jolie robe convenable pour la future madame Williams et de rentrer à la maison. C'était qu'un petit bain de présentation sans plus. Visiblement, Ariane n'a pas tout dit. Qui ça étonne ? Ça ne doit pas ravir Megan non plus. Personne n'est content finalement. « Avec des tas de services, je suis distinguée. » C'est sarcastique ou ce ne l'est pas ? « On s'habitue vite. » Les pauvres ont assurément plus de facilité à s'accommoder de la vie des riches que l'inverse. Ça vaut pour Ariane. Ça vaut pour Megan aussi qui le découvrira bien rapidement. Ça vaut pour tous les pauvres de ce monde, sauf Jack. Il aime bien être pauvre. N'importe quoi.

« Si vous vous entendez sur une robe promis je vous en laisse. » Ta coupe est vide. La sienne est pleine et elle a le monopole de la bouteille. Cette journée va vraiment de pire en pire. Megan est exigeante (c'est quand même une belle qualité, faut lui donner ce qu'elle a). Aucune robe ne semble lui plaire. « Je connais une autre place. » que tu dis en attrapant ton portable pour fouiller dans tes contacts. Tu connais Melbourne comme le fond de ta poche, presque comme si tu y avais grandi. « C'est un styliste italien. » Évidemment qu'il est italien. Super gay en plus. Il n'y a pas plus stéréotypé que lui. Il est doué. Ça compense pour le reste. Il fait n'importe quoi avec presque rien. « Tu veux aller voir ? » que tu lui demandes en levant les yeux vers elle. Aucune insulte en plus. Tu fais un effort là, non ? Soit vous allez là-bas. Soit elle en choisit une ici.

cristal queens
Megan Monroe & @Ariane Williams & @Elise Irish

« Je suis très intéressée à savoir ce qui fait de toi l'heureuse élue. » C’était bien quand Ariane comptait les points et qu’on me sollicitait plus. C’était bien quand les tensions entre l’ancienne madame Williams et la nouvelle prenaient occupaient trop Elise pour qu’elle s’en prenne à moi. Mais elle revient à la charge et, si j’ai ce qu’il faut pour ne pas m’effondrer et lui tenir tête, sa voix m’irrite déjà les tympans. Pour peu, je serais capable d’accepter de porter la prochaine robe qu’on me présentera, quelle qu’elle soit, juste pour rentrer chez moi et profiter d’une tranquillité méritée. Mais elle aimerait trop ça, que je cède, alors ça me suffit pour garder le menton bien relevé. « Le coup de foudre, qu’est ce que vous voulez. » Damon a dit que les siens auraient le droit à la vérité, donc je me doute que sa mère a fait partie des heureux élus. De ceux qui savent que notre union est arrangée. Toutefois, mon côté provocateur reprend malheureusement une fois encore le dessus, avant que ne hausse finalement les épaules. « Je suppose que si vous voulez la vraie réponse à cette question, il faudra la poser à votre ex mari. » Puisque les détails de notre arrangement sont entre lui et moi. Je ne ne l’apprécie pas plus qu’elle, je ne le respecte pas plus qu’elle, mais c’est lui qui peut causer ma ruine s’il le souhaite : je garderai son secret s’il n’a pas souhaité partager les détails avec elle. « Je suis pas mal intentionnée et j’ai pas l’intention de faire du mal à Damon, ça devrait vous suffire non ? » Elle aurait pu hérité d’une belle fille vénale, c’est déjà ça non, de quoi se plaint-elle ?

« C’est elle qui paie, profite du compte. » Je suis retournée à l’observation des robes et, si Ariane me fait comprendre qu’elle n’est du côté de personne, elle fait tout de même office de figure rassurante dans tout ce bordel. « J’en ai pas après son argent. » Pourquoi semblent-ils tous persuadés du contraire ?

« Y’a de bons restaurants, sur ma liste. » Je fronce les sourcils, me demandant ce qu’elle tente, la rousse. Cherche-t-elle à acheter un peu de paix ? « Avec des tas de services, je suis distinguée. » - « On s'habitue vite. » Je méprise les gens comme elles : les bourgeois qui regardent le reste du monde avec un mépris évident. Elise n’a jamais manqué de rien, Elise a grandi dans un milieu privilégié et elle est bien trop pédante, se sent bien trop supérieur aux petites gens pour que je m’entende un jour avec elle. Après avoir rencontré ses deux géniteurs, je ne peux m’empêcher de me poser une question : mais de qui Damon a-t-il hérité son côté humain ? « Si vous vous entendez sur une robe promis je vous en laisse. » - « Ici, ça risque d’être compliqué. » Je ne fais pas preuve de mauvaise volonté. Je suis même prête à leur promettre que je choisirai une robe aujourd’hui pour que nous soyons toutes les trois débarrassées de cette corvée quand certaines mariées mettent des semaines à se décider, mais il y a une chose à laquelle je ne m’abaisserais pas : ressembler à une bourgeoise coincée. « Je connais une autre place. C'est un styliste italien. » Surprise qu’elle semble décidée à faire un effort, aussi insignifiant soit-il, je lève un sourcil. « Tu veux aller voir ? » Je me demande où est le piège. Cela ne peut pas être un rameau d’olivier : tout chez la brune semble indiquer que l’identité de la fiancée de son fils lui déplaît. Pourtant, je n’ai guère le choix. « Je vous suis. » J’ai hâte de sortir d’ici de toute façon. Et si je mets un point d’honneur à ne pas ouvrir ma bouche pendant le trajet en voiture jusqu’à l’autre boutique, un sourire un peu plus satisfait étire mes lèvres lorsque nous mettons les pieds à l’intérieur. Voilà qui devrait être mieux.