Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
Je crois que parfois dans la vie, tout n’est pas réfléchi, tout n’est pas dicté à l’avance par cette entité que certains aiment à appeler le destin. Je crois que parfois, l’être humain arrive à se laisser guider par son instinct le plus primitif, le plus animal. Et que dans ce cas-là, plus aucune règle ne vaut. Je m’étais comme réveillée d’un long songe et j’avais tout quitté, tout plaqué, tout abandonné, tout laissé en chantier derrière moi, à moitié commencé, jamais terminé. J’avais laissé Dean, seul, dans notre maison, avec un mariage à annuler, ma bague de fiançailles et tout un tas de coups de fils à passer. J’avais tout abandonné, futur mari, future famille, future vie bien rangée et presque parfaite. J’avais tout envoyé valdinguer par la fenêtre tout simplement parce qu’un jour, je m’étais rendue compte que j’étouffai et la seule chose que j’avais été capable de faire avait été de réagir instinctivement. Tout à coup, il y a quelque chose qui a sauté là-dedans, je ne sais pas, je pense que c’est parce qu’inconsciemment j’ai eu l’impression de perdre le contrôle sur toutes les choses dans lesquelles j’étais impliquée, sur tous les éléments de ma vie. Ça m’a plongé dans un état absolument indescriptible, c’était comme être enfermée dans une boîte sans lumière dans laquelle le temps s’arrête. Je me suis sentie comme un requin-tigre, tu sais, les requins quand ils avancent plus, ils crèvent et le requin-tigre c’est le plus agressif, quand il est immobilisé, il défonce tout ce qui passe. Et c’est ce que j’ai fait. Tu ne peux plus interagir avec le monde, tu te renfermes petit à petit, tu deviens totalement hermétique aux autres et au quotidien. J’aurai normalement dû me poser avec Dean, lui expliquer qu’il n’y était pour rien, que ce n’était pas de sa faute, que c’était juste moi qui n’arrivait plus à faire semblant, semblant d’être heureuse, d’être parfaite et de vouloir cette vie parfaite et bien rangée. Mais je n’ai pas réussi à trouver les mots, j’étais plus capable d’agir autrement que par instinct de conservation et je savais que si je restais un jour de plus, ça signerait ma fin. Alors je suis partie, sans signe avant-coureur, sans explication et je l’ai laissé, sur le perron de notre maison avec un simple « Je suis désolée ».
Et deux jours plus tard, commençait le premier jour du reste de ma vie. J’étais arrivée la veille, j’avais logé chez ma mère, dont j’avais le double des clés et qui n’était pas en ville pour la semaine puisqu’elle était partie en thérapie thermale avec quelques amies. J’avais trouvé un appartement un peu vieillot et pas très cher au #160 à Fortitude Valley et depuis le salon on pouvait apercevoir la Brisbane River. J’avais entrepris de redonner à mon logement un coup de neuf et j’avais acheté plusieurs pots de peinture pour essayer d’en faire mon appartement, quelque chose qui me correspondrait et où je me sentirais bien. J’avais passé une bonne partie de ma soirée d’hier à repeindre le salon et la cuisine. Et ce matin j’avais terminé de repeindre ma chambre et l’autre chambre qui me servirait désormais d’atelier pour mes créations. J’avais choisi des couleurs assez modernes et actuelles. J’avais commandé mes futurs meubles sur internet et ils étaient censés arriver pour le milieu de la semaine prochaine. Je m’autorisais alors une pause, assise à même le sol dans mon appartement totalement vide à l’exception de moi et de mon chien qui était allongé à mes côtés, sa tête reposant sur mon genou. « Tu vas voir, on va se plaire ici, Lago » avais-je murmuré à mon chien en lui caressant doucement la tête. Je poussais un petit soupir, laissant ma tête venir se reposer contre le mur et je fermais les yeux. Aussitôt ce fut l’image de Matteo qui m’apparut et comme à chaque fois que ça arrivait il me semblait que je n’arrivais plus à respirer, comme si mes poumons étaient tout à coup trop petits pour apporter suffisamment d’oxygène à mon corps et mon cerveau, j’avais l’impression de suffoquer et les larmes me venaient presque aux yeux. Mais depuis le temps, depuis presque deux ans, j’avais l’habitude de ressentir ça. Pendant un an et demi je m’étais enfermée dans une sorte de torpeur de laquelle personne ne pouvait me sortir, pas même Dean, qui avait pourtant essayé avec énergie. Je me levais aussitôt, j’avais besoin de changer d’air, presque littéralement d’ailleurs parce que c’était presque si là, je m’asphyxiais. Et sans avoir plus à réfléchir, je savais exactement où est-ce que je devais me rendre. « Allez, viens Lago, on va aller faire un petit tour, ça nous fera du bien, surtout à moi ». Et j’ouvrais la porte de mon appartement, mon chien sur les talons.
J’étais à présent devant la porte de cet appartement, au numéro 19 à Pine Rivers et j’hésitais. Après tout, je ne savais pas réellement qui j’allais trouver derrière cette porte, je ne savais pas si j’étais prête à faire face à mes amis d’enfance, après deux ans de silence de ma part, je ne savais pas si eux, ils seraient contents de me voir. Tout ce que je savais à cet instant, c’était que j’avais besoin de revoir des visages familiers, des visages qui me rapprocheraient de Matteo, qui me rappelleraient les bons moments que nous avions tous passé ensemble, à jouer dans notre quartier, quand nous étions beaucoup plus petits et insouciant. J’avais tout de suite pensé à Elio, parce que c’était le meilleur ami de Matteo et que c’était la personne qui me le rappellerait le plus et un peu sans trop y réfléchir j’avais choisi de me pointer à son appartement en cet après-midi. Et je ne savais plus, maintenant que j’étais devant cette porte, si j’allais trouver le courage de frapper. Et sûrement face à mon désarroi, ou simplement agacé de devoir rester face à une porte close, Lago prit les devants et grappa la porte avec une de ses pattes avant. « Non, Lago ne.. » commençais-je à protester alors que la porte s’ouvrait sur Kaecy. Ce n’était pas elle que je m’attendais à voir, mais au final, je crois que je n’aurais pas pu espérer mieux. Kaecy était une de mes meilleures amies pour ne pas dire, ma meilleure amie. Et j’avais été une amie assez déplorable ces dernières années, surtout depuis la mort de Matteo. C’était au début trop douloureux pour moi de songer à Brisbane, à nos amis communs, à ces personnes avec qui nous avions tant partagé. J’avais rangé Brisbane dans une petite boîte au fond de mon cœur et je ne l’avais rouverte que récemment. En voyant Kaecy dans l’entrebâillement de la porte, je fus submergée par tout un tas d’émotions différentes : je passais par la joie immense de revoir une amie proche et que je n’avais pas vu depuis ce qui me semblait être une éternité, par la honte de débarquer comme ça, comme un cheveux sur la soupe, alors que ça avait été silence radio pendant presque deux ans de mon côté, je passais également par une certaine appréhension quant à la réaction de mon amie d’enfance (allait-elle me claquer la porte au nez et prétendre que nous ne nous connaissions pas ?) et je ressentais une nostalgie de la taille d’un trou noir quand je songeais au fait qu’une époque s’était tournée avec la mort de Matteo et que plus jamais nous ne serions une bande au complet, toujours prêts à faire les 400 coups et à nous supporter les uns les autres. Et tout ce qui réussit à passer la barrière de mes lèvres fut un « Oh Kaecy… » d’une toute petite voix qui était un peu le siège de toutes les émotions qui faisaient rage en moi.
« Kaecyyyyyyyy, s’il te plaaaaaaait, promis on sera sages ! - Ouais, sages comme des images, t’aimes bien quand on est sages hein ? - Laisses nous regarder la téléééééé ! »
Kaecy soupira, levant les yeux au ciel. Les jumeaux n’avaient pas tord. Elle aimait bien quand ils étaient calmes, parce-que au moins, elle pouvait s’entendre penser. Elle pouvait même parfois, quand on poussait le vice un peu plus loin, travailler. Mais ces moments étaient vraiment très rares puisque les gamins n’arrivaient pas à rester plus de dix minutes sans se mettre à courir dans tout l’appartement, pire que des piles électriques.
« J’vous connais les loustiques, vous allez être sages à regarder la télé pendant vingt-minutes et après vous allez vouloir autre chose ! »
Les deux frères se regardèrent, échangeant une conversation que eux seuls pouvaient comprendre. C’était ça qui était frustrant avec eux aussi, c’était que ni Kaecy, ni Elio pouvait savoir à l’avance ce qu’ils maniganceaient puisqu’ils arrivaient toujours à tout improviser. Et seulement avec le regard. Alors, ils finirent par se retourner tous les deux en même temps en direction de Kaecy avec ce grand sourire qu’ils savaient si bien faire. Et la jeune femme sentait bien sa volonté fléchir face à ces bouilles d’ange. D’un, parce-qu’elle aimait quand même leur faire plaisir, dans le fond. Même s’ils étaient insupportables, elle les aimait. Et puis, la seconde raison était plutôt évidente quand on connaissait l’histoire de cette famille plus que particulière. Les petits avaient déjà assez souffert comme ça, Kaecy ne voulait pas leur rajouter de la tristesse.
« Juste le temps que je prépare le repas alors, après vous ferez autre chose ! - Ouuuuuuuuuuuuuui ! - Promiiiiiis, merciiiiiii ! »
Kaecy leur tendit alors la télécommande de la télé qu’elle tenait dernière son dos depuis le début de leur conversation, et les regarda s’éclipser vers le salon, le sourire aux lèvres. Après tout, ils étaient mignons quand ils voulaient non ? Elle finit par elle se remettre au travail. Après tout, le déjeuner n’allait pas se faire tout seul. Et puis, de toutes façons, même si Elio avait été présent, c’est elle qui aurait fait le déjeuner. Elle ne voulait pas mourir intoxiquée par quelque-chose d’à moitié cuit.
Les jumeaux étaient partis dans leur chambre quand Kaecy put enfin se poser sur le canapé. Juste, se laisser prendre au piège par les énormes coussins qu’il contenait, poser sa tête dessus et fermer les yeux. Le silence, profiter du silence qu’il lui était offert pour une fois. La vie de maman à plein temps, elle s’y faisait, elle n’avait pas réellement le choix. Mais maintenant, l’avantage, c’était qu’elle comprenait mieux sa mère qui parfois avait envie de péter un câble lorsqu’elle était plus petite. Pas qu’elle fut une enfant désagréable, loin de là, elle avait eu l’avantage, pour ses parents, de mûrir beaucoup plus vite que la plus part des enfants. Mais elle restait une enfant, avec ses crises, et surtout la crise d’ado qui allait bien avec. Ce fut la période où Kaecy avait décidé que malgré son handicap, elle pouvait quand même faire comme tout le monde et se rebeller par la même occasion contre ses parents. Elle s’était rapidement rendue comptes que ce n’était pas vrai, mais elle n’avait pas été des plus tendres avec ses parents pendant cette période là.
Kaecy était en train de faire les cent pas, des papiers pour le boulot à la main, lorsqu’elle entendit un bruit bizarre au niveau de la porte d’entrée qui se situait dans son dos. Elle leva rapidement la tête vers la pendule. Bizarre, elle n’attendait personne et Elio n’était pas censé rentrer avant quelques bonnes heures. Fronçant les sourcils, elle alla alors voir ça de plus prêt, tout à d’abord à l’aide du judas. Et ce qu’elle vit la laissa sans voix pendant quelques instants. Disons qu’elle ne s’attendait réellement pas à voir ce visage là s’afficher derrière la porte de l’appartement, à la base, d’Elio. Elle attrapa alors la poignée de la porte pour ouvrir doucement cette dernière, s’arrêtant à mi-chemin pour voir si elle avait réellement bien vu Heidi derrière cette porte ou si c’était son esprit qui lui jouait des tours. Mais vu la tête que faisait la jeune femme derrière la porte, Kaecy comprit qu’elle ne s’était pas trompée. Heidi. Elle ne l’avait pas vu depuis quelque-chose comme deux ans, étant partie s’installer à l’autre bout du pays avec son compagnon. Heidi, c’était aussi la personne avec qui Kaecy avait passé une bonne partie de son enfance, habitant dans le même quartier qu’elle, avec Elio et Mattéo son frère à elle. Matteo… Décédé deux ans auparavant en service. C’était d’ailleurs depuis cet évènement là qu’Heidi avait coupé les ponts. Personne de Brisbane n’avait eu de ses nouvelles, ou pas récemment. La seule personne qui continuait à en avoir était la mère d’Heidi. Mais après tout, elle avait eu le droit de le faire. Comment survivre à la perte de son frère ? Kaecy s’était plusieurs fois posée la question à la suite de cette nouvelle, à savoir comment elle aurait fait elle si elle avait perdu Elio. Et elle n’avait jamais eu de réponse concrête à cette question.
« Oh Kaecy… »
C’est Heidi qui parla la première, et entendre sa voix fit un bien fou à Kaecy. Parce-qu’elles avaient toujours été très proches et que ça l’avait attristé d’avoir perdu contact avec elle. Elles avaient été ce petit duo pendant des années, pour presque plus rien du jour au lendemain. Alors de la revoir là, c’était surtout de la nostalgie que Kaecy ressentait. Mais de la joie, aussi, parce-qui peut ne pas être heureux de revoir une amie si proche ? Personne. Alors, poussant d’une main la porte et laissant se dessiner un de ces sourires doux et réconfortant à la fois sur le visage, Kaecy réduit la distance, le peu de distance qu’il y avait entre les deux jeunes femmes pour venir prendre Heidi dans ses bras. Et ça fit un bien fou, c’était un peu comme rentrer à la maison après une longue balade.
« Tu t’es faite attendre, tu sais ? »
Kaecy finit par se reculer d’Heidi, toujours le sourire aux lèvres. La phrase qu’elle venait de lui dire n’avait pas été prononcée avec méchanceté, loin de là, mais plutôt comme si elle était soulagée de pouvoir enfin dire ça. Elle s’écarta de l’entrée de l’appartement.
« Aller rentres, restes pas là. »
La jeune femme entra à son tour et Kaecy referma la porte. Se retournant vers le salon, elle soupira limite en voyant l’état de l’appartement. Des affaires aux jumeaux traînaient un peu partout, ses affaires de boulot à elle étaient quant à elles étalées sur la table de la salle à manger, et une tasse de thé était restée sur la table de salon. Autant vous dire que c’était beaucoup trop de bazzart pour une Kaecy qui recevait quelqu’un. Elle se mit alors à ranger le maximum d’affaires qui trainaient en un temps record, sans pour non plus ranger partout. Après tout, ce n’était pas comme si Heidi n’était jamais venu, à l’époque, à l’improviste chez Kaecy et que le lieu de vie de Kaecy n’était pas rangé. Mais cette visite ci avait quelque-chose de particulière. D’une parce-que les deux jeunes femmes ne s’étaient pas vu depuis longtemps, et puis Kaecy sentait qu’une atmosphère différente régnait. Et ressentir avec son sixième sens, c’était un peu son don à elle, étant privée de naissance d’un de ses cinq sens principaux.
Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
Il me semblait que les quelques minutes que mit Kaecy avant d’enfin ouvrir la porte furent les minutes les plus longues de toute ma vie. J’étais venue voir Elio dans l’espoir que cela apaise le trou béant qui se trouvait à la place de mon cœur dans ma poitrine depuis la mort de Matteo. Matteo avait toujours représenté tellement de choses pour moi que devoir vivre sans lui aujourd’hui me semblait être une véritable torture. Ca avait été l’homme le plus important de ma vie. En revenant à Brisbane, à peine étais-je sortie de l’avion que tout un tas de souvenirs longtemps enfouis m’étaient revenus en tête. Je me souvenais surtout de notre enfance, où nous passions notre temps ensemble avec Matteo, Kaecy et Elio à jouer dans les rues du quartier où nous habitions tous. Et automatiquement à chaque fois qu’une de ces scènes se jouaient dans ma tête, j’étais prise d’une nostalgie sans bornes. Lors de ces moments je ressentais le besoin de retrouver mes amis d’enfance, ceux avec qui j’avais partagé beaucoup de choses lorsque nous étions encore innocents et inconscients de l’injustice de la vie. J’avais, contre toute attente, éprouvé le besoin de revoir Elio, bien qu’il m’ait beaucoup moins manqué que Kaecy depuis mon départ de Brisbane, mais c’était celui qui me rappelait le plus Matteo lorsque nous n’étions que des gamins. Je ne savais pas réellement ce qui m’avait poussé à aller le trouver lui plutôt que Kaecy, peut-être était-ce que je redoutais moins sa réaction à lui que la réaction de Kaecy. Peut-être que son rejet me ferait moins de mal que son rejet à elle. Plongée dans une angoisse des plus totales, je voyais soudainement la porte s’ouvrir sur un visage plus que familier : Kaecy.
Kaecy se mit alors à sourire doucement après que j’ai prononcé son nom et elle poussa la porte pour venir m’enlacer. Cette étreinte était étrangement réconfortante, c’était comme revenir à la maison. Enfin non, c’était exactement comme revenir à la maison. Je serrais fébrilement Kaecy contre moi alors que je me mettais à pleurer comme une enfant. Si j’avais su que revenir à Brisbane serait aussi éprouvant au niveau des sentiments, je crois que je n’aurai jamais eu la force de quitter Adelaide, mais bon sang ce que ça faisait du bien. C’était comme si je me sentais enfin vivante pour la première fois depuis deux maudites années. « Tu t’es faite attendre, tu sais ? » dis alors Kaecy de sa voix douce. Et d’une voix entrecoupée de sanglots et clairement incompréhensible, je baragouinais tout un tas de choses parmi lesquelles on pouvait tout de même distinguer un « désolée » et un « amie indigne ». Kaecy tapotais doucement mon dos attendant que je me calme un petit peu et que je respire un bon coup, ce que je fis. Je brisais alors notre étreinte pour m’essuyer les joues et Kaecy s’écarta un petit peu de moi et me laissa la place pour rentrer dans l’appartement. « Aller rentres, restes pas là » ajouta-t-elle doucement. Et je m’exécutais sans dire un mot, les yeux tous rouges et bouffis d’avoir pleuré, je ne me posais même plus la question de savoir pourquoi était-ce Kaecy qui m’ouvrait la porte de l’appartement d’Elio. J’observais quelques instants Kaecy qui s’affairait à ranger l’appartement qui était, il fallait l’avouer, dans un état déplorable et assez peu digne de Kaecy, mais je m’en fichais bien. « Tu ne devrais pas te donner tant de mal pour moi » dis-je d’une voix rauque.
J’étais plantée là, droite comme un piquet, sans trop savoir où me mettre ni quoi dire. Ce n’était pas facile de revenir après deux ans de silence total. Il fallait dire que je ne savais pas trop par où commencer. Un silence, pas réellement pesant cependant, s’installa entre nous tandis que Kaecy terminait de ranger ce qui semblait être des jouets pour enfants. « J’ai quitté Dean. » finis-je par lâcher, un peu comme une bombe à Kaecy qui le connaissait et qui avait eu l’occasion de le rencontrer plusieurs fois avant la mort de Matteo. « Enfin, je suis partie et je l’ai laissé derrière moi et depuis j'évite ses coups de fils, ce qui s'apparente à le quitter, je crois.» ajoutais-je dans une grimace un peu coupable. Il m’apparaissait alors que j’étais une véritable sauvage lorsqu’il s’agissait de relations humaines. « Je crois qu’il est temps que j’arrête un peu mes conneries. » avais-je alors conclu avec un drôle de sourire mi gêné, mi amusé.
Au moment où Kaecy avait décidé de prendre Heidi dans ses bras, alors qu'elle l'avait plus ou moins trouvé là, devant l'entrée de l'appartement d'Elio - oui car elle avait toujours du mal, malgré l'année écoulée, à se dire que c'était aussi son appartement -, elle n'avait pas imaginé qu'elle allait éclater en larmes dans ses bras. C'est vrai, elles ne s'étaient pas vu depuis deux ans maintenant, beaucoup de choses auraient pu changer. Heidi aurait très bien pu la repousser en la voyant arriver vers elle, comme pour remettre les choses au clair dans leur relation et ne pas établir de nouveau ce lien qu'elles avaient. Elle aurait pu aussi simplement répondre à son étreinte, discuter quelques minutes avec Kaecy avant de repartir. Après tout, en venant à cette adresse, c'était surtout Elio qu'elle s'attendait à voir, pas Kaecy. Ca avait du lui faire un choc lorsqu'elle avait ouvert la porte. Et pourtant non, rien de tout cela ne c'était passé. Elle s'était juste laissée aller dans ses bras, comme si c'était la chose la plus normale et la plus soulageante à faire. Et Kaecy ne la repoussa pas. Au contraire, elle tenta tant bien que mal de la réconforter, par des petites tapes délicates dans le dos, réconfortantes, semblant comprendre quelques mots entre les sanglots. La crise de larmes durant son temps, Kaecy put sentir qu'elle avait quand même, au fond, fait du bien à Heidi. C'étaient des larmes lourdes, comme Kaecy les aurait appelé. Celles qui portent un réel chagrin. Elle fit ensuite entrer son amie dans l'appartement avant de s'affairer à ranger comme elle pouvait. Les jumeaux mettaient toujours un bazar monstre... Et elle aussi depuis qu'elle vivait ici, ce qui n'était pas réellement son genre.
« Tu ne devrais pas te donner tant de mal pour moi »
La voix d'Heidi avait résonné dans son dos alors qu'elle ramassait quelques petites voitures qui traînaient au milieu de ce qu'on pourrait appeler une salle à manger. C'est sur qu'avec les pieds de la table et des chaises, c'était un parcours de jeu idéal pour des enfants à l'imagination parfois trop débordante. Elle fit signe d'une main à Heidi qu'elle disait des sottises, sans pour autant sortir un mot. Elle se doutait que si l'autre jeune femme était ici, c'est qu'elle avait des choses, de plus grosses choses, sur le coeur. Et elle voulait qu'elle puisse prendre le temps qu'elle voulait pour engager la conversation, prendre le temps de se mettre à l'aise, prendre le temps de prendre ses repères dans cet appartement qu'elle connaissait déjà d'avant, mais avec un autre tête, celui qu'un appartement de jeune homme célibataire. Le temps aussi de reprendre ses marques auprès de Kaecy. Elle ne voulait pas la brusquer, non, pas elle. Elle le faisait avec Elio, parce-qu'elle savait qu'elle pouvait se le permettre. Elle le connaissait aussi bien qu'elle se connaissait elle-même, et savait que quand il n'allait pas bien elle pouvait lui rentrer dedans sans soucis, que c'était même bénéfique pour lui. C'était d'ailleurs comme ça qu'ils s'étaient retrouvés avec des jumeaux à charge, parce-que Kaecy avait poussé Elio à prendre ses neveux chez lui. Dans la situation qui se présentait avec Heidi, c'était différent. Même si elle ne l'avait pas vu pendant deux ans, et même si elle n'était pas arrivée à l'appartement depuis plus de trois minutes, Kaecy savait qu'elle était fragile en ce moment - la preuve en était qu'elle s'était effondrée en larmes dans ses bras au bout de dix secondes de rencontre. Et comme Kaecy l'avait pressentit, Heidi ne tarda pas à parler de nouveau, pour de vrai cette fois ci.
« J’ai quitté Dean. »
Cette phrase eut un peu l'effet d'une bombe. Disons que Kaecy s'attendait à quelque-chose de gros pour voir Heidi à Brisbane, mais peut-être pas cette nouvelle là. Après tout, Dean et Heidi, c'était un petit peu le couple modèle que tout le monde pouvait jalouser. C'était le couple qui filait le parfait amour, un roman à l'eau de rose. Alors l'entendre dire ça, comme ça, sans prévenir, ça eut le don de stopper Kaecy dans son trajet jusqu'à la cuisine, sa tasse usagée à la main, et de lui faire faire demi-tour sur place.
« Tu as quoi ? »
Sa voix était à la fois choquée, très choquée, et en même temps possédait toujours cette douceur sur la fin des mots, comme si c'était naturel pour elle de toujours vouloir prendre soin des autres alors qu'elle avait envie à l'intérieur de vouloir réagir tout autrement. Elle aurait eu Elio en face d'elle, et s'il avait été dans la situation d'Heidi, elle aurait sûrement dit sa phrase en criant à moitié. Mais pas là. En revanche, elle avait eu une réaction faciale très expressive: les yeux écarquillés, la bouche bée. N'importe qui en la voyant aurait compris qu'elle venait d'apprendre une nouvelle improbable. Et Heidi dût voir rapidement, et comprendre rapidement, l'incompréhension de Kaecy car elle reprit la parole presque aussitôt, comme si elle avait besoin d'une de vider son sac rapidement, pour faire du bien, et de deux pour donner une explication à Kaecy.
« Enfin, je suis partie et je l’ai laissé derrière moi et depuis j'évite ses coups de fils, ce qui s'apparente à le quitter, je crois... Je crois qu’il est temps que j’arrête un peu mes conneries. »
Kaecy cligna des paupières une, deux, trois fois pour être sûre de bien enregistrer l'information. Elle avait donc bien quitté Dean, avec qui elle était d'ailleurs fiancée. Avec qui elle allait avoir un mariage de rêve. La jeune femme prit alors deux secondes où elle respira, avant d'aller poser rapidement la tasse qu'elle avait dans les mains sur le comptoir de la cuisine. Elle revint ensuite vers Heidi, prit son visage entre ses mains, tendrement. On aurait dit qu'elle allait parler à une enfant, comme ça, mais n'ayant pas pu communiquer réellement par la voix une bonne partie de son enfance, Kaecy était quelqu'un de très tactile, si bien que quand elle parlait de sujets sérieux comme celui qu'elles étaient sur le point d'aborder, elle n'arrivait pas à ne pas avoir de contact physique avec son interlocuteur. Dans ce cas là, elle se permettait un contact proche et plutôt intime, car elle connaissait Heidi. Elle n'aurait pas fait ça au premier venu dans la rue, c'était sûr.
« Toi, il va falloir que tu me racontes en détails, car ce n'est pas une situation normale, je me trompe ? Qu'est-ce qui s'est passé ? »
Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
Voilà, je venais de lâcher la bombe, comme ça, sans le moindre préavis. Ce qui laissa Kaecy muette sur le coup. Il fallait avouer que je pouvais comprendre cette réaction de surprise. J’avais moi-même tout juste pris conscience que Dean ne me convenait pas que je le quittais déjà. Parce que Dean et moi n’avions aucun véritable problème, pas de ceux que la majorité des couples ont du moins. Dean trouvait toujours le temps de me voir, ne faisant jamais trop passer sa carrière avant notre relation, nous n’avions aucun problème financier, aucune crise de jalousie ne venait jamais entacher notre bonheur conjugal, Dean était même le genre d’homme qui pensait toujours à rabattre la cuvette des WC. Non, Dean et moi ne nous disputions jamais, ou presque jamais et les sujets de ces rares disputes ne volaient en général pas bien haut. Aux yeux de beaucoup de monde et de l’avis général de nos amis, Dean et moi formions un couple idéal et soudé. Ce qui n’était pas faux, Dean et moi étions toujours prêts à venir en aide à l’autre et à le supporter coûte que coûte. Il fallait cependant croire que la perfection n’était pas ce que je recherchais dans une relation de longue durée.
« Tu as quoi ? » s’exclama-t-elle presque en me lançant un regard étonné. Kaecy posa la tasse qu’elle avait dans les mains sur le comptoir de la cuisine avant de venir à nouveau près de moi. « Toi, il va falloir que tu me racontes en détails, car ce n'est pas une situation normale, je me trompe ? Qu'est-ce qui s'est passé ? » Je soupirais, m’asseyant alors sur une des chaises qui se trouvaient dans la cuisine et Kaecy en fit de même. « En réalité, je ne sais pas trop par où commencer. Je ne sais même pas réellement quel est mon problème avec Dean. C’est comme si je m’étais réveillée un matin dans la peau d’une autre. J’adore Dean et je reste persuadée qu’avec lui j’aurai une vie de rêve. Mais je crois que ce n’est pas ce dont je rêve. C’est comme si tout était trop parfait pour être réellement parfait. Je ne sais pas si tu me suis, je t’avoue que j’ai du mal à me suivre en ce moment. Je sais juste que ça m’a pris d’un coup. Il fallait que je parte pour Brisbane tout de suite. » A ce moment, comme si Dean avait pu sentir que je parlais de lui, mon téléphone, posé sur le comptoir, se mis à vibrer et le nom de mon ex-fiancé apparu sur l’écran. Je retournais celui-ci et relevais les yeux vers Kaecy pour détourner la conversation vers un autre sujet. « Mais dis-moi, toi, qu’est-ce que tu fais chez Elio à ramasser des jouets d’enfants ? Ne me dis pas que toi et Elio vous..? » Je ne terminais pas ma phrase, comme si l’idée elle-même qu’Elio et Kaecy puissent avoir des enfants me semblait improbable et inimaginable.
Kaecy observait attentivement Heidi, cherchant le moindre indice dans son regard, dans sa gestuelle. Mais elle comprenait pas pourquoi elle aurait pu faire une chose pareil. Après tout, on ne quitte pas son fiancé du jour au lendemain comme ça, sans une bonne raison. Kaecy espérait du coup qu'il n'ait pas agit comme un connard envers Heidi, même si Dean ne semblait pas en être un - les meilleurs cachent bien leur jeu -, car Heidi était une femme qui ne méritait pas ce genre de comportement. En fait, aucune femme ne méritait qu'avoir un mari connard avec elle, non. Mais Heidi pouvait être classifier dans la catégorie vraie gentille. Elle était souriante, aimable et serviable, toujours disponible pour sa famille et ses amis. Elle était compréhensive et à l'écoute, toujours de bons conseils. Autant dire qu'elle n'aurait jamais réellement fait de mal à une mouche. Mais quitter son fiancé de la sorte ? Ca ne lui ressemblait absolument pas. Les deux jeunes femmes finirent pas venir s'asseoir sur les tabourets de la cuisine, Kaecy observant toujours Heidi. Elle semblait comme dépassée et épuisée par les événements aussi. Il fallait dire que Kaecy savait qu'elle n'allait toujours pas bien depuis la mort de Matteo.
« En réalité, je ne sais pas trop par où commencer. Je ne sais même pas réellement quel est mon problème avec Dean. C’est comme si je m’étais réveillée un matin dans la peau d’une autre. J’adore Dean et je reste persuadée qu’avec lui j’aurai une vie de rêve. Mais je crois que ce n’est pas ce dont je rêve. C’est comme si tout était trop parfait pour être réellement parfait. Je ne sais pas si tu me suis, je t’avoue que j’ai du mal à me suivre en ce moment. Je sais juste que ça m’a pris d’un coup. Il fallait que je parte pour Brisbane tout de suite. »
Kaecy fronçait légèrement les sourcils, acquiesçant de la tête. Elle comprenait ce que voulait dire Heidi, bien sûr. Elle ne comprenait pas comment elle en était arrive là, mais elle comprenait la fait que parfois, quand tout semble trop bien, trop bon, on n'ait qu'une seule envie, celle de tout foutre en l'air. Comme si le loup avait entendu qu'on parlait de lui, le téléphone d'Heidi, posé sur la table, se mit à sonne et le nom de Dean apparu. Kaecy s'apprêtait alors, comme par réflexe, à dire à Heidi qu'elle pouvait prendre l'appel quand cette dernière retourna son téléphone face contre table. Kaecy leva un regard d'autant plus plein d'interrogations vers Heidi. Ainsi, elle l'évitait réellement beaucoup. Ne laissant aucunes explications au jeune homme. La curiosité de Kaecy était piquée au plus au point, mais elle n'eut pas le temps une nouvelle fois de prononcer une seule phrase car Heidi reprit la parole.
« Mais dis-moi, toi, qu’est-ce que tu fais chez Elio à ramasser des jouets d’enfants ? Ne me dis pas que toi et Elio vous..? »
La jeune femme resta silencieuse pendant quelques secondes avant de comprendre réellement la question d'Heidi. Elle avait l'habitude maintenant que les gens croient qu'Elio et elle étaient en ménage, avaient eu des enfants et tout ce qui s'en suive. Sauf que là, ce n'était pas une personne étrangère qui lui posait la question, non c'était une personne avec qui elle avait toujours, jusqu'il y a quelques années, été proche. Et tous les proches de Kaecy étaient au courant jusque maintenant. Elle reprit la faculté de penser qu'après ce temps de bug, de latence. Et la réaction qui l'emporta par la suite fut un rire, petit et timide au début puis de plus en plus franc. Il ne dura cependant pas très longtemps, car Kaecy comprit rapidement qu'elle allait devoir raconter l'histoire depuis le début à Heidi, et elle l'avait raconté tellement de fois que maintenant, ce n'est pas qu'elle en avait marre de ressasser les mauvais souvenirs mais tout de même. Au moins, Elio n'était pas là, il n'avait pas besoin qu'on lui rappelle une nouvelle fois les mauvais événements.
« Non, t'as pas à t'inquiéter là dessus, la relation qu'on avait Elio et moi est toujours la même, ça ça n'a pas changé ! Non non, c'est que... La soeur d'Elio est décédée dans un accident de voiture, l'année dernière. Et les jumeaux se retrouvaient sans toit... Alors j'ai pris les choses en mains et décidé qu'Elio allait les prendre sous son aile et que j'allais venir l'aider. Du coup j'ai fini par emménager ici ! »
Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
Je me doutais que Kaecy ne comprenait pas exactement tout ce qui se passait dans ma tête. Moi même je ne comprenais pas réellement ce qu'il s'y passait. La seule chose que je pouvais dire c'était que mon comportement relevait plus de la pulsion instinctive que d'une réelle réflexion. Il me semblait que j'avais fait le choix d'un certain lâché prise, j'avais décidé de ne plus être conditionnée par ce qu'on attendait de moi, que ce soit mes proches ou tout simplement la société. J'avais fais le choix de devenir la femme libre et intrépide que j'avais toujours rêvé d'être. Je voulais embrasser la vie et m'endormir chaque soir sans le moindre regret. Je ne voulais pas de barrière. Et il apparaissait que Dean était devenue l'une de ses barrières. Mes sentiments vis-à-vis de mon ex-fiancé n'étaient pas clairement définis. D'un côté, j'avais ce besoin pressant de ne pas rester auprès de lui parce que je me sentais oppressée dans notre relation, coincée dans une routine qui ne me correspondait pas et ne me convenait pas. D'un autre côté, j'avais toujours des sentiments très forts à l'égard de celui qui avait partagé ma vie pendant un peu plus de 10 ans. Si cela n'était pas l'amour passionné que j'aurai du éprouvé pour lui, il y avait un attachement non négligeable. C'était une des raisons qui me poussait à refuser de lui répondre, parce que j'avais peur de craquer au son de sa voix, j'avais peur de céder et de retourner à ses côtés mais pas pour les bonnes raisons. Quelque part au fond de moi, je me disais que si Dean et moi étions fait pour être ensemble, nous nous retrouverions, une fois a crise de la trentaine passée et une fois que je saurais ce que je voulais faire et qui je voulais être.
Après avoir évité les questions de Kaecy concernant le fait que je refusais de répondre aux appels de Dean, je la lançais sur une question qui me tracassait : la raison de sa présence chez Elio alors qu'il n'était pas là et celle de la présence de jouets d'enfants. Au début, Kaecy ne sembla pas comprendre où je voulais en venir. Il fallait avouer qu'Elio et Kaecy formait à eux deux les meilleurs amis qui puissent exister sur terre. Contrairement, à ma relation avec Elio, celle qu'il entretenait avec Kaecy avait toujours été purement platonique. Si certains arrivaient parfois à penser qu'ils étaient ensemble du fait qu'ils passent la majorité de leur temps ensemble, lorsqu'on les connaissait bien l'absence d'ambiguité dans leur relation sautait aux yeux. Et après un petit silence, Kaecy se mit à rire un peu. Je la regardais alors avec un regard d'incompréhension, attendant qu'elle m'explique un peu la situation. « Non, t'as pas à t'inquiéter là dessus, la relation qu'on avait Elio et moi est toujours la même, ça ça n'a pas changé ! Non non, c'est que... La soeur d'Elio est décédée dans un accident de voiture, l'année dernière. Et les jumeaux se retrouvaient sans toit... Alors j'ai pris les choses en mains et décidé qu'Elio allait les prendre sous son aile et que j'allais venir l'aider. Du coup j'ai fini par emménager ici ! » Outch. Il était évident qu'en presque un an et demi d'absence, j'avais eu le temps de louper pas mal de choses. Mais apprendre la mort de Leah de but en blanc sans m'y être préparée fut un véritable choc pour ma part. Leah n'avait jamais été ma meilleure amie mais je l'avais suffisamment cotoyé au long de toutes ses années pour être terriblement affectée par l'annonce de son décés. « Mon Dieu... » Ce fut les seuls mots qui parvinrent à sortir de ma bouche dans un murmure. Mon visage se fermait tout à coup et je restais silencieuse pendant plusieurs minutes. Evidemment la mort de Leah faisait écho à celle de Matteo, ce qui n'était pas sans m'émouvoir un petit peu plus. Cependant, je ne pleurais pas, j'avais bien trop pleuré au cours de l'année passée et il semblait que mes yeux étaient comme asséchés. Une fois de plus, mon incompétence d'amie m'éclatait à la figure.
Kaecy, en répondant à la question d'Heidi, ne s'était pas rendue à quel point elle avait peut-être dit les choses un peu trop directement. Il était vrai qu'elle n'était pas encore réparée du départ de Matteo, et Kaecy n'avait pas fait le rapprochement entre la soeur d'Elio et son frère à elle. Ce n'est qu'en relevant le regard vers Heidi qu'elle comprit que la nouvelle était plutôt un choc pour elle.
« Mon Dieu... - Heidi, j'suis désolée, j'aurai pas du te l'annoncer comme ça... »
Elle s'en voulait, elle connaissait Leah en plus. Kaecy ne voulait pas refaire subir une peine de nouveau à Heidi, elle n'en avait pas besoin, vraiment pas. Sur le moment, elle n'avait juste pas pensé que ça pouvait lui faire revenir d'autres souvenirs, surtout ceux là. Après tout, il était vrai qu'en un an et demi d'absence, des choses se passaient dont on était pas forcément au courant. Surtout que la mort de Leah remontait quasiment à la même période que celle de Matteo.
« Ca va aller ?.. »
Cette question était complètement débile, mais c'était pour le moment la seule chose que Kaecy se voyait dire à Heidi. Après tout, que pouvons nous dire dans ces circonstances ? Il n'y a pas de phrase type qui pourrait remonter le moral ou ce genre de chose. C'était comme ça. Maintenant, elle était au courant, et elle pouvait comprendre pourquoi Kaecy s'était soudainement mise à habiter avec Elio, alors qu'ils n'étaient absolument pas ensemble. Un silence légèrement gênant vint alors s'installer entre les deux jeunes femmes, durant quelques minutes, peut-être plus ou moins, Kaecy ne saurait dire. C'était ce genre de silence où les deux partis étaient plus perdus dans leurs pensées, où on ressassait ses souvenirs - bons ou mauvais, mauvais malheureusement sur ce coup là. Kaecy finit par se lever de son assises, pour se diriger vers les éléments de la cuisine. Il fallait que leur conversation dérive sur autre chose, autre chose qui pourrait faire qu'Heidi pensait à autre chose pendant ce temps là.
« Thé ou café ? »
En attendant sa réponse, Kaecy commença à se préparer un thé pour elle - elle aimait le café, mais préféré le thé sans aucune hésitation. Elle sortit alors les tasses, le sucre et les petits biscuits du placard, avant de revenir s'asseoir en face d'Heidi, le temps que le tout se prépare.
« T'es revenue quand du coup ? T'as un appartement ou tu es de retour chez ta mère pour le moment ? »
Kaecy avait toujours cette voix douce quand elle parlait au gens, surtout là où elle savait que Heidi était toujours plus ou moins en état de choc, et que le sujet "je suis de retour à Brisbane" n'était pas forcément un sujet facile pour elle. Mais Kaecy se devait de demander, en tant qu'amie, comment elle s'en sortait niveau organisation en étant de retour. Elle pourrait sûrement trouver des choses qui pourraient l'aider à mieux être de retour, à se sentir de nouveau bien dans cette ville qui fut longtemps sienne aussi. Mais revenir n'était jamais facile, partir c'était carrément plus simple. Kaecy l'avait bien vu lorsqu'elle était partie quelques mois en Italie, lorsqu'elle était revenue c'était pour la mort de Leah justement, et ça lui avait fait un choc de revenir dans le coin, de voir son meilleur ami dans le pire des états possible, après tant de temps d'absence.
Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
« Heidi, j'suis désolée, j'aurai pas du te l'annoncer comme ça... » Je secouais la tête alors négativement à l'attention de Kaecy. Elle aurait pu prendre toutes les précautions pour m'annoncer la nouvelle qu'elle aurait sûrement toujours eu le même effet sur moi : celui d'une bombe. Apprendre la mort de quelqu'un n'avait jamais rien eu de plaisant et avait toujurs ce côté insoupçonné, notamment lorsqu'il s'agissait d'une personne dans la fleur de l'âge. Cependant, il me semblait que j'avais supporté plus de mort pour mon âge que je n'étais normalement censée en supporter. Mon père d'abord nous avait quitté alors que je n'étais âgée que de cinq ans, puis cela avait été au tour de mon grand frère de nous quitter prématurémment. Je n'étais pas prête à apprendre qu'une autre personne de mon entourage proche avait passé l'arme à gauche. De toute façon, je ne pouvais pas m'attendre à ce qu'on me traite avec douceur alors que je n'avais pas menagé mes amis lors de la disparition de Matteo où j'avais délibéremment choisi de ne plus leur répondre et de les rayer de ma vie. « Ca va aller ?.. » La question de Kaecy aurait normalement du me tirer un petit sourire en coin. Elle était maladroite et la réponse attendue n'était pas réellement une réponse sincère. Mais je connaissais Kaecy par coeur depuis des années, je savais qu'elle se sentait désolée pour moi et qu'elle voulait se montrer utile dans un moment où il était impossible de l'être. Je la regardais alors, et d'un regard je sus qu'elle avait compris ce que je pensais. Que j'allais continuer lentement sur le chemin de la guérison et qu'un jour enfin je pourrais répondre oui.
« Thé ou café ? » me demanda-t-elle alors en allant se préparer un thé. « Un thé s'il te plait » J'étais une grande amatrice de thé, à n'importe quelle heure de la journée. Bien sûr, j'appréciais de temps en temps une bonne tasse de café, mais je tournais au thé tout au long de la journée. « T'es revenue quand du coup ? T'as un appartement ou tu es de retour chez ta mère pour le moment ? » me demanda-t-elle alors qu'elle préparait nos boissons chaudes. « Je viens seulement d'arriver là, il y a environ une semaine bientôt. J'ai passé plusieurs jours chez ma mère avant de trouver un appartement. J'ai beaucoup de mal avec l'idée de rester dans cette maison, tu sais, avec les souvenirs de mon père et de Matteo, ça fait un peu trop parfois. J'ai réussi à trouver un appartement à Fortitude Valley. C'est loin d'être un palace, mais c'esst chez moi et ça fait du bien de se sentir chez soi. Bon, c'est du camping pour le moment, heureusement Lago me tient compagnie. Je vais essayer de me dégoter un travail rapidement avant d'avoir mis assez d'argent de côté pour pouvoir m'acheter un local en pleine ville pour ouvrir ma boutique. Je passe en ce moment la majorité de mes journées à dessiner et à coudre pour développer ma toute première collection de vêtements comme je l'ai toujours voulu. »
« Je viens seulement d'arriver là, il y a environ une semaine bientôt. J'ai passé plusieurs jours chez ma mère avant de trouver un appartement. J'ai beaucoup de mal avec l'idée de rester dans cette maison, tu sais, avec les souvenirs de mon père et de Matteo, ça fait un peu trop parfois. J'ai réussi à trouver un appartement à Fortitude Valley. C'est loin d'être un palace, mais c'est chez moi et ça fait du bien de se sentir chez soi. Bon, c'est du camping pour le moment, heureusement Lago me tient compagnie. Je vais essayer de me dégoter un travail rapidement avant d'avoir mis assez d'argent de côté pour pouvoir m'acheter un local en pleine ville pour ouvrir ma boutique. Je passe en ce moment la majorité de mes journées à dessiner et à coudre pour développer ma toute première collection de vêtements comme je l'ai toujours voulu. »
Kaecy écoutait Heidi parler, tout en finissant de préparer les deux thés, celui pour Heidi et le sien. Elle comprenait ce que pouvait ressentir Heidi en revevant chez sa mère, elle l'avait vécu elle même avec Elio. Au début, après la mort de Leah, à chaque fois qu'il rentrait chez ses parents, il avait toujours ces mêmes sentiments venant l'habiter. Kaecy aussi l'avait plus ou moins vécu quand son père était mort, même si c'était moins fulgurant, étant donné qu'elle était préparée à ce qu'il part, dû au cancer qu'il avait contracter. Mais c'était toujours difficile d'entrer dans une pièce et d'avoir tous ces souvenirs qui remontaient à la surface. Qui pourrait dire le contraire et prétendre qu'aucun sentiment n'est ressenti à ce moment là ? Que la tristesse et la nostalgie ne sont pas là ? Il paraît qu'avec le temps, ce genre de situation s'estompe. Mais dans le cas d'Heidi, Kaecy était persuadée qu'elle allait s'y habituer avant que ce sentiment ne s'estompe. Perdre une personne qui est aussi proche de vous, c'est sûrement le pire.
« Au moins tu as réussi à te trouver un appartement facilement. C'est pas simple en ce moment, je sais que je regarde de temps en temps pour trouver un appartement plus grand pour nous, c'est pas si facile ! Par contre, c'est qui Lago ? Me dis pas que c'est un nom d'homme, c'est vraiment trop bizarre comme prénom sinon ! »
Kaecy eut un petit rire. En vrai, elle pouvait parler elle, elle avait un de ces prénoms justement qui sortaient du commun. Elle en était fière, bien sûr, même si par moments elle en avait bavé dans sa vie avec toutes les personnes qui n'arrivaient ni à le lire, ni à l'écrire correctement.
« Et tu veux ouvrir une boutique de vêtements alors ? »
Si c'était réellement le cas, ça ne la choquait pas. Heidi avait toujours été quelqu'un qui s'était intéressée à la mode et tout ce qui s'en suivait. C'est d'ailleurs plutôt grâce à Heidi que Kaecy avait aujourd'hui un petit don pour s'avoir s'habiller. Elle se rappelait toujours cette période où au début du lycée, elle avait toujours tendance à s'habiller plutôt avec les premières fringues qui lui tombaient sous la main plutôt que de faire attention si ça rendait chic ou non. Il lui était arrivé plusieurs fois d'arriver en jogging en cours, pensant qu'il fallait toujours privilégier le confort à l'esthétique. Surtout qu'à l'époque, elle ne pouvait pas entendre si les gens autour d'elle la critiquaient, alors à quoi bon se faire chier ? Et puis elle avait commencé à écouter les conseils d'Heidi, elle s'était fait opérer pour pouvoir entendre, et depuis elle savait apprécier les compliments qu'on lui faisait lorsqu'elle avait pris du temps pour choisir sa tenue le matin ou dans le magasin la veille.
« Enfin surtout: tu cherches quoi comme job en attendant ? T'as une idée ou je peux te soumettre la mienne ? »
Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
« Au moins tu as réussi à te trouver un appartement facilement. C'est pas simple en ce moment, je sais que je regarde de temps en temps pour trouver un appartement plus grand pour nous, c'est pas si facile ! Par contre, c'est qui Lago ? Me dis pas que c'est un nom d'homme, c'est vraiment trop bizarre comme prénom sinon ! » Je me mettais alors à rire, d'un rire franc et clair, comme je n'avais pas ri depuis longtemps. Pourtant ce n'était pas si drôle que ça, mais la pression que j'avais de retrouver Kaecy et d'avoir appris la mort de Leah s'évacuait comme elle pouvait. « Non non rassure-toi. De toute façon, tant que je n'ai pas mis ma situation avec Dean au clair, je préfère ne pas trop m'intéresser aux garçons en ce moment. J'ai envie de prendre mes marques un peu et que la prochaine personne qui à je dise je t'aime soit la dernière. Non Lago, c'est lui, mon chien. » C'était un chien extrêmement intelligent et bien dressé, je l'avais avec moi depuis son plus jeune âge et j'avais passé beaucoup de mon temps libre à Adelaide à le dresser. Aujourd'hui, il m'écoutait au doigt et à l'oeil, sauf quand il n'en faisait qu'à sa tête mais c'était assez rare, à tel point que je n'avais pas besoin de le tenir en laisse et qu'il s'était fait oublier depuis mon arrivée chez Kaecy, assis tranquillement sur le tapis dans le salon face à la télévision. Je le designais du menton alors pour que Kaecy le voit. « C'est un berger blanc suisse de 5 ans »
« Et tu veux ouvrir une boutique de vêtements alors ? » J'hochais alors doucement la tête, pour confirmer ce que Kaecy venait de me demander. C'était mon rêve depuis toute petite. Je me voyais encore en train de retoucher les vêtements que ma mère m'avait acheté ou en train de faire des chutes de tissus de ma mère de nouvelles tenues pour mes poupées Barbies. C'était ancré en moi : je n'avais rien de quelqu'un de superficiel, mais j'étais toujours bien habillée, apprêtée avec un style bien à moi. J'avais ce don, à défaut d'un meilleur terme pour le qualifier, pour associer les pièces, les couleurs et les accessoires entre eux. Et je voulais en faire mon métier : l'idée même que plusieurs hommes ou femmes puissent porter les vêtements que j'avais moi-même imaginé me faisait rêver. C'était peut-être un peu mégalo, mais ça me plaisait. « Enfin surtout: tu cherches quoi comme job en attendant ? T'as une idée ou je peux te soumettre la mienne ? » Je relevais alors le regard vers Kaecy, toute ouïe. « Bien entendu que tu me soumettre ton idée ! »
« Non non rassure-toi. De toute façon, tant que je n'ai pas mis ma situation avec Dean au clair, je préfère ne pas trop m'intéresser aux garçons en ce moment. J'ai envie de prendre mes marques un peu et que la prochaine personne qui à je dise je t'aime soit la dernière. Non Lago, c'est lui, mon chien. - Aaaah oui, je me disais bien aussi ! - C'est un berger blanc suisse de 5 ans. - Je dois t'avouer que j'avais oublié que tu étais arrivée avec ton chien tellement il est sage ! Heureusement que les jumeaux ne sont pas là, ça aurait été une autre histoire avec eux ! »
Kaecy avait, en parlant de chiens, bien des fois pensé à acheter un chien pour les jumeaux, ils adoraient ces petites bêtes. Lorsqu'avec Elio, ils les emmenaient au parc et qu'ils avaient le malheur de croiser un chien, ils savaient qu'ils en avaient au moins pour un demi-heure de conversation - avec toujours les mêmes questions louches comme "Ce sont vos enfants ? Ils vous ressemblent !" posées par les gens - avec le propriétaire pour que les enfants puissent jouer avec le chien en question. Cependant, l'idée de Kaecy n'avait jamais été plus loin que son cerveau car elle savait que ce n'était pas le bon moment. Avec Elio, ils essayaient tant bien que mal d'économiser de l'argent pour pouvoir prendre un appartement plus grand, et un chien ça coûtait de l'argent. Et puis même, s'ils avaient un chien maintenant, il ne serait pas forcément heureux vu que leur appartement n'était point grand. Alors que le jour où ils auraient un appartement plus grand, un chien pourrait mieux s'y plaire, la question serait peut-être à revoir. En tous cas, elle savait que c'était le genre de surprise que les jumeaux adoreraient. La conversation vira ensuite sur les projets d'Heidi. Kaecy était heureuse de savoir que son amie avait des projets dans sa vie malgré le chaos qui semblait y régner en ce moment. Elle était de ceux qui pensait que le travail nous permettait de rester toujours dans un droit chemin, car ça nous permettait d'avoir toujours un but qui nous tirait vers le haut.
« Bien entendu que tu me soumettre ton idée ! - Et bien, il faudrait que j'en retouche deux mots à mon directeur, mais il m'avait soumis l'idée une fois d'embauche une assistance. Alors je sais que l'édition c'est pas du tout ton domaine, mais ce ne serait que pour m'aider dans les dossiers, les rendez-vous, les choses comme ça. Après, je comprendrai que ça t'intéresse pas, mais voilà. C'est bien payé pour un job temporaire, et tu aurais du temps à côté pour bosser sur ton projet à toi. Et tu n'aurais pas à passer d'entretien puisque c'est moi qui doit te choisir. Alors je sais pas, ça te dirait ? »
Kaecy leva un sourcil en direction de son amie. Elle savait qu'elle pourrait sûrement avoir des offres d'emplois beaucoup plus adaptés à ses compétences, plutôt que de venir l'aider elle. Mais elle avait besoin d'un boulot et Kaecy ne dirait pas non à un peu d'aide ces temps ci, où elle croulait sous les dossiers, le essais à lire et elle en passait. Elle attendait la réponse d'Heidi quand son portable se mit à sonner. Elle se leva pour aller décrocher, et voyant que c'était le numéro de l'école des jumeaux, elle leva les yeux au ciel avant d'appuyer sur le bouton vert.
« Mademoiselle Wilson, je vous écoute ? [...] Ah... D'accord, bah j'arrive pour les récupérer alors, merci d'avoir appelé. »
Elle raccrocha, se tournant maintenant vers Heidi avec un sourire désolé. Elle détestait faire ce qu'elle allait faire, mais cette fois ci elle n'avait pas le choix. Quand ça concernait les jumeaux, à vrai dire, elle n'avait pas souvent le choix.
« J'suis désolée Heidi, mais je vais devoir te mettre à la prote... Les jumeaux, oui les deux, sont malades et je dois aller les récupérer à l'école... »
Je veux retrouver ma place, me sentir à nouveau chez moi, et avoir de vraies amies. Je veux retrouver le genre d’amitié en laquelle on croyait. Ça me manque. Et tu me manques toi aussi... Δ
« Je dois t'avouer que j'avais oublié que tu étais arrivée avec ton chien tellement il est sage ! Heureusement que les jumeaux ne sont pas là, ça aurait été une autre histoire avec eux ! » Je souriais doucement, amusée par l'idée. « Lago adore les gosses, il est presque intenable en leur compagnie. Mais il est adorable avec eux, c'est un chien assez joueurs sur les bords, il est encore jeune ». Lago était le seul vestige de ma vie commune passée avec Dean que j'avais tenu à emporter avec moi. Je m'étais terriblement attachée à lui au cours de ces derniers années passées en sa compagnie et depuis mon retour à Brisbane il avait été d'un soutien sans failles. Je comprenais enfin l'homme qui avait un jour dit que le chien était le meilleur ami de l'homme. Car il me semblait que Lago pouvait sentir quand ça n'allait pas chez moi et il m'apportait alors le courage et le réconfort dont j'avais besoin. C'était d'ailleurs lui qui m'avait poussé à affronté mon passé en toquant à la porte de cet appartement à ma place. Sans lui, je ne serai sûrement pas assise avec Kaecy en train de boire un thé.
Puis Kaecy dérivait sur sa proposition pour ma recherche de job en attendant d'avoir assez d'argent pour me lancer dans la création de ma collection. « Et bien, il faudrait que j'en retouche deux mots à mon directeur, mais il m'avait soumis l'idée une fois d'embauche une assistance. Alors je sais que l'édition c'est pas du tout ton domaine, mais ce ne serait que pour m'aider dans les dossiers, les rendez-vous, les choses comme ça. Après, je comprendrai que ça t'intéresse pas, mais voilà. C'est bien payé pour un job temporaire, et tu aurais du temps à côté pour bosser sur ton projet à toi. Et tu n'aurais pas à passer d'entretien puisque c'est moi qui doit te choisir. Alors je sais pas, ça te dirait ? » Ce que Kaecy me proposait était bien mieux que tout ce que j'avais envisagé comme boulot jusque là alors évidemment, je choisissais d'accepter « Oh Kaecy ça serait parfait ! Donc si l'idée de travailler avec moi ne te rebute pas, je serais ravie que tu redemandes confirmation à ton patron concernant ce poste d'assistante »
Mais je fus soudainement coupée dans mes remerciements par la sonnerie du téléphone de Kaecy qui décrocha aussitôt. « Mademoiselle Wilson, je vous écoute ? [...] Ah... D'accord, bah j'arrive pour les récupérer alors, merci d'avoir appelé. » Elle semblait soucieuse et je me doutais que quelque chose n'allait pas comme elle le souhaitait. « Qu'est-ce qu'il se passe ? » «J'suis désolée Heidi, mais je vais devoir te mettre à la prote... Les jumeaux, oui les deux, sont malades et je dois aller les récupérer à l'école... » répondit-elle. « Ne t'en fais pas, c'est bon. Ca m'a fait du bien de te revoir. Passe me voir à l'occasion à Fortitute Valley dans petit appartement et tiens-moi au courant pour le job. Allez Lago, on s'en va » Je quittais alors l'apparement de Kaecy, soulagée d'avoir retrouvée une amie.
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