Mercredi 6 octobre 2021 - J’ai la tête ailleurs depuis déjà plusieurs semaines. Précisément, depuis que je sais que je porte la vie. C’est un peu grâce à Tessa car j’aurai pu rester dans le déni encore longtemps. Même avec des seins douloureux qui prennent du volume à une vitesse vertigineuse. Ne parlons même pas de mon bidon qui gonfle gentiment. Mes habitudes ont quelque peu changé. Adieu mes tenues trop prés du corps. Je n’assume pas mes formes. Du moins, pas devant Adriel qui n’est pour le moment pas encore au courant. Je sais qu’il faut que je lui dise mais je ne veux pas lui balancer ça comme s’il s’agissait de la pluie et du beau temps. Notre vie est sur le point de changer radicalement. Pour dire vrai, elle a déjà changé pour moi. J’affectionne les sweats trop larges de mon amoureux. Ça change clairement de mes petites tenues sexy. Adriel la bien remarqué. J’insiste sur le fait que j’ai envie d’être à l’aise, tout simplement. Niveau crédibilité on a vu mieux. J’essaye de repousser l’heure fatidique autant que je peux. Fini les douches à deux. Je suis enceinte de trois mois. Ça devient trop visible. Ça me fend le coeur de fermer la porte à clé. Je n’ose plus non plus être intime avec lui. Addie ne comprendrait pas pourquoi je le prive de ma poitrine. Trop sensible. Et le sentir toucher mon ventre, je ne suis pas encore prête. Je n’arriverai tout simplement pas à retenir mes émotions. Le pire c’est quand vient le moment du coucher. Notre position préférée a toujours été la cuillère. Quand je sens ses bras m’enrouler, je récupère ses mains pour les poser un peu plus haut que mon ventre. Cette situation ne peut plus durer. J’ai la sensation de me priver de lui. C’est comme une journée sans soleil. Une partie de moi a envie d’exploser de joie. Seulement, sans mon autre moitié je n’y parviendrais pas. Depuis plusieurs jours, je réfléchis à une manière de lui annoncer qu’il va être papa. J’aurai pu le faire en chanson mais ça me rappellerait trop ma précédente relation. J’ai envie que ce moment soit unique. Juste nous … trois.
Assise derrière mon bureau, je n’entends même pas la sonnerie du téléphone. Beaucoup trop absorbée par mes pensées. J’ai l’intention de lui annoncer ce soir. Pas demain, ni la semaine prochaine, mais bien ce soir ! « Allo Sanders !!! T’es sourde ou quoi ?? » Leah entre dans mon cabinet en ouvrant grand la porte. Je me précipite sur le combiné pour décrocher. « Allo oui ? … Ha bonjour Madame Carson. Oui oui, demain 9H pour Snoopy. Vous nous le déposez à la clinique et à 17H vous pourrez revenir le chercher » Les dernières modalités réglées, je raccroche en relevant la tête vers ma meilleure amie. « Toi tu me dis pas tout » Elle me regarde en me fixant droit dans les yeux. J’échappe son regard car elle me connaît trop bien. Je ne peux pas lui avouer ma grossesse. Leah ne sait pas tenir sa langue. - On n’est pas meilleures amies pour rien - . Son enthousiasme serait beaucoup trop grand. Impossible. « Pfff, n’importe quoi. » Je m’empresse d’éteindre mon ordinateur pour quitter au plus vite mon bureau. Si je reste trop longtemps là, je vais être prise au piège comme un rat. « Depuis quand tu t’habilles en sac à patate ? C’est une nouvelle mode que t’essaye de lancer ?? » Me dit-elle en soulevant légèrement mon sweat. Je le réajuste aussitôt en balayant mon vêtement avec mes mains. « Heyy !! » Toujours cette peur qu’on puisse découvrir mon petit ventre. « C’est confo. J’suis bien là dedans. » Ça par contre c’est vrai. J’ai l’impression d’être envelopper dans ma couette tout au long de la journée. Un vrai bonheur. Je crois que je commence à y prendre goût. Je regarde brièvement l’heure sur mon portable. Dix-huit heure. Adriel sera là dans une petite heure. Je n’ai pas une minute à perdre. « Tu m’excuseras, j’ai un dîner à préparer. » « Woooouhhhh !!! Vous êtes trop mignon vous deux. J’suis presque jalouse. A quand le mariage ?? » Je m’étouffe avec ma salive avant de rire niaisement. Il faut déjà que je lui annonce que je suis enceinte. On attendra un peu pour que je devienne sa femme. « HA HA ! T’as de l’humour, j’aime ça » Je ferme la porte de mon bureau avant de me retourner brusquement sur elle en fronçant les sourcils. « T’es au courant d’un truc dont tu devrais me parler ???? » Ils ont bien manigancer un voyage un Paris dans mon dos. Je les vois très bien capable d’organiser un mariage. « QUOI ? Nan mais sérieux ! Tu me crois capable de te cacher ça ??? » Ses yeux sont grands ouverts. Leah donne presque l’impression d’être choquée. « Hmmm… Mais t’aimerais ça avoue ? » Mes joues s’enflamment. J'accélère le pas vers les escaliers qui mènent à mon appartement. « Mouhahaha je le savais !!! » « Tu m’agaces, tu le sais ça ?! Je te laisse fermer la clinique, je dois filer » Je me sens tirer en arrière. Mon corps pivote vers ma meilleure amie. Elle me pointe sa joue pour un bisou. Je roule des yeux en lui offrant ce qu’elle me réclame. Tssss …
Burton m’accueille chaleureusement. Entre ces quatre murs me sens libre de pouvoir apprécier ma grossesse. Enfin ! Les deux mains sur mon ventre, je souris niaisement à mon chien qui pose sa truffe-là. C’est certainement le premier qui a senti ce petit être grandir en moi. « C’est le grand jour ! Ton papa va enfin connaître ton existence » Je glisse mes mains sous mon vêtement pour mieux sentir les rondeurs de mon corps de jeune maman. L’embryon est encore trop petit pour que je le sente bouger. Mais j’ai l’impression d’être en parfaite symbiose avec lui. Ce bébé n’était pas au programme. Du moins pas dans l’immédiat. J’en suis consciente. J’ai espoir qu’Adriel acceptera la nouvelle avec autant d’enthousiasme que moi. Ce n’est pas comme si j’avais fait exprès de tomber enceinte. On parviendra à surmonter les aléas. Notre amour est si sincère, si profond. De toute manière il est impossible pour moi de faire marche arrière. Premièrement parce que je ne ferais pas l’erreur deux fois d’avorté. Deuxièmement parce que les trois mois légal sont passé. Si malheureusement Adriel renonce à être père, j'élèverai seule cet enfant. Je ne préfère pas y penser …
Le four sonne la fin de la cuisson. J’enfile mes gants avant de sortir le plat. J’ai fais des lasagnes … Il adore ça. Okay c’est pas celles de sa mère. Mais je suis sûr qu’il saura les apprécier. Il va juste trouver étrange que je lui cuisine ce plat. Je passe mon temps à éviter soigneusement d’en manger. Ce soir je veux vraiment lui faire plaisir. J’ai même fait un effort vestimentaire comparer aux autres jours de la semaine. Une petite robe bleue décontracte avec tout de même un gilet pour cacher mes formes. Je sursaute quand j’entends la porte d’entrée s’ouvrir. « Déjà rentré ? » Il a un peu d’avance. Heureusement tout est fin prêt. Lorsqu’il s’approche je n’hésite pas à venir lui offrir un baiser en lui souriant affectueusement. « Ce soir c’est lasagne !! » Je dis fièrement en passant le plat sous ses yeux. « Je me suis dis que ça te ferait plaisir » Je me penche sur sa joue pour lui faire un bisou furtif. Puis je porte notre repas jusqu’au salon où j’ai dressé une table avec une bougie pour rendre les lieux plus ‘romantique’. Je le laisse s’installer tranquillement. J’essaye de cacher ma nervosité en tortillant une mèche de mes cheveux. Ça va bien se passer, no stress. Je déglutis difficilement en me cachant derrière mon verre. « Ta journée c’est bien passé ? » Je lui sers une part. Une pour moi également. Ma fourchette vient se planter dans mon assiette pour finir dans ma bouche. Ça ne m’avait pas manqué … hmmmm … Burton renifle un sac que j’avais caché derrière l’accoudoir du canapé. Je le chasse avec ma main en essayant de faire bonne figure devant Addie. Sourire un trop parfait. Mais mon berger allemand insiste. Rahhh je vais le tuer ce chien !!!! « Faut qu’on parle » Dis-je en repoussant mon fidèle compagnon hors du salon. Okey c’est brutal mais fallait que ça sorte … « T’as du remarquer quelques changements depuis un petit temps … » Respire respire … ! J’étouffe presque. J’attrape sa main pour ensuite le regarder droit dans les yeux. « Je veux que tu sache que j’ai toujours était sincère avec toi … » Mon coeur palpite un peu trop vite. J’ai les mains moites. Lance-toi Sanders. C’est le moment ou jamais. Je me penche vers le fameux sac pour en sortir un livre que j’ai confectionné. Un joli conte qui relate tout l’amour que j’ai pour lui. C’est plutôt mignon. Rien d’alarmant pour le moment. Je souris un peu plus à chaque page que nous tournons ensemble. « Je sais que j’ai été distante ces derniers jours et je m’en excuse. J’avais besoin de temps avant de … ‘fin… » rahhhh c’est pas facile sérieux. J’ai tellement peur qu’il m’en veuille. « Promets-moi que ça ne changera rien entre nous » Mes yeux suppliants brillent un peu sous l’émotion. Je vais mettre ça sur le compte des hormones. Je me penche à nouveau pour attraper le deuxième conte. Celui-ci est plus explicite. En voyant la couverture je pense qu’il va vite percuter où je veux en venir. Je lui tends timidement, les mains légèrement tremblantes. J’ai imaginer une mini princesse avec la chevelure de sa mère et les tâches de rousseurs de son père. L’espièglerie de ses parents. Je me cache derrière une peluche étoile que j’ai acheté pour l’occasion. Osant à peine le regarder de peur d’y voir des regrets. Lorsqu’il relève les yeux sur moi je serre très fort la peluche sur mon ventre en plongeant mes émeraudes sur mon amoureux. « Tu vas être papa … » Mes yeux se remplissent de larmes. Je n’arrive pas à en dire plus. Des larmes de joie évidemment. J’ai espoir qu’il partage positivement ce moment avec moi. Pour le moment je me tiens gentiment à ma place en patientant sa réaction. J’ai jamais trouvé le temps aussi long. Les souvenirs de Mars me hantent. Non non, l’histoire ne se répétera pas. Notre petite étoile brillera sous la fierté de ces deux parents.
Mercredi 6 octobre 2021 Appareil photo au cou, je pose délicatement les mains sur les épaules de Charlotte — ma cliente — pour les diriger pour la photo. « Voilà, comme ça », je conclus en me reculant. « Bouge pas… » Je lève mon appareil photo sur elle, ses yeux bleus fixent l’objectif. « Tourne un peu la tête à droite… voilà, oui, comme ça. » Elle s’exécute et j’appuie sur le déclencheur, une fois, deux fois. On poursuit comme ça un moment. Faut dire qu’elle est plutôt photogénique, je n’ai pas tant d’indications à lui donner pour ses photos professionnelles. En riant, un peu nerveuse on dirait, elle m’explique que c’est grâce à des vidéos sur Tik Tok qu’elle a appris à poser. Ça me fait sourire. À force que Lyla me parle de cette application, j’ai succombé à l’installer sur mon téléphone. Moi qui déteste — et qui suis incapable — d’avoir les yeux scotchés trop longtemps à mon écran pour autre chose que du boulot (ou des textos d’Erin), je ne l’ai pas ouverte pendant quelques temps, jusqu’à ce que j’appuie dessus par erreur et que je bug dessus pendant beaucoup trop longtemps. J’y ai découvert tout un nouveau monde pour les photographes, une nouvelle manière de présenter mon travail. Je ne m’y suis pas encore mis sérieusement, mais j’ai commencé à parler avec Charlotte, une designer graphique, il y a quelques temps, et elle m’encourage à m’y mettre. Nous avons échangé des services de photos professionnelles contre ceux d’identité visuelle. D’ailleurs, avec son téléphone, elle nous filme durant la séance de photos pour une courte vidéo et ça me fait tout bizarre. Je tente de l’oublier. Penchée au-dessus de mon appareil photo près de moi, elle observe attentivement les portraits que j’ai pris d’elle et en semble plutôt ravie, ce qui me fait plaisir. « Ça te dit d’aller manger un morceau? » me demande-t-elle finalement. Mon regard se porte sur ma montre qui m’indique la réponse. « Je ne peux pas, désolé. Ma petite amie — » Sans m’en rendre compte, je souris niaisement. « — nous a préparé à dîner ce soir. » Mon sourire s’affaiblit et mon estomac se tort. Ça fait quelques temps qu’Erin a… un comportement bizarre. J’ai l’impression qu’elle s’éloigne, qu’elle n’ose comme pas me regarder dans les yeux. Quand j’essaie de la caresser, de me montrer plus entreprenant, elle me repousse gentiment. Elle se dépêche à prendre sa douche avant que je n’aie pu la rejoindre ou elle verrouille la porte en vitesse. Certes, elle porte beaucoup mes vêtements ces temps-ci, ce qui a le don de me rassurer au moins un peu sur notre couple, mais en même temps, ce n’est pas tant son genre. Ce n’est pas pour rien que la deuxième chambre est remplie de ses vêtements, mais elle y touche à peine depuis un certain temps. Je l’ai vue être malade quelques fois et il est arrivé une fois ou deux que je me réveille et qu’elle ne soit plus à mes côtés dans son lit. Elle dit qu’elle est fatiguée ces temps-ci, que c’est le boulot, mais vraiment… je ne sais pas si je la crois. J’ai un doute. Et si… et si elle voulait m’annoncer qu’elle ne veut plus de nous comme ça ce soir? Qu’elle veut qu’on retourne à de l’amitié, comme avant? J’ai la nausée. Pour être franc… si elle me quitte, je ne suis pas certain que ça pourrait redevenir comme avant. « Ça va? » La voix de Charlotte me tire de mes pensées beaucoup trop sombres pour une belle journée comme celle-ci. Je bats des paupières rapidement et hoche la tête en tentant d’offrir un sourire rassurant à Charly. « Je vais devoir te laisser, faut que je retourne me préparer à mon appart. » La main de ma nouvelle amie se pose sur mon bras. « Ça va aller, Mayers. » « Bien sûr que ça va aller… tout va bien, je t’assure. » Mais je ne suis pas certain d’être convaincant si une personne qui vient d’entrer dans ma vie arrive à détecter qu’à l’intérieur de moi, c’est la tempête.
Link n’est pas à l’appart. Je pense qu’il travaille encore. Je verse des croquettes dans les bols de Peter Quill et Rocket, sachant que je ne rentrerai probablement pas ce soir. Du moins… je l’espère. Peut-être que je m’en fais trop et qu’Erin a seulement envie de me cuisiner quelque chose ce soir? Sans truc à me dire. Mais elle agit vraiment pas comme d’habitude… Argh. Ma douche est prise rapidement, je m’essuie avec ma serviette et me dirige jusqu’à ma chambre pour m’habiller parce que j’ai encore oublié mes vêtements dans ma penderie. Je suis tellement habitué depuis mon retour à Brisbane d’habiter seul ou bien d’être avec Erin que je n’y pense pas plus que ça. En repositionnant ma montre sur mon poignet, juste au-dessus de mon tattoo, je vérifie l’heure. Pas possible… je suis en avance? C’est plutôt rare chez moi, j’avoue. Mais plutôt que de glander à l’appart pour passer le temps, je décide qu’il est temps que je parte chez Erin. De toute manière, c’est un peu comme chez moi depuis qu’on s’est mis ensemble, j’y passe pratiquement plus de temps qu’ici. C’est d’ailleurs elle qui me rappelle ici et là que je devrais peut-être retourner à l’appart, profiter de la colocation avec mon bro. Elle n’a pas tort, parce qu’être en coloc avec lui, c’est trop bien. Et autant en profiter avant qu’Erin et moi emménagions ensemble pour de vrai… j’ai hâte, il faut dire. Des bisous à mes babies plus tard, habillé d’une chemise et d’un jean propres, je file à ma voiture pour me rendre chez Erin, retenant presque mon souffle de découvrir ce qu’elle me réserve ce soir. M’enfin. Je passe au centre-ville chercher une rose pour Erin. J’ai envie de lui faire plaisir, et bon… c’est un peu ma manière de lui signifier que je tiens à nous, à notre couple. Un petit clin d’oeil à notre voyage à Paris, au véritable départ de nous deux, fous amoureux l’un de l’autre, en tant qu’adultes et tout et tout.
Comme j’ai la clé de son appartement sur mon trousseau, je ne prends pas la peine de cogner. Dès que je pose un pied à l’intérieur et referme la porte derrière moi, une merveilleuse odeur m’entoure. Je salive déjà. « Ça sent bon », je commente en enlevant ma veste pour la poser sur un crochet dans l’entrée. « Déjà rentré ? » Je la rejoins près du comptoir de la cuisine et l’attire vers moi pour l’embrasser. Faites qu’elle ne me laisse pas ce soir. Mais ses lèvres se laissent aller contre les miennes quelques secondes. C’est bon signe, si? C’est bon tout court. « J’avais hâte de te rejoindre », je lui dis près de l’oreille, avant de lui coller un bisou contre la tempe. Je lui glisse la rose dans les mains. « Tu es magnifique, ma chérie. » Elle porte un gilet qu’elle serre contre elle comme si elle avait froid — pourtant, le chauffage est à fond ici — et je crois distinguer sous lui une robe bleue que j’aime bien qu’elle porte. En tout cas, ça fait différent de mes sweats qu’elle semble s’être appropriés ces jours-ci. Elle est aussi jolie, mais ce n’est pas elle exactement. « Ce soir c’est lasagne !! » Mon regard se pose sur ledit plat de lasagnes sur le comptoir et un petit sourire se profile sur mes lèvres, même si ma tête me dit qu’il y a peut-être une raison pourquoi elle a fait mon plat préféré spécifiquement. Elle qui évite d’en manger quand j’en fais — par j’en fais, je veux dire, faire cuire le plat de ma mère au four. Elle dit qu’elle en a trop mangé, mais je ne vois pas comment on peut se tanner de pâtes, de sauce et de fromage. M’enfin. « T’as préparé des lasagnes? » je fais, incrédule, comme pour m’en assurer. Elle me passe direct le plat sous les yeux. Ça sent tellement bon sérieux. Mais une lueur inquiète passe dans mon regard. J’ai l’impression qu’elle a cuisiné mon plat préféré pour m’annoncer un truc. Et si…
Et si elle était malade? Comme Tessa. Mon estomac se retourne. Cette simple idée me donne la nausée. Déjà que la nouvelle de Tessa m’a assommé. Et si deux de mes proches m’annoncent une nouvelle comme celle-là? Si c’est ça… je… j’aurais l’impression que mon monde s’écroulerait. « Je me suis dis que ça te ferait plaisir » La voix d’Erin me sort de mes pensées. Je tente un petit sourire qui s’avère plutôt forcé. J’ai hâte qu’elle me dise ce qu’il y a et, si elle ne le fait pas dans les… dix prochaines minutes, on va dire, je n’hésiterai pas à le lui demander. Ses lèvres se posent sur ma joue, mais ça ne me détend pas trop. Mes pieds me guident à la suite de ma meilleure amie, dans le salon, sans que j’aie trop à y penser. Mes yeux balaient la table basse qu’elle a décoré de bougies qui laissent un parfum de cupcakes dans l’air. « C’est joli, ma chérie », je commente doucement en m’installant sur le canapé. Erin s’installe à son tour et se tortille une mèche de ses cheveux, ce qui n’apaise pas la sensation de panique naissante que j’ai en moi. Malgré tout, je tente de me changer les idées. Elle m’a préparé des lasagnes et on va manger ça avec des bougies pour mettre l’ambiance. Tout ce que j’aime. « Ta journée c’est bien passé ? » J’ai fait ma première vidéo Tik Tok avec Charlotte est ce que je voudrais répondre, mais ma voix ne sort pas et je me contente de hocher la tête. Elle nous sert chacun nos parts alors que je n’arrive pas vraiment à bouger. Sa fourchette se porte facilement à sa bouche alors que la mienne reste sagement à côté de mon assiette. Allez, Erin, dis-moi ce qu’il y a… Oh et puis zut… ça sent trop bon. La première bouchée me fait écarquiller les yeux de bonheur. « C’est vraiment trop bon », je gémis avant de prendre une gorgée de mon verre. Burton semble intéressé par un truc à côté de ma copine et celle-ci tente de le repousser avec un sourire plutôt étrange à mon égard. Comme si elle cachait quelque chose… « Faut qu’on parle » Sa phrase me surprend tellement que j’en échappe ma fourchette en regardant ma petite amie avec toute la surprise dans mon regard. Je replace mon ustensile près de mon assiette. « Okay… » « T’as du remarquer quelques changements depuis un petit temps … » Mes lèvres se serrent les unes contre les autres. Bien sûr que j’ai remarqué des changements. Erin est plus distante, elle porte des vêtements beaucoup trop grands pour elle, ne veut plus que je la touche… Elle semble plutôt nerveuse en ce moment. Ce qui me rend à mon tour assez… anxieux. Sa main attrape la mienne et son regard émeraude se plonge dans le mien (pas émeraude). J’en oublie presque de respirer. Qu’est-ce qu’elle va bien pouvoir me dire… Bordel, l’attente est interminable et insupportable. « Je veux que tu sache que j’ai toujours était sincère avec toi … » Mon pouce caresse le dos de sa main. Va-y, tu peux tout me dire. « Je le sais, ça », je réponds doucement en tentant un sourire. Tu peux encore l’être avec moi. N’aies pas peur. Même si moi, la peur me travaille.
Erin se penche sur l’accoudoir et remonte sa main avec un livre qu’elle me tend. Le titre me fait sourire. Adriel, 10 raisons pour lesquelles je t’aime. Mes doigts caressent la couverture et mon coeur se met à battre de plus belle. Elle m’aime, elle m’aime, elle m’aime, elle m’aime. « C’est toi qui a fait ça? » je souffle, ému. Collés l’un contre l’autre, on tourne les pages chacun notre tour. Chacune des pages, chacun des textes et chacune des illustrations me fait sourire davantage. C’est vraiment mignon. Et touchant. Mais ma tête me fait remarquer qu’il y a peut-être une raison pour laquelle elle me donne ça aujourd’hui. Ce n’est pas notre anniversaire de couple ou une fête quelconque, pourtant. « Je sais que j’ai été distante ces derniers jours et je m’en excuse. J’avais besoin de temps avant de … ‘fin… » Une main toujours sur le livre, je laisse l’autre caresser son dos, tout près de sa nuque, sous ses cheveux. Je me penche pour poser mes lèvres contre sa joue, les laisse là un moment pour savourer le parfum de sa peau. « De temps pour quoi, Riri? » « Promets-moi que ça ne changera rien entre nous » Ses yeux cherchent les miens, mais cherchent aussi l’assurance que ça ne changera rien entre nous. Ça y est, elle va m’annoncer qu’elle est malade, elle aussi… Je ne suis pas prêt. Oh… ou il lui est peut-être arrivé quelque chose? Mon estomac se noue alors que mes pensées s’enflamment. Et si… et si un gars a abusé d’elle? Ça expliquerait pourquoi elle n’a plus l’air si… à l’aise dans son corps. Pourquoi elle ne me regarde plus autant dans les yeux. Pourquoi elle ne me laisse plus beaucoup la toucher. Je vais le taper, ce mec. Je laisse mes doigts glisser sur sa nuque pour les ramener sur sa joue. Ses yeux brillent. J’ai envie de lui promettre ciel et terre pour qu’elle ne pleure pas. Je le ferais de toute manière. « Rien ne changera entre nous, promis », je murmure. Erin est la personne qui compte le plus pour moi. Une vie sans elle… ça serait passer la vie dans le noir complet. Elle est ma lumière, mon soleil.
Elle me tend finalement un deuxième livre. Intrigué, je baisse les yeux sur la couverture sans toutefois réaliser sur le coup. Quand Baby Manders sera grande. Une enfant aux cheveux blonds semble être le personnage principal. Erin quand elle était petite? Et pourtant, le personnage masculin à côté est le même qui me représentait dans l’autre livre… et il est beaucoup plus âgé que la petite. Mon regard se lèvre avec hésitation dans celui de ma copine, comme pour chercher une confirmation alors que le puzzle se remet en place dans ma tête. « Erin? » Je m’entends à peine moi-même. Baby Manders… Ça ne peut qu’être… Alors que je lis chacune des pages dans ma tête en reprenant les phrases au moins quatre fois chaque (non, non, sans exagération), tout se bouscule en moi. Non…? Ça ne peut pas…? Et pourtant, ce livre… Je lève le regard quelques fois sur ma copine alors que mes mains légèrement tremblantes tournent les pages. Mais Erin ne me regarde pas, comme si elle n’osait pas, elle se contente de serrer une peluche en forme d’étoile que je ne reconnais pas. Tu sais, tu ne seras jamais trop grande pour un câlin de ton Papa, ça dit dans le livre. Je déglutis. Mon coeur bat si fort que c’est tout ce que j’entends, on dirait. Je referme le livre et mes jointures se referment sur l’épaisseur, bien fort. Lorsque je lève les yeux de nouveau, Erin me regarde enfin. Ses yeux brillent et, si j’arrivais à bouger, si je n’étais pas aussi paralysé, je passerais mes pouces sur ses paupières pour sécher ses larmes. Je n’arrive pas à déterminer si elle est contente ou triste… Mais je détecte un tout mini sourire qui se profile sur ses lèvres, alors je pense que la première option fait plus de sens. « Tu vas être papa … » La bouche ouverte, les mots ne sortent pourtant pas. Moi, Adriel Mayers, je vais être… papa? Moi, tout juste vingt-huit ans… papa? Et pourtant, cette nouvelle fait du sens. Tout se replace. Les vêtements trop grands… Elle faisait ça il y a quelques mois. Avec Gaby. Comme si elle n’osait pas assumer son corps qui portait la vie. Les fraises. Oh my God, toutes les fraises qu’elle engloutis ces jours-ci. S’entend, elle en mange plus que la moyenne même normalement, mais là, c’est beaucoup plus que normalement. Ça explique aussi les deux fois où je l’ai vue être malade… toutes les fois où j’ai senti, dans la nuit, qu’elle sortait du lit pour revenir quelques minutes plus tard. Les fois où elle s’est levée plus tôt que moi alors que je me lève de bonne heure pour aller courir presque tous les jours. Ça explique peut-être pourquoi elle ne veut plus que je la touche… même si ça ne doit pas trop paraître encore, non? Moi, papa. « Papa… » Je me laisse tomber contre le dossier du canapé en passant une main dans mes cheveux. Je tourne la tête pour fixer mon regard sur son ventre. « Je… » Mes deux coudes se logent sur mes cuisses lorsque je me penche pour semi enfouir mon visage dans mes mains. J’attrape le verre de bière à côté de mon assiette et le cale en une seule fois. « Erin… » Je tourne de nouveau la tête vers elle. Une larme a coulé sur sa joue et, instinctivement, ma main se tend pour aller la recueillir, mais je retire ma main ensuite pour la poser sur ma cuisse. « Je… tu… t’es… sérieuse? T’es sûre? » Je me trouve bête de ne pas avoir pensé à cette possibilité. Et bon, c’est plutôt que j’ai évité d’y penser, je le reconnais. Mais j’aurais dû reconnaître les signes. Comme la dernière fois… Ça me ramène quelques mois en arrière. Quand, grâce à ma belle-soeur qui nous avait parlé de ses symptômes de grossesse, j’avais eu l’audace de penser que ma meilleure amie pourrait être enceinte de Nel. Et j’avais eu raison. Et aussi… à quel point ça a affecté Erin de se faire avorter. De dire adieu à son enfant. Et je sais que c’est pourquoi l’idée de lui demander une telle chose ne me passe même pas par l’esprit.
Je ne suis pas prêt à être père. La simple idée d’élever un enfant m’étourdit. Moi, Adriel Mayers, élever un enfant… Quand moi-même je ne me sens pas toujours comme un adulte. Rarement. Quand l’idée de peut-être devoir renoncer à certains trucs comme les voyages me donne le vertige. Même si bon… je ne suis peut-être pas obligé de faire une croix là-dessus. Il y a des familles qui voyagent, non? Des familles… Et je sais que je suis prêt à mener une vie plus stable, de toute manière. Ça fait un moment que je le sais. Me mettre en couple avec Erin cet hiver me l’a confirmé. Mes mains se tendent pour encadrer le visage de mon amoureuse délicatement et je plante mon regard dans le sien. « Je vais être papa… » Je le réalise à peine. Ça tourne en boucle dans ma tête comme pour me convaincre que c’est vrai. « De toi… m’enfin… papa de ton bébé… de… » Je me sens tout maladroit. Je prends une grande respiration. « De notre enfant… woah… » C’est beaucoup plus tôt que je ne l’aurais imaginé. Mais… c’est avec Erin. Je nous voyais avoir des enfants éventuellement de toute manière. Un jour. Je laisse mes mains glisser sur ses épaules, le long de ses bras, pour les arrêter avec beaucoup d’hésitation sur son ventre. Et je relève mon regard dans celui de l’amour de ma vie, lui souris alors que je sais que mon monde est en train de basculer.
Mercredi 6 octobre 2021 - Je n’arrête pas de contrôler l’heure. Et ce n’est pas pour la cuisson des lasagnes, mais plutôt pour guetter l’arrivée d’Adriel. J’ai encore un peu de temps devant moi d’après l’horloge de la cuisine. Il est supposé finir à dix-neuf heures. Mais avec lui ça surfe plutôt sur du dix-neuf trente, vingt heures. « Ça sent bon » Le plat manque de m’échapper des mains. Mon équilibre vacille. J’ai échappé de peu à la catastrophe. Addie ne manque pas de me surprendre en se pointant avec de l’avance. Ce n’est clairement pas dans ses habitudes. Se douterait-il de quelque chose ? J’ai peur. Il me rejoint dans la cuisine. Son bras m’attire contre lui. C’est naturellement que je réduis à la distance pour venir l’embrasser avec tendresse. S’il y a bien quelque chose sur cette terre dont je ne me lasserai pas c’est sa proximité. Même fâché je ne lui résiste pas.« J’avais hâte de te rejoindre » Mon sourire se veut encore plus tendre à son égard. J’aime tellement cet homme que de lui dire un simple je t’aime ne suffirait pas. « Je ne vais pas m’en plaindre » Une rose vient se glisse là. - Sérieux il est parfait - Je me sens tellement chanceuse. Mon nez capte son arôme délicieux en plongeant droit sur ses pétales rouge sang. « Merci t’es un amour » Le dos contre son torse généreux, je relève la tête Pour lui adresser un doux sourire. « Tu es magnifique, ma chérie. » J'espère qu’il me trouvera aussi belle quand il saura que je porte son enfant. Les yeux plein d’étoiles, je laisse ma tête s’appuyer contre lui en sentant de nouveau la fleur qu’il vient de m’offrir. L’espace d’un cours instant je m’autorise à décompresser. Je redoute tellement la suite. Si ça se trouve ce sont nos derniers instants ensemble … Je ne sais pas si je saurais accepter qu’il renie cet enfant surprise. Je comprendrais qu’il soit un peu paumé. Moi même je le suis. J’ai besoin de son soutien pour affronter les sept mois qu’il me reste. Mais pas seulement. C’est toute l’éducation de notre enfant qui nous attend. On aura des hauts et certainement des bas. À deux tout est tellement plus facile. Ne m’abandonne pas je t’en supplie. Histoire de chasser les craintes qui me hantent, je fais volte-face avec le plat de lasagne en abordant le sourire de Bree van de kamp. - Vous savez ? La rousse toujours beaucoup trop parfaite, avec son panier en osier remplit de cookies pour mieux aborder les cancan du voisinage - . J’ai envie de faire bonne figure. Adriel me connaît trop bien. Je vois bien dans son regard qu’il n’attend qu’une chose : Que je lui crache le morceau. Mais dés que je fais un pas en avant, je recule de trois mètres tout de suite après. J’ai beau avoir passé des semaines à préparer ce moment, aujourd’hui je ne maîtrise rien. Même pas mes tiques nerveux. « T’as préparé des lasagnes? » Un rire nerveux m’étouffe. Je n’ai pas été très fine en proposant ce plat. Si encore je l’aimais. Mais c’est loin d’être mon péché mignon. Ça se mange. « T’as vu que je fais des efforts » Please, pose pas de questions et mange. S’il commence à me faire un interrogatoire je ne vais pas faire long feu.
On rejoint le salon avec le plat. Le scintillement des bougies rend l'atmosphère plus cosy. J’aime assez cette ambiance. Ça serait encore plus parfait avec un petit feu de cheminée qui crépite. « C’est joli, ma chérie » « Merci mon coeur » J’ai beau m’être montré farouche ces dernières semaines, je n’en suis pas moins amoureuse. Machinalement, je lui demande comment c’est passé sa journée. La question peut sembler bateau, pourtant sa réponse m’intéresse. J’aime savoir qu’il aille bien. Mais je n’ai le droit qu’a un hochement tête. J’aimerai le serrer dans mes bras et le rassurer que tout va bien. Encore faudrait-il que j’assume ce que je compte lui dire. Je me force à manger. L’angoisse me coupe clairement la faim. Avaler sans régurgiter relève presque de l’exploit. « C’est vraiment trop bon » Bouche fermée, je hoche la tête à mon tour en souriant faussement. « Hmmmm » Que je feinte. J'espère qu’il savoure parce que je ne vais pas lui en refaire de si tôt. Le bruit du sac plastique me fait tout de suite tourner la tête dans cette direction. En alerte, je chasse mon chien avec ma main pour ne pas qu’il fasse tout capoter. J’ai comme une envie de l’étriper. Surtout qu’il insiste en plantant son museau-là. Dans la précipitation je m’adresse à Adriel sans mesurer l’impacte de mes mots. Il en fait tomber sa fourchette. Mon corps se crispe de surprise. Je suis toute tendue. Surement autant que lui. La dernière fois que j’ai annoncé une grossesse, disons que ça ne s’est pas passé comme je l’aurais prédit. « Okay… » Pour le rassurer et me rassurer moi aussi au passage, je glisse ma main dans la sienne en plongeant mes yeux dans les siens. La chaleur de sa peau m’apaise. Je ferme quelques secondes mes yeux pour enfin me lancer dans des confidences hasardeuses. « Je le sais, ça » Qu’il me confie alors que je lui promets d’avoir été toujours sincère avec lui. Malgré ma peur, je me penche vers le sac pour en sortir un livre qui relate tout l’amour que je lui porte. J’ai envie de le rassurer sur ce que je ressens à son égard. J'espère qu’il ne doute pas de notre amour car je n’ai jamais été aussi amoureuse qu’aujourd’hui. « C’est toi qui a fait ça? » Ma tête contre la sienne, je me décolle pour plaquer mes lèvres sur sa tempe. « Oui. Pendant que tu faisais tes photos moi j’étais occupé à illustrer notre histoire » Un merveilleux conte que j’ai encore du mal à réaliser. L’angoisse me rattrape vite. Me voilà en train de lui confier que j’avais besoin d’un peu de temps avant de lui avouer quelque chose qui va radicalement changer sa vie. Notre vie … « Du temps pour quoi, Riri? » Je ferme les yeux au contact de ses lèvres. - Courage, tu peux le faire. - Mon coeur bat à cent à l’heure. J’ai tellement peur qu’il prenne ses distances et de le perdre … Ma vie s’écroulerait radicalement malgré le petit ange qui fleurit en moi. « Rien ne changera entre nous, promis » Ses paroles me rassurent. Je lui tend finalement le deuxième livre. Celui qui révélera tout. Je sens dans son regard qu’il est tout perdu. Je ne manque aucune de ses expressions. « Erin? » Finalement je baisse les yeux. Comme un enfant qui aurait peur de se faire gronder. Je sais que j’ai mes torts. Je manque de discipline concernant ma contraception. Okey j’aurai pu être plus adulte. Ce n’est pas comme si ça ne m’étais ma déjà arrivé. Pourtant je n’ai pas plus de regret que ça. Ce bébé respire l’amour. Je l’aime déjà tellement. On saura l’accueillir dans les meilleures conditions j’en suis certaine. En rangeant ma deuxième pièce, ça fera une très belle chambre pour notre mini "nous". Je me décide enfin à mettre des mots sur ses doutes. Les larmes me submergent. J’ai de la peine à les retenir. Trop d’émotions. Entendre de ma propre bouche qu’il va être père ça me fait réaliser à quel point tout ça est vrai. « Papa… » Qu’il répète machinalement. Incapable de parler, je remue la tête en lui souriant timidement pour lui répondre par l’affirmatif. Je n’arrive pas à déterminer s’il est heureux de la nouvelle ou bien s’il est effrayé. Peut-être un peu des deux. Son corps bascule dans le canapé. Je reste figé à ma place en n’osant pas bouger de là. « Je… » Ça me rend toute nerveuse. Il vide son verre de bière d’une traite pour se donner du courage. « Erin… » Mes doigts se referment sur eux même en agrippant les manches trop longues de mon gilet. « Oui ?… » Nerveusement je mordille ma lèvre supérieure en le fixant. J’ai peur de connaître la suite de sa phrase. Il ose un contact en séchant mes larmes. Mais il la retire de suite comme si ça lui brûler les doigts. Je ne sais pas comment le prendre … « Je… tu… t’es… sérieuse? T’es sûre? » Je déglutie la salive qui se trouve dans ma gorge avec difficulté. Ma main toute tremblante glisse dans la poche de mon gilet pour en sortir plusieurs test de grossesse positifs que je lui présente en éventail. Moi aussi je n’en étais pas très sûr avant de m’en assurer moi-même. Mon autre main récupère une feuille plier en deux dans mon autre poche. Les résultats de ma prise de sang. Celle-ci affirme que je suis bel et bien enceinte de trois mois et une semaine. Il peut le lire en toutes lettres en bas de la page. « J’en suis certaine … » Je souffle d’une voix tremblante. Si je n’étais pas assise mes jambes ne m’auraient pas supporté. Ma vision se trouble. D’un revers de bras je sèche une vague de larmes avec la manche de mon vêtement. Mon visage se relève malgré moi. Adriel encadre mes joues de ses deux mains. Nos regards se connectent dans la seconde. « Je vais être papa… » « Ouiii » Je fond littéralement dans un océan de larmes. « De toi… m’enfin… papa de ton bébé… de… » Un million d’émotions m’envahit. Je renifle en plongeant mes émeraudes sur le futur papa. « De notre enfant… » « Notre enfant » Nos mots se mélangent un somptueux mélange. Dans une parfaite synchronisation. Ça sonne doux dans mes oreilles. « … woah… » Je n’ai aucun doute sur sa paternité. Il peut dormir sur ses deux oreilles. Tous les autres hommes sont invisibles à mes yeux. Mon coeur ne bat que pour lui. Encore plus depuis que je porte notre enfant. Je me crispe un peu lorsqu’il pose ses mains sur mes épaules. Droite comme un piquet, j’ose à peine bouger. - Respire - Plus ses mains descendent, plus mon souffle se saccade. Je suis ses gestes du regard. Il est hésitant lorsqu’il s’approche dangereusement de mon ventre. Je prend donc l’initiative de prendre ses mains dans les miennes pour les poser là. Son premier sourire me réchauffe. Il fait même reflet sur moi. Ça me donne assez d’assurance pour laisser tomber mon gilet et tirer sur la ficelle de ma robe. Celle-ci s’écarte pour se fendre en deux et laisser apparaître le nid de notre petite étoile. Un petit ventre de trois mois pointe son nez. Je réalise alors qu’il est un peu plus imposant que je le pensais. « Baby Manders est bien au chaud » J’entrelace mes doigts pour ensuite venir poser ses paumes sur ma peau dénudé. L’envie de l’embrasser me brûle les lèvres. « Je t’aim…e » Que je murmure tout prés de son visage. Mon baiser à un petit goût salé. J’aime sentir ses mains sur mon ventre. Je l’ai tellement désirer ses derniers jours. Front contre front, je balance que j’ai sur le coeur pour me soulager l’esprit. « Je sais que ce bébé n’était pas prévu … pas tout de suite… je sais que j’aurai du me montrer plus prudente … » Mes pouces caressent le dos de ses mains délicatement. « …pourtant je n’éprouve pas de regrets. J’aime ce bébé. Je … j’irai jusqu’au bout cette fois ... » Que je lui confie, hésitante. Indirectement je lui avoue que je ne ferais pas de croix sur cet enfant. Même si lui décide de le faire. De toute manière je ne pourrais pas interrompre la grossesse légalement parlant. Et l’abandon n’est même pas envisageable. « J'espère que tu peux comprendre ça. » Alors qu’une larme coule le long de ma joue, je viens m’enfouir dans ses bras à demi-nu à la recherche de sa chaleur corporelle. Ma bouche le recouvre de doux baisers dans le cou tandis que je lui caresse la joue du bout des doigts. J’ai envie de croire qu’il partagera les mêmes envies que moi. J’ai envie de croire qu’on élèvera cet enfant tous les deux avec beaucoup d’amour. On formera le meilleur trio qui soit. Ça ne sera pas toujours parfait. Mais se sont les imperfections qui nous rendent si uniques. Notre amour l’est, j’en suis persuadée. « Je dois prendre rendez-vous pour la première écho. Si tu te sens prés ...» A rencontrer l'amour de notre vie ...
Mercredi 6 octobre 2021 Ma nervosité est telle qu’elle me fait arriver en avance chez Erin. N’importe qui qui me connaît assez bien sait que ce n’est pas vraiment dans mes habitudes. L’odeur qui flotte dans l’appartement est délicieux et me fait déjà saliver. Attirant la femme de ma vie contre moi, je lui avoue avoir eu hâte de la rejoindre. Ce qui est totalement la vérité, bien que l’anticipation de savoir si elle veut toujours de moi n’a pas été inutile dans l’histoire. Son sourire fait manquer un ou deux battements à mon coeur et, c’est plus fort que moi, mais je l’imite. « Je ne vais pas m’en plaindre » J’en profite pour lui tendre la rose que je suis passé chercher en ville. Tout de suite, elle la porte à son nez pour la sentir. « Merci t’es un amour » Mes doigts glissent dans ses longs cheveux blonds. Quand je la complimente, sa tête vient s’appuyer sur mon torse et j’enroule mes bras autour d’elle. Je commence à me faire une raison, elle ne veut sans doute pas me quitter… si? Elle n’agirait pas ainsi — aussi colleuse — si elle comptait me laisser. Bien que bon, même quand il n’y a que de l’amitié entre nous, elle est pratiquement aussi tactile que moi. Il y avait juste, disons, certaines… zones qu’on évitait. Puis, Erin se retourne pour me montrer le plat de lasagnes qu’elles a concocté. Je n’en reviens pas. C’est tellement un plat qu’elle évite, d’habitude. Et là, elle m’en a préparé… Il y a certainement quelque chose de difficile qu’elle veut me dire. Non? Sous son sourire se cache une certaine nervosité, je la connais trop bien. J’aimerais juste qu’elle me partage ce qu’elle a en tête, là, tout de suite. Pour la soulager, mais pour me soulager aussi. Un petit rire étouffé s’échappe de sa bouche. « T’as vu que je fais des efforts » Silencieux, je l’observe un instant, comme si la raison de tout ça allait apparaître sur son front. Des efforts. Des efforts pour quoi? Pour moi? « Je pense que tu aimes ça secrètement, mais que tu es trop fière pour l’admettre », je la taquine avant de lui tirer la langue. « Mais merci… » Ça me touche qu’elle ait fait mon plat préféré.
Toutefois, l’anxiété m’empêche quelque peu de ressentir la faim, bien que ces lasagnes donnent totalement envie. Je pense que c’est la première fois qu’elle m’en fait et j’aimerais profiter à fond. Au salon, je découvre une super ambiance toute cozy. « Merci mon coeur » Je lui offre un petit sourire tout attendri alors que je m’installe sur le divan. Mais l’attente commence à être insupportable. Je sens qu’il y a quelque chose ces derniers temps. Ma tête se fait des films d’horreur toute seule. Et si…? J’aimerais seulement qu’elle m’en parle maintenant. Je n’arrive même pas à lui raconter ma journée. Je n’ai pas la tête à ça, pour être franc. Après une certaine hésitation, la lasagne d’Erin se montre trop tentante pour que je continue ainsi sans manger. « Hmmmm » Mes yeux se plissent devant son hochement de tête. J’ai un doute, mais ne fais pas de remarque. J’ai le ventre trop retourné pour élaborer davantage. Burton nous sort tous les deux de nos pensées en faisant du bruit à côté d’Erin. C’est alors qu’elle m’annonce qu’elle a quelque chose à me dire. Enfin. Malgré mon impatience, j’en fais tomber ma fourchette de surprise. Comme si je ne m’y attendais pas. Parce que même si j’ai hâte de savoir ce qui se passe ces temps-ci pour changer son comportement avec moi à ce point, j’aurais préféré qu’elle me rassure et qu’elle me dise que tout va bien, que ce n’est que dans ma tête. Et bon… peut-être que je me fais des films et que ce n’est pas négatif, ce qu’elle a à me dire. Sa main se glisse dans la mienne et mon corps se détend un tout petit peu. C’est bon, elle ne me laissera pas. Si? Erin me rappelle qu’elle a toujours été sincère avec moi, et je lui assure que je le sais. Je n’en doute pas du tout. Elle me tend un livre qui me redonne le sourire aussitôt. Rien que sur la couverture, c’est une déclaration d’amour qui me touche vraiment beaucoup. « Oui. Pendant que tu faisais tes photos moi j’étais occupé à illustrer notre histoire » Ému, je relève le regard sur elle. Je prends bien mon temps pour lire chacune des pages du livre qu’elle vient de m’offrir. Ses mots me touchent, me rassurent, me font du bien. Je ne doute plus de son amour pour moi, qu’elle ne va pas m’annoncer qu’elle va me laisser, mais l’idée qu’elle puisse être malade ou que quelqu’un puisse lui avoir fait du mal me traverse l’esprit et me fige. Riri reconnaît avoir été distante dans les derniers jours et s’excuse en affirmant qu’elle avait besoin de temps. Lui demandant davantage d’explications, j’en profite pour déposer un baiser sur sa joue et me recule pour me rendre compte qu’elle a fermé les yeux. Ça doit être sérieux… Du mieux que je le peux, je tente de la rassurer sur le fait que peu importe ce qu’elle a à me dire, ça ne changera rien entre nous. Erin est ma priorité et si elle a besoin de moi, je serai là; et même, je serai là même si elle n’a pas besoin de moi. Je ne vois pas ce qui pourrait faire en sorte que je m’éloigne ou que je la laisse.
Surpris de réaliser qu’il y a un deuxième livre, je le prends avant d’observer la couverture avec intensité. Au début, la petite fille blonde me fait penser à ma meilleure amie, mais je réalise bien vite que ce n’est pas elle… Quand je la questionne par son simple prénom, incapable d’en dire plus, elle baisse les yeux. Mon rythme cardiaque prend de l’ampleur. Non… ça ne se peut pas? Elle ne peut pas être…? J’entreprends alors de lire les pages, presque quatre fois chacune. Ça me paraît tellement irréel tout ça. Tout se remet en place dans ma tête. J’en viens même à me demander pourquoi je ne m’en suis pas rendu compte. Les yeux de ma copine brillent. Je ne sais pas si c’est un bon ou un mauvais signe. Est-elle contente de cette nouvelle? Ce n’était clairement pas prévu à notre agenda. Pour ma part, je ne sais que trop en penser sur le coup… Moi, papa. Alors que je peine déjà à être un adulte, alors penser à m’occuper d’un petit être… Petit être qui vient d’Erin, s’entend. Ça change tout. D’un petit hochement de tête tout timide, elle me confirme ce que j’ai énoncé tout haut. Les mots peinent à me venir. Je cale mon verre de bière, comme pour me réveiller, m’ouvrir grand les yeux sur la réalité. Ma vie vient de changer radicalement. Je ne sais que trop en penser pour le moment. Seul son prénom réussit à toucher mes lèvres. « Oui ?… » Elle se mordille la lèvre et je tends la main pour sécher une larme, mais la repose aussitôt sur ma cuisse. Moi, papa…? J’ose même lui demander si elle est certaine. Ça existe, des tests défectueux, je sais pas… Il peut y avoir aussi toutes sortes de raisons pour lesquelles elle pourrait avoir ces symptômes. Elle me présente un éventail de tests. Mon regard les fixe un à un — il y a bien deux lignes sur chacun d’entre eux. Elle me présente même un papier que je récupère avec les mains légèrement tremblantes. Mon coeur bat si vite que je remarque à peine toutes les informations sur la page. Mais c’est écrit là, noir sur blanc: elle est enceinte. Erin est enceinte. De moi. Je vais être papa. « J’en suis certaine … » Sa voix n’est pas stable, comme si elle allait se mettre à pleurer. Ses yeux se remplissent d’eau. Ça me fait de la peine de la voir comme ça. J’imagine pas le stress qu’elle a dû ressentir avant de me l’annoncer. Et cette réalisation me fait voir la situation sous un autre angle. « Ouiii », qu’elle répond quand j’affirme tout haute que je vais être papa. Les larmes coulent à grands flots de ses émeraudes. Mes mains encadrent son visage alors que je lui souffle que je serai papa de notre enfant. Ça me fait trop bizarre de dire ça tout haut. Mais il y a quelque chose de trop beau là-dedans. Je ne le réalise pas tout à fait, ça me paraît surréel. « Notre enfant », qu’elle dit presqu’en coeur avec moi. Woah… Lentement, mes doigts glissent sur ses épaules. Je sens ma copine toute tendue. Son ventre me fait hésiter. En elle, il y a notre enfant. Est-ce que je vais le sentir? Non, c’est beaucoup trop tôt, sans doute. Je n’en sais rien. Mais Erin prend les devants en dirigeant mes mains sur son ventre. Ça me fait tout drôle, il est bel et bien un peu plus rond. Un petit sourire naît sur mes lèvres. Ses doigts tirent sur une ficelle et les pans de sa robe tombent de chaque côté de son ventre. Battant des paupières, je ne le lâche pas du regard. De combien de temps est-elle enceinte, déjà? Je m’imaginais que ça ne datait que de quelques semaines, tout au plus. Rapidement, j’empoigne de nouveau la feuille qu’elle m’a tendue un peu plus tôt. Ça fait plus de trois mois… Trois mois. Pourquoi elle ne me le dit que maintenant? Avait-elle si peur de me le dire? « Ça fait… trois mois que tu es… enceinte? » je souffle difficilement. « Tu l’as su quand? » Je ne comprends pas pourquoi elle m’aurait caché quelque chose aussi longtemps. On est censés tout se dire — certes, je peux comprendre qu’elle ait eu peur de me le dire. En même temps, non… parce que jamais je ne l’abandonnerai. Jamais.
« Baby Manders est bien au chaud » Erin me tire de mes pensées et je lui offre un petit sourire tout gêné en relevant les yeux dans les siens. « Baby Manders… », je répète. Un mini nous. En elle. Oh my God. Erin attire mes paumes sur son ventre nu. Il est tout chaud et plus… courbé que normalement. « Je t’aim…e » Son souffle caresse mon visage. Je ferme les yeux alors que ses lèvres se posent sur les miennes. Elles goûtent salé. Mes mains demeurent sur son ventre, je n’ose pas les bouger et, en même temps, elles sont bien, là. Front contre front, je balance mon nez sur le sien de droite à gauche, et de gauche à droite. « Je t’aime aussi, Riri. Tellement… » Cette grossesse n’était pas prévue à l’horaire, si je suis franc avec moi-même, j’aurais préféré que ça soit plus tard. Ce n’était pas dans mes plans maintenant. Mais je suis le premier à dire à qui veut l’entendre que, parfois, il faut se laisser porter par la vie et arrêter de toujours tout planifier. En vrai, je n’aime pas trop planifier. Ce n’est pas pour rien que je partais beaucoup sur des coups de tête en voyage. « Je sais que ce bébé n’était pas prévu … pas tout de suite… je sais que j’aurai du me montrer plus prudente … » J’ai l’impression qu’elle lit dans mes pensées parfois. Je secoue la tête. « Moi aussi, alors, j’aurais dû me montrer plus prudent… » Ce n’est pas qu’à elle à faire attention. « Mais… c’est arrivé. Alors… » Mes lèvres se posent de nouveau contre les siennes. Je me sens maladroit, alors c’est peut-être mieux que je ne dise rien? Je viens pour lui dire que ce bébé arrive plus tôt que prévu, qu’on aurait peut-être dû faire plus attention, oui, mais qu’on peut y arriver — mais elle poursuit. « …pourtant je n’éprouve pas de regrets. J’aime ce bébé. Je … j’irai jusqu’au bout cette fois ... » Lentement, mes yeux plongés dans les siens, je hoche la tête. Ses pouces caressent le dos de mes mains, et les miens, son ventre. C’est la dernière chose que je lui demanderai de faire. J’ai bien vu, il y a quelques mois, qu’elle ne voulait pas réellement se faire avorter, qu’elle ne le faisait pas pour elle. J’ai bien vu à quel point cette expérience l’a changée. « J'espère que tu peux comprendre ça. » « Je sais… » je murmure. « Je comprends. Et… tu seras pas toute seule, Erin. » Je la connais assez pour savoir que c’est ce qu’elle redoutait, que c’est pour ça qu’elle se faisait si nerveuse. Elle vient se blottir dans mes bras et je suis certain qu’elle peut sentir mon coeur battre dans ma poitrine. Ses lèvres parcourent mon cou et ses doigts caressent ma joue. Mes yeux se ferment pour mieux savourer son toucher sur ma peau. Je la soulève légèrement pour qu’elle puisse s’assoir sur mes cuisses, face à moi, et que ses jambes puissent s’enrouler à mes hanches. Sa lasagne est bien bonne, mais disons que je n’ai pas tant la tête à en manger, là. « Je dois prendre rendez-vous pour la première écho. Si tu te sens prés …» Je passe mes doigts de nouveau dans ses cheveux en la serrant plus fort contre moi. « Tu veux que je sois là? » je demande bêtement, surpris. Je ne sais pas trop comment ça fonctionne, si les papas sont censés être là ou pas, si ça la gênerait ou je ne sais quoi. C’est plus le choc de réaliser que je vais être papa qui prend le dessus sur moi, je pense. « Dis-moi c’est quand et je serai là », je murmure contre ses cheveux. Je repousserai une séance photos s’il le faut. Je relève la tête, les yeux écarquillés, en réalisant un petit détail. « Si ça fait trois mois que tu… es enceinte… » Je calcule vite dans ma tête. « Ça fait genre seulement six mois avant… hum… son… arrivée? » Woah. Son arrivée. Et six mois, c’est vite passé. J’ai chaud. Ça va alller. « Erin… tu… » Je me mordille la lèvre nerveusement. « Tu penses que je vais être à la hauteur? J’ai… j’ai pas d’expérience, moi. » Et en plus, j’ai perdu un enfant dans un supermarché. Je ne suis même pas sûr qu’elle le sache. (Merci au bff de Tessa pour l’avoir trouvé.) Et je ne suis pas certain que ça soit une bonne idée qu’elle le sache. Elle, elle a tout plein d’expérience avec les enfants. Elle fera la meilleure maman du monde, je n’en doute pas. Et moi, c’est à peine si j’ai gardé mon neveu.
Mercredi 6 octobre 2021 - Mon taux d’anxiété doit être à son maximum. J’essaye de ne pas trembler et d’avoir l’air « naturel » . Chacun de mes sourires me crispe les joues un peu plus. J’ai ce rire nerveux qui ne me lâche pas. Quand je l’entends, j’ai envie de me foutre des tartes. La rose d’Adriel fait tourbillonner mon coeur d’amour. J’ai hâte de lui annoncer qu’il va être papa. Et en même temps je suis morte de trouille. Nerveuse, je tente une diversion avec mon plat de lasagnes. Je sais qu’il adore ça. Il pourrait se contenter de ce repas jusqu’à la fin de sa vie. Rien que ça ! Encore plus si c’est sa mère qui le lui a cuisiné. J'espère que les miennes seront à la hauteur. Toute fière, je me tourne vers lui avec notre repas de ce soir. « Je pense que tu aimes ça secrètement, mais que tu es trop fière pour l’admettre » Je me tord les lèvres en essayant de me convaincre qu’il a raison. Mais en baissant les yeux sur le plat ça me ramène vite à la réalité. « J’aimerai te dire oui mais sincèrement, ça ne vaut pas un bon magret de canard avec ses pommes de terre grenailles. » Je me souviens de ce pique-nique dans le centre équestre. Addie avait cuisiné mon plat préféré et il m’avait annoncé que j’allais être maman d’un petit poulain. C’était parfait ! Il est parfait. J’aime trop cet homme ho la laaaa !!! Je sens que mes hormones me montent à la tête. Si je continue de me remémorer cette après-midi à pique-niquer avec lui je vais finir par pleurer comme une madeleine. A l'aide de mes deux mains je fais de l’air en levant les yeux sur le plafond pour tenter de me calmer. « Mais merci… » Le voir me tirer la langue m’amuse. Je lui souris avant de reproduire le geste. « Profite, ça sera pas tous les jours » J’ajoute un brin amusé. Il ne sera pas papa tous les jours non plus. Heureusement pour moi !
On s’installe au salon pour la dégustation. Mon assiette sur les cuisses, je tente de manger ce que j’ai préparé. Okay c’est bon. Mais l’appétit n’est pas au rendez-vous. J’angoisse trop à l’idée qu’il n’accepte pas la nouvelle. J’ai de la misère à imaginer un avenir sans lui. Ce bébé me rendrait heureuse, c’est certain. Mais il manquerait le soleil à ma vie. Mon autre moitié. Je ne serais qu’à demi épanouie sans sa présence auprès de moi. Et j’ai envie que mon enfant connaisse son père. A aucun moment je veux qu’il subisse la même enfance que j’ai vécue. À trop tergiverser toute seule, Burton manque d’annoncer la nouvelle avant moi en fourrant son museau dans le sac qui contient les fameux bouquins. Je gonfle mes poumons à leur maximum pour me donner du courage. Puis je me lance en lui avouant que j’ai quelque chose à lui annoncer. Le fracas de sa fourchette me fait sursauter. Je suis beaucoup trop tendue, c’est horrible. La main tendue vers lui, je lui offre le premier livre qui témoigne tout l’amour que je lui porte. Du stade de meilleur ami, Adriel est devenu l’homme avec qui j’ai envie de fonder une famille. Sans compter tout le reste. Vivre, rire, pleurer, aimer, un peu… beaucoup, à la folie ! Passionnément. La première étape passée, je lui donne le deuxième tome. Celui qui changera radicalement sa vie. Rien qu’a la couverture ça va lui mettre la puce à l’oreille. J’hoche timidement la tête quand il prononce son nouveau rôle de vive voix. Ça me fait un je ne sais quoi dans le ventre. Je réalise peut-être plus facilement de l’entendre dire. Je suis persuadée qu’il fera le meilleur des papas pour notre enfant.
Une petite larme m’échappe face à ce trop-plein d’émotions. Adriel vient la sécher aussitôt avec sa main. Mais le voir rompre le contact aussi vite me chagrine un peu. Je sais comment je dois l’interpréter … Je sens bien qu’il est tout perturbé par la nouvelle. Qui ne le serait pas … Quand il m’interroge sur la véracité de mon annonce, je lui tend rapidement les différents tests que j’ai effectué. Ils présentent tous deux barres parallèles. Aucun doute n’est possible. Comme si ça ne suffisait pas, j’ajoute à cela le résultat d’une prise de sang qui annonce que je suis enceinte de plus de trois mois déjà. Je ne peux pas être plus précise. L’émotion me submerge. Mes yeux se noient rapidement de larmes. Trop de pression qui s’évapore dans un océan salé. Adriel m’encadre très vite le visage de ses deux mains pour que nos regards se croisent. J’ai de la peine à le voir tellement mes yeux sont brouillés. Instinctivement je lui souris pour le rassurer. - Tout va bien se passer - Il ne m’a jamais abandonner, pourquoi le ferait-il maintenant. ? Dans un moment si crucial. Je ne l’imagine pas briser notre amitié, encore moins notre amour pour un sentiment d’insécurité. « Ça fait… trois mois que tu es… Enceinte? » Les yeux baissés sur nos mains qui tâtent mon ventre, je lui réponds « Trois mois et une semaine précisément. Paris a été plus qu’un simple voyage …. Un mini nous c’est pointer là-bas » Un petit sourire timide s’étire sur la commissure de mes lèvres. Mes prières ont été entendus au Sacré coeur de la capitale. On m’offre la chance d’être maman une seconde fois. J’ai bien l’intention de ne pas laisser échapper cette occasion. « Tu l’as su quand? » « Fin septembre je .. » Je me reprend vite pour ne pas citer Tessa. Il n’est pas encore au courant pour sa grossesse. J’estime que c’est à elle de lui annoncer. « J’avais des doutes. Je me sentais fatiguée avec un appétit d’ogre. Il m’a fallu un peu de temps pour réaliser. Et je ne voulais pas te l’annoncer n’importe comment non plus. » J'espère que l’idée des livres lui a plu. J’aime me montrer originale. En plus c’est un souvenir qu’il va pouvoir feuilleter quand l’envie lui prendra. « Baby Manders… » Mon coeur palpite. Je fais glisser ses mains avec les miennes sur mon ventre tout chaud. Puis je lui glisse un je t’aime timide entre ses lèvres. Pour enchaîner un baiser salé. Son nez frotte contre mien. Mon sourire renaît un peu plus. La connexion est parfaite. Je ne pouvais pas espérer mieux. Mes craintes s’estompent peu à peu. « Je t’aime aussi, Riri. Tellement… » Ma bouche se colle aussitôt à la sienne pour un baiser passionné. Je caresse tendrement sa joue avec ma main. « Je t’aime encore plus, si tu savais » Je pourrais mourir pour lui. Vraiment. Aucun homme ne me fera dévier le regard de mon amoureux. Je suis une femme plus que comblée à ses côtés. Je m’excuse cependant d’avoir été maladroite avec ma contraception. Je ne voulais pas lui imposer un enfant. Pas maintenant. On est jeune, on la vie devant nous. Ce n’était pas dans l’urgence de concevoir notre progéniture. J’en suis pleinement consciente. « Moi aussi, alors, j’aurais dû me montrer plus prudent… Mais… c’est arrivé. Alors… » Alors ? Je l’interroge du regard, inquiète de connaître la fin de sa phrase. Je n’arrive pas à déterminer s’il est déçu ? Sous le choc ? Heureux ? J’ajoute alors que je ne compte pas abandonner cet enfant. Quitte à perdre l’homme que j’aime. J’ai trop souffert et je souffre encore de l’IVG du mois de Mars. Même si j’essaye de persuader tout le monde du contraire. « Je sais… Je comprends. Et… tu seras pas toute seule, Erin. » Rassurée, je relève les yeux sur lui en lui souriant tendrement. « Merci … Merci de ne pas nous abandonner » Certainement ma plus grosse crainte. L’abandon. Mon père a exceller dans le domaine. Mais Adriel n’a rien à voir avec celui qui se prétend être mon patriarche. Il est bien plus jeune pourtant tellement plus mature.
Je fond dans ses bras. À demie nue. Pour la toute première fois je lui laisse une vue imprenable sur mon ventre. J’accepte même qu’il me touche. Sentir ses mains là me fait bien fou. Je l’informe pour l’échographie. Mon gynécologue me tanne depuis plusieurs semaines. Mais il est hors de question de la faire sans lui.« Tu veux que je sois là? » Je fronce légèrement les sourcils en le fixant. Ça me paraît évident que je veuille qu’il soit présent. « A ton avis ?! » Je n’attends que ça qu’il vienne. « Dis-moi c’est quand et je serai là » « Vendredi prochain, c’est okey pour toi ? » Je me sens tellement impatience de voir ce qui se passe dans mon ventre. « Si ça fait trois mois que tu… es enceinte… » Hummm ? « Ça fait genre seulement six mois avant… hum… son… arrivée? » Un sourire s’étire jusqu’à mes oreilles pour partager son enthousiasme. « Ouiiii, plus que six mois et nous seront trois mon amour. T'aimerais que ça soit une fille ou un garçon ? » Je demande par curiosité. L’un ou l’autre, je vais être une maman comblée. « Tu penses que je vais être à la hauteur? J’ai… j’ai pas d’expérience, moi. » J’encadre son visage avec mes deux mains en lui souriant niaisement. « Tu feras un merveilleux papa Lord Manders. Je te permet pas d’en douter. Et on sera deux pour affronter ce nouveau monde ensemble » Ensemble … on va avoir un bébé ensemble.
Je baille à plusieurs reprise. La tension qui retombe certainement. Je le laisse débarrasser la table pendant que je m’éclipse dans la salle de main. Je vais pour fermer la porte. - Mauvaise habitude quand tu nous tiens - Mais je l’entrouvre aussitôt en lui laissant la possibilité de me rejoindre s’il le souhaite. Secrètement j'espère qu’il le fera. Les douches à deux me manque. (…) Nous nous retrouvons rapidement au lit. Sans nuisette, ni pyjama sur le dos, cette nuit j’ai envie de dormir complètement nue. Je veux sentir la moindre vibration de mon amoureux peau contre peau. Du bout des doigts je caresse son bras en calant ma tête sur son torse. Ma cuisse repose sur ses jambes. Je me laisse bercer par les battements de son coeur. « Hmmm ça m’avait manqué les patouilles avec toi » Bébé ou pas, j'espère qu’on se câlinera toujours autant.
Vendredi 8 octobre - Les jours passent. Pas assez vite à mon goût. Je suis beaucoup trop impatiente de rencontrer notre petite étoile. Le jour J je suis au taquet. « DEBOUUUT DEBOUUTTTT mon coeur. C’est aujourd’huiiiiiii » Les rôles s’inverseraient presque. Moi qui d’habitude traîne tellement sous la couette. Mon gros nounours a de la peine à se réveiller. Faut avouer que la nuit a été quelque peu …agitée. Fallait bien rattraper le manque de câlins. J’ai les hormones en feu. J’opte pour la méthode deux en me glissant sous la couette pour le parsemer de bisous un peu partout. Je m’approche dangereusement de son nombril en souriant jusqu’aux oreilles. Juste UN bisou là, je remonte à la surface de la couette, tout prés de son visage endormi « Debout papou chéri » Je lui souffle dans le creux de l’oreille. « Pour de vrai … j'te chanterai "En Cloque" en attendant le p’tit » je fredonne, les yeux brillant d’amour pour cet homme. J’ai encore du mal à réaliser ce qui nous arrive. Je pense que cette échographie va nous aider à réaliser le cadeau que nous offre la vie. Un bébé, un merveilleux bébé qui sera le nôtre dans six mois à peine.
Mercredi 6 octobre 2021 C’est clair que les lasagnes sont mon plat préféré. J’en mangerais tout le temps. Bon, pas tout le temps tout le temps. Pour le petit-déjeuner, je vais quand même choisir du bacon et du Nutella sur du pain aux raisins et à la cannelle. Mais bon, sinon, lasagnes forever. Erin n’est pas du tout d’accord, je le sais, et je le vois rien qu’à son regard lorsqu’elle baisse les yeux sur le plat qu’elle m’a concocté. « J’aimerai te dire oui mais sincèrement, ça ne vaut pas un bon magret de canard avec ses pommes de terre grenailles. » Un soupir s’échappe de ma bouche, mais se transforme finalement en un petit sourire amusé. Ça, elle pourrait en manger pratiquement jour et nuit. Bon, je dois avouer que c’est plutôt bon, mais ce n’est pas mon préféré. C’est quand même un repas que je lui ai cuisiné et, sans vouloir trop me venter, je pense que c’était pas mal. N’empêche, qu’est-ce que je ne ferais pas pour elle. Cuisiner. (Et elle pour moi…) Je la remercie de m’avoir préparé mon plat préféré, qu’est-ce qu’elle est parfaite, sérieux. J’espère juste qu’elle n’a rien de grave à m’annoncer… Elle me tire la langue en retour. « Profite, ça sera pas tous les jours » Je fais mine d’être déçu. « Bon, je vais profiter, alors… » Même si l’appétit n’est pas trop là. Je suis tellement préoccupé par son comportement des derniers temps et la raison pour laquelle elle m’a préparé un repas dont elle ne peut plus entendre parler que ça me coupe l’appétit. Erin aussi semble ne pas trop avoir faim, mais on est tirés de notre dégustation par Burton qui ne se fait pas du tout discret. Rien qu’à voir le sourire peu naturel de ma copine, je comprends que c’est peut-être quelque chose qu’elle veut me montrer… l’impatience me gruge, mais je ne dis rien. J’attends. Très impatiemment, mais je finis par manger une bouchée de sa lasagne. C’est très, très bon, mais mon attention est tout de suite accaparée par le livre qu’Erin me tend. Ému, je parcours les pages en prenant bien soin de peser les mots dans ma tête. Son attention me touche, me rassure, mais porte mes inquiétudes sur autre chose. Et si elle avait quelque chose de difficile à m’annoncer? Mais Riri me tend un deuxième livre. Celui-là me laisse presque totalement sans voix alors que mon cerveau fait des siennes pour trouver ce que ça veut dire. Moi… papa? C’est une nouvelle dont le sens ne me vient pas tout de suite. Je ne réalise pas, je cherche la confirmation de celle qui vient de me l’annoncer. Elle me le confirme, verse une petite larme et mon coeur se serre pour cette femme que j’aime tant, avec qui… avec qui je vais avoir un bébé, il semblerait. Je lui demande si elle est certaine; pas parce que je doute de ses paroles, mais parce qu’un faux test positif, ça se peut, non? Mais vu le nombre de tests qu’elle a faits, je n’en doute plus du tout. Et elle a même fait une prise de sang…
C’est officiel… on va être parents. Je suis trop sous le choc pour vraiment savoir si je suis heureux ou pas de la nouvelle. Certes, avoir des bébés un jour avec elle, c’était totalement dans mes plans de vie, mais disons que ça arrive un peu plus tôt que prévu. J’ai peur de ne pas être à la hauteur, je me sens encore comme un gamin, parfois. Mais les yeux de Riri s’embrouillent d’eau, et une bouffée d’amour pour elle m’envahit. Parce que même si je ne suis pas prêt, cet enfant, ce sera avec elle que je vais l’élever. Et je ne veux surtout pas qu’elle se sente toute seule dans tout ça. Ça ne me traverse même pas à l’esprit de lui demander de renoncer à ce bébé, surtout sachant ce qu’elle a vécu, sachant comment elle s’est sentie quand son premier test de grossesse s’est révélé positif. Je la revois encore dans mon bain, ne sachant pas trop comment se sentir face à cette nouvelle, comment elle allait l’annoncer à Nel. Mais je réalise ce que j’ai vu sur la feuille qu’elle m’a montrée sans trop le réaliser sur le coup: elle est enceinte de trois mois. ses émeraudes se posent sur nos mains qui s’unissent sur son ventre qui commence à s’arrondir. « Trois mois et une semaine précisément. Paris a été plus qu’un simple voyage …. Un mini nous c’est pointer là-bas » Un petit sourire tendre naît sur mes lèvres et ma main se pose sous le menton de mon amoureuse pour lui relever le visage doucement afin qu’on puisse se regarder yeux dans les yeux. On se sourit mutuellement, le temps semble s’arrêter rien que pour nous deux. Un mini nous. J’aime bien cette image. Paris était… magique. Encore plus que ce qu’on ne l’aurait cru. Moi, papa… pfiou, ça me paraît tellement irréel. Mais clairement que ce bébé sera parfait, parce qu’il viendra d’elle. Sauf que je réalise que si ça fait 3 mois qu’elle est enceinte, qu’elle ne me l’a pas dit avant… aujourd’hui. « Fin septembre je .. » Oh, alors… seulement depuis peu. « Tu? » je demande en haussant un sourcil, attendant la suite de sa phrase. « J’avais des doutes. Je me sentais fatiguée avec un appétit d’ogre. Il m’a fallu un peu de temps pour réaliser. Et je ne voulais pas te l’annoncer n’importe comment non plus. » Je hoche la tête, un petit sourire sur les lèvres en repensant à comment elle me l’a annoncé. Elle avait un peu le même genre de symptômes que la dernière fois, quoi. C’est vrai qu’elle mange plus depuis un certain temps, j’aurais dû me douter de quelque chose. Toutes ces fraises… oh la la. « Mais tu n’as pas été trop malade? » je demande. Cette fois-ci. Je me retiens de lui dire ça pour ne pas ramener le douloureux souvenir de sa première grossesse. Je n’ai pas souvenir qu’elle ait rendu son repas souvent, à part une ou deux fois. Mais bon, je me disais que c’était sans doute la fatigue, ou qu’elle couvrait quelque chose. En début d’année, avec Gaby, il me semble qu’elle l’était un peu plus. Je lui ai d’ailleurs tenu les cheveux quelques fois alors qu’on ne faisait que regarder un film. Même si bon, au final, on se voyait beaucoup moins souvent que la normale…
Ému, je répète ses paroles. Baby Manders… Un mini nous. J’espère qu’il ou elle aura les yeux verts de sa maman. Je l’aime tellement, Erin. Je peux même goûter ses larmes sur mes lèvres quand elle y pose les siennes. « Je t’aime encore plus, si tu savais » Les yeux pétillants, je secoue la tête. « Impossible. À l’infini et plus loin encore, tu te rappelles? » Erin se répand en excuses concernant la contraception. Mais ce n’était pas que sa responsabilité, c’était la mienne aussi. Me sentant maladroit dans ma manière de m’exprimer, je me coupe moi-même, sentant les points d’interrogation dans le regard de ma copine sur moi. Je finis plutôt par admettre que je sais, que je comprends, et qu’elle ne sera pas toute seule. Jamais. Erin compte beaucoup trop pour moi. Ensemble, on peut affronter tout, j’en suis sûr. « Merci … Merci de ne pas nous abandonner » Une fraction de seconde, je pince les lèvres en me demandant si elle a réellement pu penser que je les abandonnerais, quelque peu vexé — moi, les abandonner? Mais je réalise que ses craintes viennent sûrement de sa propre histoire à elle. Sauf que je ne suis pas son connard de père, merci. « Tu peux compter sur moi. M’enfin… vous… » Tout timide, je laisse un petit sourire flotter sur mes lèvres en détournant le regard quelques secondes. Erin me montre son ventre. Il est tout chaud sous mes mains. Plus rond que ce que je ne me serais imaginé, ce qui me surprend, me fait tout bizarre en pensant qu’il y a un être vivant qui grandit en elle. Quand elle me parle de son rendez-vous pour l’échographie, je m’étonne qu’elle me propose d’y aller avec elle. Parce que ça m’intimide un peu, que je ne sais pas trop comment ça fonctionne. « A ton avis ?! » Je me mordille la lèvre un moment, touché qu’elle veuille bien que je l’accompagne, intrigué, mais aussi un peu nerveux. Mais bien sûr que je serai là. « Vendredi prochain, c’est okey pour toi ? » Je hoche la tête. J’aurais dis oui à n’importe qu’elle date, pour être franc. Il faut que je regarde mon agenda, voir si j’ai un truc à déplacer pour être avec elle. C’est alors qu’une autre réalisation s’impose à moi: il ne reste que six mois avant l’arrivée de ce bébé… ça me semble si peu, ça me fait même un peu paniquer en mon fort intérieur. Il y a six mois, on était genre… en avril. Ça me paraît si loin et si proche en même temps. En tout cas, cette réalisation fait sourire la future maman. « Ouiiii, plus que six mois et nous seront trois mon amour. T'aimerais que ça soit une fille ou un garçon ? » Je retiens ma respiration et tendre de reproduire son sourire. Trois. On va être trois. Il y a tellement de questions qui tourbillonnent dans mon esprit. Où va-t-on habiter, par exemple? Comment est-ce qu’on change des couches? Comment est-ce qu’on va annoncer ça à nos proches? À Max, à Link, à nos parents… à Tessa. Oh la la. Comment on va l’annoncer à mon ex? Elle m’a assuré qu’elle était okay avec le fait qu’Erin et moi, on est ensembles. Mais là… on parle d’un bébé, quoi. Et si ça l’affecte beaucoup dans un sens négatif, certainement que son jumeau — mon bro — sera de son côté. Ce que je comprends, mais… Je cligne des yeux pour me faire revenir au présent. On pensera à ce genre de détails… plus tard. « Hum… » Je laisse mes pouces caresser son ventre alors que je déglutis. « Je sais pas trop… ça m’importe peu. Que ça soit une fille ou un garçon, j’veux dire, pas que ça… ne m’intéresse pas. » J’ai envie de me taper le front vu ma maladresse. Sérieux. [color:8a32==cornflowerblue]« Quoi que ça serait cool une mini Riri», je laisse finalement tomber dans un petit sourire en coin. Une petite princesse comme Erin, aussi positive, enthousiaste, espiègle… aussi parfaite, quoi. Mais même si on a un garçon, il sera parfait parce qu’il viendra d’elle. Vraiment, le sexe n’a pas d’importance pour moi, même si ça fait bizarre d’y penser de base. Moi, papa. Et elle, maman. Ça me parait quand même moins étrange de l’imaginer en maman que moi en papa. « Et toi? » Et plus je pense qu’on va être parents — ça sera quoi demain, et dans les mois suivants? —, plus je me demande comment je pourrai bien être à la hauteur. Moi, je n’ai pas gardé d’enfants comme Erin, je n’ai pas incarné la reine des neiges pour une oeuvre caritative. Oui, j’ai pris des enfants en photo pour des portraits de famille, mais ce sont les parents qui géraient leurs gamins, hein. Disons que ça me rend pas super à l’aise de le faire pour eux. J’ai pas de petite soeur ou de petit frère dont j’ai eu à m’occuper. Les deux mains d’Erin viennent encadrer mon visage. « Tu feras un merveilleux papa Lord Manders. Je te permet pas d’en douter. Et on sera deux pour affronter ce nouveau monde ensemble » Je relâche mon souffle — je ne m’étais même pas rendu compte que je le retenais. Ses paroles me rassurent un peu, surtout sa dernière phrase. Elle a totalement raison… on sera deux, là-dedans. Ça va bien aller. « Ensemble », je répète dans un souffle, avant d’enfouir mes doigts dans ses cheveux, sur sa nuque, et de coller mes lèvres contre les siennes. Ensemble.
On n’a pas trop touché à nos assiettes, tous les deux. La nouvelle nous a apparemment coupé l’appétit, mais je ne pense pas que ça soit une mauvaise chose, loin de là. C’est une nouvelle surprenante, mais pas mauvaise en elle-même. Est-ce que la perspective d’être papa me fait peur? Certainement, au moins un peu. Mais ce sera avec Erin, et je ne pourrais pas être plus comblé que ça. On vivra ça ensemble. Je range les restes de lasagne dans des plats pour plus tard. L’appétit nous reviendra, et puis c’est trop bon, alors pas vraiment le choix. Erin s’éclipse à la salle de bain alors que je termine de mettre la vaisselle dans le lave-vaisselle. Soupirant alors que j’entends l’eau de la douche commencer à couler, il me vient à l’esprit qu’elle a sûrement verrouillé la porte de la salle de bain comme elle le fait depuis quelques temps déjà. Mais mon instinct me pousse à aller voir quand même et c’est une porte entrouverte que je découvre. Ça me fait sourire de soulagement, d’envie et de désir aussi. Et je réalise que c’était peut-être parce que son ventre s’arrondissait qu’elle ne voulait plus qu’on se lave ensemble. Tout se replace… J’entre sans faire de bruit, ferme la porte doucement, hésite un moment avant de finalement enlever mes vêtements. Puis, je m’approche de la douche et entre derrière Erin. Déjà, les effluves de son gel douche m’enivrent, me font sourire, et ma main se tend pour tasser ses cheveux sur le côté, laissant sa nuque et le haut de son dos à découvert. Je pose mon menton sur son épaule en enlaçant sa taille avec mes bras, posant mes mains sur son ventre… encore surpris qu’il soit plus rond que d’habitude, que ce dont je me rappelle. « Ça m’a manqué, ça… », je glisse tout près de son oreille avant de mordiller son lobe. Ça, ces petits moments câlins sous la douche, ou ces petits moments câlins tout courts. Je dépose un petit baiser sur son épaule, sur sa nuque, avant de descendre le long de son omoplate. « Je t’aime, Erin. Y’a rien qui pourra me faire changer d’avis… » Pas même cette grossesse imprévue. Surtout pas cette grossesse imprévue. Moi, papa… woah. J’attrape la bouteille de gel douche — sans me tromper, yay me —, en verse un peu dans mes mains et entreprends de les passer sur chaque centimètre de peau de mon amoureuse. Quand j’arrive à son ventre, je m’agenouille devant elle pour me retrouver face à lui. Je l’observe longuement, essayant d’imaginer un petit être qui grandit en elle, n’ayant aucune idée d’à quoi il peut ressembler. Mais il est vivant, il porte autant mes gênes que ceux d’Erin. C’est fascinant, la biologie. Enfin, je pose mes lèvres sur son ventre en caressant ses côtes de mes pouces, levant les yeux dans ceux de ma copine pour partager un moment plein de complicité.
Après la douche vient le moment d’aller au lit. Complètement nus. Ça ne pourrait pas plus m’enchanter, j’ai l’impression que ça fait une éternité que ce n’est pas arrivé. J’aime la sentir à moitié sur moi comme ça, sa jambe par-dessus les miennes, ses doigts qui caressent mon bras, son souffle qui chatouille les poils sur mon torse. J’en ai des frissons, que je suis tellement bien que j’ai l’impression que c’est interdit. Mes mains glissent de ses cheveux mouillés au bas de son dos, et remontent lentement pour se loger de nouveau dans ses cheveux. « Hmmm ça m’avait manqué les patouilles avec toi » Les yeux fermés, je mets un petit temps à répondre, laissant un petit sourire faire sa place sur mes traits. « Moi aussi, si tu savais », je souffle contre ses cheveux. Je n’ajoute pas que j’ai bien cru qu’elle allait me laisser vu qu’elle ne voulait plus que je la touche, parce que je réalise maintenant à quel point c’était irrationnel de ma part. Ce n’est pas comme si elle dormait sur le divan, non plus. « Tu sembles te réveiller plus tôt, ces temps-ci », je commente toutefois. « C’est à cause de… du bébé? Tu fais de l’insomnie? » Je ne sais pas ce que ça fait d’être enceinte, et je ne le saurai jamais, mais ça a peut-être un lien.
Vendredi 8 octobre 2021 Les jours qui suivent ce premier rendez-vous d’échographie passent beaucoup trop lentement à mon goût. La nervosité me ronge. Ou plutôt une sorte de nervosité. Ce n’est pas particulièrement négatif, juste que je ne sais pas trop à quoi m’attendre. Je n’ai parlé de cette nouvelle à personne encore, on dirait que je ne réalise pas trop exactement ce qui est en train de nous arriver. De toute manière, ça fait des jours que je squat chez Erin et je n’ai vu personne d’autre qu’un client hier (et elle, et Burton, et Leah quand je suis descendu dans la clinique sur l’heure du midi). Et puis… faut dire que ça me stresse un peu de le dire aux gens autour de moi. J’ai peur qu’ils nous jugent, qu’ils disent que ça ne fait pas longtemps qu’on est ensembles, qu’on aurait dû être plus prudents, qu’on n’est pas prêts ou je ne sais pas. Pas que ça me fasse changer d’avis sur ce que je pense de tout ça… peu importe ce que les gens pensent, je serai du côté d’Erin, de notre couple. Mais j’ai pas envie de faire de la peine à Tessa en lui mettant sous les yeux qu’Erin et moi attendons un enfant, ou bien que Link trouve que j’aurais dû faire plus attention pour pas que sa jumelle s’en porte mal. Et mes parents… oh la la. Ils ont une manière de penser plutôt vieillotte, parfois, et pour eux, le mariage est crucial avant le bébé… Sans compter que je sais qu’ils pensent qu’Erin n’est pas la meilleure personne pour moi. Je sais qu’ils ont tort, en passant. Ils ne la connaissent juste pas comme moi, je la connais. « DEBOUUUT DEBOUUTTTT mon coeur. C’est aujourd’huiiiiiii » Un grognement s’échappe de bouche, je me tourne de l’autre côté en espérant pouvoir dormir un peu plus. Depuis quelques temps, je peine à me réveiller tôt comme je le faisais avant, d’ailleurs je vais courir beaucoup moins souvent que d’habitude. C’est possible que les nuits avec Erin aident là-dedans… et pendant les semaines où on ne faisait plus trop l’amour, eh bien, c’était l’habitude, quoi. Son lit est beaucoup trop confortable, d’ailleurs. Cette nuit, par contre… oh la la. Rien que d’y penser, j’en ai des frissons. J’ai l’impression de la retrouver. D’ailleurs, je gémis de bonheur lorsqu’Erin se met à parsemer mon corps de bisous. Ses lèvres tout près de mon nombril suffisent à me donner envie d’elle et à me réveiller. Le nombril, quoi. Son visage se retrouve tout près du mien — je le sais, pas parce que je le vois, mais parce que je sens son souffle contre le mien. « Mais pourquoi tu t’arrêêêêêêête », je me plains en fixant mon regard dans le sien. J’ai envie encore de ses bisous, je frissonne rien que de me l’imaginer. « Debout papou chéri » me dit-elle tout près de l’oreille. Son papou me fait sourire autant qu’il me serre l’estomac. Moi, papa. Allons-nous pouvoir nous câliner tout autant quand il y aura le bébé? La nouvelle ne me déplaît pas, mais faut dire que j’ai un peu peur de devoir partager Erin… « Pour de vrai … j'te chanterai "En Cloque" en attendant le p’tit » Je roule sur le dos et attire ma copine pour qu’elle se retrouve sur moi. Complètement. Mes lèvres se posent sur les siennes et les mordillent avec tendresse. Pour avoir traduit la chanson encore et encore, pour l’avoir écoutée jusqu’à pouvoir chanter moi-même les paroles dans une langue que je ne parle pas, je sais ce que ce petit bout de chanson veut dire. [color:8a32=#cornflowerblue]« Elle a été écrite pour nous, cette chanson… » Je fais rouler Erin sous moi parce que je me dis que ça ne doit pas être super confortable pour elle d’être sur le ventre comme ça, et j’entreprends de donner de petits bisous dans son cou, totalement réveillé maintenant.
Dans la salle d’attente, j’ai l’impression que ça fait une heure qu’on attend, voire plus. Mais un petit coup d’oeil à l’horloge m’indique que ça ne fait que dix minutes qu’on est arrivés. « Erin Sanders, c’est à vous. » Mon regard se tourne vers la voix masculine qui appartient à une femme qui se trouve tout près d’un couloir. Je retiens mon souffle alors que je suis mon amoureuse, ma main dans la sienne, la serrant très fort, jusqu’à la petite salle vers laquelle la madame nous entraîne. Elle referme la porte derrière nous et invite Erin à s’installer, m’indique une chaise tout près pour moi. Ça me fait tout drôle quand mon amoureuse lève son chandail pour montrer son bedon tout rond à quelqu’un d’autre. Elle grimace quand la technicienne vide un tube de gel sur son ventre, c’est peut-être froid? Intrigué, une main toujours dans la sienne, je plonge mon doigt dans une goutte de gel pour le porter à mon nez et sentir. Ça ne sent pas grand chose, je ne sais trop pas ce que c’est. Alors que la professionnelle prépare ses affaires et ne regarde pas, je tends la langue sur mon doigt pour goûter au produit en espérant ne pas m’intoxiquer. C’est plus fort que moi. Un vrai gamin. Une grimace déforme mes traits, ça ne sent peut-être rien, mais c’est dégueulasse au goût. J’essuie donc ce qu’il me reste sur mon pantalon. La technicienne revient vers nous et s’installe sur l’autre chaise. Nerveux, je me racle quelque peu la gorge. « Quand est-ce qu’on va savoir si c’est un gars ou une fille? » Je me tourne vers Erin et cligne des yeux. « D’ailleurs… est-ce qu’on veut le savoir? » Sa décision sera la mienne, ce qui lui fait plaisir, quoi. On a parlé de nos préférences, mais pas de si on voulait le savoir avant. « Vous avez encore le temps d’y réfléchir », nous explique la femme en prenant le machin-truc qui, je pense, servira à voir le bébé. « C’est au cinquième mois que vous pourrez savoir, si vous le souhaitez. » Donc encore quelques semaines à attendre, quoi.
Mercredi 6 octobre 2021 - Je me sens tellement plus légère de lui avoir annoncé. Une petite part de moi avait peur qu’il n’accepte pas son rôle de père immédiatement. Pire, que cette annonce mette en péril notre couple. Ça aurait été difficile à encaisser. Mais je n’aurai pas pour autant renoncer à ce bébé. Pas cette fois. Même si cela doit m’éloigner de mon âme soeur. Ce petit ange vole doucement à la première place. « Mais tu n’as pas été trop malade? » Je lui adresse un sourire tout en venant poser ma main sur la sienne afin le rassurer. « C’est supportable. Quelques vomissements le matin. Le plus chiant c’est que j’ai toujours envie de pipi … Un soir je me suis endormie sur le trône mais tu dormais trop bien pour t’en rendre compte » Ce qui l’avait plus déranger finalement c’est mon réveil qu’il a dû éteindre à ma place. Le voir ton ému me rend encore plus émotive. Amoureuse surtout. C’est tout une déclaration d’amour que je lui fais. « Impossible. À l’infini et plus loin encore, tu te rappelles? » Un sourire niait s’étale sur mes lèvres tandis que je lui pince les joues avec mon pouce et mon index. « Au-delà des étoiles ? » Quoi que moi je m’y plais. Notre constellation sera encore plus parfaite avec notre petit-pois. Au fil de la discussion je finis par le remercier de ne pas nous abandonner. Je doute qu’Adriel en vienne là. Il n’a rien de comparable à mon père. Mais mon enfance a été bercé par des rejets et une totale ignorance venant de mon géniteur. Une petite part de moi a toujours peur que ça se reproduise. Je ne veux pas que mon enfant connaisse cette douleur. Une douleur invisible et pourtant aussi douloureuse que les coups. « Tu peux compter sur moi. M’enfin… vous… » Heureuse, j’enroule mes bras à sa nuque pour le faire basculer vers moi. Je ne pouvais pas espérer mieux comme réponse. J’évoque ensuite la future échographie. La toute première qui permettra de prouver en image que mon corps est plein de vie. Ma Gynéco insiste depuis des semaines déjà pour que je la fasse. Mais je tiens à la faire avec le papa. Pour ça il fallait que je prenne mon courage à deux mains. C’est chose faite. Adriel est tellement maladroit que ça m’amuse plus qu’autre chose. Cette nouvelle situation le perturbe. Je le vois dans ses yeux, ses gestes hésitants. Son hochement de tête me confirme qu’il sera là vendredi prochain. Je lui adresse un tendre sourire. J’ai du mal à réaliser qu’on en soit à ce stade. Je n’ai aucun regret. Pas avec lui. Je n’aurai pas pu espérer mieux comme papa pour mon enfant. Notre enfant. Pour la toute première fois, je lui offre la possibilité de toucher mon ventre. Mes mains viennent guider les siennes. Ça me fait tout drôle. La sensation est plus qu’agréable. J’en frissonne. Mon corps le réclame. Trop d’abstinences ces derniers jours. Je me retiens de ne pas lui sauter dessus. J’en viens à lui poser une question existentielle. A savoir, le sexe du bébé. Quelle importance ? Fille ou garçon, on l’aimera tout pareil. Mais ça me rend curieuse quand même. Alors je lui demande, histoire de savoir à quel point il réalise qu’il va être papa d’ici quelques mois. « Je sais pas trop… ça m’importe peu. Que ça soit une fille ou un garçon, j’veux dire, pas que ça… ne m’intéresse pas. » Il donnerait presque l’impression de s’en foutre. « Même pas une petite préférence ? » Je demande en plissant les yeux pour tenter de lire dans ses pensées. « Quoi que ça serait cool une mini Riri » Je me laisse imaginer une mini blondinette, comme celle de mon bouquin. Ça serait plutôt marrant que ce livre soit réellement un prélude de notre futur bébé. Mon subconscient a choisi la fille plutôt que le garçon. Mais je n’arrive pas à déterminer si c’est vraiment ce que je veux. « Mini Manders tu veux dire. Ce bébé aura 50% de tes gènes tu sais » J’insiste là-dessus. Ça me rend impatiente de voir le résultat de ce fabuleux mélange. « Et toi? » Les yeux rivés sur nos mains, je réfléchis. Je me dis que si j’avais une fille je pourrais la coiffer, lui mettre des robes de princesses. Si c’est un garçon j’aurai l’impression de voir un mini Adriel trop cute avec ses joues bouffies. Il jouerait de la guitare comme papa. « Je sais paaass. Humm… le mieux c’est de ne pas choisir. Les deux ! » Mon sourire atteint mes oreilles. L’idée m’a traversé l'esprit oui. Avoir deux enfants avec lui ça serait magique. Une fille ET un garçon. Il faudra juste prévoir un déménagement dans une maison assez grande pour accueillir tout ce petit monde. On n’en est pas encore là. Mon appartement à deux chambres. Pour le premier c’est suffisant. Je le rassure en lui disant qu’il fera un merveilleux papa. Je n’ai pas trop de doute là-dessus. Et il ne sera pas tout seul pour tout gérer. Je serais là. « Ensemble » Je laisse mon buste basculer vers lui, petit sourire aux lèvres alors que nos bouches sont à quelques centimètres l’une de l’autre. « Pour la vie, pour de vrai » Je murmure à mon tour tout en plongeant mes yeux dans les siens. Ma main vient glisser délicatement sur sa joue. Irrémédiablement les centimètres deviennent des millimètres. Pour finalement s’évaporer par un baiser plein d’amour. Je viens presser ma bouche contre la sienne tandis que mes doigts disparaissent dans ses cheveux. C’est si bon de le retrouver au complet.
J’étire mes bras en poussant un bâillement. Lui annoncer que j’étais enceinte m’a pris pas mal d’énergie. Je l’aide à débarrasser jusqu’à ce qu’il insiste pour s’en occuper lui-même. Je dépose furtivement un bisou sur sa joue avant de rejoindre la salle de bain. J’ai envie d’une douche bien chaude. La meilleure juste avant d’aller au lit. Je laisse finalement la porte entrouverte pour lui laisser la possibilité de me rejoindre. Chose que je ne faisais plus depuis un moment. Mais ce soir ton redevient comme avant. Hormis qu’un petit être s’invite à notre duo. Je l’entends entrer dans la pièce. Aussitôt un sourire s’étire sur mes lèvres. Je laisse mon dos s’appuyer contre son torse tandis que mes paupières se ferment doucement. « Ça m’a manqué, ça… » Mes mains glissent sur les siennes pour venir caresser mon ventre avec lui. J’ai l’impression qu’il est plus volumineux depuis que je l’ai annoncer à Adriel. « J’ai rêvé de ce moment. » Et j’ai encore l’impression de rêver tellement ce moment est délicieux. « Je t’aime, Erin. Y’a rien qui pourra me faire changer d’avis… » « Moow Addie si tu savais à quel point je t’aime moi aussi. Je me sens tellement chanceuse de porter ton enfant. » Les yeux brillants d’amour, mes fossettes se creusent avec un sourire presque timide. Je récupère un peu de gel douche dans le creux de ma main pour le savonner en retour. Comme à mon habitude, je m’amuse à faire des bulles en joignant mes deux mains. Avec la mousse je lui fais une barbe de père Noël. « Haha !!! Papa Noël tu m’amèneras quoi comme cadeau cette année ? » Je demande avec une petite voix d’enfant en essayant d’avoir l’air crédible. En vérité, j’ai déjà tout ce qu’il me faut. Du moment qu’il est à mes côtés, je suis une femme comblée. Je suis surprise de la voir s’agenouiller face à moi. Ça me fait toujours un peu flipper ce genre de chose. Allez savoir pourquoi. Le contact de ses lèvres sur mon ventre me fait fondre d’amour. Le regard baissé sur lui, je lui souris en glissant mes mains dans ses cheveux.
Music
« You're my always You're my forever You're my reality You're my sunshine You're my best times You're my anomaly And I'd choose you »
Je chante dans un murmure juste pour lui tout en me balançant doucement de droite à gauche, le regard toujours posé sur lui. Cette chanson devrait lui rappeler de vagues souvenirs … J’ai écrit ces paroles avec mon coeur et toute mon âme. Assumant totalement ce que je ressens pour lui. Ce voyage à Paris restera à jamais gravé dans mes plus beaux souvenirs.
Je m’emmitoufle dans mon peignoir en coton blanc pour me sécher. Le regard espiègle, je tourne la tête en arrière tout en fixant mon amoureux. J’attends qu’il pose les yeux sur moi pour laisser tomber mon peignoir par terre. Un petit rire malicieux s’échappe de mes lèvres avant que je ne rejoigne la chambre en trottinant. Comme si je voulais lui échapper. Que nenni. Confortablement installer sous la couette, je me faufile en position cuillère dans le creux de ses bras. J’avoue a haute de voix que ces petits moments avec lui m’avait manquer. « Moi aussi, si tu savais » Je tourne légèrement la tête pour pouvoir l’admirer. Mes doigts caressent son menton. « Il va falloir qu’on se rattrape … » La commissure de mes lèvres s’étire pour laisser apparaître un sourire. Je commence à lui déposer des bisous dans le cou. « Tu sembles te réveiller plus tôt, ces temps-ci » Je ne répond pas, trop occuper à le recouvrir de baiser. Mon corps se tourne doucement. « C’est à cause de… du bébé? Tu fais de l’insomnie? » « Hmmm, non, j’avais juste envie de pipi. Et trop faim aussi. » Il se pourrait bien que j’ai faim d’autre chose là. Mon corps se tourne au complet, mes mains vont se balader sur son torse, ses fesses. Ma bouche atteint le lobe de son oreille que je mordille au passage. « J’ai faim de toi » Je susurre entre deux bisous volés. Ça m’émoustille à l’idée de ne faire qu’un avec mon amoureux. Front contre front, je frotte mon nez contre le sien tout en lui souriant tendrement. Je suis plus entreprenante d’habitude. Mais ce soir je veux le laisser prendre l’initiative de le faire de son propre chef. Parce que c’est un peu différent des autres fois. J’ai l’impression que je l’aime encore plus.
Vendredi 8 octobre 2021
Les yeux encore clos, un sourire est ancré sur mes lèvres. Les mains d’Adriel sont toujours posées sur mon ventre. Comme s’il avait peur que notre bébé se fasse la malle. Je trouve ça plutôt amusant et vraiment mignon. Je me retourne pour me retrouver nez à nez. Son sommeil est encore bien profond car il ne réagit même pas à mes lèvres qui frôlent les siennes. La méthode douce ne semble pas fonctionner. J’opte alors pour la version plus hardcore. Avec ma délicatesse légendaire je lui gueule de se lever, la voix rieuse. Le bougre, il me tourne le dos en grommelant dans sa barbe. Comment ose t-il ! Je vais pas lâcher l’affaire si facilement. Okey, il veut jouer à ça. Je sais qu’il ne résistera pas cette fois. Ma tête disparaît sous la couette pour le parsemer de bisous. Des caresses aussi. Je le provoque volontairement. Trop facile. Son corps est déjà opérationnel. Il m’étonnera toujours de ce côté-là. Je suis plutôt flatté car ça confirme que je lui plaît. Mais je n’ai pas envie de lui donner satisfaction pour autant. Le but là c’est qu’il se réveille pour être à l’heure à l’échographie. Je remonte à la surface. Les coudes sur ses omoplates, mon menton repose dans le creux de mes mains. Je souris comme une chipie. Trop fière de mon plan machiavélique. « Mais pourquoi tu t’arrêêêêêêête » « Parce que j’ai envie de t’embêter et ça marche » Un petit rire m’échappe. Je lui dis de se lever. Je veux pas qu’on soit en retard. Je ne manquerais ce rendez-vous pour rien au monde. Les paroles de notre chanson fredonnent entre mes lèvres. Il n’en fallait pas plus pour qu’il m’attrape et me fasse rouler sur lui. Je pousse un petit cri de surprise. Mes cheveux viennent créer une cage secrète en cachant nos deux visages. Cette position me rappelle notre premier baiser sur la glace. Je ne résiste pas à l'envie de l’embrasser. Il me mordille la lèvre, je le chatouille en retour. « Hmmm » Des grands gamins qui refusent de grandir. « Elle a été écrite pour nous, cette chanson… » Je viens frotter mon nez contre le sien affectueusement. « Oui, je l’aime beaucoup. On devrait la chanter sur scène la prochaine fois » À ce rythme là on va pouvoir se faire un album. Notre soirée mensuelle au Canvas est presque devenue un rendez-vous incontestable. On a même notre fan club. Je trouve ça amusant de voir les gens nous acclamer comme si nous étions des célébrités.
Les clés dans les mains, je m’apprête à déverrouiller les portes de Choupette. Mais Adriel me stoppe dans mon élan en prétextant qu’on sera plus à l’aise dans sa Maserati. Je fronce les sourcils en le fixant. « Plus à l’aise mouaiiis » Je le soupçonne plutôt de ne pas vouloir me laisser conduire. Si ça commence comme ça à trois mois de grossesse ça sera quoi dans six mois. « Je suis pas malade tu sais » Je préfère préciser. Je ne voudrais pas être traité comme une assistée. Être enceinte ce n’est pas non plus devenir une incapable. Je ne suis pas en porcelaine ! J’accepte pour cette fois de prendre sa voiture. J’avoue que les sièges chauffants c’est cool. Quand on arrive dans la salle d’attente c’est une autre histoire. Je sens le stress grimper en flèche. Encore plus en voyant ces autres femmes enceinte jusqu’au cou. Maladroitement je ne peux pas m’empêcher de fixer leur ventre rond comme un ballon. Un bambin se tient debout devant sa mère. Il doit avoir deux ans à tout casser. Je le vois coller son oreille sur le ventre de sa maman. Je trouve ça trop mignon. Instinctivement ma main vient chercher celle d’Adriel tandis que j’observe la scène. Ma tête s’incline sur son bras. « J’ai trop hâte de pouvoir le serrer dans mes bras » Je lui ferais tout plein de câlins. Je lui chanterais des chansons que j'aurais écrite spécialement pour lui. Ma mère lui tricotera des vêtements. Je m’imagine en train de le bercer dans un rocking-chair, face à une cheminée qui crépite. Dans notre futur cocon d’amour. « Erin Sanders, c’est à vous. » Je lève aussitôt la tête. Prise par surprise alors que je m’étais perdue dans mes pensées. Une boule se forme dans ma gorge. Inconsciemment j’ai un peu peur. Je ne sais pas pourquoi d’ailleurs. Ce n’est pas la première fois que je vois mon gynéco. Par contre c’est la première fois que je verrais quelque chose apparaître sur l’écran. Je n’avais pas fait d’échographie pour Gabi. Je n’ai pas eu le courage … Je m’installe sur la chaise d’auscultation en relevant ma robe pour laisser accès à mon ventre. Ça me fait bizarre de voir Adriel ici. La gynécologue m’étale du gel. C’est toujours aussi froid my God. A croire qu’il a été stocké dans le frigo. Elle allume le moniteur. J’observe, curieuse. Jusqu’à ce que je sente le doigt chaud d’Adriel glisser sur mon ventre. Je lève alors les yeux sur lui en l'interrogeant du regard lorsque je le vois renfiler le bout de son index. Il le porte à sa bouche pour … goûter. Sérieusement ? « Adiiiiee qu’est-ce que tu fout ?? » Je chuchote pour pas me attirer l’intention de mon gynéco. Sa grimace me fait pouffer de rire. « T’es con » Que je lui dis affectueusement. C’est mon clown d’amour. J’entends les pas du praticien revenir vers nous. Discrètement je fais une petite tape sur sa main pour qu’il arrête ses bêtises. « Quand est-ce qu’on va savoir si c’est un gars ou une fille? » Nos regards se croisent. « D’ailleurs… est-ce qu’on veut le savoir? » J’hausse les épaules. « Humm … On pourrait faire une baby shower et le découvrir avec nos proches. Qu’est-ce que t’en penses ? » Je pourrais pas attendre neuf mois pour le savoir. J’aimerais trop faire cette fête avec Tessa. On pourrait découvrir ensemble le sexe de notre bébé. Je lui en parlerais la prochaine fois que je la vois. « Vous avez encore le temps d’y réfléchir. C’est au cinquième mois que vous pourrez savoir, si vous le souhaitez. » Je regarde Adriel en souriant. « Dans deux mois ! Tu réalises que dans deux mois on pourra mettre un nom sur notre petit ange ? » Je me sens toute niaiseuse. Mon ventre sursaute au contact de la sonde. Je serre sa main tout en fixant l’écran de l’échographe. Après quelques secondes de recherches, un petit point apparaît. Je suis presque soulagée de le voir. Ce n’était donc pas un rêve. « Regardeee » Mes yeux se remplissent de larmes aussi vite qu’un cheval au galop. « C’est notre petite étoile » Que je renifle sans jamais quitter l’écran des yeux. Je pourrais l’admirer des heures. « Tout va pour le mieux. Il est parfaitement formé. Aucune anomalie à première vue. Continuer de manger sainement. Pas de viandes crues. Pas d’alcool et tout se passera bien. » A mon grand regret l’écran s’éteint. J’essuie le gel sur mon ventre à l’aide d’une lingette. « Je pourrais avoir une photo s’il vous plaît ? » La gynéco se tourne vers nous en nous tendant une photo chacun. « Une pour papa, une pour maman, pas de jaloux » Je la remercie d’un sourire avant d’admirer notre bébé encore et encore. « On dirait un petit-pois » Je ri, encore tout émue. J’ai du mal à décoller mes yeux de là. J’attends d’être sorti du cabinet pour laisser exploser ma joie. « On va être parents mon amour !!! » Je saute à son cou pour venir l’embrasser fougueusement. « Je t’aimeeee je t’aimeee je t’aime » Que je ne cesse de lui souffler à l’oreille en le parsemant de plein de bisous. J’ai l'impression que ça ne sera jamais assez. Mais je ne cesserais jamais de lui dire pour ne pas qu’il oublie à quel point je tiens à lui.
Mercredi 6 octobre 2021 J’ai l’impression de flotter sur un petit nuage avec Erin, mais tout en n’étant pas entièrement là. C’est dur pour mon cerveau d’encaisser que, d’ici quelques mois, je serai papa. Non mais, PAPA. Toutefois, tout se replace dans ma tête: les symptômes d’Erin que je prenais pour de la fatigue à cause de la clinique, son addiction aux fraises renouvelée que j’arrivais à me convaincre que c’était normal alors que, un peu plus tôt cette année, c’était un des trucs qui m’avaient fait croire qu’elle pouvait être enceinte. Bon, n’empêche, elle mélangeait ses nuggets avec de la confiture de fraises. NON MAIS. Cette fois-ci, elle ne semble pas faire de drôles de mélanges comme ça, mais ne sait-on jamais… Intrigué et inquiet à la fois, je lui demande si elle n’a pas été trop malade. Sa main se pose sur la mienne, on s’échange un sourire. « C’est supportable. Quelques vomissements le matin. Le plus chiant c’est que j’ai toujours envie de pipi … Un soir je me suis endormie sur le trône mais tu dormais trop bien pour t’en rendre compte » L’image d’Erin qui s’endort alors qu’elle n’a voulu que faire pipi me vient en tête et j’étouffe un petit rire. « Sérieux? » En effet, je ne m’en suis pas rendu compte. Il y a bien une fois où son réveil n’arrêtait pas de sonner… mais ça me paraît tellement vague. Comme si ça s’était passé dans un rêve plutôt que dans la réalité. Au moins, je suis content qu’elle n’ait pas plus eu de symptômes que ça, qu’elle le vit bien. C’est l’important. On s’échange de doux je t’aime, mais comme presque chaque fois, c’est une compétition à savoir qui aime le plus l’autre. Je me crois infaillible avec mon argument de Buzz Lightyear. Erin attrape ma joue entre son pouce et son index, un sourire sur les lèvres. « Au-delà des étoiles ? » Je hoche la tête, ce délire d’étoiles qui revient encore et encore me fait sourire jusqu’aux oreilles. « Et même plus loin », j’ajoute, me disant que comme l’Univers est en pleine expansion et qu’on ne connaît même pas sa totalité, c’est fort possible. Elle me surprend en me remerciant de ne pas les abandonner. Je veux dire… pourquoi est-ce que je ferais ça? Tout maladroit, je lui dis qu’elle — ils — peut compter sur moi, et elle enroule ses bras autour de ma nuque alors que je vois l’effet de mes mots sur les traits de son visage. Elle m’attire vers elle et nos visages se retrouvent à quelques millimètres l’un de l’autre. J’aime me retrouver aussi proche d’elle, comme si nos deux bulles se jumelaient pour n’en former qu’une seule. L’idée qu’elle veuille bien de moi à la première échographie me rend toute chose. Ça me touche, et bien sûr que je ne manquerai ça pour rien au monde. Même si ça me rend tout nerveux étant donné que c’est l’inconnu. Erin m’invite à toucher son ventre. Ça me fait tout drôle de m’imaginer qu’en elle, il y a un être qui découle autant d’elle que de moi. Sa peau est toute chaude. Nos regards se fixent l’un dans l’autre alors qu’on partage un moment aussi intime. Je peine encore à réaliser… je ne sais pas si je le réaliserai un jour, que je vais être papa. Bon, je n’aurai pas trop le choix, on s’entend. Je suis autant excité à l’idée de rencontrer notre enfant que j’ai peur. Et quand la future maman me demande si je préférerais un garçon ou une fille, je bégaie que ça m’importe peu. Pas de le savoir tout court, mais bien que ce soit un garçon ou une fille, je sais qu’il ou elle sera parfait/e. Parce qu’il/elle viendra d’Erin. « Même pas une petite préférence ? » Elle plisse les yeux, me regarde intensément comme si elle ne me croyait pas. Je finis par avouer que ça serait cool, une mini Riri. Quoiqu’un garçon aussi pourrait être une mini Riri, tenir d’elle en majorité. Par exemple, on me dit souvent que, niveau personnalité, je retiens plus de ma mère que de mon père. « Mini Manders tu veux dire. Ce bébé aura 50% de tes gènes tu sais » Sa remarque me fait sourire, bien que ça me fait à la fois tout bizarre. C’est fou de penser qu’un être humain va tenir de moi aussi… À mon tour, je lui retourne la question. Si elle me l’a posée, c’est peut-être parce qu’elle a une idée en tête, elle. « Je sais paaass. Humm… le mieux c’est de ne pas choisir. Les deux ! » Un petit rire s’échappe d’entre mes lèvres. « Même pas une petite préférence? » je répète sa propre réponse à la mienne. Les deux… je nous imagine avoir des jumeaux et une bouffée de chaleur mélangée à de la panique m’envahit. Un bébé, déjà, faut que je me fasse à l’idée. Mais deux bébés…? Ce serait fou. On les aimerait autant, mais je me sentirais encore moins à la hauteur. M’enfin, elle parle peut-être d’un deuxième enfant pour la suite… Mais comme j’ai déjà un peu de mal à digérer l’idée d’avoir un enfant — je ne me sens tellement pas prêt, mais il n’y a rien de mieux que de mettre les deux pieds dans l’aventure, non? —, imaginer déjà avoir notre deuxième… Un pas à la fois, hein. Pas que l’idée me déplaise, mais il faut que j’assimile l’idée que je vais être papa, déjà. Quand j’énonce mes craintes tout haut, Erin n’hésite pas à me rassurer et ses mots me font un grand bien. Surtout qu’elle me rappelle qu’on élèvera un enfant ensemble. Son visage s’approche de nouveau du mien, ses lèvres se retrouvent si près des miennes que je peux déjà y goûter. « Pour la vie, pour de vrai » Son souffle caresse ma peau, ses émeraudes plongent dans mes yeux. Mais quand sa main caresse ma joue, c’est plus fort que moi, mes paupières se ferment et je me penche davantage pour venir poser ma bouche sur la sienne, incapable de résister plus longtemps. Pour de vrai. C’est un peu devenu notre mantra, comme si on se disait: après toutes ces années, on est ensembles pour de vrai. J’ai l’impression de retrouver ma copine, de me sentir de nouveau ultra proche d’elle alors que je la sentais s’éloigner petit à petit dans les dernières semaines, alourdie par un grand secret.
La fatigue remplace la faim, mais j’insiste pour finir de ranger le tout parce que, premièrement, c’est elle qui a tout cuisiné et préparé, et aussi parce qu’elle a l’air plus fatiguée que moi. Ça doit faire partie des premiers symptômes… Je suppose que c’est épuisant, porter la vie. Bref. Après m’avoir déposé un petit bisou sur la joue qui me fait frissonner, elle s’éclipse vers la salle de bain et, par habitude, mon ventre se serre alors que je me convainc qu’elle a sûrement verrouillé la porte comme dans les dernières semaines. Heureusement, mon intuition me pousse à aller vérifier et je découvre que je peux entrer. Je prends ça comme une invitation et ne tarde pas à me déshabiller pour aller la rejoindre sous l’eau chaude. La sentir contre moi me fait énormément de bien. Ses nouvelles rondeurs me font tout drôle, mais pas dans le mauvais sens. Juste que ça me surprend encore. « J’ai rêvé de ce moment. » Tout sourire, je me contente de frotter mon nez contre sa joue avant d’y déposer un petit baiser. Savourant ce moment, je lui avoue une fois de plus mes sentiments pour elle en lui promettant que rien ne pourra me faire changer d’avis sur nous deux. « Moow Addie si tu savais à quel point je t’aime moi aussi. Je me sens tellement chanceuse de porter ton enfant. » Porter mon enfant… oh la la. Mais moi aussi je me sens chanceux. Juste un peu confus par toute la situation. Ses mains pleines de gel douche passent partout sur mon corps. Je savoure les yeux clos, chaque caresse me donne un peu plus envie d’elle. Ses mains s’occupent alors de mon visage et s’attardent sur mon menton, et je l’entends glousser. Intrigué, j’ouvre les yeux. « Haha !!! Papa Noël tu m’amèneras quoi comme cadeau cette année ? » Je ris en roulant des yeux. Quelle gamine celle-là. Pas que je sois bien, bien mieux… « Tout ce que tu veux, ma chère », je réponds en essayant de garder mon sérieux. C’est peine perdue. Déjà, quelques mois après Noël, il s’avère qu’on aura tous les deux un petit cadeau de la vie… Comme pour m’en assurer, je m’agenouille devant elle pour me retrouver face à son ventre. Après un peu d’hésitation toutefois, j’y pose mes lèvres, me forçant un peu à réaliser que nous allons bientôt être trois. Les mains d’Erin glissent dans mes cheveux, faisant perdurer mon sentiment d’énorme bien-être. Là, en cet instant, j’ai l’impression qu’à nous deux, on peut affronter n’importe quoi. Erin se met à fredonner une chanson que je ne tarde pas à me rappeler. Comment oublier? Cette chanson, elle l’a écrite pour moi, pour me déclarer son amour il y a quelques mois. Peu avant que, peut-être, on ne conçoive cet enfant, d’ailleurs… C’est dur de dire quel jour exactement je suppose puisque bon, on ne s’est pas lâché de tout le voyage. Woah, on a conçu un enfant ensemble. Je me laisse bercer par sa voix, le visage collé contre son ventre, caressant ses côtes de mes pouces, et je me demande si le bébé aussi, il l’entend. Sa maman.
On sort finalement de la douche après je ne sais combien de temps. J’attrape une serviette et m’ébouriffe les cheveux avec pour les sécher un peu. Quand je relève les yeux sur Erin, elle me fixe d’un air provocateur et laisse tomber le peignoir qu’elle vient tout juste d’enfiler. Mmmm. Toujours aussi belle. Ses formes ne me laissent pas indifférent. Elle s’échappe vers la chambre, laissant le peignoir en un petit tas par terre. Je me lance à sa poursuite, les bras tendus, en riant. « Attends-moi », je la supplie, mais c’est en vain parce que, quand j’arrive dans sa chambre, elle est déjà sous la couette. Je me glisse derrière elle pour la prendre dans mes bras et la serrer un peu plus fort contre moi. J’ai l’impression que ça fait longtemps qu’on n’a pas été aussi câlins que ça. Elle se tourne finalement vers moi et ses doigts glissent sur mon menton. « Il va falloir qu’on se rattrape … » Je me mordille la lèvre, des flammes toutes chaudes dansant dans mes iris. J’ai tellement envie d’elle, d’elle toute entière, âme et corps. Oui, oui, il va falloir qu’on se rattrape, je songe même si les mots ne franchissent pas mes lèvres. Les siennes descendent dans mon cou dans de délicieux baisers qui me font gémir, mais j’ai encore quelques trucs en tête avant de nous laisser nous abandonner totalement l’un à l’autre. Par exemple, est-ce que c’est à cause du bébé qu’elle se réveille plus tôt? Est-elle inconfortable? Elle ne répond pas à premier abord, mais finit par se tourner vers moi. « Hmmm, non, j’avais juste envie de pipi. Et trop faim aussi. » J’étouffe un rire. « La prochaine fois, réveille-moi, ça sera plus fun à deux », je dis, petit sourire malicieux aux lèvres. Ses mains entreprennent de se balader sur moi, sa bouche finit par arriver près de mon lobe d’oreille pour le mordiller. Mes sens se mettent en alerte, un gémissement s’échappe de ma gorge. « J’ai faim de toi » « Mmmm, moi aussi… » Ma jambe s’enroule à la sienne, mes mains se promènent sur son corps nu avec beaucoup plus d’intensité. Ma bouche cherche la sienne, la trouve finalement, la mordille avec vivacité. Je colle mon bassin au sien en me demandant combien de temps on a pour se rapprocher autant avant que son ventre ne nous ralentisse. Mais je suis sûr qu’elle sera toute aussi belle, qu’on trouvera moyen de se rapprocher quand même. Si? Lentement — ou pas —, ma main se faufile entre ses cuisses pour lui offrir des caresses que je rêvais de lui donner dans les dernières semaines. « J’ai envie de toi… » je murmure contre son cou, juste avant d’y faire glisser doucement ma langue et de le mordiller.
Vendredi 8 octobre 2021 La nuit a été courte. Et épuisante. J’aimerais rester ainsi, collé contre Erin, encore longtemps. Pour toujours. Mais sa voix s’infiltre dans mes oreilles, et pas rien qu’un peu. J’opte alors pour me tourner. On est en congé aujourd’hui, ne pourrait-on pas dormir encore un peu? Le sommeil me fait oublier notre rendez-vous. Ses caresses et ses bisous, par contre, me réveillent un tout petit peu plus, me donnent vraiment envie d’ouvrir les yeux, de profiter avec elle, de poursuivre, peut-être, ce qu’on a commencé cette nuit. Mon corps en entier se réveille sous ses doigts. Sauf qu’elle s’arrête brusquement et je m’en plains immédiatement. « Parce que j’ai envie de t’embêter et ça marche » Je grommelle quelque chose d’incompréhensible même à moi, mais qui prouve de mon mécontentement. Erin rit et je boude encore plus. Mais qu’elle fredonne les paroles de notre chanson me redonne le sourire. J’arrive à me situer dans la mélodie et à comprendre ce qu’elle dit. Je l’attire alors à moi, voulant sentir son corps contre le mien. Voilà, c’est beaucoup mieux. Elle lâche un petit cri de surprise, ses cheveux chatouillent mon visage et nous enferment dans notre petit cocon rien qu’à nous. Nos lèvres se scellent l’une à l’autre dans un délicieux baiser. Son nez se frotte doucement sur le mien quand je commente qu’elle a été écrite pour nous. « Oui, je l’aime beaucoup. On devrait la chanter sur scène la prochaine fois » Je hoche la tête, tout à fait d’accord. Ça fait d’ailleurs depuis Paris que l’idée flotte entre nous deux, mais bon, ce n’est pas comme si je peux apprendre une chanson francophone du jour au lendemain, non plus.
Erin se dirige tout naturellement vers sa voiture. Secouant la tête, j’enlace mon bras au sien en l’entraînant vers la mienne. « Viens, on va être plus à l’aise dans ma Maserati », je dis en déverrouillant les portes. Ses sourcils se froncent alors qu’elle se stoppe et me fixe, l’air suspicieux. « Plus à l’aise mouaiiis » La vérité, c’est que sa coccinelle m’a toujours un peu inquiété. J’ai l’impression que les freins pourraient lui faire défaut en pleine route. Cette inquiétude s’est décuplée maintenant qu’elle est enceinte. Au moins, je sais qu’Alexis ne laisserait jamais Erin la conduire si elle était dangereuse. N’empêche… je n’ose pas trop partager mes craintes à ma copine sachant à quel point sa voiture lui tient à coeur. J’ai l’impression qu’elle ne le prendrait pas très bien. Et bon… il y a aussi le fait que j’ai appris tout récemment qu’elle a eu sa première fois avec mon meilleur ami sur la banquette arrière. J’essaie de ne pas trop y penser, surtout qu’elle veut que je passe à autre chose, mais c’est difficile quand je suis dedans. « Je suis pas malade tu sais » Je tourne la tête vers elle dans un petit sourire. « Je le sais, ça, ma chérie. » Et puis, il fait encore un peu frais dehors, les sièges chauffants pourraient nous être utiles. Une fois à la clinique, on s’installe dans la salle d’attente. Autour de moi, il y a des mamans seules, des mamans avec leur famille au complet et même des mamans seulement avec un enfant. J’ai de la misère à ne pas fixer leur ventre en réalisant que celui d’Erin sera aussi gros que le leur d’ici quelques mois. « J’ai trop hâte de pouvoir le serrer dans mes bras » Je me penche sur elle pour coller un bisou sur son front. Sans toutefois répondre quoi que ce soit, parce que je ne sais pas trop si je peux répondre moi aussi. Je suppose, oui, moi aussi j’ai hâte… mais ça me paraît tellement lointain, tellement irréel. Bref, pour éviter de fixer qui que ce soit, j’attrape la main d’Erin dans la mienne et ferme les yeux, jusqu’à ce qu’une voix grave appelle le nom de ma copine. Surpris, je constate que la voix vient d’une femme, mais je m’en retrouve plutôt soulagé. Ma main se resserre sur celle d’Erin. C’est le moment. Elle s’installe sur une chaise et moi juste à côté d’elle. Une grimace se pose sur son délicat visage quand le médecin met du gel sur son ventre. Un peu curieux de ce dont il s’agit, je trempe mon doigt sans trop m’en rendre compte pour le sentir, puis pour le… goûter. Je ne sais pas trop ce qui me prend, faut croire que c’est instinctif. « Adiiiiee qu’est-ce que tu fout ?? » Je grimace parce que le goût est absolument dégueu. « T’es con » Elle me fait une petite tape sur ma main et je m’empresse d’étendre le reste du gel sur mon pantalon. J’étouffe un rire en relevant les yeux sur elle. « C’est pour ça que tu m’aimes », je réplique avant de lui envoyer un bisou mimé.
La gynécologue revient vers nous et je me redresse pour être à mon meilleur. Intrigué, je lui demande quand on va pouvoir savoir le sexe du bébé, avant de réaliser qu’Erin et moi n’avons pas discuté de si on allait attendre la naissance ou pas. La naissance. Oh my God. « Humm … On pourrait faire une baby shower et le découvrir avec nos proches. Qu’est-ce que t’en penses ? » Timidement, je hoche la tête. Pourquoi pas. Mais va déjà falloir qu’on l’annonce à nos proches… Je redoute déjà le moment de le dire à mes parents, à Link, à Tessa, à Maxence. Je me demande ce que ma soeur va en penser. Son plus jeune frère qui va avoir un enfant avant elle, alors qu’elle essaie avec son mari d’en avoir un. La dame nous informe qu’on pourra de toute manière le savoir qu’au cinquième mois. Ça me rassure, on pourra en discuter à tête reposée. Erin est tout sourire, elle rayonne. « Dans deux mois ! Tu réalises que dans deux mois on pourra mettre un nom sur notre petit ange ? » Woah… C’est vrai, on pourra discuter de noms. J’ai bien hâte de voir ce qu’on choisira. De nouveau, je hoche la tête. « Déjà deux mois… » C’est fou ce que le temps passe vite. Deux mois, ce n’est rien.
Erin sursaute quand le médecin pose le machin-truc sur son ventre. On a tous les deux les yeux rivés sur le petit écran qui ne montre pas grand chose pour l’instant, main dans la main, comme hypnotisés. Puis, on voit un tout mini point apparaître. « Regardeee » Et je plisse des yeux comme pour mieux voir, surpris par la grosseur. C’est notre bébé? Genre, littéralement le fruit de notre amour. « Il est tout petit », je souffle, fasciné. Ma copine semble toute émue et ses yeux se remplissent d’eau. Je serre un peu plus fort sa main dans la mienne. « C’est notre petite étoile » « Oui… », j’arrive à répondre en retour, les yeux fixés sur l’écran. Woah… notre bébé. Dans son ventre. Sur cet écran. « Tout va pour le mieux. Il est parfaitement formé. Aucune anomalie à première vue. Continuer de manger sainement. Pas de viandes crues. Pas d’alcool et tout se passera bien. » Je jette un petit coup d’oeil à Erin en biais. Pas d’alcool, hein, que mon regard semble dire. Sauf que bon, je sais qu’elle n’en prendra même pas une seule goûte. Elle avait totalement arrêté avec Gabi. Et puis, ce n’est pas comme si elle en avait besoin, non plus. On peut s’amuser à des soirées même sans alcool. C’est que pour la taquiner. À grand regret, je regarde la gynéco éteindre l’écran. « Je pourrais avoir une photo s’il vous plaît ? » demande Riri en essuyant le gel sur son ventre. Le médecin nous tend chacun une photo, que je prends avec limite les mains tremblantes. « Une pour papa, une pour maman, pas de jaloux » Erin et moi n’arrivons tous les deux pas à décrocher notre regard de nos photos respectives. Ce bébé porte nos gênes à tous les deux. Men, on a créé la vie. Je n’en reviens pas. « On dirait un petit-pois » Je ri avec elle. « Le plus mignon petit pois, on s’entend. » C’est le nôtre.
Dès qu’on sort du cabinet, Erin explose de joie, alors que je me fais plus calme, perdu dans mes pensées, réfléchissant à… la vie. Littéralement. « On va être parents mon amour !!! » Je manque de basculer vers l’arrière quand elle me saute au cou pour m’embrasser. Je me délecte de ses lèvres en fermant les yeux, en passant ma main dans ses cheveux. « Je t’aimeeee je t’aimeee je t’aime » Sa joie m’inonde de bonheur. Je ne pourrais être plus heureux de la voir aussi heureuse, même si j’ai totalement l’impression de me trouver dans un rêve. Nous, parents. « Je t’aime tellement, Erin », je lui murmure près de l’oreille en resserrant mon étreinte sur elle.