C’est un jour particulier aujourd’hui. Je dois passer mon après-midi à l’hôpital déguisée en princesse. J’adore ces moments, j’aime être capable de faire apparaître un sourire sur le visage de ces enfants malades. La vie a déjà été bien assez dure avec eux, et pourtant, ce sont généralement les personnes les plus souriantes de la planète. Mon costume est en place, je me transforme en Anna de la reine des neiges et j’essaie d’avoir un sourire bienveillant, je me dois d’être la personne la plus positive sur terre, en espérant que toute cette joie leur permette de combattre ces foutues maladies qu’ils ne méritent pas.

Une chambre, puis deux, je ne vois pas le temps passer. Je souris, j’essaie de chanter et de danser comme je le peux, même si je ne suis pas très douée. A vrai dire, je trouve que je ressemble assez à la vraie princesse Anna. Je suis simple, maladroite et j’essaie d’être amusante, c’est pour ça que j’ai décidé de l’incarner, je n’ai pas besoin de faire beaucoup d’efforts pour devenir ce personnage que j’aime beaucoup. Je connais quelques accords de guitare alors je joue un peu, je leur donne des coloriages et joue aux cartes. Ils m’occupent l’esprit, et tout ça m’empêche de penser à tout ce qui s’est passé avec Trent. Comment c’est possible de se sentir bien avec quelqu’un pour ensuite se rendre compte qu’on ne devrait même pas être en contact ? J’ai déjà assez souffert de toutes ces histoires avec Léo, je ne veux pas remettre les pieds dans les choses compliquées.

Pourtant, je tourne la tête, et je vois ce sourire. Le même qu’au refuge et qu’à la caserne. Comment il peut être encore ici ? Je vais finir par croire que c’est le destin qui décide de nous réunir au moment où je m’y attends le moins. Je souris, et je me souviens que je suis en robe de princesse avec un maquillage assez ridicule. Je suis soudainement gênée alors je rigole nerveusement et mes yeux se plantent sur mes pieds. Sans que je ne m’en rende compte, je finis par m’avancer vers lui. “Qu’est que tu fais ici ?”


@Trent Higgins

Le transport à l’hôpital se fait dans le calme. La gamine qui s’est évanouie pendant son cours de gym semble être hors de danger, bien qu’elle soit un peu pâle. Tu continues de t’assurer que ses signes vitaux restent dans la norme alors que Laura conduit l’ambulance jusqu’au St-Vincent. Tes pensées virevoltent d’un sens et de l’autre alors que vous empruntez ce chemin que tu connais par cœur à force de le faire depuis longtemps déjà. Tu as beau être le petit nouveau au sein de l’équipe du centre-ville, tu connais Brisbane par cœur et tu as souvent travaillé en remplacement, ce n’est rien de complètement nouveau pour toi. La gamine étendue sur la civière ne semble pas trop paniquée et tu lui offres un sourire réconfortant alors que tes pensées se trouvent pourtant bien loin de ce qui se passe dans cette ambulance. Tu ne pourrais te l’expliquer, mais tu ne cesses de penser à Molly. Tu ne devrais pas, tu le sais après tout. Depuis que vous avez compris ce qui vous lie indirectement l’un à l’autre, tu sais que le mieux que tu puisses faire pour te préserver, pour préserver un certain équilibre toujours bien trop précaire dans ta vie, c’est de ne pas te rapprocher d’elle. Tu le sais et pourtant, dès que le transfert de la gamine est terminé et que la paperasse est remplie, plutôt que de prendre le chemin pour le stationnement de l’hôpital, tes pas te guident dans la direction opposée ce que Laura remarque aussi. « Higgs, où tu vas? » « J’reviens, ce sera pas long. » Elle scande ton nom une deuxième fois, mais tu ne l’écoutes déjà plus alors que tu changes d’étage pour te rendre là où tu sais que se trouve l’aile pédiatrique de l’hôpital.

Tu ne sais pas trop ce que tu espères, Molly t’a dit qu’elle travaillait majoritairement au refuge et que le bénévolat ne remplissait son temps libre qu’une fois de temps en temps. Ce serait vraiment un gros coup de chance qu’elle se trouve ici alors que tu passes dans le coin, par le plus grand des hasards qui en réalité, n’a absolument rien d’un hasard. Ton regard se perd ici et là, dans les chambres des petits patients. Tu aperçois ce que tu devines être une autre bénévole déguisée sous les traits de Belle, de la Belle et la Bête qui lit une histoire à un petit groupe d’enfants qui sont tous émerveillés et étonnamment attentifs à tous les mots qui quittent ses lèvres. Tu t’es arrêté sans même le réaliser pour écouter l’histoire, tu sais que les jumeaux adoreraient l’entendre avec toute l’expression et le cœur qu’elle met dans son interprétation du conte pour enfants. Toi, tu peines à enligner les mots correctement et tu es loin d’avoir une interprétation hors pair quand tu prends les voix des princesses, mais ça semble assez bon pour que Aaron demande sans cesse que tu recommences en riant. C’est seulement quand Belle remarque que tu l’écoutes que tu te remets en marche et au moment même que tu te tournes, ton regard se pose sur Molly qui est vêtue d’une longue robe verte, celle de la princesse Anna de la Reine des Neiges. Tu lui souris quand son regard croise le tien et elle finit par s’approcher de toi. « Qu’est-ce que tu fais ici? » « J’écoutais l’histoire de la Belle et la Bête. » Tu pointes la princesse à quelques mètres de là et tu échappes un rire. « On vient de faire le transport d’une petite fille aux urgences et je voulais voir si elle était correcte. » Menteur. Elle est probablement encore aux urgences la gamine, à l’autre bout de l’hôpital. Mais tu n’allais quand même pas lui dire que t’avais envie de la voir elle, pas vrai? Ce ne serait pas raisonnable. « Tu fais une très jolie princesse Anna. » Parce que ça, c’est raisonnable de le dire peut-être? « Comment tu vas? »

J’ai besoin d’être occupée pour m’empêcher de penser. Si je ne me fatigue pas à courir partout dans la journée, je me retrouve à avoir le cerveau qui tourne à mille à l’heure quand je suis seule dans ma chambre. Je pense à tout ce qui m’entoure, à mes échecs amoureux, au travail, à ma famille et à Jack qui a disparu de la circulation, et depuis quelque temps, mes pensées sont accaparées par un homme auquel je ne devrais pas penser. Un que je devrais oublier, laisser filer, c’est ce qu’il y a de mieux à faire quand on sait quelles personnes font partie de son entourage. Je ne peux plus le voir, je n’ai pas le droit d’y penser en ayant un sourire niais ancré sur le visage. Je n’ai pas le droit de faire le dit sourire en croisant son regard au service pédiatrie de l’hôpital alors que je suis habillée en princesse. Et encore une fois, mon cerveau s’éteint. Encore une fois, mon corps et mon coeur n’en font qu’à leur tête. Pourquoi est ce que ma vie doit toujours finir par être compliquée ? Ce n’est pas ça que je veux. Je veux une famille, une histoire belle et simple, je veux être comblée et heureuse, est ce que c’est vraiment trop demandé ? Plus le temps passe, plus j’ai du mal à être positive et à croire en l’âme soeur. Je finis pas me dire que je suis trop idéaliste et qu’à cause de ça je finirai par vivre avec tous les animaux du refuge, pour pouvoir leur donner tout l’amour que je ne peux pas donner à un être humain qui voudrait partager cette vie.

« J’écoutais l’histoire de la Belle et la Bête. » Je fais un signe de la main à ma collègue princesse et toute mon attention est de nouveau accaparée par le brun debout devant moi. Je continue de me compliquer la vie en regardant ses yeux et chaque trait de son visage. Je secoue la tête afin de me concentrer à nouveau sur la conversation, c’est mieux ainsi. « On vient de faire le transport d’une petite fille aux urgences et je voulais voir si elle était correcte. » “Oh rien de grave j’espère !” Je n’aime pas quand il y a petite fille et urgence dans la même phrase, je ne peux pas m’empêcher de m’imaginer le pire scénario. « Tu fais une très jolie princesse Anna. » Je rougis, bien sûr que tout mon corps réagit à ce compliment. Je déglutis et mon sourire s’agrandit un peu plus. “Je pense surtout que face à un adulte je dois avoir l’air un peu ridicule !” Je ris et je hausse les épaules. Difficile d’avoir une conversation sérieuse avec la princesse la plus joyeuse et amusante de Disney. « Comment tu vas? » Comment je vais ? Je ne cesse de penser à toi et à toutes ces rencontres arrivées par hasard, je ne peux pas quitter les yeux de ce sourire que je commence à trop bien connaître, je suis désespérée à l’idée qu’encore une fois, je doive me séparer d’une personne que j’aimais bien. Mais on n’est pas obligé d’arrêter de discuter tout de suite pas vrai ? Je peux rester encore à l’écouter au milieu de ce couloir, juste encore un peu, et après, on ne se verra plus jamais. Pourquoi est ce qu’on se reverrait de toute manière ? Tout ça n’est que le fruit du hasard, et un jour, il arrêtera sûrement de nous réunir. Même si je me surprends à espérer que ça ne soit pas vraiment le cas. “Je vais plutôt bien, je suis pas encore morte de fatigue donc c’est que je peux continuer à courir partout !” Je croise les bras sur ma poitrine d’un air déterminé. “Tu as fini ta journée de travail ?” Qu’est ce que tu cherches à faire Molly ? “Je vais sûrement devoir aller lire une ou deux histoires et chanter quelques chansons dans plusieurs chambres encore !” Je fais la conversation, et je sais qu’au fond de moi j’aimerais qu’il me dise que sa journée est terminée et qu’il est venu là pour me voir et qu’on passe du temps ensemble, mais j’ai dit qu’il fallait que j’arrête de me faire ce genre de films, alors, j’essaie de rester amicale, jusqu’à ce qu’il me dise qu’il doit partir et que je n’ai plus jamais la chance de croiser un aussi beau sourire.

Laura va s’impatienter d’une minute à l’autre et t’appeler pour te demander ce que tu fais. C’était con, de partir comme ça, sans même lui dire où tu allais. Elle va ronchonner quand tu vas décrocher et elle va te faire la menace de partir sans toi pour retourner à la caserne, et tu vas avoir l’air d’un con à errer dans les couloirs de l’hôpital sans jamais poser les yeux sur la jeune femme que tu espères pourtant voir, celle que tu ne devrais pas vouloir croiser, mais qui se fait toujours un chemin dans ton esprit même quand tu te l’interdis. C’est idiot et pourtant, la vie semble être de ton côté quand elle apparaît dans ton champ de vision sans que tu n’aies besoin de la chercher bien longtemps. Elle te sourit et tu ne penses plus à rien d’autre. Tu oublies que c’est compliqué, qu’elle est l’ex-femme de Léo, que Charlie trouverait ça sûrement plus qu’ironique que tu aies un faible pour elle alors que tu jures ne pas vouloir t’attacher à qui que ce soit depuis la naissance des jumeaux. Ça été chaotique tellement longtemps avec la blonde que t’en as presque oublié que tu avais le droit. Le droit de passer à autre chose. Le droit de t’ouvrir à une possibilité nouvelle. Après Kim, après Charlie, faut dire que tu es sur tes gardes, avec raison. Et comme un con, tu te retrouves à penser à la seule fille de tout Brisbane qui est trop étroitement lié à ton passé amoureux. Good job Higgins. « Oh rien de grave j’espère! » Tu secoues la tête, peut-être que tu aurais été mieux de lui dire la vérité tout compte fait. « Non, non, juste un petit malaise à l’école. Elle devrait pas rester longtemps dans les parages. » Et toi non plus Trent. Va-t’en avant de dire ou de faire quelque chose de déplacer.

Tu restes cloué sur place toutefois, à admirer Molly dans sa robe de princesse, avec ses deux tresses qui tombent de chaque côté de son visage. « Je pense surtout que face à un adulte je dois avoir l’air un peu ridicule! » « Pas du tout. » que tu la rassures aussitôt, parce que tu ne trouves pas qu’elle a l’air ridicule, au contraire. Tu la trouves belle, terriblement belle dans toute cette simplicité qu’elle dégage, le rose qui lui monte aux joues et ses yeux qui brillent. Tu ne l’as pas encore vu auprès des enfants, mais juste de la voir là comme ça devant toi, tu sais d’avance qu’elle se plaît dans ce qu’elle fait ici. « Siobhan adore la Reine des Neiges, elle serait très impressionnée de te rencontrer je pense. » Oh Higgs, pense pas comme ça. Fais pas ça. Tu secoues la tête, te force à ne pas te faire des scénarios où la jeune femme pourrait se retrouver en présence de tes jumeaux. C’est la pire des idées et surtout, c’est la pire des tortures que d’aller contre tous ces scénarios qui se créent bien trop facilement dans ton esprit.  « Je vais plutôt bien, je suis pas encore morte de fatigue donc c’est que je peux continuer de courir partout. » Tu échappes un rire. Elle n’arrête donc jamais, un peu comme toi. « Tu as fini ta journée de travail? » Tu secoues la tête et puis tu jettes un coup d’œil à ton téléphone. Étonnamment, tu n’as pas encore d’appel manqué de la part de Laura, pas même un message d’insulte qui te demande ce que tu es en train de faire. « Il me reste encore une heure. Ma partenaire m’attend aux urgences. » que tu lui avoues. Tu devrais partir, lui dire que c’était un plaisir de la croiser et t’en tenir à ça. Tu devrais, mais tu ne le fais pas. « Je vais sûrement devoir aller lire une ou deux histoires et chanter quelques chansons dans plusieurs chambres encore! » Elle doit filer, et toi aussi. Le timing est pourri, tu te retrouves pressé et pendant quelques secondes, tu arrêtes de penser. « Ma sœur s’occupe des jumeaux ce soir, est-ce que ça te dirait d’aller manger un morceau après ta journée? » C’est à l’opposé de tout ce que tu t’es dit que tu ferais, et pourtant, tu n’as pas pu t’en empêcher. « Entre amis. » Molly n’est pas ton amie, elle ne devrait pas l’être, ni devenir quoique ce soit d’autre. Oh well. Tu lui offres un sourire nerveux et vient mettre tes mains dans tes poches. « Y’a un nouveau bistro à quelques rues de la caserne que j’ai bien envie d’essayer. » Et j’ai envie de te revoir. Et pas juste de te croiser ici et là. Juste pour une soirée.

« Non, non, juste un petit malaise à l’école. Elle devrait pas rester longtemps dans les parages. » Rassurée, je hoche la tête et ne demande pas plus de détails. Je n’ai pas vraiment envie de m’inquiéter plus que ça, je suis déjà au milieu des enfants malades depuis le début de l’après-midi, et il y a des jours où ça peut être un peu plus compliqué que d’autres.

Je suis encore en tenue de princesse, il y a toujours des enfants qui ont besoin de moi quelque part alors je ne peux pas me changer, même si je me sens un peu ridicule face à Trent. « Pas du tout. » Je souris encore sans même le remarquer, il est spécial, je le sens au fond de moi, mais je n’ai pas le droit de ressentir quoi que ce soit pour lui, ça se terminerait forcément mal pour mon coeur. « Siobhan adore la Reine des Neiges, elle serait très impressionnée de te rencontrer je pense. » “J’en serais ravie !” Oh que tu parles trop vite Molly. Ce n’est qu’après cette réponse que je me rends compte que ce n’est peut-être pas une aussi bonne idée que ça. Je n’ai jamais eu l’occasion de parler ou de voir les jumeaux de trop près. Mais l’idée de passer du temps avec Trent me séduit bien plus que ça ne le devrait. Pourquoi je n’arrive jamais à écouter ma tête dans ce genre de moments ? « Il me reste encore une heure. Ma partenaire m’attend aux urgences. » Je suis un peu déçue, je me dis qu’il aurait pu m’accompagner s’il sa journée avait été terminée. On ne va pas se voir longtemps, et ça me rend un peu triste. Mais ça, je le garde pour moi. “Oh tu devrais pas trop tarder ici, si quelqu’un a besoin de toi c’est la priorité.” Je ne suis pas une de ses priorités, loin de là, et je ne comprends pas ce qu’il fait ici alors qu’il doit travailler en bas. Est ce qu’il serait venu seulement pour voir si j’étais là ? Non, certainement pas. Pourquoi est ce qu’il aurait fait une chose pareille ? Je ne suis rien d’autre pour lui que l’ex femme du nouveau mari de son ex.

Il y a un petit silence, quelques secondes seulement avant qu’il ne reprenne la parole. « Ma sœur s’occupe des jumeaux ce soir, est-ce que ça te dirait d’aller manger un morceau après ta journée? » Mes yeux s’arrondissent, étonnée de voir qu’il me propose de sortir. « Entre amis. » Outch. Je sais qu’on ne pourra être que des amis, c’est la chose la plus raisonnable à faire, mais ce mot montre bien que je ne l’intéresse pas plus que ça. “Je devrais avoir fini dans une heure ou deux !” C’est donc un oui, bien évidemment, qui aurait pu en douter ? « Y’a un nouveau bistro à quelques rues de la caserne que j’ai bien envie d’essayer. » Je ne sors que très rarement, alors je ne connais pas grand chose. “Je te fais confiance, je suis pas compliquée de toute manière !” Je hausse les épaules, un grand sourire accroché à mes lèvres et mes yeux qui brillent d’impatience. On m’appelle au loin et je hoche la tête. “Je te donne mon numéro, comme ça tu me dis où on se rejoint et à quelle heure !” On dirait une enfant, mais je m’en fiche. Je lui donne tout ce dont il a besoin pour pouvoir me contacter et je m’éloigne en lui faisant un signe de la main. Je le revois ce soir, et là, ça ne sera pas le hasard. Mais c’est un ami, seulement un ami.

« J’en serais ravie! » Tu n’as pas le cœur de lui dire que ce serait sans doute une bien mauvaise idée. Pas le cœur d’aller contre ce que ta tête cri pourtant depuis que tu as appris que Molly est l’ex-femme de Léo. C’est une bien mauvaise idée ne serait-ce que d’être ici aujourd’hui, à lui faire la conversation, alors imaginer la présenter aux jumeaux? C’est un plan plus que foireux, tu en es bien trop conscient. Pourtant, c’est toi qui l’as sous-entendu, toi qui l’as suggéré indirectement et tu ne peux que sourire devant l’excitation qui s’empare de la jeune femme. Dans un autre contexte, dans d’autres circonstances, ça aurait pu être simple comme ça. Avoir envie de la voir, trouver des raisons pour multiplier les occasions de le faire. Dans un univers parallèle, peut-être. Dans celui-ci, c’est autre chose. « Oh tu devrais pas trop tarder ici, si quelqu’un a besoin de toi, c’est la priorité. » « Laura va m’appeler si jamais. » que tu rassures Molly. « Laura, c’est ma partenaire. » que tu précises ensuite, réalisant que ça pouvait peut-être porter à confusion.  Et évidemment, au moment même où tu prononces le prénom de la blonde qui t’attend aux urgences, son nom apparaît sur l’écran de ton téléphone. Pour l’instant, le message ne lit qu’un simple C’est long!! qui va sans aucun doute être suivis de multiples insultes dans les prochains messages. Alors sur un coup de tête, pressé par le moment qui file trop vite, tu fais exactement l’inverse de ce que tu t’étais dit que tu ferais. « Je devrais avoir fini dans une heure ou deux! » Tu souris. Non seulement elle a dit oui, mais elle semble bien emballée par l’idée. Ça te fait plaisir, bien plus que tu ne veux te l’admettre. « Je te fais confiance, je suis pas compliquée de toute manière! » « Super. » Elle n’est pas compliquée, tu aimes croire que tu ne l’es pas vraiment non plus, et pourtant, toute la situation qui vous entoure, elle, l’est. « Je te donne mon numéro, comme ça tu me dis où on se rejoint et à quelle heure. » Tu hoches la tête alors que tu ajoutes ses informations dans ton téléphone et vous échangez des signes de la main alors qu’elle part dans une direction et toi de l’autre. 10 messages plus tard de la part de Laura et tu te rends à la blonde juste avant qu’elle ne se décide à partir sans toi.

Trent
Allô Molly, c'est Trent. On se rejoint au Sails Bistro à 19h?

Trent
J'ai hâte de te voir.

Tu arrives le premier au bistro où tu as donné rendez-vous à Molly. Ce n’est qu’une rencontre anodine entre deux personnes qui apprennent à se connaître, rien de compliqué, rien qui n’explique cette boule de nerfs qui ne t’a pas lâché depuis que tu as croisé la jeune femme à l’hôpital quelques heures plus tôt. Tu l’attends devant, préférant l’accueillir à l’extérieur du restaurant. Tes doigts jouent nerveusement avec ton jeu de clés, ton regard se perd sur les passants et tu ne cesses de regarder ton téléphone au cas où tu recevrais un message de Molly comme quoi elle a changé d’idée. Ce serait sans doute plus raisonnable ainsi, tu en es conscient, mais tu es soulagé quand ton regard se pose enfin sur elle. Elle a troqué la robe de princesse pour des vêtements de la vie de tous les jours et tu ne peux t’empêcher de faire un commentaire. « Moi qui pensais aller dîner avec une princesse ce soir, je suis déçu. » que tu lances sur un ton plein d’humour. « Le reste de ta journée s’est bien passée? » que tu demandes alors que tu viens ouvrir la porte du bistro, l’invitant à rentrer dans le restaurant avant toi.

J’ai vraiment reçu des messages de Trent. Il n’a pas décidé de faire marche arrière et on doit se retrouver ce soir, pour un rendez-vous entre amis. Je dois garder ça en tête, nous ne pouvons être que des amis. En réalité, on ne peut même pas être amis, ce n’est pas une bonne idée. J’ai besoin de tranquillité, de nouvelles rencontres, pas de me renfermer dans tout ce qui était déjà ma vie pendant ce mariage. Pourtant, je ne peux plus m’empêcher de penser à lui, et me demander ce qu’il pense de moi. Je ne me fais pas d’illusions, il a été le premier à dire qu’on allait se voir comme des amis, alors je suis le plan, je ne voudrais pas qu’il finisse par s’éloigner de moi. On ne se connait pas depuis longtemps, pourtant, je sais déjà que j’aimerais le garder dans ma vie un moment.

Je passe de très longues minutes (heure ?) à me changer. Je tente plusieurs tenues, des robes, des jeans, des jupes… la chambre devient un vrai champ de bataille. Je troque ma tenue de princesse pour une combinaison noire et une veste. J’arrive quelques minutes en avance et il m’attends déjà. Je m’en veux un peu, je préfère être la première à arriver lors des rendez-vous. Je souris en le voyant devant la porte. « Moi qui pensais aller dîner avec une princesse ce soir, je suis déçu. » Je ne peux m’empêcher de rire en imaginant à quel point j’aurais pu être gênée en arrivant en princesse dans ce bistrot. “Pour une prochaine soirée déguisée peut-être !” On a pas commencé la première soirée que je me retrouve déjà à parler d’une prochaine, qu’est ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Je secoue légèrement la tête et regarde au sol une seconde avant de tenter de passer à autre chose. « Le reste de ta journée s’est bien passée? » Je hoche vivement la tête en entrant dans le restaurant. “Ca a duré un moment mais tout le monde s’est beaucoup amusé.” J’adore ces moments. “Et toi ?”

On entre et on s’installe à une table, je suis un peu angoissée mais il n’y a pas de raison pour qu’on ne s’entende pas. “Ca fait des mois que je ne suis pas sortie… c’est sympa ici.” Je regarde autour de moi, je n’avais jamais entendu parler de cet endroit, et je suis ravie de le découvrir avec ce beau brun souriant devant mes yeux.

Pourquoi est-ce que chaque fois qu’une situation semblait complètement déraisonnable, tu décidais d’y sauter à pieds joint? Pourquoi est-ce que chaque fois que ta logique te criait de rester loin d’une femme, ton cœur décidait de s’en mêler et d’aller à contre-courant? Comme si tu ressentais un besoin un peu tordu de te jeter corps et âmes dans des relations qui semblent vouées à l’échec dès leur commencement. Kim d’abord, dont la fatalité te hante toujours. Charlie ensuite, dont la présence dans ta vie sera éternelle de part vos jumeaux qui grandissent à vue d’œil. Et Molly maintenant. Molly, l’ex-femme de Léo. Molly l’intouchable. Molly de qui tu ferais mieux de te tenir loin, tu le sais pertinemment. Et pourtant, un large sourire s’étire sur ton visage lorsqu’elle arrive vêtue d’une combinaison noire et tu la trouves terriblement jolie dans toute sa simplicité, même si tu ne peux t’empêcher de passer un commentaire sur cette robe de princesse qu’elle portait quelques heures plus tôt. « Pour une prochaine soirée déguisée peut-être! » Vous n’êtes même pas encore entrés dans le bistro qu’elle semble ouverte à te revoir une prochaine fois, ce qui te fait plaisir autant que cela te fait peur. Mais tu as déjà les pieds dans les plats, alors autant en profiter. « C’est l’Halloween qui approche après tout. » que tu remarques. Bien que la fête ne soit pas particulièrement populaire ici, tu avais tout de même l’intention de déguiser les jumeaux, les requêtes de tes petites têtes blondes en termes de costumes étant déjà nombreuses. « C’est quoi ta fête préférée? » Dans ta famille, Noël était une célébration qui commençait tôt et qui se faisait en grand, quelque chose que tu espérais pouvoir partager avec tes enfants malgré la complexité de ta relation avec leur mère.

« Ça a duré un moment mais tout le monde s’est beaucoup amusé. » Tu souris, content de voir qu’elle prenait réellement plaisir à se déguiser et faire ce petit bonheur dans la vie des enfants malades. « Et toi? » C’est à ton tour de hocher de la tête à la positive. « On a pas eu d’autres urgences après ça donc c’est toujours pour le mieux. » Même si les heures pouvaient parfois être longues sans urgence, c’est toujours pour le mieux que de réaliser que vos services ne sont pas nécessaires. Tu ouvres la porte et invite la jeune femme à rentrer dans l’établissement et vous vous installez à une table et rapidement une serveuse vous apporte deux menus. « Ça fait des mois que je ne suis pas sortie… c’est sympa ici. » « Trop occupée avec tous tes jobs et ton bénévolat ou simple par manque d’occasion? » que tu lui demandes, curieux – bien plus que tu ne devrais l’être – d’en apprendre un peu plus sur l’historique sentimental de la jeune femme. Certes, tu savais qu’elle avait été mariée avec Léo dans le cadre de cette émission stupide, mais avait-elle tourné la page sur leur histoire aussi vite que le Ivywreath avait pu le faire? Tu ignorais complètement s’ils étaient toujours en contact d’ailleurs, bien que tu n’oserais jamais poser la question directement. « J’avoue que je sors plus autant qu’avant non plus. Avec les jumeaux, les opportunités sont limitées. » Et comme tu les as à temps plein, ce n’est pas comme si tu pouvais profiter de moment seul comme le ferait un père célibataire jouissant d’une liberté certaine qui accompagnait la garde-partagée.

Je ne pensais pas avoir un rencard, pas avant un bout de temps. J’avais dit que je devais penser à moi et à mon bien être avant tout, mais encore une fois, je ne suis pas les règles écrites entre moi et moi. « C’est l’Halloween qui approche après tout. » Et pourquoi ne pas faire une soirée déguisée pour l’occasion ? j’adore les fêtes de ce genre, enfantines et qui me rappelle le temps où je n’avais pas tous ces problèmes. Mais je ne sais pas si d’ici là il voudra me revoir, l’avenir est imprécis, et j’ai l’impression que tout ça n’est qu’une vaste mauvaise idée. « C’est quoi ta fête préférée? » “Noël !” Je réponds sans hésiter. Il y a un an j’ai passé un long moment à décorer l’atelier et la maison de Ginny. L’ambiance est différente, bien plus magique que le reste de l’année, et je trouve que tout le monde a besoin de magie dans la vie. “Et toi ?” J’aime relancer les questions, apprendre à le connaître.

La journée s’est particulièrement bien passée pour moi, et je me demande si c’est pareil pour lui. « On a pas eu d’autres urgences après ça donc c’est toujours pour le mieux. » Je hoche la tête, rassurée. Je n’aime pas recevoir de mauvaises nouvelles, qu’elles aient un lien direct ou non avec moi. « Trop occupée avec tous tes jobs et ton bénévolat ou simple par manque d’occasion? » Je hausse les épaules, je ne cherche pas à provoquer les occasions et c’est mieux comme ça. “Un peu des deux sûrement…” Je fronce les sourcils. “J’ai rarement des occasions il faut dire.” Il y a quelques mois j’étais mariée, ou alors occupée à m’engueuler et à retrouver Pete qui est certainement parti pour de bon cette fois, et que je n’ai pas envie de voir dans tous les cas. C’est terminé tout ça, je suis enfin passée à autre chose et ça me fait du bien. « J’avoue que je sors plus autant qu’avant non plus. Avec les jumeaux, les opportunités sont limitées. » Il a une vraie vie d’adulte, il ne peut pas faire ce qu’il veut quand il veut et c’est exactement ce que je voudrais vivre. A mon âge, j’aimerais avoir des enfants, être mariée et avoir ma maison avec toute ma famille, c’est la vie dont je rêve, et je ne peux m’empêcher de le regarder avec un grand sourire quand il mentionne ses enfants. “La vie de famille passe avant les fêtes.” Ca me parait normal. “Et ça te plait comme ça ?” J’espère qu’il dira oui, et que je verrais encore une fois qu’on a bien plus de points en commun qu’on ne peut l’imaginer.

Tu voudrais tant pouvoir enlever tout le contexte autour de vous. Qu’il n’y ait plus de Charlie, plus de Léo, plus de ces relations passées qui vous liaient un à l’autre de la pire des manières, mais en faire abstraction le temps d’un soir n’allait certainement pas régler le problème. Était-ce réellement un problème toutefois, si tu comptais garder ton amitié, ou du moins cette possibilité de, complètement platonique avec Molly? Tu savais que si les pensées se faisaient ainsi un chemin dans ta tête, c’est parce que tu ressentais pour elle une attirance qui allait au-delà d’une simple connaissance qu’on apprécie, mais il te fallait mettre ça de côté pour ne pas te plonger une fois de trop au sein d’une histoire compliquée. Malgré tout, tu étais décidé à apprendre à connaître la jeune femme, l’impression qu’elle avait eue sur toi jusqu’à maintenant bien trop grande pour que tu résistes complètement à la tentation. Tu ne savais pas si tu allais la revoir après ce soir, mais tu comptais bien en profiter pour l’instant. « Noël! Et toi? » Son enthousiasme te fait sourire alors que tu hoches la tête doucement, en approbation. « Moi aussi. Ma mère a toujours fait en sorte que ce soit une grande célébration chez nous. La musique de Noël se fait entendre dès le mois de novembre chez mes parents. » Et elles tournent en boucles, les chansons du temps des fêtes alors que ta mère décore la maison de fond en comble, l’immense sapin prenant la moitié du salon et sous lequel on retrouve année après année beaucoup trop de cadeaux. « J’espère pouvoir poursuivre la tradition avec les jumeaux. » Pour l’instant, ils étaient encore petits, plus ou moins conscients de ce que la période représentait vraiment, mais ils seraient grands biens assez vites et tu savais que tu serais éventuellement obligé de partager ce temps avec Charlie, bien que tu préférais ne pas trop y penser pour le moment.

« Un peu des deux sûrement… » que Molly t’avoue lorsque tu lui demandes si elle ne sort pas parce qu’elle est trop occupée ou simplement par manque d’occasion. « J’ai rarement des occasions il faut dire. » « Comment ça? » que tu lui demandes, curieux. Tu espères qu’elle ne verra pas la question comme étant trop intrusive, tu espères seulement pouvoir apprendre à la connaître un peu mieux, dans un contexte qui n’est pas l’hôpital, le refuge ou même après un incendie. Dans un contexte qui vous donne réellement le temps de parler sans pression extérieure. Les occasions se font plus rares pour toi aussi depuis la naissance des jumeaux, surtout depuis que tu t’en occupes à temps plein. Certes, tu es chanceux, tu es bien entouré et tu sais que tu peux toujours compter sur ta famille, ou même sur Quincy et Zoya pour t’aider, mais c’est différent. Autant tu te plais dans ton rôle de père, tu t’ennuies de ton indépendance, de ta liberté complète. De pouvoir faire ce que tu veux, quand tu veux. Il faut dire que de voir Zoya agir de la sorte alors qu’elle a Chloé crée chez toi des sentiments mitigés, une incompréhension mélangée à une jalousie que tu n’aimes pas admettre. « La vie de famille passe avant les fêtes. » Tu acquiesces. Tu es d’accord avec l’idée en générale, mais c’est parfois difficile de ne pas regretter ta vie d’avant. « Et ça te plaît comme ça? » « La majorité du temps, oui. » que tu lui avoues, préférant jouer la carte de la transparence. « Il n’y a rien que je ne ferais pas pour les jumeaux, mais parfois je m’ennuie de ne pas avoir constamment à m’inquiéter pour quelqu’un d’autre. » Tu ris doucement, parce que même avant d’avoir des enfants, tu étais le genre de personne à t’en faire pour tout et pour tout le monde. C’est plus fort que toi finalement. « Est-ce que c’est pour ça que tu t’es inscrite à cette émission? Dans l’espoir de fonder une famille? » La question file avant que tu n’aies vraiment le temps de réaliser tout ce qu’elle sous-entend et tu ressens une soudaine gêne de te montrer aussi curieux. « Te sens pas obligé de répondre si t’as pas envie. » que tu souffles doucement, tes doigts tapotant nerveusement sur la table.

« Moi aussi. Ma mère a toujours fait en sorte que ce soit une grande célébration chez nous. La musique de Noël se fait entendre dès le mois de novembre chez mes parents. » Je souris, j’aime l’idée qu’il fête Noël et je ne sais même pas pourquoi. Je me demande comment c’est possible de se sentir aussi proche et autant en accord avec quelqu’un alors qu’on le connait à peine. Je secoue la tête, je dois faire fuire toutes ces pensées de ma tête, nous ne sommes qu’amis, il ne veut pas plus, et je n’ai pas le droit de vouloir plus moi non plus. « J’espère pouvoir poursuivre la tradition avec les jumeaux. » “Noël en famille c’est le plus beau cadeau qu’on puisse faire à des enfants.” Je souris, j’en suis convaincue. Tout s’oublie à Noël, il n’y a que de l’amour et de la joie, et c’est bien pour ça que c’est et que ça restera sûrement pour toujours ma fête préférée.

On parle de tout et de rien, la conversation se fait sans qu’on ait besoin de réfléchir. « Comment ça? » Je soupire un peu “J’ai presque jamais de rencard, ma vie sentimentale a toujours été assez compliquée…” Je me confie un peu, mais je ne veux pas le gêner, je ne veux pas trop en dire, il ne faudrait pas qu’il s’ennuie et qu’il veuille s’enfuir.

Il vit avec ses jumeaux, et il s’en occupe majoritairement tout seul. « La majorité du temps, oui. » Je souris, je comprends que ça doit être assez difficile de renoncer à sa vie du jour au lendemain. Pourtant, il arrive à tout gérer, et je ne pourrais pas être plus admirative. « Il n’y a rien que je ne ferais pas pour les jumeaux, mais parfois je m’ennuie de ne pas avoir constamment à m’inquiéter pour quelqu’un d’autre. » J’aimerais connaître ce sentiment, pouvoir m’inquiéter pour des petites parties de moi. “Ca doit être aussi terrifiant que beau.” Sa vie me rend rêveuse, et je ne peux pas m’empêcher de sourire en l’écoutant.

Bien évidemment on parle du mariage, de cette période de ma vie qui n’a pas vraiment de sens. « Est-ce que c’est pour ça que tu t’es inscrite à cette émission? Dans l’espoir de fonder une famille? Te sens pas obligé de répondre si t’as pas envie. » “Ca me dérange pas.” Je pince les lèvres. “J’avais envie de croire que c’était possible de trouver l’âme soeur comme ça.” Tentative désespérée qui a échoué. “Mais ça n’a pas été le cas, jamais… Il s’est rien passé avec Léo.” Je détaille, parce que je veux qu’il le sache.

Elle t’écoute attentivement et elle rayonne, Molly. Tu ne saurais expliquer pourquoi, mais il y a cette lueur dans le fond de ses yeux qui te charment, cette attention qu’elle te porte qui te donne l’impression d’être réellement vu pour la première fois depuis longtemps. Tu passes tellement tout ton temps à t’assurer que tout le monde va bien que tu en oublies parfois combien ça peut être agréable d’être tout simplement écouté par autrui, sans attente et sans jugement. « Noël en famille, c’est le plus cadeau qu’on puisse faire à des enfants. » « Elle est comment, ta famille? » que tu lui demandes, curieux d’en apprendre davantage sur les raisons qui ont fait de Noël sa fête préférée à elle aussi. Intrigué d’en savoir plus sur les traditions qui bercent cette période de l’année que vous chérissez tous les deux, mais aussi curieux d’en apprendre davantage sur sa famille en générale. Ses parents, ses frères et sœurs si elle en a, ce noyau de gens qui font d’elle qui elle est aujourd’hui. Tu sais trop bien que tu ne serais pas l’homme que tu es aujourd’hui si ce n’était pas de l’influence et de l’éducation de tes parents, que tu portes à tous les jours avec toi des morceaux de tes sœurs et de ton frère ainsi que tous ses jeunes qui ont été placés temporairement chez toi pendant que vieillissais sous un toit qui avait toujours plus à donner à ceux qui manquaient de stabilité, de sécurité et bien souvent, d’amour.

« J’ai presque jamais de rencard, ma vie sentimentale a toujours été assez compliquée… » Tu hoches doucement la tête, un air compatissant sur le visage. Tu ne peux pas dire que ta vie sentimentale a été un succès non plus, tu as enchaîné longtemps les relations qui ne menaient à rien et puis il y a eu Kim, qui est partie trop vite, et Charlie qui elle, a créé une tempête dans ton univers et continue de le faire, bien malgré toi. « Je peux comprendre. La mienne aussi, a toujours été plutôt chaotique. » que tu lui admets en toute transparence. « J’ai eu deux relations qu’on peut considérer sérieuses, mais rien qui n’a duré dans le temps. » Et encore, tu ne sais pas si tu pourrais réellement qualifier cette aventure avec Charlie comme sérieuse, si ce n’était pas du fait que les jumeaux en sont nés. Jumeaux qui une fois de plus viennent prendre leur place dans la conversation, sans que ce ne soit trop imposant ou malaisant pour la brune qui t’accompagne. Elle semble avoir un réel intérêt pour les enfants, ce qui te fait chaud au cœur. Aaron et Siobhan prennent beaucoup de place dans ta vie et ceux qui en font partie se doivent de savoir qu’ils seront toujours tes priorités, quoi qu’il arrive. « Ça doit être aussi terrifiant que beau. » Tu hoches doucement la tête. C’est une façon particulière mais aussi bien précise de voir les choses. « Les choses qui en valent vraiment la peine le sont généralement. » Terrifiantes et belles. Un peu comme la jeune femme qui te fait face en ce moment, même si tu ne te risquerais jamais à faire le commentaire à voix haute.

Terrifiante, parce qu’il y a beaucoup d’histoire qui vous relie l’un à l’autre d’une manière qui est tout sauf simple. Et ce serait facile de prétendre que le sujet n’existe pas, qu’il n’est pas nécessaire de l’aborder, mais tu as des questions sur ce qui a bien pu l’emmener à s’inscrire à une émission comme Mariés au premier regard et sans poser directement la question, tu te demandes de quoi a bien pu être composé sa relation avec celui que Charlie a choisi comme époux. « Ça me dérange pas. J’avais envie de croire que c’était possible de trouver l’âme sœur de cette façon. » Tu ne sais pas si tu y crois. Ça semble être un trop gros risque à prendre. Tu es plutôt traditionnel quand tu penses à un évènement aussi significatif que le mariage. Tu espères que celle à qui tu diras je le veux un de ces jours soit celle qui sera dans ta vie pour toujours. Pendant un court moment, t’as voulu croire que cette fille-là pouvait être Charlie et elle ne cesse de te rappeler pourquoi depuis, elle ne pourra jamais l’être. « Mais ça n’a pas été le cas, jamais… Il s’est rien passé avec Léo? » Tu fronces les sourcils, surpris par cette révélation que Molly te fait. « Qu’est-ce que tu veux dire? » Tu viens prendre une gorgée de ton verre d’eau avant de relever les yeux vers ton interlocutrice. « Vous avez jamais essayé d’être un couple avec Léo? » Alors pourquoi lui avoir dit oui? Pourquoi avoir participé à l’émission s’ils n’avaient jamais même essayé?

« Elle est comment, ta famille? » Je ne m’attendais pas à cette question. Je pince les lèvres, je regarde autour de moi quelques secondes pour essayer de trouver les bons mots. Je ne veux pas qu’il me prenne en pitié, j’ai horreur de ça. Alors je vais essayer de trouver la bonne manière d’expliquer une chose pareille. “J’ai grandi aux alentours de Brisbane, avec une soeur et un frère. Mais… c’est compliqué depuis quelques temps… j’ai.... j’ai appris que j’avais été adopté y’a quelques mois…” Pourquoi est ce que je me confie à ce point à un homme que je connais à peine. “J’aime beaucoup ma famille, ça ira mieux.” Je ne pense pas que qui que ce soit ne puisse comprendre cette situation, mais il m’arrive d’avoir besoin d’en parler.

La famille, les histoires sentimentales, tous les sujets y passent les uns après les autres. Je ne m’ennuie pas, et les minutes passent sans que je n’y vois rien. « Je peux comprendre. La mienne aussi, a toujours été plutôt chaotique. J’ai eu deux relations qu’on peut considérer sérieuses, mais rien qui n’a duré dans le temps. » Je ris un peu, j’ai du mal à y croire. “Mais avec Charlie, les enfants tout ça… c’était pas ce que tu voulais ?” Je pince les lèvres, je suis peut-être trop intrusive alors je m’excuse. “Je pose trop de questions pardon…” Mais je suis curieuse, j’ai envie de savoir tout un tas de choses au sujet de Trent. Je ne sais pas pourquoi il m’intéresse à ce point, et je n’ai pas envie de me questionner sur ça maintenant. Alors je profite du moment tant que je le peux, sans même savoir si on se reverra un jour après ce soir. « Les choses qui en valent vraiment la peine le sont généralement. » Je hoche la tête, j’ai l’impression qu’on est sur la même longueur d’onde, et ça me fait sourire un peu plus après chaque minute.

« Qu’est-ce que tu veux dire? » Je déglutis, comment expliquer que j’ai été marié à un homme pendant presque une année sans qu’il n’y ait jamais aucune séduction. C’était mon ami pendant un temps, puis tout est devenu compliqué. « Vous avez jamais essayé d’être un couple avec Léo? » Je capte son regard, pour qu’il comprenne que je suis sérieuse. “On a essayé pendant la lune de miel je pense, tout était beau, on s’est embrassé une fois, puis plus rien, on a été des amis et maintenant je ne le vois plus…” Je gigote sur ma chaise, je suis gênée parce que je ne sais pas ce qu’il va penser de tout ça.