| (craker #17) but i hope to be worth it |
| | (#)Mer 27 Oct 2021 - 17:25 | |
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ROSALIE CRAINE & @WYATT PARKER ☽ I got no innocence, faith ain't no privilege. I am a deck of cards, vice or a game of hearts. And still you, still you want me. Oh, I always let you down. You're shattered on the ground. Still, I find you there next to me. And oh, stupid things I do. I'm far from good, it's true. Still, I find you next to me. Elle est désagréable, cette impression. Celle d’être une adolescente qui ne cesse de regarder son téléphone dans l’espoir d’y voir un nouveau message apparaître. C’est ridicule et complètement enfantin comme comportement, bien que tu ne puisses te résoudre à être la première à envoyer quoique ce soit qui s’éloigne du script qui prend machinalement place entre vous depuis quelques jours. Ce n’est pas qu’il t’ignore complètement Wyatt, non. Il t’envoie encore un message ou deux à tous les jours, pour savoir comment tu vas, si le bébé bouge bien, s’il n’a pas oublié un rendez-vous à venir. Il ne t’ignore pas, mais il t’évite clairement, quand depuis cette nuit où vous avez une fois de plus jouer trop fort avec les limites du permis, il a cessé toutes ces visites surprises qu’il te faisait depuis quelques temps. Que sa présence à laquelle tu t’étais habituée sans même t’en rendre compte faisait maintenant place à une absence qui se fait cruellement remarquer. Quand tu ne cesses d’espérer te réveiller d’une sieste pour le voir une fois de plus assoupi sur ton canapé, ou avoir le dos voûté au-dessus de la table à écrire dans ce carnet. Carnet que tu dois bien avoir lu dans son entièreté une dizaine de fois depuis que tu l’as trouvé. Carnet que tu savais priver, mais que tu n’avais pas su reposer une fois que tu avais feuilleté les premières pages, découvrant avec surprise toutes les facettes d’un Wyatt qu’il ne t’avait que trop rarement laissé apercevoir pendant toutes ces années. Les angoisses et les peurs que tu y lis sont réelles, et elles le grugent plus encore que tout ce que tu aurais pu t’imaginer. Tu les avais vu pourtant, les signes. Tu te souvenais avec précision de cette scène qui s’était jouée le jour de son déménagement, quand il avait été question de vider la chambre d’Ariane. Mais même à ce moment-là, elles étaient maigres, les informations que tu avais réussi à lui soutirer au milieu de la panique alors que dans ce carnet, tout s’étalait de manière plus ou moins cohérente, mais avec une clarté à laquelle tu n’avais jamais eu droit par le passé. Et la vérité, c’est que tu ne savais pas quoi faire avec toutes ces nouvelles parties de lui qui tournoyaient sans cesse dans ta tête.
Tu te rejouais constamment les scènes de cette nuit-là, celle où un petit rien avait causé des ravages sans précédent, celle où la simple caresse de tes doigts sur son nouveau tatouage avait mené à vous retrouver de cette façon que vous vous étiez pourtant interdits. Tu as besoin de lui parler, il vous est essentiel de crever l’abcès et d’au moins tenter de faire du sens de ce qui s’est passé, de ce que ça peut bien vouloir dire même si tu étais celle qui avais juré ce soir-là que ce n’était qu’une fois, que ça ne pouvait être rien de plus. La vérité, c’est qu’avec Wyatt, tu avais toujours voulu plus, sans jamais être en mesure de lui rendre la pareille. Tu jouais avec le feu sans jamais t’autoriser à t’y brûler, qu’importe si c’est lui qui se faisait mal au bout du compte. Cette version de l’histoire toutefois, elle était révolue et elle se devait de le rester. Alors que restait-il, si les erreurs du passé ne pouvaient plus être répétés? Qu’est-ce que ça fait de vous, quelle explication pouvez-vous réellement donné à cette nuit-là si toutes vos explications d’avant ne sont plus valides? Se dire les vrais choses, du genre que tu as lu encore et encore dans son carnet, ça ne vous a jamais réussi non plus. Il suffit de repenser à cette soirée de St-Valentin pour comprendre que même ces trois petits mots que vous vous étiez si longuement refusés n’avaient pas suffit à vous sauver, quand un post Instagram avait suffi pour que tu viennes tout gâcher de messages textes que tu avais instantanément regretter. Alors tu continuais de regarder ton téléphone, en espérant plus, sans jamais être capable d’être la première à lui envoyer quoique ce soit. Que pouvais-tu lui dire de toute façon? Toi-même, tu n’étais plus certaine de ce que tu pensais, de ce que tu ressentais. Ou du moins, c’est ce que tu voulais te faire croire, quand pourtant, dans un carnet bien différent qui était bien caché dans l’un des tiroirs de ton bureau, se trouvait toutes tes vérités que tu n’avais jamais été en mesure de lui exposer. Nouvelle preuve encore une fois que Wyatt et toi, malgré toutes vos différences, vos vécus et vos familles diamétralement opposées, vous étiez bien plus similaires que vous n’étiez prêts à l’admettre.
Après avoir passé une énième journée à tourner en rond dans ton appartement, incapable de te concentrer sur quoique ce soit, tu prends la décision impulsive de te rendre chez lui directement. Tu décides de t’y rendre en marchant, en espérant que la douceur de cette journée de printemps et les dizaines de minutes qui séparent ton appartement du sien t’aident à trouver les bons mots. Tu t’es imaginée des centaines de conversations possibles, sans jamais savoir comment en commencer ne serait-ce qu’une seule, coincée dès les premiers instants. Tu penses plusieurs fois à faire demi-tour, comme une gamine qui n’est pas prête à faire face à ce qui l’attend une fois rendue à destination, mais tu sais qu’il est inutile de repousser constamment l’inévitable. Tu préfères encore prendre le temps de lui parler chez lui que de devoir avoir une conversation complètement filtrée dans une salle d’attente à l’hôpital. Il ne reste que deux mois devant vous avant Noël, avant la naissance de votre fils et c’est ridicule de croire que les choses puissent rester ainsi encore bien longtemps. Alors tu continues d’avancer, d’arpenter les rues de Spring Hill jusqu’à te retrouver enfin devant chez lui. La présence de sa voiture dans la rue témoigne qu’il doit se trouver derrière le panneau de bois et il te faudra encore quelques minutes avant de trouver le courage de cogner à la porte, serrant contre toi son carnet. Tu as l’impression que ton cœur va exploser dès que tes yeux trouvent sa silhouette et tu remercies l’univers qu’il soit complètement vêtu cette fois-ci. « Ça fait un moment que t’es pas venu me voir sans t’annoncer, donc je me suis dit que c’était à mon tour de te rendre la pareille. » Il y a un sourire qui se veut sincère sur ton visage, bien qu’empreint d’une nervosité qui ne fait pas de sens entre vous tant tu sais que personne ne te connaît aussi bien que lui. « J’te dérange pas? » que tu demandes quand même, bien que tu n’aies pas l’intention de repartir sans avoir pris la peine de parler de ce qui s’est passé et de ce que tu as lu aussi. Tu lui tends d’ailleurs le carnet, sans lui dire qu’à la suite des dernières pages qu’il a écrit, tu as retranscrit les paroles d’une de tes compositions, laissant les paroles de Next to me dire ce que toi, tu n’auras jamais le courage d’admettre à voix haute. « T’as oublié ça, l’autre nuit. » Tu sais, la nuit que t’es parti sans rien dire, comme un voleur?
Qu’est-ce qu’on fait maintenant Wyatt? |
| | | | (#)Sam 30 Oct 2021 - 17:37 | |
| Le déni d’avoir potentiellement pu oublier mon carnet dans l’appartement de Rosalie aura au moins eu un aspect positif : m’obliger à défaire tous les cartons qui traînaient depuis des semaines dans mon nouveau logement. Mon bien le plus précieux est resté sur la table basse du salon, dans un appartement qui n’est pas le mien, après que je sois parti comme un voleur sans dire un mot. Les heures d’insomnie m’ont permis d’évaluer la situation, mon carnet restait introuvable et l’image qui me colle à l’esprit depuis ce matin-là n’était pas un simple rêve, mais une réalité que j’aurais aimé ne jamais avoir à réaliser. Mon bien le plus précieux est resté sur la table basse du salon, dans un appartement qui n’est pas le mien, après que je sois parti comme un voleur sans dire un mot. Ce n’est pas que je joue les fantômes, tant bien que mal, je continue à prendre des nouvelles. À toutes les demi-journées, j’envoie un message pour m’assurer qu’elle va bien, que notre garçon continue à jouer aux loopings et que la situation ne s’empire pas, mais la conversation s’arrête à ce type de renseignements. Le reste du temps, je prétends être bien trop occupé par la promotion de mon livre pour avoir le temps de lui rendre une visite. Le mensonge n’est que de moitié quand Boyd me rappelle que je dois tout de même répondre à quelques interviews et me rendre disponible en visio depuis que je refuse de me déplacer.
Si les journées s’organisent de manière à ne jamais me laisser le temps de penser, les soirées sont bien plus complexes à gérer. Le sommeil est devenu une donnée quasi-inexistante quand mon esprit ne trouve jamais le repos perdu entre des souvenirs intenses de cette nuit et les angoisses qui montent à l’idée même que Rosalie est pu mettre la main sur mon carnet. Tout se mélange entre le souvenir intense de ses lèvres sur ma peau, la crainte de ce qu’elle a pu découvrir, le remords d’avoir encore une fois tout gâché, le désir d’encore la retrouver dans une telle étreinte et dans l’anxiété de devoir la revoir très bientôt. Ainsi, mes heures de sommeil se comptent sur les doigts d’une main bien que cela fasse près d’une semaine déjà. À constamment vouloir rester occuper, j’ai déjà pu repeindre les murs de ma chambre dans une couleur plus à mon goût, j’ai monté les meubles dont j’avais besoin, et même toute ma bibliothèque est organisée comme elle ne l’avait jamais été auparavant. À mesure que les jours défilent mes cernes s’assombrissent sans que jamais je ne prenne l’envie de sortir pour la retrouver, pour crever l’abcès et exorciser toutes ses pensées qui m’obsèdent. Comme jamais auparavant, je me laisse bouffer par tout ce qui m’angoisse sans trouver quelqu’un vers qui me tourne. Ils sont tous parti sans se retourner et dans une perpétuelle torture incessante, mon esprit me rappelle que Rosalie sera la prochaine à me fuir.
Après un énième appel téléphonique avec Boyd, je décide de me diriger vers la seule pièce que je n’ai pas encore touchée. La deuxième chambre de l’appartement, cela qui sera dédié à mon fils. À l’intérieur, plusieurs cartons s’entassent résultat des quelques achats des nuits passées. J’ai tout pris, tout ce qui me paraissait un tant soit peu utile, avant de suivre la liste que Ginny m’avait dicté lors d’un appel il y a de cela plusieurs jours. Bien décidé à rendre l’endroit fonctionnel, je déplace les cartons dans un coin pour me laisser l’accès au plus grand des quatre murs. Vêtu d’un jogging sans âge et d’un tee-shirt déjà tache de peinture, j’installe mon matériel dans l’idée de réaliser ce mur coloré que j’avais repéré en scrollant sur le net. Musique en fond, les yeux rougis par la fatigue, mais le corps nourri à coup de caféine, je commence à peindre avec minutie. Pour mon garçon, je ne souhaite que le meilleur. Absorbé par ma tâche, perdu dans ma bulle, j’en oublie l’anxiété et les pensées négatives, préférant imaginer à qui il pourra bien ressembler, tout ce que je lui dirais lorsqu’il sera né, toutes les promesses dont je compte ne jamais me dérober.
Le bruit de la sonnette me fait sursauter, laisser un énorme trait de peinture pastel salir le dessin précis que je m’entêtais à faire depuis de longues minutes. Décider d'ignorer la personne qui souhaite me déranger, je suis bien obligé de poser mon pinceau lorsque des coups se font entendre contre le panneau de bois. Je m’attendais à tout, sauf à trouver Rosalie de l’autre côté de la porte. « Ça fait un moment que t’es pas venu me voir sans t’annoncer, donc je me suis dit que c’était à mon tour de te rendre la pareille. » Son sourire me déstabilise autant que sa présence, au point où je reste planter comme un con dans l’encadrement de la porte, pinceau à la même avec probablement la pire gueule qui soit. « J’te dérange pas ? » - « Euh… Non. » Si, un peu. « Viens entre. » Je me dégage pour la laisser entrer avant de me précipiter vers la porte de la chambre pour déposer mon pinceau, couper la musique et surtout refermer immédiatement la porte derrière moi. Je tire sur mon tee-shirt comme si cela allait me donner une meilleure dégaine quand je dois déjà avoir l’air d’un zombie face à une Rosalie toujours aussi resplendissante avec ses formes de grossesse.
« T’as oublié ça, l’autre nuit. » Elle me tend mon carnet et mon cœur semble loupé quelques battements. Alors, je n’avais pas rêvé, il n’avait pas été égaré dans un café comme je tentais de m’en convaincre depuis plusieurs jours déjà. Depuis tout ce temps, il était chez elle, entre ses mains, juste à sa portée. D’un geste vif, je m’empare du carnet noir pour mieux le jeter dans le premier tiroir du meuble juste à côté de moi. Une main nerveuse vient se glisser entre mes cheveux en bataille alors que la politesse voudrait que je lui propose de s’asseoir ou au moins quelque chose à boire. J’ai le sang qui vient taper contre mes tempes et toute la fatigue de ces derniers jours semble m’avaler tout entier. « Tu l’as lu… Pas vrai ? » Elle ne serait pas là sinon, pas avec cet air qui mélange une sérénité avec une part de questionnement qui ne cesse de flotter sur l’expression de son visage. La seconde d’après je lui tourne le dos pour me diriger vers la cuisine ouverte et m’affairer à nous servir deux verres de limonades. Je n’ai jamais autant redouté le moment où elle prendra la parole. |
| | | | (#)Sam 30 Oct 2021 - 18:38 | |
| Tu ne sais pas combien de temps tu te retrouves à attendre derrière le panneau de bois. Une minute, deux peut-être. Le temps te semble cruellement long alors que tu as l’impression que tu aurais pu te sauver par cent fois déjà avant que tu n’entendes la poignée se tourner. Tu l’as sincèrement considéré, t’enfuir plutôt que cogner à nouveau. Mais tu es là et il vous faut faire face à la musique, peu importe ce que ça veut dire et de quoi ça va avoir l’air. Une chose est certaine toutefois : tu ne t’attendais pas à voir Wyatt dans un tel état. Tu peines à camoufler ta surprise d’ailleurs alors que tu scannes son visage d’abord. Les cernes foncés sous ses yeux, la barbe pas faite depuis plusieurs jours, les tâches de peinture sur sa joue. Tâches que tu retrouves sans grande surprise sur son t-shirt qui semble avoir connu des meilleurs jours, tout comme son jogging. C’est Wyatt au complet qui semble avoir passé une mauvaise nuit, ou bien plus qu’une simple nuit à voir la fatigue étirée tous les traits de son visage et tout de suite, ça te sonne une cloche d’alarme. Ça, en plus de tout ce que tu as pu lire dans son carnet, ça n’a absolument rien de rassurant. Tu tentes de lui sourire et pourtant, l’inquiétude se lit dans ton regard alors que tu attends une quelconque réaction de sa part. Tu es presque en train de te demander s’il n’est pas en train de dormir debout et les yeux ouverts, quand il se décide enfin à ouvrir la bouche. « Euh… Non. » Tu attends encore un peu et il fini par se tasser légèrement pour te laisser entrer dans cet appartement que tu découvres pour la première fois. « Viens entre. » Tu le remercies d’un signe de la tête alors qu’il disparaît rapidement, la musique qui se couple, le pinceau entre ses doigts qui disparaît et la porte qui se ferme, cachant une pièce dont tu ne découvriras pas le contenu tout de suite à ce que tu comprends.
Ton attention est toutefois portée ailleurs rapidement alors que tu admires l’énorme bibliothèque qui orne l’un des murs du salon, les livres étonnamment bien rangés dans les différents compartiments. Tu tournes le regard partout autour de toi, l’espace est grand, ouvert et bien entretenu, contrairement à Wyatt qui semble être complètement au bout de rouleau. Tu n’as même pas besoin de lui poser la question pour savoir qu’il l’est, tu possèdes toutes les réponses dans ce carnet que tu tiens encore fermement contre toi. Le problème, c’est que tu ne sais pas quoi lui dire pour aider. Tu ne sais pas quoi lui demander. Tu ne sais pas quoi faire et pire que tout, tu as l’impression que tu n’as fait qu’empirer les choses, quand tu as joué avec le feu. Après une minute ou deux dans un silence complet, tu finis par reporter ton attention sur Wyatt, lui tendant avec réticence son carnet. Il disparaît d’entre tes mains à toute vitesse, avant d’atterrir dans le fond d’un tiroir, comme si cela allait suffire à faire disparaître tous les secrets qu’il contient, toutes les pensées que tu connais désormais et qui te hantent jour et nuit depuis. « Tu l’as lu… Pas vrai? » Tu voudrais lui dire que non, être ce genre de personnes là. De ceux qui trouvent un carnet rempli d’informations personnelles et qui résistent à la tentation de le lire. Vous savez parfaitement tous les deux que tu n’es pas ce genre de personnes toutefois, bien au contraire. Tu n’as pas le temps de lui répondre qu’il est déjà parti vers la cuisine, le nez dans le frigidaire et c’est sans trop savoir quoi dire ou quoi faire que tu t’approches, conservant toutefois une distance qui est vous est plus essentielle que jamais. « Pourquoi tu m’as pas dit que Yele était reparti à Londres? » C’est lâche de ta part sans doute, de répondre par une question, mais il comprendra ainsi que oui, tu l’as lu. Oui, tu t’es perdue dans les doutes et dans les peurs et tu crains plus que jamais de les aborder, surtout maintenant alors qu’il semble ne plus rien gérer. Il se retourne et dépose un verre de limonade devant toi, mais tu n’y touches pas. « C’est quand la dernière fois que t’as dormi Wyatt? » Ça te démange les bouts des doigts, de venir les poser sur sa main. C’est ton corps en entier qui se doit de résister à la tentation de s’approcher encore un peu plus, pour le serrer dans tes bras, pour lui dire que t’es là, qu’il peut te parler. Tu veux tellement le faire, tu veux tellement le dire, mais ça reste coincé en dedans de toi, comme si tu n’osais pas te le permettre. « Dis-moi ce que je peux faire, s’il-te-plaît. »
Pour t’aider avant que tu ne craques complètement. |
| | | | (#)Dim 31 Oct 2021 - 14:05 | |
| Pas une seule seconde, j’ai envisagé l’idée même que ce soit Rosalie qui était en train de frapper à ma porte. Pourtant, toutes les probabilités se voulaient réunies pour qu’elle soit bel et bien la seule personne à me rendre visite. Cela ne m’a pas traversé l’esprit tant cela fait des jours que je tente d’occulter la moindre de mes pensées la concerner. Un instant, j’imagine avoir rêvé, que le manque de fatigue me fait halluciner sa présence quand je dois simplement être en train de me ridiculiser devant l’un de mes nouveaux voisins. Jusqu’à ce que son regard croise le mien. Ses prunelles, que je saurais reconnaître, n’importe où et qui sont emplies d’une inquiétude, qui elle, n’a absolument rien d’habituel. À cet instant, je remercie toutes les insomnies pour m’avoir forcé à ranger l’appartement quand c’est la première fois que je le laisse quelqu’un en franchir le pas de la porte. Elle s’avance et je ne sais plus quoi faire de mon corps entre l’accueillir avec entrain et lui demander de partir parce qu’en rien, je ne suis prêt à l’affronter maintenant. Il est un peu tard pour une quelconque marche arrière lorsqu’elle est déjà en train d’observer le salon et sa bibliothèque. Respire Wyatt.
Il m’est difficile de rester face à elle, encore plus lorsqu’entre ses mains apparaît mon stupide carnet. Je pensais que le retrouver, aller me soulager, en réalité cela ne fait qu’ajouter un poids supplémentaire qui vient se loger entre ma cage thoracique. Faire disparaître l’objet ne rendra pas moins réel le fait qu’elle se soit sans doute amusée à fouiner entre les pages. Un autre jour, je me serais énervé, une dispute aurait éclaté à tenter de lui rappeler que certaines choses se doivent de rester dans le domaine du privé. Aujourd’hui, je n’en ai pas la force quand sentir son regard se balader sur ma silhouette me donne tout simplement l’envie de fuir. C’est ce que je fais d’ailleurs, dans la cuisine. Pour imposer encore un peu de distance, pour ne surtout pas croiser son regard qui en dit déjà bien trop long sur tout ce qu’elle a pu découvrir. « Pourquoi tu m’as pas dit que Yele était reparti à Londres ? » Mes doigts s’accrochent à la poignée du frigo tandis que je prends une éternité à m’intéresser au contenant de l’objet. Chacun de mes gestes se veulent d’une lenteur folle tandis que ma mâchoire se serre, refusant d’évoquer le départ du benjamin de la famille. Ils sont tous partis. « Si j’en parle pas, ça ne reste que l’un de ses stupides caprices de gamin. » À ne pas le dire, cela ne rend rien officiel. Il est parti pourtant mon petit frère, depuis plusieurs semaines. Il a pris l’appartement que je gardais encore en terre anglaise, il a juré me payer un loyer et donner des nouvelles, mais on sait aussi bien l’un que l’autre que les nouvelles ne viendront probablement jamais.
« C’est quand la dernière fois que t’as dormi Wyatt ? » - « J’ai une sale gueule à ce point-là ? » Pas besoin de croiser mon reflet dans un miroir pour connaître l’avancée des cernes qui me bouffe la moitié du visage et la barbe qui ne ressemble plus un rien. Le simple fait que je ne retire pas mes lunettes, lui donne la puce à l’oreille. « Un jour. » que j’avoue avant que son regarde ne fonde sur le mien. « Ou deux, je sais pas… » La dernière fois, je me suis assoupi sur le canapé tandis que je tentais de trier quelques affaires et cela n’a pas durer plus de deux heures. Mes doigts s’agitent sur le comptoir tandis que l’envie de fumer une cigarette ne cesse de grandir. Je n’ai plus de tabac et les seules substances qui me restent la faire bondir au plafond pour mieux lancer une dispute inutile dans ce genre de circonstances. On s’observe comme deux animaux étrangers, à se demander qui sera le premier à évoquer cette fameuse nuit. Je voudrais m’échapper, mais Rosalie me tient, parce que Rosalie a appris bien des choses dans son coin. « Dis-moi ce que je peux faire, s’il-te-plaît. » L’envie première se voudrait de lui demander de partir, de me laisser tranquille, de retourner vers l’autre. L’instinct d’autodestruction me nargue à en faire danser mes lèvres sans qu’aucun son ne s’échappe de manière audible. Mais mon esprit me rappelle, la chambre que j’étais en train de créer avec son arrivée, son ventre arrondi qui cache l’arrivée, de plus en plus proche, de notre fils. « Reste un peu ? » Je ne saurais parler pour le moment, les mots ne seront pas les bons, j’ai besoin d’un temps, de sentir encore sa présence. Peut-être après, peut-être plus tard, quand mon esprit cessera de me dire à chaque seconde, qu’elle va partir, qu’elle n’a aucune envie d’être là.
« Viens. » Mes doigts manquent d’aller chercher les siens, mais mon geste reste en suspens, un cours instant avant que l’envie d’attraper sa main se transforme en un simple signe de tête. Je cherche à gagner du temps, à meubler le moment, alors je l’entraîne vers la pièce que j’ai si précipitamment renfermé à son arrivée. Lentement, j’ouvre la porte avant de pénétrer dans la chambre qui est bien loin d’être terminée. Je vais ouvrir la fenêtre pour éloigner l’odeur entêtante de la peinture et laisse Rosalie entrer à son tour. Dans un coin, seul le berceau fait office de meuble, le reste se trouvant encore dans des cartons. Sur le mur, mon dessin bien loin d’être achevé et qui pour le moment, paraît ne ressembler à rien. « Ça m’évite de penser. » Créer tout cela, rendre la présence future de notre garçon plus réel me permettent de me raccrocher à quelque chose. « Et à cause de la sonnette, j’ai fait un gros pâté dégueulasse. » Meubler dans un rire, le silence de tout ce que je n’ai pas le courage d’aborder à l’instant. |
| | | | (#)Dim 31 Oct 2021 - 16:26 | |
| Tu oublies la principale raison qui t’a poussé à venir ici aujourd’hui dès l’instant où tu poses les yeux sur Wyatt. Soudainement, ça ne te semble plus si important, d’éclaircir ce qui s’est passé cette nuit-là, de chercher à comprendre pourquoi il s’est sauvé de la sorte quand sous tes yeux se joue quelque chose de bien plus inquiétant. De tomber sur lui et de le voir dans cet état sans avoir lu son carnet, ça aurait créer un tourbillon de questions sans réponse, des questions que tu aurais eu du mal à poser et auxquelles Wyatt se serait efforcé de ne pas répondre. Mais de le voir comme ça en sachant ce qui se cache derrière, en comprenant un peu mieux les peurs et les doutes qui l’habitent et le hantent, ça vient complètement changer la donne. Ça te donne une longueur d’avance que tu n’avais jamais eu par le passé et tu fais de ton mieux pour l’utiliser à ton avantage, mais surtout, à son avantage à lui. Tu n’es pas là pour le mettre au pied du mur, pas là pour l’accuser de quoique ce soit. Tu ne cherches qu’à comprendre, qu’à rassurer, même si pour ça, tu n’as jamais su être la meilleure. « Si j’en parle pas, ça ne reste que l’un de ses stupides caprices de gamin. » Tu échappes un long soupir. Tu n’as pas la moindre idée de comment il peut vraiment se sentir, aucune comparaison réelle à faire quand, même si les rapports avec ton aîné et tes parents sont inexistants présentement, ils ne sont pas loin, ils n’ont pas disparu de la carte. Tu n’as qu’à conduire à l’autre bout du quartier pour te retrouver chez tes géniteurs, à l’autre bout de la ville pour te faire face à Garrett. Ce n’est pas si simple pour Wyatt qui a perdu tous ses repères dans les derniers mois, d’abord avec le départ égoïste d’Ariane, et maintenant avec Yelahiah qui en rajoute une couche au pire des moments. « Si t’en parles pas, ça te bouffe par en dedans et t’es pas plus avancé. » Tu détestes de le voir comme ça, quelque part prisonnier entre son déni et cette douleur qui le ronge. « Il t’a dit s’il allait revenir? » Tu essayes de te consoler avec le fait qu’au moins lui, il n’a pas complètement coupé les ponts. Lui au moins, il a dit où il partait et ce qu’il allait y faire. Tu n’es pas naïve toutefois, tu connais la complexité de la relation entre les frères Parker et tu ne t’imagines pas qu’ils vont s’envoyer des messages constamment pour se tenir au courant. « Londres c’est pas si loin. On pourra toujours aller lui rendre visite, quand le bébé sera né. » On, Rosalie? Elle se cache bien là, la raison pour laquelle vous devez absolument parler de ce qui s’est passé, quand déjà, toutes les lignes maladroitement tracées entre vous sont complètement brouillées, ne laissant qu’un bordel sans fin qui ne fait plus de sens.
« J’ai une sale gueule à ce point-là? » Oui. Pire encore même. « Est-ce que tu veux vraiment que je réponde à ça? » Tu tentes l’humour, un petit rire, un sourire au coin de tes lèvres, ton regard qui s’adoucit. Ce n’est pas son genre à Wyatt, de se laisser aller de la sorte. Ça s’accumule beaucoup trop depuis quelques mois et il a atteint sa limite, tu le vois bien et pourtant, tu ne sais toujours pas comment faire en sorte de lui alléger les épaules. Il y a tellement de choses que tu voudrais lui dire pourtant, des choses qu’il a besoin d’entendre et elle est là, ton opportunité. Pourquoi est-ce que t’es incapable de la prendre? Pourquoi est-ce que t’es incapable de faire le premier pas qu’il n’a plus la force de prendre? « Un jour. Ou deux, je sais pas… » Tu soupires légèrement, incapable de défaire ton regard de son visage fatigué. « C’est à cause de ce qui s’est passé? » C’était utopique de croire que vous pourriez éviter le sujet encore bien longtemps. Tu l’approches doucement toutefois, tu cherches seulement à comprendre le pourquoi du comment. Quand il passait encore chez toi, il n’avait pas l’air si fatigué. Tu n’es plus certaine soudainement et tu fouilles dans ta mémoire pour tous les souvenirs des dernières semaines. Vous vous êtes tellement concentrés sur toi, sur ta grossesse, ta tension qu’il fallait absolument garder à son plus bas que t’as oublié de t’assurer que lui aussi, il allait bien. News flash : ce n’est pas le cas. Tu ne sais pas trop ce à quoi tu t’attends, quand tu lui demandes ce que tu peux faire. C’est bien une danse nouvelle entre vous, toi qui tends la main pour l’aider, lui qui accepte cette dernière et pourtant, tu ne tentes même pas de camoufler ton soulagement lorsqu’il reprend enfin la parole après une longue minute de silence. « Reste un peu? » Ton sourire s’élargit davantage alors que tu hoches la tête sans la moindre hésitation. « Aussi longtemps que tu voudras. »
J’te l’ai dit il y a quelques mois de ça, Wyatt. J’ai plus envie de me sauver.
« Viens. » Sa main s’élève dans ta direction, dans un mouvement qui reste inachevé alors qu’il te fait finalement signe de la tête de le suivre. Sur un coup de tête, tu décides tout de même de venir joindre tes doigts au sien, de compléter son invitation à le faire qui n’en était pas vraiment une. Ton regard passe de vos doigts enlacés jusqu’à son visage. Ça, ce sera une autre question à se poser plus tard quand tout ce qui compte dans l’immédiat, c’est de découvrir derrière la porte qu’il s’était empressé de fermer à ton arrivée. L’odeur de la peinture est frappante alors que Wyatt s’empresse d’aller ouvrir la fenêtre. Ton regard se perd sur les différents cartons qui s’empilent, le berceau qui est monté dans un coin de la pièce avant de se retourner vers le mur principal sur lequel se dessine tranquillement ce qui deviendra une murale. Ce n’est qu’un mélange de couleurs imprécis pour le moment, mais il n’est pas difficile d’y voir toute l’attention et la minutie que Wyatt y a déjà mis. Tu viens caresser ton ventre, baissant le regard vers ce dernier alors que tu t’adresses à votre fils, tentant maladroitement d’oublier que Wyatt aussi peut t’entendre. « Tu vas être bien ici. » Et si l’arrangement entre vous n’a jamais semblé aussi flou qu’à l’instant présent, tu ne doutes pas une seule seconde de l’attention et de l’amour que Wyatt a à donner à votre garçon, même si lui, ne cesse de douter de ses capacités à être un bon père. Dans un murmure que tu sais qui n’échappera pas à Wyatt, tu rajoutes « T’aurais vraiment pas pu avoir un meilleur père. » et tu mets quelques secondes de plus avant de relever le regard, préférant faire comme si tu n’avais rien dit alors que tu t’intéresses de nouveau à la murale. « Ça m’évite de penser. » Oh que tu le comprends, le besoin de faire le vide dans sa tête. « Et à cause de la sonnette, j’ai fait un gros pâté dégueulasse. » « Je suis désolée. » que tu souffles dans un rire alors que tu trouves des yeux ledit pâté. « Avec un petit peu de gris là, ça passera ni vu ni connu. » que tu suggères en pointant le mur du doigt. « T’as une photo de ce à quoi ça va ressembler, une fois terminée? » Tu te rapproches de Wyatt, hésites une seconde et puis une autre à briser la distance entre vous deux, mais tu n’as plus envie de reculer alors que tu viens poser une main sur son épaule. « Je pense que tu devrais essayer de faire une sieste. » que tu suggères, ne perdant jamais ce sourire que tu espères rassurant. « Je peux rester si tu veux. M’allonger avec toi, si ça peut aider. » Comme lui avait fait avec toi, quand il était revenu de Melbourne. Après tout, il n’y a plus vraiment de limite qui existe encore entre vous après ce qui s’est passé l’autre nuit, et si vous repoussez encore d’en parler un peu, vous pouvez bien vous perdre dans cet entre-deux encore un peu plus longtemps. |
| | | | (#)Dim 31 Oct 2021 - 18:21 | |
| « Si t’en parles pas, ça te bouffe par en dedans et t’es pas plus avancé. » J’ai toujours détesté l’aisance que possède Rosalie pour lire entre mes lignes. Elle n’a jamais eu besoin de lire le moindre carnet pour entendre la véritable réflexion derrière le sarcasme ou pour comprendre la faiblesse que je cache parfois. Je ne voulais pas parler du départ de Yelahiah, c’est un fait. Je ne peux pas en vouloir à mon petit frère d’être reparti à Londres, il s’est construit là-bas et n’était revenu en Australie que pour Ariane. Elle l’avait abandonné tout aussi lâchement et je ne pouvais décemment pas le retenir sur le territoire quand il a toujours été plus heureux ailleurs. « Il t’a dit s’il allait revenir ? » Un léger rire m’échappe tandis que se rejoue la discussion, apaisée, qui avait eu lieu avec mon petit frère. « Il ne reviendra pas. » Il ne l’a pas dit comme cela, mais il était bien trop évident de l’interpréter ainsi. « Il était revenu à Brisbane pour Ariane. Il a toujours préféré Londres. » Et qui pourrait lui en vouloir, là-bas les histoires de famille n’existe pas. Il va sûrement retrouver ses amis, il va pouvoir vivre sa vie autrement après avoir tourné la page sur bien des problèmes. C’est sûrement mieux ainsi. « Londres c’est pas si loin. On pourra toujours aller lui rendre visite, quand le bébé sera né. » On ? Je relève la tête pour entre apercevoir le sourire qu’elle m’offre, une esquisse peu rassurer, mais qui se veut d’au moins essayer. « On n’a jamais été proche avec Yelahiah. » Je hausse les épaules préférant ne pas m’étaler sur le sujet qui pourrait m’amener à parler de remords. On n’a jamais su se comprendre tous les deux et je ne lui manquerai pas. Fin de l’histoire. Il m’oubliera comme Ariane est en train de le faire et la fratrie que j’ai passé près de trente ans à maintenir à flot n’existera plus que dans des souvenirs. Tant pis.
La fatigue semble me heurter de plein fouet quand la brune s’amuse à me rappeler que ma tête pourrait effrayer tous les gamins du quartier. Les heures de sommeil n’ont pas été nombreuses durant la semaine quand je me trouvais incapable de m’allonger sans que mon esprit vagabond dans des recoins que je préfère encore laisser inexploré. Je ne trouvais pas l’apaisement nécessaire pour aller me coucher dans mon lit et simplement dormir. « C’est à cause de ce qui s’est passé ? » J’aurais aimé que le sujet reste encore dans la pénombre même si ce dernier ne cessait de flotter entre nous depuis qu’elle est entré. Pour la toute première fois, c’est moi qui suis parti sans rien dire et je sens bien que Rosalie s’en retrouve déstabiliser. La sensation, je la connais par cœur, les millions de questions qui s’en vont de pair également. « J’ai pas de regrets. » Si c’est ce qu’elle voulait savoir. Je ne regrette pas de m’être laissé aller, d’avoir fait le choix de me glisser entre ses bras. Qu’importe tout ce que l’on pourra bien se raconter pour apaiser nos consciences, il existe ce lien. Il est indescriptible, dur à cerner parfois, mais il n’a jamais été aussi fort. Certains parleraient de sentiments, je préfère croire qu’il s’agit de nous, tout simplement. Nous et notre éternel besoin de se retrouver à un moment ou à un autre, qu’importent les difficultés que cela pourrait engranger. Mais le sujet se retrouver avorter lorsque je lui demande simplement de rester un peu. On pourra en discuter. Il faudra que l’on en parle, mais pas maintenant. « Aussi, longtemps, que tu voudras. »
Toujours pour mieux détourner l’attention, je l’emmène dans la future chambre du bébé. Et si sa main, qui vient rejoindre la mienne, fait frissonner tout mon corps, elle ne pourra le notifier que par mes doigts qui viennent serrer les siens juste assez longtemps avant que l’on se sépare. La pièce est imbibée d’une odeur de peinture entêtante, mais je tenais à lui montrer les choses qui changent petit à petit. Pour ne pas la laisser respirer trop de substances toxiques, je m’empresse d’aller ouvrir la fenêtre, lui tournant le dos, juste un instant. « Tu vas être bien ici. » Ce n’est pas à moi qu’elle s’adresse quand je me retourne pour la voir visage baisser vers son ventre qu’elle caresse en douceur. Je retiens mon souffle tandis que ses lèvres bougent à nouveau. « T’aurais vraiment pas pu avoir un meilleur père. » La sincérité de ses paroles provoque une tempête sans nom venant tout ravager sur son passage, j’ai le cœur qui s’emballe autant que ma gorge se noue sous l’émotion. La dualité s’en revient alors qu’une part de moi cherche à la croire tandis que l’autre, celle qui domine, ne cesse de marteler que la confection d’une chambre ne fera jamais de moi un bon père. Ce n’est qu’une tentative pour prétendre que tout se passera bien quand je me demande encore si cette pièce aura toute son utilité après sa naissance. Rosalie ne me laissera jamais l’avoir seul, elle trouvera toutes les excuses du monde pour qu’il ne vienne jamais dormir ici. C’est stupide de faire autant d’effort quand il paraît presque évident que quelque chose viendra tout foirer, encore, entre nous et que je me retrouverais seul comme un pauvre con. Ma mâchoire se serre tandis que je lutte contre mes propres pensées et que ma vision commence à légèrement se brouiller. Rosalie ne dit jamais des choses aussi profondes dans le simple but de plaire, je devrais le savoir et pourtant, tous les doutes sont de sortie pour mieux venir me bouffer de l’intérieur. En silence, parce qu’il est bien trop difficile de poser des mots sur une peur tout ce qu’il y a de plus irrationnelle.
Alors, il est bien plus simple de détourner la conversation sous forme de plaisanterie. Pour gagner du temps, pour qu’elle se concentre sur autre chose que mon visage qui semble être devenu un livre ouvert sous ses yeux. « Je suis désolée. Avec un petit peu de gris là, ça passera ni vu ni connu. » Je hoche la tête au même moment où je marque l’endroit d’un léger bout de scotch. « Je rependrais plus tard. » Quand elle ne sera plus là, lorsqu’il faudra encore noyer mes pensées dans une activité qui se veut assez précise pour ne pas me faire déborder sur les angoisses qui m’habitent. « T’as une photo de ce à quoi ça va ressembler, une fois terminée ? » Je hoche la tête sans avoir encore trouvé l’image de base, celle que j’ai imprimée et perdue quelque part dans la bâche de protection étalée sur le sol. Il me faudra un instant pour repérer le bout de papier coincé sous un pot de peinture. « Un peu comme ça. » J’ai pris quelques libertés, j’ai laissé mon imagination parler même si je suis bien loin d’être doué en dessin. Pour le moment, on dirait d’étrange triangle, qui je l’espère, plus tard formeront une chaîne de montagne au couleur pastel. « C’est pas grand-chose. » Elle trouve cela probablement stupide, la moitié sera caché par le berceau et la table à langer. Peut-être que je perds mon temps à faire tout cela quand notre garçon n’en verra rien.
Si Rosalie ne s’était pas rapprochée de moi, j’aurais fini par attraper un pinceau pour tout gâcher. Mais elle est juste à côté de moi la brune, je sens la chaleur de son corps contre mon bras nu tandis que sa main vient glisser sur mon épaule avant de la serrer avec force. « Je pense que tu devrais essayer de faire une sieste. » L’idée ne paraît pas absurde quand la moindre chose pourrait me faire exploser entre colère et tristesse. « Je peux rester si tu veux. M’allonger avec toi, si ça peut aider. » Je pourrais lutter des heures durant, mais la fatigue l’emporte sur la raison lorsque cette fois, je viens réellement chercher sa main pour l’entraîner en dehors de la pièce. Je m’étais juré que Rosalie ne passerait pas le pas de cette chambre, qu’elle ne viendrait jamais dormir ici, que cela devait s’en tenir ainsi. Je m’étais promis bien des choses pour ne pas flancher, mais qu’elle propose de me tenir compagnie insuffle un sentiment de sécurité que je ne saurais décrire. « Je reviens. » Je m’échappe quelques minutes dans la salle de bain pour retirer mes vêtements tâchés de peintures et enfiler quelque chose de tout aussi confortable, mais bien plus propre. La trouver assise au bord du lit ne me paraît presque normal et lorsque je m’allonge sur le matelas, je n’ai pas envie de fuir.
Pourtant, les minutes défilent dans un silence qui se veut presque pesant, le temps s’allonge sans que je ne bouge ou que mes yeux quittent le plafond. Mon esprit cours à mille à l’heure, les pensées s’échappent dans tous les sens pour mieux se répercuter en écho avec le souffle de Rosalie à mes côtés. « Demande-moi. » Toutes les questions qui doivent lui passer par la tête depuis sa lecture, toutes les précisions qu’elle souhaiterait avoir. Il faut qu’elle demande, sinon je ne dirais rien. |
| | | | (#)Dim 31 Oct 2021 - 19:37 | |
| « Il ne reviendra pas. » Il n’y a aucun doute dans la voix de Wyatt et tu ne le remets pas en question. Il connaît son frère, tu le sais parfaitement qu’il ne dirait pas ça s’il n’en était pas convaincu. Ça te fait quand même de la peine de penser que votre fils va non seulement grandir sans la présence de sa tante dans son quotidien, mais maintenant sans celle de son oncle aussi, Wyatt se trouvant désormais seul comme représentant de ce qui était autrefois l’étrangement tissée serrée fratrie Parker. « Il était revenu à Brisbane pour Ariane. Il a toujours préféré Londres. » Un soupir t’échappe. Ariane, toujours Ariane. Des mois qu’elle est partie, des mois que vous êtes sans nouvelles, et elle finit toujours par se faire une place dans la conversation malgré tout. « On n’a jamais été proche avec Yelahiah. » Tu le sais ça, mais quand même. Tu peines à croire que votre fils ne rencontrera pas son oncle, ni même son grand-père paternel, bien que tu n’oses même pas évoquer le père de Wyatt alors qu’il se trouve dans cet état. Peut-être plus tard. Quand il aura dormi quelques heures. Quand tu trouveras le courage de discuter de ce qui se trouve dans le carnet. Quand tu cesseras de te complaire dans son déni, toi aussi. C’est d’ailleurs maladroitement que tu approches le sujet de votre nuit passée ensemble il y a plusieurs jours de cela, craignant que cette dernière ne soit la cause des insomnies qui martèlent si violemment le Parker. Tu t’attends à ce qu’il te dise que c’était une erreur, que vous n’auriez pas dû, que vous aviez promis de ne plus jouer. Ce bout de la conversation, tu te l’es imaginé par cent fois et pas une seule fois il ne prononçait ces mots-là. « J’ai pas de regrets. » « Vraiment? » Tu es prise par surprise, tu n’as pas eu le temps de t’imaginer une quelconque réponse à ce script-là et ça se ressent. Pourtant, alors que tu te préparais ardemment pour le contraire, tu es soulagée, contente même de l’entendre dire qu’il ne regrette pas. Parce qu’elle était bien là, ta plus grande crainte. Que non seulement ça vienne brouiller tout le chemin que vous avez fait depuis quelques mois, mais surtout que ça brise quelque chose à nouveau entre vous. « Je regrette pas non plus. » que tu finis par souffler, tournant le regard vers lui. Tu ne sais toujours pas quoi en penser, aucune idée de ce que vous êtes censés faire maintenant, mais dans l’immédiat, ça n’a plus d’importance. Tout ce qui compte, c’est d’être là pour Wyatt. De l’aider autant qu’il te l’autorisera, peu importe la forme que cela peut prendre.
Wyatt te guide vers ce qui deviendra la chambre de votre garçon et ça te fait sourire, de voir tous les efforts qu’il y a mis jusqu’à maintenant. L’attention qui se trouve dans chaque coup de pinceau sur le mur, toutes les pensées qui ont été mise dans les différents meubles nécessaires et tu es curieuse de voir de quoi ça va avoir l’air quand tout sera terminé. Ça te fait réaliser un peu plus à quel point toi, tu as pris du retard dans les préparatifs pour son arrivée. Non seulement parce que ta sœur occupe encore la chambre qui va lui être dédiée, mais aussi parce que ça te fait peur, de te mettre à tout installer. Tu ne saurais le verbaliser, mais même après plus de trente de semaines de grossesse, la peur de voir ce petit bébé t’être arraché subsiste, les séquelles de ta fausse-couche encore puissantes même si tu ne laisses rien paraître. Peut-être bien que de voir Wyatt y mettre autant de cœur était ce dont tu avais besoin pour commencer toi aussi, bien que ce n’est pas vraiment à ça que tu penses dans l’immédiat, toutes tes pensées tourner vers Wyatt, et le lien déjà si fort que tu l’imagines avoir avec votre fils dès qu’il sera parmi vous. Dans les dernières semaines, tu avais vu Wyatt se faire plus curieux avec ton ventre, à demander à sentir votre fils bouger, à lui parler un petit peu même, quand il te pensait assoupie. Tu voulais qu’il puisse retrouver ça, malgré ce qui s’était passé entre vous et si tu peinais à le dire concrètement, tu te promettais de le lui faire comprendre, à ta manière. « Je rependrais plus tard. » Il marque le pâté d’un bout de tape et tu hoches la tête doucement. Curieuse de voir le modèle d’inspiration pour la murale, Wyatt trouve finalement l’image qui lui sert de guide. « Un peu comme ça. C’est pas grand-chose. » « Je trouve ça vraiment beau. » que tu t’empresses de dire, parce que c’est bien plus que pas grand-chose à tes yeux. « Il mérite d’avoir au moins une chambre qui est bien emménagée avant sa naissance, et avec Wendy qui semble pas pressée de partir de chez moi… » Tu ris doucement. Ce n’est pas ta force, de dédramatiser les situations. Pas ta force non plus, de venir te battre avec ses démons pour faire taire toutes ses voix que tu connais désormais dans le fond de son esprit, celles qui s’efforcent à rabaisser chacune de ses actions et à lui faire croire qu’il n’a pas ce qu’il faut pour être un bon père. « J’pourrais t’aider si tu veux. » Tu es loin d’être une artiste peintre toi aussi, mais à deux, peut-être que vous pouvez continuer d’essayer de faire de belles choses, ensemble?
Mais la murale se doit d’attendre quand tu restes convaincue que la seule chose dont Wyatt a besoin en ce moment, c’est de quelques heures de sommeil. Tu sais que ça ne suffira pas pour faire disparaître les cernes sous ses yeux, ni même pour faire taire les démons dans sa tête, mais ça te semble être un bon point de départ. Tu t’attends à une résistance quelconque de la part de Wyatt, préparant déjà tes meilleurs arguments pour l’inciter à aller s’allonger, mais il te surprend une fois de plus quand dans un geste simple et atrocement familier, il vient plutôt emmêler ses doigts dans les tiens à nouveau. Sans dire un mot, tu le suis à l’extérieur de la chambre de bébé et le suit jusqu’à la sienne, la découvrant ainsi pour la première fois. Si sa chambre dans le dernier appartement était souvent un bordel sans nom, carnets et livres couvrant constamment le plancher, le lit toujours à moitié défait, la pièce qui se dessine sous tes yeux est bien rangée et le lit donne l’impression qu’on ne s’est y pas allongé depuis un long moment. « Je reviens. » Tu hoches doucement la tête et viens t’asseoir sur le bord du lit alors qu’il disparaît dans la salle de bain pour réapparaître quelques secondes plus tard, ayant troqué son linge tâché de peinture pour quelque chose de plus frais. En silence, tu le regardes s’allonger dans le lit et viens prendre place à côté de lui. Il est sur le dos, regard fixé sur le plafond alors que tu es couchée sur ton côté gauche, tes yeux ne quittant jamais son visage. Tes mains entourent ton ventre et il n’y a que le bruit de vos respirations pour remplir la pièce pendant ce qui semble être de longues minutes. « Demande-moi. » « Je sais même pas par où commencer. » que tu soupires alors que tu hausses légèrement les épaules. Tu avais été ébranlée par tellement de passages de ce carnet, tu ne te sentais pas vraiment légitime de savoir tout ça. « Pourquoi tu m’as jamais rien dit de tout ça? » Ça semble être un bon endroit pour commencer quand encore, tu peines à croire que si ce n’était pas d’un simple oubli de sa part, tu serais encore dans le flou total sur bien des points. « Tu penses vraiment que je vais partir? Qu’on va partir? » Tu attrapes l’une de ses mains et dans un geste qui se veut maintes et maintes fois répété désormais, tu viens la placer sur ton ventre qui continue de prendre de l’expansion, jour après jour. « Regarde-moi. » que tu souffles, attendant qu’il se tourne enfin sur son côté avant de rajouter : « On va nulle part. J’te jure que j’vais pas disparaître du jour au lendemain comme Ariane et jamais que je te priverai de ton fils. Peu importe ce qui se passe entre nous. » Ça, c’est une promesse que tu allais tenir coûte que coûte et tu avais besoin qu’il te fasse confiance sur ce coup-là. |
| | | | (#)Lun 1 Nov 2021 - 18:28 | |
| « Vraiment ? » La surprise dans sa voix souligne par cent fois tous les disfonctionnements qui sont propres à notre relation. Elle ne devrait pas être aussi étonnée de m’entendre affirmer avec force que tout cela se devait d’arriver. On ne devrait pas autant douter de la véracité de tout ce qui ne cesse de nous arriver, de tous les événements qui nous portent constamment l’un vers l’autre. « Plus de mensonges. » que je souffle alors lentement tout en haussant les épaules dans une nonchalance qui nous est propre afin de ne jamais entrer plus en profondeur dans tout ce que cela comporte comme attachement et autres sentiments que nous sommes bien incapables de gérer de front. « Je regrette pas non plus. » Alors c’est bien tout ce qui compte. Qu’importe si le timing se veut résolument affreux, qu’importe si l’on a aucune idée de ce que cela engendre à nouveau. Pour la première fois depuis des années, personne d’autre que nous s’avère concerner. Il n’y a plus de tromperie, pas de secret à devoir garder. Juste deux adultes complètement paumés qui avait cruellement besoin de se retrouver. Le reste pourra attendre encore un peu.
À trop vouloir éviter les grandes conversations, je cherche à gagner du temps en lui montrant la future chambre du petit. Rien n’est encore parfaitement terminé, mais il m’avait semblé important de débuter à rendre l’endroit cosy qu’importent les pensées qui m’obscures l’esprit. Une part de moi se résigne à penser qu’il ne dormira jamais entre ces murs, qu’importe ce que Rosalie peut bien être en train de lui raconter. L’autre part, celle qui cherche encore à se battre, veut encore croire à la possibilité dans un équilibre dans le chaos. Pour lui. « Je trouve ça vraiment beau. » Une nouvelle fois, je hausse les épaules, ne sachant trop quoi répliquer. C’est ce que j’avais trouvé de plus sympa, ce qui ira probablement le mieux avec les tableaux que Ginny m’a envoyé. « Il mérite au moins une chambre qui est bien emménagée avant sa naissance, et avec Wendy qui semble pas pressée de partir de chez moi… » - « Encore faut-il qu’elle serve un jour. » J’ai senti la panique dans sa voix à l’idée de n’avoir encore rien débuté de son côté, mais ce sont mes propres démons qui préfèrent prendre de l’avance. C’est plus fort que moi lorsque mon cerveau fatigue ne se branche que sur ce qui domine le fond de ma pensée depuis bien trop longtemps. Elle est au courant de toute façon, alors pourquoi faire semblant ? Elle avait en sa possession bien pire encore quand je sais pertinemment que mon carnet a été lu et relu maintes fois pour n’échapper aucun détail. « J’pourrais t’aider si tu veux. » Je secoue la tête lentement. [color=slategrey]« Les odeurs de peintures c’est pas bon pour vous. » Ni pour elle, ni pour le petit bonhomme dans le creux de son ventre. « Et tu dois te reposer. » C’est bien ce qui m’avait fait tenir ces dernières semaines, m’assurer qu’elle se repose. À passer chez elle, tous les jours me permettaient d’occuper mon esprit, de laisser une trace qui je l’espérais finirait par faire la différence. Puis la tempête à prix de l’ampleur et les démons ont gagné le combat dès l’instant où j’ai fait l’erreur de laisser une part de moi chez elle. Au sens propre comme au figuré. Elle possède tout entre ses mains et cela me terrifie bien plus encore.
Alors je ne cherche pas à lutter quand elle me propose d’aller me reposer. Je pourrais dire que je n’en ai pas besoin, mais le mensonge serait éhonté. N’ayant aucunement la force de me lancer dans un débat sans fin, je préfère capituler dès la première seconde. Peut-être aussi, parce que cela suppose qu’elle va encore rester à mes côtés. J’ai besoin de sa présence, de sentir son corps non loin du mien, qu’importe le silence que j’impose depuis de longues minutes déjà. Son souffle est régulier, du coin de l’œil, j’aperçois ses mains posées sur son ventre. Elle est là et c’est bien tout ce qui compte dans l’ouragan qui vient tout chambouler dans ma tête. À fixer le plafond, je rêve de ne jamais avoir à me lancer dans la conversation qu’elle semble attendre depuis son arrivée, mais Rosalie s’agite à mes côtés, elle s’impatiente. « Pourquoi tu m’as jamais rien dit de tout ça ? » Un souffle m’échappe entre ricanement et incrédulité. « Tu me poses réellement la question ? » Malgré les années, malgré la complicité on a toujours été bien incapable de se dire les choses. Pour deux écrivains, nous sommes réellement à chier quand il s’agit de s’exprimer auprès de l’autre. Jamais je ne me vois dans la capacité de lui raconter tout ce qu’elle a pu lire entre ces pages. « Je me déteste d’avoir oublié ce carnet. » Je ne voulais pas qu’elle puisse avoir accès a tout cela, rien n’avait été volontaire. J’aurais encore préféré me faire renverser par un bus plutôt que de lui laisser accès a cette version de moi-même empli de traumatismes et de doutes. Il est véritablement douloureux de savoir que désormais elle sait tout ce que je n’avais jamais voulu dire, mais que j’avais eu cruellement besoin d’extérioriser par l’écriture. « Tu penses vraiment que je vais partir ? Qu’on va partir ? » Mes yeux se ferment avec force tandis que je cherche à me convaincre que tout cela n’est qu’un mauvais rêve, que rien de tout cela n’est réel. Mais Rosalie est là, elle attrape ma main pour venir la poser sur son ventre et mon souffle se coupe au fond de ma gorge. « Tous les jours. » que je murmure lentement, les pupilles résolument fixer sur le plafond blanc. Cette peur, je ne sais la contrôler. Elle est tapie dans l’ombre depuis bien des années, mais reviens me hanter depuis le départ d’Ariane et la cascade d’évènements qui a suivi. Je ne vois aucune raison au fait que ce foutu équilibre prenne un sens même pour notre fils. « Regarde-moi. » Je refuse de tourner la tête vers elle, laisse mon regard fixer sur le plafond à attendre qu’elle lâche prise. Mais rien ne change si ce n’est que je sens ses yeux posés sur moi dans une bataille qui pourrait s’éterniser. Alors, je me tourne lentement sans jamais croiser son regard. « On va nulle part. J’te jure que j’vais pas disparaître du jour au lendemain comme Ariane et que jamais je te priverais de ton fils. Peu importe ce qui se passe entre nous. » Mon pouce caresse en continue son ventre tandis que je me sens traverser par un bon millier d’émotions. Enfermer dans mes idées noires, je ne vois que Rosalie qui préfère retourner à sa vie rêvée, qui préfère offrir autre chose à notre enfant qu’importe les liens du sang. « Tu veux autre chose que tout ça. » Mes mains s’agitent entre nous sans que je sois dans la capacité d’expliquer plus que le bordel qui nous unis. Elle a toujours voulu mieux que ma personne quand elle avait accepté de l’épouser, lui. C’est bien la même rengaine qui blesse, celle qui avait laissé bien trop de cicatrices. « On s’impose des règles que l’on est incapable de tenir, on a beau s’entêter, j’ai envie de t’embrasser à chaque fois que je te vois, qu’importe ce que j’ai pu dire par le passé. » Quand je hurlais ne plus jamais vouloir la voir, quand je lui assurais que tout était terminer et que nous serions que des co-parents pour notre fils. « Je nous vois comme mes parents, eux aussi ils ne savaient pas s’aimer correctement. » que je souffle alors, enfin lancer dans un semblant d’explication. « Et il est parti avec Yelahiah sous le bras, sans jamais prévenir. » De là était né ma haine envers mon frère, celui qui avait été choisi par notre paternel tandis que l’on avait été laisser pour compte derrière. « Pour je ne sais quelle raison et on finit par toujours tout détruire. » Tout se mélange entre cette image que j’ai toujours gardé de mes parents et notre histoire qui n’a rien à voir, mais qui me rappelle à des blessures d’antan. Il avait bien eu des périodes idylliques, mais qui c’était toujours soldé par des disputes monstrueuses qui avait causé leur perte et des années plus tard, la nôtre. « Et je peux pas m’enlever de la tête qu’après une énième dispute tu te décide à partir avec lui pour retourner à la vie stable qu’un autre savait t’offrir. » Comme mon père était parti à Londres pour vivre une vie cent fois meilleure que celle qui avait eu à Paris. Elle m’assaille cette pensée, elle vient me bouffer tout entier pour mieux m’entraîner dans des recoins d’angoisses et de craintes que j’aurais préféré taire à jamais. Ma main se retire de son ventre tandis que je me laisse à nouveau tomber sur le dos, les lèvres sceller et les yeux devenant bien trop humide. Il y a bien d’autres choses que je souhaiterais lui dire pourtant, des réalisations qui me sont venus durant cette semaine loin de l’autre, mais les mots ne peuvent se former de manière censé quand la tempête est bien trop levée. « J’ai besoin que tu restes. » Les mots se cassent entre mes cordes vocales nouées pour ne s’échapper que dans un murmure à peine audible.
Et sans un mot, je finis par laisser mon corps venir se blottir contre le sien.
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| | | | (#)Lun 1 Nov 2021 - 20:22 | |
| « Plus de mensonges. » Tu hoches la tête, un léger sourire sur les lèvres. Elles étaient nombreuses les règles que vous aviez tenté d’appliquer entre vous depuis que vous aviez appris pour la grossesse, mais celle-là était bien la seule qui semblait perdurer dans le temps. La seule qu’il vous fallait absolument conserver, peu importe tous les détours que vous vous entêtiez à prendre. Une décennie de vous et malgré tous les coups bas, toutes les trahisons, tous les mensonges, une vérité demeurait : vous étiez incapables de vivre l’un sans l’autre. Le temps n’avait pas su faire effet, toute la volonté du monde n’avait jamais suffit à vous tenir éloignés quand bien même vous étiez plus doués à vous faire du mal qu’à vous aimer comme vous étiez pourtant capable de le faire, autrefois. Tu ne sais pas ce que ça veut dire pour aujourd’hui, pour demain, pour la suite des choses alors que vous êtes plus près que jamais d’endosser de nouveaux rôles pour lesquels vous n’êtes pas prêts ni l’un ni l’autre. Les questions se multiplient et s’entassent dans un coin de ta tête quand tu sais que dans l’immédiat, vous ne trouverez pas de réponses satisfaisantes. Peut-être que ce n’est pas plus mal après tout, de ne pas chercher de réponses pour quelques temps. De laisser les choses suivre un cours normal, sans rien forcer, sans rien nommer et voir ce qui vient, ce qui prend forme. Vous avez essayé tout le reste sans jamais réussir alors peut-être bien que c’est ça, votre solution à vous?
La chambre prend forme tranquillement et tu te fais déjà impatiente de découvrir le résultat final. Wyatt semble incertain et insatisfait du travail qu’il a fait jusqu’à maintenant, dépréciant presque ce que tu devines déjà être quelques heures de peinture appliquée avec minutie. Tu gardes tes yeux sur le dessin qui lui sert d’inspiration, tentes tant bien que mal de visualiser de quoi ça pourra bien avoir l’air quand tu n’as jamais eu l’œil très artistique, bien plus à l’aise avec les mots que tu ne peux l’être avec les images. « Encore faut-il qu’elle serve un jour. » « Évidemment qu’elle va servir. » Il n’y a aucune hésitation, aucun doute même dans ton esprit que cette pièce va être utilisée tôt ou tard. Tu sais que tu avais dit que tu ne t’imaginais pas te séparer de votre garçon dans la première année, du moins pas pour une nuit complète, mais ça ne veut pas dire pour autant que tu n’avais pas dans l’idée qu’il passe autant de temps que possible ici. « Je sais qu’on devrait déjà avoir un plan pour après sa naissance, mais je… J’arrive pas encore à me l’imaginer. Je suis désolée. » Tu n’as pas de plans concrets, rien de précis à offrir à Wyatt, et tu t’en voudrais presque de ne pas savoir mieux le rassurer alors que tu le sais maintenant, à quel point il craint de voir son rôle s’effacer dans la vie de votre fils, et dans la tienne aussi. Ce n’est pourtant pas son rôle ni sa place que tu remets en question dans ton esprit, mais ce sont bien tes propres doutes et tes propres peurs qui semblent t’empêcher de te projeter plus loin que le moment immédiat. « Les odeurs de peinture c’est pas bon pour vous. » Oh oui, il te semblait bien avoir lu ça quelque part. « Et tu dois te reposer. » « J’pourrais t’aider à petites doses alors. Entre deux siestes, avec un masque. » Tu insistes, un sourire qui s’étire sur tes lèvres. Peut-être bien que c’est ta façon à toi de lui faire comprendre que le travail et l’attention qu’il met à cette pièce à son importance et une valeur inestimable à tes yeux, du genre que tu peines à bien traduire en mots, comme d’habitude.
Tout prend une tangente bien différente alors que tu lui proposes de se reposer et qu’au milieu du silence, il t’offre une chance de poser toutes les questions que tu peux avoir à propos de son carnet. « Tu me poses réellement la question? » Tu échappes un soupir. C’était un bien mauvais point de départ quand tu sais pourtant que vous n’avez jamais été très doués pour vous dire les vraies choses, celles qui font mal et celles qui laissent des traces profondes. C’est un problème ridicule pour deux écrivains qui vivent de leurs mots, de la prose dont ils sont capables lorsqu’il ne s’agit pas de parler d’eux-mêmes. « Je me déteste d’avoir oublié ce carnet. » « Moi je suis contente que ce soit arrivée. » Tu ne vas pas faire semblant, c’est lui-même qui a fait le rappel un peu plus tôt : plus de mensonges. « T’avais besoin que quelqu’un sache tout ça et moi, j’avais besoin de le comprendre pour pouvoir t’aider. » Tu ne sais pas encore comment tu vas vraiment pouvoir l’aider concrètement, mais tu espères sincèrement que de pouvoir engager la conversation, aussi difficile soit-elle, ça va vous permettre de faire le point. Permettre d’abaisser ne serait-ce qu’un petit peu tous les doutes qui l’alourdissent, surtout ceux en lien avec ta présence et celle de votre fils dans sa vie. « Tous les jours. » Il refuse de te regarder et tu insistes, par tes doigts qui englobent les siens sur ton ventre, par tes yeux qui ne quittent jamais son visage, à la recherche du moindre contact avec lui. Tu l’intimes de te regarder, mais même après de longues minutes, il ne fait que se retourner vers toi, évitant toujours de poser les yeux sur toi, son regard se perdant quelque part sur le mur derrière. Tu as besoin qu’il t’entende et qu’il te croie, quand tu lui promets que plus jamais tu n’as l’intention de sortir de sa vie complètement, et que jamais tu n’en viendrais à le priver de votre fils, mais tu le vois dans le fond de ses yeux, même alors qu’il refuse de les poser sur toi, qu’il ne l’entend pas de la même manière.
« Tu veux autre chose que tout ça. » Tu secoues la tête alors que ses mains s’agitent maladroitement entre vous deux et tu ne retiens pas le mouvement plus longtemps, alors que l’une de tes mains vient se poser sur sa joue pour le forcer enfin à te regarder droit dans les yeux. « C’est pas vrai ça. Ce n’est plus le cas. » Tu ne lui feras pas l’affront de dire que ça n’a jamais été le cas quand 95% de vos problèmes des dernières années retournaient autour de ça. Du fait que tu t’étais convaincue vouloir d’une vie parfaite auprès de l’homme parfait que tes parents avaient choisi pour toi, à l’opposée extrême de ce que toi tu voulais réellement, de ce que tu avais toujours voulu. « Tu ne penses pas que si je voulais encore de cette autre vie, j’y serais retournée depuis le temps? » Elles auraient été nombreuses pourtant, les occasions de le faire. Tu ne doutais pas une seule seconde que si tu étais retournée dans cette maison à Bayside, en suppliant Lachlan de te reprendre, il l’aurait fait, ne serait-ce que pour sauver vos apparences et vos réputations. Mais tout avouer et partir avait été la chose la plus libératrice que tu n’avais jamais fait et jamais tu n’avais eu envie de faire marche-arrière. Mais ça, il ne le sait pas Wyatt, quand ce sujet, comme tant d’autres, se veut d’être soigneusement évité autant que possible. « T’es pas mon second choix, ni mon choix par défaut Wyatt. » Malgré tout ce que tes actions avaient pu démontrer par le passé, il avait toujours été et resterait toujours ton premier choix, qu’il soit prêt à le voir et le croire ou non. « On s’impose des règles que l’on est incapable de tenir, on a beau s’entêter, j’ai envie de t’embrasser à chaque fois que je te vois, qu’importe ce que j’ai pu dire par le passé. » C’est ton cœur qui se met à battre à la chamade, ta gorge qui se noue alors que de nouvelles vérités éclates. C’est une chose de le lire entre les lignes de son carnet, c’est autre chose complètement que de l’entendre le verbaliser de la sorte. « Je nous vois comme mes parents, eux aussi ils ne savaient pas s’aimer correctement. » Tes doigts caressent sa joue alors que tu continues d’écouter sans rien dire, les émotions et les pensées qui partent dans tous les sens. « Et il est parti avec Yelahiah sous le bras, sans jamais prévenir. Pour je ne sais quelle raison et on finit toujours par tout détruire. » « Tu m’as jamais vraiment parlé de ton enfance, ni de ton père… » que tu murmures doucement alors que tu la vois dans le fond de ses yeux, la tempête qui continue de faire ses ravages dans son esprit. « Et je peux pas m’enlever de la tête qu’après une énième dispute tu te décides à partir avec lui pour retourner à la vie stable qu’un autre savait t’offrir. » « Jamais Wyatt. » Tu les vois, ses yeux humides, son besoin de se reculer et d’imposer une distance que tu lui refuses dès l’instant où tu le retiens un peu plus longtemps et que tu viens déposer tes lèvres sur les siennes avec une douceur infinie. « J’peux pas te promettre qu’on se disputera pas pour un oui ou pour un non, mais je ferai jamais ça. » Ta gorge est serrée alors que tu n’oses pas te reculer de peur qu’il t’échappe encore. « Peu importe ce que je dois faire pour que tu finisses par me croire, je vais le faire. » Tu savais parfaitement qu’il ne te faisait pas encore pleinement confiance et tu ne pouvais pas lui en vouloir pour ça, pas après tout ce que tu lui avais fait dans les dernières années. Mais s’il y avait une chance, aussi minime soit-elle, que tu puisses réparer tes torts, alors tu tenterais de le faire. « J’ai besoin que tu restes. » « Alors je reste. » Toute la journée. Toute la nuit. Toute une vie s’il le veut vraiment. Tu ne bougeras pas, tu ne bougeras plus. Pour une fois dans ta vie, tu ne tenteras pas de chercher la moindre signification dans tous les mots qui viennent d’être échangés. Pour l’instant, vous avez tout simplement besoin d’être tous les trois, et c’est bien suffisant.
Wyatt ne met pas longtemps à s’endormir, la tête blottit contre toi, le bras autour de ton ventre et tu caresses ses cheveux, te perdant dans la simplicité du moment. Tu restes là à le regarder dormir pendant une heure, peut-être deux, avant que ce ne soit ton corps qui te rappelle que tu ne peux pas vraiment te permettre de rester immobile aussi longtemps, de un par les coups de poings que votre fils s’entête à te donner dans la vessie, mais aussi parce que tu commences à avoir faim et tu sais que si tu ne manges pas rapidement, ton diabète va faire des siennes et ça, ça peut venir jouer avec ta tension. Aussi délicatement que possible vu la position dans laquelle tu te retrouves, tu parviens à te défaire de l’étreinte de Wyatt et à t’extirper du lit sans le réveiller. Tu refermes la porte de sa chambre en douceur alors que tu inspectes la cuisine. Sans grande surprise, Wyatt se contente éternellement de n’avoir que le strict nécessaire, c’est-à-dire pas grand-chose à manger dans son garde-manger, ni dans son frigo. Tu prends la décision de te rendre à l’épicerie du coin et ramasses quelques trucs vite fait pour te cuisiner des pâtes avec cette sauce dont Wyatt raffolait quand vous étiez encore ensemble. Tu en fais assez pour qu’il en reste pour lui à son réveil et quand tu réalises qu’il est encore profondément assoupi après avoir mangé, tu te lances dans un ménage de la cuisine, ne serait-ce que pour t’occuper les mains et l’esprit après tout ce qui s’est passé. Tu fais disparaître les bouteilles de bières et les multiples mégots de cigarettes et de joints dans le cendrier, t’occupes de laver et d’essuyer les nombreuses tasses tâchées de café qui s’empilent dans l’évier et quand tu manques de trucs à faire, tu te mets à fouiner dans la grande bibliothèque dans le salon, redécouvrant avec un sourire les différents ouvrages qui s’y trouvent. |
| | | | (#)Mar 2 Nov 2021 - 1:24 | |
| « Moi je suis contente que ce soit arrivée. » Un long soupir m’échappe sans que je ne puisse le contrôler. Forcément, elle avait su trouver son compte dans mon oubli, se fichant bien de l’aspect privé de tout ce qu’elle avait bien pu lire. « T’avais besoin que quelqu’un sache tout ça et moi, j’avais besoin de le comprendre pour pouvoir t’aider. » Je voudrais pouvoir approuver ses propos, mais tout ce que je retiens, c’est qu’elle possède désormais toutes les armes pour mieux me désarçonner. Dans ce carnet, j’avais couché bien des choses dont personne n’avait connaissance. Rien ne prédestinait à ce qu’un jour mes mots soient lu par quelqu’un, encore moins par Rosalie.
Elle avait eu accès à la moindre de mes pensées, mais bien plus encore. Les doutes que je n’ai jamais su exprimer, les traumatismes qui restaient tapis dans l’ombre depuis bien des années. Par les nombreux rebondissements vécus au travers de notre relation, je pensais m’être construit une armure suffisante pour ne plus jamais flancher. Je me pensais invincible, forger par les épreuves que nous avions rencontrées. Jusqu’à ce que Rosalie m’annonce sa grossesse et que tout soit alors remis en question. La vie d’un petit être nous unissant est venue se mettre entre nous, chamboulant absolument tout sur son passage et venant gratter sur des cicatrices enfouies bien trop profondément. Le contact de sa main sur ma joue se veut oppressant lorsqu’elle insiste avec force pour que mon regard croise le sien. Jamais je n’avais su lire autant de certitude dans le fond de ses yeux tandis que ses doigts cherchent à s’ancrer sur ma peau comme le rappel constant de sa présence qu’importent les mots que je balance maladroitement. « C’est pas vrai ça. Ce n’est plus le cas. » Mon esprit ne se concentre que sur l’emploi du temps, sur l’hésitation qui rappelle que durant un temps elle voulait bien plus que ce que notre relation pouvait lui apporter. Je reste persuadé que rien n’a réellement changer quand bien même ma vie semble plus stable, que j’essaye de vivre de mon art et que les jeux dangereux m’attirent bien moins. « Tu ne penses pas que si je voulais encore de cette autre vie, j’y serais retournée depuis le temps ? » Elle marque un point. Juste assez pour me faire relever les yeux, pour que mes pupilles s’ancrent dans les siennes à la recherche de la vérité. C’est toute mon âme qu’elle cherche à convaincre tandis que son corps se rapproche du mien et que ses doigts ne cessent de caresser ma joue. « J’ai envie de te croire. » que j’avoue alors si faiblement perdu dans la bataille que livre mon esprit entre la peur irrationnelle de la voir partir et cette raison qui souligne par cent fois la véracité de ses propos. Elle est là, elle ne crie pas. Les tensions sont bien loin quand elle me pousse à étaler toute cette vérité que je lui cache depuis des mois. De toutes ses forces, elle me demande de m’accrocher à elle sans jamais dériver. « T’es pas mon second choix, ni mon choix par défaut Wyatt. » J’ai le cœur qui se met à battre la chamade alors que sa vérité s’étale sous mes yeux. Les mois se sont enchaînés sans que jamais elle ne s’éloigne, sans qu’elle ne m’inonde de reproche, sans que l’on ne cherche à volontairement se faire du mal. J’ai beau cherché, rien ne me vient, tant tout semblait avoir coulé dans une évidence qui ne nous ressemble pas. Il m’était paru évident d’être toujours présent, on avait su célébrer la révélation du sexe de notre bébé, et même si parfois, on se chamaille sur le prénom idéal, les disputes semblent dater d’un autre temps. Tout sonne différent, vu sous cet angle.
Les vannes se sont ouvertes et les paroles se déversent dans un sens qui n’a guère de cohérence. Les mots pleuvent les uns à la suite des autres pour évoquer une enfance marquée au fer rouge par l’absence d’un père, par une mère fugueuse et des enfants ballotés dans tous les sens. Des vérités jamais évoquées au fil des années préférant s’enfouir dans des blessures jamais refermées. « Tu m’as jamais vraiment parlé de ton enfance, ni de ton père… » Les informations, elle n’avait pu les pêcher qu’auprès d’Ariane qui ne se souvenait de rien, si ce n’est ce qu’elle m’avait entendu dire parfois. Elle s’était forgé une opinion biaisée par mes propos la gamine et à deux, on n’avait eu de cesse de se rassurer sur l’évolution de notre famille. « Tu prendrais peur. » que je souffle dans un rire qui n’a de statut que le nom. Il est presque plus évident de lui avouer ce qui me terrorise aujourd’hui, ce qui me cloue sur place avec l’envie de baisser les bras. « Jamais Wyatt. » À nouveau, sa conviction résonne dans toute la pièce tandis qu’elle me refuse le moindre mouvement. Je voudrais lui échapper, mais elle me tient en place avec force, forçant mon regard à croiser le sien avant que ses lèvres n’agissent comme un baume de douceur. « J’peux pas te promettre qu’on se disputera pas pour un oui ou pour un non, mais je ferais jamais ça. » Mon souffle se raccroche au sien alors qu’il me faut presque loucher pour la regarder tant, son nez est collé aux miens, nos lèvres à quelques centimètres, prêtent à se rencontrer. « Peu importe ce que je dois faire pour que tu finisses par me croire, je vais le faire. » Les mots me manquent tant l’assurance de ses paroles m’ébranle. Jamais je ne l’avais vu ainsi, aussi sûre d’elle, aussi convaincue de la faisabilité d’un nous que l’on ne savait maîtriser. « J’essaye. » que je souffle malgré tout avant de lui demander de rester. Sa présence agira comme un pansement le temps que mes idées se placent, le temps que la fatigue l’emporte. Mon corps est à bout quand mes yeux papillonnent et que je viens chercher un peu de chaleur contre ses seins. « Alors je reste. » C’est bien tout ce que j’avais besoin d’entendre avant de sombrer, le cerveau court-circuiter pour m’accorder un brin de répit.
J’ai dormi d’un sommeil sans rêve, de ceux assez lourd pour rendre le réveil incroyablement difficile. Il me faut quelques minutes pour me rappeler où je suis, quelques secondes encore pour réaliser que Rosalie n’est plus à mes côtés. Je me tourne avec force avant d’entendre le bruit distinct d’une page que l’on tourne et d’un récit étouffer par la porte fermée. Je souffle juste un instant alors que mon corps tout entier semble douloureux comme si j’avais dormi sur un sol en béton ou que j’avais exorcisé bien des démons. La conversation me revient en mémoire, la force de ses mots, son regard ancré dans le mien. J’ai besoin de la retrouver.
En silence, je me lève pour rejoindre le couloir et avoir une vue d’ensemble sur le salon. Rosalie est installée dans un fauteuil, un de mes livres dans une main, l’autre lentement posé sur l’arrondi de son ventre. Elle chuchote à notre fils qui semble lui répondre par les coups qu’il lui donne. Je l’entends se moquer de mes goûts bien trop prononcer pour les vieilles éditions de la littérature française qu’elle ne saura jamais lire. Elle lui dit tout et n’importe quoi et je l’observe sans rien dire, rassurer à l’idée même qu’elle soit restée. La tempête semble s’être apaisée quand sous mes yeux s’étale un futur qui pourrait nous ressembler. Un apaisement que je me refusais de connaître, mais qui se tisse entre nous sans jamais être forcé. Un soupir me trahit quand son regard se relève bien trop rapidement dans ma direction, prise la main dans le sac. Un sourire se dessine sur mon visage encore bien fatigué tandis que je m’approche pour la rejoindre. Jamais je n’hésite lorsque mes mains viennent se poser sur les appuis-bras du fauteuil pour mieux entourer son corps. Nos regards se croisent, nos nez se frôlent avant que je ne l’embrasse avec douceur dans une familiarité un brin déconcertante. Un merci silencieux que je ne laisse durer alors que sans un mot, j’attrape un livre dans la bibliothèque pour venir m’installer à même le sol contre sa jambe.
Les minutes défilent sans qu’aucune phrase ne soit échangée. Je prétends m’intéresser à l’ouvrage quand le simple fait de sa présence m’aide pour me recentrer, faisant taire la tempête et dégageant un sentiment de planitude bien différent. C’est un léger gémissement de sa part qui me fait relever la tête. Juste à ma hauteur son ventre se déforme assez pour me faire comprendre que notre fils lui massacre les côtés. « Puisqu’il est actif. » Je me lève pour aller chercher ce fichu carnet qui ne sert plus à rien de cacher. Je l’ouvre à la première page et viens presque coller mon visage au ventre de Rosie. « Il faut que tu nous aides bonhomme. » Les conversations sérieuses reprendront après, j’ai besoin de cette pause dans une bulle qui se veut notre. « Qu’est-ce que tu penses de Raphaël ? » J’attends, mais aucune réaction. « Désolé maman, mais celui-là, c’est non. » Je barre lentement le prénom qu’elle semblait tant aimée depuis un moment désormais. « Et Oscar ? » Celui-là avait fait débat, je n’aime pas, mais Rosalie semblait appréciée et j’avais fini par céder. Mais bébé ne réagit toujours pas. « Bon… » Je commence à désespérer à mesure que la liste se réduit que notre garçon semble avoir décidé de reprendre sa sieste. « Gabriel ? » |
| | | | (#)Mar 2 Nov 2021 - 9:36 | |
| Tu es la première surprise par l’aisance et l’assurance des mots que tu lui offres en réponse à ses peurs et ses doutes, tentant de lui faire comprendre que tu n’as pas l’intention de partir, que tu n’as plus l’intention de fuir. C’est peut-être d’avoir pu découvrir cet aspect plus vulnérable de lui qui te donne enfin la confiance et le courage de dire toutes ces choses que tu gardais pour toi depuis bien longtemps. Tu as l’impression que le monde autour de vous se décale encore un peu pour faire réellement place à une réalité dont tu n’avais pas encore saisi l’ampleur jusqu’à maintenant. Cette nuit-là, il y a une semaine de ça, vous vous étiez retrouvés physiquement, mais pas seulement. Il avait été question de cédé à pulsions quand pourtant, chaque baiser et chaque caresse cachait, comme toujours, une signification bien plus lourde de sens. Et ça ne te fait pas peur, dans l’immédiat, alors que tes doigts retrouvent la chaleur de sa peau et que tu t’efforces de chasser un à un les démons qui le bouffent de l’intérieur. « J’ai envie de te croire. » Et si avant, tu aurais insisté pour qu’il le fasse plus vite, t’insultant du fait que ce n’était pas déjà le cas dès l’instant où tu le voulais, tu comprends maintenant que c’est un travail qui prend du temps, que les blessures et les erreurs du passé restent, mais que ça ne vous condamne pas nécessairement pour autant. Plus maintenant quand il est bien clair que vos vies seront toujours étroitement liées, autant par votre fils que par ses sentiments que vous n’osez toujours pas nommer mais qui vous englobent, dans le moment présent et depuis bien longtemps.
Plus Wyatt s’ose à s’ouvrir à toi, plus tu comprends que ses peurs et ses doutes sur toi ne sont en partie que les reflets de blessures qui ne te concernent pas. Tu ne connais pas grand-chose du père de Wyatt. L’homme répond aux abonnés absents depuis tellement longtemps qu’il a toujours été compris qu’il s’agissait là d’un sujet hors-limite. Ariane a déjà glissé quelques commentaires ici et là, sur ce qui s’est passé alors que Yelahiah n’était encore qu’un bambin, une séparation claire entre les aînés et le benjamin, mais tu ne connais aucun détail. Tu réalises que Wyatt porte toujours des blessures qui se voit prendre de plus en plus de place maintenant qu’il s’apprête à être père à son tour et tu ne sais pas vraiment comment les chasser, ces démons-là. « Tu prendrais peur. » Ça te tort le cœur, de t’imaginer un petit Wyatt subir les actions de ses parents sans jamais avoir son mot à dire sur les décisions prises pour lui. « T’es pas ton père. » que tu souffles. Il n’est pas son père et toi, tu n’as pas l’intention d’agir comme ce dernier non plus. Tu as fait l’erreur de le perdre une fois, de le repousser de toutes tes forces en usant des plus grandes horreurs, tu n’avais pas l’intention de commettre encore de tels impairs, surtout pas alors que tu ne croyais pas voir le jour où il te permettrait de reprendre cette place particulière à ses côtés. Pourtant, c’est d’une évidence que tu ne questionnes même pas que tu la reprends cette place, comme si tu ne l’avais jamais quitté, alors que tu lui promets de faire tout ce qui est possible pour qu’il parvienne à avoir confiance à nouveau, en lui-même et en toi aussi. « J’essaye. » « Je sais. » que tu souffles à nouveau alors qu’il se rapproche un peu plus de toi, que tes doigts glissent de sa joue jusqu’à ses cheveux, se perdent dans les boucles alors que sans un mot, tu l’incites à trouver enfin un sommeil que tu espères paisible et réparateur. Il en a bien besoin.
Assise dans un fauteuil, livre dans les mains, tu ne cesses de flatter ton ventre, suivant avec amusement les différents endroits où ton garçon s’amuse à faire des pirouettes. Tu continues de lire quelques lignes d’un ouvrage de vieux français dont tu ne comprends pas tous les mots que tu prononces avec un accent qui écorche sans doute tout ce que tu dis. « Promis, ça sonnera mieux quand ce sera papa qui va le lire. » que tu souffles alors qu’il continue ses prouesses, t’arrachant quelques grimaces ainsi qu’un rire. « Et promis, on va t’acheter des livres que tu pourras apprécier avant tes vingt ans. » Ce serait bien un sacrilège que votre fils grandisse sans un amour certain pour la littérature. « Faudra me le dire si papa dit des bêtises sur moi en français. » Un sourire s’étire à nouveau sur ton visage alors que tu les imagines à se parler dans la langue de Molière, ne serait-ce que pour te garder à part de la conversation. Tu ne te fais pas d’idées toutefois, tu les vois se liguer tous les deux contre toi dès que l’occasion se présente. Ça a quelque chose de particulièrement doux, de t’autoriser ce genre de rêveries alors que jusqu’à maintenant, tu peinais encore à voir au-delà de ta grossesse. Tu t’apprêtes à reprendre ta lecture quand tu entends un soupir qui te fait automatiquement relever le regard vers le couloir. C’est sans surprise que tu aperçois la silhouette de Wyatt qui te regarde et tu te demandes ça fait combien de temps qu’il est là, à observer la scène de loin. Il y a plusieurs choses que tu voudrais lui dire, comme le fait qu’il y a de quoi manger dans le frigo, ou que t’as nettoyé la cuisine, mais alors qu’il s’approche en silence, sans jamais briser le contact visuel entre vous deux, tu préfères accueillir sa présence en silence, ce dernier ayant toujours parlé bien plus fort entre vous deux que n’importe quel mot. Sans la moindre hésitation, il passe ses bras autour de toi et viens trouver tes lèvres dans un naturel qui a tout ce qu’il y a de plus désarçonnant. Dans un silence complet, il attrape à son tour un livre dans la bibliothèque et se pose à même le sol, juste à côté de toi.
Tes doigts se perdent dans ses boucles un moment, caressent ton ventre celui d’après et tu alternes ainsi pendant plusieurs minutes. Tu n’arrives pas vraiment à te concentrer sur ce que tu lis, repassant constamment les mêmes lignes dans ton esprit, mais ça t’importe peu. La sérénité du moment, aussi inattendue soit-elle, te fait du bien et tu as envie que ça perdure aussi longtemps que possible, malgré les nombreux coups de ninja qu’impose encore et encore votre garçon. Wyatt relève la tête alors que tu échappes un gémissement d’inconfort et son regard se perd de suite sur ton ventre qui se déforme sous les pirouettes de votre fils. « Puisqu’il est actif. » Tu fronces les sourcils alors que Wyatt s’éclipse rapidement jusqu’à l’entrée et revient avec le fameux carnet dont tu connais le contenu par cœur. « Il faut que tu nous aides bonhomme. » La bouche de Wyatt est collée sur ton ventre alors qu’il ouvre son carnet à la première page, faisant apparaître la liste des prénoms potentiels. « Qu’est-ce que tu penses de Raphaël? » Tu pouffes de rire quand tu comprends enfin ce que le Parker a en tête. Tu ne ressens aucun coup toutefois alors que vous attendez quelques secondes, toujours sans réaction de la part du bébé. « Désolé maman, mais celui-là, c’est non. » Ton cœur se serre à l’entente du mot maman que tu ne penses même pas à réagir à la manière peu orthodoxe que Wyatt a mis en place pour choisir le prénom de votre fils. « Oscar? » Tu sais qu’il n’est pas particulièrement fan de celui-là Wyatt, mais c’est un de tes coups de cœur alors tu flattes ton ventre dans l’espoir de recevoir une réaction, mais sans succès. « Bon… » « Il est aussi difficile que toi, on est mal barré. » que tu souffles avec un rire alors que tu vois la liste des prénoms sans ratures se faire de plus en plus limitée. « Gabriel? » Tu attends une seconde et puis une autre, t’apprêtes à dire à Wyatt qu’il doit s’être rendormi, lorsque tu sens un bon coup de pied dans tes côtes. « Oh. » Tu ris un peu plus alors que tu viens flatter l’endroit où tu viens de le sentir. « Ça te plaît, Gabriel? » Pour toute réponse, il frappe à nouveau et ton regard passe de ton ventre pour venir trouver celui de Wyatt. « Je pense qu’on a un gagnant. » que tu souffles, soudainement prise d’une vague d’émotions que tu ne saurais camoufler, tes yeux mouillés trahissant tout ce que tu peux bien ressentir. Tu te fais glisser hors du fauteuil pour te retrouver assise à côté de Wyatt et tu viens poser tes lèvres sur les siennes, entre deux rires teintés de bonheur autant que de nervosité. « Gabriel Parker. » Vous n’avez toujours pas statué sur le Craine, mais ça te semble bien inutile de le faire maintenant quand le nom semble prendre tout son sens de cette façon.
Tu poses ton regard à nouveau sur le carnet que Wyatt a toujours entre les doigts, te souvenant de l’ajout que tu y as fait toi-même avant de venir ici quelques heures plus tôt. Tu avais dans l’idée qu’il découvre la composition quand tu ne serais pas là, mais dans un souci de transparence, de lui rendre à ton tour toute cette vulnérabilité qu’il t’avait offert un peu plus tôt, tu changes de plan. « Après les dernières pages que tu as écrites, j’ai ajouté quelque chose… » C’est une nouvelle forme de nervosité qui t’envahit quand jamais tu n’avais montré la moindre de tes compositions à Wyatt. Sur la page où se trouve les paroles de la chanson, il pourra lire Tu as toujours été mon premier choix dans ton écriture fine avant de découvrir à son tour, un côté de toi que tu n’avais pas prévu de lui montrer. « Apparemment que Gabriel aime ça, quand je chante. » que tu murmures doucement, trouvant étrange d’utiliser ce prénom pour votre fils bien que ça fasse sens, comme tout le reste. Tu le laisses ainsi découvrir les paroles en silence, résistant à l’envie de te lever et de partir dans une autre pièce pour ne pas voir ses réactions. |
| | | | (#)Ven 5 Nov 2021 - 0:55 | |
| « T’es pas ton père. » J’admire la force avec laquelle elle souffle cette affirmation comme si la question ne pouvait être amenée au débat. On ne sait réellement ce que nos aînés nous lèguent quand ils ont été absents la plupart du temps. Nier ses convictions prendrait des heures que je n’ai pas envie de perdre quand la fatigue ne cesse de me ronger au point où mes yeux papillonnent de plus en plus vite. Rien ne semble parfaitement résolu, les angoisses sont simplement allées se tapir dans l’ombre, prêtes à resurgir au moment le moins opportun, mais dans cet instant, alors que mon corps vient se coller au sien, je me dis qu’elle avait probablement raison. Il avait fallu que je livre mon énorme sac que j’en déverse un peu à ses pieds pour ne plus sentir cette pression folle sur mon sternum. Ses doigts glissent dans mes cheveux et ma respiration s’apaise en un éclair dans la familiarité du geste, dans la douceur qui se dessine tout autour de l’attention qu’elle me porte. Le moment semble suspendu dans le temps, comme si l’on trouvait enfin le courage de s’enfermer à nouveau dans cette bulle qui n’a toujours appartenu qu’à nous.
L’apaisement semble se prolonger bien après les songes tandis que je me faufile dans le couloir pour mieux observer Rosalie. Je ne saurais reconnaître ce doux sourire qui étire les traits de son visage alors que ses doigts courts sur les courbes de son ventre, chuchotant mille choses à notre fils. Sous mes yeux, elle s’épanouit à lui lire, maladroitement, des mots en français. Pour la première fois, je m’autorise à laisser mon esprit vagabonder vers l’image du futur qui se présente à nous. L’image de Rosalie avec notre garçon entre les bras me provoque un frisson que je n’aurais interprété. Celui qui vend ma présence bien trop rapprocher et qui amuse la brune. Ne voulant briser l’instant, préférant le silence qui a bien souvent toujours été plus confortable entre nous, je m’installe sans un bruit à prétendre de lire pour la millième fois la même page.
Le moment s’imprègne d’un sentiment doux, heureux de sérénité que l’on ne se connaissait plus. À nouveau, ses doigts jouent entre mes boucles tandis que s’improvise une discussion importante avec le bébé qui joue aux cabrioles sous son nombril. Je m’amuse de la situation quand il apparaît certain que je cherche à clore un débat devenu beaucoup trop long en utilisant des moyens qui peuvent s’avérer douteux. « Il est aussi difficile que toi, on est mal barré. » Un rire m’échappe tandis que notre fils à décider de ne pas réagir au prénom que sa mère semblait adorer depuis le début. « Tu voulais l’appeler Oscar aussi… » Je souffle en exagérant, levant les yeux au ciel comme un adolescent en crise. « Il te fait comprendre que tes choix sont questionnables. » Si tout est annoncé sur le ton de la plaisanterie cela change complètement de la dernière conversation que nous avions pu avoir à ce sujet. La liste était déjà incroyablement réduite et le manque de réaction de bébé ne cesse de faire disparaître les possibilités. Jusqu’à celle que j’avais souligné un bon nombre de fois et que Rosalie avait évoquer de son propre-chef. Gabriel. « Oh. » Je relève la tête si vite que je pourrais jurer avoir entendu ma nuque craquer dans le mouvement. « Il a bougé ? » Je viens coller ma main proche de celle de Rosalie. « Ça te plaît, Gabriel ? » Cette fois, je le sens avec elle, le coup franc qu’il balance avant de continuer à se tourner un peu. « Je pense qu’on a un gagnant. » Nos éclats de rire sonnent si franc quand le ventre de la future maman se déforme à nouveau dans une ultime approbation de la part de notre garçon. Mon regard vient chercher le sien et je m’étonne de voir ses prunelles soudainement si humides alors qu’elle se glisse à mes côtés sur le sol inconfortable. Nos lèvres se trouvent dans un murmure qui sonne comme le début d’une aventure grandiose. Quelque chose de nouveau qui n’efface en rien le passé, mais tente de construire une relation différente. « Gabriel Parker. » - « Gabriel, c'est parfait. » À croire qu’il aura su nous mettre d’accord dans une simplicité qui m’émerveille quelque peu. Il va bousculer nos vies, Gabriel. Lui qui est déjà responsable de tant de changement invisible.
Mon bras vient s’enrouler autour des épaules de Rosalie tandis que de ma main libre, j’entoure pour de bons, le prénom qui sera le sien. Toutes les choses notées dans ce carnet n’ont pas encore trouvé leur résolution ou leurs conclusions, mais cette première à toute son importance. « Après les dernières pages que tu as écrites, j’ai ajouté quelque chose… » Mes sourcils se froncent tandis que mes doigts s’agitent pour faire tourner les pages avec ardeur. Ce carnet que je ne souhaite relire, celui qui renfermer toutes mes peurs et qu’elle a pu décortiquer bien trop en profondeur. J’aimerais autant l’enterrer que le remercier d’avoir été abandonné sur la table de son salon. Elle avait eu accès à une part de moi qui se veut tellement différente, celle que personne connaissait jusqu’alors. Je suis terrorisé à l’idée de lui laisser autant d’accès, je voudrais lui demander d’oublier, de ne jamais en reparler, mais voilà qu’elle a su m’offrir quelque chose en retour. Quelques mots retranscrivent de son écriture si fine, laissant les mots danser entre les lignes dans ce qui ressemble en tout point au texte d’une chanson. « Apparemment, que Gabriel aime ça, quand je chante. » Je ne sais plus si le frisson est dû à l’emploi du prénom de notre garçon ou aux premiers mots que je suis en train de lire. Lentement, je découvre une description qui me ressemble étrangement entre cigarettes et hurlement, le tout présenter dans un chaos qui ne peut rencontrer que la guerre que l’on n’a jamais cesser de se mener. Tout hurle à nos ressemblances dans la manière dont on a su se briser sans jamais réellement s’abandonner. Les frissons se veulent multiplient à se graver sur ma peau dans une chair de poule qui trahit bien toutes les émotions qui défilent avec force, me prenant à la gorge, bien incapable d’aligner le moindre mot. Les siens résonnent d’une force qui m’ébranle de l’intérieur, faisant chavirer bien trop férocement le masque que j’ai toujours su enfiler à ses côtés dès qu’il s’agissait de parler de sentiment. « On… » Les mots restent coincés dans le fond de ma gorge tant rien ne semble s’aligner de manière cohérente pour donner un sens à ce qui me traverse. Le silence a toujours été bien plus aisé dans ce genre de circonstance, il m’est plus simple de resserrer l’étreinte pour laisser mes lèvres venir se poser en douceur contre sa tempe. Dans le geste se traduit bien des mots que je ne saurais exprimés, bien des sentiments qui se diffusent lentement entre nous de manière bien plus apaisée depuis l’annonce de sa grossesse. Notre histoire a pris mille tournants, a rencontrer bien des obstacles, mais nous voilà l’un contre l’autre, sans cri ni hurlement, dans la simple envie de profiter de l’instant. « Merci d’être venu. » Tout simplement. |
| | | | | | | | (craker #17) but i hope to be worth it |
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