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(with all the strength of a raging fire)

Samedi 27 Novembre 2021.

Quelle que soit la discipline, en équitation, le travail se fait en équipe. Il doit être le résultat d'une entente entre le cavalier et sa monture. Car les chevaux ne sont pas des objets manipulables à souhait mais des êtres vivants, dotés de leurs propres instincts, ressentis et réactions face aux situations auxquelles ils sont confrontés. C'est pourquoi parfois, quand il existe un manque d'alchimie manifeste entre l'humain et l'animal - que ce soit à l'instant T ou de manière générale, des accidents peuvent se produire.

Des accidents comme celui de ce matin, où le cours de saut d'obstacles a viré au drame lorsque Cicero a fait un refus devant un oxer, entraînant la chute de Melissa. Comme le demande la procédure à Riverside, j'ai aussitôt été prévenue afin de constater l'état de l'adolescente. Fort heureusement, il y a eu plus de peur que de mal : une simple fracture de la cheville. Ce n'est pas anodin mais les choses auraient quand même pu être pires. Melissa a été prise en charge, ses parents prévenus, et je suis ensuite retournée dans mon bureau afin de remplir les papiers nécessaires.

Ce remue-ménage est la raison pour laquelle j'ai manqué l'appel de Cade.

En conséquence, il est également la raison pour laquelle en cet instant précis, soit une poignée d'heures plus tard, je tourne en rond dans mon salon sans pouvoir tenir en place, bras croisés, sourcils froncés et esprit en ébullition.

Je ne connais pas très bien Cade, mais je suis pratiquement sûre d'avoir senti une certaine appréhension dans sa voix. Après l'écoute de son message vocal, je me suis empressée de lui confirmer par SMS que je serai à la maison le restant de la journée. Depuis, des dizaines de questions et autant de suppositions se livrent un combat acharné dans ma tête. Pourquoi une telle urgence ? Est-ce lié à moi, et si oui sous quel motif ? Ou bien est-ce en rapport avec Elie ? En quoi a-t-il besoin que je sois l'intermédiaire, dans ce cas ?

Je grogne de frustration et me laisse tomber sur le sofa. A mes côtés, Alpha pousse un petit gémissement, sensible à mon état de stress intense. Il s'est à peine couché sur le tapis que ses oreilles se dressent. Il a entendu quelqu'un. Un coup d'oeil par la baie vitrée plus tard, j'ai la confirmation qu'il s'agit bien de Cade. J'ouvre la porte alors qu'il est encore en train de gravir les marches du perron, un sourire chaleureux mais néanmoins un peu crispé étirant mes traits.

« Hey. Je t'en prie, entre. Je t'offre quelque chose à boire ? » Je l'interroge en le guidant jusqu'au salon communicant. Alpha est toujours là mais semble détendu. Je ne suis pas étonnée. ll sait qu'il n'a pas besoin d'être sur ses gardes. Bien qu'il n'ait jamais vu Cade, il connait son odeur, cette dernière étant régulièrement ramenée à la maison par Elie, puisque les deux hommes travaillent ensemble.

Mon regard ne quitte pas Cade. En tout état de cause, je devrais aussi et surtout lui demander ce qui l'amène.

Pourtant, je n'en fais rien. J'en suis incapable.


@Cade Grimes

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(with all the strength of a raging fire)

Gooze lève la main au passage du serveur. – Un autre pour lui. « Lui » c’est Cade Grimes. L’ agent fédéral des Etats-Unis déchu qui arbore sa tête des mauvais jours et ne s’était même pas rendu compte que son premier verre de la soirée était vide. Le jeune homme qui passait avec son plateau rond à la main hocha une fois de la tête et reprit son chemin vers le bar. – T’en a besoin ! Son ex collègue avait bien cerné la situation dans laquelle Grimes se trouvait. Ils se connaissaient bien pour avoir bossé ensemble plusieurs fois et bien qu’ils ne se confiaient jamais l’un à l’autre sur leurs histoires personnelles, le haussement de sourcils de Cade à la question « Ca va comme tu veux ? » de Gooze n’avait pas laissé de doutes. Non, il n’avait pas envie de rigoler et pourtant, il avait accepté de siroter un verre, se forçant à se bouger le train pour ne pas finir enraciné dans son modeste appartement de Redcliffe. Milena, sa sœur, n’avait même pas réussi à lui faire décrocher son téléphone, un soir où la pénombre avait vite ambiancé son salon. – Sur quoi tu bosses ? Mets moi l’eau à la bouche. Avait-il demandé à son ex collègue. Il fallait dire que son poste au sein du FBI lui manquait terriblement. Se jeter à corps perdu dans une enquête aurait pu lui faire oublier pas mal de ses tracas du moment… - Pas grand-chose d’extraordinaire. Des délurés qui trainent, la routine… Gooze porte son verre de vodka à ses lèvres et il n’eut pas le temps d’avaler sa gorgée. – Hm ! Si ! Y’a bien un truc qui nous a tous cloués dernièrement. Le serveur déposa un autre scotch devant Cade. – Le type, celui qui enlevait les gamines… Il est dehors. Ses yeux ronds trahirent son intérêt soudain. Si c’était l’enfoiré qui avait enlevé Quinn… - Ils l’ont relâché, ils ont vraiment rien dans le cibouleau… Cade revoyait la jeune femme alors que Gooze s’extasiait sur cette erreur de justice.

Il n’en savait que trop peu et pourtant, il termina son verre d’une traite en grimaçant sous le feu de l’alcool dans sa trachée et il se leva. – Quoi…tu te barres déjà ?!  Il le fallait. Il fallait qu’il en sache plus. – J’ai un truc urgent à faire. La main dans sa poche de jean pour en sortir son portefeuille, Cade n’eut pas le temps de déposer un billet sur la table. – C’est bon, c’est pour moi. Hey ! Si tu veux on s’fait une petite virée un de ces soirs… Les pensées déjà tournées vers Quinn et cette récente nouvelle qui n’allait forcément pas la réjouir, Grimes hocha de la tête. – Quand tu veux. Ca ne lui disait clairement rien pour l’instant, mais il n’allait pas l’offusquer.  

De retour chez lui, Cade ne retira même pas sa veste et fonça sur son ordinateur portable, posé négligemment sur la table basse. La lumière de l’écran illumina son visage inquiet jusqu’à ce qu’il tombe sur l’annonce fatidique. Il appuya son coude sur son genou et se passa la main sur la bouche, préoccupé. Il avait fait une promesse à Quinn. Celle-ci il comptait la tenir. Il se leva d’un coup et fit les cents pas dans son petit salon, le téléphone à l’oreille. Répondeur.

- Quinn, c’est Cade. Il faut qu’on se parle… assez vite ! Dis moi quand tu es chez toi.

Sa voix familière avait été un brin détaché, involontairement. Mais Cade savait trop bien ce qui risquait d’arriver et il était hors de question qu’il arrive quoi que ce soit à Quinn. Laissant ses soucis de côté, il se lança dans la lecture de plusieurs articles avant de recevoir enfin une réponse de la jeune femme.

Sans tarder, il grimpa dans sa voiture et arriva chez elle en quelques minutes. « Hey. Je t'en prie, entre. Je t'offre quelque chose à boire ? » Quinn est égale à elle-même. Souriante, disponible et elle dégage cette fraicheur qui faisait un bien fou à quiconque passait du temps avec elle. Cade avait monté les quelques marches sur le perron et sans s’arrêter, il franchit le seuil de la porte d’entrée. – Merci, ça ira. Il était ravit de la voir. Bien moins quand il repensait à la raison de sa visite. Il eut bien du mal à dissimuler cette gravité quand il se tourna vers elle sans même évoquer la décoration de son salon, ou la façon dont elle était coiffée. Un manque de légèreté qui devait lui mettre la puce à l’oreille. – Quinn je… J’ai pas de très bonnes nouvelles. Son ton hésitant allait de paire avec l’affection qu’il lui vouait. Lui annoncer que son bourreau était libre, c’était asséner un couteau dans une plaie encore sanglante.



@Quinn Callahan  

Je composais déjà du mieux que possible avec mon angoisse depuis son message vocal, mais maintenant que Cade se tient sur le pas de ma porte, je me sens sur le point de défaillir. Je dois combattre ces ténèbres qui me menacent et essayer de rester rationnelle. Après tout, je me fais peut-être du souci pour pas grand-chose. Et puis, quant à m'empêcher de me fracasser le crâne contre le sol suite à un malaise, l'ex agent du FBI a assez donné de sa personne. Alors, par pure politesse autant que par besoin vital de penser à autre chose que la raison de sa visite, je lui demande ce qu'il souhaite boire.

Sa réponse, son air indéchiffrable et son attitude en général me font l'effet d'un coup en pleine poitrine. Depuis quand Cade retient ses petits commentaires et ses rictus gentiment moqueurs, ceux-là même qui me font rire à chaque occasion ? Et depuis quand 'Ça ira' remplace-t-il 'Je prendrais bien une bonne bière' ? Je fronce les sourcils. Je perçois une nouvelle vague de stress monter en moi. Il y a définitivement quelque chose qui ne tourne pas rond, quelque chose de si important, de si primordial que Cade se voit obligé de passer en urgence à la maison afin de me l'annoncer.

Et puis, le couperet tombe.

« Quinn je… J’ai pas de très bonnes nouvelles. » Je fais mine d'avaler ma salive mais sans grand succès. Ma gorge est sèche comme du papier de verre. Mon regard trouve celui de Cade, une expression de biche capturée par les feux d'une voiture placardée sur mes traits. D'ailleurs, c'est précisément ce que je ressens à cet instant précis : je suis prise au piège, consciente qu'un événement terrible se prépare, un événement qu'il m'est impossible d'éviter.

Mes mains fébriles trouvent mes hanches. Je ferme les yeux, lève la tête et souffle un bon coup, reportant ensuite mon attention sur Cade. Ce n'est plus la peur qui m'enveloppe tout entière désormais, mais une indicible terreur. Car le dénominateur commun le plus flagrant, le plus incontestable entre lui et moi, n'est autre que l'homme qui partage ma vie.

« Dis-moi que ce n'est pas Elie. Dis-moi qu'il va bien. » Le ton de ma voix est à la limite de la supplication. Je sais que l'ancien SEAL est compétent et entraîné, qu'il peut faire face à de nombreuses situations, même les plus difficiles. Malgré cela, j'ai aussi conscience que son métier actuel n'est pas sans danger, loin de là. N'est-il pas supposé protéger ses clients au péril de sa propre vie ?

Mon esprit m'emmène dans un monde où la mission d'Elie de ce matin a mal tourné. Où il a été gravement blessé, où il se trouve actuellement entre la vie et la mort, voire pire. En tant que collaborateur, Cade aurait été le premier au courant. Par amitié pour Elie, pour moi, il aurait voulu m'annoncer la terrible nouvelle lui-même. Arrête. Arrête de te torturer.

Le temps s'écoule au ralenti. Chaque seconde dure une éternité.
Une éternité en Enfer.


@Cade Grimes

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UC




@Quinn Callahan  

Je ne me souviens pas avoir déjà ressenti un tel soulagement de toute mon existence. Je laisse échapper un profond soupir alors que chaque cellule de mon corps travaille à évacuer cette écrasante pression qui me maintenait immobile et me nouait les entrailles. Je revis et respire de nouveau, tel un nageur égaré remontant enfin à la surface après une dure lutte contre des eaux sombres et tumultueuses. Elie va bien. Il est hors de danger. Je laisse mon esprit me le rappeler autant de fois dont il a besoin jusqu'à ce que le cœur tambourinant dans ma poitrine reprenne un rythme normal.

Je lève les yeux sur Cade, étirant mes lèvres en un mince sourire, car encore empreint d'une vive terreur tout juste évanouie. Son expression, toujours grave et sérieuse, attise mon inquiétude. Puisque sa visite n'est pas liée à Elie, de quoi peut-il s'agir ? L'ex-agent du FBI s'avance vers moi avec précaution. On dirait presque qu'il sait à l'avance de quelle manière je vais réagir à son annonce, et d'emblée, mon subconscient me fait reculer d'autant de pas. Comme si le déni me submergeait avant même de savoir de quoi il retourne. Comme si échapper au messager me permettrait aussi d'échapper à son message.

Mais c'est peine perdue, et il ne faut rien de plus que trois mots, trois simples mots, pour faire effondrer tout mon univers.

« Il est sorti. » Il n'a pas besoin de me préciser qui est sorti, ni d'où. Alors il me livre plutôt les informations utiles : les réponses aux questions que j'aurais forcément posées une fois le choc maîtrisé. « Il a été relâché y’a quelques jours, j’ignore encore pourquoi. » Mon sang me bat les tempes. Les mâchoires serrées, incapable de soutenir le regard de Cade, je baisse le mien et le cloue au sol pendant que ma main droite serre le dossier du fauteuil le plus proche, m'offrant la stabilité dont je semble soudain cruellement manquer.

« Non. C'est impossible. » Je souffle. Qu'a-t-il bien pu se passer pour qu'un tel monstre sorte de prison ? Comment, après toutes les horreurs qu'il a commises, peut-il être autorisé à retrouver la liberté ? A-t-il fait appel afin de revenir sur son jugement, et s'octroyer une remise de peine pour bonne conduite derrière les barreaux ? Non. On ne la lui aurait jamais donnée. Pas dans ces circonstances. Pas pour de tels crimes. Vraiment ? « J’compte bien en savoir plus, et questionner quelques-uns de mes contacts chez les fédéraux… »

Je n'écoute déjà plus.

Tout se bouscule dans ma tête. Pourquoi Dennis Bryant a pu se soustraire à la justice, par quel moyen, où il est maintenant, les risques que je cours ou non, ce que j'ai vécu, les conséquences dramatiques de mon enlèvement. La façon dont il arrive encore à me définir, à me toucher, à me détruire de l'intérieur, à me faire avoir honte de vivre parfois, honte de mes actes au point de les cacher à l'homme qui partage ma vie. Puis, par-dessus ce chaos ambiant, une image s'impose, bien plus grande, bien plus brillante que le reste. Celle d'une petite fille au visage sale et fatigué, mais déterminé. Mary.

Je suis sur le point de défaillir. Deux paumes se posent tout doucement de chaque côté de mes épaules. Je sens la présence de Cade près de moi, et je m'y accroche aussi fort que je le peux, espérant que cela suffise à me sortir de cette spirale infernale. Une larme roule sur ma joue au moment où, face à ses mots, je décide de reporter mon attention sur lui. « Je n’le laisserai pas t’approcher. »  Va-t-il seulement essayer de le faire ? Tout ce que je sais, c'est que je ne peux pas nier cette possibilité.

Et ça me suffit amplement.

« Je te remercie, Cade. Sincèrement. Mais tu ne peux pas être avec moi H24. » Je tente de rassembler autant de courage que possible afin de cacher la peur dans le ton de ma voix. Qu'il ne reste rien d'autre qu'une assurance inébranlable. « Apprends-moi à me défendre. » Je serre les poings. « Je ne suis plus une enfant faible et fragile. Et je ne veux plus attendre que quelqu'un vienne me sauver dès qu'on s'en prend à moi. Je veux pouvoir compter sur moi-même, désormais. »

Je commence à faire les cent pas devant Cade. De l'autre côté de la pièce, Alpha a beau ne pas bouger, il continue d'observer la scène, ses oreilles pointées droit devant lui en signe d'intérêt, sûrement parce que sa maîtresse n'est pas dans son état normal. Et pour cause. Car plus les secondes s'égrènent et plus la crainte s'efface, laissant place à une colère sourde qui s'immisce partout en moi. « Je ne serai plus jamais une victime. » Je lance avec une force jusque-là insoupçonnée.

« J'ai besoin de toi, Cade. » Je reprends en me rapprochant de lui, le regard insistant et suppliant. Sans sa précieuse aide, mon plan sera tué dans l'œuf. « Je ne peux pas demander à Elie. Il ne doit rien savoir de tout ça. » J'ai conscience de lui en demander beaucoup, mais je n'ai pas le choix. « S'il apprend que Bryant est sorti, il le traquera et le tuera pour être certain qu'il ne puisse plus me faire de mal. » Je connais l'ancien SEAL par coeur : ça ne fait aucun doute. Il n'hésitera pas à recourir à une violence extrême si ça peut m'éviter un tel danger. Il a les compétences et les ressources. Rien ne l'arrêtera, pas même moi. Pas cette fois.

« Je t'en prie. » Je conclus dans un murmure, avec le fol espoir qu'il accepte.


@Cade Grimes

Spoiler:

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Cade aurait largement préféré que cette visite chez Quinn soit placée sous le signe de retrouvailles amicales enjouées et distrayantes. Il n’en était rien. Après tant d’années à bosser pour le bureau fédéral américain, il ne savait que trop bien comment réagissaient les victimes lorsqu’on leur annonçait que leurs bourreaux n’étaient pas, ou plus, derrière les barreaux. Dans le cas de Quinn, cette nouvelle était d’autant plus pénible qu’il connaissait son histoire et surtout parce qu’il avait tissé quelques liens avec elle. Outre le fait qu’elle soit la petite-amie de son collaborateur, la jeune femme lui était désormais familière et il s’en était rapproché assez rapidement quand il avait perçu sa sympathie et sa légèreté d’esprit malgré un lourd passé. Elle faisait partie de ces gens qui étaient entré dans sa vie et qu’il ne laisserait derrière pour rien au monde.

« Non. C'est impossible. » Sa voix est déjà prise d’angoisse. Quinn venait de réaliser. Et dans les yeux de Cade se lisait aussi cette inquiétude qu’il aurait pourtant voulu lui éviter. Apprendre à une jeune femme qu’elle n’était plus en sécurité parce qu’un taré pourrait à tout moment chercher à finir le boulot…voilà bien une mission qui ne lui plaisait pas mais qui s’avérait indispensable. Comme il le lui avait promis, l’ex agent fédéral ne la laisserait pas tomber ! Alors même qu’il tente de la rassurer et de lui démontrer son acharnement pour que la justice fasse machine arrière, Quinn semblait ailleurs. Comme complètement aspirée par cette crainte de devoir de nouveau vivre dans la peur. Il posa alors ses mains sur ses bras pour tenter de la faire revenir. « Je te remercie, Cade. Sincèrement. Mais tu ne peux pas être avec moi H24. » Certes non. Elle avait raison. Son regard figé sur elle cherchait une solution, un indice sur ce qu’il pouvait faire pour l’aider. Un silence accompagna ces quelques secondes et puis… « Apprends-moi à me défendre. » Non ! Il soupira à l’intérieur, se redressa légèrement et serra la mâchoire. Clairement, il ne voulait pas la transformer en une machine à vengeance. Car si elle mettait ça sur le compte de l’auto-défense, ce qui en ressortirait au vu de son passé serait bien plus sauvage si jamais elle devait se retrouver face à son agresseur. Quinn avait déjà vécu bien trop de choses pour se rajouter cette pression là sur les épaules. Et puis… elle lui semblait si pure qu’il était difficile de l’imaginer dans un contexte si violent. Pour peu qu’elle lui demande de lui enseigner quelques méthodes de tirs avec une arme à feu…« Je ne suis plus une enfant faible et fragile. Et je ne veux plus attendre que quelqu'un vienne me sauver dès qu'on s'en prend à moi. Je veux pouvoir compter sur moi-même, désormais. »

Ce cheminement de pensées était légitime bien que Cade n’approuve pas totalement. Et il était très courant. D’expérience, il savait que les victimes se laissaient couler jusqu’à la dépression, ou qu’elles réagissaient en réalisant qu’elles n’étaient soumises à aucun individu, et qu’elles existaient en tant qu’être humain. « Je ne serai plus jamais une victime. » Elle tente de s’en convaincre malgré la dangerosité de son bourreau. Grimes dévie le regard, hésitant. Il ne voulait pas être trop catégorique dans son refus. – J’suis pas sûr que ce soit une bonne idée… Posément, il venait de lui indiquer son avis. Outre le fait qu’il avait du mal à en faire son élève, que dirait Elie s’il apprenait ça ?! – J’ferai tout ce que j’peux pour que ce taré retourne en taule mais ne m’demande pas de te transformer en une espèce de Calamity Jane. Non. Surtout pas. Qu’elle ne lui demande pas de lui confier un revolver, ne serait-ce que pour s’entrainer sur une cible en papier ! « J'ai besoin de toi, Cade. Je ne peux pas demander à Elie. Il ne doit rien savoir de tout ça. » Cade avait bien du mal à comprendre pourquoi Elie, son supposé conjoint, devait rester aveugle à cette histoire. N’était-il pas sensé l’épauler ? Tout le monde a son petit jardin secret, même dans un couple, il était bien placé pour le savoir, mais Elie pouvait la protéger. « S'il apprend que Bryant est sorti, il le traquera et le tuera pour être certain qu'il ne puisse plus me faire de mal. » Alors c’était elle qui protégeait Elie d’un acte irrémédiable et condamnable – C’est peut-être moi qu’il tuera s’il apprend que je t’entraine à mettre un type de 90 kilos K.O. !  Toujours incertain sur cette question, Cade fit quelques pas dans le salon, observant la décoration sans trop y prêter plus d’attention. « Je t'en prie. » Ces supplications étaient insoutenables. Il avait pourtant juré de l’aider… Il s’arrêta et soupira. – Il est possible que Bryant ne cherche pas à te retrouver mais… il a interdiction de quitter le pays. Cette mesure finit de le faire plier. Il planta son regard vert sur Quinn. – Qu’est ce que tu veux exactement ? Ça le tuait au fond, mais il ne pouvait pas lui refuser.  




@Quinn Callahan  

Le temps a passé. Comme il le fait toujours. Et trois longues décennies se sont écoulées depuis mon enlèvement en cette froide matinée du mois de juin. Désormais, je ne suis plus cette petite tête blonde terrorisée qui se replie sur elle-même en espérant que le monstre de son histoire veuille bien la laisser tranquille pour quelques instants encore. Je ne suis plus cette enfant qui attend qu'on la rassure, qu'on sèche ses larmes, qu'on lui dise que tout ira bien. Mary était forte. Aujourd'hui, alors que Cade vient de bouleverser mon univers avec la pire des nouvelles, je dois honorer sa mémoire en étant au moins aussi forte qu'elle. C'est à mon tour de tenir tête à celui qui a initié toute cette tragédie. C'est à mon tour de le faire payer s'il ose recommencer.

Mais je ne peux pas le faire sans Cade. Je lui demande son aide, le regard plein de détresse autant que d'espoir. Il ne dissimule aucunement sa réserve : il ne pense pas que ce soit une bonne idée. Il préfère se concentrer sur le retour de Bryant derrière les barreaux, assurant qu'il n'a aucune envie de me transformer en une Calamity Jane de l'ère moderne. Si la situation n'était pas aussi sérieuse, aussi grave, j'aurais pu sourire à cette référence. Ce n'est évidemment pas ce que je cherche, mais quelque part, dans un coin de ma tête, je saisis ce qu'il veut dire par là.

Sauf que ce n'est pas suffisant pour m'arrêter. Sa mise en garde dissimulée me passe au-dessus. Car rien ne compte davantage à mes yeux que d'être capable de me protéger. Et de protéger Elie. Raison pour laquelle je ne peux rien lui dire et encore moins exiger de lui qu'il m'apprenne à me défendre. Je n'ai personne d'autre vers qui me tourner et je ne veux pas non plus mêler mon jumeau à cette histoire. Tel que je le connais, il s'empresserait de tout raconter à l'ancien SEAL et l'aiderait peut-être même à arrêter Bryant. Shane me trahirait sans ciller si c'est pour s'assurer qu'il ne m'arrive rien, et tant pis pour les conséquences. J'en suis convaincue, au plus profond de moi. Parce que si les rôles étaient inversés, je n'agirais pas différemment.

Cade est ma seule option, ma seule lueur d'espoir dans ces ténèbres à venir. J'ai besoin qu'il le comprenne, alors j'insiste, sans relâche. « C’est peut-être moi qu’il tuera s’il apprend que je t’entraine à mettre un type de 90 kilos K.O. ! » Je secoue vivement la tête. « Il n'en saura rien, je t'en fais la promesse. » Et même s'il devait l'apprendre, Cade ne risque aucune représailles. Je serais la première dire à Elie que j'ai pratiquement mis le couteau sous la gorge de son collaborateur. Je ne suis pas du genre à fuir mes responsabilités, quelles qu'elles soient. Ainsi, je le supplie, je l'espère, une dernière fois.

Il semble réfléchir, puis lâche. « Il est possible que Bryant ne cherche pas à te retrouver mais… il a interdiction de quitter le pays. » Je ne pensais pas que la situation pouvait être pire, et pourtant. Dennis Bryant a été libéré, malgré cela, il est obligé de rester en Australie. J'ai beau avoir conscience que le territoire est grand, ça ne sert pas à me rassurer. Au contraire. Cade doit lire la panique sur mes traits : il finit par abdiquer. « Qu’est ce que tu veux exactement ? » Il faut admettre que cette question me prend de court. Je veux pouvoir m'en sortir seule. Je veux pouvoir rendre d'éventuels coups sans attendre qu'on vienne me sauver. Mais dans la pratique, ça donne quoi ? Ce n'est pas comme si j'avais eu l'occasion d'y réfléchir…

Je hausse les épaules. « On peut peut-être commencer par les bases ? Est-ce que.. tu aurais un moment où je pourrais te rejoindre quelque part une heure ou deux, à quelques reprises, juste le temps pour moi de… d'apprendre ? » Ici, ce n'est pas possible, et j'imagine que Cade le sait. Les horaires d'Elie ne sont pas spécialement fixes, il peut partir ou revenir à n'importe quel moment. Sans compter la proximité du centre équestre - et on sait à quel point les rumeurs vont vite dans ce genre de communauté restreinte. Bien que Cade et moi ne fassions rien de répréhensible, je préfère jouer la prudence.

Je soupire, pose une paume sur son bras, et verrouille mes iris aux siens. « Je t'en demande beaucoup. » Je répète dans un souffle. « Je le sais. Et t'as pas idée de combien je te suis reconnaissante d'accepter. » Je laisse passer une seconde de silence. « Loin de moi l'idée de virer Calamity Jane. » J'esquisse un mince sourire : à mon tour de le rassurer sur mes intentions. « Tout ce que je veux, c'est être capable de résister au cas où il déciderait de s'en prendre encore à moi. Si je reste là, à ne rien faire, je vais devenir folle, Cade. Je ne peux pas passer ma vie à regarder par-dessus mon épaule et à angoisser dès que je suis seule. »

Et il n'y a qu'une seule et unique chose au monde capable de m'éviter une telle situation : m'endurcir, m'octroyer cette force dont j'ai été trop longtemps privée. Avec l'aide de Cade.


@Cade Grimes

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(with all the strength of a raging fire)

Cade était bien conscient que la nouvelle qu’il venait d’annoncer à Quinn était bien loin de la réjouir. Pire, il savait que ça allait l’anéantir alors qu’elle se croyait à l’abri de son agresseur pour plusieurs dizaines d’années à venir, si ce n’était pour toujours. C’était déjà un calvaire que de devoir lui annoncer ça et faire renaitre chez elle ce fort sentiment de crainte, alors ses jolis yeux brillants d’angoisse qui se posaient furtivement sur lui agissaient comme des coups de poignards. Il ne voyait plus Quinn seulement comme la petite fille, la victime d’un enlèvement atroce qui a ruiné une bonne partie de sa vie. Elle était désormais une amie qu’il avait envie de protéger et d’emmener loin de ce cauchemar pour l’éternité. Son sourire s’était évanouit depuis qu’il était entré chez elle, et l’inquiétude avait prit en otage chaque trait de son visage, et chacune de ses réactions. Cade était cependant loin de se douter qu’elle allait lui faire une demande bien spéciale…

« Il n'en saura rien, je t'en fais la promesse. » Comment diable Elie pouvait passer à côté des séances d’entrainement à l’auto-défense que sa petite-amie et son collaborateur prévoyaient de faire ? Et depuis quand la violence devait faire partie d’une personne aussi douce que Quinn ? Cade hésitait. Il comprenait son besoin de pouvoir se défendre, toujours était-il que ça impliquait de lui apprendre des méthodes agressives et de mentir à Elie. La combinaison ne rendait pas du tout Grimes serein, pourtant au fond de lui se cachait l’éventualité que Bryant se retrouve face à la jeune femme et que, sans quelques cours, elle ne pourrait pas faire le poids si le but de son agresseur était de finir le boulot… « Qu’est ce que tu veux exactement ? » Il cédait sans plus d’enthousiasme.

Face à Quinn, Cade ne saurait même pas par où commencer. Son passé était délicat et il ne voulait absolument pas modifier la personne qu’elle était. « On peut peut-être commencer par les bases ? Est-ce que.. tu aurais un moment où je pourrais te rejoindre quelque part une heure ou deux, à quelques reprises, juste le temps pour moi de… d'apprendre ? » C’était donc concret et définitif. Quinn en venait lui demander d’arranger des rendez-vous pour réellement apprendre à répliquer à une attaque physique. Il avait espéré une minute qu’elle fasse marche arrière en pensant que ce n’était finalement pas une si bonne idée. Il soupira très légèrement. – Y’a tout c’qui faut au centre, mais Elie peut passer n’importe quand… Autant dire qu’il fallait trouver un autre lieu plus tranquille. Cade n’en voyait qu’un. – Le mieux c’est que tu viennes chez moi. Il trouverait de quoi l’entrainer en ramenant du matériel du boulot, ou en utilisant coussins et oreillers pour ne pas qu’elle se blesse. Il s’en voudrait…de l’envoyer à l’hôpital, ou qu’elle subisse fatigue et blessure même superficielle. Il y a fort à parier qu’il reviendrait sur sa décision si cela arrivait.

En voyant sa réticence, Quinn soutient son regard. « Je t'en demande beaucoup. Je le sais. Et t'as pas idée de combien je te suis reconnaissante d'accepter.» Il acceptait pour l’aider. Mais elle ne serait clairement pas son élève préférée puisqu’il allait lui retirer une partie de l’innocence qui la caractérisait, certes à ses dépens, mais la fraicheur de Quinn était un côté qu’il appréciait beaucoup et qu’il ne voulait pas anéantir. Il baisse les yeux, s’en voulant aussi d’être la source de cette demande. « Tout ce que je veux, c'est être capable de résister au cas où il déciderait de s'en prendre encore à moi. Si je reste là, à ne rien faire, je vais devenir folle, Cade. Je ne peux pas passer ma vie à regarder par-dessus mon épaule et à angoisser dès que je suis seule. » Elle avait raison. Elle avait bien le droit de vouloir prendre sa vie en main. Et il serait là pour l’aider. Il redressa les yeux sur elle. – okay… souffla t-il doucement à son intention. -  Promets moi juste de ne rien faire de stupide…si jamais ta route croise la sienne. L’entrainement peut parfois laisser penser à certain que plus rien ne peut les atteindre. – Un mec comme lui, ça n’a pas de limites Quinn. Elle ne l’ignorait probablement pas, mais un couteau ou une autre arme mise à disposition d’un meurtrier pouvait facilement servir en cas de résistance en face. La jeune femme semblait confiante malgré tout, et décidée qui plus est. – Tu veux commencer quand ?  





@Quinn Callahan  

Les sourcils froncés, à mi-chemin entre le soulagement et la réflexion, je laisse mon esprit vagabonder dans tous les endroits que je connais, en recherche de celui qui saura nous accueillir sans éveiller le moindre soupçon. La maison que je partage avec Elie n'est absolument pas envisageable : son planning est bien trop aléatoire et il lui arrive régulièrement de devoir partir à la dernière minute comme, dans l'autre sens, de rentrer plus tôt que prévu. Quant au centre équestre situé juste à quelques pas d'ici, des dizaines de personnes se croisent à Riverside chaque jour. Impossible de ne pas être interrompus, ou simplement de rester discrets. Le lieu de travail de Cade ne me vient en tête qu'une demi-seconde : car il est aussi et surtout celui de l'ex-SEAL, l'homme qui ne doit jamais rien savoir de tout ça. Pour sa propre protection.

« Le mieux c’est que tu viennes chez moi. » Je plonge mon regard dans le sien, puis acquiesce doucement. Il a raison. Redcliffe n'est pas un quartier que j'ai l'habitude de côtoyer, sauf à de rares occasions. Personne ne viendra me chercher là-bas, et il y a peu de chances qu'on me reconnaisse. Dans le cas contraire, je trouverais toujours une excuse qui justifiera ma présence sur place. « D'accord. Si ça ne te gêne pas de ton côté, alors ça me va. Merci. » Ce n'est pas un mot en l'air. A nouveau, Cade me prouve que je peux compter sur lui, quelle que soit la situation. En réalité, dès notre rencontre, il s'est imposé en protecteur, en ange gardien. Depuis, il ne m'a pas laissée tomber. Pas une fois.

A l'époque, je n'ai rien eu besoin de lui dire. Mon prénom, mon visage vieilli de trente ans, mes traits cependant familiers, et ma réaction face au journal télévisé du matin ont suffi : il a su qui j'étais, ce que j'avais vécu. Je crois que, d'une certaine manière, cela nous a instantanément rapprochés. Je lui ai confié des choses sur l'enfer de cette cave, sur ce lien noué avec Mary, que je n'avais pu raconter à personne jusque-là, à l'exception de l'inspecteur responsable de cette affaire. Pas même à mes parents, pas même à Shane. Cade, compte tenu de son ancien métier, là-bas aux États-Unis, a eu mon dossier entre les mains - et ce n'est qu'un parmi d'autres. Il en a parcouru chaque détail au point de les connaître par cœur. Ainsi, j'ai tout de suite su qu'il me comprendrait.

Comme il me comprend aujourd'hui encore. Cette envie de pouvoir me défendre, maintenant que le danger est redevenu réel, presque palpable. Cette nécessité de me prendre en main, de ne plus me sentir victime. « Promets moi juste de ne rien faire de stupide… si jamais ta route croise la sienne. Un mec comme lui, ça n’a pas de limites Quinn. » A-t-il peur que je devienne trop confiante ? J'imagine que c'est légitime. Il sait de quoi il parle : c'est lui, l'expert sur le sujet. « Je sais. Je te le promets. » Je lui assure, appuyant mes paroles d'un vif hochement de tête. J'ai dit adieu à ma tranquillité d'esprit à l'instant où j'ai su pourquoi Cade est venu me voir. Mais avec son aide, peut-être serais-je capable de la retrouver… un peu. Je ne souhaite rien de plus. Rien d'autre.

Le silence nous entoure et les mains sur les hanches, j'essaie de rassembler mes pensées, de les ordonner. La voix de Cade me parvient. « Tu veux commencer quand ? » J'ai entendu sa question, mais je décide de ne pas répondre directement. « Tu sais quoi ? Assieds-toi, je vais nous chercher ces bières. On en a bien besoin, je crois. » Je ne lui laisse pas l'occasion de réagir que je me hâte d'ores et déjà de rejoindre la cuisine, Alpha derrière moi, laissant mon invité au salon. Je m'empresse d'attraper les deux boissons fraîches, de les décapsuler, et de retourner auprès de Cade. J'ai envie de m'effondrer pourtant, je fais bonne figure. Il le faut. Je n'aurais pas le choix, face à Elie.

« Ce serait bien qu'on commence dès que possible. Tu me diras quand ça t'arrange. » Je m'installe à ses côtés après lui avoir tendu sa bouteille de Carlton Draught. « Tu peux me prévenir même à la dernière minute, je saurais me débrouiller. » L'un des avantages à être sa propre patronne : je ne dépends d'aucun chef. Je peux donc m'éclipser du centre équestre pour une raison ou une autre sans que ça ne choque mes collaborateurs. Au final, c'est mieux si je m'adapte à l'emploi du temps de Cade plutôt que l'inverse. Et ce n'est que normal : loin de moi l'idée de lui créer des problèmes.

« Merci d'avoir gardé un œil sur lui… et de m'avoir prévenue. » Je préfère savoir que Bryant n'est plus derrière les barreaux, même si cette vérité est lourde de conséquences. « Tu crois que ton contact pourra te dire comment sa libération a été possible ? » Je l'interroge après une première gorgée douce-amère. Et ce n'est malheureusement pas l'unique élément qui me pose problème. « J'espère que les médias n'en parleront pas. Si Elie devait tomber sur l'info… » Je laisse flotter la fin de cette phrase dans l'air, avant de reprendre. « Tu le connais, maintenant. Tu sais que c'est quelqu'un de bien. Mais il reste sanguin de caractère, et rien ne compte davantage à ses yeux que la sécurité des gens qu'il aime. J'ai peur de ce qu'il pourrait faire en sachant Bryant juste là, dehors, capable de s'en prendre à moi s'il le décidait. » Et ça, ça me terrorise plus que tout le reste. Plus que de me retrouver une nouvelle fois à la merci de mon agresseur.


@Cade Grimes

Show me how

(with all the strength of a raging fire)

Bien qu'il soit encore en partie réticent à l'idée de donner des cours d'auto-défense à Quinn, c'était tout naturellement que Cade lui proposait de programmer ces quelques séances chez lui, dans son modeste appartement de Redcliffe. Il n'y avait pas beaucoup de place mais il veillerait à ce qu'elle ait tous les moyens nécessaires pour apprendre les gestes essentiels à la protection de soi-même. Il aménagerait son salon pour qu'elle puisse s'y déplacer aisément. Il se servirait de coussins et de couvertures s'il fallait sécuriser l'espace. Maintenant qu'il lui avait répondu par l'affirmative, l'ex agent fédéral ne se voyait pas revenir sur cette décision. Dans les yeux de Quinn se lisait cet espoir certain qu'elle mettait sur lui et sur les notions qu'il lui apprendrait et comme depuis qu'ils s'étaient rencontrés, il ne voulait pas la décevoir. « D'accord. Si ça ne te gêne pas de ton côté, alors ça me va. Merci. » Grimes hocha simplement de la tête pour lui confirmer le lieu de leurs futurs rendez-vous. Il n'avait encore aucun programme en tête, s'imaginant que la jeune femme devrait lui en dire plus sur ce qu'elle voulait apprendre...ils avaient le temps de voir tout ça.

« Promets moi juste de ne rien faire de stupide… si jamais ta route croise la sienne. Un mec comme lui, ça n’a pas de limites Quinn. » Il les connaissait malheureusement trop bien, les types comme lui... Ceux qui ont un problème psychologique qui affecte, voire anéantie la vie de pauvre gens qui n'ont rien demandé. Il revoyait le visage jeune et angélique de la petite Quinn sur la photo que les médias diffusaient en boucle à l'époque, et c'était tellement dur d'imaginer l'enfer qu'elle avait du vivre, et qu'elle craignait encore. C'était pour ça que Cade avait choisit d'entrer au FBI a l'époque. Pour venir en aide. Mettre ses tripes sur un dossier pour venger les petites Quinn Callahan. Et si maintenant elle avait bien grandit, il ne la lâcherait pas pour autant. Bien au contraire. « Je sais. Je te le promets. » lui assura t-elle presque déterminée. Grimes la regarde, souhaitant vivement que son quotidien ne soit pas largement modifié par cette nouvelle qu'il était venu lui annoncer. Une jolie jeune femme comme elle devait vivre comme elle l'entendait sans avoir à se retourner à chaque coin de rue, c'était impensable.

« Tu veux commencer quand ? » Loin de lui l'envie de la brusquer, mais il fallait tout de même qu'ils prévoient pour que Cade puisse se rendre disponible, tout en passant à travers les questions de son collaborateur. « Tu sais quoi ? Assieds-toi, je vais nous chercher ces bières. On en a bien besoin, je crois. » C'était sans doute trop concret...elle détourna la conversation et disparue dans la cuisine. Cade fit un pas dans sa direction et puis, elle revint rapidement avec deux bières à la main. « Ce serait bien qu'on commence dès que possible. Tu me diras quand ça t'arrange. » Après avoir attrapé la bouteille, il vint s'asseoir en constatant qu'elle n'avait pas encore changé d'avis. « Tu peux me prévenir même à la dernière minute, je saurais me débrouiller. » Il était vrai que Cade n'était pas très souvent chez lui, mais il saurait trouver du temps pour Quinn. Bryant était déjà dehors, le plus tôt serait donc le mieux. - Je t’appellerai. Impossible de lui donner un créneau tout de suite mais il réfléchissait déjà à la voir en soirée. Ce serait plus discret et leur éviterait sans doute de devoir trouver des excuses rocambolesques pendant la journée. Cade engloutit une première grande gorgée de sa bière...

« Merci d'avoir gardé un œil sur lui… et de m'avoir prévenue. » L'ex agent fédéral baissa la tête sur l'étiquette de sa bouteille en ruminant. Il aurait nettement préféré ne pas avoir à lui rendre visite pour lui apprendre la sortie de son ravisseur. - C'est pas de gaieté de cœur, j'aurai voulu t'éviter cette visite. Il redressa les yeux sur elle, avec un air sérieux sur le visage. « Tu crois que ton contact pourra te dire comment sa libération a été possible ? » Il y avait peu de chances qu'il ait d'autres détails. En se pinçant brièvement les lèvres de frustration, il lui répondit avant de prendre une deuxième gorgée. - C'est peu probable. J'suis une sorte de paria, les gars sont un peu méfiants. Mais Cade Grimes arrivait bien souvent à ce qu'il voulait. Il avala lentement et reprit. - A moins que j'aille fourrer mon nez dans les dossiers, j'imagine qu'ils ne diront rien. Quinn en vint à évoquer Elie et cette ressemblance de caractère qui était évidente entre Cade et lui. Cette impulsivité et cet acharnement à protéger son entourage. Les deux hommes avaient de nombreux points communs et l'américain se mit alors à la place de son collaborateur. Comment réagirait-il si sa petite amie lui cachait une chose pareille ?! Il péterait un plomb ! « Tu le connais, maintenant. Tu sais que c'est quelqu'un de bien. Mais il reste sanguin de caractère, et rien ne compte davantage à ses yeux que la sécurité des gens qu'il aime. J'ai peur de ce qu'il pourrait faire en sachant Bryant juste là, dehors, capable de s'en prendre à moi s'il le décidait. » Il péterait un plomb et il ne manquerait pas d'aller trouver l'enfoiré quoi qu'il lui en coûte. Cade haussa les sourcils. C'était évident qu'Elie ferait la même chose. Il était fou de Quinn. - Ouais... J'le connais. Et je sais qu'il sera au courant un moment ou un autre. Il plongea son regard dans celui de la jeune femme. - Quinn, t'arriveras pas à lui cacher ça très longtemps...Les médias en parleront oui, mais l'attitude de Quinn jouerait son rôle aussi. - Il est dingue de toi, il va vite voir que quelque chose ne va pas. A moins qu'elle ne dégaine un Poker Face du tonnerre, Cade se doutait qu'Elie ne resterait pas dans l'ignorance pendant des mois...





@Quinn Callahan  

Nos boissons fraîches en main, je propose à Cade d'organiser nos séances en fonction de son propre emploi du temps, le mien restant plus facilement modifiable, même à la dernière minute. Ainsi, il me préviendra quand il sera disponible et ce sera à moi de m'arranger pour honorer notre rendez-vous. Je trouve que c'est la moindre des choses, et il semble approuver ce fonctionnement. « Je t’appellerai. » J'acquiesce, satisfaite. Je sais que ce ne sont pas des mots en l'air destinés à mettre un terme à la conversation, et que je n'aurais pas besoin de lui remémorer son engagement. Malgré ses réticences - légitimes - que je peux percevoir vis-à-vis de la situation et de la manière dont je décide de la gérer, Cade m'aidera. Il tiendra sa promesse, comme il l'a toujours fait. Lors de notre rencontre, sa récente mise à pied par le FBI ne l'a pas empêché de me jurer qu'il ferait surveiller Bryant et qu'il m'informerait du moindre changement. N'est-ce pas la raison de son appel si pressant et de sa venue ici cette après-midi ? Ne vient-il pas de me prouver une fois encore que je peux lui faire confiance ? Alors non, je ne suis pas inquiète. Je n'ai aucune raison de douter de lui.

Je le remercie d'être là pour moi, de ne pas m'avoir laissée tomber. « C'est pas de gaieté de cœur, j'aurai voulu t'éviter cette visite. » Son air est sombre. Son implication et sa sollicitude me touchent au plus haut point. Il se sent concerné. Parce que je suis devenue, à ses yeux, davantage qu'une inconnue dont il a lu la sombre histoire d'enlèvement sur des feuilles de papier, de longues années plus tôt. Aujourd'hui, il me connaît vraiment. Aujourd'hui, nous sommes amis. Je lâche un soupir, les sourcils froncés, avant de poser une paume sur son avant-bras. « Je sais. » Je lui réponds simplement, presque en un murmure. « Mais je préfère savoir qu'il a été relâché. » Je ne regrette pas ce choix. Même si c'est aussi douloureux que terrifiant. « Et je n'aurais pas voulu l'apprendre d'une autre façon. » Qui sait comment j'aurais réagi, face à un média quelconque dans un lieu public, entourée d'étrangers ? Ou bien complètement seule, sans personne près de moi à l'instant T capable de me soutenir, de m'empêcher de sombrer ?

En tous les cas, mes pensées sont tournées vers Mary. J'ai mal au cœur de me dire que justice n'a finalement pas été rendue. Bryant était sensé rester derrière les barreaux jusqu'à la fin de sa misérable existence, sans possibilité d'appel, sans espoir d'obtenir la moindre réduction de peine. Quand j'imaginais l'ex-agent fédéral me donner des nouvelles de ce monstre, j'entrevoyais quelque chose d'autre, à mille lieues d'une liberté retrouvée. Je réalise que savoir ce qui s'est passé m'est nécessaire. Cade a-t-il le moyen d'obtenir cette information ? « C'est peu probable. J'suis une sorte de paria, les gars sont un peu méfiants. » Ça me désole de l'entendre. Il ne devrait pas l'être. Il ne mérite pas de l'être. « A moins que j'aille fourrer mon nez dans les dossiers, j'imagine qu'ils ne diront rien. » Fouiller dans les dossiers ? Il ne fait plus partie du Bureau. Je ne crois pas me tromper en songeant qu'il a sûrement perdu cette autorisation. Et il est hors de question que je lui fasse courir le moindre risque. « Alors laisse tomber. Au final, ça n'a aucune importance. » J'essaie de me montrer convaincante. Il me faudra du temps mais j'espère, un jour, accepter de ne jamais avoir la réponse à cette question.

Sauf si les journalistes s'emparent de l'affaire, et qu'au moins l'un d'entre eux se donne pour mission de découvrir la vérité, coûte que coûte. C'est ce qui me donne un brin d'espoir d'un côté, et me fait peur de l'autre. J'ai beau vouloir dissimuler la réalité à Elie, ça ne dépend pas exclusivement de moi. Surtout que Cade en est persuadé : il le saura, tôt ou tard. Et sans doute plus tôt que tard. « Quinn, t'arriveras pas à lui cacher ça très longtemps. Il est dingue de toi – » Mon regard s'éclaire et un sourire vient étirer mes lèvres. « – il va vite voir que quelque chose ne va pas. » Une grimace contrite remplace très vite mon air béat. « T'as raison… Même si je savais mentir, il finirait par comprendre. » Il est observateur, perspicace. Et un ancien SEAL. « Il faut juste que… je fasse le point, que je réfléchisse à ce que je vais lui dire. » Je vais devoir peser chacun de mes mots, si je veux qu'il évite de prendre la pire des décisions. Celle qui risquerait de tout lui coûter.

Cade et moi discutons une poignée de minutes tout en partageant notre bière, abordant des sujets généraux, moins lourds de conséquences. Puis, sur la dernière gorgée, je lance un coup d'œil en face de moi, à travers la grande baie vitrée du salon. La journée est belle, en parfait contraste avec la tempête qui fait rage dans mon esprit. Et soudain, je sais exactement ce qu'il me faut. Ma bulle. Black est au paddock mais brossé. Je peux être sur place dans moins d'une heure si j'arrive à me faire discrète, à récupérer et harnacher mon cheval sans me faire interpeller par un client au passage. « Je crois que je vais sortir faire une balade. Me vider la tête. Prendre un peu de recul. » Cade me regarde avec une certaine intensité. Je devine aisément l'objet de son appréhension : peut-il me laisser seule après ce qu'il vient de me dire ? Après que mon monde se soit transformé en un chaos sans nom ? « Ça va aller. » Je le rassure aussitôt, avec douceur et maîtrise.

Je le raccompagne sur le porche de la maison. « J'attends ton appel. Et Cade… Merci pour tout. J'ai beaucoup de chance de t'avoir à mes côtés. » Je pourrais ajouter que je lui dois une fière chandelle - et c'est l'euphémisme du siècle. Que s'il a besoin de quoi que ce soit, je serai là. Pourtant, je n'en fais rien. Il le sait déjà. C'était le cas avant sa visite, et celle-ci n'a rien changé, si ce n'est que je lui suis d'autant plus redevable…

---- SUJET TERMINÉ ----

@Cade Grimes