Pam avait été clair, elle refusait que je remette les pieds chez elle. Elle n’était pas à l’aise avec les cartes, avec mes pendules mais quand j’avais apporté une planche ouija chez elle pour entrer en contact avec un mort, c’était la goute d’eau. Elle refusait que je pratique ces activités chez elle, surement trop flippée qu’un esprit malveillant reste dans son appartement et s’en prenne à elle. Mais si elle savait… Je ressentais la présence d’un être chez elle déjà bien avant de venir avec ma planche. Enfin, tant pis, j’allais pratiquer ailleurs. Mais le problème c’est que je n’avais pas d’autre lieux, personne n’était réellement partant pour me laisser m’installer dans une pièce chez lui. Alors pour l’instant, ma solution était d’aller chez ma mère. Elle était au travail toute la journée et quand elle rentrerait, elle n’y verra que du feu. Parce que, si elle semble fermer les yeux sur les annonces que je poste sur Airbnb pour mettre son logement en location pendant ses absences, en ce qui concerne mes activités extra ludiques, elle ne m’a jamais montré un réel soutien. Elle n’aime pas ça elle aussi, pas à l’aise non plus, pourtant, c’est bien grand-mère qui m’a transmis ses talents. Il parait que ça saute toujours une génération et je crois que maman s’est toujours sentie un peu à l’écart par rapport à tout ça. Sujet sensible entre nous. Un de plus, un de moins… Aujourd’hui, c’est Juanita qui a pris rendez-vous, je lui ai demandé la classique petite présentation avant de venir, pour savoir à qui j’avais affaire mais elle avait été franche en me disant que ce rendez-vous n’était pas pour elle mais pour son neveu et m’explique rapidement son histoire. Ok, donc j’allais accueillir un jeune homme qui n’avait aucune idée d’où il mettait les pieds et en plus de ça, il était envoyé par sa tante qui flippait pour son avenir parce que le gars avait une jambe en moins. Ça s’annonçait particulièrement… compliqué. Quand il comprendra pourquoi il vient ici, il n’aura qu’une envie : fuir. Mais elle était prévenue, c’était le deal, moi, j’avais mon argent alors qu’il reste ou qu’il parte, tant pis. « 7eme étage, chez Kimarra. » je lance dans l’interphone. C’est le nom de ma mère. Ca me permet de toujours rester un peu incognito. 7 étages, c’est un peu long, même avec l’ascenseur, j’attends et j’finis par aller ouvrir avant qu’on ne sonne à la porte directement et au même moment les portes de l’ascenseur s’ouvrent, juste devant la porte de l’appartement. Elle avait donc pas menti.
Les parents de Cameron n’en peuvent plus de regarder leur fils fixer les quatre murs de sa chambre depuis qu’il est emménagé chez eux il y a presque deux mois déjà. Ses proches sont évidemment conscients qu’il a besoin de temps pour se faire à sa nouvelle réalité, pour accepter la perte de son membre, mais sa marraine a décidé de forcer un peu le destin en l’obligeant à sortir aujourd’hui, persuadé que se faire prédire un avenir reluisant par une diseuse de bonnes aventures l’encouragerait à ne pas lâcher et à passer au travers cette période difficile. « Je n’ai pas envie d’y aller… » lâche-t-il dans un soupir en observant par la fenêtre sa tante qui l’attend un peu trop impatiemment. « Ça va te faire du bien de sortir et ça lui fera plaisir. Ça ME fera plaisir. » répond sa mère en lui caressant affectueusement les cheveux. Instantanément, Cameron se penche légèrement tout en repoussant les doigts de sa mère d’un coup de main comme s’il chassait une mouche. Même s’il a juste envie de retourner s’enfermer dans sa chambre, il accepte en se disant qu’il aura ensuite la paix. Jusqu’à la prochaine fois.
Même s’il n’est pas vraiment dans un état pour fuir, sa marraine l’accompagne jusqu’à l’intercom plein d’enthousiasme. « Tu vas voir Cameron, tu as un brillant avenir devant toi, je n’en doute pas une seconde. » dit-elle en appuyant sur le bouton de l’intercom pour signaler leur arrivé. Tandis qu’elle regarde ailleurs, le brun ne peut s’empêcher de lever les yeux au ciel face à la crédulité de sa tante. À l’inverse de la femme, Cam est plutôt incrédule, il n’a jamais cru à ce genre de choses et venir perdre son temps ici aujourd’hui le rend de mauvais poils même si ce n’est pas comme s’il était attendu ailleurs. « Je vais t’attendre ici! » dit sa tante tout en tendant sa main vers les boutons de l’ascenseur. Agacé qu’elle le traite comme s’il n’était plus capable de rien faire, le jeune homme se dépêche d’appuyer sur le bouton du 7e étage avant sa tante. « Si t’avais pas remarqué, je me suis fait amputer une jambe, pas les mains. » grogne-t-il en lui lançant un regard assassin tandis que les portes de l’ascenseur se ferment.
Lorsque les portes de l’ascenseur s’ouvrent enfin, le regard de Cameron se pose sur une jeune femme qui lui semble familière. Il espère au fond de lui qu’il se trompe et qu’ils ne se connaissent pas ou que si c’est le cas, que ce n’est pas avec elle qu’il a rendez-vous aujourd’hui. « Tina? » Ou est-ce Mina? Lina? Nina? Les sourcils froncés, il sort lentement de l’ascenseur en boitant, puis il jette quelques regards autour d’eux en espérant apercevoir quelqu’un d’autre qui l’attendrait. Sauf que l’adresse sur la porte devant laquelle Jina se tient semble correspondre à celle où il doit se rendre. Il soupire en prenant appuie sur sa canne. « Diseuse de bonnes aventures hein? Ça risque d’être divertissant… » ajoute-t-il sèchement pour bien lui faire comprendre qu’à ses yeux elle n’est qu’une arnaque.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrent et c’est un jeune homme qui en sort, s’aidant d’une canne pour marcher. A vrai dire, je crois que je m’attendais à pire que ça, je m’attendais à voir un mec en fauteuil roulant et je suis peut être un peu soulagée que ce soit pas le cas. J’crois que les personnes handicapées me font peur, quelle qu’elles soient mais j’me rends surtout compte que j’ai vraiment aucune excuse pour réagir comme ça et que finalement, fauteuil ou canne, il lui manque quand même une jambe à ce mec. « Tina? » Je relève les yeux, me rendant compte que j’avais fais une fixation sur sa canne et sa jambe plutôt que sur son visage. Merde. « Jina. » mon ton est sec parce que personnellement, il m’a fallu moins d’une seconde pour me rappeler de son prénom une fois que j’avais bien lu dans ses yeux. Ma réponse est un peu sèche, parce que je sais exactement à qui j’ai affaire à présent et là, j’ai juste envie de dire : karma ! « Diseuse de bonnes aventures hein? Ça risque d’être divertissant… » « et si j’met un coup de pied dans ta canne, est –ce que tu penses que les aventures seront toujours bonnes ? » peut être que ça lui fera perdre l’équilibre et qu’il se retrouvera à terre, comme toutes les fois où il avait essayé (et réussi) de m’intimider et de m’humilier au collège. « y a rien qui t’oblige à faire ça. » encore moins maintenant que je savais que le neveu de cette pauvre dame était Cameron. D’ailleurs, ce serait plutôt à elle que j’devrais tirer les cartes, pour lui faire comprendre qu’elle avait rien à devoir à ce petit con. Je reste bloquée devant la porte d’entrée alors qu’il a quand même l’air décidé à faire cette séance, mais à quoi bon ? Pour faire plaisir à tata ? Vraiment ? C’est qu’elle devait sacrément être bonne avec lui pour qu’il accepte ce tel supplice. J’ai rien contre ceux qui ne croient pas en mes talents, par contre, ceux qui n’y croient pas et qui le dénigrent, c’est autre chose. Surtout quand on a un passif commun. « C’est facile de prédire l’avenir des emmerdeurs dans ton genre. Tout fini par se payer un jour, tout. » et visiblement, il le savait déjà, quelqu’un ou quelques chose avait bien fait le taf.
« Jina. » Le ton de la jeune femme ne laisse aucun doute : elle se souvient assurément de Cameron. Le contraire aurait été plutôt surprenant considérant l’enfer qu’il lui a fait vivre alors que leurs chemins s’étaient croisés à l’école. Au fil des années, il est devenu un peu moins détestable qu’à l’adolescence, jusqu’à ce que son accident vienne tout ruiner et le fasse retomber dans ses mauvaises habitudes pour tenir les autres à l’écart. « Ah! Je me souviens maintenant que tu le dis. » Jina avec un J, bien entendu, même s’il s’entêtait à l’époque à écrire son prénom avec un G rien que pour l’embêter davantage. Chaque moyen de la faire réagir était bon et aujourd’hui, il s’en prend à son métier qui n’en est pas vraiment un à ses yeux. « et si j’met un coup de pied dans ta canne, est-ce que tu penses que les aventures seront toujours bonnes ? » Cam arque les sourcils en la défiant du regard de mettre sa menace à exécution même si au fond il espère qu’elle ne le fera pas parce qu’il ne veut pas s’écraser devant elle et qu’elle le voit encore plus en position de vulnérabilité. Mais considérant qu’il arrive à marcher sans sa canne, il devrait réussir à garder son équilibre malgré la perte de sa canne, non? Il se raccroche à cet espoir plutôt qu’à la possible humiliation qu’elle pourrait lui faire vivre en le faisant tomber. Karma. « Pas pour toi en tout cas avec le coup de canne que tu te prendrais dans le troisième œil. » En plus du commentaire qu’il laisserait assurément sur sa page pour lui nuire. « y a rien qui t’oblige à faire ça. » Il soupire en repensant à sa tante qui l’attend en bas et qui ne le laissera pas tranquille tant qu’il n’aura pas été de l’avant avec sa demande. Jina n’a aucune raison de mentir pour lui, quoiqu’elle serait certainement gagnante dans cette situation puisqu’elle n’aurait pas à l’endurer. « Plus vite on commence, plus vite on finit. » Maintenant qu’il se trouve devant elle et qu’il a fait l’effort de sortir de la maison de ses parents, aussi bien continuer et aller jusqu’au bout. Il ne veut pas se dégonfler même s’il est persuadé qu’elle escroque les gens. C’est sa tante qui paie aujourd’hui, pas lui. « C’est facile de prédire l’avenir des emmerdeurs dans ton genre. Tout fini par se payer un jour, tout. » Il la fusille du regard en s’approchant d’elle d’une démarche vacillante. « Je suis curieux d’entendre ça… Alors, tu me laisses entrer ou on fait ça dans ton cadre de porte? » Sans même attendre sa réponse, il poursuit son chemin tout en ne ratant pas l’occasion de percuter son épaule avec la sienne lorsqu’il passe à côté d’elle. Une fois dans son appartement, il se retourne pour lui faire face. « Elle est où ta boule de cristal? À moins que tu sois plus du type « lignes de la main », histoire d’avoir un peu de chaleur humaine en plus de vider le portefeuille de pauvres personnes naïves… »
Est-ce qu’on oubliait si facilement quelqu’un a qui on en a fait voir de toutes les couleurs il y a tout juste dix ans ? Aller, onze peut être. Qu’il ne me fasse pas le coup qu’il avait oublié toutes ses mauvaises blagues, ses persécutions quotidiennes, ses tapes sur l’épaule et le nombre de cahier qu’il avait balancé par terre juste pour le plaisir de me voir m’abaisser devant ses yeux. Cameron avait été un vrai petit emmerdeur tout le long de ma première année de scolarité à Brisbane et il avait largement contribué à mon mal être à cette période de ma vie. Tout s’était calmé, petit à petit lorsque j’avais fais la connaissance d’Angus. Pas que mon meilleur ami – enfin, ex meilleur ami ? – prenait sans cesse ma défense à l’époque, non, parce qu’il n’avait jamais vraiment été témoins de ces scènes et je ne lui en parlais pas non plus – mais j’imagine que Cameron avait préféré ne plus trop me tourner autour quand il avait compris que je n’étais plus seule. Et une année entière, seule, c’est toujours beaucoup trop long. Le revoir aujourd’hui me donnait un sentiment mélangé de colère et de tristesse. Moi qui pensais avoir fait une croix sur ce passé, qui pensais que j’étais passée à bien d’autres choses. Visiblement, les fantômes finissent toujours par revenir nous hanter. Et mon envie de lui faire remarquer ne se fait pas prier. Rancune absolument pas dissimulée. « Pas pour toi en tout cas avec le coup de canne que tu te prendrais dans le troisième œil. » il se fou d’ma gueule, en plus. « J’suis prête à prendre le risque. » mais j’ai aussi du fric à m’faire et je doute qu’il allait m’payer la totalité de la prestation s’il repartait sur le cul. « Plus vite on commence, plus vite on finit. » ca risque pas d’être très long, à mon avis, on en sera vite rendus. « Je suis curieux d’entendre ça… Alors, tu me laisses entrer ou on fait ça dans ton cadre de porte? » j’en reviens pas que j’allais le faire rentrer chez ma mère. Je lève les yeux au ciel, souffle et poussa la porte avec ma semelle pour le laisser entrer, quand il me passe devant, c’est un Nième coup d’épaule que je reçois. « Gaffe à toi, tu risquerai de perdre l’équilibre. » quel con. « Elle est où ta boule de cristal ? À moins que tu sois plus du type « lignes de la main », histoire d’avoir un peu de chaleur humaine en plus de vider le portefeuille de pauvres personnes naïves… » y a sans doute aucune chaleur qui dégage de ses mains, ni de nulle part ailleurs. « à condition d’avoir une âme pour ça. » je referme la porte derrière moi. « Par là. » cette fois, c’est moi qui passe devant et c’est moi qui le bouscule, sans ménagement, puisque visiblement, sa canne ne l’empêche pas d’en faire autant. Deux gamins ? oui, on est sans doute repartis dix ans en arrière mais cette fois, la Jina en face de lui ne compte plus baisser les yeux. « Tu t’assois, tu dis rien. » je sors mon jeu de tarot et commence par le battre sept fois dans mes mains. J’suis pleine de négativité, forcément qu’on en sortira rien de bon, de ce tirage. Trois cartes. Je pose trois cartes faces cachées sur la table et regarde Cameron avant de les retourner. « Comment c’est arrivé ? » j’suis pas censée poser de question avant de commencer, sauf que je sais d’avance que ça sert à rien de retourner ces cartes. Ca va mener nulle part. j'insiste en regardant sa canne, au cas où il ait pas compris où j'veux en venir.
« J’suis prête à prendre le risque. » Elle est d’humeur massacrante Jina et avec raison, on ne peut pas dire que Cameron a été très sympathique avec elle jusqu’à présent, même si leur dernier échange remonte à plusieurs années alors qu’ils fréquentaient tous les deux la même école. Le jeune homme a changé depuis, même s’il ne le laisse pas vraiment paraître actuellement. Jusqu’à tout récemment, il était un garçon souriant qui dégageait la joie de vivre, mais son accident avait tout gâché et son sourire se faisait aussi rare que de la merde de pape. S’il devait se résoudre à être malheureux pour le reste de ses jours, aussi bien entraîner ceux qui l’emmerdent dans son malheur avec lui. « C’est si payant que ça arnaquer les gens que tu pourrais survivre sans travailler quelques temps? » À moins qu’elle compte raconter à ses clients que l’un d’eux l’a attaquée histoire d’attirer leur pitié dans l’espoir de se faire encore plus d’argent sur le dos de pauvres personnes naïves. Cameron pénètre dans l’appartement de Jina non sans percuter son épaule avec la sienne au passage comme il l’avait si souvent fait lorsqu’il lui rendait la vie dure à l’école. « Gaffe à toi, tu risquerai de perdre l’équilibre. » Il lève les yeux au ciel en laissant échapper un petit rire tandis que l’esquisse d’un sourire apparait au coin de ses lèvres. « J’ai de bons réflexes, je me rattraperai. » Il veut le dernier mot même s’il risque de perdre à ce jeu si elle décide vraiment d’essayer de le faire tomber, ce qui ne serait que le retour du balancier considérant toutes les fois où elle s’est retrouvée à ses pieds par sa faute. Le brun n’y connait pas grand-chose en diseuses de bonnes aventures, si ce n’est que ce qu’il a vu à la télé dans des films ou des séries. Alors il la questionne pour savoir à quoi s’attendre, bien qu’il en profite pour se moquer d’elle au passage. « À condition d’avoir une âme pour ça. » Le regard planté dans le sien, il se pince les lèvres furtivement. « Je ne suis pas encore mort aux dernières nouvelles. » Même si Jina ne se plaindrait probablement pas qu’il le soit. « Par là. » Jina passe à côté de lui et met sa menace à exécution en le percutant à son tour. Cam se rattrape de justesse en posant sa main libre sur le mur à proximité en laissant échappé une grimace malgré lui. « Lina est rendue féroce, j’aime ça! » Évidemment, il fait exprès de se tromper dans son nom rien que pour l’énerver. « Tu t’assois, tu dis rien. » Il hausse les épaules d’un air innocent avant de prendre place sur la chaise en face d’elle sans rien dire. « Comment c’est arrivé ? » Le musicien n’a pas besoin de suivre le regard de la jeune femme pour savoir de quoi elle parle. Il la fixe en silence, tout sourire disparu de son visage. Il n’a pas envie de lui parler de son accident, pas à elle ni personne d’ailleurs. Sa vie a complètement basculé depuis qu’il s’est fait happer en juillet dernier et même si sa jambe ne réapparaîtra jamais par magie, il préfère essayer d’oublier ce qu’il s’est passé, aussi stupide que ce soit. « T’es pas supposé être au courant avec tes pouvoirs magiques? » demande-t-il sèchement en désignant ses cartes d’un mouvement de tête. Son accident n’était en rien un secret, tous les médias en avaient parlé étant donné le métier qu’il pratique. Visiblement, Jina n’est pas au courant et ce n’est pas lui qui compte lui raconter. « Ce n’est pas de tes affaires. Tourne les cartes qu’on en finisse. » ajoute-t-il, ses traits se durcissant face à sa trop grande curiosité.
« C’est si payant que ça arnaquer les gens que tu pourrais survivre sans travailler quelques temps? » ca entre par une oreille, ça sort aussitôt par une autre. J’arnaque personne mais s’il pense être original avec son attaque, c’est loupé. C’est pas rare, ceux qui me contactent pour me dire que je suis pas honnête, pour me dire que j’abuse de la vulnérabilité des personnes émotionnellement et psychologiquement fragiles. C’est faux, s’ils savaient tous ceux qui venaient me voir en ayant une estime d’eux bien au dela de ma propre estime de moi. J’aime ce que je fais et je le fais avec conviction. C’est pas des tours de passe passe qui me permettent juste d’arrondir les fins de mois. Un don transmis par ma grand-mère, elle qui faisait des miracles quand elle était plus jeune, j’aurai adoré la connaitre. Ceux qui viennent me voir sans croire une seule seconde à ce qui pourrait se dire une fois les cartes tirées partent déjà du mauvais pied. Si les prédictions sont mauvaises, c’est pas de ma faute, c’est simplement leurs mauvaises ondes qui viennent brouiller les pistes. Cameron est un petit con, on tirera rien de cette séance. C’est foutu d’avance. Et avec son comportement, s’il pense que j’vais le prendre en pitié parce qu’il boite devant moi, il se fou le doigt dans l’œil. « J’ai de bons réflexes, je me rattraperai. » il me soule. Definitivement. Cette volonté d’avoir absolument le dernier mot. Wait, on dirait moi. Sauf que j’ai pas la force, de toutes façons, celle qui aura le tout dernier mot, c’est moi. . « Je ne suis pas encore mort aux dernières nouvelles. » « suffit pas d’être mot pour pas avoir d’âme. » avoir un cœur qui bat, ça suffit à maintenant ses organes vitaux en état. Un corps sans âme, c’est bien ce qui semble le définir. A vrai dire, j’ai aucune foutu idée de ce qu’il est devenu ces dix dernières années, mais j’ai pas du tout envie d’en savoir plus sur lui. Il semblerait que les gens puisse changer, dommage, j’ai tendance à être très rancunière quand on m’en a fait voir toutes les couleurs. Même s’il devient curé, j’pourrais pas croire qu’il a de bonnes intentions. Ma rancœur se laisse aller alors que je lui passe devant et que mon coup d’épaule se veut sans doute plus agressif que prévu. Mais il semble ne pas se laisser abattre pour autant. « Lina est rendue féroce, j’aime ça! » et moi, j’le deteste. Maintenant, nous étions en terrain conquis, chez moi, enfin, chez Pam, mais mon territoire, je décidais. Il s’assit sans trop rien dire, se plaçant en face de moi. Ca me brûlait quand même les lèvres de savoir pourquoi il avait une prothèse. « T’es pas supposé être au courant avec tes pouvoirs magiques? » je souffle, ça sert strictement à rien que je réplique. S’il cherche une boule de cristal dans laquelle lire des prédictions en image ou avoir des flash du passé des personnes que je rencontre, c’est foutu. Retourne dans ton film fantastique pour enfant. « Ce n’est pas de tes affaires. Tourne les cartes qu’on en finisse. » d’un geste brutal, je finis par retourner les cartes. Première carte : l’ermite à l’envers. Puis vient le pendu et pour finir le soleil. Je le laisse un instant à regarder ces cartes, finalement, peut être qu’on arrivera à en tirer quelques choses… « On dirait que t’es pas un cas désespéré. » j’hausse les épaules, il a peut être finalement de vraiment en savoir plus. « Tu sais, c’est pas parce que je sais lire les cartes que je peux tout voir. » que j’lui dis, avant d’aller plus loin, avec une impression de devoir me justifier, c’est vraiment désagréable, mais j’en ai besoin. « Bref… depuis que t’es comme ça, tu te repli sur toi, jusqu’à t’éloigner des personnes que t’aime et tu peux leur faire du mal. T’as tendance à croire que tout est fini pour toi, mais du vois, lui. Le pendu…. On pourrait croire que c’est pas une bonne carte, mais au contraire, il signifie que pour l’instant, t’es immobilisé, et que tôt ou tard, tu finiras par t’en sortir. C’est temporaire… » les trois cartes sont assez complémentaires et se suivent logiquement. L’ermite, à l’envers, signifie ce repli sur soi, le rejet des autres. Le pendu montre justement cet événement indésirable arrivé, qui le paralysie un moment et qui finira par lui donner un nouvel élan. « Le soleil, c’est le retour à la lumière… »
« Suffit pas d’être mort pour pas avoir d’âme. » Ces paroles auraient pu le blesser si elles avaient été prononcées par quelqu’un à qui il tient, mais ce n’est pas le cas ici. Jina et Cameron ne se sont pas parlés depuis une dizaine d’années et bien qu’il ne lui montre sans doute pas sa plus belle facette présentement, il sait qu’il a changé depuis le lycée. Il aurait pu s’excuser pour son comportement à l’époque, pour lui prouver qu’il avait cheminé depuis, mais chercher à faire réagir à la place est beaucoup plus facile. De toute manière, il est persuadé qu’elle ne le croirait pas s’il lui disait qu’il n’était plus le même que dix ans plus tôt. « Tu peux bien penser ce que tu veux, ça m’est égal. » Malgré qu’il a bien changé depuis son accident, Cameron se battait auparavant pour que ses proches aient le mérite auquel ils avaient droit, il était un bon père et il se faisait toujours un plaisir de gâter ceux à qui il tenait. Finalement, peut-être que Jina a raison et qu’il n’a pas d’âme, que sa jambe n’est pas la seule partie de lui-même qu’il a perdue en juillet dernier. Le musicien n’a pas envie de rester ici plus longtemps que nécessaire, avec Jina qui lui rappelle un peu trop le petit con qu’il était à l’époque où ils se côtoyaient et qu’il est peut-être redevenu depuis sa sortie de l’hôpital. Il l’empresse donc de tourner les cartes puisque sa tante soit contente et qu’il puisse retourner observer les quatre murs de sa chambre le plus rapidement que possible. « On dirait que t’es pas un cas désespéré. » Le brun fronce les sourcils dans la quitter des yeux, surpris qu’elle dise quelque chose de presque sympathique à son égard. « Tu sais, c’est pas parce que je sais lire les cartes que je peux tout voir. » Il ricane un coup en haussant les épaules. « N’importe qui pourrait apprendre à lire les cartes en faisant une recherche sur Google. » réplique-t-il, pas du tout impressionné par ses supposés talents auxquels il ne croit pas du tout. Il ne suffit que d’apprendre la définition des cartes et d’en savoir un peu sur la vie de la personne en face pour raconter quelque chose qui fait du sens. Jina n’est peut-être pas au courant de ce qu’il a vécu ces dix dernières années, mais il ne faut pas être un génie pour comprendre qu’il n’est pas dans son assiette et qu’il vit difficilement avec son handicap. « Bref… depuis que t’es comme ça, tu te repli sur toi, jusqu’à t’éloigner des personnes que t’aime et tu peux leur faire du mal. T’as tendance à croire que tout est fini pour toi, mais tu vois, lui. Le pendu…. On pourrait croire que c’est pas une bonne carte, mais au contraire, il signifie que pour l’instant, t’es immobilisé, et que tôt ou tard, tu finiras par t’en sortir. C’est temporaire… Le soleil, c’est le retour à la lumière… » Il l’observe attentivement un moment tout en demeurant silencieux, légèrement chamboulé qu’elle ait mis aussi facilement le doigt sur la façon dont il se sent depuis quelques mois alors qu’il ne lui a pas parlé de son accident. Une partie de lui a envie de croire que ce que Jina lui a dit est vrai, qu’il finira par remonter la pente et être heureux, mais il ne peut s’empêcher d’être sceptique. C’est plus facile pour lui de rejeter ce que Jina prédit que lui donner raison et lui donner la satisfaction qu’elle a réussi à le convaincre. « Tu fais genre que tu ne sais pas ce qui m’est arrivé, mais je suis sûr que t’as dû faire tes recherches avant que j’arrive, pour savoir ce qu’il m’est arrivé avant que tu fasses ton petit spectacle de magie. » Il désigne les cartes retournées sur la table d’un geste de la main. « Tu fais juste raconter quelque chose de général qui pourrait s’appliquer à n’importe qui dans ma situation, t’es presque certaine de miser juste, il n’y a rien d’exceptionnel là-dedans. » Il ricane en secouant négativement la tête avant de sortir son portefeuille de ses poches pour lui balancer les billets que sa tante lui avait donnés pour payer la séance. « Tiens, t’es contente, voilà ton argent. » dit-il sèchement. Au fond, il est confus, il ne comprend pas pourquoi Jina a été sympathique avec lui alors qu’elle aurait tout simplement pu le dénigrer en lui racontant ce qu’elle voulait.
« N’importe qui pourrait apprendre à lire les cartes en faisant une recherche sur Google. » n’importe qui pourrait faire n’importe quoi en faisant une recherche sur Google. Je ne prétendais pas avoir su lire les cartes du jour au lendemain, j’avais appris, potassé, lu des livres spécialisés, j’avais observé ma mère faire de temps en temps quand elle tirait les cartes à ses amis. Elle m’avait transmis quelques interprétation, on avait longuement discuté à ce sujet, à plusieurs reprises. N’importe qui pouvait apprendre à lire les cartes sur google, mais tout le monde n’était pas fait pour ça et ce n’était pas donné à tout le monde de pouvoir en avoir une interprétation juste. Il y a milles et une combinaison de carte possible, des façons de les lire qui sont multiples également, mais ce n’est pas moi qui en choisi ces combinaisons et leur sens. Les cartes choisissent pour nous, parce que les cartes savent tout. Pas La peine de répondre et j’allais laisser faire la suite en espérant réussir à lui clouer le bec.
Les trois cartes retournées devant nous, je lui en fais l’interprétation et le regarde ensuite droit dans les yeux pour tenter d’y desceller quelques chose, une émotion, n’importe laquelle. Est-ce que j’avais juste, est-ce que j’étais à côté d’la plaque ? En tout cas, tout semblait coïncider. S’il attendait que je lui donne des choses concrète, une date, un événement précis, ce n’était pas à la bonne porte qu’il avait frappé… enfin, même si c’était sa tante qui attendait surement bien plus de cette séance que lui. Il n’était pas ici de gaité de cœur, encore moins depuis qu’il m’avait reconnu. « Tu fais genre que tu ne sais pas ce qui m’est arrivé, mais je suis sûr que t’as dû faire tes recherches avant que j’arrive, pour savoir ce qu’il m’est arrivé avant que tu fasses ton petit spectacle de magie. » je fronce les sourcils. « J’avais aucune foutu idée que ce serait toi qui serais ici avant de que ne sorte de cet ascenceur. » j’en ai marre d’être insultée encore. Qu’il soit sceptique est une chose mais qu’il soit de mauvaise foi en était une toute autre. « Tu fais juste raconter quelque chose de général qui pourrait s’appliquer à n’importe qui dans ma situation, t’es presque certaine de miser juste, il n’y a rien d’exceptionnel là-dedans. » pourquoi est-ce que ses mots m’atteignaient plus qu’il ne le fallait ? Mon cœur tambourinait dans ma poitrine, si j’avais l’habitude qu’on ne me respecte pas, c’était d’autant plus difficile à accepter alors que Cameron avait participé longuement à mon mal être lorsque j’étais gamine. Un mal être que j’avais fini par laisser de côté et qui n’avait plus raison d’être aujourd’hui. Pourquoi fallait-il qu’il débarque ici pour m’humilier de la sorte. L’argent qu’il me balançait au visage retombait doucement au sol et sur la table. « Sors d’ici. » je lance à demi-mot avant de relever la tête et le regarder droit dans les yeux. « Dégage ! » je ramasse son argent et fini par lui balancer en retour. « J’veux plus jamais entendre parler de toi, Cameron ! » j’aurai prié pour ne plus jamais à avoir à recroiser sa route. Je me presse à aller ouvrir la porte pour qu’il rejoigne la sortie. « rester dans ton déni ne te fera jamais avancer. Continuer à croire que tu vaux mieux que les autres, ne te fera jamais avancer. On dirait que comprends pas les leçons que la vie tente de te donner. Vas te faire foutre, Lewis. » la voix tremblante, face à mes propres démons, je refusais qu’il reste un instant de plus pour se délecter du mal qu’il pouvait encore faire.
« J’avais aucune foutu idée que ce serait toi qui serais ici avant que tu ne sortes de cet ascenseur. » Même si Cameron sait que sa tante et lui n’ont pas le même nom de famille et que, par conséquent, Jina n’aurait pas pu se douter ainsi de l’identité de son client, il est persuadé que ce ne sont pas vraiment les cartes qui ont parlé. Après tout, avec le métier qu’il pratique, il est connu et il sait que son accident a été médiatisé. Qu’est-ce qui lui dit que Jina n’a pas vu cette nouvelle passer à la télévision en juillet dernier et qu’elle était donc au courant de sa situation lorsqu’elle l’a reconnu sur le pas de sa porte? Si tel était le cas, elle devait avoir sauté de joie en découvrant que le karma s’était occupé de celui qui s’était moqué d’elle des mois durant. « Si tu le dis. » dit-il en fronçant les sourcils. Il y a aussi la possibilité que sa tante ait parlé de sa condition à Jina lors de la prise de rendez-vous. Ça ne le surprendrait pas tellement considérant qu’elle est bavarde, sa tante. Bref, il doit y avoir une explication logique autre que les cartes que la jeune femme a tourné devant lui. Peu importe comment elle a eu ces informations sur lui, il en a assez entendu pour aujourd’hui et sa mère ne lui a pas dit pour combien de temps il devait être ici. Il est sorti et elle sera contente, il n’a pas envie d’écouter les conneries de Jina une seconde de plus. Il lui fait d’ailleurs part de ce qu’il pense vraiment en lui balançant l’argent de sa tante. « Sors d’ici. Dégage ! » Il remet son portefeuille dans sa poche sans la quitter des yeux. « Avec plaisir. » La brune prend l’argent et lui balance à son tour, mais il ne le reprend pas, laissant les billets s’éparpiller sur la table devant lui tandis qu’il se relève lentement à l’aide de sa canne. « J’veux plus jamais entendre parler de toi, Cameron ! » Lui non plus n’a pas envie de la revoir, ils s’entendent au moins là-dessus. À vrai dire, il n’a pas envie de voir personne, pas ma même Angus ou les membres de sa fratrie. Tout ce qu’il veut, c’est la paix et qu’on respecte le fait qu’il ait besoin d’être seul pour apprivoiser sa nouvelle réalité. « Considère ça comme chose faite. » Si ce n’était que de lui, il ne serait pas ici aujourd’hui et comme Jina et lui n’ont absolument rien en commun, à sa connaissance du moins, il n’a pas de raison pour revenir faire un tour ici. « Rester dans ton déni ne te fera jamais avancer. Continuer à croire que tu vaux mieux que les autres, ne te fera jamais avancer. On dirait que tu comprends pas les leçons que la vie tente de te donner. Vas te faire foutre, Lewis. » Il ricane alors qu’il s’approche d’elle d’une démarche vacillante. Même si ses anciennes habitudes sortent depuis quelques temps, il ne croit pas qu’il vaut plus qu’elle ou les autres, au contraire, il est persuadé qu’il ne vaut pas grand-chose. Sa confiance en lui en a pris un sacré coup et peut-être qu’il tente de se remonter en l’écrasant comme il le faisait auparavant. Un comportement dont il n’a jamais été fier, mais qui est beaucoup plus facile à répéter que de s’excuser alors qu’il n’est pas dans son assiette depuis de longs mois. « La vie me donner des leçons? T’es sérieuse? Et c’est quoi la leçon que la vie a voulu donner au chauffard qui m’a frappé tu penses? » Que la vie est courte et qu’il aurait dû en profiter? Il était trop tard pour ça considérant que l’homme était décédé d’un malaise au volant de son véhicule. « Et la leçon que la vie aurait voulu donner à une enfant d’un an et demi?! » Cette fois-ci, son ton est plus sec alors qu’il culpabilise de ne pas être présent pour Hannah comme il l’était avant son accident. La petite ne méritait pas l’absence de son père, cet incident n’avait pas que des conséquences sur sa vie à lui. « À t’écouter parler, tu n’as jamais rien fait de mal. Regarde-toi comme il faut parce que t’es loin d’être Miss Parfaite j’en suis sûr. » Il franchit la porte tout en l’observant avec mépris, appuyant frénétiquement sur le bouton de l’ascenseur dans l’espoir de partir d’ici au plus vite.
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