Blanche Neige et Grincheux @Tessa Mulligan

« HEY! » Je le vois qui me regarde et qui calcule la distance entre nous deux pour savoir s’il a le temps de prendre une bouchée de plus de mon sandwich que j’ai laissé sur la table de salon le temps d’aller me prendre une bière. Il se met à manger plus vite sans mettre fin au contact visuel, s’enfuyant seulement lorsqu’il juge que la distance entre nous n’est plus si sécuritaire que ça pour lui. J’essaie de l’attraper mais il me passe entre les jambes comme s’il avait fait ça toute sa vie. « Mon esti de chien sale. » Je grogne en le pourchassant dans le salon pour le remettre dans sa cage, mais je n’arrive pas à lui mettre la main dessus. Il est trop rapide et se faufile à des endroits où je ne passe pas. Plus je le regarde, plus j’ai l’impression qu’il rit de ma gueule et ça fait juste me faire chier encore plus. « MILAAAAAAAAAAAA! » que je hurle après m’être frappé un genou sur la table basse. C’était quoi l’idée de quitter mon appartement tranquille pour habiter avec Stacey et Mila? J’avais la paix là-bas, je pouvais faire ce que je voulais quand je voulais sans que personne ne soit sur mon dos. Peut-être que Stacey avait raison et que Mila peut faire ce qu’elle veut avec moi, ce chien en est visiblement la preuve alors que je n’en voulais pas. J’abandonne la course-poursuite pour aller me faire un deuxième sandwich et l’effronté vient s’asseoir à côté de moi en me bavant sur le pied. « Oh parce que tu penses que je vais t’en donner en plus? » Je me retiens de lui mettre un morceau de jambon devant le nez juste pour le narguer. Histoire qu’il ne puisse pas me voler celui-là aussi, je décide d’aller manger dehors, j’en profiterai pour fumer en même temps. Sauf que j’ai à peine le temps de sortir de la maison qu’une odeur nauséabonde parvient à mes narines et il ne suffit que je baisse la tête pour voir que j’ai marché dans la crotte du chien. « MILA FOR FUCK SAKES! » Je vais l’étriper (le chien ou Mila, l’histoire ne le dit pas… peut-être les deux). J’ai un haut-le-cœur tandis que j’essaie d’enlever mon soulier sans trop y toucher. Finalement, je vais manger mon sandwich à la table et je me dépêche de changer de chaussures et de sacrer mon camp de la maison. Ça va me faire du bien de ventiler.

En chemin vers chez Tessa, je m’arrête dans un café pour m’en commander un. Pas question de lui en ramener un avec sa condition cardiaque, cependant, surtout que je sais très bien que ce ne serait pas son premier. Je lui commande une chocolatine pour me faire pardonner et je repars en direction de chez elle dès que j’ai reçu ma commande. Lorsque je toque trois coups à sa porte, je n’entends rien sauf le bruit des pas d’Hemingway de l’autre côté de la porte. La porte n’est pas verrouillée, je me permets donc d’entrer, caressant le chien d’une main pour qu’il se calme un peu. « Tess? » Pas de réponse. Je m’avance en jetant un coup d’œil dans chaque pièce au passage mais c’est seulement lorsque je mets les pieds dans le salon que je l’aperçois qui dort comme un bébé et je ne peux réprimer un sourire narquois tandis que j’ai une idée qui me traverse l’esprit. Le café et la chocolatine dans une main, j’attrape un coussin sur son canapé de l’autre et je lui lance dessus de toutes mes forces. « ON SE RÉVEILLE LÀ-DEDANS! » crié-je avant de me mettre à rire et de porter mon café à mes lèvres pour en prendre une gorgée. Je la laisse respirer un peu avant de laisser tomber sur ses cuisses le sac avec la chocolatine. « T’es fatigué de ta nuit passée avec un bel étalon? » demandé-je en me laissant tomber lourdement sur le canapé sans la quitter des yeux. « Ça va ton cœur? » Je ne passe pas par quatre chemins, bien au courant de sa condition et surtout du fait que c’est son genre de faire semblant que tout va bien alors que ce n’est pas le cas. Peut-être que ses frères sont trop abrutis pour la croire, mais elle ne m’en passera pas une petite vite à moi.

Blanche Neige et Grincheux @Tessa Mulligan

« Putain Lawrence, tu m’as fait peur ! » Je hausse les sourcils en lui adressant un sourire triomphant, bien fier de mon coup. Depuis que Danika me permet de voir Maddox sans qu’elle ne soit présente, j’ai un peu moins de temps pour moi donc je n’ai peut-être pas été aussi présent que je l’aurais voulu pour Tessa dans les derniers mois.  Il faut bien que je me reprenne lorsque nous passons enfin du temps ensemble, non? Absolument. Et considérant qu’elle prend plaisir à me faire des câlins tout en sachant que je ne suis pas friand de ce genre de marques d’affections, je ne me sens pas mal du tout de lui remettre de cette façon, peu importe le nombre de regards assassins qu’elle pourrait me lancer. « C’était le but. » Mission accomplished. Je fronce les sourcils et je me penche légèrement vers elle en fixant son front. « Attends t’as un truc d’écrit dans le front. » La bouche entrouverte, je me force à garder un air sérieux tandis que je fais semblant d’essayer de déchiffrer des mots que les touches de son clavier auraient laissés sur sa peau. « Lawrence est fabuleux. » Je me redresse en lui donnant une tape sur le bras du revers de la main. « C’est trop gentil de ta part, t’aurais pas dû. » Je hausse les sourcils d’un air amusé tout en portant mon gobelet à mes lèvres pour en prendre une gorgée.

L’instant d’après je lui lance sa chocolatine sur les cuisses et les traits de Tessa semblent se détendre. « C’est pour te faire pardonner  ?! Tu aurais pu me ramener un café aussi ! » dit-elle en approchant le sac de son nez pour humer les effluves de la viennoiserie. Je rigole en étendant mes jambes pour poser mes pieds sur la table basse. « J’aurais pu rien te ramener aussi. » Jamais satisfaites les femmes, on leur donne une main et elles veulent un bras. « On peut rien te cacher Sherlock ! Tu le connais peut être... C’est un certain Morphée ! Sacré gaillard ! Un véritable apollon ! » Je hausse les sourcils tout en me mordillant la lèvre inférieure, faisant mine d’approuver son choix. « Ah ouais, j’ai passé plusieurs nuits en sa compagnie. Bien foutu, nuits torrides… à recommencer. » Franchement un meilleur choix que la dernière conquête de Stacey, Tessa est sortie avec le bon Mayers. « Je te propose pas quelque chose, je vois que tu as ce qu’il te faut. » Je tapote le côté de mon visage du bout du doigt. « Madame est perspicace. » Maintenant installé à ses côtés, je prends de ses nouvelles et plus particulièrement de son cœur qui m’inquiète. « Il irait mieux si tu n’avais pas essayé de me tuer en arrivant ! » Je lève les yeux au ciel en soupirant bruyamment. « Je le testais, t’avais l’air morte. » J’essaie de me défendre comme je peux, ce n’est pas parce qu’elle a des problèmes cardiaques que je vais m’empêcher d’essayer de la faire sursauter dès que j’en ai l’occasion. « Il va bien. Il n’y a pas de mieux, mais pas d’aggravations ! » Je hoche la tête en guise de réponse, rassuré par ses mots. J’espère juste qu’elle ne diminue pas sa condition pour ne pas m’inquiéter. « J’ai un peu de mal à retrouver la pleine forme depuis mon retour, mais ça va ! Et avant que tu me dises quoi que ce soit papa ours... J’ai pris quelques jours pour me reposer ! » Je lui fais un clin d’œil en portant mon gobelet de café à mes lèvres, prenant le temps de prononcer quelques mots avant de prendre ma gorgée. « Je suis fier de toi. Si t’as besoin d’aide avec quoi que ce soit, tu sais où me trouver. » C’est bon pour elle et aussi pour moi comme ça me donnerait un break de mes sœurs. Pas que je n’apprécie pas leur présence, détrompez-vous, mais ce n’est pas facile tous les jours de cohabiter avec elles alors que j’habitais seul depuis quatorze ans. « Hum... Comment vas-tu ? Mila ne te fait pas trop de misère ? » Un petit sourire en coin, je dépose mon café sur la table basse avant de croiser mes bras contre mon torse. « Ça va, pas grand-chose d’intéressant ou de nouveau de mon côté. Je survis à Mila pour l’instant, elle déplace de l’air la petite. » Petite, dire qu’elle sera majeure bientôt. « C’est pratique de les avoir si proches, elles peuvent m’aider avec le petit. Un peu moins pratique à d’autres occasions. » Quand je veux passer la nuit dans les bras de quelqu’un d’autre que Morphée par exemple. « Et toi, à part ton cœur? »

Blanche Neige et Grincheux @Tessa Mulligan

« Haha ! C’est que tu es vraiment très drôle aujourd’hui dit moi ! Qu’est-ce qui se passe, t’as avalé un clown au p’tit déj ?! » Je ne sais pas trop pourquoi, mais je me trouve pas mal drôle aujourd’hui. Je suis de bonne humeur et ça fait du bien après les derniers mois qui ont été plus que compliqués. Tant pis pour Tessa si ma bonne humeur la dérange. « Au nombre de clowns qui entre dans leur petite voiture, imagine combien j’ai pu en manger. » Je fais exprès de gonfler mon ventre en la tapotant d’une main en adressant un clin d’œil à mon amie. Je continue sur ma lancée de blagues en la questionnant sur la nuit qu’elle vient de passer considérant sa fatigue. Si son cœur n’est pas la cause de sa fatigue, il faut bien qu’il y ait une autre raison. « J’étais sûre que ton côté ours mal léché lui aurait tapé dans l’œil ! Qui serait capable d’y résister ! » Je pince mes lèvres pour faire mine de réfléchir alors que la réponse est assez évidente. « Toi. Tu ne sais pas ce que tu manques. » Je hausse à répétition mes sourcils avant de me mettre à rire. Jamais je prendrais le risque de mettre à mal notre amitié pour une histoire de cul, je ne ferai pas la même erreur deux fois et, surtout, je ne donnerai pas raison à son frère qui s’est toujours imaginé qu’il se passait quelque chose entre nous deux.

« Tu es rassuré maintenant ? J’ai l’air assez vivante à tes yeux ? » Je porte mon gobelet de café à mes lèves pour en prendre une gorgée avant de froncer les sourcils tout en l’observant attentivement comme si je prenais mentalement des notes. « Y’a encore place à l’amélioration mais on va dire que ça va faire l’affaire pour l’instant. » Le but n’est pas qu’elle me déteste d’ici à mon départ de chez elle. Trêve de plaisanterie, je lui rappelle que je suis là si elle a besoin de quoi que ce soit. « Je sais bien que je peux compter sur toi ! » Je prends une autre gorgée de café avant qu’elle ne me questionne sur ma « récente » colocation avec Mila. « Tu veux dire que tu as peur qu’elle te surprenne avec Morphée ?! C’est sûr que tu risquerais de la traumatiser la pauvre ! Épargne là tu veux ! » Je soupire bruyamment en levant les yeux au ciel. « À son âge, il serait temps qu’elle comprenne que les bébés n’apparaissent pas dans des baluchons comme dans Dumbo. » Pas que je compte lui faire une démonstration, loin de là, mais je ne vais pas me priver de passer la nuit avec quelqu’un dans ma propre maison. « Et je n’ai pas peur qu’elle me surprenne, je m’en fou comme de l’an quarante qu’elle me surprenne, c’est plus pour elle. » Pour ses yeux et ses oreilles supposément chastes. « Et avec Maddox ? » Je hoche lentement la tête en prenant un air plus sérieux. « Ça se passe bien! Ça fait quelques mois que je peux le voir plus souvent, qu’on se partage la garde… je suis content de pouvoir rattraper le temps perdu. » Enfin… façon de parler parce que je ne pourrai jamais récupérer les 3 années que j’ai perdues.

Avec le départ en mer de Tessa, notre dernière rencontre remonte à plusieurs semaines déjà et je la questionne donc sur ce qu’il y a de nouveau dans sa vie, persuadé qu’elle me répondra qu’il n’y a pas grand-chose à part quelques futilités. « Et bien en fait, fallait que je te dise un truc. Tu risques de me croiser un peu plus à l’hôpital, mais t’inquiète tout va bien ! » Je fronce les sourcils en l’interrogeant du regard. Vite comme ça, je ne vois pas de bonne raison qui pourrait l’amener à se rendre plus souvent à l’hôpital. En général, lorsque les gens s’y rendent, c’est parce qu’ils ne vont pas bien. « Hmmmmm ok? » Mon regard reste accroché au sien tandis que j’attends impatiemment qu’elle me déballe son sac. Je déteste les surprises et à ne pas perdre patience. Lorsqu’elle caresse son ventre, mon regard suit le mouvement de sa main et je ne suis pas certain de comprendre ce qu’elle veut me dire. Je ne veux pas le comprendre. « Je... je suis enceinte. » Je me mets à ricaner. « T’es rendue la Vierge Marie? » À ma connaissance, Tessa ne fréquente personne. Pas que je pense qu’elle est abstinente, au contraire, mais elle ne serait pas assez irresponsable pour ne pas se protéger. Du moins je l’espère. C’est seulement lorsque je constate qu’elle ne rit pas que je comprends qu’elle est sérieuse. « Tu me fucking niaises? » dis-je un peu trop sec en grimaçant, le regard plein de jugement. Et je ne lui laisse pas le temps de répondre parce que la question est clairement rhétorique. « Fuck que je te pensais plus responsable que ça Tess’. Ce qu’il s’est passé avec Maddox ne t’a pas allumé une lumière? » Je suis surpris d’elle et déçu même sans connaître les détails de sa grossesse, de l’identité du père. « Tu vas le garder je suppose? » Quelle question, je connais suffisamment Tessa pour savoir qu’elle ne se ferait pas avorter. « For fuck sakes, tu as pensé un peu à ton cœur?! » Elle doit se ménager, le médecin l’a dit, et je ne suis pas convaincu qu’une grossesse soit recommandée dans son cas. « Dis-moi que le père n’est pas un sans dessin… » Il ne manquerait plus que ça. Et qu’elle ne me sorte pas que c’est Morphée, je ne suis plus d’humeur à rire…

Blanche Neige et Grincheux @Tessa Mulligan

Tessa contre-attaque et me balance le coussin que je lui ai lancé pour la réveiller. Je l’esquive de justesse en me protégeant de mes mains en riant. Disons que j’ai affaire à des adversaires pas mal plus intimidants lorsque je me retrouve dans le ring. « Tu sais à quel point c’est une torture pour moi de résister à ton charme ! Tu hantes toutes mes nuits !» Et le pire c’est que ce n’est peut-être pas tout à fait faux, sauf que je suis probablement plus là pour garder un œil sur elle que pour passer la nuit en sa compagnie. « Je hante tes nuits parce que je t’empêche d’avoir un prétendant c’est ça? » Je lui fais un clin d’œil en riant. Jamais je n’empêcherais Tessa d’avoir une vie amoureuse ou sexuelle active, mais je ne me gênerais pas pour lui dire ma façon de penser si, comme Stacey, elle passait la nuit avec un imbécile de première. Et que l’un d’eux ose la blesser et il aura affaire à moi. « Tu m’en vois soulagée si tu peux t’en contenter !» Au moins Tess semble de bonne humeur et ça me rassure un peu sur sa condition. « Est-ce que j’ai vraiment le choix de toute façon? » Probablement pas.

Il y a des bons et des mauvais côtés à habiter avec Stacey et Mila. D’un côté ça me rassure de savoir qu’elles n’habitent plus avec leur père, de l’autre, parfois la simplicité de vivre seul me manque. À l’époque, je n’avais pas besoin de me demander si les filles étaient à la maison si j’avais envie de ramener un inconnu à la maison pour la nuit. Maintenant, j’essaie de faire un minimum attention pour ne pas les déranger. « Entre nous... je crois qu’elle sait tout ça ! Mais toi tu serais prêt à la surprendre ? » Je fronce les sourcils, une légère grimace étirant mes traits. « Surprendre Mila? Je ne sais même pas si elle a déjà embrassé quelqu’un, elle ne semble tellement pas rendue là encore… » Et je ne vais pas m’en plaindre parce que non, je n’ai pas particulièrement envie de la surprendre alors qu’elle s’envoie en l’air avec quelqu’un. Même si elle sera bientôt majeure, ça n’a pas particulièrement l’air de l’intéresser présentement, chaque chose en son temps. « C’est une bonne chose que vous puissiez tenter de rattraper tout ça. Je suis contente de voir que vous avez finalement trouvé un terrain d’entente. Et Maddox s’adapte bien ? J’imagine que ça a dû le perturber un peu tout ça. » Je hoche lentement la tête. « Oui il s’adapte bien. Je pense que ça a aidé que j’habite quelques semaines chez Dan en février, ça nous a permis de nous côtoyer plus souvent. » Il n’y avait pas que des mauvais côtés à cette cohabitation temporaire. « Mais effectivement, disons qu’au début ce n’était pas facile… » Je porte mon gobelet à mes lèvres, le regard fuyant. Même si aujourd’hui il m’accepte, repenser au soir où Danika lui a avoué la vérité me fait toujours mal. « Disons qu’il n’était pas content au départ. » Je souris tristement avant de faire un geste de la main pour indiquer que c’était du passé.

Je préfère ne pas m’attarder sur le sujet, bien que le sujet suivant ne fasse pas l’unanimité. Je ne m’attendais pas du tout à ce que Tessa m’annonce ce genre de nouvelle et, avec sa condition, ça ne fait pas du tout mon bonheur. Je sais que je ne suis pas doux dans mes propos, mais c’est parce que je m’inquiète pour elle au fond et je veux lui épargner des souffrances inutiles. « Tu as fini ? Tu me penses assez stupide pour ne pas y avoir réfléchi ? Tu crois que ça ne m’angoisse pas ? Que ça ne me fait pas peur ? Bien sûr que j'ai pensé à mon coeur... J’ai songé à avorter...» Visiblement elle n’y a pas réfléchi avant de tomber enceinte mais je m’abstiens de rajouter quoi que ce soit, me contentant de mordre l’intérieur de ma joie pour m’empêcher de parler. « Lawrence, je suis enceinte de presque trois mois, qu’est-ce que tu veux que je fasses ? » Je lève les yeux au ciel en déposant mon gobelet sur la table basse. « C’est quoi, tu l’as appris hier? » Laissez-moi en douter. « C’est pas un caprice de ma part... On s’est protégé... Alors cesse de me juger s’il te plaît ! J’ai clairement pas besoin de ça !» Ça lui ressemble déjà un peu plus, bien qu’il y avait une solution pour éviter une grossesse non désirée. « Et la pilule du lendemain, tu n’y as pas pensé quand le préservatif a brisé? » Des options, il y en avait à sa disposition et je ne peux pas croire qu’elle va mettre sa vie en danger. « Je sais que ça me fait prendre un risque, mais... Je peux pas me résoudre à tuer ce bébé, c’est au-dessus de mes forces. J’ai pas besoin de ta permission Lawrence... mais j’aimerai savoir que je peux compter sur toi, même si tu n’approuves pas ce choix ! » Je soupire bruyamment en me levant, puis je passe une main dans mon visage avant de faire volteface pour la regarder. « C’est qui le père?! Il en pense quoi?! » Il est au courant au moins j’espère, parce que là encore je ne vais pas me priver de lui dire ma façon de penser puisqu’il s’agit d’un sujet sensible pour moi. « Ta famille en pense quoi? » Seront-ils là seulement pour la supporter? Je peux entendre Freddy rire d’ici et je n’ai aucune difficulté à imaginer à quel point son jumeau doit se faire un sang d’encre à l’idée de la perdre une fois de plus. Je me laisse retomber sur le canapé en secouant négativement la tête. « Le médecin a dit quoi? » Inquiet, je tape du pied en mordillant ma lèvre inférieure sans la quitter des yeux.

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Depuis que ma relation avec Freddy s’est envenimée, je me suis rapidement rapprochée de Tessa. À partir de ce moment, je l’ai considéré comme ma propre sœur, peut-être parce que les retrouvailles avec Stacey n’étaient pas aussi simples que je l’aurais pensé, peut-être parce que j’avais besoin de retrouver ce lien avec quelqu’un, ce lien qui m’avait été arraché suite au décès de nos parents et de notre frère. Je sais que Tessa n’est pas toujours d’accord avec mes paroles et mes réactions, comme Stacey et Mila d’ailleurs, mais ça part toujours de bonnes intentions. « C’est exactement ça, je suis traumatisée tu vois ce que tu me fais vivre ? » Si elle était tant traumatisée que ça, je suis pas mal convaincue qu’elle ne se tiendrait plus avec moi. Après tout, nous ne sommes en rien reliés par le sang, il n’y a rien qui l’oblige à continuer de me voir. Et encore là, même si j’ai une demi-sœur quelque part dont j’ignore l’identité, je ne pense pas qu’un jour nous irons faire une quelconque activité ensemble. « Dis-le à ta face parce que t’as tout sauf l’air traumatisée en ce moment. » Et si vraiment elle veut l’être, traumatisée, je suis assez bon à ce jeu-là en général en parlant de choses que les gens n’ont pas envie de savoir. « J’ai bien peur que non ! » J’expire bruyamment en secouant négativement la tête. « Tu aurais pu te forcer un peu plus pour moi. » me moqué-je en l’observant avec un faux regard réprobateur.

Après les blagues viennent assurément les sujets plus sérieux, les sujets qui nous tiennent plus à cœur. Prendre ma place de père auprès de Maddox a été tout sauf évident, mais au bout de quelques mois, le petit a accepté de me laisser assumer mon rôle. Vivre toute cette frustration et cette peine d’avoir été privé de mon fils pendant toutes ces années m’a fait comprendre toute la misère que j’ai fait vivre à mes parents adoptifs depuis qu’ils m’ont pris sous leur aile et m’ont donné envie de rectifier le tir avec eux pour leur permettre de voir leur petit-fils grandir à défaut d’avoir été proche d’eux pendant mon enfance et mon adolescence. Perdu dans mes pensées, ce sont les bras de Tessa autour de mon corps qui me ramènent sur Terre et qui me font grogner. Je ne prends même pas la peine de dire quoi que ce soit parce que je sais à quel point ça l’amuse de me faire des câlins alors qu’elle sait très bien que je n’en ai jamais été friand. « Le principal c’est que vous appreniez à vous connaître. C’est tout ce qui compte ! » Je lui souris faiblement en hochant la tête. « Je suppose que tu as raison. » J’essaie de me convaincre que c’est suffisant, mais même si je passe de plus en plus de temps avec Ines à qui je suis réellement attaché, je ne peux m’empêcher de penser à Danika et aux rapprochements que nous avons eus au début de l’année qui m’ont réellement fait croire qu’on pourrait se donner une deuxième chance. Une amère désillusion. « Hm l’odeur de ce café est une torture ! » dit Tessa en reprenant sa place. Finalement, je suis incapable de me retenir de passer un commentaire sur cette proximité qu’elle m’a imposé. « Tu ne l’aurais pas senti si tu avais respecté ma bulle. » Je lui fais un clin d’œil en portant mon gobelet à mes lèvres pour prendre une gorgée de ce délicieux café qu’elle aimerait tant que je lui donne. Please try again.

Je ris beaucoup moins depuis que Tessa a lâché la bombe, qu’elle m’a mis au courant de cette grossesse surprise que j’ai tout sauf vue venir. « En vérité c’est tout comme... je le sais depuis un peu plus d’une semaine... Depuis le début de l’année, entre le stress, le diagnostic et les contrariétés, mes cycles c’est le chaos alors j’ai pas spécialement prêté attention à un éventuel retard... Et les nausées, j’ai mis ça sur le compte de mon traitement qui me filait le mal de mer... Et puis je me suis protégée, alors j’ai pas pensé une seconde au fait que je puisse être enceinte ! J’me suis pas rendu compte ce soir là s’il y a eu un problème avec le préservatif, j’allais pas bien ok ? » Est-ce que je peux réellement lui en vouloir alors que j’ai moi-même un enfant qui n’était pas désiré au départ? À défaut de continuer à critiquer son irresponsabilité, je m’informe plus tôt sur l’identité du père et de ce qu’il en pense. « Ash, on se connait depuis la fac... Il avait été là pour moi après ma séparation d’avec Adriel... Il le sait, je lui ai dit dès que j’ai eu les résultats de la prise de sang. Il m’a promis qu’il serait là pour mon échographie la semaine prochaine. » Ça me rassure un peu de savoir qu’elle ne sera pas seule pour élever son enfant et, surtout, qu’elle ne compte pas le cacher au père comme Danika l’a fait. « Au moins ça… tu vas avoir besoin d’aide. » Surtout dans sa condition. Le plus d’aide qu’elle pourra avoir, mieux ce sera. « Je ne l’ai dit qu’à mes parents pour le moment, ils sont à la fois inquiets et contents, difficile à dire... J’ai encore rien dit à Link ou à Freddy... Je voulais être sûre que tout allait bien pour le bébé.. et pour moi. J’ai pas envie de les inquiéter pour... peut-être rien s’il y a un problème. » Je hausse les sourcils d’un air surpris. Connaissant la relation privilégiée qu’elle partage depuis toujours avec Lincoln, je suis surpris d’apprendre que je suis au courant avant lui. « Wow, je l’apprends avant ton jumeau? Je ne me pensais pas si important. » J’essaie de détendre l’atmosphère comme je peux même si je pense toujours que ce n’est pas une bonne idée dans sa condition. « Mon cardiologue dit que, c’est possible pour moi de mener une grossesse à terme. Que je devrais m’arrêter de travailler et ne pas forcer car je serais sûrement plus fatiguée que la plupart des femmes. Et aussi que ça serait sûrement une césarienne pour éviter de trop solliciter mon coeur pendant l’accouchement. » Je hoche lentement la tête malgré toutes les questions qui se bousculent dans ma tête. « Ton cœur va supporter l’anesthésie? » demandé-je inquiet. « J’ai toujours voulu être maman Lawrence... Je me dis que si ce petit être a réussi à s’accrocher, c’est peut-être qu’il y a une raison. » Malgré mes craintes, visiblement sa décision est prise et je suis conscient que je n’arriverai pas à la faire changer d’idée. Je soupire donc en secouant la tête négativement sans la quitter des yeux. « T’es mieux de t’accrocher toi aussi parce que s’il t’arrive quoi que ce soit, je vais t’en vouloir pour le reste de ma vie. » Je plisse les yeux comme pour la mettre en garde tout en posant une main sur son genou pour lui faire comprendre que je serai là pour la supporter.

Blanche Neige et Grincheux @Tessa Mulligan

« La prochaine fois, essaie de me réveiller avec plus de douceur et là... peut-être que je ferais un effort ! » Elle n’a pas le sens de l’humour, Tessa, ou elle est autant grincheuse que moi quand elle se réveille le matin. Une bonne chance qu’on ne soit pas plus que des amis ou ça risquerait des faire des flammèches tôt le matin. « Bon bon bon, vous n’êtes jamais satisfaites les femmes. Ça me fait penser à un proverbe chinois dont Stacey m’a parlé une fois… » Ma langue claque contre mon palais tandis que j’essaie de m’en souvenir. Lorsque je m’en souviens enfin, je lève mon index, le regard illuminé. « Un homme qui veut séduire une femme doit franchir des montagnes, une fille qui veut séduire un homme n'a qu'une cloison de papier à franchir. » Okay, ce n’est peut-être pas le proverbe qui a le plus rapport avec ce qu’elle vient de dire, étant donné qu’il n’y a jamais eu de séduction entre nous deux, mais sa « critique » m’a quand même fait penser à ça. « Il faut vraiment que tu m’expliques pourquoi les hommes on doit toujours en faire plus que vous lorsqu’il s’agit de séduire l’autre sexe. Non mais avoue que c’est vrai… on doit vous complimenter en fou, vous acheter plein de cadeaux, vous surprendre pour Noël et votre anniversaire… et vous à côté? C’est à peine si vous avez besoin de lever le petit doigt alors qu’on doit se fendre le cul à côté. Non vous, vous avez juste à nous parler sur un ton langoureux en balançant vos cheveux vers l’arrière et vous avez toute notre attention, il ne nous en faut pas beaucoup plus pour être satisfaits. Oh et il ne faudrait surtout pas oublier d’organiser une soirée super romantique qui coûte la peau du cul pour la Saint-Valentin ou on va en entendre parler pendant des semaines. Pourquoi ça ne sera pas l’inverse pour une fois? Je pense que les filles aussi vous devriez vous forcer pour nous surprendre des fois, que la responsabilité ne soit pas toujours sur nos épaules. » Même si Topaze n’a jamais passé de commentaires là-dessus alors que nous passons de plus en plus de temps ensemble, la pression sociale suffit à ce que je me sente obligé de penser à ce genre de choses avec Noël qui approche de plus en plus. Parce que si jamais ce qu’il se pas se entre nous devient sérieux, elle aura certainement des attentes. « C’est de bonne guerre ! Mais tu sais à quel point j’aime t’entendre grogner. » Je lève les yeux au ciel en ricanant. Évidemment que je le sais, je le vois bien que ça l’amuse chaque fois qu’elle me prend dans ses bras, qu’elle pénètre dans ma bulle alors qu’elle sait que je ne suis pas complètement à l’aise avec les marques d’affection. « Un jour je vais me venger et depuis le temps que tu t’amuses à le faire, tu n’as pas fini de m’avoir sur ton dos. » Je la mets en garde, la vengeance est un plat qui se mange froid.

« Il avait l’air de bien encaisser la nouvelle en tout cas. Je crois qu’il était encore plus emballé que moi. » Ça me rassure de savoir que le gars en question est content d’apprendre qu’il sera papa et qu’il compte être dans la vie de son enfant car Tessa en aura bien besoin. « C’est déjà ça… » Il ne reste plus qu’à espérer qu’il sera responsable et qu’il ne changera pas d’idée lorsque l’enfant viendrait au monde. « Qu’est-ce que tu crois... Je n’offre pas mes câlins au premier venu, je pensais que tu avais compris ça depuis longtemps ! » Je ris en lançant un regard dubitatif dans sa direction. « Je ne dis pas que je suis le premier venu, mais je pensais quand même que tu en aurais parlé à Lincoln avant moi. Sa réaction te fait peur? » Pourtant de ce que je connais de lui, il n’a pas l’air du genre à critiquer les choix de sa sœur, au contraire, c’est plutôt de la réaction de Freddy que je me méfierais si j’étais à sa place. « Il faudra bien ! Ca va aller. » Ces « promesses », je les prends toujours avec un grain de sel étant donné que ça ne dépend pas vraiment d’elle et qu’elle ne pourra rien faire pour que son cœur supporte l’anesthésie. Il faut espérer, simplement. « Hey ! Je suis une Mulligan, ne pense pas que tu sauras te débarrasser de moi aussi facilement ! Tu vas devoir me supporter encore des années, moi et mes accolades ! » C’est vrai que les Mulligan sont comme de la mauvaise herbes : ils reviennent toujours malgré tout ce que tu fais pour ne plus les voir. « Et si je ne veux pas? » Je tente d’avoir l’air convaincant même si je sais très bien qu’elle ne me croira pas une seconde. « Et puis, s’il vient à m’arriver quelque chose, tu pourras toujours dire que... tu m’avais prévenue et qu’une fois de plus j’ai refusé de t’écouter ! Et dans le pire des cas... Je compte sur toi pour dire à cet enfant que j’étais la meilleure ! » Je secoue vivement la tête en baissant les yeux, refusant d’imaginer une telle possibilité. « Je ne le ferai pas, tu seras obligée d’être là pour le faire toi-même. Compris? »