« -C- ’est bien. » Tu conclues à la fin de ta consultation de controle. Moignon intact, sans blessure secondaire à la prothèse, le but de ces consultations était surtout de voir son adaptation autant physique que psychologique. Et le psychologique, c’était pas ton truc. Ni celui de Cameron d’ailleurs, il te l’a encore bien fait comprendre en bougonnant tout au long du rendez vous, alors que tu faisais l’immense effort de t’intéresser à lui et sa petite crise existentielle. C’était beaucoup, pour toi, que de forcer la discussion. D’habitude imperméable aux souffrances de tes patients, c’était rare de te voir essayer de soutenir l’un d’entre eux. Et ça t’agaçait, qu’il n’aille pas dans ton sens. Il y a beaucoup de choses qui te vexent, et ne pas être réceptif à tes efforts en faisait parti.
« On a fini pour aujourd’hui. Tu me tiens au courant pour la suite avec la kiné? » Tu demandes, fouillant ta poche pour attraper ton téléphone. Ce qui était pratique en étant chirurgien, c’est que la plupart des patients pensaient qu’en jetant un coup d’œil a l’écran de ton mobile, tu lisais le message d’un autre patient ou d’un collègue. Alors qu’en réalité tu échangeais avec Albane lorsqu’elle n’est pas avec toi. Cette fois ci, c’était un message reçu il y a quelques heures d’une personne que tu n’as jamais rencontré. C’était un type qui avait envoyé un message sur un forum alors que tu cherchais un moyen de réparer ta prothèse endommagée sans la changer complètement. Ça te coûtait cher de malmener l’extension de ta jambe. Et par hasard tu l’avais lu son message douloureux. Fraîchement amputé, tu avais compris l’angoisse qu’entraînait la perte d’un membre. Alors pour une fois, tu t’étais montré compatissant, sans doute grâce a l’anonymat d’internet. Et de fil en aiguille, c’était devenu quelqu’un avec qui tu discutais souvent sans jamais avoir envisagé de le rencontrer. Tu t’étais un peu trop livré sur ta propre expérience pour avoir envie de le voir un jour. Toi qui étais habitué à substituer la cause de ton amputation par un cancer ou un accident routier, tu lui avais expliqué brièvement la scène digne des dents de la mer que tu avais vécu. Alors tu n’imaginais même pas une seconde le croiser un jour, et tu ne lui avais jamais demandé où il vivait pour éviter d’aborder le sujet d’une rencontre. « On se voit bientôt Cameron. » Tu lui lances un rapide regard, empruntant la sortie de la salle de consultation tout en écrivant un message à ce qui s’apparentait à un ami virtuel. Cameron, comme toujours était totalement fermé. On pourrait même dire un vrai casse couille aujourd’hui. Et t’adorais te plaindre. Alors tu envoies à ton interlocuteur téléphonique un long message expliquant à quel point ton patient était emmerdant et insupportable aujourd’hui, et tu ne maches pas tes mots, sans préciser qu’il s’agissait d’un homme dans la même situation que lui. Tu te doutais qu’en cas contraire, il le prendrait pour lui, qui avait aussi beaucoup de mal à se remettre psychologiquement de l’opération. Ton pouce presse le bouton d’envoie au moment où tu es en train de passer la porte. Sauf que le bruit d’une notification te fait ralentir. Tes sourcils se froncent, troublé par la coïncidence du timing. Tu jettes un œil derrière toi, pour regarder Cameron de manière curieuse. Hésitant, tu reportes ton attention sur ton téléphone pour envoyer un second message, bref, simplement une lettre, pour ôter un simple doute de ton esprit. De nouveau, le bruit d’une notification. Au même moment. La coïncidence semblait invraisemblable. Tu blêmis. « Cameron? » Tu demandes, cherchant une réponse à la situation étonnante qu’il se passait sous tes yeux. Alors que le jeune homme s’empare de son téléphone, en plein doute et en pleine panique, tu t’empresses de supprimer le premier message envoyé. Au vu du visage froncé de ton patient, tu finis de réaliser que l’inconnu était en réalité Cameron et qu’il a pu lire les premiers mots de ton message, mais au vu de ta rapidité tu penses bien qu’il n’a pas pu en lire beaucoup plus. Et le regard qu’il te lance confirme tes craintes. Il a fallu que tu répondes sur un forum au seul patient amputé que tu avais en ce moment. Ta mine déconfite, tu repenses à tous les échangés que vous aviez eu, tout ce que tu lui avais avoué indirectement en te réfugiant derrière le chaleureux anonymat. Tu ne prends pas encore conscience que Cameron devait être dans le même état. D’habitude mutique sur son état psychologique, il s’était aussi confessé sur beaucoup d’aspects. Sauf que ça, ça ne t’effleure pas encore l’esprit. Toi, tu ne penses qu’à ta petite personne et tes petits soucis personnels. Ça te crispe, ça te tend. Tu contiens une certaine colère, tu ne sais pas contre qui la rediriger. Parce que tu t’en veux, mais tu as du mal à rejeter toute la faute sur toi, tu préférais tout mettre sur les épaules d’une tiers personne. « C’est une blague? » C’était plutôt à lui de dire ça.
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« C’est bien. » Il se sent comme un chien à qui on tend une croquette pour avoir effectué le comportement recherché. Malgré tout ce que son chirurgien peut bien dire, Cameron est d’avis que rien n’est bien. La vue de son moignon lui rappelle chaque fois son accident et tout ce qu’il a perdu en conséquence. Que quelques mois auparavant seulement, il était heureux avec Willow et sur la scène avec les membres de son groupe de musique devant des milliers de personne. Aujourd’hui, à l’inverse, il n’ose plus sortir de chez lui pour éviter les paparazzis et les regards remplis de pitié des gens qu’il connait. Il est misérable et il n’arrive pas à voir la lumière au bout du tunnel comme ses proches s’en attendent. « On a fini pour aujourd’hui. Tu me tiens au courant pour la suite avec la kiné? » Cameron se dépêche à remettre sa prothèse, puis à replacer son pantalon afin que l’absence de sa jambe passe inaperçu aux yeux des autres patients de l’hôpital. Si quelqu’un passe un commentaire sur sa légère boiterie, il pourra toujours dire qu’il s’est foulé la cheville pour qu’on le laisse tranquille. « C’est ça. » grommèle-t-il sans même le regarder tout en se levant à l’aide de sa canne qu’il utilise encore dès qu’il marcher moindrement longtemps parce que sa prothèse lui fait parfois mal et qu’il doit encore s’habituer à la dépense énergétique supplémentaire que lui demande chacun de ses pas. Psychologiquement, il n’est pas encore prêt à accepter la perte de son membre et il se décourage toujours trop vite dès qu’il arrive face à un obstacle. Il est fatigué, mentalement et physiquement. « On se voit bientôt Cameron. » « Bye…» Il soupire en prenant son téléphone sur le bureau de Winston après y avoir noté son prochain rendez-vous.
« Cameron? » Il lève furtivement le regard vers son chirurgien qu’il croyait déjà parti depuis quelques secondes déjà. « Quoi? » Il rebaisse les yeux vers son téléphone et il constate qu’il a reçu un message du gars avec qui il correspond depuis quelques semaines déjà. Une personne qu’il ne connait pas réellement et qui s’est retrouvé dans la même situation que lui dans le passé. Avec lui, il se sent à l’aise de parler de son ressenti, il se sent compris et pas jugé comme par les membres de sa famille qui ne peuvent pas comprendre ce qu’il traverse. Lorsqu’il lit le message de son correspondant, il ne lui faut que quelques secondes pour remarquer une similarité avec sa situation à lui et ses doutes sont confirmés dès qu’il voit le message disparaître sous ses yeux avant qu’il n’ait le temps de terminer de le lire. « C’est une blague? » Bouche bée, son regard se promène entre son téléphone et Winston tandis que l’information se rend à son cerveau. Il réalise alors toutes les confidences qu’il lui a faites en pensant que jamais ils ne se verraient. Pendant tout ce temps, il s’agissait de celui qui lui avait coupé la jambe. Une constatation qui lui donne une bouffée de chaleur. « T’es sérieux? » Il le dévisage en rangeant son téléphone dans sa poche. « Tu parles de professionnalisme, un chirurgien qui se plaint de ses patients comme tu le fais… tu mériterais que je porte plainte. » Dans le cadre de ses fonctions, Winston avait essayé plusieurs fois de savoir comment il allait, mais Cameron refusait de lui répondre en profondeur à chaque fois, préférant se fermer et se limiter au minimum. Sauf qu’au final, son chirurgien en sait beaucoup plus qu’il l’aurait voulu et ça, Cam ne veut pas l’accepter. Il se sent trahi et piégé. « C’est comme ça que tu fais en sorte que tes patients se confient à toi? À leur insu? » demande-t-il sèchement, le regard dur.
-C- ameron a l’air énervé, offusqué par ces révélation, et à raison. Il te dévisage, le téléphone rangé dans sa poche. Tu ne te doutes pas de l’effet qu’a pu avoir cette découverte sur Cameron. Tu es très loin de l’impact néfaste de ce genre de mauvaise surprise. La perte de confiance ne t’effleure même pas l’esprit. Toi t’es juste décontenancé, dégoûté d’être tombé sur un patient. Tu en viens à regretter d’avoir donné ton numéro à un homme au fond du trou. Tu préfères te protéger toi et tes petits tracas que de faire des concessions pour aider un inconnu. Qui n’en était finalement pas un, certes. Si c’était à refaire et si tu en avais de nouveau l’occasion, tu ne referas pas cette connerie. Tu fermeras l’onglet sagement, te persuadant comme toujours que ça ne te regardait pas, et que tu n’étais pas un psychologue. Tu n’aurais de toute façon pas pu être psy. « T’es sérieux? » Tu fronces les sourcils, cherchant à comprendre. « Tu parles de professionnalisme, une chirurgien qui se plaint de ses patients comme tu le fais… tu mériterais que je porte plainte. » Tu lèves les yeux au ciel, bien conscient qu’il était autant dérouté que toi de cette nouvelle difficile à digérer. « Tu peux toujours, j’ai rien à me reprocher. T’étais pas sensé savoir de qui je parlais si tu n’étais pas… toi même du coup. » Tu te pinces l’arrête du nez, t’emmêlant les pinceaux dans cette histoire rocambolesque. Tu n’avais pas brisé le secret professionnel, ne donnant ni le nom, ni aucun signe distinctif de tes patients. Tu te plaignais comme tout le monde des personnes que tu croisais à ton travail. Sauf que toi, tu le faisais plus souvent et parfois de façon plus virulente. Tu n’as pas la patience, souvent. Et c’est sans doute mal venu pour un médecin. Parce que des cons, tu en côtoyais. Limitant tes mots secs face à eux, plus les années passaient, plus tu les retenais. Mais il arrivait toujours que tes pensées dépassent la barrière de tes lèvres lorsque ta maigre patience arrivait à bout. Alors exprimer ton agacement était une bonne alternative pour faire baisser la pression. Et Cameron n’était pas le seul à recevoir tes plaintes. Albane était aussi une habituée.
« C’est comme ça que tu fais en sorte que tes patients se confient à toi? A leur insu? » T’as du mal à comprendre comment il peut prononcer cette question. Tu t’imagines très mal fouiller la vie de chacun de tes patients, jusqu’à retrouver des messages anonymes pour qu’ils se confient, tu ne sais même pas dans quel but. Il en fallait du temps et de l’énergie. « Non mais tu crois que j’ai que ça à foutre d’aller fouiller dans la vie de mes patients? » Parce qu’à l’hôpital, tu en avais des patients, au moins que tu croisais. « Et tu crois que je serais assez con pour non seulement t’envoyer un message parlant de toi, en plus en ta présence, et surtout vérifier que c’est bien toi en t’envoyant un second message? » Tu ne sais pas si tout était bien clair. Mais ça aurait été ridicule de ta part. « Autant te le dire directement dans ce cas là. » Tu lèves les yeux au ciel, exaspéré. Faire un tel manège pour avouer qu’il était le destinataire anonyme à qui il écrivait, c’était ridicule. Et qu’est ce que t’en as foutre de la vie privé de tes patients. Alors oui, tu avais essayé d’aider Cameron parce qu’il vivait la même chose que toi. Mais tu ne t’intéressais pas plus à leur état d’âme. Moins ils t’en parlaient, mieux tu te portais. « Pourquoi la seule fois où je réponds à un message il a fallu que ce soit à un patient… » Tu soupires une main s’emmêlant dans tes cheveux bouclés. Tu as l’impression que les coïncidences étaient trop fréquentes ces derniers temps. Clairement, un dieu se foutait allègrement de ta gueule. Tu ne savais pas comment te sortir de cette situation ni comment y réagir. Parce que malgré tout, Cameron s’était confié à toi. Et t’avais du mal à faire comme si tu n’avais jamais reçu aucun de ses messages. C’était trop tard pour ça, le mal était fait. Alors tu l’observes un instant silencieusement, sans savoir comment aborder ce sujet épineux. « Pourquoi t’envoyais tout ça à un inconnu et t’en parlais pas a un ami plutôt? » Tu penses déjà connaitre la réponse, parce que l’anonymat était plus simple pour se confier. Il n’y avait pas de jugement direct. Et souvent, c’était une porte de sortie rassurante.
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Encore plus depuis son accident, Cameron a beaucoup de difficultés à s’ouvrir à autrui, à montrer qu’il ne va pas bien. S’il l’a fait avec cet interlocuteur inconnu plus tellement inconnu que ça, c’est parce qu’il était persuadé que jamais ils ne se rencontreraient. S’il avait su qu’il s’agissait de son chirurgien, jamais il n’aurait partagé ses états d’âme avec lui. Au mieux, il se serait tu, au pire, il l’aurait envoyé promener pour le garder le plus loin de lui que possible. « Tu peux toujours, j’ai rien à me reprocher. T’étais pas sensé savoir de qui je parlais si tu n’étais pas… toi même du coup. » Cameron n’est pas convaincu que les patrons de Winston seraient du même avis s’il se plaignait, ou du moins il veut y croire parce qu’il se sent stupide de se retrouver dans cette situation et qu’il doit bien mettre le blâme sur quelqu’un d’autre que lui-même alors que Winston ne l’a jamais forcé à s’ouvrir à lui comme il l’a fait. « Pas sensé savoir que je suis tellement insupportable que tu n’as même pas la décence d’attendre que je sois parti avant de te plaindre. Got it. » crache-t-il en le fusillant du regard une fois de plus. En temps normal, il se fou de savoir que quelqu’un le trouve méprisant ou même le déteste, mais les choses sont différentes actuellement parce que le chirurgien a eu accès à une facette que le musicien garde habituellement pour lui. « Non mais tu crois que j’ai que ça à foutre d’aller fouiller dans la vie de mes patients? » Probablement pas, Cameron n’a aucun doute que Winston doit être occupé avec son boulot, même s’il prend visiblement le temps de le lire et de lui répondre régulièrement. Il lui a posé des questions sur comment il se sentait, mais c’était dans le cadre de ses fonctions. « J’en sais rien, mais t’as assez de temps pour te plaindre visiblement. » Il l’a en travers de la gorge, d’ailleurs. « Et tu crois que je serais assez con pour non seulement t’envoyer un message parlant de toi, en plus en ta présence, et surtout vérifier que c’est bien toi en t’envoyant un second message? » Il ricane en haussant les épaules sans quitter l’interne du regard. « C’est ce que tu viens de faire alors je suppose que la réponse est oui. » répond-il sur un ton méprisant. Winston aurait pu continuer son chemin en faisant comme si de rien n’était et Cam n’aurait jamais su qu’il s’agissait de son interlocuteur, mais il était revenu sur ses pas et lui avait adressé la parole pour confirmer ses craintes. Le malaise bien présent entre eux deux, c’est lui qui l’a créé, pas le Lewis. « Autant te le dire directement dans ce cas là. » Sauf qu’il ne peut pas faire ça, Winston, parce qu’il se ferait solidement réprimandé par ses patrons. Il le sait et son patient le sait aussi. Cam serait capable de le poursuivre rien que pour lui faire payer cette humiliation. L’argent de l’hôpital, il n’en a pas besoin. « Pourquoi la seule fois où je réponds à un message il a fallu que ce soit à un patient… » Il détourne le regard en se pinçant les lèvres. « Pourquoi la seule fois où j’écris à quelqu’un en privé, il a fallu que ce soit toi? » Celui qui lui a pris sa jambe et sa joie de vivre après qu’il se soit fait faucher par ce chauffard. Il aurait dû sauver sa jambe plutôt que la lui couper, Cameron ne cessait de répéter ces paroles dans sa tête. « Pourquoi t’envoyais tout ça à un inconnu et t’en parlais pas à un ami plutôt? » Même s’il s’est déjà ouvert à Winston par le passé, le faire en personne est beaucoup moins facile. « Ce n’est pas de tes affaires. » répond-il sèchement en se relevant en prenant appuie sur sa canne sans même oser le regarder. « Qu’est-ce que ça peut bien te faire de toute façon? Fais pas comme si ça t’importait. » Pas après le message qu’il venait à peine de lui envoyer.
« -P- as sensé savoir que je suis tellement insupportable que tu n’as même pas la décence d’attendre que je sois parti avant de te plaindre. Got it. » Touché. Vrai. Mais touché. Tes yeux roulent, comme s’il dramatisait la situation. T’es persuadé qu’il en fait trop. Que t’étais tout autant lésé que lui, dans cette histoire délicate. Parce que oui, Cameron un casse couille, c’est un fait. Il est râle, il ne supporte aucun conseil, il n’est ouvert à personne, et, pour résumer, il est chiant. Alors, s’il était en droit de passer ses nerfs sur les autres, tu étais en droit de te plaindre sans modération. « J’en sais rien, mais t’as assez de temps pour te plaindre visiblement. » Tu arques un sourcil, le regardant de haut, un instant. Il se permettait de juger? « Et ça prend beaucoup de temps. » Le sarcasme martèle ta phrase sans subtilité. Tu encaisses encore la critique, sans cacher ton exaspération. Tu supportes mal les blâmes, et ce depuis toujours. Mais ce n’est pas quelque chose qui semble freiner Cameron. « C’est ce que tu viens de faire alors je suppose que la réponse est oui. » Tu te contentes de faire claquer ta langue sur ton palais d’un air désapprobateur mais tu n’entres pas dans un débat que tu savais déjà stérile. Cependant ton regard suffit à trahir tes pensés. T’as pas beaucoup de patience, et ça se ressent dans l’expression tendue qui émanait de ton corps. Pourtant t’essayes vraiment, pour Cameron, d’être tolérant, compréhensif et compatissant. Mais c’était difficile. La faute partagée à ta susceptibilité et son irritabilité. « Pourquoi la seule fois où j’écris à quelqu’un en privé, il a fallu que ce soit toi? » Tu soupires, un peu trop fort. T’es agacé, et ça se sent. Lui aussi, de toute évidence. La pression montre entre vous et tu la contiens comme tu peux. « Parce que la vie est une pute? » Réponse d’un film, classique, caricaturale. Mais si vraie. Le destin se foutait de votre gueule et ne s’en cachait pas.
« Ce n’est pas de tes affaires. Qu’est-ce que ça peut bien te faire de toute façon? Fais pas comme si ça t’importait. » T’as l’impression d’entendre un adolescent en pleine crise existentielle. « Rien. Enfin, je sais que c’est une période vraiment compliquée. » T’as vécu la même situation. Tu avais mis plusieurs semaines avant de sortir de la noirceur et la colère du deuil de ta jambe. Et il t’avait fallu quelques mois pour le réaliser totalement. T’avais été infecte avec un bon nombre de personnes autour de toi, de ton entourage proche ou non. T’en avais versé des larmes. Mais on s’en remet. Aujourd’hui tu tentais d’extraire jusqu’à la moelle tous les petits avantages que pouvait avoir le handicap. T’étais pas forcément le genre de mec optimiste mais il fallait avouer que tu avais su voir le bon côté de ce qui a longtemps été considéré comme un drame. « Mais c’est pas parce que oui, parfois, t’es vraiment chiant comme patient, que je me soucis pas de ta façon de vivre les choses. » Tu ne sais pas si lui dire qu’il est chiant était vraiment la meilleure des idées. Et pourtant, tu avais tout de même retenu tes mots qui étaient bien souvent plus crus. Mais t’essayes vraiment avec Cameron. Cependant tu n’es pas sur qu’il le remarque. Parce qu’il est buté sur son idée, et parce qu’il ne sait pas à quel point tu devais te faire violence pour ne serait ce que d’avouer te soucier de quelqu’un d’autre que de ta petite personne. Tu avais beaucoup d’égo, qui prenait beaucoup de place et parfois étouffait tes bonnes intentions. « Je sais que c’est difficile de t’aider. Mais j’aurai voulu. » Et tu te doutes que tu ne pourras pas. Pas maintenant. Tu regrettes de lui avoir pris une personne à qui il se confiait par pur ego. Il semblait avoir du mal à parler, et tu ne sais pas s’il en discutait avec d’autres personnes qu’avec toi. Il parait que parler, c’est important. Mais toi t’appliques pas toujours les conseils qu’on te donne, si ce n’est jamais. En aucun cas tu remettais en question ta maladresse épistolaire. T’arrives à te convaincre que tu es dans tes droits. Tu justifies ta faute par le fait que ce soit une chose commune parmi tes collègues. Sauf qu’eux, ne s’étaient pas fait choppés. Mais toi, t’as rien à te reprocher. T’es juste aussi buté que lui.
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[color=DarkCyan]« Et ça prend beaucoup de temps. » Probablement parce qu’il se plaint beaucoup, du moins c’est ce que Cameron comprend. Si son métier le frustre à ce point, peut-être devrait-il envisager de changer de domaine et en choisir un où il n’a pas autant à interagir avec de la clientèle. « Si tu passes autant de temps à te plaindre de tes patients alors que tu viens à peine de commencer dans le domaine, ce ne serait peut-être pas une mauvaise chose que tu choisisses autre chose. » Qu’il aille travailler dans les laboratoires de l’hôpital dans le pire des cas ou dans la cuisine où il pourrait faire la conversation avec ses œufs et ses tranches de bacon. Au moins là, il ne dérangerait personne, surtout pas ses patients qui essaient au mieux qu’ils le peuvent de se remettre d’un accident qui a changé leur vie. « Parce que la vie est une pute? » Winston a raison et Cameron l’expérimente depuis quelques mois maintenant, depuis qu’il s’est retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment et que sa vie a changé du tout au tout. En plus de perdre sa jambe, il a perdu sa joie de vivre. Le brun est retourné vivre chez ses parents après s’être séparé de la mère de son enfant et il n’a ni osé remettre les pieds sur son voilier, ni retouché à sa guitare qui prend la poussière dans un coin sombre de sa chambre. Plus rien ne le motive ou lui donne envie de se lever le matin, au contraire, il passe de longues heures à dormir malgré la douleur qu’il ressent à force d’être inactif. Winston était l’un des rares à qui il se permettait de s’ouvrir, d’exprimer ouvertement ce qu’il ressentait sans avoir peur de se faire juger et il lui en veut de lui avoir enlevé ça. « Pas juste la vie, apparemment. » réplique-t-il avant de détourner le regard en soupirant.
« Rien. Enfin, je sais que c’est une période vraiment compliquée. » Ce qui ne l’a pas empêché de se plaindre de lui même s’il comprend les difficultés qu’il éprouve présentement à aller de l’avant. « Et ça ne le sera visiblement pas moins. » Pas maintenant qu’il a perdu la seule personne à qui il se sentait à l’aise de parler de sa condition parce qu’il savait qu’il était passé par là quelques années plus tôt. « Mais c’est pas parce que oui, parfois, t’es vraiment chiant comme patient, que je me soucis pas de ta façon de vivre les choses. » Les paroles de Winston laissent Cameron perplexe. Est-ce que le chirurgien croit vraiment ce qu’il vient de dire ou tente-t-il de se sauver le cul après que le musicien l’ait menacé de porter plainte? Maintenant qu’il sait qu’il est le fameux patient de qui Winston se plaint souvent, il doute de sa parole. Il se sent trahi et il craint de se faire avoir une fois de plus en faisant confiance à quelqu’un à qui il ne devrait pas. « Honnêtement, je ne sais même pas si je devrais te croire. » Il a besoin de temps pour digérer ce qu’il vient d’apprendre, pour que son égo blessé se remette de cette humiliation, même s’il se doute qu’il ne sera pas suffisamment à l’aise pour faire un pas vers Winston dans le futur et que leur prochaine rencontre risque d’être plutôt malaisante. « Je sais que c’est difficile de t’aider. Mais j’aurai voulu. » Cameron hausse les épaules en s’approchant de Winston en boitant. « Je n’ai pas besoin de ton aide. » C’est faux, mais il est incapable de lui dire le contraire. « T’as sûrement d’autres patients qui veulent de ton aide, puis ça te fera sauver du temps, tu n’auras plus besoin de me lire et de m’écrire. » Vexé, il passe à côté de Winston pour sortir de la salle de consultation sans même daigner le regarder.
Je n’imaginais pas trop Cameron rester lui faire la discussion pendant 3000 ans avec sa frustration. Du coup tu me diras si tu veux poster derrière ou si tu préfères que ça serve de clôture.