Tu es clairement hors de ta zone de confort sur ce coup là. Vous allez passer quelques jours en mer, sur le bateau de Levi. Dans l’idéal ce serait que vous ne touchiez pas une côte pendant la totalité du séjour. La réalité sera peut être différentes. Tu es bien loin d’oublier que Levi a un cancer et qu’il peut y avoir un soucis à tous moments - ou pas, tu n’es pas non plus expert. Tu es aussi confiant que s’il accepté cette longue balade en mer, c’est parce qu’il s’en sent capable. Même si Levi est capable de tout dans n’importe quelle situation. Surtout quand il s’agit de toi. Il ferait tout pour toi, tu oses espérer que ça n’inclut pas jusqu’à en mourir. Une autre raison qui ferait que vous deviez jeter l’ancre, la bouffe, ou à boire. A boire surtout on ne va pas se le cacher, car ta consommation a été très grande ces derniers temps. Mais d’être coupé du monde entier pendant plusieurs jours, tu as l’espoir fou que ça va t’aider à ne pas avoir besoin. Déjà, tu ne vas pas allumer ton téléphone de la semaine. Tu as pris soin de changer ton répondeur pour y dire que tu n’es pas disponible jusqu’à la fin du mois. Tu n’as pas prévenu les gens individuellement, à part Johnny, bien évidemment. Il t’a même encouragé à faire ce trip et voir ce dont tu es capable.

La seule chose dont tu sais être totalement capable en cette première journée sur le bateau de Levi c’est l’observer s’affairer à droite à gauche avec les cordes et les poulies. Il te dit de faire ci ou ça parfois et tu l’écoutes sans vraiment enregistrer le pourquoi du comment. Surtout parce que tu es pas mal charmé par la vue de ton futur époux dans son élément. Ca te fait aussi bizarre d’être sur ce bateau mais dans l’eau cette fois. Tu as passé pas mal de temps entre ces cloisons depuis le début de l’année. Pas beaucoup depuis qu’il a naturellement élu résidence chez toi à ton grand plaisir. Mais ça te fait beaucoup de bien d’être là avec lui. Coupé du monde. Vraiment. Tu ne savais pas combien tu en avais besoin mais l’idée vient de toi, ton subconscient te l’a soufflé.

Levi est à la barre alors que tu te lèves d’une sieste imprévue. T’as un peu la tête dans le cul et tu vas le rejoindre aussitôt. T’es bien emmitouflé dans un hoodie (un des siens, tu voulais son odeur), et tu vas l’enlacer par derrière, posant ta tête contre son épaule. Tu refermes les yeux, comme si tu étais prêt à continuer ta sieste encore un petit peu. T’es bien mieux installé là, tout contre lui. Tes mains sur son torse que tu caresses doucement par dessus son vêtement. Dans ces moments là tu n’es pas en train de réfléchir quel bouteille tu vas ouvrir juste après. Ca fait du bien. Il est ton remède, tu le sais. Il est vraiment tout pour toi. Tu t’en rends compte plus tous les jours.

@Levi Lionhart

Bien que tu ne l'avouerais jamais, les dernières semaines avaient été éprouvantes. Tu compatissais et ton cœur se serrait d'être témoin du drame qui venait de heurter l'homme que aimais, celui dont tu voudrais protéger de tous les maux. Toutefois, cette tragédie venait germer en toi des mauvaises graines d'émotions multiples. La disparition de Dan te ramenait irrémédiablement à Gideon et le vide incommensurable qu'il laissait encore dans ton existence. De plus, la nouvelle de cette cauchemardesque nouvelle retentissant sur les chaînes australiennes avait dévoilé à quel point, Asher et toi, formiez en quelque sorte un couple atypique : si focalisés sur le présent et l'avenir que finalement, vous en sachiez très peu sur votre passé.

Tout en gardant un œil sur ton amant et t'évertuant à le soutenir aussi bien que possible, tu avais poursuivi ton entreprise de te plonger corps et âme dans ta musique. Les dernières semaines t'avaient fait réaliser plus que jamais que tu n'étais pas accoutumé à avoir un rôle d'importance dans la vie de quelqu'un, comme tu en jouissais manifestement auprès du Buckley. La vérité était que tu étais quelqu'un de solitaire par choix, par conviction, par nécessité. Tu avais toujours fuit établir des liens solides avec qui que ce soit car tu redoutais perdre ces gens auxquels tu t'attachais. Tu savais aussi à quel point il t'était aisé de te mettre en colère quand quelque chose ne te convenait pas et tu préférais ne pas te venger sur des êtres humains. Et pourtant, Asher t'était apparu comme une évidence, comme l'encre idéale à ton histoire. Tu ne voulais pas d'un quotidien sans lui. Mais au cœur de ce deuil, tu étais intimement terrifié de ne pas être à la hauteur, de ne pas être suffisant, de faillir à son bien-être.

Love is Pain représentait les sentiments qui t'étreignaient sournoisement. La chanson était sortie le jour-même que vous aviez sélectionné pour mettre les voiles et même si tu savais qu'il relevait du songe de penser que tes tracas resteraient sur la terre ferme, tu portais beaucoup d'ambition à ce petit périple. Il était le premier que tu osais réellement réaliser depuis ta récidive de cancer et tu avais sincèrement envie de passer du temps seul à seul avec Asher. Tu avais stocké un maximum de denrées de sorte à vous éviter de devoir rejoindre la côte. Secrètement, tu désirais aussi te ressourcer à ses côtés, dans ce contexte qui t'était familier.

L'air salin n'avait pas tardé à te revigorer et bercé par les vagues, ton esprit semblait retrouver une certaine sérénité. Asher paraissait apprivoiser peu à peu ce mode de marin et il s'appliquait aux actions que tu lui expliquais. Tu passais une majeure partie de ton temps sur le pont, à t'enivrer des sensations de la navigation, emmitouflé. Lorsqu'Asher vint te rejoindre de sa sieste, tu lui adressais un sourire, ne quittant pas la barre. Le musicien se blottit contre toi, sa main sur ton torse, son menton sur ton épaule. Tu saisis tendrement sa main et la portes à tes lèvres afin d'y déposer un baiser. « So tell me what's better: sleeping at sea or in your bed on solid ground? » tu questionnes avec malice.

Tes yeux déjà refemés, tu profites de la proximité de l’homme que tu aimes. Son odeur, son corps chaud, juste là contre toi. Vivant. Il prend ta main pour l’embrasser et tu tournes en même temps ton visage pour déposer un baiser sur sa nuque. « So tell me what's better: sleeping at sea or in your bed on solid ground? » Un large sourire se forme aussitôt sur tes lèvres alors que tu reposes ta tête contre lui. « In my bed. » Que tu réponds sournoisement. C’est la vérité en plus de tout. Tu serres sa main dans la tienne. « We need my bed on your boat. That’s what we need. » Parce que celui présent sur l’embarcation est trop petit pour deux personnes. Heureusement vous n’êtes pas de ceux qui sont dérangés de dormir l’un sur l’autre. Levi qui ne met jamais bien longtemps pour venir se coller à ta peau. Ses mains qui se glissent sous tes habits à tous les coups. Tu pourrais presque faire croire que t’en es blasé mais la vérité c’est que s’il ne le faisait pas c’est toi qui serait all over him une fois couché prêt à dormir.

« Is the weather forecast still nice with us? » Que tu demandes. Vous avez déjà vérifié plusieurs fois avant le départ et il y avait quelques jours sur la semaine qui donnaient l’impression d’éventuels mauvaises surprises. Tu n’as clairement pas pris place sur ce bateau pour vous mener tous les deux droit vers votre mort en pleine mer. Nope. Y’a bien des choses qui te retiennent sur cette Terre, la première étant tout contre toi. Levi. La deuxième c’est la tournée qui arrive au mois de décembre. Ca fait bien longtemps que tu veux retrouver cette sensation. Celle ci même où il est certain que la musique est ton métier. Tu veux voir comment ton corps tient le coup sur ce rythme que vous avez imposé avec le choix des dates. Tu sais qu’il faut que tu commences à prendre soin de ton corps pour tenir le coup même si l’alcool a toujours été, et sera toujours, l’élément indispensable chaque soirs. Ce serait bien que tu essaies sobre un jour Asher. One day. Ouais. Mais certainement pas le premier soir de la tournée. Les billets se vendent bien, la date de Brisbane est complète déjà. Tu as arrêté de poster quoi que ce soit sur ton Instagram depuis bien des semaines. Tu t’es focalisé sur bien d’autres choses, te disant que tu avais légitimement besoin d’un break vu la situation actuelle dans ta famille. Ce trip sur le bateau c’est le break dans le break, c’est la bulle totalement hermétique que tu ne voudrais jamais quitter.

Asher te rejoint sur le pont et se blottit délicieusement contre toi. Votre duo surplombe ainsi les mers, face à votre incommensurable horizon. Tu saisis doucement sa main que tu viens baiser tendrement, les lippes du garçon se posent contre ta tempe. Tu inspires profondément, savourant l'entier de ce moment, avant de prendre la parole dans une question qui se veut à la fois taquine et compétitrice. « In my bed. » Tu souris doucement. La vérité était que la petitesse de ton lit ne pouvait assurément pas riposter au grand confort du sien. Tu regrettais inavouablement d'ailleurs ce matelas qui te procurait la sensation de te trouver sur un nuage. « We need my bed on your boat. That’s what we need. » Un rire file entre tes lèvres. « That sure is a good idea. » Tu consens. « You're getting me used to confort, » tu remarques avec un rictus en coin. Avec Asher, tu prenais indubitablement goût à de nombreux plaisirs de la vie que tu ne t'avais jamais autorisé à aborder. Si dans le passé tu pensais te préserver dans cette vie minimaliste, aujourd'hui, tu avais pleinement conscience que le jeu en valait légèrement la chandelle et que grâce au Buckley, ta qualité de vie avait considérablement augmenté.

Tu te retournais de sorte à lui faire face et pressais suavement ses lèvres des tiennes. « Is the weather forecast still nice with us? » « We're good. » Si vous aviez consulté la météo pour planifier votre escapade, c'était surtout pour conforter Asher. Pour ta part, tu n'avais aucun scrupule à t'y rendre à l'aveuglette et confiant, tu savais que vous vous en sortirez même si une tempête se dressait devant vous. Un peu comme dans votre cheminement sur terre, finalement. Tu te mordilles la lèvre avant de questionner : « You hungry ? » Tu t'orientes vers la cabine pour mettre l'eau à chauffer afin de te faire ton précieux thé. « What d'you think about writing our song on this trip? » Tu suggères, la malice et le défi faisant étinceler ton regard.

Cette escapade, cette naïve mise entre parenthèses de votre quotidien en prenant le large, t'offre un vecteur pour renouer avec ta passion d'origine : la navigation. Ils sont loin, ces années où tu n'étais qu'un gamin qui se sentait réellement et uniquement bien qu'en luttant contre les vents et marées anglaises. Ils sonnent désormais dérisoires, ces trophées et médailles que tu as remportés lors de compétitions, la seule satisfaction que tu as su apporter à tes parents bien que ceux-ci, à ton ravissement, se sont contentés de te soutenir dans ton aspiration qu'en payant tes cours de voile. Le destin avait tout de même bien fait les choses, lorsque les connexions de ton paternel ont fait en sorte que c'est en t'enrôlant dans la marine marchande qu'ils se sont débarrassés de toi, alors que tu n'avais que seize ans. La mer t'a toujours été mère et pour les prochains jours, tu la réapprivoises, te réconfortes logé en son sein.

La brutale disparition de Dan t'a fait réaliser à quel point Asher et toi possédiez des parts d'ombres l'un vis-à-vis de l'autre. Tu en avais conscience, évidemment, portant toi-même tes propres secrets. Tu les estimais anodins, exclusivement concentré sur le futur. Toutefois, les événement engendrés par le décès du frère d'Asher a eu l'effet d'une violente claque dans ta figure, te rappelant que trente ans de la vie de ton amant n'est en fait qu'un mystère pour toi. Et cette énigme est réciproque.

Tu ne sais pas pourquoi tu t'attaches tant au passé, désormais. Si c'est parce que tu veux protéger le Buckley des maux qui peuvent le happer lorsque tu étais totalement ignorant qu'il puisse connaître la perte d'un frère. Si c'est parce que tu as éprouvé une certaine et inavouable jalousie envers ceux qui maîtrisaient ces aspects de la vie du musicien. Tu reconnais tout le néfaste qui est occasionné par toute comparaison avec des autres, mais ça te colle à la peau, parasitaire. Tu ne veux plus voir Asher choqué et désemparé comme il l'a été, le matin où la télévision lui a balancé en pleine figure qu'il avait perdu un membre de sa famille.

C'est peut-être ça, que tu recherches, lorsque malicieux, tu lui proposes d'écrire votre chanson. Celle de vos secrets, de votre passé, de votre histoire. « You mean, our wedding song? » t'interroge Asher et tu souris en coin, l'aimant encore plus d'être si rivé sur le future, l'aimant si fort de te ramener à l'essentiel. Tu jettes un paquet de noodles dans de l'eau portée à ébullition. « You know I’m always up to write with you. You inspire all of me. » « I'm your muse, » tu affirmes avant de te retourner vers ton fiancé. « I was thinking about writing a song adressing our story. » Tu expliques, pressant la lèvre inférieure d'Asher des tiennes, la taquinant de tes dents, avant de l'embrasser amoureusement, tes mains contre ses flancs, rapprochant sournoisement sa taille de la tienne. « What parts of your story you never wrote about? » Tu demandes curieusement. C'est un exercice risqué, voire contre-productif, car les volets de la vie d'Asher laissés sous silence le sont pour une raison et ne l'inspirent probablement pas. Mais tu ne comptes pas écrire une chanson pour le public, vous en avez des dizaines qui peuvent se métamorphoser en tubes. Tu veux écrire avec lui pour te rapprocher encore plus de lui.

Les noodles abandonnées dans l'eau frétillante, tu fais désormais totalement face à Asher qui t'a suivi jusqu'à la cabine exigüe où se tient ce qui fait office, entre autres, de cuisine. Tes lèvres viennent tendrement, amoureusement, se presser contre les siennes tandis que tu lui formules ton idée, teintée de souhaits, que vous élaboriez la chanson de votre histoire. Un projet personnel, tu le consens, mais ce qui t'intéresse n'est pas de faire de cet ouvrage un tube, tu ignores même s'il serait voué à retentir sur des ondes ; tu aspires à ce que votre patrimoine soit écrit et chanté, comme un héritage à votre futur, une relique de votre passé et un hymne sur votre présent.

Aussi, tu désires découvrir davantage cet homme que tu aimes profondément. La disparition de Dan t'a fait redéfinir la valeur du passé. Si tu n'es pas de ceux qui s'attardent sur le révolu, force t'est de constater que tu t'es senti prodigieusement impuissant face au drame qui a frappé de plein fouet ton amant. La surprise a été maîtresse ultime de cette tragédie et même si tu ne possèdes aucun pouvoir sur votre destinée, tu te dis que connaître davantage le blond t'offrirait des armes pour le protéger de potentiels maux. Alors, malicieusement, tu le questionnes sur ces parts de son histoire qu'il n'a jamais ornées de son talent. « My story? » Tu acquiesces, tes mains se logeant sur ses flancs. « Our story. » Ton sourire s'élargit, tu lui dérobes rapidement un baiser, mordillant au passage sa lèvre inférieure. Tu aimes tellement cette symbiose que vous formez. « I’ve been writing about my brother lately… » Tu reprends ton sérieux, ton regard intéressé et compatissant couvant ton interlocuteur. « Meaning to your pain. That’s how I’ve named it. » Le titre est déjà lourd de sens, tu sens ton cœur se serrer, un parallélisme se dressant malgré toi vis-à-vis de la relation que tu entretenais avec Gideon. « I’m not gonna sing it but I can show you the lyrics. » Un sourire en coin s'impose sur ton minois. « Only if  you want me to read them, » tu soumets. « It’s very new I didn’t even show Johnny yet. » Tu acquiesces, compréhensif. « Have you written it completely? » Tu t'interroges. Est-ce un travail encore en construction, rythmé de doutes, ou au contraire, est-ce une chanson qui lui est venue naturellement, frénétique, joyau brut de ses tripes et de son cœur ?

Tu sens dans ses yeux que y’a un truc sous ses questions qu’il ne dit pas clairement. Tu lui fournis une réponse à propos de ce que tu as écrit récemment. Réponse plutôt hors sujet car il parlait de nouvelle chanson à écrire avec lui sur ce bateau, mais d’une certaine manière, ce que tu lui confesses fait quand même beaucoup de sens malgré tout. Tu vois qu’il écoute chacun de tes mots avec attention car ce n’est pas rien ce que tu es en train de lui dévoiler. Tu apprécies sentir ses mains sur toi car tu n’avais pas imaginé ce séjour sur son bateau autrement. « Only if  you want me to read them, » Un léger sourire se forme sur tes lèvres car ces mots te rappellent que trop bien une des fois où il était chez toi il y a quelques années de ça. Où tu lui as laissé ton carnet et tu es allé te cacher dans la cuisine pour le laisser lire puisqu’il demandait tant après eux. Il ne les avait pas lu au final. « Have you written it completely? »

Tu fais un vague signe de la tête qui est entre oui et non. « I don’t know. Maybe. » Tu te mordilles la lèvre inférieure alors qu’une de tes mains parcours un de ses bras en le lui caressant. Tu te regardes faire car il est plus simple de ne pas le regarder dans les yeux. Tu ne sais pas si les paroles sont terminées car elles sont juste sorti de toi à un moment où tu t’y attendais le moins et tu les as écrit comme elles sont venues. Peut être que ça mérite retouche, peut être que ça mérite de rester pure de la sorte. Tu n’as pas fait de modifications pour l’instant car quand tu les lis, quand tu les dis, ton coeur se brise et c’est exactement pour ressentir autant que tu écris des chansons. « You can read them. I don’t mind. » Tu remontes enfin tes yeux aux siens. « Have you written anything new lately? » Parce que toi aussi t’as bien envie de découvrir le fond de son âme. Tu n’as pas du tout louper Love is pain. Oh non tu ne l’as pas loupé. Tu la connais même déjà par coeur. « Anything that you’d let me read…? » Echange de bons procédés en quelques sortes. Tu ne demandes jamais ce genre de chose car c’est son jardin secret autant que tu as le tiens. Mais aujourd’hui tu tends cette perche. Aujourd’hui tu as envie de demander un peu plus.

Tes épaules s'affaissent, tes mains sur les flancs de ton amant, alors qu'il te dévoile écrire sur son frère récemment. L'éclat de jade de tes iris le fixe, tendre et intéressé, et tu te satisfais de découvrir qu'Asher pose les pans de son histoire liés à celle de son frère sur le papier. Ainsi, tu te convaincs qu'il fait son deuil, qu'il excommunie petit à petit des onces d'ombre de son passé flirtant pernicieusement avec l'injuste tragédie de son présent. Tu le perçois comme une thérapie, comme le fait que le Buckley prenne soin de lui pour aller de l'avant, aller mieux. Il a intitulé son ouvrage Meaning to your pain et tu es persuadé que nul autre titre n'aurait pu être plus adéquat. Tu déposes chèrement tes lèvres sur sa joue avant de lui indiquer que tu ne souhaites prendre connaissance de son écrit seulement s'il le désire. Puis, tu t'enquières sur l'avancée de cette chanson, qui pourrait probablement connaître plusieurs volets. Les émotions fortes ne sont-elles après tout pas le fuel des artistes ? Si Asher te qualifie de muse, tu soupçonnes que ses trippes comme son cœur sont maîtres de son stylo.

« I don’t know. Maybe. » Il se mordille la lèvre, sa main évolue sur ton bras, son regard absent de tes prunelles. Tu l'observes quelques instants silencieusement, de peur de rompre une réflexion importante menée dans l'esprit de ton interlocuteur. « Does it feel right? » Tu interroges. Asher et ses chansons n'avaient, à tes yeux, pas besoin d'être parfaits. Il leur fallait juste être vrais. Son essence suffisait largement à créer de purs trésors. « You can read them. I don’t mind. » Tu souris doucement, reportant ton attention sur le repas que tu vous prépares. « Have you written anything new lately? » Un rire bref file entre tes lippes. « I can't stop. » « Anything that you’d let me read…? » Ton portrait emprunte une mine malicieuse. « Depends. What do you have to offer in exchange, rockstar? » Tu marchandes, espiègle, mordillant sa lèvre inférieure avant de la baiser suavement. « I wrote one about time and another one about breathing, » tu vends, sournois, ta bouche glissant momentanément dans le cou de ton fiancé, ta paume se posant sur le buste du trentenaire.

« Does it feel right? » Tu fais oui de la tête. Toujours sans le regarder. It really does. Ça fait longtemps qu’une chanson ne t’était pas sorti aussi spontanément dans un temps si bref. Tu es encore bien au milieu de tes émotions et c’est pour cela que tu es toujours en réflexion vis à vis de cette chanson. Tu ne sais pas si tu seras capable de chanter ces mots devant un public. En tout cas, pas dans un futur proche. De toute façon cette chanson ci sera sur un futur album si tu décides de l’enregistrer sous le nom de Hurtwave. Tu es tellement bouleversé avec ces mots là que tu sens comme une obligation à ce qu’ils soient entendus par le plus grand nombre. Te disant que si ça t’aide sur ton chemin, ça en aidera d’autre… Ca faisait longtemps que tu n’avais pas eu ce sentiment que la musique était pour toi plus que juste une passion. C’est une total nécessité à ce moment précis. Ca te fait traverser les plus grandes tempêtes de ta vie et Dieu sait que celle ci est une des plus rudes. L’accumulation rend le tout encore plus lourd sur tes épaules et dans ta tête. Ta poitrine qui est compressée plus souvent également. Partager ces mots là avec Levi aideront peut être à apaiser un peu tout ça.

Le voir sourire est également un remède temporaire. « I can't stop. » Savoir qu’il est très inspiré te fait du bien également. « Depends. What do you have to offer in exchange, rockstar? » Il veut plus que ce que tu viens de lui proposer ? Et il vient taquiner ta lèvre avant de t’embrasser. Tu en oublies presque le temps de quelques secondes ce dont vous êtes en train de parler. Il a ce pouvoir là Levi. Tu es très enclin à continuer le baiser mais il reprend la parole. « I wrote one about time and another one about breathing, » Il te parle tout en te faisant ressentir beaucoup de ses mots et ses lèvres sur toi. « What do you want in exchange? » Car tu es ouvert à donner bien des choses. « You can have anything you want… » Que tu complètes en allant serrer ses fesses dans tes mains. Peut être bien que tu sous entend quelque chose de physique plus qu’un échange de bons procédés de chansons et d’histoires de vos vies respectives. He can have everything… Tu dis ça aussi parce qu’il est en train de te faire tourner la tête avec ses lèvres, ses mains, ses mots… Et en plus il est en train de vous faire à manger. He knows all my weaknesses…

Asher acquiesce et le sourire que tu lui offres est teinté de tendresse, de soulagement et de fierté. Tu es heureux que ton amant soit en mesure de mettre des mots sur les émotions titanesques et potentiellement dévastatrices que tu l'imagines ressentir. Tu te trouvais aux premières loges des étapes de la disparition et du deuil de Dan est quand bien même tu es désolé de ne pouvoir préserver ton amour de ces maux, tu es satisfait que le Buckley dispose des moyens nécessaires à assimiler, dompter et, tu l'espérais, accepter son chagrin. Tu désirais ardemment son bonheur et étais intimement convaincu que cette escapade en mer vous ferez le plus grand bien, individuellement comme à votre couple. Selon toi, vous aviez besoin de vous distancer, de mettre en pause votre routine et la secouer un peu pour étreindre un retour aux sources catégorique. Tu ignorais la suite de ce trajet d'envergure, mais tu étais comblé de pouvoir partager ta passion de la navigation avec ton fiancé.

Tu confies à ton interlocuteur ne pouvoir arrêter d'écrire, de composer, d'imaginer. Ton cerveau est frénétique, tu t'en réveilles la nuit. La musique vibre dans tout ton être et tu te considères plus prolifique que jamais. Tu ignores combien de temps cette inspiration durera, mais tu comptes bien coucher sur le papier tout ce qui germe dans ton esprit. De plus, tu extrais une certaine euphorie à voir tes projets se concrétiser. Bientôt, un nouvel album sortira et tu chéris cette scène publique que tu investis de plus en plus puissamment.

Tu négocies avec ton petit ami, joueur. « What do you want in exchange? » Tes lèvres viennent taquiner les siennes, tes dents mordillent doucement sa chaire. « You can have anything you want… » Ton sang boue alors que le blond serre tes fesses de ses mains et tu émets assurément aucun mouvement de recul. Plutôt, tu susurres un « Bold » à son oreille puis glisses ta bouche le long de sa mâchoire et dans son cou, baisant avec davantage d'insistance son épaule. L'idée que vous soyez plusieurs jours sur Cadence à l'abris des regards indiscrets insinue dans ta boîte crânienne l'envie de marquer sans scrupule la peau de ton amant. L'éclat brillant dans tes yeux n'annonce rien qui vaille et tu pousses Asher sur ta couchette sans prévenir. « You're in a very generous mood, Mr Buckley, » tu commentes, avant de lui adresser un regard aussi complice qu'entendu.