(outfit) Fin juin 2021

Je n’ai jamais été un grand fan des soirées déguisées si ce n’est celles organisées par ma sœur jumelle. Ce soir ne fait pas exception à la règle, puisque c’est le thème du cinéma qui a finalement remporté la victoire après un combat acharné contre celui des années 80. Non pas que je n’apprécie pas le côté rétro de cette époque, mais y’a rien qui peut surpasser le septième art. Il faut dire que je n’avais pas franchement envie d’avoir à porter des couleurs ultra flashy, c’est sans doute un peu pour cela qu’après une longue réflexion, je me suis décidé à me déguiser en Severus Snape, le seul et l’unique. L’idée ne me paraissait pas mauvaise, jusqu’à ce que je déballe la perruque brune de son emballage. Y’a qu’à voir la gueule de mon chien pour comprendre que le déguisement est loin de m’aller comme un gant. J’ai rien à redire sur la tunique bleue foncée et la longue cape noire, en revanche la perruque commence déjà à me gratter et damn ce que j’ai l’air con. Je passe mes doigts dans le carré plongeant pour démêler les mèches de cheveux synthétiques en grimaçant. La seule chose qui me pousse à sortir de chez moi, c’est de savoir qu’on sera tous logés à la même ancienne sauf qu’il n’y a personne lorsque j’arrive enfin devant le lieu de l'évènement, pas un chat. Je tente d’appeler ma frangine, une fois puis deux avant de tomber sur sa messagerie vocale. « Sache que j’suis devant l’entrée, tout seul, et déguisé en version bas de gamme de Severus Rogue donc j'apprécierais grandement si tu pouvais bouger ton cul pour me sortir de ce grand moment de solitude, merci.» Je raccroche et troque mon téléphone contre mon paquet de clopes. J’ai jamais compris pourquoi, mais j’ai toujours trouvé ça réconfortant de fumer une cigarette en attendant l’arrivée d’une personne comme si l’action en elle-même pouvait expliquer le fait de me retrouver seul.  « Comme on se retrouve. » Je me fige au son de sa voix. C’est pas possible, faut toujours qu’il débarque dans des situations plus que cocasses. Je me retourne pour lui faire face, soufflant sur une mèche de la perruque pour l’enlever de mon visage. « Vas-y, fous-toi d’moi » Je devance sa moquerie que je sens arriver gros comme une maison. Jordan m’a déjà vu cul nu alors un peu plus ou un peu moins, c’est pas la perruque qui va changer grand-chose au malaise déjà bien présent. « Tes meilleurs potes sont de la partie aussi ? » - « Faut croire que je suis abonné aux rendez-vous râtés. » C’est qu’il doit avoir un garydar à défaut d’avoir un gaydar parce qu’il se montre toujours quand je me retrouve solo, tel un super-héros. « T’es déguisé en quoi toi ? En menthe à l’eau ? » Je fixe sa veste, option numéro une : il n’a pas compris le principe des soirées déguisées. Option numéro deux : j’ai dû passer à côté du film qui l’a inspiré. Mon petit doigt me dit que je suis encore le seul couillon à m’être fait berner. « Si c'est un de vos coups montés à Jess et toi, j'vous jure que vous risquez de le regretter pendant plusieurs années.»J'écrase ma clope le rebord de la passade et la balance dans une poubelle. C'est quand même bizarre qu'il n'y ait personne et que je me trouve seul avec lui alors que c'est ma soeur qui a eu l'idée de cette soirée.

@Jordan Fisher
 

Il ne cesse de sourire, Jordan. C’est qu’il a l’air d’adorer me voir me ridiculiser, toujours au premier rang quand cela arrive, le pêcheur. Il ne manque plus qu’Andy pour ajouter une petite cerise sur le gâteau. Je me débats avec les mèches de ma perruque noire, soufflant sur les mèches pour qu’elles quittent ce visage qu’elles ne cessent de caresser. J’pourrais pas avoir les cheveux longs, ça demande trop d’entretien et puis je déteste la sensation des filaments contre ma mâchoire. « J’ai un t-shirt Star is Born. » Il me sort ça comme si c’était le costume du siècle sauf que y’a pas de quoi se vanter, son t-shirt est caché sous son pull blanc et son bomber menthe à l’eau. « Pas vu, pas cru. »  J’hausse les épaules et tire sur ma clope laissant la fumée remplir mes poumons tandis qu’il se met à rire. « Arrête tu sais que je ne lui ai pas encore dit pour l’autre fois ? » Pas encore dit ? Je m’étouffe avec la fumée de cigarette lorsque j’essaye de répliquer tentant de reprendre le peu d’oxygène qui s’offre à moi sauf qu’en essayant de respirer, je gobe une mèche synthétique de ma perruque ce qui me fait tousser de plus belle. « Comment ça pas encore ? » que je lance après avoir repris mes esprits. Il m’est impossible de savoir s’il se paye ma tête, parce que c’est son truc à lui, se foutre de ma gueule.  « Mais ouais je comprends pas pourquoi y’a personne. » Et moi, je comprends pas pourquoi je suis le seul blaireau à être déguisé. Il n’a pas l’air hyper inquiet, je tourne la tête pour regarder autour de nous en espérant voir la mini silhouette de ma sœur débarquer au loin. « T’es déguisé en Serdaigle ? C’est qui ? Cho Chang ? » Si j’avais le super pouvoir de tuer les gens d'un simple regard, il serait déjà mort à l’heure qu’il est. Cho Chang, il aurait pas pu choisir pire comme personnage, j’aurais même préféré qu’il fasse référence à Rusard plutôt qu’à cette fille. Je l’ai jamais apprécié, que ce soit dans les films comme dans les livres. Non pas parce que c’est un personnage féminin, juste parce qu’elle est trop cucul la praline et sacrément indécise. Je pointe le bout de ma baguette sur son menton en le défiant du regard. « Fais-gaffe à ce que tu dis, je suis Severus Rogue, le seul et l’unique » Je balaye mes cheveux d’un coup de tête alors qu’il semble perdu dans ses pensées. « Si y’a un concours de costume t’as mon vote. Solidarité entre maisons tout ça tout ça. » J’essaye de retenir le petit rire qui tente de m’ôter tout air sérieux, je suis un serdouffle donc à moitié de sa maison. « Avoue que j’t’ai fait peur avec baguette ! » Je souris, Jordan votera peut-être pour moi, mais j’ai pas besoin de stipuler qu’il n’aura pas mon vote. Je fais pas dans la charité et c’est pas un simple t-shirt qui me fera changer d’avis. « Bon ils sont où tous ? Tu peux tenter un coup de baguette magique ? » Je lève ma baguette en l’air avant de me racler la gorge, une fois, puis deux car y’a cette voix dans ma tête qui me dit que tout ira bien si je me racle la gorge à deux reprises. « Accio ma frangine et tutti quanti ! »  Je fais un bref mouvement de poignet et range ma baguette dans la poche de ma tunique. « Y’a plus qu’à attendre maintenant. » que je lui dis un peu trop sûr de moi. Je fais dos à la rue pour ne plus voir les moldus qui me montrent du doigt portant mon attention sur le blondinet qui se tient face moi. « Bon, j’ai raté quoi dans ta vie depuis la dernière fois ? T’as pêché du poisson  un peu ou pas du tout ? » J’arque un sourcil, bien trop curieux d’en apprendre plus sur sa vie. Je me dis qu’entre partenaire de situations cocasses, on est arrivé à un point où on peut se dire ces choses-là sans que ce soit gênant. « D’ailleurs j’suis toujours en vie, merci de t’en être inquiété. J’aurais pu me faire tuer en montant dans la voiture d’un serial killer la dernière fois. » Ce qui est vrai, y’a tellement de dingues dans ce monde et j’ai tellement une chance de cocu, la preuve en est, que j’aurais très bien pu monter dans la seule voiture de Brisbane avec un psychopathe pour conducteur.

 

« Ca aurait été cool que ce soit Cho Chang. » Cool pour lui, ouais mais pas pour moi surtout que Cho Chang est un personnage fictif racisé et que je n’aurais jamais osé me mettre dans sa peau même le temps d’une soirée. Rogue par contre, c’est différent. Il est né d’un moldu et d’une sang-pur. Il a grandi dans une petite ville industrielle ce qui en soi, n’est pas si éloigné de ce que j’ai connu. Ma mère a toujours eu le cœur pur comparé à mon père qui s’est vite laissé dépasser par la faiblesse de l’être humain, les tentations et toutes ces choses qui poussent les moldus à l’adultère. J’attrape ma baguette en bois, celle que je dépose sous le menton de Fisher. Je serais bien tenté de lui lancer un petit crache-limaces pour me venger, histoire de le faire réfléchir à dix fois avant d’aller balancer notre petite soirée à la plage auprès de ma frangine. Une sœur qui n’a pas l’air d’avoir reçu mon message à défaut de se rappeler de la fête qu’elle a organisée. Mon arme quitte le visage de celui dont-je-ne-prononcerais-pas-le-nom pour venir s’agiter sur l’allée dans laquelle nous nous trouvons. Les minutes passent et le sortilège d’attraction ne semble pas avoir l’effet escompté puisqu’il n’y a aucun signe de Jess à l’horizon ni même des connaissances qu’on peut avoir en commun. Je le savais, je savais qu’Ollivander était un putain de charlatan mais on a jamais voulu me croire parce que oui, si la baguette ne fonctionne pas c’est forcément de la faute du vendeur et non pas de mes lacunes en sorcellerie. Ce défaut de fabrication me pousse à vouloir faire la conversation sauf que ça n’a pas l’air d’être le cas du blondinet qui ne souhaite pas répondre à ma question. Le vent se lève sur Brisbane, assez pour ne pas tenir compte le courant d’air que je viens de me prendre. La soirée s’annonce longue et les silences trop nombreux pour que je me lève demain matin avec la satisfaction de m’être éclaté. « Je savais pas que tu étais ma responsabilité. » Il rigole sans savoir que j’ai vraiment galéré à trouver une personne assez généreuse pour prendre un mec en hoodie et serviette de plage dans sa bagnole. La même voiture dont les numéros sur la plaque d’immatriculation étaient tout sauf pairs. « Mais je suis content de voir que tu n’es pas mort depuis la dernière fois. » Content ou soulagé de ne pas avoir eu à avouer à sa pote qu’il était la dernière personne à m’avoir vu en vie ce soir là ? « Tu viens pêcher du poisson ce soir ? Avec ta cape c’est pratique pour faire des trucs incognito. » Je ris, passant mon pouce sur mes lèvres m’efforçant de ne pas lui montrer mon majeur. C’est qu’il est vachement gonlé le Jordan à me poser la seule question à laquelle il n’a pas voulu répondre. Qu’il s’étrangle avec son poisson, pas question que je fasse preuve de confessions sur mes intentions lorsqu’il n’est pas capable d’en faire autant. « Tu devrais tester l’occlumantie pour trouver les réponses à tes questions. » « Ton cerveau est peut-être doué pour l’occlumantie, mais je suis sûr que c’est loin d’être le cas de ton cul. » que je peste,  à mon avis il est même à des années lumières de bloquer les tentatives de pénétrations extérieures, son cul. Ce qui est loin d’être le cas pour le reste de son corps puisque plus j’essaie d’apprendre à le connaitre et plus je me prends des murs. Je lâche un soupire que je ne tente même plus de cacher me demandant ce qu’on va bien pouvoir se dire en attendant l’arrivée des autres invités. « T’en es où dans ta carrière de musicien ? » que je demande sur un ton nonchalant, peu certain d’avoir une réponse à ma question. Il faut dire que je le connais pas et que plus je le côtoie et moins je le comprends. J’ai l’impression de découvrir un autre garçon alors que je savais déjà pas grand-chose du mec que j’ai croisé sur la plage. « Tu veux entrer boire un verre ? » Je lui montre la terrasse d'un bar avec la pointe de ma baguette. Loin de moi l’idée de le pousser à être bourré, bien que j’ai l’infime espoir que l’alcool nous aide à faire la conversation, une vraie conversation pas celle qu’on tente d’avoir depuis le début de la soirée. Je sors une nouvelle fois mon téléphone portable de ma tunique pour envoyer un simple S.O.S à Jessy ainsi que ma localisation. « Vous vous êtes connu comment avec ma frangine ? » C’est une question que je n’ai jamais posé ni à l’un, ni à l’autre et s’il veut pas parler de sa vie personnelle, peut-être qu’il sera plus généreux sur les anecdotes qui concernent ma jumelle.

 

(outfit) Fin juin 2021

 « Tu veux en nombre de stream, nombre de chansons sorties, ou albums? » Soit je parle une langue qu’il ne semble pas comprendre, soit on a vraiment du mal à converser, lui et moi.  « C’est vaste comme question, mais ça va très bien. » Je me gratte le derrière de la tête plus parce que je me sens mal à l’aise qu’à cause de cette satanée perruque. « Je t’ai pas demandé de te mettre dans la peau de spotify, j’voulais juste savoir si ça te plaisait toujours autant. » J’hausse les épaules, visiblement c’est aussi un sujet qui ne mérite pas de réelle réponse. Je vois pas ce que ma frangine peut lui trouver ou peut-être qu’il n’est comme ça que lorsqu’il se retrouve en ma compagnie. J’observe le blond un moment comme lorsque je m’apprête à me lancer dans la résolution d’un casse-tête, un de ces jeux en bois qui finissent toujours par me donner mal à la tête. J’aimerais lui demander s’il est bavard que quand il tente de pécho ou s’il se retient d’en dire trop parce qu’il n’a simplement pas envie de me voir creuser, au lieu de quoi je lui propose d’entrer dans le bar pour boire un verre dans l’espoir que l’alcool nous aide à délier nos langues, la sienne plus que la mienne. « Avril 2020, le show caritatif au Crowbar. On a commencé à discuter et puis je suis devenu votre fangirl numéro 1 dans le public. »  J’ai l’impression d’avoir gagné à la loterie en évoquant leur rencontre entre lui et ma frangine car il vient de débiter bien plus de mots en une seule phrase que ce qu’il a pu le faire depuis que nous nous sommes rencontrés. Je note le fait qu’il emploie « votre » au lieu de « son » m’incluant dans le lot ce qui est surprenant quand on voit le comportement qu’il peut avoir à chaque fois que nos chemins se croisent.  « Vous m’avez même fait pleurer avec votre set. Je me souviendrais toujours de ce soir là. » Cette fois ci, je souris. Je me souviens de cette soirée comme si c’était hier mais j’ai beau me remémorer les visages dans le public, y’en a aucun que j’arrive à visualiser. Je me serais certainement souvenu de lui si je n’avais pas été trop occupé à regarder les cordes de ma guitare comme à chaque fois que je monte sur scène, une astuce pour combattre le stress. C’est malheureux, mais rares sont les fois où je me permets de croiser un regard lorsque je joue, parce qu’il suffirait que je tombe sur une expression négative, une mimique pour que je commence à douter et que je fasse tout foirer. Je pousse la porte du bar, m’arrêtant pour le laisser passer en repensant à cette phrase que Bernie prenait un malin plaisir à me répéter, celle qui dit que si les gens font preuve de galanterie, c’est uniquement dans le but de pouvoir se rincer l’œil en matant un cul ou deux. Un seul pour ce soir, je lui enjambe le pas en essayant de ne pas le perdre parmi la foule. « On a encore une nouvelle chanson en préparation avec Jess. Un délire. Pour changer. Mais c’est toujours génial au final. Tant que c’est fun on s’arrêtera jamais je pense. » Je ris, ouais ça m’étonne pas de ma sœur même si ce soir il n’a pas l’air d’être un mec qui s’éclate facilement ou peut-être qu’il le fait uniquement avec les bonnes personnes. Je m’installe en face de lui alors que j’observe des gens se lever pour rejoindre la scène qui se trouve non loin de nous. « Tu fais des trucs à côté de Oxtorm ? T’en es où toi ? » - « Tu veux en nombre de passions, nombre de boulots, ou de rendez-vous ratés ? » Je lève le nez vers lui en souriant. La question est moins vaste que celle que j’ai posé auparavant, mais la réponse quant à elle, semble bien plus compliquée. Je suis perdu, voilà où j’en suis. Perdu entre ce que j’aurais aimé faire de ma vie et ce qui je fais actuellement. « Si ce n’est commandé de vieux costumes sur le net ? » Je ris tentant de gagner du temps avant de lui donner une réponse qui n’aura rien de gratifiant. « Je bosse dans un vieux vidéoclub et j’livre des dvds à domicile. Et toi ? T’as d’autres passions si ce n’est la musique et me venir en aide dans des moments plus que gênants ? » Je suis surtout un boulet pour Bernie qui n’a pas les moyens de me payer mais qui persévère parce qu’il a trop peur de me voir me foutre en l’air. Je lève la main pour faire signe au serveur avant de reporter mon attention sur Jordan. « À ton avis combien y’a de chewing-gum collés sous cette table ? » J’enlève ma perruque ainsi que ma cape que je pose sur la banquette passant rapidement ma main dans mes cheveux humides pour leur redonner une forme.  « Celui qui se rapproche le plus du nombre exact paye la première tournée. 22, c’est mon dernier mot. »  Vingt-deux ne me parait pas déconnant, le bar doit avoir plusieurs années et les gens sont tellement flemmards qu’il est plus facile de coller leur chewing-gum sur le dessous de la table plutôt que de se lever pour aller le mettre dans une poubelle. « Tu crois qu’il y aurait quelles chansons dans la playlist de Cho Chang ? » J’ai toujours aimé imaginer la playlist de mes personnages fictifs préférés. Non pas que ce soit le cas pour Cho Chang, mais il faut bien commencer quelque part et il m'est impossible de faire mieux quand je ne connais pas les goûts cinématographiques de Fisher.  Le serveur s’approche de nous, jetant un rapide coup d’œil à ma perruque sans piper mot. « Une blonde pour moi, s’il vous plait. » Il se retourne vers Jordan pour prendre sa commande et j'en profite pour jeter un coup d'oeil à mon portable en espérant y trouver un message de Jessalyn.
 

(outfit) Fin juin 2021

« Comme tu veux. » Jordan ne semble pas être ouvert à mon sens de l’humour, ouvert à rien du tout serait le terme le plus exact. Je lui fais part du vidéoclub, un endroit que je tente de maintenir à flot comme je le peux tout en sachant que plus les années passent et plus on se rapproche du jour où on sera forcé de baisser les stores pour la toute dernière fois. Une fermeture inévitable qu’on ne fait que repousser avec Bernie. Rien de bien intéressant, deux passe-temps qui sont loin d’être aussi glorieux que ceux du jeune homme qui se tient face à moi. Il reste humble, Jordan, mais on est loin de mener la même vie, lui et moi. « J’ai la chance de pouvoir vivre de la musique. » Il n’attrape pas la perche que je lui tends, comme toutes celles que j’ai pu lui lancer depuis le début de la soirée. J’acquiesce de la tête à ses mots même si ce n’est pas quelque chose que j’envie tout particulièrement. Je pourrais pas devenir célèbre au point de ne plus avoir un moment à moi et j’ai du mal à comprendre comment on peut vivre heureux en étant épié matin, midi et soir. C’est pas le cas pour Jordan, du moins j’ai beau faire le tour du bar à la recherche d’un mec avec un appareil photo, je n’en vois aucun. Il a su trouver le juste milieu alliant notoriété et respect de la vie privée. Je tente de combler les blancs avec des trucs débiles, comme le nombre de chewing-gum qu’on peut trouver sous la table, mais là encore Fisher n'a pas l'air d'être amusé. « La première tournée est pour moi. » J’hausse un sourcil. « C’est par pitié ou parce que t’as vraiment envie de payer ? » S’il pense pouvoir faire dans le social avec moi c’est qu’il n’a rien compris. Je me penche pour passer la tête sous la table afin d'y compter le nombre de chewin-gum, c’est que ça ressemblerait presque à une œuvre d’art. Le bois est parsemé de petit ronds de toutes les couleurs, dix-huit pour être exact, ce qui me fait sourire car je n’étais pas loin du compte finalement. Le serveur arrive, je relève rapidement la tête sans faire attention au coin de la table qui vient cogner contre ma boite crânienne m’arrachant un juron alors que je pose ma main sur la bosse que je peux déjà sentir se former sous mes doigts. « Et de la glace ? » qu’il ajoute lorsque je commande une bière. Ça me fait sourire, je n’ai pas besoin d’acquiescer pour qu’il ajoute ceci à la commande. « Un Sprite pour moi. Merci. » Je fronce les sourcils en plongeant mes yeux dans ceux du blond. « T’as un jumeau caché ? » Non, parce que le mec qui se tient devant moi est à l’opposé de celui que j’ai rencontré sur la plage à tel point que ça devient déconcertant. C’est comme si on faisait connaissance à nouveau qu’on nous avait plongé dans un univers alternatif sauf que je n’ai pas changé comparé à la version 2.0 qui est assise en face de moi. « Si elle était étudiante en 2020 je pense qu’elle serait du genre à écouter Taylor Swift. Et Snape des vieux groupes de métal genre Iron Maiden, Metallica. » Je viens piocher dans l’un des deux bols que le serveur à déposer entre nous pour y prendre deux cacahuètes. « J’suis d’accord pour Taylor Swift, c’est clairement le genre de nana à se morfondre sur toutes ses relations amoureuses, Cho Chang. » que je lui réponds en lançant une cacahuète en l’air avant de la rattraper avec ma bouche. « Par contre, j’aime à penser que Snape serait plus du genre à écouter de vieux groupes de rock. » Sûrement parce que je ne suis pas un grand fan de métal contrairement à ma sœur. Ça gueule trop fort pour moi, du moins assez pour la supplier de changer de chanson à chaque fois qu’elle veut m’en faire écouter. Bizarrement, c’est pas pareil quand c’est Jess qui chante, là j’arrive à comprendre ce qu’elle peut bien trouver à ce style de musique parce que sa voix est magnifique et puis que je me lasserai jamais du talent de ma frangine. « Toi t’écoutes quoi ? Comme Jess ? » - « J’écoute très peu de métal sauf quand on doit en jouer. » Y’a mon petit doigt qui me dit que je viens de perdre quelques points dans son estime suite à une telle révélation, mais bon, à être dans le négatif, autant y aller tête la première. « Je préfère le rock et la folk. En réalité, je peux presque tout écouter si c’est en version acoustique par contre j’suis allergique à l’auto tune. » Je grimace, y’a rien de pire ; je préfère encore écouter quelqu’un chanter faux qu’une personne ayant usé d’un logiciel pour corriger son grain de voix. « C’est quoi la musique que tu passes en boucle en ce moment ? Et t’écoutes quoi, toi ? » Deux questions en une phrase, je mise dix chewing-gum usagés que y’en a une des deux qu’il va probablement ignorer.